Cesmurs, gardiens de mĂ©moire, ont la parole. AbonnĂ©s. De superbes dĂ©couvertes. Saint-Rome-de-Tarn. PubliĂ© le 19/07/2018 Ă 08:09. Ă lâimage des quelques hameaux ou corps de ferme quiOifaa. 167 223 139 123 325 146 190 183 166
action selon la belle formule dâHenry Miller. Ils nous mettent des ailes pour parcourir avec eux un bout de notre chemin dâhumanitĂ©. Car les clowns ne jouent pas la comĂ©die. Sâils ont un nez rouge ou un masque blanc et des habits extravagants, câest pour mieux se mettre Ă nu. Mime, acrobaties, musique, quelques mots Ă peine. LesBienvenue sur la fiche d'information de l'entreprise basĂ©e Ă montesquieu avantes Dans cette fiche nous vous proposons Ă©lĂ©ments suivants une liste des services & travaux proposĂ©s par l'entreprise dans les environs de montesquieu avantes les coordonnĂ©es gratuites de l'artisan / entreprise la possibilitĂ© de rentrer directement en contact par tĂ©lĂ©phone de demander un devis ou un rendez-vous et de donnez votre avis sur Les Murs ont la Parole ou de les consulter car Nos Artisans ont du Talent ! L'essentiel des travaux/produits de Les Murs ont la Parole Lâentreprise Les Murs ont la Parole basĂ©e Ă montesquieu avantes 09200 dans le dĂ©partement 09 â AriĂšge vous accompagne pour vos projets et vos travaux. Lâentreprise est spĂ©cialisĂ©e dans les domaines suivants Peinture â Tapisserie. Un projet de travaux ? Retrouvez des avis sur lâentreprise Les Murs ont la Parole sur dans les catĂ©gories Peinture â Tapisserie. NâhĂ©sitez pas Ă contacter ce peintre ou bien Ă dĂ©poser un avis sur Les Murs ont la Parole. Ajoutez des informations relatives Ă votre entreprise, Ă vos prestations et ajoutez vos photos pour mettre en avant votre savoir-faire et vous dĂ©marquer ! Ajouter du contenu Mettez dĂšs maintenant Ă jour les informations relatives Ă votre entreprise, ses coordonnĂ©es son adresse ou modifiez le numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone. En seulement quelques clics. Mettre Ă jour Un devis ? Prenez directement contact avec cet Artisan Ă montesquieu avantes Si cet Artisan Ă montesquieu avantes correspond Ă vos critĂšres, vous pouvez le contacter directement en utilisant le formulaire ci-dessous, ou par tĂ©lĂ©phone numĂ©ro direct & gratuit en prĂ©cisant que vous le contactez par Nos Artisans ont du Talent. Vous ĂȘtes professionnel du BTP ? Rejoignez le rĂ©seau Nos Artisans ont du Talent et proposer vos services avec prĂ©sentation dĂ©taillĂ©e Donnez votre avis maintenant ! Laissez votre avis Consultez les Artisans certifiĂ©s recommandĂ©s dans votre dĂ©partement Travaux de rĂ©novation comment choisir votre artisan Ă montesquieu avantes ? Qui nâa jamais eu des travaux Ă rĂ©aliser dans le but de rĂ©nover un bien ou les locaux dâune sociĂ©tĂ© ? Particuliers ou professionnels, tous doivent trouver un artisan BTP sĂ©rieux et compĂ©tent pour effectuer ces rĂ©novations dans les meilleures conditions possibles. Seulement il nâest pas toujours Ă©vident de trouver le bon professionnel. Cuisine Ă rĂ©nover, salle de bain Ă rafraĂźchir, couverture de toiture Ă remplacer⊠en fonction de vos besoins, les artisans diffĂšrent. Ainsi, pour rafraĂźchir une piĂšce, choisissez un artisan peintre spĂ©cialisĂ©. Pour la mise en place dâune piscine, prĂ©fĂ©rez lâexpert en pose de piscine. Vous lâaurez compris, il est indispensable de dĂ©finir vos besoins en amont afin de sĂ©lectionner le meilleur artisan Ă montesquieu avantes 09200. Lâimportance du devis travaux Ă montesquieu avantes et dans les environs Lorsque vous avez dĂ©cidĂ© de rĂ©nover votre habitation, il vous faudra dĂšs lors effectuer des demandes de devis auprĂšs dâartisans spĂ©cialisĂ©s Ă montesquieu avantes ou dans les environs. Les devis travaux Ă montesquieu avantes constituent une bonne approche pour Ă©valuer le montant des rĂ©novations Ă venir. Cette estimation de tarif contient diffĂ©rentes donnĂ©es notamment le prix des matĂ©riaux utilisĂ©s, le montant de la main-dâĆuvre, le dĂ©lai de rĂ©alisation des travaux⊠Gardez Ă lâesprit quâil reste indispensable dâĂ©tablir plusieurs devis dâartisans afin de les comparer et de statuer en faveur du plus avantageux. Aussi, cela vous permettra de faire jouer la concurrence et de rĂ©duire davantage les coĂ»ts de vos travaux.
SĂQUENCE7 Les murs ont la parole Motiver un jugement de gout sur une Ćuvre graphique 66 SĂQUENCE 12 « Eux, câest nous » Faire part oralement de sa rencontre avec un roman 124 SĂQUENCE 13 Un point c'est tout ! Udiddit FICHES OUTILS SOMMAIRE 131 * En raison d'accords avec les dĂ©positaires des droits de reproduction, les rĂ©fĂ©rences des documents
[Paroles de "Entre les murs" ft. Ninho][Intro Ninho]Eh, eh, ehOuh, ouh, ouh, ouh, ouhWesh, frelon, c'est comment ?LĂ , j'suis d'humeur Ă t'envoyer un roman[Couplet 1 Ninho]Wesh, frelon, c'est comment ? LĂ , j'suis d'humeur Ă t'envoyer un romanDehors, ça va pas, mĂȘme les p'tits veulent faire la bataille, igo, c'est incroyableLe terrain tourne plus comme avant non, le terrain tourne plus comme avant nonEt tous les matins, y a la daronne qui s'demande "Qu'est-c'que son fils il fait dans la vie ?"J'peux mĂȘme pas lui rĂ©pondre, donc j'Ă©vite les questions, toi-mĂȘme t'es bĂ©-tom toi-mĂȘme t'es bĂ©-tomĂa commence Ă faire long, ça commence Ă faire longJ'ai promis d'assurer, j'ai promis d'assumerJ'rĂ©cupĂšre un cent meujs, demain, j't'envoie la moitiĂ©[Pont Ninho]C'est toujours plus dur dedans que dehors, quand tu sors, on s'barre au bord de merTrois piges ferme, zĂ©ro perm', y a plus personne qui d'mande des nouvellesAh la, la, la, trois piges ferme, zĂ©ro perm'Y a plus personne qui d'mande des nouvelles[Refrain Ninho & DA Uzi]Dedans, c'est dur dedans, c'est dur et dehors, c'est dur aussi et dehors, c'est dur aussiLa sortie, c'est sĂ»r, le hesses et le mirador veulent gĂącher nos viesC'est noir c'qui s'passe entre les murs, j'ai trop vu la ue-r, le mal chante ma mĂ©lodie oh noJ'suis solo dans ma putain bulle et Ă ma sortie, j'vais leur faire un gĂ©nocide oh noDedans, c'est dur dedans, c'est dur et dehors, c'est dur aussi et dehors, c'est dur aussiLa sortie, c'est sĂ»r, le hesses et le mirador veulent gĂącher nos viesC'est noir c'qui s'passe entre les murs, j'ai trop vu la ue-r, le mal chante ma mĂ©lodie oh noJ'suis solo dans ma putain bulle et Ă ma sortie, j'vais leur faire un gĂ©nocide oh no[Couplet 2 Da Uzi]Mon reuf, moi, ça va hamdoulilah, j'ai reçu la moitiĂ© d'ton bailJ'entends les nouvelles, j'suis d'mauvaise humeur et j'm'endors Ă six heures du mat'Ma plaque a sautĂ©, j'mange la gamelle, on m'a dit qu'ma meuf s'est fait galocheY a DB qui m'envoie des lassos toujours, j'suis tranquille, Villepinte, c'est la maisonEt j'deviens paro', en vrai, tu m'oublies, j'me pose des questions On est frĂšre ou pas ?Y a beaucoup d'choses que toi t'as mĂȘme pas dit mais quand j's'rai dehors, on va rĂ©gler çaJ'parle pas trop, Ă la base, j'fais l'innocent, on croyait qu'c'Ă©tait pas lourd, j'ai pris huit ansJ'voulais l'Versace, tout en Medusa, lĂ , quand j'sors demain, j'fais des cadavres[Pont DA Uzi]Et j'fais ma peine, j'sais pas si tu m'suis, j'suis parti pour huit ans Ă cette heure-ciLe hesses, il m'parle comme John Gotti, j'me taille, il s'imagine des viesNous, on s'connait, on n'est pas novices, tu fais l'che-lou quand tu parles au phoneDans quelques annĂ©es, on s'revoit en face, on est des bonhommes, pas b'soin d'parler fort[Refrain Ninho & DA Uzi]Dedans, c'est dur dedans, c'est dur et dehors, c'est dur aussi et dehors, c'est dur aussiLa sortie, c'est sĂ»r, le hesses et le mirador veulent gĂącher nos viesC'est noir c'qui s'passe entre les murs, j'ai trop vu la ue-r, le mal chante ma mĂ©lodie oh noJ'suis solo dans ma putain bulle et Ă ma sortie, j'vais leur faire un gĂ©nocide oh noDedans, c'est dur dedans, c'est dur et dehors, c'est dur aussi et dehors, c'est dur aussiLa sortie, c'est sĂ»r, le hesses et le mirador veulent gĂącher nos viesC'est noir c'qui s'passe entre les murs, j'ai trop vu la ue-r, le mal chante ma mĂ©lodie oh noJ'suis solo dans ma putain bulle et Ă ma sortie, j'vais leur faire un gĂ©nocide oh no Certainesinscriptions retranscrises dans le livre sont amusantes. CelĂ plaira trĂšs certainement aux soixante-huitards attardĂ©s et aux bobos Voir tous les avis CaractĂ©ristiques Auteur Julien% p igm ââą *a» y yi fcn T, - .- ßÊ* 5 ** Li^ ,"*Ăą LâARCHITECTURE -i tJMiĂĂkiĂ© / LâARCHITECTURE DE VITRUVE, TRADUITE EN FRANĂOIS, AVEC DES REMARQUES. MEMBRE DE LâORDRE ĂQUESTRE ET DES ĂTATS DE LA PROVINCE DE NAMUR. G 7 , y.'' stGrtjJ A BRUXELLES, CHEZ ADOLPHE STAPLEAUX , LIBRAIRE, IMPRIMEUR DE S. M. LE ROI DES PAYS-BAS ET DE S. A. R. LE PRINCE DâORANGE, MARCHĂ AUX HERBES, H. a86. WWW WM 1816. J i / -maez DU TRADUCTEUR. armi les arts que les anciens nous ont transmis , et dans lesquels ils ont Ă©tĂ© nos maĂźtres , on distingue sur-tout lâarchitecture. Son origine se perd dans la nuit du temps. DĂšs les siĂšcles les plus reculĂ©s , elle avoit atteint une grande perfection. Lefr Ăgyptiens avoient trouvĂ© le beau, le sublime, le grandiose, lorsquâils construisirent les temples de ThĂšbes du temps de SĂ©sostris , dont on fixe le rĂšgne plus de trois siĂšcles avant la guerre de Troie. Comme les autres arts , ils consacrĂšrent celui-ci Ă leur religion ; ils sembloient ne les cultiver que pour elle , c etoit pour lâhonorer quâils cherchoient la perfection. Les anciens monumens qui sây sont conservĂ©s nâoffrent, pour ainsi dire , encore aujourdâhui , que des temples , des statues de leurs dieux et des tombeaux. Les colonies Ă©gyptiennes, que CĂ©crops et Inacus introduisirent dans la GrĂšce , y rĂ©pandirent leur mythologie et les beaux-arts. Les Grecs, comme les Egyptiens, les employĂšrent dâabord pour le culte des dieux , et se livrĂšrent ensuite Ă leur goĂ»t, avec toute lâardeur qu'inspirent le gĂ©nie et la gloire. Leurs succĂšs furent rapides * quelquefois mĂȘme ils passĂšrent les limites des rĂšgles que leur enseignĂšrent les Egyptiens , et sur-tout pour lâarchitecture mais ces Ă©carts de lâimagination ne servirent quâĂ les Ă©clairer , Ă leur faire mieux connoĂźtre les excellens principes de leurs maĂźtres ils y revinrent, et on vit sortir de leurs mains des ouvrages , moins colos- sals Ă la vĂ©ritĂ© , mais tout aussi admirables que ceux qui dĂ©coroient les villes brillantes de ThĂšbes et de Memphis. Comme ils reprĂ©sentoient leurs dieux sous des formes humaines, lâart chez eux eut dâabord lâhomme pour objet. Dans la formation de leurs statues , ils cherchĂšrent ce quâil y avoit de plus beau dans la nature et a vj âą. 2 ' "' H r II Ă Ăź A C E parmi tous les individus qui la composent, ils choisirent ce quâil y avoit de mieux. Des diverses beautĂ©s quâils y trouvĂšrent dissĂ©minĂ©es , ils formĂšrent, en les rĂ©unis- sant, ce beau idĂ©al qui nâexiste pas dans la nature, et qui est bien plus parfait quelle. On Ă©tablit des rĂ©gies dâaprĂšs lesquelles on connut ce qui formoit lâessence de la beautĂ©, et lâon trouva que le rapport des proportions y contribuoit le plus. Ces rapports une fois trouvĂ©s pour former de belles statues, on appliqua les mĂȘmes principes pour perfectionner l'art de bĂątir. Aussi , comme le remarque Vitruve , toutes les proportions de lâarchitecture ont Ă©tĂ© prisĂ©s sur celĂźesdu corps humain. Les Grecs ayant formĂ© , pour reprĂ©senter leurs dieux, des statues dâune beautĂ© parfaite, ils construisirent des temples pour les y placer , dâaprĂšs les mĂȘmes principes. Le beau siĂšcle de PĂ©ri clĂ©s vit fleurir Ă la fois tous les arts dans la GrĂšce. LâĂ©loquence, la poĂ©sie , la peinture et la sculpture produisirent des chefs-dâĆuvre. On vit sâĂ©lever dans le mĂȘme temps des temples magnifiques et autres Ă©difices dont on ne se lasse pas dâadmirer les proportions. Les Grecs revinrent aux excellens principes quâils tenoient des Ăgyptiens. Parmi les dĂ©corations capricieuses qui caractĂ©risent les ornemens de la colonne Ă©gyptienne, ils choisirent les trois genres qui leur plurent davantage pour former les trois ordres de leur architecture. Ils continuĂšrent par la suite Ă cultiver cet art, en sâĂ©cartant un peu cependant des bons principes quâils avoient Ă©tablis. Les Romains Ă leur tour les puisĂšrent chez les Grecs, Ă qui ils dĂ©voient Ă©galement la connoissance des autres arts et des belles-lettres. Souvenez-vous, Ă©erivoit CicĂ©ron » Ă Quintius, que vous commandez Ă des Grecs qui ont civilisĂ© tous les peuples, en » leur enseignant la douceur et lâhumanitĂ©, et Ă qui Rome doit les lumiĂšres qu elle .» possĂšde. » Lorsque les Romains cultivĂšrent lâarchitecture, les rĂšgles de cet art Ă©toient Ă©tablis depuis long temps. On avoit fixĂ© ses proportions qui Ă©toient le rĂ©sultat dâune infinitĂ© de combinaisons , et des pensĂ©es sublimes dont Ă©toient remplis ceux qui avoient cuL- tivĂ© les arts dans les siĂšcles oĂč ils furent les plus llorissans. Les architectes romains ne sâĂ©cartĂšrent pas de ces rĂšgles. Câest dâaprĂšs les proportions quâelles Ă©tablissoient, quâils construisirent tous les Ă©difices de Rome 5 il Ă©loit D U T R A D U C * T E U R. VI aisĂ© de les suivre et dâen faire lâapplication, puisquâelles sont toutes trĂšs-prĂ©cisĂ©es. Tout est mesurĂ©, tout est dĂ©terminĂ© dans l'architecture. Il nâen est pas de mĂȘme des belles-lettres, ni des autres arts que les Romains tenoient aussi des Grecs.'Tant de choses rĂ©unies doivent contribuer Ă la beautĂ© dans les ouvrages de poĂ©sie et dâĂ©loquence ! Lâinvention du sujet, sa sage disposition, la beautĂ© des pensĂ©es, la vĂ©ritĂ© des images, le choix des expressions, etc. De mĂȘme, dans la peinture, soeur de la poĂ©sie, la correction du dessin, la beautĂ© des formes, le choix des attitudes, la disposition convenable de lâouvrage, le parti que le peintre sait tirer dĂ» clair obscur, le coloris, etc. Il existe bien des rĂšgles gĂ©nĂ©rales, mais leur application au sujet quâon traite est entiĂšrement dans le'gĂ©nie du poĂšte, de lâorateur et de lâartiste. Pour bien connoĂźtre ces rĂšgles et pour en faire la juste application , il faut avoir une partie du gĂ©nie des grands hommes qui les ont Ă©tablies. Il falloit ĂȘtre Virgile pour imiter HomĂšre,, et CicĂ©ron pour imiter DĂ©mosthĂšne. INous ne voyons nulle part quâaucun peintre ou sculpteur romain ait atteint la perfection dans lâart dâApelle , de de PraxitĂšle, Dans lâarchitecture, au contraire, tout est dĂ©terminĂ©, tout est fixĂ© par des rĂšgles prĂ©cises et immuables. DĂšs quâon eut trouvĂ© les belles proportions qui constituent son essence et font sa plus grande beautĂ©, on en forma des principes qui sont Ă la portĂ©e de tout le monde ; il suffit de les connoĂźtre et de ne pas s'en Ă©carter. ^ous avons retrouvĂ© ses belles proportions dans les ruines de la GrĂšce et de lâancienne Rome dont la plupart des Ă©difices Ă©toient lâouvrage dâarchitectes grecs, que les Romains , vainqueurs des hĂ©ritiers dâAlexandre , avoient emmenĂ©s avec eux pour les employer Ă embellir leur capitale. * Auguste et MĂ©cĂšne , ces grands protecteurs des beaux-arts , firent de Rome une nouvelle AthĂšnes. * Il y a v oft dĂ©jĂ long-temps, comme nous le verrons dans nos remarques sur Yitruvc , que les Ătrusques avoient fait connoĂźtre lâarchitecture en Italie. Les Grecs mĂȘme ont employĂ© des architectes romains , comme nous lâapprend Yitruve dans lâintroduction du septiĂšme livre. PRĂFACE Vlij Les successeurs dâAuguste marchĂšrent quelquefois sur ses traces , et continuĂšrent Ă Ă©lever des Ă©difices construits dâaprĂšs les principes quâils tenoient des Grecs. En vain le temps a exercĂ© sa faux contre leurs ruines, beaucoup se sont conservĂ©es jusqu a nous. Ces prĂ©cieux restes suflisoient, peut-ĂȘtre , pour nous faire retrouver parmi eux les rĂšgles de lâart de bĂątir mais nous avons Ă©tĂ© bien plus heureux, puisque lâarchitecte dâAuguste a laissĂ© un traitĂ© complet de son art, et ce traitĂ© est venu jusquâĂ nous. Cet ouvrage n Ă©toit pas .le seul qui existĂąt alors sur l'architecture. Plusieurs auteurs grecs et latins avoient Ă©crit sur ce sujet. Vitruve les nomme dans la prĂ©face du septiĂšme livre. DâaprĂšs ce quâil dit, aucun d'eux nâavoit Ă©crit un traitĂ© complet de cet art ; chacun sâĂ©toit occupĂ© dâun objet en particulier lâun avoit Ă©crit sur lâordre dorique , un autre sur lâordre toscan , dâautres sur la construction des temples , etc. Tous leurs ouvrages sont perdus. Le traitĂ© de Vitruve est le seul qui nous soit restĂ© , et il peut en quelque sorte nous consoler de la perle de tous les autres , puisque , comme il le dit, il a rĂ©uni dans son ouvrage les principes qui sont Ă©pars dans les autres auteurs. Il paroĂźt mĂȘme que, lorsque son traitĂ© parut , il fit oublier tous les autres. Les anciens le regardoient en effet comme le meilleur et le plus complet de tous. On voit combien il Ă©toit estimĂ© avant mĂȘme que le temps nâeĂ»t mis le sceau Ă son mĂ©rite , puisque Pline le cite spĂ©cialement dans les XVI. e , XXXV. e et XXXVI. e livres de son histoire , ainsi que dans une infinitĂ© dâautres endroits. En un mot, lorsquâil parle de lâarchitecture , il ne cite jamais dâautre auteur que Vitruve , et rapporte toujours ses propres paroles. Ce qui prouve combien il Ă©toit estimĂ© , mĂȘme dans les siĂšcles les plus barbares ^ câest le grand nombre de manuscrits de son ouvrage qui ont Ă©chappĂ© aux ravages du temps et des hommes. On les conserve dans les plus cĂ©lĂšbres bibliothĂšques , entrâautres Ă Rome dans celle du Vatican oĂč lâon en trouve deux ; dans celle du prince de Corcini, etc. J ai donnĂ© une liste des diffĂ©rentes Ă©ditions de lâouvrage de Vitruve et des traductions qui en ont Ă©tĂ© faites dans toutes les langues de l Europe , depuis la renaissance des arts et 1 invention de 1 imprimerie. MalgrĂ© leur nombre , elles sont entiĂšrement DU TRADUCTEUR. ĂX Ă©puisĂ©es, et ce nest quâavec la plus grande peine quâun artiste ou un amateur parvient Ă sâen procurer un exemplaire. On a lieu de sâĂ©tonner que personne nâait pensĂ© jusquâĂ prĂ©sent Ă donner au public une nouvelle Ă©dition du de lâantiquitĂ© qui traite dâune science que nous devons entiĂšrement aux anciens , que nous avons apprise dâeux , et dans laquelle nous ne pouvons rĂ©ussir qu'en les imitant, qu'en marchant sur leurs traces. Depuis lâĂ©poque oĂč lâon a vu renaĂźtre en France le goĂ»t des lettres et des arts , on sâest empressĂ© de publier de nouvelles Ă©ditions des auteurs grecs et latins. Les poĂštes , les orateurs, les historiens ont Ă©tĂ© traduits , commentĂ©s plusieurs fois, et le sont encore tous les jours.» Mais ce quâils ont Ă©crit sur les sciences et les arts ne nous est pas aussi connu ; peu dâouvrages de ce genre sont parvenus jusquâĂ nous. Il existe cependant une belle tracluclionâdes ouvrages de Pline, * quâon peut regarder comme lâencyclopĂ©die des anciens; câest en effet le recueil de toutes leurs con- noissances, tant dans les sciences que dans les arts. Nous avons aussi une traduction de Strabon, une de Frontin et de YĂ©gĂšce. Mais les lumiĂšres que nous avons acquises depuis tant de siĂšcles, nous ont rendus bien plus habiles que les anciens. Ce quâils ont Ă©crit sur ces matiĂšres ne peut guĂšre servir quâĂ contenter notre curiositĂ© , en nous faisant voir jusquâĂ quel point ils avoient portĂ© les sciences. âą Il nâen est pas de mĂȘme de lâarchitecture cet art, comme nous lavons dit, nous est venu des anciens dans toute sa puretĂ©, dans sa derniĂšre perfection; câest en vain que nous prĂ©tendrions les surpasser en nous Ă©cartant de leurs principes nous devons les suivre, nous devons imiter leurs ouvrages sous peine de choquer le bon sens et le goĂ»t. En reconnoissant cette vĂ©ritĂ© incontestable, nâest-il donc pas bien Ă©tonnant que le seul traitĂ© dâarchitecture que les anciens nous ont laissĂ©, soit presquâoubliĂ© parmi nous ? La traduction françoise de Perrault a Ă©tĂ© imprimĂ©e la derniĂšre fois en 1684. Depuis ce temps, il nâa plus paru en France aucune Ă©dition de Vitruve ; et cependant le goĂ»t des beaux-arts, et sur-tout de lâarchitecture, a toujours augmentĂ© depuis * Cette traduction est de M. Poinsinet de Siyry ; elle est imprimĂ©e en 18 vol. in-4. 0 X PRĂFACE celte Ă©poque. Des gens capables de perfectionner la traduction de Perrault ne man- quoient pas en France, neanmoins personne ne l'a fait ce qui est dâautant plus Ă regretter, que notre langue est actuellement plus rĂ©pandue que jamais; par consĂ©quent ce seroit dans cet idiome, que les gens instruits de toutes les nations con- noissent, quâil conviendrait dâavoir une traduction de Yilruve. Je crois donc que cette nouvelle Ă©dition sera accueillie favorablement du public; lâutilitĂ© de mon travail sera aisĂ©ment reconnue par tous les amateurs des beaux-arts, et sur-tout par les artistes, pour qui principalement je lâai entrepris car je suis persuadĂ© que le traitĂ© de Yitruve est encore actuellement le meilleur et le plus complet que nous ayons sur lâarchitecture. Les changemens arrivĂ©s depuis lui dans nos moeurs et nos usages, ont rendu, jâen conviens, quelques passages un peu difficiles Ă comprendre pour le grand nombre; mais avec lâaide dâune explication, je crois que les jeunes artistes tireront plus de fruit de cette lecture que de tous les â autres livres qui traitent de cette science. * Le chevalier de Chambrai Ă©crivoit en 1G80, que Yignole avoit beaucoup dâobli- » galion Ă ÂŁon traducteur qui lâavoit produit en deçà des monts, particuliĂšrement à » nos ouvriers françois qui le tiennent en une trĂšs-haute estime ; car quoiquâen effet » il en soit digne, nĂ©anmoins Ă©tant comparĂ© Ă Palladio et Scamozzi, ils ne sont pas en leur lustre , et ils les suivent mĂȘme dâassez loin. Le lecteur, continue-t-il, pourra faire » le discernement , en comparant les uns et les autres avec les originaux antiques que » je leur ai mis en tĂšte, comme le fanal et la boussole de la vraie architecture. » Comme lâobserve trĂšs-bien M. de Chambrai, Yignole, qui a Ă©tĂ© long-temps le guide des architectes françois , est trĂšs-infĂ©rieur Ă Palladio et Ă beaucoup dâautres auteurs Italiens qui ont Ă©crit sur cet art. Nous devons en effet convenir que , pendant longtemps, les Italiens ont Ă©tĂ© nos maĂźtres dans cette partie, et que lâon avoit raison dâavoir recours Ă leurs lumiĂšres. Il est certain que, dans le moyen Ăąge , le goĂ»t pour lâarchitecture gothique a dominĂ© en Italie comme dans le reste de lâEurope mais le goĂ»t de 1 architecture grecque nâen avoit pas entiĂšrement disparu. Les monumens quâon avoit sans cesse sous les yeux dans cette patrie des beaux-arts en ayoient conservĂ© la D U T RADUCTEU R." * x Ăź mĂ©moire. Le babtislhĂšre de Florence, bĂąti en i335 , en est une preuve il offre un octogone dont lâintĂ©rieur est dĂ©corĂ© de colonnes corinthiennes qui portent un entablement du mĂȘme ordre qui rĂšgne tout autour. Les Grecs du moyen Ăąge nâavoient pas non plus entiĂšrement abandonnĂ© celte architecture ; la gothique avoit cependant poussĂ© quelques racines dans la GrĂšce mais les grandes proportions pour les temples chrĂ©tiens y Ă©toient encore observĂ©es , lorsque les Grecs , aprĂšs la conquĂȘte de Mahomet lĂŻ, furent obligĂ©s dâaller chercher un asile auprĂšs des MĂ©dicis. Il nây a donc rien dĂ©tonnant quâon ait eu, pendant plusieurs siĂšcles , recours aux architectes dâItalie. Mais dĂšs que les lumiĂšres eurent ramenĂ© en Europe le goĂ»t pour lâarchitecture grecque, et quelle fut venue remplacer la gothique que les siĂšcles de la barbarie y avoient introduite, on,eut de suite recours Ă Yitruve. Sous François premier, le restaurateur des belles-lettres et des beaux-arts en France , Philander , lâami du cardinal George dâĂrmagnac , qui fut le MĂ©cĂšne de son siĂšcle , donna une bonne Ă©dition de Yitruve, accompagnĂ©e de notes trĂšs-savantes. Pendant le rĂšgne de Louis XIY, qui fit renaĂźtre en France le siĂšcle dâAuguste , Claude Perrault en donna une magnifique traduction, quâil enrichit dâexcellentes notes ; elle fut imprimĂ©e aux dĂ©pens du roi avec toute la magnificence possible , et lâon y Ă©tala tout le luxe de la typographie. Depuis lors, on nâa plus fait imprimer en France aucune traduction de Yitruve , et câest ce qui me donne lieu dâespĂ©rer que celle que je publie recevra un accueil favorable. Dans un temps sur tout oĂč le goĂ»t des Ă©tudes solides reprend plus que jamais ,'celte nouvelle Ă©dition doit plaire au public , puisquâindĂ©pendamment de la science qui en fait le sujet, ce traitĂ© savant contient plusieurs autres avantages en effet, Yitruve ne traite pas seulement de son art, il parle aussi des sciences qui y ont rapport. On y trouve un traitĂ© de la musique des anciens , un autre dâastronomie , dâautant plus intĂ©ressant, que câest le plus ancien de ceux qui sont parvenus jusquâĂ nous. Lorsquâil dĂ©crit les habitations , les Ă©difices publics , il fait en mĂȘme temps la peinture exacte des mĆurs grecques et romaines , et nous apprend une infinitĂ© de particularitĂ©s concernant les sciences quâon ne trouve dans aucun autre ouvrage. Cette partie de son livre est trĂšs-intĂ©ressante , et jâai tĂąchĂ© de dĂ©velopper ses idĂ©es dans mes remarques, pour satisfaire la curiositĂ© des amateurs de lâantiquitĂ©. On peut dâailleurs regarder Yitruve comme un de nos meilleurs auteurs classiques ; PRĂFACE xi] il Ă©crivoit dans le siĂšcle dâAuguste, par consĂ©quent dans le temps ou la langue latine Ă©toit dans toute sa perfection. LâĂ©rudition profonde et variĂ©e dont son ouvrage est semĂ©, prouve quâil possĂ©doit toutes les sciences quâil dĂ©sire dans un architecte. Son style est aussi agrĂ©able quâinstructif ; lâintroduction de chaque livre est remarquable par le choix des traits historiques quâil rapporte ce sont comme autant dâĂ©pisodes qui dĂ©lassent le lecteur, et ils sont Ă©crits avec tant de goĂ»t et dâĂ©lĂ©gance, quâon peut les donner pour modĂšles aux jeunes gens qui cultivent la langue latine. Quant Ă ceux qui apprendront lâarchitecture , ils auront le double avantage d'en puiser les rĂšgles dans le meilleur traitĂ© qui existe , et dans un ouvrage digne, pour le style, du beau siĂšcle oĂč il fut Ă©crit. Quâon ne dise pas que lâĂ©tude de cette science ne doit pas faire partie de celles qui composent une bonne Ă©ducation. JusquâĂ prĂ©sent, il est vrai, on a nĂ©gligĂ© de lây faire entrer nĂ©anmoins si les artistes, tels que les peintres , les sculpteurs et les architectes , doivent la savoir par Ă©tat, il convient aussi aux personnes riches et instruites de la connoĂźtre. La plupart consacrent quelques annĂ©es de leur jeunesse Ă voyager; sâils ignorent les principes de l'architecture , ils ne pourront apprĂ©cier le mĂ©rite des Ă©difices oĂč les anciens et les modernes ont Ă©talĂ© tant dâart et de magnificence. Que de jouissances seront perdues pour eux ! D'un autre cĂŽtĂ© , sâils doivent faire construire quelques bĂątimens pour eux-mĂȘmes , ou si, placĂ©s dans quelque magistrature, ils se trouvent dans le cas dâen faire Ă©lever pour le public, ils sauront du moins faire un choix judicieux parmi les plans quâon leur prĂ©sentera, sâils commissent les rĂšgles vĂ©ritables de lâarchitecture. Dans le premier cas , ils nâemploiront pas leur argent Ă faire des choses ridicules ; et dans le second, les connoisseurs applaudiront l homme instruit qui aura fait- un usage utile et agrĂ©able des deniers publics. * Quand jâĂ©crivois ceci, mon projet Ă©toit de faire imprimer le texte latin en regard de la traduction. Diverses circonstances mâayant .empĂȘchĂ© de surveiller moi-mĂȘme lâimpression de mon ouvrage , jâai renoncĂ© Ă ce projet ; il nâen sept pas de mĂȘme si jâen donne -une seconde Ă©dition. Je suis loin de penser que ma traduction puisse remplacer le texte ; les vrais savans y auront toujours recours * ? mon unique but a Ă©tĂ© dâen faciliter lâintel- lĂŻgenc'o, JiCS Les mĆurs et les usages des Romains diffĂšrent trop des nĂŽtres? pour que nous puissions comprendre leurs ouvrages sans le secours de notes. Il est absolument nĂ©cessaire que les personnes qui, par leur savantes recherches, ont pĂ©nĂ©trĂ© dans lâantiquitĂ©, nous en facilitent l'Ă©tude. Ce secours est sur-tout indispensable pour lâintelligence de Vitruve, qui traite d'une science qui, sans cesse, a rapport aux habitudes de la vie humaine. Aussi les derniĂšres Ă©ditions sont-elles accompagnĂ©es de notes ou de commentaires. On distingue sur-tout ceux de Barbaro, de Perrault et de Galiani, qui sont aussi savans quâutiles aux artistes. Ils auroient pu donner une forme plus commode Ă leurs Ă©ditions ; les notes souvent trĂšs-longues sont rĂ©pandues dans tout le cours de lâouvrage ; il sâen trouve quelquefois trois ou quatre dans une mĂȘme ligne ; Ă chaque instant elles interrompent le lecteur qui a souvent oubliĂ© la matiĂšre du texte aprĂšs avoir lu la note. Aussi nây a-t-il guĂšre que les architectes qui les lisent prĂ©sentement. Jâai cru obvier Ă cet inconvĂ©nient en rĂ©unissant, Ă la fin de chaque chapitre , toutes les explications, et les interprĂ©tations nĂ©cessaires pour faciliter lintelligence d un ouvrage hĂ©rissĂ© de difficultĂ©s qui nâavoient pas encore Ă©tĂ© Ă©claircies jusquâĂ prĂ©sent ; par-lĂ le lecteur ne sera plus interrompu; ce sera comme un nouveau chapitre ajoutĂ© au premier. M. Ramond a adoptĂ© cette maniĂšre dans lâĂ©dition quâil a donnĂ©e des lettres de Coxe sur la Suisse. Comme lui, je nâai mis Ă cĂŽtĂ© du texte que les notes qui sont indispensables pour expliquer quelques mots, sans l intelligence desquels on ne pour- roit comprendre la suite du discours. Je les ai toujours faites les plus courtes quâil mâa Ă©tĂ© possible. Les remarques que jâai ajoutĂ©es Ă la fin des chapitres sont le fruit des recherches que j ai faites Ă Rome et dans le reste de lâItalie. Mon goĂ»t pour lâarchitecture mâat- tiroit sans cesse parmi ses anciens monumens; je les Ă©tudiois ; je compĂąrois leur proportion avec les principes que Vitruve Ă©tablit dans son ouvrage, sur-tout dans le troisiĂšme et le quatriĂšme livres , tellement que je puis dire, que câest au milieu des ruines des Ă©difices romains que jâai interprĂ©tĂ© le traitĂ© d'architecture de Vitruve. On sent que jâai souvent dĂ» avoir recours aux interprĂštes de notre auteur , entrâautres Ă la traduction enrichie de notes de Perrault, qui Ă©toit la meilleure avant que celle de Galiani parut. Câest la justice que lui rend ce traducteur italien. Perrault, dit-il b prĂ©face J xiv » » » est sans contredit le seul qui, tant pour T utilitĂ© de ses notes, jusquâĂ prĂ©sent, ait mĂ©ritĂ© une estime particuliĂšre, qui sont on ne peut mieux raisonnĂ©es, que pour la clartĂ© de sa traduction. » Cependant le traducteur italien remarque, dans une infinitĂ© de notes, que Perrault nâa pas du tout saisi le sens de lâauteur latin ; mais au lieu dâaccuser son ignorance , il ne manque jamais de supposer quâil y a faute dans les manuscrits, Galiani a cherchĂ© dans le texte le vĂ©ritable sens de ces passages, et, sans y rien changer, il est parvenu Ă le trouver. Jâai adoptĂ© toutes ces interprĂ©tations de Galiani, et comme lui, jâai rĂ©tabli le texte. Par-lĂ plus de cent passages, oĂč Perrault a fait des contre-sens, faute de les avoir compris , sont rendus dâune maniĂšre simple et naturelle dans ma traduction r sans avoir touchĂ© au texte. Je suis loin cependant dâavoir suivi en tout la traduction de Galiani; je dois convenir que son ouvrage , ainsi que celui de Perrault, mâont Ă©tĂ© trĂšsrUtiles ; je mâen suis servi comme ils se sont servis de ceux de leurs prĂ©dĂ©cesseurs mais, comme on le verra dans mes remarques , jâai bien des fois traduit autrement quâeux, parce quâils nâavoient pas eu assez souvent recours aux anciens monumens dâarchitecture. Perrault, il est vrai, avoit voyagĂ© en Italie, maĂŻs il fit sa traduction Ă Paris. Galiani, quoiquâau milieu des Ă©difices romains , a fait la sienne Ă Tsaptes, sans sortir de son cabinet. 1 Ses notes trĂšs-curieuses sont pleines dâĂ©rudition cependant tous ceux qui les liront ; verront clairement quâil a bien plus consultĂ© les bibliothĂšques que les anciens monumens d architecture. On conçoit qu un traitĂ© dâarchitecture tel que celui de Vitruve est rempli de mots techniques, la plupart tirĂ©s du grec , puisque câĂ©toit des Grecs que les Romains avoient appris cette science. Souvent mĂȘme il emploie les mots grecs ou il les cite , ce qui en rend 1 intelligence trĂšs-difficile, mĂȘme pour les savans. La plupart des traducteurs Italiens ne se sont pas donnĂ© la peine, non plus que Galiani, de les expliquer ; ils se sont contentĂ©s de travestir ces mots dans leur langue. Ils ont par exemple rendu ces expressions latines, irabes everganeĆ par trabi everganei âą celles-ci, scapi cardinales , par scapi cardinali , etc. Jâai prĂ©fĂ©rĂ© suivre lâexemple de Perrault ; tous DU TRADUCTEUR. xv les mots qui nâont pu ĂȘtre rendus par dâautres mots françois dans le texte , je les ai expliquĂ©s dans des notes qui sont au bas de la page. Jâen ai excepte' ceux dont la signification se trouve dans le texte. ° Quanta ma maniĂšre de traduire, je nâai eu en vue que la clartĂ© et la simplicitĂ©. J© nâai pas cherchĂ© Ă mettre de l'Ă©lĂ©gance dans mon style , parce quâil mâa paru quâun ouvrage de ce genre en excluoit rigoureusement lâemploi , et que la prĂ©cision Ă©toit prĂ©fĂ©rable aux ornemens. Dâailleurs ces ornemens auroient produit des inĂ©galitĂ©s et des disparates fĂącheuses pour le goĂ»t autant que pour lâoreille. DâaprĂšs ce principe ; toutes les fois quâune phrase ambitieuse sâest prĂ©sentĂ©e dans ma traduction, jâeus soin de la repousser comme dĂ©placĂ©e. Non erat hic locus. Jâaime Ă croire que tout lecteur Ă©clairĂ© approuvera ma mĂ©thode. En effet, dans un ouvrage tout didactique, la diction la plus simple et la plus intelligible doit lâemporter sur les expressions recherchĂ©es,' 1 SdihouĂš de vit* tiwe, N compte dix Ăditions latines de Yitruve, dans lesquelles on ne comprend pas les diverses rĂ©impressions ; les voici 1. ° Celle de Sulpice , imprimĂ©e vers Fan i 486 . 2 . ° Celle qui fut imprimĂ©e Ă Florence en 1496 . 5.° Une autre imprimĂ©e Ă Venise en l497* 4. 0 Celle de Joconde imprimĂ©e aussi Ă Venise en i5il. 5. ° La mĂȘme corrigĂ©e par lâauteur et rĂ©imprimĂ©e Ă Florence en i5i3. RĂ©imprimĂ©e de nouveau en 1022 , et pour la troisiĂšme fois en i523. 6 . ° Celle imprimĂ©e Ă Strasbourg en i543, et pour la seconde fois en i55o. 7. 0 Celle de Guillaume Philander , imprimĂ©e Ă Lyon en i55a ; et pour la seconde fois aussi Ă Lyon en i556. 8." Celle de Daniel Barbaro, imprimĂ©e Ă Venise^en 1567 . g* Celle de Jean de Laet, imprimĂ©e Ă Amsterdam en 164 & io.° Finalement celle de Berardo Galiani, imprimĂ©e Ă Naples en 1758 , avec une traduction italienne. Dans les six premiĂšres Ă©ditions que nous venons de citer , on nâa imprime que le texte sans aucune note. Plusieurs auteurs ont expliquĂ© Vitruve dans de savans .commentaires ; on estime sur-tout ceux de Philander , de Perrault, de CĂ©sarini , de Barbaro et de Galiani. Dâautres se sont contentĂ©s dâen expliquer quelques passages. Le Caporali nâa expliquĂ© que les cinq premiers livres. ^ĂŒxjdwc\ioviĂŽ de yĂ»fCiwLJ* Il y a, en italien, cinq traductions; savoir 1. ° Celle de CĂ©sarini , imprimĂ©e Ă CĂŽme en i5ai. 2. ° Celle de Durantino , imprimĂ©e Ă Venise , d^abord en i 5 z$ , et ensuite en i535. 3. ° Celle de Barbaro, imprimĂ©e dâabord Ă Venise en i566 , ensuite en , et pour la troisiĂšme fois en 1629. 4. 0 Celle de Caporali, imprimĂ©e Ă PeroĂŒse en i 536. 5.° Celle de Galiani, imprimĂ©e Ă Naples en 1758. En françois , il y en a deux i.° Celle de Jean Martin , imprimĂ©e pour la premiĂšre fois Ă Paris en i 547 , ensuite en 1672, et pour la troisiĂšme fois Ă Cologne en 1618. 2. 0 Celle de Claude Perrault, imprimĂ©e dâabord Ă Paris en 1673 , et ensuite en 1684. Il y en a deux en allemand t.° LâĂ©dition de D. Gualtere et H. Rivius , imprimĂ©e dâabord Ă Nuremberg en i548 , ensuite Ă Basle en 1675, et pour la troisiĂšme fois en i6i4. a. 0 Celle de Scheider, qui a paru pour la premiĂšre fois Ă la foire de Leipsick en 1808. En espagnol , âą Pendant long-temps il nây eut pas de traduction complĂšte de Vitruve. On avoit cependant, en celle langue, le recueil de D. Didac Sagreda , intitulĂ© Medidas del Romano o Vitruvio , imprimĂ© Ă Madrid, en i 542 , Ă TolĂšde dâabord en i54q , et ensuite en i564. Ce fut en 1787, que D. Joseph Ortitz et Sanlz en firent imprimer , pour la premiĂšre fois Ă Madrid, une traduction complĂšte. Robert Castel avoit promis une traduction angloise de Vitruve , comme on le voit dans le journal des savans de Leipsick, annĂ©e 1737; jâignore si elle a jamais paru. Henri Votton , qui a Ă©crit un traitĂ© dâarchitecture en anglois, cite souvent notre auteur. TABLE DES CHAPITRES. ' -g > - LIVRE PREMIER. / Pages. N T RO D U C T I O N ... 1 Chapitre I. De Varchitecture en gĂ©nĂ©ral , et des qualitĂ©s d'un architecte. . . 5 Chap. II. En quoi consiste lâarchitecture .. il Chap. III Des parties de Varchitecture qui concernent la distribution des Ă©difices publics et particuliers . .29 Chap. IV. De quelle maniĂšre on peut choisir un local sain .5i Chap V. Des fondemens , des murs et des tours .3j7 Chap. VI. De la distribution et de la situation des bdtimens qui se trouvent dans lâintĂ©rieur des villes . 42 Chap. VII. OĂč lâon doit placer les Ă©difices, publics. . 4g LIVRE SECOND. Introduction . 5i Chap. I. Origine des Ă©difices ... 53 Chap. II. Des principes de toutes choses, dâaprĂšs le sentiment des philosophes. ..... 56 Chap. III. Des briques .. . . . 5 q Chap. IV. Des diffĂšrens sables. . . 6 a Chap. V. De la chaux. . 62 Chap. VI. De la pouzzolane. .. 66 Chap. VII. Des carriĂšres dâoĂč lâon tire la pierre. 69 Chap. VIII. Des diffĂ©rentes espĂšces de maçonneries. . . Chap, IX. Des bois propres Ă bĂątir. . .82 Chap. X. Des diffĂ©rentes espĂšces de sapins qui se trouvent des deux cĂŽtĂ©s de T Apennin. . 91 XX table Pages. livre troisiĂšme. INTRODUCTION . .. ° Chap. I. De la construction et des proportions des temples .. 9^ Chap. II. Des cinq espĂšces de temples .. .. . 107 Chap. III. Des fondemens des colonnes et de leurs ornemens. » . . livre quatriĂšme. Introduction, . ⹠⹠» âą . . Chap. I. Des trois ordres de colonnes et de leur origine ... 10 9 Chap. II. Des ornemens des colonnes ...346 Chap. III. De Tordre dorique .j. 1 ^ 2 Chap. IV. De la distribution de lâintĂ©rieur des temples et de leurs vestibules .161 Chap. V. Quelle position il faut donner aux temples .. .. .166 Chap. VI. Proportions des portes des temples, . . ibid. Chap. VIT. Des temples Ă la maniĂšre toscane . .âą âą *77 Chap. VIII. Comment les autels doivent ĂȘtre placĂ©s. .... 186 LIVRE CINQUIĂME. Introduction, v . 188 Chap. I. Du forum . 189 Chap. II. Du trĂ©sor public , des prisons et de VhĂŽtel-de-ville. . ... 197 Chap. III. Du théùtre et du choix d'un local sain pour l'y placer ..* . 199 Chap. IV. De VhĂ»rmonie. \ ... 206 Chap. V. Des vases du théùtre. . ... 216 Chap. VI. De la construction du théùtre ... ... 222 Chap. VII. Du portique et dâautres parties du théùtre . 226 Chap. VIII. Des trois espĂšces de scĂšnes et des théùtres grecs .23o Chap. IX. Des portiques qui sont derriĂšre la scĂšne et des promenoirs. ; ... . 2 35 Chap. X. De quelle maniĂšre il faut disposer les bains , et quelles sont leurs parties. . . 25 q Chap. XI. De quelle maniĂšre il faut construire les palestres et les xystes. ...... 246 CjĂźAP, Xll. Des ports et de la maçonnerie qui se fait dans lâeau .» - . 25 i LIVRE fl; I w âąĂĂĂ des chapitres. xxj LIVRE SIXIĂME. Pages Introduction .'âą * âą Chap. I. Comment il faut situer les Ă©difices dans les diffĂ©rents climats .260 Chap. TI. Comme on doit rĂ©gler les proportions des Ă©difices dâaprĂšs la nature des lieux. . 203 Chap. III. Des cours des maisons . Chap. IV. Des cours , de leurs galeries ^ des cabinets d etude et des pĂ©ristyles. .... 272 Chap. V. Des salles Ă manger , des salons , des exĂšdres et des galeries de tableaux. . . 275 Chap. VI. Des salons Ă la maniĂšre des Grecs .278 Chap. VII. De lâaspect quâil convient de donner d chaque partie de lâĂ©difice .279 Chap. VIII. Des formes que doivent avoir les maisons , dâaprĂšs la condition de ceux qui les habitent . 2 8° Chap. IX. Des maisons de campagne. .. 282 Chap. X. Comment les Grecs distribuent leurs habitations .. 286 Chap. XI. De la soliditĂ© des Ă©difices .... . 291 LIVRE SEPTIĂME. Introduction . 2 97 Chap. I. De la rudĂ©ration . 3 o 8 Chap. IL Comment on doit prĂ©parer la chaux pour faire le stuc .. . . 3 i 3 Chap. 111 . Des enduits ...3i7 Chap. IV. Des enduits qui se font dans les lieux humides . 32-4 Chap. V. Comment il faut peindre lâintĂ©rieur des appartemens . 327 Chap. VI. Comment on doit prĂ©parer le marbre pour faire le stuc .. . 332 Chap. VII. Des couleurs naturelles . 355 Chap. VIII. Du cinabre .. * 557 Chap. IX. De la prĂ©paration du cinabre . 539 Chap. X. Du noir artificiel . 543 Chap. XI. Du bleu dâazur et de lâocre brĂ»lĂ©e .. . 345 Chap. XII. Du blanc de cĂ©ruse , du vert-de-gris , et du minium . 546 Chap. XIII. De la couleur pourpre . 547 Chap. XIV. Des autres couleurs artificielles . .. 34 g C XXI] TABLE LITRE HUITIĂME. Pages. Introduction.. . ... . Chap. I. Des moyens de trouver de Veau. .. 356 Chap. II. Des eaux de pluie. . . 9 Chap. III. Des qualitĂ©s particuliĂšres de certaines eaux de fontaines .563 Chap. IT. Des qualitĂ©s particuliĂšres quâont les eaux d'autres fontaines . Chap. V. Comment on peut connoĂźtre la qualitĂ© des eaux . 3q5 Chap. TI. Comme on doit conduire les eau\ et les niveler. . . .^76 Chap. TI1. Des diverses maniĂšres de conduire les eaux .3y8 LIVRE NEUVIĂME. Introduction. . . . . . . . . âą . âą âą âą .. 38g. Chap. I.*...3gi Chap. Il..3g2 Chap. III...5g4 Chap. IV. De la sphĂšre et des planĂštes. .. 3g8 Chap. T. Du cours que le soleil fait dans les douze signes du zodiaque . 408 Chap. VI. Des constellations septentrionales. ... .. 4 og Chap. TII Des constellations qui sont au midi .. ... . 4i3 Chap VIII. Description des cadrans avec les analĂšmes .. 417 Chap. IX. De la construction des horloges, et par qui elles ont Ă©tĂ© inventĂ©es . 420 L I V R E D I X I Ă M E. Introduction ..; . 429 Chap. I. Des diffĂ©rentes espĂšces de machines et de leurs organes .43i Chap. II. Des machines pour tirer .^ . 435 Chap. III. Dâune autre machine pour tirer . 453 C 11 AP. IV. Dâune autre machine pour tirer . 43 g Chap. T Dâune autre espĂšce cle machine. . *. l\h^- ChAP. VI. Moyen qii employa CiĂšsiphon polir transporter des fardecCux trĂšs-pesants, . . . 443 Chap. VII. Comment on dĂ©couvrit les carriĂšres dâEphĂšse . 445 Ciiap. VIII. Des principes mĂ©caniques .. Ibid. Chap. IX. Des machines pour tirer lâeau .âą.^ 5 0 D ES CHAPITRES. XXĂj Pages. 353 35s 35 Ă» 3^3 3^6 3;8 3 9 i Ch ap. X. D'une autre espĂšce de tympan et des moulins Ă Veau .. . . 45 1 Chap. XI. De la vis . 45Ăź Chap. XII. De la machine de CtĂšsihius ... 454 Chap. XIII. Des orgues hydrauliques . 455 Chap. XIV. Comment on peut mesurer les milles dans un voyage .. 46o Chap. XV. Des catapultes et des scorpions . 465 Chap. XVI. Des balistes .467 Chap. XVII. Proportions de la baliste .. ibid. CĂŻiap. XVIII. De la maniĂšre de bander les balistes et les catapultes .470 Chap. XIX. De s machines pour assaillir les forteresses .471 Chap. XX. De la tortue qiVon emploie pour combler les fossĂ©s .475 Chap. XXL Des autres espĂšces de tortues .. 477 Chap. XXII. Des moyens qu J on emploie pour dĂ©fendre les places fortes . 48o „ 408 4 0 9 4i3 4 iy 420 FIN DE LA TABLE DES CHAPITRES. 429 43i 435 458 439 ; 441 445 445 v». t X .*i,7 ERRATA La lettre n , dans la colonne des lignes, indique que la faute est dans les notes ; le chiffre romain, suivi dâun c, indique la colonne oĂč elle se trouve; et le chiffre arabe, la ligne de la colonne. 'WXV"WVWWVW% Pi G SS. Lignes. i3 *4 est quâil faut avoir Ibidem , 8 puloinalis *9 5 enfin la hauteur Ibidem , 3i lorsquâil sâagit de lâarchitecture ; quantitĂ© 20 21 reprĂ©sentoient 21 5 entreillĂ©s 3i 16 car puisque personne 47 i3 nous les divisons en quatre 55 32 lâordre que jâai donnĂ© 6i 36 et 37 Liv. VIII. Ch. vu 68 n. II. C. I hist. de lâacad. 80 II Castel - Gandolto 8 9 3i nâest point alors plus sujet 9° 27 ils font de leur Ă©corce 9 5 derniĂšre, tous ces diviseurs 9 6 i5 et par-consĂ©quent vingt-quatre 97 »⹠3 de Romme 99 3 et 4 la proportion seule fait le beau 106 25 templytoscans 116 23 on a trois septiĂšmes 1J 9 5 la huitiĂšme partie de sa grandeur Lisez » câest quâil faut avoir » pulvinatis » entre la hauteur » lorsquâil sâagit de lâarchitecture. Par la quantitĂ© \ » reprĂ©senteroient » en treillis » puisque personne » nous le divisons en quatre » le rang que jâai donnĂ© Liv. VII. Ch. i » mĂ©moire de lâacad. » Castel Gandolfo » nâest point alors syjet » il sort de leur Ă©corce » tous ses diviseurs » et par consĂ©quent de vingtâquatre » de Rome » la proportion seule ne fait pas le beau » temples toscans » ou a trois septiĂšmes » la huitiĂšme partie de cette grandeur E R R A T A. xxvj Pages. Lignes. Lisez 120 n. I. c. 9 fvoniibus vaĂŻutarum. Sur le cĂŽtĂ© de lâabaque , pour peu » Jrontibus eolutarum J sur le cĂŽtĂ© de lâabaque. Pour peu 125 n 3 et 3 o des ports et autres Dans le 12. e Chap. du Liv. V , en parlant, etc. des ports et autres dans le i2. e Chap. du Liv. V. En parlant, etc. 128 i 5 les siĂšcles de PĂ©riclĂšs » le siĂšcle de PĂ©riclĂšs 129 24 et 25 une moulure carrĂ©e d'un autre cĂŽtĂ©, dans sa position horizontale. La forme circulaire » une moulure carrĂ©e. Dâun autre cĂŽtĂ© , dans sa position horizontale la forme circulaire Ibidem s r 33 moulures principales les deux tores de la scotie » moulures principales, les deux tores et la scotie Ibidem , 37 connexitĂ© des tores » convexitĂ© des tores i 3 x 38 se reprĂ©senloient de front n se prĂ©sentoient de front i 3 a 22 Talviati } Salviati i 33 35 dans le chapitre prĂ©cĂ©dent » au commencement de ce chapitre i 38 xo câest ce que j'ai fait, CĂ©sar, dans le premier livre }> câest ce que jâai fait, CĂ©sar dans le premier livre, * 4 q 22 asticcinola i asticcivola Ibidem 25 Cateri » Canteri i 5 o 34 on aura sans doute confondu » on aura confondu i 5 i i 5 longueur » largeur 176 n. II. C. X Parthenos , » Parthenon ' x8o 18 Pourquo » Pourquoi 182 *9 et oit rempli par un mur » Ă©toit rempli par ce mur *94 33 Ă©taient formĂ©s » Ă©taient fermĂ©s i 9 5 x 3 pluteum epistyiiorum » pluteum epistyiiorum Ibidem , x 7 quâelles Ă©lĂšvent » quâil Ă©lĂšve 199 n. 2x2 I. c. 2 aux piliers La clef de sol doit aussi ĂȘtre placĂ©e sur la 2. e ligne dans le genre Diatonique et Chromatique A» aux paliers Ibidem , derniĂšre , peripate meson J> paripate meson 220 i 5 la netĂ© hyperboleon » la nete synemmenon 229 27 immĂ©diatement aprĂšs ces deu'x » immĂ©diatement aprĂšs des deux s 3 o 5 des rochers on des maisons *> des rochers ou fies maisons a 34 - 33 et 34 Voici comme Vitruve veut quâon trace les cĂŽtĂ©s de lâorchestre depuis les degrĂ©s bb jusquâĂ la ligne qui marque le devant de la scĂšne 12, on trace Voici comme Vitruve veut quâon trace les cĂŽtĂ©s de lâorchestre depuis les degrĂ©s bb jusquâĂ la ligne qui marque le devant de la scĂšne 12» On trace ERRATA. XXV1J Pages. Lignes. Lisez 234 38 61 » bi 245 derniĂšre , dans la figure e j » dans la figure 3 ^ a n* 18 YetĆotesium » Y elĆotesium "e Ibidem , *9 prognigeum » propnigeum 2 63 3i soit lâhorizon du monde Bbb du bord » soit lâhorizon du monde Bbb du bord septenscotie; septentrional B ; on tire trional B on tire 281 21 quâils survenoit quâil survenoit 283 n. I. c. 4 vases de terre 3 vases de terre cuite 286 27 Les salles sont rĂ©servĂ©es » Ces salles sont rĂ©servĂ©es ; 29° 3i et la dĂ©faite des Perses 3* et la dĂ©faite de PersĂ©e 291 23 le livre prĂ©cĂ©dent 3 les livres prĂ©cĂ©dents 'livre, 2 9 3 i3 tout ce quâil falloit pour faire bĂątir , yy tout ce quâil falloit faire pour bĂątir , 298 9 antecides yy antcrides 3o4 *7 Perrault a trĂšs-mal saisi ce passage de » Perrault a trĂšs-mal saisi ce passage de Yitruve; Yitruve, suivant sa coutume; lorsquâil, etc. suivant sa coutume lorsquâil, etc. 3o5 11 Ă©toit donc connu 2 Ă©toit donc connue 307 26 et 27 est sans doute cause y> est cause 3°9 x 7 cassera i sassera 3i3 4 spinadi pescc spin a di pesce 3i8 7 culpture yy sculpture 3iq 4 sâimprĂ©gne. AussitĂŽt yy sâimprĂšgne aussitĂŽt 3 2 8 18 de demi-figures » des demi-figures Ibidem , derniĂšre , Alabaudin yy Alabandin 332 28 voici les diffĂ©rentes espĂšces quâon emploie yy voici les diffĂ©rentes espĂšces de couleurs quâon une pierre de poids * emploie 337 18 yy une pierre du poids -34i derniĂšre voyez le moyen . yy voici le moyen 345 1 8 et 19 lapis lazulĂ© yy lapis lazuli 35o 16 qui vient aux environs de Troyes yĂż qui vient des environs de Troyes Ibidem , 34 des couleurs diffĂ©rentes de celle yy de couleurs diffĂ©rentes de celles 35a 18 ceruleo yy CĂŠruleum Ibidem 23 Osiro yy OslniĂżn es 355 n. 3 dâAlexis GommĂšne » dâAlexis ĂomnĂšne lâĂ 363 23 sienne yy Sienne > 364 12 et i3 Les eaux yy Ces eaux 368 n 11. C. I de la Libie CirĂšne yy de la Libie. CirĂšne i ERRA T A. XXVI1J Pages. Lignes. 369 n. I. c. 3 On a oubliĂ© dâajouter ici , la traduction du passage de Pline. 370 *9 Passants 3 7 i 3o Suspicio Galba 3 9 6 5 Misolabe 4o3 7 et 8 la planĂšte de Mars fait son cours aussi; lâardeur du soleil. 4o6 36 et 3 7 comme aujourdâhui long-temps; avant Vitruve 443 *7 Il fit amener ainsi tous les fĂ»ts des colonnes ; sur le mâodĂšle de cette machine. 4b MetagĂšnes 445 24 es machines 4 7 2 B. I. c. 2 cry'sXoç , Ă©chelle , câest-Ă -dire 5o3 12 Echinas S17 23 Bains qui rĂ©gnent tout au tour 5ig 14 Porte des Ă©trangers 5ai 23 sur lesquels on Ă©toit au théùtre Lisez » Dans risle dâischia il y en a qui guĂ©rissent de la pierre et de la gravelle comme font les eaux de la fontaine nommĂ©e Acidula, prĂšs de ThĂ©ano Sedicino.... On dit de mĂȘme que, quand on boit de l'eau du lac Velino, elle soulage aussi dans ces maladies. v Passant » Sulpicio Galba » Mesolabe » la planĂšte de Mars fait son cours/ aussi lâardeur du soleil » comme aujourdâhui ; long-temps avant Vstruve il fit amener ainsi tous les fĂ»ts des colonnes. Sur le modĂšle de cette machine MetagĂšnes » les machines » cry'e Aoââ, câest-Ă -dire » Echinus » Bancs qui rĂ©gnent tout au tour » Portes des Ă©trangers » sur lesquels on Ă©toit assis au théùtre Page 54 g, colonne 2 e . , ligne i 4 Craie Ă©rĂ©trienne, sĂ©lunisienne et annullaire ; qui ajoutez-y les lignes 16 et 17 de la- mĂȘme colonne , commençant par ces mots ; entre dans la composition , etc. LâARCHITECTURE D E .5 a;. Y IT1ĂV E, âKB -f;V / K LIVRE PREMIER. INTRODUCTION. TL and is que votre divin gĂ©nie, ĂŽ CĂ©sar, vous rendoit maĂźtre de lâempire du monde; quâaucun ennĂ©ini ne pouvoit rĂ©sister Ă votre valeur invincible ; que les citoyens romains se giorilioient de vos triomphes et de vos victoires ; que les peuples mĂȘme que vous aviez soumis y applaudissoient ; que le sĂ©nat et le peuple romain, dĂ©livrĂ©s de toute crainte , mettoient leur confiance dans la sagesse de votre gouvernement qui leur assurait la paix et le bonheur ; jâaurais craint d ĂȘtre importun et de vous interrompre mal Ă propos dans vos sublimes occupations, en vous offrant ce traitĂ© dâArchi- teclure , fruit de mes longues Ă©tudes et des efforts que jâai faits pour expliquer cette science. Vous prouvez que vos soins ne se bornent pas seulement aux affaires les plus importantes de lâĂ©tat, mais que vous vous occupez encore de la construction des bĂąti- mens publics, dans la Mie de les rendre plus utiles vous ne vous ĂȘtes pas contentĂ© de faire Rome la maĂźtresse de toutes les provinces que vous lui avez soumises, vous la rendez encore admirable par la belle structure de ses Ă©difices, dont la magnificence Ă©gale la majestĂ© de votre empire. * Dans ces circonstances, je nâai pas cru devoir diffĂ©rer plus long-temps de vous prĂ©senter ce que j ai Ă©crit sur ce sujet, espĂ©rant quâune profession qui mâa fait connoĂźlre i / 2 L A R C H BT E Martial , et dâautres auteurs, parlent des honneurs divins rendus aux empereurs pendant leur vie. 2 Le plus fort de tous les raisonnemens pour prouver que Yitruve Ă©toit contemporain dâAuguste, câest que , dans le deuxiĂšme chapitre du troisiĂšme livre de cet ouvrage , il dit que le temple de la Fortune Ă©questre Ă©toit prĂšs du théùtre de pierre. Cette maniĂšre de parler ne convenoit quâau temps dâAuguste , oĂč il nâexistoit quâun seul théùtre de pierre Ă Rome , qui Ă©toit celui de PompĂ©e, comme Pline nous lâapprend , en nous disant que le théùtre de PompĂ©e est le premier qui fut bĂąti en pierre. Ce qui nâĂ©toit plus vrai dĂšs le temps de Yespasien , oĂč il existoit Ă Rome plusieurs théùtres de pierre. DâaprĂšs tout cela , je suis persuadĂ© que Yitruve Ă©toit contemporain dâAuguste , et que câest Ă cet empereur quâil dĂ©die son ouvrage. ; dedie ;ent par 51101 ils it dans \e dans ; Tacite. ; weiisi" Ă©toient TariOD,. is 171 » ; la ca* s aprĂšs» osla bĂą' de tel r nio f i CHAPITRE PREMIER. De l Architecture en gĂ©nĂ©ral et des qualitĂ©s d'un Architecte . JLj a science de lâarchitecture en renferme plusieurs autres ; presque toutes contribuent Ă lâembellir, de sorte quâon peut dire qu elle est le juge de toutes les productions des autres arts. On lâacquiert par la pratique et par la thĂ©orie. La pratique est une longue habitude de donner,aux difĂźerens matĂ©riaux quâon employĂ©, la forme quâils doivent avoir d aprĂšs les dessins quâon a faits. La thĂ©orie dĂ©montre et explique pour quelles raisons on doit donner, aux choses bien construites, telle ou telle proportion. MalgrĂ© un travail assidu et les plus grands efforts , les architectes qui nĂ©gligent la thĂ©orie de leur art et se livrent Ă la seule pratique , nâacquiĂšrent aucune rĂ©putation. Ceux au contraire qui abandonnent la pratique et ne recherchent que la thĂ©orie , atteignent lâombre de la science et jamais la rĂ©alitĂ©. Ceux-lĂ seuls , qui joignent la thĂ©orie Ă la pratique, rĂ©ussissent dans leur entreprise. Semblables au guerrier armĂ© de 1 Hor. epist. j. Liv. II. Ep. 1. v. j 5 . a Suet. vie de Jules-CĂ©sar. Mart. Liv. Y. Ep. 8. ĂŻ. 4 LâARCHITECTURE DE V-1 T R U V E. toutes piĂšces , ils sont pourvus cle tout ce dont ils ont besoin , et pai viennent a leur but avec honneur. Dans toutes les sciences, et principalement en architecture, on distingue soigneusement la chose reprĂ©sentĂ©e de celle qui La repiesente; pai celle qui est reprĂ©sentĂ©e, on entend la chose meine dont on doit traitei ; par celle qui Ăźepiesente, on entend la dĂ©finition quâon en fait, dĂ©veloppĂ©e dans un raisonnement appuyĂ© sur les sciences. Lâarchitecte doit donc sâexercer dans lâune et lâautre maniĂšre. Il faut quâil joigne lâintelligence au travail. Car lâesprit sans lâapplication, et lâapplication sans lâintelligence , nâont jamais rendu aucun artiste parfait./Il doit donc savoir Ă©crire et dessiner , possĂ©der la gĂ©omĂ©trie , et ne pas ignorer les rĂšgles de lâoptique, ĂȘtre versĂ© dans lâarithmĂ©tique et bien connoĂźtre 1 histoire ; sâĂȘtre appliquĂ© Ă la philosophie , savoir la musique et possĂ©der quelque teinture de la mĂ©decine , de la jurisprudence , de lâastronomie qui nous apprend Ă connoĂźtre le mouvement des deux et quelles en sont les causes? Lâarchitecte doit connoĂźtre les lettres ; sans elles il ne pourroit rĂ©diger les mĂ©moires oĂč il dĂ©veloppe ses projets et sur lesquels il les appuie. Sâil sait dessiner, il lui sera plus facile ' de tracer et rendre sensible la forme quâil veut donner Ă ses ouvrages. La gĂ©omĂ©trie prĂȘte de nouveaux secours Ă lâarchitecture , puisquâelle enseigne lâusage de la rĂšgle et du compas , sans lesquels on ne pourroit tracer rĂ©guliĂšrement le plan gĂ©o- mĂ©tral des Ă©difices ; elle montre Ă bien prendre les alignemens et Ă dresser chaque partie avec lâĂ©querre et le niveau. Dans les rĂšgles de lâoptique , il puisera lâart de prendre les jours, en plaçant les fenĂȘtres dâaprĂšs les dispositions du ciel 1 . Avec lâarithmĂ©tique il calcule la dĂ©pense de lâouvrage quâil entreprend , et rĂ©sout les problĂšmes les plus difficiles de la proportion. Il trouve dans lâhistoire lâorigine de presque tous les orne- mens de lâarchitecture et les moyens dâen rendre raison. Par exemple , si sous les mutu- les des corniches, au lieu de colonnes il place des statues de femmes vĂȘtues de longues robes, ce qui s appelle des cariatides, il apprendra Ă ceux qui en ignorent le motif, que les habitans de Carie , ville du PĂ©loponĂšse, se liguĂšrent autrefois avec les Perses , qui faisoient la guerre aux Grecs. Ceux-ci la terminĂšrent bientĂŽt par des victoires glorieuses et la dĂ©clarĂšrent de suite aux CariĂątes. Leur ville fut prise et rasĂ©e , tous les hommes passĂ©s au fil de i Ă©pĂ©e , les femmes emmenĂ©es captives ; et pour les traiter avec plus d ignominie , on ne permit jamais aux dames de qualitĂ© de quitter leurs robes et autres ornemens accoutumĂ©s , afin qu elles ne servissent pas seulement au moment du triomphe , mais que paroissant toujours dans l Ă©iat oĂč elles se trouvoient alors , elles conservassent la mĂ©moire de cet affront , et qu ainsi elles portassent Ă Xi Les rĂšgles de lâoptique lui sont encore utiles pour gelle, Nuits attiq. Liv. XVI , Ch. , pour connoĂźtre plusieurs choses , comme on le verra ci-aprĂšs Liv. III, Ă que l point les anciens avoient portĂ© la science de JW Ch. 2 et 3, et aussi Liv. VI , Ch. g. Voyez aussi Aulu- tique. LIVRE I, C h A p. i. 5 011 di$! f l u i est -sente sr le s joigne genct. »ssĂ©d tĂ©tiquç t! ifi qui 3 moires ui sera ;es. La e de la fi gĂ©o- te par- rendrc Ă©tique s plus orne- QUtU- ignĂ©s noliĂź, erses, foires , tous $ {rai- leurs nt au soient ent > B noiU e lelâr jamais la peine que leur ville avoit mĂ©ritĂ©e. Les architectes cle ce temps-lĂ , imaginĂšrent de placer ces sortes de statues, au lieu de colonnes, dans les Ă©difices publics, afin de transmettre Ă lai postĂ©ritĂ© un exemple Ă©ternel de la punition quâon avoit fait souffrir aux CariĂątes. Les LacĂ©dĂ©moniens en usĂšrent de mĂȘme lorsque , sous la conduite de Pau- sanias, fils de ClĂ©ombrote , ils dĂ©firent, avec peu de monde, la nombreuse armĂ©e des Perses Ă la bataille de PlatĂ©e. AprĂšs avoir fait servir les captifs Ă la pompe de leur triomphe , pour laisser aux gĂ©nĂ©rations futures un monument qui attestĂąt leur courage et leur victoire , ils bĂątirent, du produit des riches dĂ©pouilles de lâennemi, une galerie quâils appelĂšrent persique. Ils y placĂšrent des statues vĂȘtues, comme lâĂ©loient ces barbares, pour en soutenir la voĂ»te , i afin de punir cette nation par un opprobre que son orgueil avoit mĂ©ritĂ©. Ils rendirent ainsi la valeur lacĂ©dĂ©monienne redoutable aux ennemis , et excitĂšrent les peuples Ă la dĂ©fense de la libertĂ©, par lâexemple de leurs concitoyens. Depuis , Ă l imitation des LacĂ©dĂ©moniens , plusieurs architectes firent soutenir les architraves et les entabiemens sur des statues persiques, et enrichirent leurs ouvrages de semblables inventions. Il existe plusieurs histoires de ce genre quâil faut quâun architecte commisse, La philosophie Ă©lĂšve l ame de lâarchitecte ; sans lui inspirer de lâarrogance, elle le rend Ă©quitable et fidĂšle , et ce qui est plus essentiel encore , absolument dĂ©sintĂ©ressĂ©. Car pour rĂ©ussir dans ses entreprises , la probitĂ© et l'honneur seuls doivent le diriger. Quâil ne soit donc pas avide de gain , et quâil songe moins Ă sâenrichir quâĂ acquĂ©rir de la rĂ©putation par son art , ne faisant jamais rien dâindigne dâune profession si honorable. C est ce que lui prescrit la philosophie. Il est une autre branche de la philosophie , qui apprend Ă connoĂźtre la nature. Les Grecs la nomment physiologie. Il est trĂšs-essentiel quâil l'Ă©tudie pour comprendre les effets de la nature , qui sont variĂ©s Ă lâinfini. Par exemple , sâil veut conduire, par diffĂ©rens dĂ©tours, les eaux dâun lieu Ă un autre sur un plan horisonlal ; ou que . pressĂ©es par leur propre poids , 11 veuille les faire jaillir , quelle quâen soit la cause , il sâengendre une quantitĂ© dâair dans les tuyaux , inconvĂ©nient auquel il ne pourroit remĂ©dier , sâil ne connoissoit pas , par la philosophie, les principes des choses qui sont dans la nature. Sans le secours de la philosophie , comment pourroit-on saisir le vrai sens des ouvrages de ClĂȘsibius , d ArchimĂšde , et de tous ceux qui ont Ă©crit sur de pareils sujets? Quant Ă la musique, il doit la savoir parfaitement, pour connoĂźtre les rĂšgles des proportions mathĂ©matiques de la rĂ©sonnance 2 et pour tendre, comme il faut, les Ralistcs , Catapultes et Scor- 1 Pausanias Liv. ĂII , Ch. 9 , parle de ce portique 2 Voyez ci-aprĂšs Liv. V, Ch. 3 ; et Auiugelie, ISuits comme du plus bel Ă©difice qui fĂ»t sur la place de âattiques Liv. XVI, Ch. 18. Sparte. i 6 LâARCHITECTURE DE VITRUYE. pions; i les chapiteaux de ces machines sont, Ă cet effet, percĂ©s Ă droite et Ă gauche de deux trous , qui rendent un mĂȘme ton , et par lesquels passent les cables, faits de cordes de nerfs, que lâon bande avec des cabestans, moulinets ou vindas et leviers, et quâon ne doit arrĂȘter pour dĂ©cocher la machine, qu autant qu elles rendent 1 un et 1 autre des sons qui forment un accord parfait lorsquâon les touche ; par ce moyen, il juge si les bras de la machine sont Ă©galement tendus pour frapper en mĂȘme-temps leur coup ; car si elles ne rendaient pas un mĂȘme son, le trait seroit dĂ©rangĂ© dans sa direction. La musique lui sert encore Ă disposer les vases dâairain 2 quâon place dans les cases sous les degrĂ©s des théùtres, par proportions mathĂ©matiques, et dâaprĂšs les diffĂ©rons sons quâils rendent, que les Grecs appellent Tons. La grandeur de ces vases est rĂ©glĂ©e dâaprĂšs les divers accords de la musique ; on les dispose circulairement le long des degrĂ©s, de maniĂšre quâils passent de la quarte Ă la quinte, Ă lâoctave, etc. ; la voix des acteurs qui part de la scĂšne, retentit contre ces vases qui se correspondent, et par lĂ elle sâaccroĂźt et parvient plus douce et en mĂȘme-temps plus sonore aux oreilles des spectateurs. Enfin personne ne pourroit construire les machines hydrauliques et autres semblables, sans le secours de la musique 3. LâĂ©tude de la mĂ©decine lui est nĂ©cessaire pour connoĂźtre les aspects du ciel , que les Grecs nomment climats 4 distinguer les lieux sains et dangereux , et quelles sont les diverses propriĂ©tĂ©s des eaux. Il nâest pas possible de bĂątir une habitation, qui soit saine, si lâon nâa bien examinĂ© toutes ces choses. Il faut quâil commisse la jurisprudence et les lois pour diriger la construction des murs communs, 5 les gouttiĂšres et les Ă©gouts ; pour placer les fenĂȘtres ; pour lâĂ©coulement des eaux et choses semblables. Avant de commencer un Ă©difice, il doit prĂ©venir tous les procĂšs qu on pourroit intenter au propriĂ©taire, lorsque 1 ouvrage sera achevĂ© ; cette connoissance lui est aussi nĂ©cessaire , pour bien rĂ©diger les baux de location, tant Ă lâavantage du locataire que du ren- deur, et nây laisser Ă©chapper aucun terme ambigu , afin d Ă©viter toute espĂšce de chicane qui pourroit sâĂ©lever entr eux. L astronomie 6 lui sert pour la confection des cadrans 1 Yitruve parle plus amplement de ces machines Liv. X , Ch. i 5 , 16, 17 et 18. 2 Vitruve parle de la distribution de ces vases, de lâharmonie et des théùtres Liv. V. Ch. 3 , 4 , 5 , 6 , 7 et 8. 3 Tout le dixiĂšme livre est employĂ© Ă traiter de ces machines, tant de celles hydrauliques que de celles de la guerre. 4 Ce mot est dĂ©rivĂ© du verbe %Xiva , inclinĂ©, parce que les divers degrĂ©s du mĂ©ridien sont inclinĂ©s -vers le pĂŽle , ou dĂ©clinent vers lâĂ©quateur. 5 Par murs communs, Vitruve nâentend pas, comme lâa cru Perrault, les murs mitoyens, mais les murs des maisons le long des rues, dont la construction Ă©toit rĂ©glĂ©e a LomĂ© par des lois particuliĂšres, comme on le verra plus loin. 6 Vitruve se sert du mot Astrologie que nous avons aoandonne aux charlatans, pour dĂ©signer lâinfluence quâils prĂ©tendent que les astres ont sur le corps t humam ; et je me suis servi de celui q astronomie, qui dĂ©signe la connoissance de 1 Ă©tat des cieux et du mouvement des astres. 7 LIVRE I, C h a p. i. fçM s dcj M 1 2 autre si les i car niusi- de- sren- d'wers quâils scĂšne, douce rnrroit laides. tenter , i leces- j ten- hicane , coin- ;S B' uri 3 n Ă©toii i on le solaires, par la connoissance qu elle lui donne des quatre points cardinaux , de lâĂ©tat du ciel, des Ă©quinoxes , des solstices et de tout le cours des astres. . Puisque lâarchitecture demande donc une aussi grande Ă©rudition et le concours de tant dâautres sciences , je ne crois pas que personne puisse tout-Ă -coup se donner pour architecte. Cette qualitĂ© nâappartient quâĂ celui qui, dĂšs son enfance, a commencĂ© Ă monter par tous les degrĂ©s qui conduisent au faĂźte du temple de lâarchitecture. Les igno- rans seront peut-ĂȘtre Ă©tonnĂ©s , et ne pourront croire que la mĂ©moire et lâintelligence humaines soient suscep tibles d autant de lumiĂšres ; mais on verra bientĂŽt combien ils sont dans lâerreur, si I on rĂ©flĂ©chit que toutes les sciences Ă©tant liĂ©es, et communiquant les unes avec les autres , les connoissances humaines sont comme un corps composĂ© de divers membres ; ceux qui, dĂšs leur tendre jeunesse , ont consacrĂ© leurs momens Ă lâĂ©tude des belles-lettres , en sont convaincus. Ils sont persuadĂ©s aussi que la connexion qui se trouve entre elles, en facilite beaucoup FĂ©tu de. Ce qui fait dire Ă Pythius i, cet ancien architecte qui sâest rendu cĂ©lĂšbre par la construction du temple de Minerve , dans la ville de PriĂšne , que lâarchitecte rĂ©ussira mieux dans ces diffĂ©rentes sciences , que ceux qui. par les efforts de leur gĂ©nie, et leur industrie, ont excellĂ© dans quelques-unes en particulier. Cependant cela nâest pas exact. En effet , il nâest pas possible , ni mĂȘme nĂ©cessaire, quâil possĂšde la grammaire comme Aristarque , la musique comme Ăris- toxĂšne 2 ; quâil soit aussi bon peintre quâApelle , aussi bon sculpteur que Miron ou PoliclĂšte , enfin aussi savant en mĂ©decine quâHippocrate 5 il suffit quâil ait quelques connaissances de la grammaire , de la musique , de la peinture , de la sculpture , et de la mĂ©decine ; lâesprit de lâhomme nâest pas capable d'atteindre la perfection dans autant de sciences , dont les dĂ©mens exigent dĂ©jĂ beaucoup dâĂ©tude. Ce nâest pas aux architectes seuls auxquels il est refusĂ© d atteindre la perfection, puisque ceux mĂȘme qui sâadonnent Ă quelquâart en particulier, qui sâefforcent dâen vaincre toutes les difficultĂ©s pour sây rendre profonds et renommĂ©s, ne rĂ©ussissent pas toujours. Que dis-je ! parmi tous ceux qui cultivent une mĂȘme science , et en font leur unique Ă©tude, il nâest donnĂ© quâĂ un petit nombre , et dans lâespace d'un siĂšcle , dây devenir cĂ©lĂšbres ; comment voudroit-on que lâarchitecte qui doit possĂ©der tant de connoissances, non-seulement nâen ignore aucune, ce qui est dĂ©jĂ beaucoup exiger, mais qu'il excelle dans toutes , tandis que les forces et lâintelligence humaines suffisent Ă peine pour en approfondir une seule ? js avons ;e n;eti latffr es asti* 1 Vitruve le nomme Phileos dans 1 introduction du sur lharmonie; câest dans ces livres que Vitruve a nuise VII. e Liv. Il parle aussi dâun architecte nommĂ© Pytheus , ce quâil a Ă©crit sur la musique dans les 4 e et 5" Ch. du Liv. I\ , Ch. 3. Liv. Y, comme il nous lâapprend lui-mĂȘme. 2 AristoxĂšne, disciple dâAristote, a livres I 8 LâARCHITECTURE DE VI T R U V E. Il me semble donc qu'en cela Pythius sâest trompe 7 ; il n a pas rĂ©flĂ©chi que deux choses, la pratique et la thĂ©orie, composent tous les arts. La pratique appartient proprement Ă ceux qui font profession de quelquâart en particulier, et la thĂ©orie appartient gĂ©nĂ©ralement Ă tous ceux qui cultivent les sciences. Quâun mĂ©decin et un musicien parlent, par exemple , lâun de la proportion des pulsations du poulx, et 1 autre de celle des mou- vemens des pieds que font des pas de danse ; cette thĂ©orie leur est commune Ă tous deux. NĂ©anmoins si un homme vient de se blesser, ou tombe dangereusement malade, on nâappelle pas le musicien , mais le mĂ©decin qui doit le secourir. Si au contraire , on veut mettre dâaccord quelquâinstrument de musique, on nâappellera pas le mĂ©decin, mais le musicien , qui parviendra Ă lui faire rendre des sons harmonieux qui charmeront les oreilles. Les astronomes et les musiciens peuvent Ă©galement raisonner sur la sympathie des Ă©toiles , et sur les consonnances musicales, dont les unes se distinguent par quadrals et par trines i , et les autres par la quarte et la quinte ; et avec les gĂ©omĂštres de ce qui concerne la vue, câest-Ă -dire , de cette science que les Grecs appellent optique 2. Il en est de mĂȘme du reste des sciences ; leurs diverses thĂ©ories servent Ă toutes , ou du moins Ă la plupart. Mais sâil sâagit de la pratique quâon nâacquiert que par le travail et une longue habitude, il faut que chacun traite de celle dans laquelle il sâest particuliĂšrement exercĂ©. De sorte qu il est censĂ© quâun architecte en sait assez , quand il est mĂ©diocrement instruit dans les arts qui dĂ©pendent de lâarchitecture , quand il peut en juger et les examiner au besoin, et nâavoir pas la honte de demeurer court. Sâil se rencontre par hasard des personnes dont lâesprit et la mĂ©moire ont assez d Ă©tendue pour possĂ©der parfaitement la gĂ©omĂ©trie , lâastronomie , la musique et les autres sciences ; cette capacitĂ© doit ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme quelque chose au - delĂ de ce qui est nĂ©cessaire Ă lâarchitecte. Ce sont alors des mathĂ©maticiens qui peuvent traiter Ă fond de toutes les sciences ; mais ces gĂ©nies sont fort rares 5 il sâen trouve peu, tels quâont Ă©tĂ© Ari star que Ă Samos , Philolaiis et Architas Ă Tarente , Apo- lonius Ă Perge, EratosthĂšne Ă CyrĂšne , ArchimĂšde et Scopinas Ă Syracuse. Avec le secours du calcul et la connoissance quâils avoient des secrets de la nature , ils ont fait les plus belles dĂ©couvertes dans les mĂ©caniques et dans la gnomonique, et les ont transmises Ă la postĂ©ritĂ©. Mais puisque la nature avare produit rarement de ces gĂ©nies extraordinaires, et quâil laut cependant que rarcliilecle possĂšde, autant quâil est possible, ces diverses connois- snnces ; car il seroit dĂ©raisonnable dâexiger quâil les possĂ©dĂąt toutes parfaitement, je vous 1 On appelle quadrat aspect , la situation de deux 90 degrĂ©s font le quart du mĂ©ridien et 120 le tiers ; astres Ă©loignĂ©s lâun de lâautre de 90 degrĂ©s , et le trine voyez les remarques Ă la fin de ce chapitre, aspect lorsquâils sont Ă©loignĂ©s de 120 degrĂ©s , parce que 2 Ce mot est tirĂ© du verbe tance que de Jupiter Ă Saturne , tellement quâen rĂ©unissant celte harmonie , 011 trouvera sept tons ». pour former une musique aussi parfaite que celle du diapason. DâaprĂšs celle harmonie , il prĂ©tend » donc que Saturne dans son cours suit le mode dorien , et Jupiter le mode phrygien. Il ajoute » plusieurs subtilitĂ©s ingĂ©nieuses qui sont beaucoup plus agrĂ©ables quâutiles , telles que la magnifiqne » harmonie des astres , leur marche mĂ©lodieuse , leur rĂ©volution cadencĂ©e , et ce concert sublime > que forment tous les corps cĂ©lestes et les cieux divers 1. Il paroĂźt que Vitruve partageoit cette opinion , tant par ce quâil dit dans ce chapitre , que dans le sixiĂšme du cinquiĂšme livre , oĂč il parle des dispositions dâun théùtre , qui doivent ĂȘtre prises , dit-il , dâaprĂšs les rapports qui se trouvent entre les astres et la musique. Quoiquâil ait adoptĂ© ce systĂšme , on voit quâil nâignoroit pas celui des autres philosophes il les rapporte tous dans le second chapitre du deuxiĂšme livre. Mais cette prĂ©fĂ©rence pour celui de Pylhagore et des philosophes dont il fut le chef, lui fait , suivant moi, infiniment dâhonneur , ^car lâantiquitĂ© nâa pas produit de savants qui aient Ă©tĂ© aussi Ă©clairĂ©s quâeux ' dans les sciences naturelles , et dont les dĂ©couvertes aient fait plus dâhonneur Ă lâesprit humain. Il y avoil alors, comme le rapporte Vitruve Liv. IL Ch. 2. , des philosophes qui soutenoient que lâeau, le feu, lâair, les atomes, Ă©toient les principes des choses. Pylhagore prĂ©tendit, au contraire, que les principes des choses Ă©toient les convenances et les proportions dont se formoient les harmonies , et que la bontĂ© et lâintelligence faisoient la nature de Dieu. Il fut le premier qui appela lâunivers , monde, Ă cause de son ordre. Il soutint quâil Ă©toit gouvernĂ© par la providence sentiment lout- Ă -fait conforme Ă nos livres sacrĂ©s et Ă lâexpĂ©rience. Il inventa les cinq zones , et dĂ©couvrit lâobliquitĂ© du zodiaque. Il assura que la zone torride Ă©toit habitable. 11 dĂ©couvrit le carrĂ© de lâhypotĂ©nuse dâoĂč sont sortis une infinitĂ© de thĂ©orĂšmes et de solutions gĂ©omĂ©triques. PhilolaĂŒs de Crotone , un de ses disciples, prĂ©tendoit que le soleil recevoil le feu rĂ©pandu dans lâunivers et le rĂ©verbĂ©roil. Il tenoit que les comĂštes Ă©toient des astres qui se remontrent aprĂšs une certaine rĂ©volution. Oecette autie pythagoricien, souienoit quil y avoit deux terres, celle-ci et celle qui lui est opposĂ©e', ce 1 Pline Liv. Il, Ch. ao. Il en parle encore dans la pre'face du mĂȘme Livre. qui ne convient -qu' Socrate , Platon , Architas, gĂ©nĂ©ral Taremin , XĂ©nophon Epaini- ĂŻiondas , Numa, enfin ce que la philosophie, les lettres , Part militaire et le trĂŽne ont en de plu* illustre , Ă©toient pythagoriciens. Toutes leurs idĂ©es sur les harmonies de la nature ont Ă©tĂ© renouvelĂ©es, par M. Bernardin de S. 1 Pierre , dans son charmant ouvrage des Eludes de la Nature. Ils ne les bornĂšrent point Ă Pastronomie ; nous voyons, dans ce chapitre , que les mĂ©decins mĂȘme trouvĂšrent dans lâharmonie les principes de leur art. HĂ©rophile , mĂ©decin cĂ©lĂšbre qui vivoit du temps de Plia- laris , 56 o ans avant PĂšre vulgaire , avoit rĂ©glĂ© les degrĂ©s du mouvement des pulsations du pouls selon les diffĂ©rens Ăąges de lâhomme , dâaprĂšs les rĂšgles de la musique 1. Le mĂ©decin Zerlin , qui mourut Ă Yenise en 1699, a renouvelĂ© celte opinion a. Vitruve dit que les anciens distinguoient deux sortes de philosophie ; celle qui nous apprend Ă connoĂźtre la nature, et celle qui traite de la morale. Il exige que son architecte connoisse aussi cette derniĂšre, pour quâelle soit la rĂšgle de sa conduite. M/ Legier, cĂ©lĂšbre architecte, que FrĂ©dĂ©ric II , roi de Prusse , fit venir de Paris Ă Berlin, nous, a prouvĂ© combien il Ă©toit pĂ©nĂ©trĂ© des principes de Vitruve. Il prĂ©sente un jour Ă ce grand roi le plan de la maison royale dite le nouveau Sans-Souci. FrĂ©dĂ©ric lâapprouve, mais il veut qu-âau lieu du salon dâentrĂ©e, on fasse une espĂšce de grotte trĂšs-grande. Legier lui reprĂ©sente que cela seroit absolument contre les rĂšgles de Part, quâil sera critiquĂ© par tous les connoisseurs. Quâimporte , lui rĂ©pond le roi jâexige quâon exĂ©cute ma volontĂ© câest moi qui paye lâouvrage si on le critique, dites que je lâai voulu avoir comme cela. Mais , lui dit Legier, ni votre majestĂ© ni moi, ne serons- pas toujours lĂ pour dire Ă la postĂ©ritĂ© , que câest par vos ordres que cet Ă©difice a Ă©tĂ© bĂąti de cette maniĂšre. Ma rĂ©putation mâest bien plus chĂšre que tout lâargent que je pourrois gagner Ă cet ouvrage je supplie votre MajestĂ© de vouloir choisir un autre architecte. Legier peu soit donc Bien moins Ă sâenrichir quâĂ acquĂ©rir de la rĂ©putation par son art. Il possĂ©doit cette philosophie dont parle Vitruve. CHAPITRE II. En quoi consiste lArchitecture. architecture a six objets principaux lâordonnance, que les Grecs appellent iaxis; la disposition, quâils nomment diatesis ; Xeurythmie ; la proportion , la biensĂ©ance et la distribution , quâon appelle en grec Ă©conomie. Lâordonnance donne Ă chaque partie du bĂątiment la grandeur nĂ©cessaire pour lâusage auquel elle est destinĂ©e ; elle la rĂ©duit Ă une mĂȘme mesure pour en former un ensemble bkn proportionnĂ©; » Pline. LĂźt. XXIX, Cb. 2 Zerlino inst. ym. Ch. 3 , P. I. LâARCIUTECTĂRE DE VITRUVE. 12 Lâordonnance se rĂšgle donc par la quantitĂ© appelĂ©e en grec posotes , et par quantitĂ©, on entend le module, qui est uneâgrandeur prise dans quelque partie de lâouvrage, pour servir de terme de comparaison aux dimensions de toutes les autres parties. Placer chaque chose dans le lieu qui lui convient selon sa qualitĂ© , de maniĂšre que cet arrangement produise un effet agrĂ©able , câest ce quâon appelle la disposition. Les dessins , ou, pour parler comme les Grecs , les idĂ©es de la disposition se font de trois maniĂšres ; savoir par lâichnographie , par lâorthographie et par la scĂ©nographie. Lâichnographie , c'est lorsquâavec la rĂšgle et le compas , on trace , dans un espace mĂ©diocre , le plan dâun Ă©difice , comme si câĂ©toit sur le terrain. Lâorthographie reprĂ©sente dans un petit dessin colorĂ© , lâĂ©lĂ©vation dâune des faces du bĂątiment dans les mĂȘmes proportions quâil doit avoir. La scĂ©nographie est un dessin ombrĂ© qui fait voir non seulement lâĂ©lĂ©vation dâune des faces , mais aussi celle dâun des cĂŽtĂ©s , par le concours de toutes les lignes qui aboutissent Ă un mĂȘme point. Pour faire ces dif- fĂ©rens dessins , il faut unir lâesprit et lâintelligence. Le plaisir quâil goĂ»te Ă faire bien exĂ©cuter le plan quâil a conçu , fait que lâesprit y met toute son attention et son exactitude. Lâintelligence fait surmonter les difficultĂ©s ; elle pĂ©nĂštre , elle emploie tous les secrets de lâart. Avec le secours de ces trois maniĂšres de dessiner, on reprĂ©sente parfaitement toutes les dispositions dâun Ă©difice. Lâeurythmie est la beautĂ© que produit lâaccord de toutes les parties dâun ouvrage ; câest elle qui donne Ă lâensemble un aspect agrĂ©able. Rien nây contribue davantage que la proportion, lorsque la hauteur rĂ©pond Ă la largeur , et celle-ci Ă la longueur. La proportion est aussi le rapport que lâouvrage entier a avec ses parties , et celui que ces parties ont entre elles Ă cause de lâuniformitĂ© des mesures. Comme dans le corps humain, il y a un rapport de grandeur entre le coude, le pied , la paume de la main , le doigt et les autres parties ; ainsi dans un ouvrage perfectionnĂ© , un membre en particulier fait juger de toute la grandeur de lâĂ©difice. Par exemple le diamĂštre dâune colonne, le module dâun triglyphe fait juger de la grandeur dâun temple i. On con- noĂźt aussi celle dâune baliste par la proportion du trou que les Grecs appellent PĂ©ri - treton. De mĂȘme lâespace qui se trouve dâune rame Ă une autre , laquelle se nomme DipĂȘchdice , fait voir quelle est la grandeur dâun navire. Il en est de mĂȘme de tous les autres ouvrages. La biensĂ©ance exige dâabord que tout ce qui se voit dans un Ă©difice y soit tellement correct, quil ne s y trouve rien qui ne soit conforme Ă la raison et aux rĂšgles de lâart pour cela il faut premiĂšrement faire attention Ă lâĂ©tat et Ă la qualitĂ© des ^i Voyez h 3.* Ch. du JV. Xiy. L I V H E I, C h a p. i i. i3 choses i , câest ce que les Grecs nomment sefurnw. c; ensuite Ă lâhabitude et Ă la nature. Par exemple , si on fait attention Ă la qualitĂ© des choses, on ne fera pas de toit 2 au temple de Jupiter foudroyant, ni Ă celui du ciel , non plus quâĂ celui du soleil et de la lune. On les laissera dĂ©couverts , parce que ces divinitĂ©s se font connoĂźtre pendant le jour et dans tout lâunivers. Pour la mĂȘme raison, les temples de Minerve, de Mars, dâHercule, seront dâordre dorique, parce que les vertus graves de ces divinitĂ©s rĂ©pugnent Ă la dĂ©licatesse des autres ordres. Au lieu que VĂ©nus, Flore , Proserpine et les nymphes des fontaines, auront les leurs d'ordre corinthien, parce que la dĂ©licatesse et lâagrĂ©ment des fleurs, des feuillages et des volutes, dont cet ordre est embelli , convient Ă la lĂ©gĂšretĂ© quâon attribue Ă ces dĂ©esses. La biensĂ©ance semble aussi exiger que les temples de Junon, de Diane , de Bacchus, et des autres dieux de cette espĂšce, soient dâordre ionique , parce que cet ordre tient le milieu entre la sĂ©vĂ©ritĂ© du dorique et la dĂ©licatesse du corinthien , par consĂ©quent est plus analogue Ă la nature de ces divinitĂ©s. Une observation , quâexige encore la biensĂ©ance , est quâil faut avoir Ă©gard Ă lâhabitude , qui veut que , si lâintĂ©rieur des bĂątimens est richement dĂ©corĂ© , le vestibule le soit de mĂȘme ; car si lâintĂ©rieur Ă©toit riche et Ă©lĂ©gant, et que lâentrĂ©e et le vestibule fussent mesquins , il nây auroit ni agrĂ©ment ni convenance. De mĂȘme si,, sur des entablemens doriques , on mettoit des corniches dentelĂ©es ; ou si , au-dessus des architraves ioniques, soutenues par des colonnes Ă chapiteaux en forme dâoreiller, 3 on taille des triglyphes, et quâainsi on attribue et transporte Ă un ordre les choses qui sont particuliĂšres et propres Ă un autre, les yeux en seront choquĂ©s , parce quâils sont habituĂ©s Ă les voir disposĂ©es dâune autre maniĂšre. La convenance quâexige la nature des lieux , consiste Ă choisir les endroits oĂč lâair et les eaux sont les plus sains , pour y placer les temples , principalement ceux quâon bĂątit Ă Esculape , Ă la SantĂ©, et aux autres divinitĂ©s auxquelles on attribue la vertu de guĂ©rir les maladies. Car les malades qui passeront dâun air malsain dans un autre qui sera plus salubre , et qui feront usage de meilleures eaux, se guĂ©riront aisĂ©ment ; ce qui augmentera beaucoup la bloient Ă un oreiller ou coussin roulĂ© sur lui-mĂȘme, et liĂ© dans le milieu pour le transporter plus commodĂ©ment dans les voyages , comme font encore aujourdâhui lesPolonois qui transportĂšnt les matelas dans leur voiture, parce que, dans toute la Pologne, personne,nâa des lits pour les Ă©trangers. Ces matelas sont beaucoup plus minces que les nĂŽtres. Vitruve, Liv. III , Ch. 3 , nomme encore le chapiteau ionique pulvinaUs. Pline , Liv. XV , dit que la noix du noyer ressemble Ă un* oreiller. 1 Perrault a traduit le mot statio par Ă©tat des choses, et Galliani par statuto statut. Le latin ne rendoit dĂ©jĂ pas trop bien le mot grec que Vitruve a Ă©tĂ© obligĂ© de rapporter comme terme de lâart le français le rend encore plus mal. Il est dĂ©rivĂ© de rĂźSrqf&t qui signifie poser, placer', Ă©tablir. 2 HypĆthra signifie ici gĂ©nĂ©ralement toute espĂšce dâĂ©difice dĂ©couvert ; mais dans une signification plus restreinte , il dĂ©signe une espĂšce de temple, dont il est parlĂ© dans le chapitre premier du Liv. III. 3 Parce que les cĂŽtĂ©s du chapiteau ionique ressem- LâARCHITECTURE DE V I T R U V K 4 dĂ©votion du peuple , qui attribuera Ă ces divinitĂ©s la guĂ©rison quâil devra Ă la nature dâun lieu salutaire. Il est encore une convenance que demande la nature des lieux. Câest de faire en sorte que les fenĂȘtres des chambres Ă coucher et des bibliothĂšques soient placĂ©es au levant i ; que celle des hains et des appartemehs d hiver aient les leurs au couchant dâhiver ; et que les cabinets des tableaux et autres curiositĂ©s qui demandent un jour Ă©gal en tout temps, aient les leurs vers le septentrion, dâautant que ce qui est tournĂ© - vers ce cĂŽtĂ© du ciel est toujours Ă©galement Ă©clairĂ©. La distribution ou lâĂ©conomie exige quâon sache choisir avec discernement ses matĂ©riaux dans le local mĂȘme oĂč I on doit travailler , et quâon Ă©vite toute dĂ©pense inutile , ce quâil est aisĂ© de faire , si toutefois lâarchitecte ne cherche pas Ă exĂ©cuter des choses impossibles , ou qui ne peuvent avoir lieu quâavec des dĂ©penses excessives ; car dans certains endroits, il ne se trouve pas de sable fossile, ni de bonnes pierres, ni de 1 epicias, ni du sapin, ni du marbre , ou, si on veut sâen procurer , il faut les faire venir de loin avec beaucoup de peines et de dĂ©penses. On se sert alors du sable de riviĂšre ou du sable de mer lavĂ© dans lâeau douce, et on emploie le bois de cyprĂšs, de peuplier ou dâorme. Lâautre partie de la distribution consiste Ă faire attention Ă lâusage auquel on destine le bĂątiment, Ă lâargent quâon veut y mettre , Ă la beautĂ© quâon veut quâil ait , parce que ces diverses considĂ©rations rĂ©gleront la distribution quâil doit avoir ; car le plan dâune maison, dans la ville, est diffĂ©rent dâune maison de campagne qui doit servir de ferme et de mĂ©nagerie ; et les maisons quâon bĂątit, pour les bureaux des gens dâaffaires et des nĂ©gocians, doivent ĂȘtre autrement disposĂ©es que celles quâon fait pour des financiers ou pour des personnes de distinction , dont les hautes qualitĂ©s et les emplois dans les affaires publiques demandent des usages particuliers en un mot il faut ordonner les Ă©difices selon les diffĂ©rentes conditions des personnes pour lesquelles on bĂątit. REMARQUES. Les sciences et les arts ont un idiome qui leur est propre. Il est composĂ© de termes quâon nomme techniques. Ces mots sont la plupart tirĂ©s de la langue que lâon parle, mais on leur donne une autre acception , ou une signification plus ou moins Ă©tendue que dans lâusage ordinaire. Ce langage est familier aux artistes ; mais lorsquâon enseigne une science , ou quâon Ă©crit quelque traitĂ© , il faut commençai pai dĂ©finir ces soi tes de termes j pour 1 intelligence de ceux qui apprennent. Câest ce que fait ici Yitruve, x Pour lâexposition des bains, voyez Liv. Y, Ch. 10 ; et pour le reste, Liv. YI, Ch. 7. L I ĂŻ , C h Ă p. ii. â i5 Ce sont les Grecs qui ont introduit en Italie les belles-lettres , les sciences et les beaux-arts. Les Pelages , colonies grecques, les apportĂšrent en Etrurie; les Etrusques les ont fait eonnoĂźtre aux Romains. Ceux-ci firent enĂšuite la .conquĂȘte de la GrĂšce , dâoĂč ils enlevĂšrent les plus beaux tableaux et les plus belles statues , ce qui augmenta leur goĂ»t pour les beaux-arts. Ils ne purent emporter les magnifiques Ă©difices qui sây trouvoient mais ils emmenĂšrent Ă Rome des architectes. Ce furent donc les Grecs qui apprirent lâarchitecture aux Romains ; et câest pourquoi ceux-ci se servirent , dans celte science , de termes grecs ou tirĂ©s de cette langue. Yitruve est obligĂ© de les traduire , de les expliquer et de faire eonnoĂźtre le sens quâils doivent avoir lorsquâils sont afFectĂ©s Ă lâart de bĂątir. Il commence donc par expliquer les principaux termes de lâarchitecture; il considĂšre sĂ©parĂ©ment les objets quâils indiquent. Par-lĂ il nous donne une idĂ©e gĂ©nĂ©rale de cet art ; il en trace les plus grandes parties, marque leur Ă©tendue, leurs limites et leurs connexions. Son explication est un peu abstraite chacun de ces termes renferme lâidĂ©e de plusieurs choses qui en renferment elles-mĂȘmes dâautres, et toutes ont besoin dâune dĂ©finition un peu longue. Les termes techniques grecs donnoient une idĂ©e assez exacte de la chose quâils exprimoient, puisquâils Ă©toient composĂ©s de mots tirĂ©s de cette langue , qui signifioient lâobjet quâon vouloit dĂ©signer, avec ses qualitĂ©s accessoires; le mot architecte, par exemple , est composĂ© des mots Ăąpxv , principal, et tsxtuv , ouvrier ainsi principal ouvrier. Les arts gĂ©nĂ©ralement rĂ©pandus dans la GrĂšce oĂč on les cultivoit depuis long-temps , avoient rendu ces mots familiers; ils Ă©toient, pour ainsi dire, compris de tout le monde. La langue grecque, pour les composer , a en outre un grand avantage sur le latin et sur les autres langues sa grande abondance fait quâon y trouve des mots pour rendre les idĂ©es les plus subtiles. Les Grecs , dit le traducteur françois de ThĂ©ophraste , ont quelquefois deux ou trois termes assez diffĂ©rens pour exprimer dĂšs choses qui le sont aussi , et que nous ne saurions guĂšres rendre par un seul mot ; cette pauvretĂ© embarrasse. » Aussi leur langue a toujours Ă©tĂ© celle des sciences et des beaux-arts. Les Romains , qui les avoient appris dâeux , se sont servis pour les r arts de la langue de leurs] maĂźtres ; ils adoptĂšrent quelques-uns de leurs termes , ils traduisirent les autres , mais en gĂ©nĂ©ral ils perdoient dans la traduction qui Ă©toit bien moins expressive. Câest pourquoi Yitruve met souvent le mot grec Ă cĂŽtĂ©. Nous jĂŻvons une difficultĂ© de plus en françois ces mots qui ont dĂ©jĂ perdu beaucoup dans la version latine, perdent encore davantage en passant dans notre langue. Mais la plus grande de toutes les difficultĂ©s, câest quâen adoptant ces termes grecs ou latins , nous leur avons quelquefois donnĂ© une autre acception que celle quâils ont dans ces langues ; tellement que je serai obligĂ© dâentrer dans quelques dĂ©tails absolument nĂ©cessaires pour lâintelligence de ces diffĂ©rens termes. De ĂŻ Ordonnance. Le mot grec rct^iq exprimoit Ă merveille ce quâon entend par lâordonnance; il est tirĂ© du verbe Tao-Ăźha qui signifie Ă©tablir , faire une chose, lâarranger dâaprĂšs certaines rĂšgles , certain ordre , certaines lois, dâoĂč 1 on a pris les mots taxe et taxer , parce que les taxes se lĂšvent dâaprĂšs un rĂ©gle-ment , dâaprĂšs une loi. EmployĂ© dans lâarchitecture , le mot se rend , en latin comme en françois , par celui !G L'A RCHITECTURĂ DE VITRUVE. dâordonnance, ainsi lorsquâon parle de lâordonnance dâun bĂątiment, on entend qnil y a de 1 ordre dans la distribution , et quâil est construit dâaprĂšs les rĂšgles Ă©tablies. Lâordre qui rĂšgne dansions les ouvrages de la nature, inspira les artistes des premiers Ăąges; câest dâaprĂšs lui quâils rĂ©glĂšrent leurs ouvrages. Ce principe fondamental fut aussi le guide de ceux qui firent faire de si grands progrĂšs aux arts , dans les beaux jours de la Grece. La confusion dĂ©plaĂźt et nuit par-tout oĂč elle se trouve , et plus encore dans les productions des beaux-arts, qui sont le rĂ©sultat des efforts de lâesprit humain. Câest par lâordre et les combinaisons quâ , quâon peut voir si elles sont le fruit du gĂ©nie. Lâordre est si essentiel Ă lâarchitecture quâelle nâexiste, pour ainsi dire, que par lui. Aussi ĂŻâordçm- narice est-elle nommĂ©e la premiĂšre parmi les objets qui constituent cet art. Elle donne , comme dit Vitruve, Ă chaque partie de lâouvrage , lâĂ©tendue, nĂ©cessaire Ă lâusage pour lequel elle est destinĂ©e elle les rĂ©duit Ă une mĂȘme mesure , pour en former un ensemble bien proportionnĂ©. Il faut donc que chaque partie ait sa juste grandeur , convenable Ă son usage et proportionnĂ©e Ă la grandeur de tout lâĂ©difice. Dans un temple il faut quâil se trouve un espace suffisant polir la. Cella , un autre pour le vestibule, un autre pour les galeries, etc, Dans une habitation il faut, par exemple , que lâalcove soit capable de. contenir le lit; lâĂ©curie , les chevaux; que la cour, la salle et les chambres ne soient ni trop grandes ni trop petites pour servir aux usages auxquels elles sont destinĂ©es la cour, pour donner le jour aux appartemens et contenir ce qui doit y entrer ; la salle, pour y recevoir les grandes compagnies; et les chambres,, pour y coucher. Lâordre doit rĂ©gner entre ces parties principales ou majeures ; il doit Ă©galement rĂ©gner entre les moindres parties qui sont comme les accĂšs-, soires de celle-ci telles que les colonnes , Ja grandeur des entre - colonnemens , etc. Il faut que le tout forme un ensemble bien proportionnĂ© dâaprĂšs les rĂšgles de lâart,, comme lâexprime le mot iaxis. Il faut distribuer dâune façon commode et agrĂ©able,, dâapiĂšs les mĂȘmes rĂšgles, non seulement les parties principales , mais encore les dĂ©tails accessoires câest ainsi qirâen mĂ©ditant sur ce qui concerne lâordre dans un Ă©difice , on voit que le plan a un. point central auquel tout vient aboutir, et quâil faut que lâintĂ©gralitĂ© et lâunitĂ© sây trouvent. LâintĂ©gralitĂ© du plan nâest antre chose , au premier coup dâĆil ,, que la. totalitĂ© des parties qui le composent; mais en creusant cette idĂ©e fonciĂšre, on sâaperçoit ensuite que cette intĂ©gralitĂ© suppose que lâon donne une juste Ă©tendue Ă toutes ces parties , et que mĂȘme on les unit ensemble en les liant toutes Ă un mĂȘme point central , ce qui constitue lâunitĂ© ; et que de plus on en rejette, avec soin 3 tout ce qui peut y ĂȘtre Ă©tranger on superflu. Ces conditions Ă©galement requises dans le dĂ©veloppement du plan y sont si importantes, quâelles font le principal mĂ©rite de lâartiste , et le place au rang des grands hommes. Au contraire , Horace met dans la derniĂšre classe des ouvriers , lâartiste qui sait rendre les dĂ©tails , mĂȘme dans une perfection rare , mais qui ne sait pas en former un tout. 1 âą * LâunitĂ© tient tellement Ă lâintĂ©gralitĂ© quâon peut en quelque sorte les confondrepour nâen Lire quâun seul et mĂȘme prĂ©cepte. Il ne faut pas croire quâelle puisse jamais la contrarier car rame- > Hor. Art. poet, ?. 3a. . \ ner l i v n e i, Cha i>. h. 17 ner tout Ă un mĂȘme centre , nâest pas mutiler*les objets. Tout ce qui est inutile et dĂ©placĂ© contrarie lâunitĂ© et lâintĂ©gralitĂ© ; ainsi lâhabile architecte retranchera toujours ce qui est superflu. Si les anciens ont rĂ©ussi , si les ouvrages quâils nous ont laissĂ©s paroissent si parfaits, câest quâils se sont toujours astreints aux principes que nous venons dâindiquer. Yovez dans les temples de ThĂšbes en Egypte , comme tout tend au mĂȘme centre et ne forme quâun seul tout, malgrĂ© la complication et lâĂ©tendue des accessoires qui les environnent. Dans la vaste Ă©tendue de leurs ruines , on a retrouvĂ© lâordonnance de ces immenses Ă©difices voici comme sâexprime Desnon , en parlant du grand temple de Karnack , village Ă©gyptien qui occupe une petite partie de lâemplacement dâun des temples de ThĂšbes. On ne peut nier, dit - il , que le plan du temple de Karnack ne soit > noble et grand ; lâart des beaux plans a toujours devancĂ© , en architecture, celui de la belle exĂ©cu- » lion des dĂ©tails , et lui a toujours survĂ©cu plusieurs siĂšcles aprĂšs sa corruption. Il fttut ajouter aux descriptions connues de ce grand Ă©difice de Karnack , que ce nâĂ©loit encorç » quâun temple , et que ce ne pouvoit ĂȘtre autre chose ; que tout ce qui y existe est relatif Ă un trĂšs-petit sanctuaire, et avoit Ă©tĂ© ainsi disposĂ© pour inspirer la vĂ©nĂ©ration dont iff Ă©toit lâobjet, » et en faire une espĂšce de cent colonnes du seul portique de ce temple , w les plus petites ont sept pieds de diamĂštre , et les plus grandes en ont onze lâenceinte de sa cir- convallation contenoit des lacs et des montagnes; des avenues de Sphinx amenoient aux portes de » cette circonvallation; enfin pour prendre une idĂ©e vraie de tant de magnificence > il faut croire » rĂȘver en lisant, parce quâon croit rĂȘver en voyant. » Les ouvrages des Grecs , dâun genre diffĂ©rent de ceux des Egyptiens , qui sembloient avoir consacrĂ© toute leur industrie Ă leur culte , Ă©toient cependant construits , dâaprĂšs les mĂȘmes principes. Les Egyptiens ne vouloient que des temples et des tombeaux , ils les firent gigantesques. Les autres instruits par ceux-ci, Ă©levĂšrent aussi des temples ; mais ils les. firent moins grands , et cherchant Ă se procurer des jouissances dans la vie , ils construisirent des places publiques , des palestres , des stades , des théùtres et autres Ă©difices analogues Ă leurs moeurs , mais bĂątis dâaprĂšs les rĂšgles quâils tenoient des Egyptiens. Ainsi, si lâon considĂšre les plans des uns et ceux des autres , on voit que câest le mĂȘme gĂ©nie qui les a inspirĂ©s. Rien dâessentiel nây est omis , rien dâĂ©tranger 11ây est ajoutĂ©. Tout y est naturel ; câest-Ă -dire , quâils prĂ©sentent les choses rangĂ©es et liĂ©es comme la nature les produit ou peut les produire ; ou bien comme un bon esprit les conçoit ou peut les concevoir. Cette qualitĂ© est la suite de la prĂ©cĂ©dente , puisque la premiĂšre Ă©tablit toutes les parties nĂ©cessaires; la seconde les arrange et sur-tout les lie entrâelles. Tous ces plans sont simples , câest-Ă -dire , quâils prĂ©sentent aussi peu de parties que la nature le permet, et toutes ces parties ramĂšnent sensiblement Ă un centre commun , en un mot , Ă lâidĂ©e de lâunitĂ©. Cette simplicitĂ© prĂ©suppose quâils voient embrassĂ© leur sujet tout entier , quâils en avoient rangĂ© tous les dĂ©tails sous un petit nombre de points de vue , en les attachant Ă lâidĂ©e fondamentale , par des rapports Ă©troits et sensibles. Le nombre des parties varie sans doute , et doit nĂ©cessairement varier, selon la nature et lâusage de lâĂ©difice ; elles sont diffĂ©rentes dans un temple , dans une palestre , dans une basilique , dans un palais , dans un théùtre ; cependant les plans de ces diverses espĂšces dâĂ©difices , offrent tous la mĂȘme simplicitĂ©, La simplicitĂ© du plan ne doit pas con- iB LâARCHITECTURE DE VITRUYE. sister Ă retrancher des parties car simplifier un objet, n est autre chose que de tiouver le moyen de le prĂ©senter tout entier sous une forme moins compliquĂ©e. Quâun architecte se garde donc dâimiter ces entablemens , qui ne sont pas en ligne droite ; mais dĂ©coupĂ©s en formant des angles et ressauts qui sâavancent sur les colonnes , se retirent dans les entre-colonnemens , et nous offrent une foule dâangles rentrants et saillants tels sont h plupart des frontispices de nos Ă©glises et les retables dâautels. Si quelques monumens de lâancienne Rome ont ce defaut, c est que, quand les Romains ont connu les beaux-arts , ils se sentoient de la corruption oĂč ils Ă©toient dĂ©jĂ tombes chez les Grecs. Les plans des temples , des théùtres , et des autres Ă©difices qui ont ete inventes dans les beaux jours de la GrĂšce , sont toujours faciles ; toutes les parties qui les composent, semblent se prĂ©senter dâelles-mĂ©mes , telles quâelles sont ; tant la combinaison de leur arrangement est aisĂ©e Ă saisir ; et cette facilitĂ© dĂ©coule le plus souvent de la simplicitĂ© , au point quâon pourroit prendre lâun de ces deux termes pour' lâautre. Quoique les plans de ces divers Ă©difices offrissent toujours la forme la plus convenable â Ă lâusage auquel ils Ă©toient destinĂ©s , ils Ă©toient mĂ©thodiques ; câest-Ă -dire , conformes aux rĂšgles de lâart rĂšgles qui avoient Ă©tĂ© trouvĂ©es par les Egyptiens , et que les Grecs suivirent, en cherchant a sâattribuer la gloire de leur invention. La plupart de ces rĂ©glĂ©s sont fondĂ©es sur le bon sens et la raison , câest-Ă -dire sur la nature des choses , aussi - bien que sur une longue expĂ©rience , ainsi que nous le verrons ailleurs. Ceci amĂšne deux observations; lâune que si lâarchitecte a dessein de plaire aux connoisseurs, il ne r doit pas blesser leur amour-propre, en contrariant, sans aucun mĂ©nagement, les idĂ©es quâils ont adoptĂ©es et Ă©rigĂ©es en prĂ©cepte ; la seconde quâil seroit bien Ă©tonnant que des rĂšgles qui ont pour elles lâautoritĂ© de tous les grands hommes qui nous ont prĂ©cĂ©dĂ©s dans la mĂȘme carriĂšre , et depuis tant de siĂšcles ne fussent pas les plus avantageuses et les plus sages Ă suivre. 11 est difficile de croire quâune mĂ©thode ainsi Ă©tablie ne soit pas au fond la meilleure ; et si elle ne lâĂ©toit pas , il nây auroit guĂšre moins de mal-adresse et de tĂ©mĂ©ritĂ© Ă la nĂ©gliger, sur-tout dans les cas ordinaires, et sans de grandes prĂ©cautions , puisquâil est vrai quâen gĂ©nĂ©ral le temps et lâusage donnent enfin Ă une pratique , quelle quâelle soit, une forme presquâĂ©gaĂźe Ă la nature. Pour ĂȘtre autorisĂ© Ă sâĂ©carter dâune mĂ©thode gĂ©nĂ©ralement adoptĂ©e et suivie , il faudroit pouvoir y en substituer une autre qui fĂ»t essentiellement et Ă©videmment plus parfaite ; mais depuis le siĂšcle de PĂ©riclĂšs , oĂč sont les hommes privilĂ©giĂ©s Ă qui ce talent crĂ©ateur est rĂ©servĂ© ? Un grand avantage que lâarchitecture a sur les autres arts , et qui offre une grande facilitĂ© aux artistes , c est que toutes les rĂ©glĂ©s qui Ă©tablissent et font rĂ©gner les diverses qualitĂ©s qui contribuent a la beaute de ses ouvrages , ont toutes ete trouvĂ©es et sont Ă©tablies par des principes immuables 1 architecte nâa plus quâa les Ă©tudier et les appliquer aux divers bĂąlimens quâil veut construire. La plupart de ces qualitĂ©s sont aussi nĂ©cessaires dans les productions des autres arts ; mais aucune rĂšgle ceitaine ne dnige 1 ai liste ; son geme seul peut les dĂ©couvrir et en faire lâapplication. Il nâen est pas de mĂȘme pour lâarchitecture les rĂšgles les plus prĂ©cises Ă©tablissent, dans les formes et les grandeurs, les divers rapports qui donnent Ă ses ouvrages toutes les qualitĂ©s dont nous venons de parler , et leur impriment ce caractĂšre de perfection que lâon doit aux anciens. On trouve toutes ces rĂšgles dans lâouvrage de Vilruve. Les troisiĂšme, quatriĂšme , cinquiĂšme et sixiĂšme livres, nous montrent, dans le plus grand dĂ©tail, les rapports de grandeurs quâil doit y avoir, enfin la hauteur, la largeur et la longueur dâun Ă©difice ; le rapport que lâĂ©tendue de ces parties principales ont avec les moindres, tels que lĂšs entre-colonnemens, la hauteur des colonnes, des enta- blemens, etc. , ramenant toutes ces parties Ă lâunitĂ© par des plans simples et mĂ©thodiques. Certains Ă©difices , comme les temples , avoient diffĂ©rentes formes chez les anciens les rĂšgles et les mesures pour les construire Ă©toient fixĂ©es et tellement prĂ©cises quâon ne pouvoit sâĂ©carter en rien des principes Ă©tablis. Il en Ă©toit de mĂȘme pour les théùtres. Aussi Vilruve , tant pour les uns que pour les autres, entre dans les plus grands dĂ©tails. Lâarchitecte nâavoit, pour ainsi dire, quâĂ copier en suivant exactement ce que lâauteur prescrivoit. Les autres Ă©difices , tels que les palais , les maisons de campagrfe , etc. , laissent un peu plus Ă faire au gĂ©nie de lâarchitecte les principes lui sont dictĂ©s , il est vrai , mais il doit en faire lâapplication , suivant lâĂ©tendue , la forme et lâusage de ces divers bĂąlimens , oĂč lâensemble , la mesure , lâunitĂ© et lâordre doivent se trouver comme dans les temples. On pourroit donc dire quâon entend par lâordonnance, la conception gĂ©nĂ©rale de tout lâouvrage ; car en ordonnant un Ă©difice , pour quâil forme un tout bien proportionnĂ© , il faut arrĂȘter 1 .° la grandeur que chaque partie doit avoir ; 2 .° les disposer dâune maniĂšre commode et agrĂ©able ; 3,° faire que - cet arrangement produise un bel effet, par lâaccord des parties entre elles , de sorte, par exemple , que la partie droite ressemble Ă la gauche ; 4.° que le tout soit bien proportionnĂ© ; 5.° que toutes ces parties soient arrangĂ©es dâaprĂšs les rĂšgles de la convenance , de la raison et de lâhabitude ; 6.° comme on ne peut faire ces choses sans matĂ©riaux , il faut quâon se les procure avec le moins de dĂ©penses quâil sera possible ; on peut dire , en dâautres termes , que comme tout cela doit se faire dans un espace donnĂ© , dont la forme et lâĂ©tendue sont arrĂȘtĂ©es par les rĂšgles de lâart, on doit Ă©conomiser son terrain , ou pour parler comme Vitruve , sa quantitĂ© , de maniĂšre que toutes ces parties sây trouvent placĂ©es convenablement dans une grandeur suffisante , et former un ensemble qui ait toutes ses proportions. La connexion de toutes ces choses est donc bien visible. Il est impossible de faire lâordonnance dâun Ă©difice sans les avoir en mĂȘme temps toutes prĂ©sentes Ă lâesprit. Ainsi jâai raison de dire que par lâordonnance , on peut entendre la conception gĂ©nĂ©rale de tout lâouvrage , et câest assez lâacception quâon donne Ă ce mot , lorsquâil sâagit de lâarchitecture ; par la quantitĂ© , comme nous. lâavons dit , on entend la portion de grandeur que contient chaque partie tant en longueur , largeur , quâĂ©paisseur. PoĂŒr proportionner entre elles et avec le tout , ces parties de diffĂ©rentes grandeurs , on se sert dâune mĂȘme mesure , qui est une grandeur prise dans une partie de lâouvrage. Câest presque toujours le diamĂštre ou le demi-diamĂštre de la colonne. Câest ce quâon nomme le module. . De la Disposition. Dans lâarchitecture , le mot disposition a une signification qui lui est particuliĂšre , puisquâil exprime celte partie de lâart qui enseigne comme il faut placer chaque chose selon sa qualitĂ©. Par exemple 20 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. que le fĂ»t de la colonne soit sur la base , le chapiteau sur le fut , et 1 entablement sur les chapiteaux , etc. On entend aussi par ce mot , la distribution que lâon fait des diffĂ©rentes grandeurs ou quantitĂ©s , quâon dispose de maniĂšre quâelles produisent un effet agrĂ©able. Partant, en donnant Ă ce mot une signification plus Ă©tendue, et le prenant dans toute la force du terme , c est la disposition , c est lâarrangement que lâarchitecte fait , dâaprĂšs les rĂšgles contenues dans ce chapitre , des diffĂ©rentes parties qui doivent composer lâĂ©difice quâil a conçu, pour ne former quâun seul tout. On voit que , du temps de "Vitruve , on reprĂ©sentoit, ou on faisoit connoĂźtre ses idĂ©es Ă cet Ă©gard de trois maniĂšres ; câest-Ă -dire par trois sortes de plans , qui sont, Ă quelques diffĂ©rences prĂšs, les mĂȘmes que ceux dont nous nous servons aujourd'hui, savoir, par lâichno graphie , par lâorthographie et par la scĂ©nographie. 1. ° Lâiclinographie , câest ce que nous appelons le plan terrestre ou planimĂ©lrique, qui reprĂ©sente en petit les fondemens de lâĂ©difice, avec leurs proportions, tels quâils doivent se trouver sur le terrain. On les rĂ©duit Ă ces petites proportions par le moyen dâune Ă©chelle , ou ligne divisĂ©e , dont les parties reprĂ©sentent les mesures dont on se servira pour les tracer sur le terrain , comme toises , pieds , pouces , etc. 2. ° Lâorthographie , câest ce que nous nommons lâĂ©lĂ©vation gĂ©omĂ©trale cette espĂšce de dessin reprĂ©sente en petit une des faces de lâĂ©difice , avec toutes ses proportions rĂ©duites par le moyen dâune Ă©chelle. Il nâindique aucune Ă©paisseur , et sans le secours de quelques ombres que "Vitruve indique sans doute par les mots modiaque picta qui dĂ©signent les parties saillantes , ils ne reprĂ©sentoient quâune supĂȘrficie plane. Toutes les lignes perpendiculaires de lâĂ©difice, Ă©loignĂ©es ou rapprochĂ©es du mĂȘme plan , nâont toutes pour base quâune seule ligne droite ; et les lignes horizontales , quoique saillantes, de ce mĂȘme plan , sont par-tout paralelles Ă cette mĂȘme ligne de base. Cette maniĂšre de dessiner ne rend pas , Ă beaucoup prĂšs, la nature , aussi bien que la perspective car il est impossible quâun grand objet , comme un Ă©difice , paroisse Ă lâoeil tel quâelle le reprĂ©sente mais elle a deux grands avantages pour lâarchitecture câest que dâabord , il est bien plus aisĂ© dâen faire un dessin , que de le mettre en perspective ; ensuite on y trouve toujours ses grandeurs et ses mesures , avantage que nâa pas le dessin en perspective , parce quâelles y varient Ă proportion de lâĂ©loignement Ăź. 5.° La scĂ©nographie , câest ce que nous nommons le plan perspective. If fixe la place des objets en supposant lâillusion qui rĂ©sulte des distances. Par-consĂ©quent il reprĂ©sente les objets visibles comme ils paroissent Ă lâĆil, dans un tableau, que, pour cette fin, lâon suppose transparent et ordinairement perpendiculaire Ă lâhorizon , et placĂ© entre lâoeil et lâobjet. Cette reprĂ©sentation se fait en tirant, de tous les points de lâobjet jusquâĂ lâĆil, des rayons qui rencontrent le plan du tableau en des points qui font les apparences ou reprĂ©sentations de ceux de lâobjet 2. ^ itruve , dans ce chapitre , a 1res â bien defini la perspective 5 il en parle encore dans lâintroâ diction du septiĂšme liYie, ou il dit, que Democnte et Anaxagore ont Ă©crit sur ce sujet et dĂ©mon- 1 Les figures qui reprĂ©sentent lâĂ©lĂ©vation des temples dans les planches Y , Yll , Y111 , sont des plans orthographiques. 2 Les figores 3 de la planche 1Y , sont des plans scĂ©nographiqties ou perspectives. 21 LIVRE I, C H AP. II. trĂ© comme il falloit faire les dĂ©corations des théùtres 1 , ce qui prouve Ă©videmment que les anciens en connoissoient les rĂšgles. Jâai vu Ă Parme , dans un des cabinets de lâacadĂ©mie , un tableau peint sur plĂątre ; il avoit Ă©tĂ© sciĂ© hors dâun mur des ruines de Velleya_, ville Ă sept lieues de Plaisance , qui fut engloutie , Ă ce quâon croit, quelque temps aprĂšs le rĂšgne de Constantin. Ce tableau reprĂ©sente un jardin dĂ©corĂ© de berceaux entreillĂ©s. Les rĂšgles de la perspective y sont aussi exactement suivies quâon le feroit de nos jours. Quelques personnes ont prĂ©tendu, sans aucun fondement, quâau lieu de scĂ©nographie il falloit lire sciographie ce qui ne peut pas ĂȘtre , car la sciographie veut dire la reprĂ©sentation des ombres, chose que Vitruve a dĂ©jĂ indiquĂ©e, en parlant cle lâorthographie , lorsquâil dit, que câest un dessin un peu colorĂ© , câest-Ă -dire ombrĂ©. Dâautres ont cru quâil entendoit par la scĂ©nographie , lâespĂšce de dessin que nous appelons en francois la coupe , que nous avons imaginĂ© pour reprĂ©senter lâintĂ©rieur dâun bĂątiment , quâon suppose pour cela coupĂ© du haut en bas , par un plan perpendiculaire. Rien de ce que dit Vitruve ne semble indiquer cette sorte de dessin. Il est nĂ©anmoins de la plus grande utilitĂ© dans lâarchitecture. Il paroĂźt que les anciens nâen faisoient pas usage , Ă moins que Vitruve ne le comprenne aussi dans lâorthographie. Nous ignorons si les anciens dessinoient leurs plans de la mĂȘme maniĂšre que nous dessinons les nĂŽtres. Jâai tout lieu dâen douter, aprĂšs avoir vu le plan de la ville de Rome, qui fut trouvĂ© dans le temple de Romulus. Ce plan est gravĂ© sur de grands carrĂ©s de pierre liburtine. Il formoit le pavĂ© de ce temple. Les fragmens quâon en a pu recueillir ont Ă©tĂ© incrustĂ©s dans les murailles de lâescalier qui conduit dans les apparlemens du palais des conservateurs au capitole , oĂč on les voit prĂ©sentement. M. Jean-Pierre Belloni lâa fait connoĂźtre dans un ouvrage quâil a Ă©crit sur ce sujet , et quâil a publiĂ© depuis quelques annĂ©es. Câest un plan planimĂ©trique , ou ichnograpliique , comme les appelle Vitruve. Les murs extĂ©rieurs et intĂ©rieurs des Ă©difices y sont dĂ©signĂ©s par un simple trait, et les oolonnes par un point ; ainsi lâĂ©paisseur des murailles et autres maçonneries nây est pas indiquĂ©e. Outre ces trois maniĂšres de reprĂ©senter un Ă©difice , les anciens se servoient aussi du modĂšle en' relief. Pline Liv. XXXV. Ch. 45. dit que les modĂšles dâArcĂ©silas Arcesilai proplcismatci se vendoient beaucoup plus cher que ceux des auires artistes , et que PraxitĂšle ne faisoit aucun ouvrage sans auparavant en avoir fait un petit modĂšle, en relief. Ce modĂšle pour lâarchitecture reprĂ©sente , en petit , la figure de lâĂ©difice avec toutes ses proportions , ^de sorte quâon le voit en petit tel quâil sera en grand. On les exĂ©cute avec de la cire , du plĂątre \ du bois , ou du carton. Cette mĂ©thode est de la plus grande utilitĂ© pour un architecte , parce quâelle lui donne la facilitĂ© de faire comprendre ses idĂ©es aux personnes qui ne commissent pas le dessin , et qui ne sont pas habituĂ©es aux plans ordinaires. Ceux-ci sont Ă la portĂ©e de tout le monde , et conviennent beaucoup , sur-tout pour les ouvriers. i Aulugelle parle aussi de la perspective dans ses Nuits Attiques, Liv. XVI, Ch. 22 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Michel-Ange avoit exĂ©cutĂ© , de la sorte , le modĂšle de la chapelle de S.* Laurent , destinĂ©e a recevoir les tombeaux de tous les MĂ©dicis. Jâai vu ce modĂšle Ă Florence , oĂč il est conservĂ© dans cette meme chapelle. Ce grand homme employoit souvent cett© mĂ©thode. On mâa dit quil s en Ă©loit servi, entrâaulres , pour lâĂ©glise de S. Pierre du Yatican. De / â Eurythmie. Câ EST dommage que nous avons adoptĂ© si lard , dans notre langue , le mot dâeurythmie , qui exprime si bien toute la magnificence de lâarchitecture. Il est compose des deux mots grecs dâĂ©u et de puĂŽpcc. Eu Ă©toit le cri dâacclamation et dâadmiration des Grecs, lorsquâils trouvoient quelque chose de beau l. PufycoV appartient particuliĂšrement Ă lâharmonie; il signifie accord harmonie 3 nombre } justesse 3 rime 3 cadence y en un mot , tout ce qui se fait par un certain ordre , et par une proportion qui donne de la grĂące aux choses. Câest comme si 1 on disoit dans 1 admiration en voyant un bel Ă©difice Quel ordre ! Quelle prĂ©cision ! Quel ensemble ! il exprime lâĂ©motion , le ravissement , en un mot , toutes les sensations quâĂ©prouve un homme de goĂ»t , la premiĂšre fois quâil voit un beau morceau dâarchitecture , tel que la façade du Louvre , ou au moment quâil entre dans la cour de la basilique de S. Pierre du Yatican. Les anciens entendoient sur-tout par lâeurythmie , le rapport et la ressemblance , que la -moitiĂ© dâun bĂątiment a avec lâautre moitiĂ© , ce qui est imitĂ© de la nature , et sur-tout de la figure humaine , dâoĂč lâon a pris toutes les idĂ©es de lâarchitecture ; car, dans lâhomme la partie gauche ressemble Ă la droite. Il en est de mĂȘme de tous les ĂȘtres animĂ©s, et mĂȘme des feuilles et des fleurs. Nous avons , trĂšs-improprement , nommĂ© cela symĂ©trie , comme nous allons le voir. Par lâeurythmie , on nâentendoit pas seulement le rapport que la partie gauche dâun bĂątiment avoit avec la droite , on entendoit toute espĂšce de paritĂ© ou dâanalogie , comme celui que les parties basses avoient avec les hautes ; celles de devant avec celles de derriĂšre , en grandeur , en figure , en hauteur , en couleur , en nombre , en situation , et gĂ©nĂ©ralement en tout ce qui peut les rendre semblables les unes aux autres. Câest assez ce que nous nommons rĂ©gularitĂ© , mais il me semble que les mots françois qui conviendroient le mieux pour rendre celui dâEurythmie , seroient ceux dâaccord ou dâharmonie des rapports. De la Proportion . Nous avons adoptĂ© dans notre langue , le mot symĂ©trie , mais nous lui avons donnĂ© une toute autre acception que celle quâil doit avoir, et diffĂ©rente de celle quâil a en grec et en latin car nous appelons symĂ©trie , la ressemblance que la partie gauche dâun bĂątiment a avec la droite ; câest prĂ©cisĂ©ment ce que les Grecs et les Latins nomment eurythmie , tandis que par symĂ©trie ils entendent la proportion. SymĂ©trie est composĂ© des deux mots grecs cruv , qui signifie avec et de jxerpov , mĂštre , mesure ; câest ce que nous appelons , faire une chose sur , ou avec une mĂȘme Ă©chelle. Jâai donc traduit le mot symĂ©trie par celui de proportion. i Eu ctoit le cri d'acclamation des Bacchantes chez les Grecs , comme Etoe lâe'toit chez les Romains, LIVRE I, ChaĂŻ. ii. 2 3 "* âą Vitruve se sert aussi du mot proportion mais lorsquâil sâen sert, il entend ce quâon appelle en mathĂ©matique , Raison , qui est le rapport ou la relation dâune quantitĂ© avec une autre. Il existe deux maniĂšres de comparer deux grandeurs diffĂ©rentes ; la premiĂšre , en considĂ©rant de combien lâune surpasse lâautre , câest ce qui sâappelle Raison arithmĂ©tique. La seconde en examinant comment lâune contient lâautre, câest ce qui sâappelle Raison gĂ©omĂ©trique par exemple , si je considĂšre que 6 surpasse deux de 4 > cette comparaison des nombres 6 et 2 est une -raison arithmĂ©tique. Si je considĂšre dâun autre cĂŽtĂ© que 6 contient fois, cette comparaison est une raison ou rapport gĂ©omĂ©trique. La premiĂšre se trouve par la soustraction , et la seconde par la division. Il y a deux termes dans toute raison , soit arithmĂ©tique soit gĂ©omĂ©trique , XantĂ©cĂ©dent et le consĂ©quent y lâantĂ©cĂ©dent est celui qui est comparĂ© Ă lâautre 5 le consĂ©quent est celui auquel lâantĂ©cĂ©dent est comparĂ©. Dans lâexemple proposĂ© , 6 est lâantĂ©cĂ©dent , et 2 est le consĂ©quent. Les proportions viennent des raisons , puisque deux raisons Ă©gales forment une proportion par exemple , les raisons arithmĂ©tiques de 5 Ă 3 et de 8 Ă 6 Ă©tant Ă©gales , elles forment une proportion arithmĂ©tique. La raison gĂ©omĂ©trique de i 5 Ă 5 Ă©tant Ă©gale Ă celle de 21 Ă 7 , ces deux raisons forment une proportion gĂ©omĂ©trique. Ainsi il y a quatre termes dans toutes proportions 5 savoir lâantĂ©cĂ©dent et le consĂ©quent de la premiĂšre et de la seconde raison. On voit clairement par les deux passages de Vitruve , oĂč il se sert du mot proportio , quâil a entendu par ce mot, les raisons mathĂ©matiques que nous venons de dĂ©finir. Dans la premiĂšre de ces phrases, il dit Ordinatio est modica membrorum operis commoditas , separatirn unipersĂŠque proportionis , ad symetriam comparatio 1J y dans la seconde , il dit aussi Proportio est ratce partis membrorum in omni opĂ©rĂ© totiusque commodulatio , ex qua ratio efficitur symetriarum 2. La fin de ces deux phrases prouve Ă©videmment , que par symĂ©trie , il entendoit ce que nous appelons proportion , et que par le mot proportio il entend ce que nous appelons en mathĂ©matique une raison , puisquâil dit que câest dâelle que vient la symĂ©trie ; câest pourquoi jâai toujours rendu Je mot symetria > par celui de proportion , et celui de proportio 3 par le mot françois rapport. Les deux mots , symetria et proportio , se trouvent trĂšs-rarement dans les auteurs latins qui nous restent. Pline qui Ă©crivoit 70 ans aprĂšs Vitruve dit que , de son temps , la langue latine nâavoit pas de terme propre , pour exprimer le mot grec symetria y ce mot Ă©toit donc purement grec du temps de Vitruve , puisquâil nâĂ©toit pas encore latinise lorsque Pline Ă©crivoit. Ce qui nous prouve de plus , combien peu les arts Ă©toient alors cultivĂ©s par les Romains 3 leur langue manquoit de terme propre , pour exprimer une chose sur laquelle reposent, pour ainsi dire , toutes les rĂšgles de lâart. CicĂ©ron, pour exprimer la proportion , se sert du verbe commetiri dâoĂč est dĂ©rivĂ© commelisus , dont Vitruve se sert dans le premier chapitre du troisiĂšme livre. Les artistes appellent encore aujourdâhui proportion dans les ouvrages de lâart lâanalogie , ou le rapport dâune grandeur avec une autre 5 cette analogie est fixĂ©e par la nature , comme sont celles 1 Vit. Liv. 1. Ch. 2 . nation toute guerriĂšre ne sâoccupoit quâau mĂ©tier des armes. Les ouvra- âą 2 Vit. Liv. 111. Ch. 1 . ges dâart , dans les premiers temps de Borne , y Ă©toient exĂ©cutes par 3 Les beaux-arts Ă©toient connus Ă Rome dĂšs son origine ; mais la des artistes Etrusques ou Grecs. 4 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. qui composent la figure humaine. La tĂȘte, disent-ils, est proportionnĂ©e avec le corps, la main avec le bras ; celte diffĂ©rence de grandeur entre la main et le bras doit toujours etre la meme dans tous les hommes bien faits , quelle que soit leur taille ; en parlant comme les mathĂ©maticiens , ce rapport de la grandeur de la main avec celle du bras , ou de la grandeur de la lele avec celle de tout le corps , ce nâest quâune raison, puisquâil nây a que deux termes, la grandeur de la main qui est lâantĂ©cĂ©dent, et celle du bras qui est le consĂ©quent. Pour quâil y ait proportion dans le sens que les mathĂ©maticiens donnent Ă ce mot, il faudroit quâil y eut deux raisons Ă©galĂ©s par exemple, dans tous les hommes bien faits , quelle que soit leur taille , la diffĂ©rence de grandeur entre la main et le bras , entre la tĂȘte et le reste du corps , doit toujours ĂȘtre la mĂȘme. Mais la grandeur de la tĂȘte et de tout le corps variera dâaprĂšs la stature plus ou moins grande de chaque individu , et câest le rapport de proportion qui se trouve entre un petit homme et un grand, qui forme, suivant les mathĂ©maticiens , la vĂ©ritable proportion ; parce quâil y a 4 termes , la tĂȘte a du petit homme qui est lâantĂ©cĂ©dent, et son corps qui est le consĂ©quent b, la tĂȘte du grand c et son corps d; a b c d. Les artistes distinguent donc deux sortes de proportions. Par la premiĂšre , ils entendent celle qui se trouve entre le tout et ses parties , et celle que les parties ont entrâelles ; par la seconde , ils entendent celle qui se trouve entre des figures semblables , dont les unes sont plus petites et les autres plus grandes. La premiĂšre de ces proportions est dĂ©terminĂ©e par la nature, et par les rĂšgles de lâart 5 lâautre est relative. Pline attribue Ă Euplianor de lâisthme de Corinthe , qui florissoit dans la cent quatriĂšme olympiade 1 , lâinvention de la proportion prise dans celte derniĂšre acception n. Pour rendre la chose plus sensible , je vais appliquer aux beaux-arts la dĂ©finition que je viens de faire. Dans la statue dâun homme , si elle est bien proportionnĂ©e , la longueur de la tĂȘte qui lui sert ordinairement de module sera Ă©gale Ă la huitiĂšme partie de toute la statue. Ceci concerne la premiĂšre espĂšce de proportion. Quâon suppose Ă prĂ©sent deux statues , dont lâune a huit pieds de haut, et lâautre huit pouces pour quâelles soient bien proportionnĂ©es lâune et lâautre, il faudra que la tĂȘte de celle qui a huit pieds de haut, soit grande dâun pied; et que celle qui nâa que huit pouces, le soit dâun pouce seulement on voit que chacune de ces statues ont leur mesure ou leur Ă©chelle particuliĂšre , qui sert Ă mesurer tout lâouvrage , dont lâune est le pied et lâautre le pouce. 11 en est de mĂȘme dâune colonne pour que son fĂ»t soit bien proportionnĂ© ; si elle est ionique , il doit avoir huit diamĂštres de haut , mais ce diamĂštre peut ĂȘtre de deux pieds , de trois pieds , etc. Dans le premier cas le fĂ»t doit avoir seize pieds de haut, et dans le second vingt-quatre , etc. ; du reste cette dĂ©finition est assez subtile , puisquâil y a beaucoup de connesion entre ces mots qui signifient tous deux le rapport dâune grandeur avec une autre. Mais lâune est le rapport de grandeur que les parties ont entrâelles et avec le tout, et lâautre est le rapport de grandeur qui se trouve entre ces mĂȘmes grandeurs et celles dâun ouvrage semblable , qui est fait sur une Ă©chelle plus petite nu plus grande. Câest trĂšs-improprement que nous avons appelĂ© en françois symĂ©trie , lâĂ©galitĂ© et la paritĂ© qui se rencontrent entre les parties opposĂ©es , ce qui est lâeurythmie. Par exemple si un Ćil est plus {» Pline, llr- XXXV, Ch. 3G. . 2 pi; ne , Li v . XXXIV , Ch. , 9 . haut LIVRE I, C h a p. iĂŻ. liaut ou plus gros que lâautre, si les colonnes sont plus serrĂ©es Ă droite quâĂ gauche 3 et si Je nombre et la grandeur nâen est pas pareille , on dit que câest un dĂ©faut dâeurythmie, suivant les anciens, ou de symĂ©trie, comme nous entendons ce mot au lieu que si un chapiteau est plus grand, ou quâune corniche ait plus de saillie que les rĂšgles de lâordre, dont est la colonne, ne le demandent, câest un dĂ©faut de symĂ©trie, suivant les anciens, ou de proportion, suivant nous. Mais comme nous lâavons dit, la proportion symetria contribue beaucoup Ă lâeurythmie, puisque la beautĂ© dâun Ă©difice dĂ©pend surtout de lâharmonie des rapports qui se trouve entre les diverses grandeurs de toutes ses parties. Le module, comme nous lâavons dĂ©jĂ dit est une mesure prise sur un des membres de lâouvrage qui sert Ă le rĂ©gler en entier ; la tĂȘte est le module sur lequel on rĂšgle, comme dit Vitruve , les proportions dâune figure humaine. Depuis que lâarchitecture grecque a repris parmi nous, nous nâavons cessĂ© de prendre pour module le diamĂštre , ou le demi-diamĂštre de la colonne. Il paroĂźt aussi que du temps de Vitruve on lui donnoit la prĂ©fĂ©rence ; mais il nâen Ă©toit pas de mĂȘme dans les plus anciens temps de lâaYchitecture, comme on le remarque aux temples de Pestum la longueur, la hauteur et les autres proportions de ces temples sont rĂ©glĂ©es, non par le diamĂštre de la colonne , mais par la largeur mĂȘme du temple. Vitruve rĂšgle aussi les proportions des temples , dâaprĂšs leur largeur. On verra ci-aprĂšs, Liv. III. Ch. 3, comment le triglyphe les rĂšgle aussi $ et dans le 17. m * Cbap. du X. me livre , on verra comment le trou de la baliste rĂšgle ses proportions ; celles des navires chez les Grecs et les Romains se lâĂ©gloient dâaprĂšs leur largeur, ou parla distance qui se trouvoit dâune rame Ă une autre, qui varioit, Ă proportion de la grandeur ou delĂ petitesse de la galĂšre. Le mot grec qui, suivant Vitruve, exprimoit cette distance, signifie deux cubes, soit parce que les bancs, sur lesquels les rameurs Ă©toient assis, avoient la forme dâun cube , soit parce que lâon sup- posoit que la distance qui sĂ©paroit deux rameurs qui Ă©toient. sur un des cĂŽtĂ©s du navire des deux qui leur correspondoienl sur lâautre cĂŽtĂ© , Ă©toit Ă©gale Ă deux cubes parfaits , placĂ©s lâun contre lâautre sur la ligne quâon suppose le diviser en deux parties Ă©gales dans toute son Ă©tendue , et dont deux rameurs auroient Ă©tĂ© placĂ©s aux deux angles extĂ©rieurs de chacun, contre le bord du navire , tellement que câĂ©toit dâaprĂšs la largeur du navire , quâon rĂ©gloit la proportion de sa longueur et toutes les autres ; comme encore aujourdâhui, câest sur le maĂźtre bau qui traverse le vaisseau dans toute sa plus grande largeur , quâon rĂšgle ses proportions. On verra ci-aprĂšs , Liv. IV , Ch. 3 , que les Grecs nommoient le module Eâp&ĂąTyg. Ce mot,pris Ă la lettre, signifie une chose qui marche, qui entre , parce que le module est censĂ© entrer dans toutes les parties , et se promener sur tout lâĂ©difice , âąpuisque câest lui qui rĂšgle toutes les grandeurs. De la BiensĂ©ance. Ln-mot latin dĂ©cor signifie ce qui convient, ce qui est suivant la dĂ©cence , lâusage et la coutume, dâoĂč nous avons pris en fĂšançoisdei mot dĂ©corum , qui a le mĂȘme sens quâen latin ; on en a pris encore le mot dĂ©corer , parce'que dĂ©cor signifie aussi la beautĂ©, lâagrĂ©ment qui rĂ©sulte de la i Ă©gularitĂ© des traits et de la bonne conformitĂ© du corps. Mais en françois, on nâa pas donnĂ© Ă ce verbe un sens aussi Ă©tendu que celui quâil a en latin ; onTa restreint Ă ce qui concerne lâordre et lâarrangement quâon met dans la distribution des, ornemens qui servent Ă embellir un lieu, un bĂątiment , etc. Le mot dĂ©coration ne convenoil pas du tout j jâai donc dĂ» substituer ceux de biensĂ©ance ou convenance, 26 LâARCHITECTURE DĂ VITRUVE. 1 ~ ~ qui sont plus gĂ©nĂ©riques et qui rendent mieux toute la signification du mot latin. Perrault Ăź avoit aussi traduit par le mot biensĂ©ance. ' Toute lâarchitecture est fondĂ©e sur deux espĂšces de principes , dont les uns sont positifs et les autres arbitraires. Les principes positifs , et desquels on nâa jamais pu sâĂ©carter , sont ceux pour lesquels lâĂ©difice est bĂąti ; tels que son usage , son utilitĂ© , et ceux qui tiennent Ă son essence et Ă la nĂ©cessitĂ© , tels que la soliditĂ© , la salubritĂ© , et la commoditĂ© une partie de ceux qui contribuent Ă sa beautĂ© et Ă lâagrĂ©ment, telles que les proportions qui ont Ă©tĂ© prises sur celles du corps humain , sont aussi positifs. Quant aux autres qui forment aussi la beautĂ© de lâarchitecture , ils sont arbitraires , en grande partie , et ils lâĂ©toient presque tous dans les premiers temps de lâarchitecture ; ils ne sont devenus stables et invariables que par la longue habitude que lâon a eue de toujours sâen servir et de voir les choses exĂ©cutĂ©es dâaprĂšs eux ; cependant plusieurs choses sont restĂ©es arbitraires dans lâarchitecture , comme dâorner de sculpture les diffĂ©rentes moulures , les frises, etc., de creuser ou de ne pas creuser des cannelures dans les colonnes , le choix de diffĂ©rens ordres pour les temples. Lorsque Yitruve dit , que la convenance exige que tout ce qui se voit dans un Ă©difice , y soit tellement correct quâil ne sây trouve rien qui ne soit fondĂ© et approuvĂ© par quelque autoritĂ© il entend que tout y soit exĂ©cutĂ© dâaprĂšs ces principes. Une partie des premiers sont tirĂ©s des lois de la nature ; câest dâeux que dĂ©pend la soliditĂ© du bĂątiment câest pourquoi ils sont invariables. Par exemple , il est nĂ©cessaire que les parties inferieures soient plus fortes que les parties supĂ©rieures , puisquâelles doivent porter tout le reste , aussi les fait-on plus massives , tels sont les cubes solides des. stylobales qui portent les colonnes , et le fĂ»t mĂȘme de la colonne , qui sâĂ©lĂšve dans une proportion plus solide jusquâau tiers de sa hauteur. Les deux autres sont attĂ©nuĂ©s. Lâart imite en cola la nature, puisque les troncs des arbres sâĂ©lĂšvent Ă peu prĂšs dans cette proportion ; ils sont plus gros vers les racines , et diminuent vers le haut, oĂč ils commencent Ă poitcr des branches. Comme il existe trois maniĂšres de bĂątir, savoir la solide, la moyenne et la dĂ©licate, lesquelles sont parfaitement exprimĂ©es par les trois ordres grecs , lorsque dans un Ă©difice on Ă©lĂšve plusieurs ordres les uns au-dessus des autres , comme au théùtre de Marcellus , ou au ColisĂ©e, le premier qui sert de base Ă tout lâĂ©difice, et qui doit porter tous les autres, doit ĂȘtre dâordre dorique , comme le plus solide de tous. Le second doit ĂȘtre ionique , parce que cet ordre lient le milieu entre la sĂ©vĂ©ritĂ© du dorique et la dĂ©licatesse du corinthien qui , pour cette raison , doit ĂȘtre Ă©levĂ© au-dessus de tous. Câest ainsi quâils sont distribuĂ©s dans le ColisĂ©e, Une autre partie de ces principes est tirĂ©e de lâusage pour lequel le bĂątiment est destinĂ© ; câest- la raison et les lois de la nĂ©cessitĂ© qui les ont dictĂ©s. Par exemple les toits doivent ĂȘtre en pente pour lâĂ©coulement des eaux ; et la corniche de lâentablement doit avoir une grande projection en avant pour en garantir les galeries ou les murailles. Le plan dâun temple est autre que celui clâune basilique , dâun théùtre , dâune habitation , parce que leurs usages sont diffĂ©rens. Ces divers bĂątimens se construisent sur des plans qui leur sont particuliers, conformes Ă leur destination et consacrĂ©s par lâhabitude ; lâarchitecte ne peut sâen Ă©carter. Ces diffĂ©rentes formes quâon donne Ă chaque espĂšce dâĂ©difices, nâont pas Ă©tĂ© trouvĂ©es dâabord ; ce nâest quâaprĂšs une longue expĂ©rience que les anciens ont connu ce qui Ă©toit le mieux et lâont approuvĂ©. Il y a toujours la plus grande tĂ©mĂ©ritĂ© de chercher a vouloir leur donner une nouvelle forme. II en est de mĂȘme pour lâentablement que Yitruve LIVRE I, Ch a,p. ii. 27 nomme en latin les dĂ©corations de lâarchitecture elles sont une vĂ©ritable reprĂ©sentation des parties nĂ©cessaires daus la construction dâun Ă©difice , comme Vitruve nous lâapprend , dans le chapitre 2 du livre IV. 6 Lâarchitrave reprĂ©sente une poutre qui seroit posĂ©e sur le sommet de plusieurs troncs dâarbres qui sont reprĂ©sentĂ©s par les colonnes ; les triglyphes reprĂ©sentent les extrĂ©mitĂ©s des poutres qui portent le plafond , les mutuĂźes , lâextrĂ©mitĂ© des forces, etc. Il en est de mĂȘme pour les proportions. La peinture et la sculpture , qui sont des arts dâimitation , ont trouvĂ© les leurs dans la nature. Câest aussi dâaprĂšs celle de lâhomme , que lâarchitecture a pris les siennes ; mais elle fut obligĂ©e de les chercher par une infinitĂ© de raisonnemens et de combinaisons , et ne les a fixĂ©es quâĂ la suite de lâapprobation. Quelques parties , il est vrai, sont restĂ©es arbitraires dans lâarchitecture , comme dâorner ou de ne pas orner, de sculpture, certaines parties mais encore cela est-il soumis Ă certaines rĂšgles car si lâon dĂ©core de sculpture certaines parties , il faut alors que dâautres le soient aussi ; et il faut que plusieurs de ces sculptures correspondent entrâelles. Quelques parties de lâarchitecture ont mĂȘme un genre de sculpture qui leur est propre , tel que lâove qui est rĂ©servĂ©e Ă lâĂ©chine ou quart de rond en un mot , tout dans lâarchitecture est fondĂ© sur des rĂšgles , et ces rĂšgles nâont Ă©tĂ© Ă©tablies quâaprĂšs des recherches infinies , et une âlongue suite dâapprobations. Les juges Ă©toient les anciens Grecs nos maĂźtres , ainsi que ceux des Romains , pour les arts. Ils con- noissoient bien mieux que nous en quoi consiste la vĂ©ritable beautĂ© ; aussi devons-nous nous en rapporter Ă ce quâils ont trouvĂ© et dĂ©cidĂ© , et câest avec raison que lâarchitecte romain dit , que tout ce qui se voit dans un Ă©difice 3 y doit ĂȘtre tellement correct , qu s il ne sây trouve rien qui ne soit fondĂ© et approuvĂ© par quelqu 3 autoritĂ©. Il veut mĂȘme que lâhabitude soit une loi , et par consĂ©quent quâon ne transporte pas Ă un ordre , les ornemens qui sont propres Ă un autre , parce que , dit-il , on nâest pas accoutumĂ© de voir les choses ainsi. Les plus grands maĂźtres se sont nĂ©anmoins quelquefois Ă©cartĂ©s de cette rĂšgle. Personne ne lâa fait davantage que le Bernin dans la magnifique galerie qui entoure la place de lâĂ©glise de S.* Pierre du Vatican j les colonnes , qui sont dâordre dorique , portent un entablement ionique. Les anciens ont aussi pris cette licence, puis quâau théùtre de Marcellus , il se trouve des denticules au dessus des triglyphes dans lâentablement qui est dâordre dorique ; cela nâa rien de choquant , et Vitruve a raison de dire quâil nây a que lâhabitude qui nous fait exĂ©cuter exclusivement ces choses. Jâajouterai avec Perrault , quâaccoutumĂ© de voir ces choses ainsi exĂ©cutĂ©es dans des ouvrages qui ont dâailleurs tant dâautres beautĂ©s fondĂ©es sur la vĂ©ritable raison, on les aime par compagnie. De la Distribution. Il est probable que , du temps de Vitruve , on nâavoit pas encore adoptĂ© , dans la langue latine , le mot Ćconomia y qui est tirĂ© du grec oĂźnoç maison , et de vopoç loi, maniĂšre , rĂšgle ; de ces deux mots on a fait oĂźnovofuci qui signifie , dans cette langue , le goirvernement et la conduite de la -maison , ou la disposition de quelque chose que ce soit, ou enfin lâĂ©conomie , dans le sens que nous avons donnĂ© Ă ce mot, en lâadoptant dans la nĂŽtre j câest dans ce sens que Vitruve sâen sert ici, et il le traduit en latin par celui de distribution. On trouve le mot Ćconomia 4- ; i 28 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. dans Quinte-Curee , et on sait quâil Ă©crivoit sous le rĂšgne de Vespasien ou sous celui de Claude, par consĂ©quent aprĂšs Vitruve. Je ne sache pas quâon le trouve dans ceux qui ont Ă©crit antĂ©rieurement. Je ne sais pourquoi Vitruve nâa pas aussi compris sous cet article lâĂ©conomie du terrain ou lâart de le mĂ©nager 5 il lâa compris, il est vrai, dans lâordonnance, lorsquâil parle de la distribution de la quantitĂ© ; mais on pourroit dire quâen cela il y auroit connexion entre lâordonnance et la distribution. Les architectes ne sauroient faire trop dâattention aux conseils quâon leur donne dans ce chapitre sur le choix et lâemploi des matĂ©riaux ; le deuxiĂšme livre est entiĂšrement consacrĂ© Ă traiter de cette matiĂšre. Malheureusement les maçons de ce pays ne les suivent guĂšre ; non plus que le conseil quâil donne de laver le sable de mer dans lâeau douce, lâemployer cette prĂ©caution est^abso- lument nĂ©cessaire pour obvier au dĂ©faut dont il parle dans le Ch. 4 du Liv. Il, qui est, que le mortier quâon en fait , ne peut sĂ©cher Ă cause du sel qui sây trouve , mais qui en sort en le lavant. Il faudroit avoir la mĂȘme prĂ©caution Ă lâĂ©gard du sable que lâon tire de la terre, pour le purger de toutes les parties terreuses j par lĂ le mortier en vaudroit beaucoup mieux le sable le plus pur Ă©tant le meilleur. Voyez Ă cet Ă©gard le 4. e Ch. du II. e Liv. . Telle est lâexplication que jâai cru pouvoir donner Ă ce chapitre qui traite jdes six parties dans lesquelles Vitruve fait consister jxmte la science de lâarchitecture cette division, comme je lâai dit, est trĂšs - subtile ; il faut toute lâintelligence possible pour les distinguer , Ă cause de la connexion quâil y a entrâelles , au point quâelles semblent ne faire quâune mĂȘme chose 5 car elles tendent Ă©galement au mĂȘme but , qui est de rendre un Ă©difice parfait dans tous les sens et de toutes les maniĂšres. Tous ceux qui ont Ă©crit sur Vitruve , avouent que ce chapitre est des plus difficiles Ă expliquer. Henri Voton prĂ©tend que le texte est corrompu dans cet endroit. Philander lâa trouvĂ© si embrouillĂ© quâil 11âa pas osĂ© tenter de lâexpliquer. Barbaro et Scamozzi ont fait tous leurs efforts pour Ă©claircir ' ce passage ; ils entrent dans une infinitĂ© de distinctions et de subdivisions qui nâĂ©claircissent pas beaucoup la matiĂšre. Barbaro avoit cru en faciliter lâintelligence avec le secours dâune table. Bernardo Galliani en a aussi fait une Ă son exemple mais je crois quâil est trĂšs-inutile de les copier, dâautant quâelles ne facilitent pas beaucoup lâintelligence du texte. r / ItVVWIMMMMHMimM/WIMVkVM ». LIVRE I, C h a p. ni. 2t aise. mor- ant. 1 ; ger k\ r Ă©lan! us les-j ai dit, i nqui ientent ! raiĂšres. iquer, ' ouille aircir eau- ' i rdo tant. ; Des parties de ĂŻarchitecture qui concernent la distribution des Ă©difices publics et particuliers. Lâarchitecture se divise en trois parties , qui sont la construction des bĂątimens ; la gnomonique et la mĂ©canique. Il existe deux sortes de constructions celle qui regarde les remparts et les autres ouvrages publics , et celle qui concerne les maisons particuliĂšres. Il existe trois sortes dâouvrages publics ; ils sont consacrĂ©s Ă la sĂ»retĂ©, Ă la piĂ©tĂ© , ou Ă lâutilitĂ© du peuple. Les bĂątimens, qui sont faits pour la sĂ»retĂ©, sont les remparts , les tours, les portes des villes , et tout ce quâon invente pour servir continuellement de dĂ©fense contre les entreprises de lâennemi. La piĂ©tĂ© des peuples fait Ă©lever , en divers endroits , des temples aux dieux immortels, Câest pour lâutilitĂ© du peuple quâon entreprend tous les Ă©difices qui sont Ă son usage , comme les ponts , les marchĂ©s publics , les portiques , les bains , les théùtres et les promenoirs. Dans tous les Ă©difices , il faut toujours que la soliditĂ© , lâutilitĂ© et la beautĂ© sây rencontrent. Pour la soliditĂ© , il faut sur-tout sâattacher aux fondemens quâon doit creuser jusquâau solide , et les bĂątir des meilleurs matĂ©riaux quâon pourra trouver , sans rien Ă©pargner. LâutilitĂ© veut que lâon dispose lâĂ©difice de maniĂšre que rien nâempĂȘche son usage ; que chaque chose soit Ă sa place ; et que tout ce qui lui est propre et nĂ©cessaire sây trouve. La beautĂ© dâun bĂątiment sera parfaite , si les justes proportions de toutes ses parties rendent sa forme Ă©lĂ©gante et agrĂ©able Ă la vue. REMARQUES . Dans le premier chapitre de ce livre , Yitruve fait connoĂźtre toutes les sciences qui contribuent Ă lâarchitecture, et quâun architecte doit savoir. Daps le second, il divise les parties qui la composent j. et dans le troisiĂšme il parle des diffĂ©rens arts que devoit exercer de son temps lâarchitecte , et qui Ă©toient attribuĂ©s Ă sa profession. C-âĂ©toit, i. a lâart de bĂątir proprement dit ; 2. 0 lâart de faire des gnomons , câest-Ă -dire des cadrans ^solaires et des horloges 5 5.° lâart des mĂ©caniques. Je conviens que les divisions , contenues dans ces trois chapitres , sont trĂš 6 -subtiles ; mais ceux qui ont Ă©tudiĂ© les anciens Grecs dans lâhistoire et leurs ouvrages , ou qui auront mĂȘme connu les Grecs modernes, nâen seront pas surpris. Ces sortes de subtilitĂ©s leur sont habituelles», 11 nây a donc rien dâĂ©lonnant quâun architecte romain, qui avoit puisĂ© toute la science de son art chez les Grecs, nâait pris un de leurs dĂ©fauts. 3 o LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. On sera peut-ĂȘtre Ă©tonnĂ© que la gnomonique , qui nâest autre chose que lâart de faire des cadrans solaires , soit mise au nombre des principaux attributs de la profession de 1 architecte. Mais si on rĂ©flĂ©chit combien il est important, dans la vie civile, de connoĂźtre comment s Ă©coulĂ© le temps, d aprĂšs les divisions que nous avons Ă©tablies, et quâon nâavoit alors dâautres moyens pour cela, que le secours des cadrans , et celui des horloges Ă lâeau , ou de sable , on sera persuade que 1 utilitĂ© de ce talent lui a fait donner plus dâimportance quâil ne mĂ©rite. Quoique Vilruve parle ici de la gnomonique et des mĂ©caniques , comme de deux arts particuliers que doit professer lâarchitecte , ils doivent aussi etre comptes dans le nombre de ceux qui contribuent Ă lâarchiieciure , et dont elle ne peut se passer, non plus que des autres dont il parle dans le premier chapitre. Il fait voir lui-meme dans le 6. me chapitre de ce livre combien la gnomonique lui est utile , et tout le monde connoĂźt la nĂ©cessitĂ© des mĂ©caniques pour les machines , du secours desquelles on ne peut se passer pour les constructions. Dans ce chapitre , Yitruve fait encore le sommaire de tout son ouvrage ; il le divise en trois parties , dont chacune contient ce qui concerne un des trois arts que doit pratiquer lâarchitecte. Ainsi la premiĂšre regarde la construction des bĂątimens ; il en traite dans les huit premiers livres. La seconde , la gnomonique , câest-Ă -dire le cours des astres , la confection des cadrans et des horloges alors connues et en usage ; il en traite dans le neuviĂšme livre. La troisiĂšme , les mĂ©caniques dont les principes sont applicpiĂ©s aux machines de guerre 1 et Ă celles qui servent Ă la construction des Ă©difices ; il en traite dans le dernier livre. La partie qui concerne la construction des bĂątimens est partagĂ©e en deux ? savoir celle des bĂątimens particuliers et celle des Ă©difices publics. On trouvera , dans le sixiĂšme livre , tout ce qui a rapport Ă lâhabitation des particuliers. Quant aux Ă©difices publics , ce sujet est encore partagĂ© en trois ; lâun appartient aux fortifications ou Ă la sĂ»retĂ© des villes ; il en traite dans le cinquiĂšme chapitre de ce livre j lâautre , Ă la religion, câest-Ă -dire aux temples ; le troisiĂšme et le quatriĂšme livre lui sont consacrĂ©s. La troisiĂšme aux Ă©difices qui sont pour la commoditĂ© du public ; il en traite amplement dans les cinquiĂšme et huitiĂšme livres. x Trois qualitĂ©s sont encore inhĂ©rentes Ă tous les bĂątimens câest la soliditĂ© , lâutilitĂ© ou la commoditĂ© , et la beautĂ© ; il traite de la soliditĂ© dans le onziĂšme chapitre du sixiĂšme 'livre 5 de lâutilitĂ© dans le septiĂšme chapitre du sixiĂšme livre ; et de la beautĂ© dans tout le septiĂšme livre , du moins, pour tout ce qui regarde les ornemens de peinture et de sculpture. Quant Ă la proportion , qui est le principal fondement de la beautĂ© , tous les endroits de son ouvrage traitent de cette partie. Nous pouvons ajouter , pour appliquer les termes de lâart , dont Yitruve se sert , que la soliditĂ© dĂ©pend de la distribution ; la commoditĂ© , de lâordonnance ou de la disposition ; la beautĂ© de 1 eurythmie , de la proportion et de la convenance. Voyez la fin de mes rĂ©flexions sur le second chapitre de ce livre. 1 Voyez Plutarque , vie de TirooVoa. LIVRE I, C h a p. iy. 3 c CHAPITRE I V. A .culiers ontij. 5 dans 3 DiqUf eçouK troB itecte, livres, et des mĂ«ca- iliers. liions !* on aux wi- oin- .ouiS ,qii lariie. ilidite lĂ© d De quelle maniĂšre on peut choisir un local sain . I !JĂ premiĂšre chose quâil faut faire, lorsquâon veut bĂątir une ville, câest de choisir un local sain ; pour cela , il doit ĂȘtre Ă©levĂ© , n ĂȘtre point sujet aux brouillards, ni aux bruines ; avoir une bonne tempĂ©rature dâair ; nâĂȘtre exposĂ© , ni au grand chaud, ni au grand froid ; il doit ĂȘtre Ă©loignĂ© des marais ; car lorsque le vent sâĂ©lĂšve le matin du cĂŽtĂ© oĂč ils sont , il pousse , sur les habitans , les vapeurs que le soleil levant attire des terres marĂ©cageuses , et ces vapeurs se-mĂȘlent Ă lâhaleine infecte et vĂ©nĂ©neuse des animaux quâengendrent les marais , ce qui est malsain et dangereux. Lâair ne sera jamais sain non plus dans une ville bĂątie au bord de la mer , si elle est exposĂ©e au midi, ou au couchant, parce que pendant lâĂ©tĂ©, dans des lieux ainsi exposĂ©s , le soleil est fort chaud Ă son lever , et brĂ»lant Ă midi ; et dans ceux qui sont exposĂ©s au couchant, lâair commence Ă sâĂ©chauffer dĂšs' le lever du soleil, il est chaud Ă midi , et presque brĂ»lant Ă son coucher ; ces chan- gemens subits du chaud au froid , nuisent beaucoup Ă la santĂ©. On remarque mĂȘme que cela influe sur les choses inanimĂ©es ; car puisque personne ne sâavise de faire les fenĂȘtres des celliers qui sont couverts , i du cĂŽtĂ© du midi , mais bien vers le nord , parce que le ciel , de ce cĂŽtĂ© , est moins variable ; câest pourquoi les greniers sur lesquels le soleil darde ses rayons tout le long du jour , ne conservent presque rien dans sa bontĂ© naturelle ; la viande et les fruits ne sây gardent pas long-temps. Il nâen sera pas de mĂȘme , si on les enferme dans un lieu Ă lâabri des rayons du soleil. La chaleur qui ne cesse dâaltĂ©rer toutes choses , leur ĂŽte leurs forces, par les vapeurs chaudes , qui viennent dissoudre et Ă©puiser leurs qualitĂ©s naturelles. Le fer mĂȘme , tout dur quâil est , sâamollit tellement dans les fourneaux , par la chaleur du feu , quâil est aisĂ© de lui donner la forme quâon veut ; il ne retourne Ă son premier Ă©tat , quâautant quâil se refroidit , ou quâĂ©tant trempĂ© , on lui rende sa duretĂ©. Cela est si vrai, quâil nây a personne qui nâĂ©prouve que la chaleur de lâĂ©tĂ© affoiblit le corps , non-seulement dans les lieux 0 Les anciens avoient deux sortes de cellier , les Constantin , PorphyrogĂ©nĂšte , Liv. VII , Ch. 2. de uns couverts et les autres qui ne lâĂ©toient pas ; câest Agricultura. Il dit que le vin fort doit ĂȘtre conservĂ© pourquoi Vitruve met ici lâĂ©pithĂšte tectis. Voyez Pline, dans des celliers dĂ©couverts, et le vin lĂ©ger dans des Liv. XIV. Ch. 2i. Voyez aussi lâouvrage de lâempereur celliers couverts. 32 LâARCHITECTURE DE Y I T R TJ Y E. malsains , mais mĂȘme dans ceux oĂč lâair est le meilleur ; au contraire , pendant lâhiver , lâair le plus dangereux nâest pas nuisible , parce que le froid affermit et fortifie. On remarque aussi que les hommes qui passent des rĂ©gions froides dans les pays chauds , ne peuvent y demeurer sans devenir malades ; au contraire ceux des climats chauds qui vont habiter les froides contrĂ©es du nord , bien loin dâĂ©prouver aucun mal de ce changement, s en trouvent beaucoup mieux. Il faut donc avoir lâattention , lorsquâon choisit un emplacement pour y bĂątir une ville , d Ă©viter celui oĂč les vents chauds ont coutume de souffler. Tous les corps sont composĂ©s des quatre Ă©lĂ©mens, que les Grecs appellent sot%six; savoir le feu , 1 eau , la terre et lâair ; de leur mĂ©lange , il rĂ©sulte un tempĂ©rament naturel qui fait le caractĂšre de chaque animal. Sâil arrive que la quantitĂ© nĂ©cessaire de lâun ou lâautre de ces Ă©lĂ©mens soit augmentĂ©e , ce qui a lieu, par exemple , lorsque le soleil agit sur le corps ; sa chaleur dĂ©truit et dissout alors les trois autres, fait entrer dans les veines, par les pores de la peau , qui sont ouverts , plus de chaleur quâil nâen faut pour la tempĂ©rature de lâanimal ou bien lorsquâune trop grande humiditĂ© sâinsinue dans les conduits des corps , change la proportion qu elle doit avoir avec la sĂ©cheresse , anĂ©antit toutes les autres qualitĂ©s , qui nâexistent quâautant que lâĂ©quilibre se maintient entre elles. Lâair trop humide , et agitĂ© par le vent, rend aussi le corps de lâhomme malade , par le froid quâil occasionne. La terre dĂ©truit de mĂȘme lâĂ©quilibre , en augmentant ou diminuant lâune et lâautre des qualitĂ©s naturelles du corps humain , ce qui arrive lorsquâil prend trop de nourriture solide , ou quâil respire un air trop grossier. Pour bien connoĂźtre- la diffĂ©rence des tempĂ©ramens, il faut faire attention Ă celle des animaux , et comparer les quadrupĂšdes avec les poissons et les oiseaux ; car leur composition est tout-Ă -fait diffĂ©rente. Les oiseaux ont peu de terrestre , et encore moins dâhumide , mais beaucoup dâair , joint Ă une chaleur tempĂ©rĂ©e ; cela fait quâils sâĂ©lĂšvent aisĂ©ment dans les airs , nâĂ©tant composĂ©s que des Ă©lĂ©mens les plus lĂ©gers. Les poissons ont une chaleur tempĂ©rĂ©e , jointe Ă beaucoup dâair et de terrestre , dâoĂč vient quâils vivent aisĂ©ment dans lâeau , et quâils meurent quand ils sont dehors. Les animaux terrestres , au contraire , ne peuvent vivre long - temps dans lâeau , parce que chez eux , la partie aĂ©rienne est tempĂ©rĂ©e par la chaleur , quâils ont peu de terrestre , et beaucoup dâhumiditĂ©. Si , dâaprĂšs les principes que je viens dâexposer , le corps des animaux est composĂ© de plus ou moins de ces diffĂ©rens Ă©lĂ©mens , que leur abondance , ou leur dĂ©faut soit si nuisible Ă la santĂ© , U est donc trĂšs-important de choisir les lieux les plus tempĂ©rĂ©s pour y bĂątir les tilles , afin qu elles ne soient pas sujettes Ă leur inlluence. Je ne puis quâapprouver la LIVRE I, ⏠h a p. iv. O '> OJ la mĂ©thode des anciens, Ă cet Ă©gard , lorsquâils vont oient bĂątir ou camper i dans un endroit ; ils faisoĂźent ayant tout un sacrifice , et prenoient pour victimes les animaux qui y alloient paĂźtre habituellement ; ils examinoient leur foie ; si, parmi ceux quâils avoient ouvert, ils n'en trouvoieht quâun certain nombre qui lâeussent livide et corrompu , par lâeffet de quelque maladie qui leur Ă©toit particuliĂšre , et non par la mauvaise nourriture quâils avoient prise , puisque les autres lâavoient sain et entier , par lâusage des bonnes eaux et des bons pĂąturages , ils y bĂątis- soient alors leurs villes ; mais sâils les trouvoient gĂ©nĂ©ralement gĂątĂ©s et corrompus , ils concluoient quâil en seroit de mĂȘme pour celui des hommes ; que les eaux et la nourriture nâĂ©toient pas bonnes dans ce pays-lĂ ; ils lâabaĂŒdonnoient de suite, nâapprĂ©ciant rien davantage que ce qui peut contribuer Ă la santĂ©. - La preuve quâon peut connoĂźtre la salubritĂ© dâun lieu par la qualitĂ© des herbes qui y croissent, câest ce qui se passe dans les deux contrĂ©es qui sont sur le bord du PotherĂ©. dont les eaux coulent entre inossus et Cortine dans lâĂźle de Candie. ; Des animaux paissent Ă droite et Ă gauche de cette riviĂšre ; ceux qui paissent prĂšs de Gnossus ont une rate , et ceux qui paissent de lâautre cĂŽtĂ© nâen ont pas. Les mĂ©decins ont cherchĂ© la cause de cette singularitĂ© , et ont trouvĂ© quâil croĂźt , dans cet endroit , une herbe qui a la vertu de diminuer la rate ; ils s en sont servis depuis pour guĂ©rir ceux qui en Ă©toient affectĂ©s. Câest pourquoi les Candiots nomment cette herbe WA^oy 2. Ces exemples font voir quâil existe des lieux , que la mauvaise qualitĂ© des fruits ou dĂ©s eaux , rend tout-Ă -fait malsains. On doit cependant faire une exception pour les villes qui sont bĂąties prĂšs des marais ; car lâair nây est pas , Ă beaucoup prĂšs , aussi malsain , s ils sont prĂšs de la mer , et situĂ©s au nord de la ville , ou entre le nord et le levant, sur-tout s ils sont Ă©levĂ©s au-dessus du niveau de la mer , puisquâalors on peut faire des canaux et des tranchĂ©es , pour faire Ă©couler lâeau des marais dans la mer , et y introduire celle de la mer, lorsquâelle viendra Ă sâenfler par les tempĂȘtes. Ces eaux amĂšres, mĂȘlĂ©es Ă celles des marais, empĂȘcheront qu'il nây naisse aucune espĂšce de reptiles, et feront mourir tous ceux qui sây trouvent ; nous en avons lâexpĂ©rience. Les marais qui 1 On appeloit castra stativa , chez les Romains , le lieu oĂč ils formoient un camp avancĂ© et retranchĂ© , pour la garde dâune frontiĂšre , ou dâune province nouvellement conquise , dans lequel ils entretenoient pendant trĂšs - long - temps des troupes. Voyez Nieuport. Ant. Rom. 2 Câest-Ă -dire qui consume la rate. On donne aussi Ă cette herbe le nom arabe de Ceterach et celui de Scolopendre , paxâce quâelle ressemble Ă un ver qui poçte ce nom. 5 34 L'ARCHITECTURE HE VITRUVE. sont aux environs dâAltine i , de Ravenne , dâAquilĂ©e 2 et de plusieurs endroits de la Gaule cisalpine , nâempĂȘchoient pas l'air dây ĂȘtre trĂšs - sain au contraire, lorsque les eaux des marais sont stagnantes , et ne peuvent s e'couler , Ă 1 aide dâaucune riviĂšre ou fossĂ© , comme sont les marais Pontins , ces eaux n Ă©tant pas agitĂ©es , corrompent et infectent lâair. Les habitans de Salapie 3, ville trĂšs-ancienne de la Pouille, bĂątie par DiomĂšde , Ă son retour de la guerre de Troie , ou comme dâautres croient, par Elphias Rhodien , voyant quâils Ă©ioient tous les ans attaquĂ©s de maladie , Ă cause que leur ville se trouvoit au milieu des marais de cette espĂšce, demandĂšrent Ă Hostilius , quâil leur permĂźt de la transporter dans un lieu plus commode et plus sain , tel quâil voudroit le choisir ce quâil leur accorda facilement. AprĂšs avoir examinĂ© , avec beaucoup d intelligence et de sagesse , un lieu , prĂšs de la mer , quâil jugea fort salubre , avec la permission du sĂ©nat et du peuple romain , il y bĂątit une nouvelle ville et ne fit payer aux habitans quâun seul sesterce, pour l'emplacement de chaque maison ; il fit pratiquer ensuite une ouverture Ă un grand lac , qui Ă©toit prĂšs de la ville , pour y introduire les eaux de la mer et le changer en port, de sorte que les Salapiens habitent prĂ©sentement un lieu fort sain, distant de ' quatre milles de leur ancienne ville. REMARQUES. On voit encore dans ce chapitre combien Vitruve Ă©toit attachĂ© au systĂšme des pythagoriciens , et quâil nâignoroit cependant pas ceux des autres philosophes. Gette prĂ©fĂ©rence, comme nous lâavons dĂ©jĂ dit, prouve combien il avoit le jugement bon, puisque , parmi tant dâopinions , il avoit su choisir la meilleure. Les anciens philosophes, peu instruits des secrets de la physique , nâen expliquoient les causes que par des qualitĂ©s occultes, des horreurs du vuide, des sympathies ou antipathies, des antipĂ©ris- tases , des attractions , et par une infinitĂ© dâautres termes dont lâimpĂ©nĂ©trable obscuritĂ© fait assez voir quâils cherchoient moins Ă dĂ©couvrir la vĂ©ritĂ© , quâĂ cacher leur ignorance aux yeux du public crĂ©dule. Les pythagoriciens nâĂ©toient pas exempts de ces dĂ©fauts ; câĂ©toit la maladie du temps ; leur systĂšme sur lâharmonie universelle et leur opinion mĂȘme sur les Ă©lĂ©mens , que Vitruve rapporte ici, sont de ce nombre , et câest justement pourquoi nous devons admirer , quâau milieu de ce chaos dâerreurs , ils aient dĂ©couvert tant de vĂ©ritĂ©s utiles , comme nous lâavons observĂ© dans 1 Altine , ville trĂšs-ancienne dans le TrĂ©visan , Ă trois lieues au nord de Venise , fut dĂ©truite lorsque les barbares du Nord inondĂšrent lâItalie ; les habitans se retirĂšrent alors , dans les lagunes , et les Ăźles qui sont aux environs du lieu oĂč Venise a Ă©tĂ© bĂątie. Il ne reste plus quâune tour de lâancienne ville dâAltine. 2 Ravenne , situĂ©e dans la Romagne , et AquilĂ©e dans le ĂŻrioul , Ă©toient deux villes trĂšs-anciennes ; elles acquirent le plus grand degrĂ© de splendeur et de richesse, aprĂšs que Constantin eut transportĂ© le siĂ©gĂ© de lâempire Ă Constantinople. La situation dâAquilĂ©e , entre les deux capitales , fit quâon y abordoit de tous les points de lâempire ; sa population , ses richesses et son Ă©tendue accrurent, au point, quâon lâappeloit la seconde Rome; mais elle a Ă©prouvĂ© le sort des Ă©tats les plus florissans. En 4 -Sa 1 Attila la saccagea , et en 5 go , les Lombards la ruinĂšrent de fond en comble. 3 Aujourd'hui Salpi, dans le royaume de Naples. 35 LIVRE I, C h A p. iv. nos remarques sur le second chapitre. Il est probable que la dĂ©couverte de ces vĂ©ritĂ©s avoit frappĂ© Vitruve , et lui avoit plu , et que cela lâavoit portĂ© Ă adopter leur systĂšme , et en mĂȘme- temps leurs erreurs. Si ce motif a dĂ©terminĂ© son choix , il prouve infiniment Ă son avantage. Quant aux erreurs quâil a adoptĂ©es en mĂȘme-temps , on ne peut lui en faire des reproches ; on ne savoit pas mieux alors. Nous avons vu dans les derniers siĂšcles, combien les universitĂ©s elles-mĂȘmes ont eu de peine Ă les abandonner , malgrĂ© que la vĂ©ritĂ© leur fĂ»t dĂ©montrĂ©e dans toute son Ă©vidence. Vitruve croyoit donc , avec les pythagoriciens , que tous les corps quelconques , soit quâils fussent animĂ©s ou non , Ă©toient composĂ©s de quatre Ă©lĂ©mens , qui sont , lâair , lâeau , la terre et le feu. Il fait , dans ce chapitre , lâapplication de ce systĂšme aux corps animĂ©s ; mais dans le second livre , il lâapplique Ă tous les ĂȘtres quelconques, et principalement aux matĂ©riaux quâon emploie dans la construction des Ă©difices. Je me propose , dans le cours de cet ouvrage , dâexpliquer , par les principes de notre physique moderne , les diffĂ©rens effets de la nature , dont la philosophie ancienne cherchoil Ă faire connoĂźtre les causes avec ses faux raisonnemens. Si les principes Ă©toient faux , les consĂ©quences quâils en liroient ne lâĂ©toient pas moins ; ce n J est pas , par exemple , parce que lâair et le feu dominent dans la composition des oiseaux , ni mĂȘme Ă cause de la lĂ©gĂšretĂ© de leurs corps quâils sâĂ©lĂšvent si aisĂ©ment ; mais bien par la grandeur et la force de leurs ailes. Cela est si vrai, quâun coq dâinde qui a de la peine Ă sâĂ©lever de terre , nâest pas plus pesant quâun aigle qui vole si haut et si aisĂ©ment, quâil peut mĂȘme enlever dâautres animaux avec lui ; il est cependant vrai que la chair et les os des oiseaux sont plus lĂ©gers que ceux des animaux terrestres. Il tire une pareille consĂ©quence pour expliquer pourquoi les poissons vivent dans lâeau , opinion, quâil avoit puisĂ©e dans EmpĂ©docle , et quâĂristote a rĂ©futĂ©e dans le livre oĂč il traite de la respiration. Si les poissons vivent dans lâeau, et ne peuvent vivre long-temps dehors, ce nâest pas Ă cause des Ă©lĂ©mens dont ils sont composĂ©s , mais parce quâils sont conformĂ©s pour cela 5 nâĂ©tant pas destinĂ©s Ă vivre dans lâair , ils nâont pas de poumons. Leurs ouĂŻes et leurs branchies leur en tiennent lieu , et sont les organes de leur respiration ; car ils ont besoin dâair pour vivre, et ils sont construits de maniĂšre Ă pouvoir extraire , de lâeau, lâair nĂ©cessaire Ă leur respiration. Les ouĂŻes des poissons sont des espĂšces de feuillets composĂ©s dâun rang de lames Ă©troites, rangĂ©es et serrĂ©es lâune contre lâautre, qui forment comme autant de barbes ou franges quâon peut appeler proprement le poumon des poissons. Ces ouĂŻes sont recouvertes dâun couvercle qui sâĂ©lĂšve et qui sâabaisse, et qui, en sâouvrant^ donne passage Ă lâeau que lâanimal a respirĂ© un nombre prodigieux de muscles fait mouvoir toutes ces parties. Le poisson avale lâeau continuellement par la bouche câest son aspiration câest dans ce passage que le sang sâabreuve dâair. Le sang qui sort du cĆur du poisson se rĂ©pand de telle maniĂšre , sur toutes les lames dont les ouĂŻes sont composĂ©es , quâune trĂšs-petite quantitĂ© de sang se prĂ©sente Ă lâeau , sous une trĂšs-grande superficie , afin que , par ce moyen , chacune de ces parties puisse plus facilement , et en moins de temps, ĂȘtre pĂ©nĂ©trĂ©e de petites particules dâair qui se dĂ©gagent de 1 eau, par lâextrĂȘme division quâelles souffrent, entre ces lames. On conçoit que des ĂȘtres , si bien organisĂ©s pour vivre dans lâeau, ne le sont pas du tout pour vivre dans lâair ; sa chaleur et sa sĂ©cheresse dĂ©truisent bientĂŽt le froid et lâhumiditĂ© qui leur est naturelle et nĂ©cessaire, sur-tout dans des parties aussi minces que le sont les fibres des branchies; 5 . 36 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. comme elles sont le principal mobile de la circulation du sang , elle se trouve arrĂȘtĂ©e , et il faut que le poisson meure. Dans plusieurs contrĂ©es de lâItalie , lâinfluence du mauvais air sây fait sentir dâune maniĂšre bien cruelle. Le teint livide et la figure hĂąve ou boursoufflĂ©e des malheureux habitans , annonce aux voyageurs ces lieux iriforlunĂ©s , sur lesquels la mort fait continuellement agir sa faux meurtriĂšre. Certains quartiers de la ville de Rome, entrâautres ceux du Yalican et de la TrinitĂ© du mont, ne sont pas exempts de ses funestes effets qui ont rendu presque dĂ©sertes les plaines qui se trouvent entre Viterbe et celte ville. Lâon a vu souvent tous les habitans abandonner leurs villes, et chercher un emplacement plus salubre , pour y en bĂątir des nouvelles , et y transporter leur demeure, i Dans un tel pays il est de la plus grande importance , avant dâentreprendre aucune construction dâĂ©difice , de choisir un lieu qui soit sain. Comme Vitruve ne destine pas seulement son architecte Ă construire des habitations et des Ă©difices publics mais quâil, veut quâil soit capable de flĂ tir des villes entiĂšres, ce qui arrivoit plus souvent alors que de -nos jours il sâattache principalement Ă lui recommander de sâassurer , avant tout, de la salubritĂ© de lâair, comme je viens de le dire. Lâeffet du mauvais air , en Italie , est tel , que des pays entiers , comme une partie de la çampagne de Rome , sont entiĂšrement dĂ©peuplĂ©s. Les vapeurs pestifĂ©rĂ©es que le soleil lire des eaux croupissantes des marais pontins et que certains vents chassent de ce cĂŽtĂ©, rendent lâair si malsain, quâil est impossible dây demeurer long-temps, sans tomber malade. Tous ceux qpi sont obligĂ©s dâhabiter ces contrĂ©es , sont Ă©crouelleux , sujets aux obstructions et aux fiĂšvres. On ne sauroit franchir , avec trop de rapiditĂ© , cet espace oĂč la mort semble avoir Ă©tabli son empire. Malheur Ă celui dont la paupiĂšre se fermeroit pendant ce dangereux trajet ; elle pourroit bien sâĂ©tre fermĂ©e pour toujours. Lâaspect livide de ceux que le besoin et lâhabitude fixent sur cette contrĂ©e , atteste assez son insalubritĂ©. Leur existence languissante nâest , pour ainsi dire , quâune mort plus ou moins prolongĂ©e. Aussi , ne reneonire-t-on guĂšre dâautres habitations que celles qui sont destinĂ©es au service de la poste , et quelques auberges. Ces marais commencent au pont dâAslura, oĂč CicĂ©ron fut dĂ©capitĂ©. Ils rĂ©gnent le long de la cĂŽte jusquâĂ Terracine , aux confins du royaume de Naples ; ils ont 2i milles romains dâĂ©tendue, câest-Ă -dire environ 8 ,lieues de France; en quelques endroits ils ont trois lieues de large; ils sont traversĂ©s , dans toute leur longueur, par la voie Appienne. Lâorigine de leur existence se perd dans, la nuit des temps dĂšs le temps de la rĂ©publique , on les dĂ©signoit indistinctement par les dĂ©nominations ager pontinus , palus ponĂŒna y et les vingt-trois villes , qui, autrefois , avoient dĂ©corĂ© sa surface 1, ne vivoieni plus que dans le souvenir des Romains, Depuis long-temps ils auroient empoisonnĂ© Rome, si les vapeurs pestilentielles, qui sâen exhalent, nâeussent Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©es par les forĂȘts qui abritent les villes de Cisterra et de Sermonelta. Les empeieuis, les rois, les papes surâtout, ont fait tous les efĂźoris, et employĂ© tous les moyens possibles pour rendre Ă lâagriculture ces vastes terrains; tout, jusquâĂ prĂ©sent,âa Ă©tĂ© inutile. Le pape Pie VI est cependant parvenu , avec des travaux immenses , Ă dĂ©couvrir la voie Appienne qui traverse ce marais , et qui Ă©toit couverte dâeau. Il lâa rendue Ă son ancien usage. Je lâai suivie en allant de Ă Naples. 0 Câest ce qui est arrive' Ă S. f Lorenzo , prĂšs du lac de BolsĂšne ; sur la montagne, les habitans abandonnĂšrent lâancienne ville pour en bĂątir une nouvelle 2 Pline , Liv. III. Ch. 5. / LIVRE I, G h a p. H HĂšre w Ăšre, ^ »esj reni^ *ni*i âą.s coDstre; »n ait! paWe princif m de rlle de deseifl 1 malsai liges, d'y roit 1» ur Ă cefc mĂ©e pii Ăste ass- oins j» iii serrici fui fe ; ik Ă» ils oi r^ine t dĂ©sii est 5 S ! 1 ĂźulilO' J ien» f P suivi 4 C H A P I T R E V. Des fondemens des Murs et des Tours. Lorsque, dâaprĂšs ces principes que je viens dâĂ©tablir, on se sera assurĂ© de la salubritĂ© d'un emplacement, pour y bĂątir une ville , si les autres avantages sây trouvent rĂ©unis , tels que lâabondance des fruits qui peuvent croĂźtre dans les environs, pour fournir la nourriture aux habitons; la commoditĂ© des chemins, des riviĂšres, des ports de mer , pour y apporter et faire venir toutes les choses nĂ©cessaires ; il faudra travailler aux fondemens des tours et des remparts , de la maniĂšre suivante. Il faut creuser , sâil se peut, jusquâau solide , et dans le solide mĂȘme , autant qu il est nĂ©cessaire , pour soutenir le poids des murs , Ă proportion de leur pesanteur. On emploie , pour les fondemens , la pierre la plus dure quâon peut trouver , et on leur donne plus de largeur que la muraille nâen doit avoir au-dessus du rez- de - chaussĂ©e. * Les tours doivent s'avancer hors des murs , afin que , lorsque lâennemi sâen approche, celles qui sont Ă droite et Ă gauche, lui donnent dans les flancs. Il faut rendre difficile lâapproche des murs , les environner de prĂ©cipices, et faire en- sorte que les chemins , qui conduisent aux portes , ne soient pas droits , mais quâils tournent Ă la gauche de la porte CG ; par ce moyen , les assiĂ©geans prĂ©senteront , Ă ceux qui sont sur la muraille , le cĂŽtĂ© droit , qui nâest pas couvert du bouclier. La figure dâune place ne doit ĂȘtre ni carrĂ©e , ni composĂ©e dâangles trop avancĂ©s ; sa forme doit ĂȘtre ronde , afin que lâennemi puisse ĂȘtre dĂ©couvert de plusieurs endroits. Les angles avancĂ©s ne conviennent pas pour la dĂ©fense, et sont plus favorables aux assiĂ©geans quâaux asssiĂ©gĂ©s. ** Il convient que les murailles AA soient assez Ă©paisses , pour que deux hommes armĂ©s venant Ă se rencontrer , puissent passer aisĂ©ment et sans gĂȘne. Pour consolider cette Ă©paisseur , il faut placer , de travers, de grands pieux dâolivier, un peu hrĂ»lĂ©s , mis les uns prĂšs des autres, afin que les deux paremens de la muraille ainsi joints , comme par des ciels , et tirants , aient une fermetĂ© qui soit de longue durĂ©e ; car les vers nâattaquent jamais ce * Planche l. re fig. i. ** Planche I. re fig. 2. 38 LâARCHITECTURE DE VĂTRUVE. bois , ainsi prĂ©parĂ© , et il ne se corrompt pas , tel vieux qu il puisse eti e ; il peut mĂȘme demeurer toujours dans la terre et dans lâeau , sans se gĂąter. Cette pratique doit avoir lieu , non seulement , pour la construction des murs , mais meme pour les fondemens ; et si, pour dâautres Ă©difices que les remparts , on a besoin dâune muraille fort Ă©paisse , il faudra aussi sâen servir ; car par le moyen de cette liaison, ils dureront fort long-temps. * La distance DD entre les tours , doit ĂȘtre tellement compassĂ©e , quelle ne soit pas plus longue que la portĂ©e des traits de flĂšche ; afin que les assiĂ©geants , en cas dâattaque, soient repoussĂ©s, Ă droite et Ă gauche , par les scorpions et les autres machines , qui servent Ă lancer des traits. Il faut, de plus , du cĂŽtĂ© de lâintĂ©rieur, arrĂȘter le mur Ă la rencontre de chaque tour , et que lâintervalle EE ** soit de toute lâĂ©paisseur de la tour. Pour communiquer dâun mur Ă lâautre FF, et traverser ces intervalles , on emploie des solives posĂ©es sur les deux extrĂ©mitĂ©s , sans les attacher avec du fer ; afin que si lâennemi se rend maĂźtre de quelque partie du mur , les assiĂ©gĂ©s puissent ĂŽter ce pont de bois ; sâils le font promptement , lâennemi , qui occupe une partie du rempart , ne pourra passer dans les autres quâen se prĂ©cipitant du haut en bas. Les tours doivent ĂȘtre rondes , ou Ă plusieurs pans , parce que celles, qui sont carrĂ©es, sont bientĂŽt dĂ©truites par les machines de guerre ; les bĂ©liers en rompent trop aisĂ©ment les angles ; tandis que, lorsquâelles sont rondes, les pierres, dans lâintĂ©rieur, Ă©tant taillĂ©es comme des coins, elles rĂ©sistent mieux aux coups qui ne peuvent que les pousser vers le centre. Mais rien ne rend ces remparts si fermes , que lorsque les murs , tant des courtines que des tours, sont soutenus par de la terre ; alors ni les bĂ©liers , ni les mines, ni toutes les autres machines , ne peuvent les Ă©branler ; cependant ces terrasses ne sont nĂ©cessaires, quâautant quâil se trouve quelquĂ©minence assez prĂšs des murs, pour que les assiĂ©geans puissent sâen servir , pour entrer de plein pied. *** Pour faire ces terrasses , il faut dâabord creuser des fossĂ©s fort profonds et trĂšs-larges au fond ; dans ces mĂȘmes fossĂ©s, on doit encore creuser les fondemens du mur , auquel on doit donner , en lâĂ©levant, une Ă©paisseur suffisante pour soutenir la terre ; en avant de ce mur , il faut en bĂątir un autre GG , Ă une distance suffisante , pour faire une terrasse capable de contenir ceux qui doivent la dĂ©fendre , comme sâils Ă©toient rangĂ©s en bataille ; de plus , entre ces deux murs , il est nĂ©cessaire dâen Ă©lever plusieurs autres HH, qui aillent de lâun Ă lâautre , disposĂ©s comme les dents dâune scie ou * Planche I. re fig. 2, ** Planche l. re fig. 2. *** Planche I. re fig. 2. LIVRE I, C h A p. v. 3 9 dâun peigne ; par ce moyen , la terre sĂ©parĂ©e en plusieurs parties , par ces petits murs , aura moins de force et de poids pour pousser les murailles. Je ne puis dĂ©terminer quels matĂ©riaux on doit employer pour la construction des murs , parce quâon ne les trouve pas par tout, comme on pourroit les dĂ©sirer ; il faut donc employer ceux qui se rencontreront sur les lieux , soit pierres de taille ou gros cailloux, ou le moelon , la brique cuite ou non cuite. On ne trouve pas, par tout, le bitume en abondance , comme Ă Babylone , oĂč on lâemploie au lieu de mortier , pour bĂątir les murailles de briques ; mais chaque pays produit diffĂ©- rens matĂ©riaux , qui ont chacun leurs propriĂ©tĂ©s ; il ne sâagit que de les choisir , et lâon parviendra Ă faire des constructions qui dureront Ă jamais. REMARQUES. La fortification Ă©toit peu de chose dans son origine ; comme on ne craignoit alors que lâinsulte des bĂȘtes sauvages et des voleurs , on nâavoit dâautre fortification que de simples haies. Alexandre le Grand trouva les Hircaniens et les Mardiens fortifiĂ©s de celle maniĂšre 1 et de nos jours encore , les habitans des Ăźles de la mer du sud nâen ont pas dâautres , comme nous lâapprend la relation du capitaine Cook. On se fortifia ensuite de murailles , parce que ces haies Ă©toient faciles Ă couper. Lorsque lâambition vint Ă croĂźtre , ceux qui voulurent dominer sur les autres , trouvĂšrent bientĂŽt le moyen de franchir ces foibles dĂ©fenses ; on y ajouta encore un fossĂ© ; en faisant ce fossĂ©, on Ă©leva en mĂȘme- temps un rempart derriĂšre lequel lâassiĂ©gĂ© se mettoit pour Ă©carter lâennemi Ă coups de traits. Lâennemi ne pouvant surmonter ces obstacles , rĂ©solut dâessuyer quelques coups de flĂšche , de passer le fossĂ© et de se loger au pied de la muraille , dâoĂč lâassiĂ©gĂ© ne le pouvoit plus chasser , quelque quantitĂ© de pierres quâil jeta pour lâincommoder ; parce quâil se couvroit de son bouclier , en le soutenant sur sa tĂȘte. Cette manoeuvre obligea ceux du dedans de faire des embrasures dans les murs, pour empĂȘcher, Ă coups de flĂšches , que lâennemi ne les pĂ»t attaquer car de quelque cĂŽtĂ© quâil vĂźnt , lâarbalĂšte lâincommodoit nĂ©anmoins , le pied des murs Ă©toit encore sans dĂ©fense , et lâennemi se logeoit entre les deux embrasures les plus proches. On imagina alors de faire des tours rondes, ayant leurs embrasures de tous cĂŽtĂ©s , quâon plaça aux extrĂ©mitĂ©s des murs , pour empĂȘcher lâennemi de se loger dans les embrasures , et pour le battre de flanc , lorsquâil tentoit lâescalade 5 elles servoient aussi Ă augmenter le front des assiĂ©gĂ©s. Lâinvention des bĂ©liers nâapporta aucun changement Ă la maniĂšre de fortifier ces machines ne se mouvoient quâĂ force de bras, et ceux qui les servoient Ă©toient assez Ă©loignĂ©s du mur , pour ĂȘtre vus de flanc par les deux tours voisines de celle quâon Ă©branloit. II nâexistoit pas dâautre fortification du temps de Vilruve 5 il en dĂ©veloppe tous les principes dans ce chapitre 5 elle nâa guĂšre changĂ© jusquâĂ lâĂ©poque de la dĂ©couverte de la poudre Ă canon qui occasionna une rĂ©volution gĂ©nĂ©rale , et changea absolument le systĂšme des fortifications. Avant cette Ă©poque , des murailles un peu Ă©paisses suffisoient pour rĂ©sister aux efforts 1 Quinte-Curce ? Liv. VI. Ch. 5. \ 40 LâUICIUTECTURE DE V I T R U V E, des bĂ©liers , et des autres machines de guerre de simples tours , dont Ă©toiĂšnt flanquĂ©es ees murailles , et dâoĂč lâon lançoit des flĂšches sur les assiĂ©geans, empĂȘchoient lâapproche. En i38o , sous le rĂšgne de Wenceslas, fils de Charles IV , un religieux de 1 ordre de S. 1 François } nommĂ© Berthold Schwartz , de Fribourg en Brisgau , trouva, dit-on , la poudre Ă canon, en cherchant , par la chimie, la pierre philosophale il en montra le premier usage aux YĂ©niliens, qui Ă©toient alors en guerre avec les GĂ©nois. Pour battre les places , on inventa les canons , dont lâexĂ©cution furieuse renversoit et foudroyoit ces foibles murs. Ceux qui se virent attaquĂ©s avec ces Ă©tonnantes machines , furent obligĂ©s de mettre un bon rempart derriĂšre leurs murailles , et de faire ces mĂȘmes murailles beaucoup plus Ă©paisses quâauparavant. Cette maniĂšre de fortifier auroit subsistĂ© long -temps ; mais elle avoit un dĂ©faut essentiel les tours rondes avoient un endroit en forme de triangle qui ne pouvoit ĂȘtre vu de ceux du dedans, et que lâennemi affectoit de battre , parcequâil Ă©toit Ă lâabri du feu de la mousquelerie , et elierclioit Ă sây loger Ă couvert des coups de lâassiĂ©gĂ© , qui ne pouvoit le voir dans cet endroit. Us y ouvroient des chemins couverts , pour pĂ©nĂ©trer dans la place , ou ils y pratiquoient des mines. Pour obvier Ă ce dĂ©faut, on remplit cet endroit dĂ©fectueux de bonne terre , laquelle Ă©tant soutenue par un bon mur , formoit deux pointes qui regardoient la campagne , comme aujourdâhui les faces dâun bastion , et couvroit cet endroit. , ** Lâennemi alors commença, avant toute autre chose , par attaquer ces deux faces, de maniĂšre que lâassiĂ©gĂ© se vit obligĂ© dâajouter encore des flancs Ă ces faces , pour meure des canons dessus , et empĂȘcher que lâennemi ne fĂźt plus tant de mal aux faces. Câest de celte maniĂšre que les bastions furent inventĂ©s et remplacĂšrent les tours. - Pour consolider les murailles, Yitruve conseille de placer , de distance en distance, plusieurs rangs de piĂšces de bois dâolivier qui la traversent de part et dâautre ; celte maniĂšre de bĂątir Ă©toit en usage dans les plus anciens temps. CâĂ©toit ainsi quâĂ©toient bĂąties les murailles du parvis du temple de Salomon. 1 CĂ©sar dit que les Gaulois bĂątissoient ainsi leurs murs. Ceux de PersĂ©polis Ă©toient aussi traversĂ©s de piĂšces de bois de cĂšdre , ce qui fut cause , suivant Quinte-Curce , quâil fut plutĂŽt rĂ©duit en cendres , lorsquâAlexandre , noyĂ© dans lâivresse , fit brĂ»ler cette superbe ville , par complaisance pour une courtisane. 2 Comme lâobserve trĂšs-bien Galliani, il nâexiste aucun fragment de tours antiques, qui offre quelques secours , pour faciliter lâintelligence du passagĂ« de Yitruve , oĂč il parle de leur construction. Tous les monumens antiques de ce genre , qui existent encore , sont antĂ©rieurs ou postĂ©rieurs au temps oĂč Ă©crivoit Yitruve. Les plus anciens de tous, sont les murs de clĂŽture du carrĂ© de la ville de Pestum , avec les quatre tours des angles ; ils ne ressemblent en rien Ă ce que dit Yitruve ; mais ils sont dâune antiquitĂ© si reculĂ©e et si Ă©loignĂ©e des temps oĂč Ă©crivoit notre auteur , quâils ne peuvent servir dâexemple. Galliani critique beaucoup le plan et la description que Perrault a donnĂ©s des j Liv. des Rois. Liy. 111. Ch. 6. v. 36. Ăź Quinte-Curce , Liv. Y. murs LIVRE I, Coap. u . 4^ les fortifians. Ces maladies , causĂ©es par le froid , sont les plus difficiles Ă guĂ©rir ; leur longue durĂ©e diminue les forces des malades auxquels les vents sont extrĂȘmement contraires , parce quâen Ă©puisant leurs forces et en exprimant , pour ainsi dire, les sucs de leur corps affoibli, ils les extĂ©nuent de plus en plus ; au lieu quâun air plus doux et plus grossier , qui nâest pas agitĂ© , les fortifie , les nourrit , et rĂ©tablit leurs forces. * Plusieurs personnes ne comptent que quatre vents , qui sont ; le Solanus , qui souffle du cĂŽtĂ© du levant ; lâEuster du cĂŽtĂ© du midi ; le Favonius du cĂŽtĂ© du couchant ; et le Septentrion du cĂŽtĂ© du nord i. Ceux qui ont fait plus de recherches sur les vents , en ont trouvĂ© huit ; particuliĂšrement Andronic Cyrrhestes 2 , qui fit bĂątir pour cela, Ă AthĂšnes , une tour de marbre , de figure octogone ; chacune de ses faces reprĂ©sentait lâimage dâun des vents , Ă lâopposite du lieu dâoĂč il souffle ordinairement ; et sur la tour, qui se terminoit en pyramide , il plaça un triton dâairain , qui tenoit une baguette Ă la main. La machine Ă©toit ajustĂ©e de maniĂšre , que , le triton tournant, se tenoit toujours opposĂ© au vent qui souffioit, et lâindiquoit avec sa baguette. Les quatre autres vents sont, lâEurus , qui est entre le Solanus et lâAuster au levant dâhiver ; Africus , entre Auster et Favonius, au couchant dâhiver ; Caurus , que plusieurs appellent Corus , entre Favonius et Septentrion ; lâAquilon , entre le Septentrion et Solanus 3. On a imaginĂ© ces noms pour dĂ©signer le nombre des vents et des rĂ©gions dâoĂč ils viennent. Cela ainsi Ă©tabli , voici ce quâil faut faire , pour trouver les points des rĂ©gions dâoĂč viennent les vents. * On posera , de niveau , une table de marbre, au milieu de la ville * ou bien, on applanira le terrain , en le nivelant, et on le rendra bien uni, en le polissant avec la rĂšgle. On placera dans le milieu un style dâairain, pour marquer lâombre du soleil. Les Grecs appellent ce style tnue&tpaq 4 5 il faut observer son ombre , avant midi, vers la cinquiĂšme heure du jour , et en marquer lâextrĂ©mitĂ© par un point de ce point, il faut tracer, avec le compas, un cercle dont le style soit le centre ; on observera ensuite lâombre , aprĂšs midi ; lorsquâen croissant ; son extrĂ©mitĂ© aura atteint la ligne circulaire , et qu elle aura , par consĂ©quent, fait une ligne pareille Ă celle du matin , on marque aussi son extrĂ©mitĂ© par un second point de ces deux points , on trace , avec le compas, deux lignes circulaires , qui * Planche II. me fig. i. 3 Sud-Est, Sud-Ouest, Noid-Ouest, Nord-Est. 1 Câest-Ă -dire, les vents Ă 'Est, Sud, Ouest, et Nord. * Planche II. tne fig. 2 . 2 Vitruve lâappelle Cyrrhestes, et Varron le nomme 4 Câest-Ă -dire qui trouve Vombre. Cyprestis. lie re rust. Liv. III. Ch. 5. 6 . 44 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. sâentre-coupent, du point de cette intersection , on tire , par le centre , une ligne qui dĂ©signera le midi et le septentrion. On prendra, apres cela , la seiziĂšme partie de toute la circonfĂ©rence de la ligne circulaire, qui est autour du centre du style, et Ion marquera cette distance , Ă 'droite et Ă gauche du point, oĂč la ligne du midi coupe la ligne circulaire, on en fera autant au point oĂč la mĂȘme ligne coupe le cercle vers le septentrion; et de ces quatre points on tirera des lignes, qui, s'entre-coupant au centre , iront dâune des extrĂ©mitĂ©s de la circonfĂ©rence Ă lâautre, cela marquera, pour le midi , et pour le septentrion , deux huitiĂšmes parties ce qui restera aux deux cĂŽtĂ©s de la circonfĂ©rence , sera partagĂ© chacun en trois parties Ă©gales , afin dâavoir les huit divisions pour les vents. Il faudra donc tirer les alĂźgnemens des rues entre ces deux divisions ; par ce moyen , on nây sera point incommodĂ© par la violence des vents car si les rues y Ă©toient directement opposĂ©es, leur impĂ©tuositĂ©, qui est dĂ©jĂ si grande dans lâair libre et ouvert, augmenteroit beaucoup , renfermĂ©e dans des rues Ă©troites. Câest pourquoi on disposera les rues de maniĂšre que les vents donnent sur les angles que forment les grouppes des maisons, afin quâils se rompent et se dissipent. On sâĂ©tonnera peut-ĂȘtre, que nous ne comptions que huit vents ,, i tandis quâil en existe un bien plus grand nombre qui ont chacun leur nom ; mais si on considĂšre quâEratosthĂšne de CyrĂȘne, avec le secours du gnomon et des ombres Ă©quinoxiales , par les observations quâil fit , en diffĂ©rens endroits , oĂč lâinclinaison du pĂŽle nâest pas la mĂȘme, trouva , par les rĂšgles de la gĂ©omĂ©trie, que le tour de la terre est de deux cents cinquante-deux mille stades 2 , qui font trente-un millions cinq cents mille pas , et que la huitiĂšme partie de cette circonfĂ©rence de la terre , qui est la rĂ©gion dâun vent, est de trois millions neuf cents trente-sept mille cinq cents pas; on ne sera pas Ă©tonnĂ© quâun mĂȘme vent qui occupe un si grand espace , paroisse en former plusieurs , Ă mesure quâil sâavance vers un point, ou quâil sâen Ă©loigne. Câest pourquoi le vent * Auster 1 a, Ă droite et Ă gauche, les vents Euronolus 2 et AltciTius 3 ; aux cotes d Africus 4 sont Libonotus 5 et SubçÎspsrus 6 ; aux cĂŽtĂ©s 1 Pline parle des difl'Ă©rens vents, Ă -peu-prĂšs comme Vitruve , Liv. IL Ch. 47- oĂč il les nomme tous. â 3 Le Stade Ă©toit une mesure de cent vingt-cinq pas, puisque huit stades faisoient mille pas. Câest-Ă -dire un mille. Ainsi 252,ooo stades multipliĂ©es par 125, produiront 3i,5oo,ooo pas , ou bien 3i,5oo milles, c est par âąerreur que Perrault a traduit trecies par trois cent. Voyez, les remarques Ă la fin de ce chapitre. * Planche II.âą 1 * 3 * * 6 fig. r. re 1 Sud. 2 Sud , tiers de Sud-Est. ' 3 Sud , tiers de Sud-Ouest'. 4- Sud-Ouest. 5 Sud-Ouest, tiers de Sud. 6 Sud-Ouest, tiers dâOuest. LIVRE I, C h a p. v. 4i murs et des tours des anciens -, parce que, dit-il, Perrault suppose des tours, de forme circulaire , qui sont Ă©levĂ©es contre les remparts. Il prĂ©fĂšre les plans quâen ont donnĂ© âą Barbaro et Caporali, qui supposent des tours 6 emi-circulaires et Ă pans , v. fig. 2 , pl. I. j ce qui est, suivant lui , plus conforme Ă ce que nous voyons dans les moiĂŻumĂȘns antiques. VitruvĂ© parle ensuite des matĂ©riaux nĂ©cessaires pour la construction des murs des villes; on doit, dit-il , employer ceux quâon trouve sur les lieux , sans en faire venir de loin. Il paroĂźt regretter quâon nâait pas , par-tout, du bitume quâon a employĂ© au lieu de mortier , pour bĂątir les murs de Babylone. Dans le troisiĂšme chapitre du huitiĂšme livre , il dit , que ces murs furent Ă©levĂ©s par SĂ©miramis. Babylone lacus amplissima magnitudine 3 qui Limne Asphaltis appellatur , habet su* pranatans liquidum bitumen , quo bitumine 3 et latere testacero structĂč muro SĂ©miramis cir- cumdedit Babylonem^ Les bitumes sont des matiĂšres huileuses et minĂ©ralisĂ©es , quâon rencontre dans le sein de la terre , sous une forme fluide , et nageant quelquefois, Ă la surface des eaux , ou sous une forme tantĂŽt molle , tantĂŽt solide , et plus ou moins concrĂšte. On met au rang des bitumes solides , le succin , le jayet ou jais, lâasphalte , et le charbon de terre ; et au nombre des bitumes liquides , lâhuile de pĂ©trole ou de pierre et le naphte. Le bitume , dont parle ici Vitruve 3 est lâasphalte , ainsi nommĂ© , parce quâon, en lire beaucoup du lac asphaltique , ou mer morte en JudĂ©e. Tacite en parle dans le V. e Liv. de son histoire ; câest une substance pesante , solide , friable , dâune couleur brune et mĂȘme noire , brillante , dâune odeur bitumineuse , sur-tout > lorsquâon lâa Ă©chauffĂ©e ; elle sâenflamme aisĂ©ment , et se liquĂ©fie au feu. Il sâĂ©lĂšve du fond des eaux de la mer morte , et il en surnage beaucoup sur sa surface. Tacite rapporte que ceux qui sont chargĂ©s de le ramasser , en prennent une partie avec la main , et la tirent jusques sur le'tillac , sans quâelle se dĂ©tache de la masse qui suit dâelle-mĂȘme , en sorte quâil nâest pas besoin dâaucune autre opĂ©ration. Quand le vaisseau est chargĂ©, on arrĂȘte celte traĂźnĂ©e , non en la coupant avec le fer ou lâairain, ce qui ne seroit pas possible ; mais on emploie , pour lâinterrompre , quelques vĂȘtemens teints du sang que rendent les femmes , dans le temps de leurs rĂšgles. Tacite , Liv. Y. Dans les connnencemens , il est moins visqueux et trĂšs-tenace ; mais il sâĂ©paissit avec le temps , et acquiert plus de duretĂ© que la poix sĂšche.â Lorsquâil est encore liquide, les Arabes le ramassent pour goudronner leurs vaisseaux. On trouve aussi , dans le sein de la terre , des mines dâasphalte ou de bitume. M. De la SabloniĂšre en a trouvĂ© une prĂšs de NeuchĂątel en Suisse ; on en connoĂźt une autre dans la basse Alsace. La mine de bitume de NeuchĂątel se fond au feu ; en y joignant une dixiĂšme partie de poix , on en forme un mastic impĂ©nĂ©trable Ă lâeau. En 1745 le principal bassin du jardin du roi, a Ă©tĂ© rĂ©parĂ© avec ce mĂ©lange , et depuis ce temps , il ne sâest point dĂ©gradĂ©. Câest avec ce mastic que lâon a rĂ©parĂ© les bassins de Versailles , Laione lâarc de triomphe , ainsi que le beau vase blanc , sur lequel est en relief le sacrifice dâIphigĂ©nie. Câest aussi avec un mastic de bitume quâon remplit, Ă Naples , les jointures des pierres plates qui composent les plates-formes qui couvrent les maisons de celle ville , au lieu de toits. 6 4 2 L. ARCHITECTURE DE V I T R U V E. CHAPITRE VI. 'Je In distribution et de In situntion des bntimens, i/ui se trouvent dnns l intĂ©rieur des Villes. Xjâenceinte de mur achevĂ©e , on trace lâespace que doivent occuper les maisons; on prend lâalignement des grandes rues, et des plus petites. Pour bien les disposer, il faut sur-tout Ă©viter quelles ne soient dirigĂ©es vers les vents dominans , parce que leur souffle est toujours nuisible ; sâils sont froids , ils blessent ; sâils sont chauds, ils corrompent tout ; et sâils sont humides , ils nuisent. Il faut Ă©viter de pareils incon- vĂ©niens ; ils se font trop sentir dans plusieurs villes ; particuliĂšrement Ă MitylĂšne, dans l Ăźle de Lesbos ; les bĂątimens y sont beaux , et mĂȘme magnifiques , mais disposĂ©s avec si peu de prudence , que le vent du midi y cause souvent des fiĂšvres, et celui du nord-ouest la toux ; tandis que celui du nord , qui guĂ©rit ordinairement ces maladies , est si froid quâil est impossible de demeurer dans les rues lorsquâil domine. Le vent nâest autre chose que le flux de lâair , agitĂ© dâun mouvement plus ou moins violent. Il est produit par la chaleur, qui agit sur l'humiditĂ© son action impĂ©tueuse en fait sortir le souffle du vent. LâexpĂ©rience quâon fait avec les Ćoli- pyles i dâairain , prouve , on ne peut pas mieux , ce que jâavance ; les effets de ces machines artificielles nous dĂ©couvrent clairement, quelles sont les causes cachĂ©es qui agitent les airs au-dessus de nous. Les Ćolipyles sont des vases creux , faits de bronze ; ils nâont quâune trĂšs-petite ouverture , par laquelle on les remplit dâean. Ces vases ne poussent aucun air , sâils ne sont pas Ă©chauffĂ©s ; mais placĂ©s devant le feu , aussitĂŽt quâils Ă©prouvent la chaleur , il sort par lâouverture un vent impĂ©tueux ; cette petite expĂ©rience dĂ©montre des vĂ©ritĂ©s importantes sur la nature de 1 air et des vents. Les lieux qui sont Ă lâabri des vents contribuent non - seulement Ă conserver la santĂ© de ceux qui se portent bien , mais cette bonne tempĂ©rature guĂ©rit bientĂŽt les malades , qui ne pourroient lâĂȘlre partout ailleurs , quâavec le secours des remĂšdes. On remarque , au contraire , que les maladies , les plus difficiles a guĂ©rir , sont tres-frĂ©quentes , dans les lieux inlempĂ©rĂ©s dont nous venons de parler ; tels sont les rhumes , la goutte , la toux , la pleurĂ©sie , la phthisie , le crachement de sang et autres , qui ne guĂ©rissent pas par les Ă©vacuations , mais par i Câest-Ă -dire, ouverture pour le vent. LIVRE I, Chap. yi. 47 lâair que contient lâeau est trĂšs condensĂ© , et la chaleur le dilate au point, quâil lui faut une place, plusieurs milliers de fois plus grande que celle quâil occupoit Ă©tant comprimĂ© par le froid -, câest ce qui fait quâil sort avec force par lâouverture de lâoeolipyle. Il en est de mĂȘme pour les vents. A mesure que le soleil Ă©chauffe une partie de lâathmosphĂšre , oĂč lâair est plus ou moins condensĂ© par le froid , cet air , ainsi dilatĂ© , chasse , en sâĂ©tendant , lâair plus Ă©loignĂ© , ce qui cause le souflle du vent. Nous ne pouvons pas traduire tous les noms que les Grecs et les Latins donnoient aux diffĂ©rens vents , par ceux que nous leur donnons aujourdâhui. Les anciens , comme le dit Yiiruve , nâen dis- tinguoient que vingt-quatre ; tandis que nous en comptons jusquâĂ trente-deux. Leurs huit principaux vents correspondent avec les nĂŽtres ; il nâen est pas de mĂȘme des autres par exemple entre lâEst et le Nord-Ăst les anciens ne distinguoient que deux vents , Boreas et Carbcis y par consĂ©quent ils ne divisoient quâen trois parties Ă©gales , lâespace qui se trouve entre lâEst et le Nord-Est. Nous autres nous y distinguons trois vents, et par consĂ©quent nous les divisons en quatre. La I. re fĂźg. de J a II mo planche fait connoĂźtre les noms et la situation des vents suivant les Grecs et les Latins, et aussi ceux que nous leur avons donnĂ©s , dâaprĂšs leur situation dans les divisions de la rose et de la boussole. EralosthĂšne , garde de la bibliothĂšque dâAlexandrie, sous le rĂšgne de PtolomĂ©e-EvergĂšte , entreprit de calculer le nombre des stades , ou mesures de 125 pas , Ă cinq pieds le pas , qui pouvoient entrer dans le circuit de notre globe , et il eut la gloire dâapprocher de la vĂ©ritĂ©. Il savoit quâau solstice dâĂ©tĂ© , le soleil passoit par le point vertical de la ville de Sienne , situĂ©e aux confins de lâEgypte et de lâEthiopie, sous le tropique du cancer. Il y avoit, Ă Sienne, un puits construit pour cette observation , qui , sur le midi du jour du solstice , Ă©toit par dedans tout Ă©clairĂ© du soleil, placĂ© perpendiculairement au-dessus 1 . Il Ă©toit notoire, quâĂ i5o stades Ă la ronde , les styles Ă©levĂ©s Ă plomb , sur une surface liorisontale , ne faisoienl point dâombre 2 . Ayant supposĂ© Alexandrie et Sienne , Ă -peu-prĂšs, sous un mĂȘme mĂ©ridien , ou sous une mĂȘme ligne tirĂ©e dâun pĂŽle Ă lâautre, il observa , Ă Alexandrie , au jour du solstice , la distance du soleil au point vertical, par lâombre dâun style Ă©levĂ© Ă plomb du fond dâune demi-sphĂšre concave. Si ce style nâavoit point fait dâombre, câest parce que le soleil auroil Ă©tĂ© Ă plomb au-dessus. Il pouvoit donc juger de la distance du sommet de lâombre , Ă lâĂ©gard du pied du style. Il trouva que cette distance Ă©toit la cinquantiĂšme partie de la circonfĂ©rence dâun cercle entier dâoĂč il conclut que , comme le soleil alors perpendiculaire sur la ville de Sienne , Ă©toit distant du point vertical , dâAlexandrie , de la cinquantiĂšme partie de la circonfĂ©rence de tout le ciel , Alexandrie Ă©toit distante de Sienne de la cinquantiĂšme partie de la circonfĂ©rence de la terre. Il Ă©toit aisĂ© aprĂšs cela de savoir la distance de ces . deux villes , et de la rĂ©pĂ©ter cinquante fois. Ayant donc supputĂ© cette distance de cinq mille stades , il trouva la circonfĂ©rence terrestre , de deux cent cinquante mille stades ; qui , rĂ©duites en lieues communes , Ă vingt-quatre stades chacune , font dix mille quatre cent seize lieues et seize stades. CâĂ©toil dĂ©jĂ beaucoup approcher de la supputation des modernes , selon laquelle on trouve le circuit de la terre dâun peu plus de gooo lieues communes. Les anciens philosophes ne sont pas dâaccord entrâeux , sur la mesure quâils assignent Ă la cir- ? timbras nusquam Jlcdente Sjene. Phars. de Lueain , Liv. 11. v. 58;. 1 Pline, Liv. 11. Ch. 63. 48 lâARCHITECTURE DE VI TRtJVE. confĂ©rence du globe. Hipparque , suivant Pline , lui donne 53 o 62 5 mille ; Possidonius 3oooo j PtolomĂ©e 225oo ; Alfragan et Tebitius 2o5oo. Philander croit que la cause de cette variĂ©tĂ© vient de la diffĂ©rence des pas dont ils se sont servis. Tellement, dit-il, que les uns Ă©toient de deux pieds.; dâautres de deux pieds et demi ; dâautres de trois, pieds ; dâautres de quatre ; dâautres de cinq. dâautres enfin de six. Yitruve nous apprend quâil avoit placĂ© deux figures , Ă la fin de ce livre , lâune qui indiquoit la direction des vepts , et lâautre la maniĂšre dâĂ©viter, que les rues ne se trouvassent dans leur direction ; ces figures , non plus que toutes celles quâil annonce se trouver Ă la fin de chaque livre , ne sont pas parvenues jusquâĂ nous ce que nous devons beaucoup regretter. Comme tous ceux qui ont traduit Yitruve avant moi, jâai tĂąchĂ© dâen faire dâaprĂšs le texte ; si elles ne ressemblent pas Ă celles de Yitruve, du moins elles en faciliteront Pintelligence. Yoyez la premiĂšre et la deuxiĂšme figure de la seconde planche. Les interprĂštes ne sont pas dâaccord , ni sur le nombre des rues , ni sur la figure que Yitruve a voulu donner Ă celte ville. Jâai copiĂ© celle de Galiani; comme lui , je lâai fait octogone, et rĂ©duit, Ă huit, le nombre des grandes rues. La diversitĂ© dâopinions, pour le nombre des rues, vient, comme lâobserve Philander , de ce que souvent chez les Piomains , lorsquâon mettoit des lettres qui indi- quoient des nombres moindres, avant une lettre qui en indiquoit un plus fort, il falloit retrancher, de ce dernier nombre , celui irfdiquĂ© par les lettres prĂ©cĂ©dentes ; comme dans le texte de Yitruve , le nombre huit est ainsi indiquĂ© IIX , ils ont donc ĂŽtĂ© deux de dix. Philander rapporte plusieurs inscriptions trouvĂ©es Ă Rome et ailleurs , oĂč les nombres sont indiquĂ©s de la sorte. Il suit de lĂ , que les ĂŽopistes auront aisĂ©ment marquĂ© XII au lieu de IIX. %/VWVVVV\VVVVVV>VVVVVVVVVVV\' tw Wf\ LIVRE I, C h a p. vi. 45 de Façonicus 7 sont Argeste 8 et les Etesiens 9 qui soufflent en certains temps de lâannĂ©e ; autour de Caurus 10 , sont Circius u et Corus 12 ; aux cĂŽtĂ©s de Septentrio i 3 , sont Thrascias i 4 et Gallicus i 5 ; Ă droite et Ă gauche dâ Aquilon 16, sont Supemas 17 et Boreas 18; auprĂšs de Solanus 19, sont Carbas 20, et en certains temps les Ornithies 21 ; et enfin , aux cĂŽtĂ©s d 'Eurus 22 , sont CĆcias 23 et Vulturus 24. Il existe encore une infinitĂ© dâautres vents qui portent le nom des terrĂ©s, des fleuves et des montagnes dâoĂč ils viennent. On peut y ajouter ceux qui soufflent le matin , produits par les rayons du soleil, qui frappe rhumi- ditĂ© que la nuit rĂ©pand dans lâair ; ils viennent ordinairement du vent Eurus , quâil paroĂźt que les Grecs ont nommĂ© Spoç, Ă cause que les vapeurs du matin les, produisent. Câest aussi Ă cause de ces vents , quâils ont appelĂ© mptov le jour du lendemain. Quelques personnes nient quâEratosthĂšne eĂ»t pu trouver la vĂ©ritable mesure du tour de la terre ; mais que son calcul soit exact ou non , cela n empĂȘche pas que notre division des rĂ©gions des vents ne soit bonne. Il suffit de savoir que les vents ne se ressemblent pas , et qu'ils sont plus ou moins impĂ©tueux. Comme je me suis expliquĂ© peut-ĂȘtre trop briĂšvement pour ĂȘtre bien compris, jâai cru quâil ronvenoit de mettre, Ă la fin de ce livre, une de ces figures que les Grecs appellent , plan raccourci et cela pour deux raisons ; la premiĂšre , pour marquer prĂ©cisĂ©ment les rĂ©gions d oĂč les vents partent ; la seconde, pour faire con- noĂźtre la façon de diriger les rues, pour que le vent ne puisse incommoder. * On marquera sur une table, bien unie, le centre A ; et lâombre que le gnomon fait, avant midi , sera aussi marquĂ©e au droit de B ; et posant au centre A , une branche du compas, 011 Ă©tendra lâautre jusquâĂ B, dâoĂč on dĂ©crira un cercle ; et ayant remis le style dans le centre oĂč il Ă©toit, on attendra que lâombre dĂ©croisse , et quâen- suite recommençant Ă croĂźtre , elle devienne pareille Ă celle dâavant midi , ce qui 7 Ouest. 8 Ouest, tiers de Sud-Ouest. 9 Ouest , tiers de Nord~Ouesi. 10 Nord-Ouest. + n Nord-Ouest, tiers dâOuest. 12 Nord-Ouest, tiers de Nord. Ci 3 Nord. 4 Nord, tiers de Nord-Ouest. i 5 Nord, tiers de Nord-Est. iG Nord-Est, 17 Nord-Est, tiers de Nord. 18 Nord-Est j tiers dâEst. 19 Sud-Est. 20 Sud-Est i tiers dâEst. 21 Sud-Est, tiers de Sud. 22 Est. 23 Est, tiers de Nord-Est. 24. Est , tiers de Sud-Est. * Planche II. me fig. 2. 46 I, â A R C I T E C T U R E DE VITRUVE. arrivera, lorsqu elle touchera la ligne circulaire au point C ; et alors, il faudra , du point B et du point C , dĂ©crire avec le compas deux lignes qui sâentre-coupent Ă D, duquel point D on tirera , par le centre * une ligne marquĂ©e EF , qui montrera la rĂ©gion mĂ©ridionale et la septentrionale ; aprĂšs quoi on prendra , avec le compas , la seiziĂšme partie du cercle , et mettant une branche au point E , qui est celui par lequel la ligne mĂ©ridienne touche le cercle , on marquera avec 1 autre branche , a droite et Ă gauche , les points G et H ; et tout de mĂȘme dans la partie septentrionale , mettant une branche du compas sur le point F , on marquera , avec lâautre, les points f et K, et on tirera des lignes de G Ă K et de H Ă I, qui passeront par le centre ; de sorte que lâespace, qui est de G Ă H, sera pour le vent du midi, et pour toute la rĂ©gion mĂ©ridionale ; et celui de 1 Ă K sera pour la septentrionale ; les autres parties qui sont trois Ă droite, et autant Ă gauche, seront divisĂ©es Ă©galement ; savoir celles qui sont, Ă lâorient, marquĂ©es LM, et celles qui sont, Ă lâoccident, marquĂ©es N et O ; et de M Ă O , et de L Ă N, on tirera des lignes qui se croiseront; et ainsi on aura , dans toute la circonfĂ©rence , huit espaces Ă©gaux pour les vents. Cette figure achevĂ©e , on trouvera , dans chaque angle de lâoctogone , une lettre , savoir entre Eurus et Auster la lettre G , entre Auster et Africus H , entre Africus et Favonius N , entre Favonius et Caurus O , entre Caurus et Septentrio K , entre Septentrio et Aquilo I, entre Aquilo et Solanus L, entre Solanus et Eurus M. Le tout terminĂ© de la sorte, on pose lâĂ©querre entre les angles de lâoctogone O A H, KAN, pour marquer lâalignement et la division des huit grandes rues et de toutes les petites. R E M A RQ UES. Ce que Yitruve rapporte sur la cause des vents , prouve , de nouveau, combien il avoit le jugement bon , puisquâau milieu de tant de systĂšmes faux , il choisissoit toujours ce qui approchoit le plus de la vĂ©ritĂ©. Les lumiĂšres des anciens, tant en physique quâen histoire naturelle, nâĂ©loient pas aussi Ă©tendues que les nĂŽtres ; parmi un grand nombre dâerreurs , il se trouvoit cependant quelques parcelles de vĂ©ritĂ© , mais il falloit infiniment de gĂ©nie pour pouvoir les saisir. On peut voir , dans le 54. me Chapitre du deuxiĂšme Livre 4e Pline , toutes les idĂ©es des anciens sur lâorigine des vents. Yitruve suppose que le vent nâest autre chose que lâair mis en mouvement. SĂ©nĂšque se sert dâune comparaison trĂšs-ingĂ©nieuse pour exprimer cette pensĂ©e. La diffĂ©rence qui existe, dit-ilentre lâair et le vent, est la mĂȘme que celle qui existe entre les eaux d J un fleuve et celles dâun lac. Ăź Yitruve ajoute ensuite , que câest la chaleur qui fait sortir lâair de lâhumiditĂ© , ce qui produit le vent. Pour le prouver , il cite lâexpĂ©rience qui se fait avec les Ćolipyles dâairain. II nâavoit plus quâun pas Ă hure pour dĂ©couvrir la rarĂ©faction de Pair. Lorsquâon ceolipyĂźe rempli dâeau sur un feu ardent, i Hue interest inter aĂ©ra et fentum , qvnd inter lacum et /lumen, Senec. quest. nat. Liv. V. LIVRE I, C H A P. y h. 49 fi M te n% lâautif. tpaiif fit pou autre; savoi- iquĂ©e fit aiii lettre J Afirici! , ente i tout [AS, itiites, e pige*, choit k s vents. ;r t dân»* ;ntr^ I Yiimf't âș is aW ardeĂŒi. CHAPITRE VIL OU Ton doit placer les Ădifices Publics. - . i r i ' . avoir rĂ©glĂ© la division des mes , il faudra choisir les emplacemens pour les Ă©difices publics qui se trouvent dans toutes les villes ; tels sont les temples et les marchĂ©s publics. Si la ville est au bord de la mer , il faut, que le marchĂ© soit prĂšs du port ; et il doit ĂȘtre au milieu de la ville , si elle est loin de la mer. On doit placer les temples des Dieux tutĂ©laires , tels que ceux de Jupiter , de Junon et de Minerve ; dans les lieux les plus Ă©levĂ©s , dâoĂč lâon puisse dĂ©couvrir la plus grande partie des murs de la ville. Ceux de Mercure, dâIsis et de SĂ©rapis doivent ĂȘtre dans les marchĂ©s ; ceux dâApollon et de Bacchus prĂšs du théùtre; celui dâHercule prĂšs du Cirque , si toutefois il ne sây trouve pas de gymnase i , ni dâamphithéùtre; celui de Mars dans un champ hors de la ville. Il en est de mĂȘme de celui de VĂ©nus, sinon quâil doit ĂȘtre prĂšs des portes. On en voit la raison dans les livres des Aruspices Toscans , qui prĂ©tendent que les temples de VĂ©nus, de Vulcain et de Mars , soient placĂ©s hors de la ville. Le premier pour empĂȘcher, entre les jeunes gens et les mĂšres de famille, les occasions dâun commerce vicieux. Le second pour Ă©carter des murs les effets destructeurs de la puissance de Vulcain, ensuite , par des priĂšres et des sacrifices , se dĂ©livrer de la crainte de voir les maisons incendiĂ©es. Le troisiĂšme pour prĂ©venir les querelles intestines et les meurtres des citoyens , les rassurer contre les entreprises des ennemis et les pĂ©rils de la guerre. Le temple de CĂ©rĂšs doit aussi ĂȘtre bĂąti hors de la ville, dans un lieu trĂšs - reculĂ©, oĂč on ne soit dans le cas dâaller que pour sacrifier parce que ce lieu doit ĂȘtre gardĂ© avec un respect religieux et une grande saintetĂ© de mĆurs. Les temples des autres dieux doivent aussi ĂȘtre placĂ©s dans des lieux commodes pour leurs sacrifices. Dans le troisiĂšme et dans le quatriĂšme livres, jâenseignerai la maniĂšre de bĂątir les temples , et ferai connoĂźtre leurs proportions ; mais auparavant, je veux parler des matĂ©riaux , de leurs qualitĂ©s et de leur usage ; câest ce que je vais faire dans le deuxiĂšme livre. Dans les suivans, je ferai connoĂźtre la diffĂ©rence des ordres, ainsi que les divers genres et proportions des Ă©difices. i Lieu destinĂ© aux exercices de la jeunesse, \ 7 5o % L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. REMARQUES. Le prĂ©cepte des aruspices toscans nâa pas toujours ete suivi bien exactement ; puiscpi a Rome le temple de Mars vengeur , Ă©toit dans le forum dâAuguste celui de Venus etoit dans le forum de Jules-CĂ©sar et plusieurs autres temples , consacres aux divinitĂ©s malfaisantes , etoient dans la ville ; comme celui de la FiĂšvre , de Vulcain , de la mauvaise Fortune et de la Paresse , etc. Il est vrai que plusieurs de ces temples Ă©toient , dans le principe , hors des murs de la ville ; mais lorsquâelle vint Ă sâĂ©tendre , ils se trouvĂšrent enclavĂ©s dedans. Il nây avoit rien de plus auguste ni de plus sacrĂ© dans la GrĂšce , que les mystĂšres de CĂ©rĂšs les plus grands personnages, non seulement de la GrĂšce , mais de Rome , sây faisoient initier.; tĂ©moin le scythe Anacharsis , lorsquâil fut fait citoyen dâAthĂšnes ; Atticus, Auguste mĂȘme , etc. Lâobjet, de cette espĂšce de confrairie , Ă©toit de rendre meilleurs et plus vertueux ceux que lâon y admettoit. Il Ă©toit dĂ©fendu aux initiĂ©s mĂȘme , sous peine de mort, de divulguer les mystĂšres de la dĂ©esse ; ceux qui violoient cette loi, Ă©toient censĂ©s avoir encouru lâire et lâindignation des dieux. . . . Vetabo s qui Cereris sacrum Vulgarit arcanĆ , sub iisdem Sit trabibus } fragilemque mecum Solvat phaselum . Horat. Liv. 111. ode 2 . Pausanias , dans sa description de la GrĂšce , craint de parler de ces mystĂšres ; on sait, dit-il, que ceux qui ne sont pas initiĂ©s Ă ces mystĂšres, ne doivent pas en prendre connoissance , ni avoir la libertĂ© de sâen informer 1 }. âą 1 Paujin. Liv. 1. Ch. 14 . Liv. 1. Ch. 38. 1 WW%/WWV%/WWV%/WWV LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. LIVRE SECOND. INTRODUCTION. Lâarchitecte Dinocrate , se fiant Ă ses connoissances et Ă son gĂ©nie , part un jour de la MacĂ©doine , pour se rendre Ă lâarmĂ©e dâAlexandre , et tĂącher dâacquĂ©rir la protection de ce grand prince , qui venoit de faire la conquĂȘte dâune grande partie de lâunivers. Ses parens et ses amis lui avoient donnĂ© des lettres de recommandation , pour les personnes les plus distinguĂ©es de la cour , 'afin de lui procurer un accĂšs plus facile auprĂšs du prince. Les personnes auxquelles il sâadressa lui ayant fait lâaccueil le plus favorable , il les pria de le prĂ©senter de suite Ă Alexandre ; ils le lui promirent ; mais comme ils diffĂ©roient lâexĂ©cution de sa demande , sous prĂ©texte dâattendre une occasion favorable , Dinocrate , se croyant jouĂ© par leurs vaines promesses , trouva le moyen de se produire lui - mĂȘme. La nature lâavoit douĂ© dâune taille remarquable ; sa figure et tout son extĂ©rieur annonçoient un homme distinguĂ©. Fort de ces avantages quâil ne devoit quâĂ lui , il se dĂ©pouille de ses habits , se frotte entiĂšrement le corps dâhuile., se couronne dâune branche de peupher , couvre son Ă©paule gauche dâune peau de lion , prend une massue Ă la main , et dans cet Ă©quipage , il sâapproche * du trĂŽne oĂč le roi Ă©toit assis et rendoit la justice. Un spectacle aussi nouveau , attire sur lui les yeux - de ceux qui se trouvoient lĂ ; Alexandre , qui lâaperçut, en fut surpris lui-mĂȘme ; il ordonne quâon le laisse approcher , et lui demande qui il est ; il rĂ©pond je 7 - 52 LâARCHITECTURE DE VITRĂVE. suis l'architecte Dinocrate , macĂ©donien , et j'apporte Ă Alexandre des pensĂ©es et des desseins dignes de sa grandeur. Jai projetĂ© de donner au mont Athos la forme dâun homme qui tient dans sa main gauche une grande ville , et dans sa droite , une coupe , qui reçoit les eaux de toutes les riviĂšres qui s Ă©coulent de cette montagne , pour les verser dans la mer. Alexandre goĂ»ta cette idĂ©e ; mais il lui demanda sâil y avoit des campagnes aux environs de cette ville , qui pussent produire des bleds , pour la faire subsister ? On trouva quâil ne pouvoit les faire venir que par la mer. Alexandre lui dit alors Dinocrate , jâavoue que votre projet est ĂŻfitĂ» , et quâil me plaĂźt beaucoup ; mais je crois quâon accuseroit celai qui Ă©tabliroit une colonie dans le lieu que vous me proposez , dâĂȘtre peu prĂ©voyant; car de mĂȘme quâun enfant ne peut se nourrir, ni croĂźtre sans le lait dâune nourrice , ainsi les habitans dâune ville ne"peuvent subsister , et encore moins augmenter leur population, sâils ne sont abondamment pourvus de vivres. Tout ce que je puis vous dire , câest que je loue la beautĂ© de votre dessein , si je dĂ©sapprouve le choix de remplacement que vous avez fait pour lâexĂ©cuter ; mais je dĂ©sire que vous demeuriez auprĂšs de moi, parce que je veux me servir de vous. Depuis ce temps, Dinocrate ne quitta plus le roi et le suivit en-Egypte. Alexandre y ayant dĂ©couvert un bon port, bien abritĂ© , environnĂ© de campagnes fertiles , oĂč tous les avantages se Irouvoient rĂ©unis, Ă cause de la proximitĂ© du Ml; il ordonna Ă Dinocrate dây bĂątir une ville qui, de son nom , fĂ»t appelĂ©e Alexandrie. Tel fut lâheureux succĂšs de lâentreprise de Dinocrate , sa bonne mine fut sa premiĂšre recommandation. Quant Ă moi , CĂ©sar , la nature ne mâaccorda point ces dehors imposans ; lâĂąge et les infirmitĂ©s ont ruinĂ© mes forces, et imprimĂ© sur mon front les rides de la vieillesse mais quoique dĂ©pourvu de ces avantages , jâespĂšre y supplĂ©er par le secours de la science, et mĂ©riter par mes Ă©crits votre protection. Dans le premier livre dĂ© cet ouvrage , jâai traitĂ© de l'architecture en gĂ©nĂ©ral, et des principes de cet art jâai parlĂ© ensuite de la construction des murailles des villes , et exposĂ© de quelle maniĂšre elles dĂ©voient ĂȘtre divisĂ©es dans leur enceinte. Pour suivre 1 ordre naturel de 1 architecture , je devrais traiter maintenant de la construction des temples et des Ă©difices , tant publics que particuliers , et des proportions qu on doit leur donner ; je nâai cependant cm devoir le faire , quâaprĂšs avoir parlĂ© des matĂ©riaux , de leurs principes , de leurs qualitĂ©s ; et mĂȘme , avant d expli quel cette matiĂšre , j ai jugĂ© a propos , de parler des diffĂ©rentes maniĂšres de bĂątir, de leur origine, des progrĂšs quâon y a faits; de rechercher dans lâantiquitĂ©, ceux qui ont rĂ©duit en principes et laissĂ© Ă la postĂ©ritĂ© les leçons de cet art ; câest ce que je tĂącherai d expliquer, comme je lâai appris des anciens auteurs. 53 LIVRE- II; C h a p. i. RE 31 ARQUES. Plutarque , dans la vie dâAlexandre , nomme StĂŠsicraie , lâarchitecte qui prĂ©senta Ă Alexandre le modĂšle du mont Athos en forme de gĂ©ant. Pline et Solin , ainsi que Yitruve, nomment Dinocrate, rarchitecte dont Alexandre se servit pour bĂątir Alexandrie. Strabon et Arrien lâappellent Chino- crate, ou comme dâautres lisent, Chiromocrate. Justin, Liv. XII, le nomme ClĂ©omĂšne. Philander rapporte cette ancienne inscription grecque qui se trouve encore dans la ville dâAlexandrie, et qui le nomme DĂ©mocrates. As/ âąxvjpiKKvtoq Ă pXT ç fis sâĂŽsçsv Si KXs%avdpov CHAPITRE PREMIER. Origine des Edifices. Dans les temps les plus reculĂ©s, les hommes, semblables au reste des animaux, nais- soient dans les forĂȘts ; ils avoient, pour demeure, des cavernes, et pour nourriture , des fruits sauvages. Le hasard voulut quâun vent impĂ©tueux vint Ă pousser, avec violence ; des arbres qui Ă©toient serrĂ©s les uns prĂšs des autres; ils sâentre-choquĂšrent si rudement , quâils s enflammĂšrent. Le feu Ă©tonna dâabord , et fit fuir ceux qui en Ă©toient le plus prĂšs ; bientĂŽt ils se rassurĂšrent, et sâĂ©tant rapprochĂ©s , ils Ă©prouvĂšrent que la chaleur tempĂ©rĂ©e du feu nâavoit rien que dâagrĂ©able ; ils y jetĂšrent du bois pour lâentretenir, et amenĂšrent dâautres hommes , auxquels ils firent sentir, par signes , lâutilitĂ© de leur dĂ©couverte. Les hommes , ainsi rassemblĂ©s, articuloient diffĂ©rens sons qui, rĂ©pĂ©tĂ©s de jour en jour, formĂšrent par hasard certains mots dont lâexpression habituelle servit Ă dĂ©signer les objets ; et bientĂŽt ils eurent un langage qui leur permit de se parler et de se comprendre. Câest donc la dĂ©couverte du feu qui donna occasion aux hommes de se rĂ©unir en sociĂ©tĂ©, et dâhabiter dans un mĂȘme endroit. La nature , dâailleurs , les ayant douĂ©s de plusieurs avantages qu elle a refusĂ©s aux autres animaux , comme de marcher droits , Ă©levĂ©s , de contempler le magnifique spectacle de la terre et des deux , et de pouvoir , Ă lâaide de leurs mains , faire toutes choses avec facilitĂ© ; les uns commencĂšrent Ă construire des huttes de feuillages ; les autres Ă creuser des cavernes aux pieds des montagnes. D autres, imitant les hirondelles , employoient de petites branches dâarbre et de la terre grasse, et cons- truisoient des retraites , oĂč ils se rĂ©fugioient ; chacun considĂ©roit lâouvrage de son voisin et perfectionnoit ses propres inventions, aprĂšs avoir remarquĂ© celles dâautrui. 54 LâARCHITECTURE DE VITRUYE. Les progrĂšs Ă©taient rapides , et la maniĂšre de bĂątir leurs cabanes sâamĂ©lioroit de jour en jour ; comme les hommes sont naturellement dociles et propres Ă imiter et perfectionner, chaque jour ils se glorifioient de leurs nouvelles dĂ©couvertes, et sâen communiquoient les effets progressifs. Câest ainsi quâen exerçant leur Esprit, ils rec- tilioient Ă lâenvi les ouvrages quâils entreprenoient. i. * Ils commencĂšrent dâabord par planter des fourches, sur lesquelles ils placĂšrent des branches dâarbres entrelacĂ©es les unes dans les autres ; ils remplissoient les vui- des , et enduisoient le tout de terre grasse ; ils faisoient de mĂȘme les murailles ; dâautres les bĂątirent avec, des morceaux de terre grasse , dessĂ©chĂ©s , sur lesquels ils posoient des piĂšces de bois en travers ; pour les garantir de la pluie et des ardeurs du soleil, ils les couvrirent de cannes et de branches dessĂ©chĂ©es ; mais comme elles ne pouvoient rĂ©sister aux pluies de lâhiver , ils Ă©levĂšrent des combles inclinĂ©s quâils enduisirent de terre grasse pour faire Ă©couler les eaux. Ce qui nous prouve que les premiers bĂ timens ont Ă©tĂ© faits de cette maniĂšre , câest quâencore aujourdâhui , nous voyons que les nations Ă©trangĂšres se font de semblables habitations , et einployent les mĂȘmes matĂ©riaux pour les construire ; comme dans la Gaule, lâEspagne, le Portugal et dans lâAquitaine ; les maisons y sont couvertes de chaume ou de hardeaux faits de chĂȘnes , en forme de tuiles. Dans le royaume de Pont, dans la Colchide * **, oĂč le bois est trĂšs-abondant, Ă cause des forĂȘts qui sây trouvent, on bĂątit de cette maniĂšre on Ă©tend par terre, Ă droite et Ă gauche , des arbres dans leur longueur, entre lesquels on laisse lâespace nĂ©cessaire pour en coucher de semblables en travers, auxquels ils sont attachĂ©s par leurs extrĂ©mitĂ©s , dans les quatre angles , de maniĂšre quâils enferment tout lâespace destinĂ© pour lâhabitation. On pose sur ceux-ci , des quatre cĂŽtĂ©s, dâautres arbres qui portent perpendiculairement les uns sur les autres ; puisquâon les met d'Ă plomb sur celui dâen bas, et on Ă©lĂšve ainsi les murailles des tours. On remplit avec des Ă©chalats et de la terre grasse les intervalles causĂ©s par lâĂ©paisseur des poutres ; on forme les toits de la mĂȘme maniĂšre. De lâextrĂ©mitĂ© de chaque angle, on arrange des poutres de mĂȘme ; mais Ă mesure quâelles sâĂ©lĂšvent de degrĂ© en degrĂ© , on les accourcit tellement, quâelles forment une pyramide j quâon couvre de feuilles et de limon. Telle est la maniĂšre rustique dont la croupe des toits est formĂ©e. Les Phrygiens *** qui habitent des plaines , oĂč il nây a pas de forĂȘts qui leur fournissent des bois pour bĂątir , creusent de petits tertres , naturellement Ă©levĂ©s , les Ă©largissent, autant que la nature du lieu le permet, et tracent un chemin pour y conduire ; sur le bord de ce creux, ils arrangent plusieurs perches * Planche IIĂ, me fig. 2. A, *** Planche III,âą fig. 2 . G. ** Planche UI. rac fig, 2. B, LIVRE II, Ch a p. iv 55 ' liĂ©es par le haut, en forme de pointe; ils les couvrent de cannes et de chaume , ! sur lesquels ils entassent une grande quantitĂ© de terre; par lĂ , ils rendent leurs habitations trĂšs-chaudes pendant lâhiver, et trĂšs-fraĂźches pendant lâĂ©tĂ©. Dans dâautres pays, on couvre les toits ,avec des herbes prises dans les Ă©tangs. En un mot chaque peuple a une diffĂ©rente maniĂšre de bĂątir. A Marseille, au lieu de tuiles, les' maisons sont couvertes de terre grasse pĂ©trie avec de la paille Ă AthĂšnes v on montre encore aujourdâhui, comme une chose curieuse par son antiquitĂ©, les toits de lâArĂ©opage faits de terre grasse; parmi les temples de la forteresse du Capitole , la cabane de Ilomulus, couverte de chaume , nous offre aussi cette ancienne maniĂšre de bĂątir. DâaprĂšs ces exemples, nous pouvons juger ce quâĂ©toient les bĂąti- mens des anciens; mais de jour en jour, Ă force de bĂątir, on est devenu plus habile dans cet art, et lâexpĂ©rience ayant multipliĂ© les lumiĂšres , ceux qui sây Sont adonnĂ©s , en ont fait une profession particuliĂšre. Comme les hommes ne se distinguent pas seulement des animaux par la supĂ©rioritĂ© que leurs sens ont sur les leurs, mais sur-tout par lâesprit qui les rend maĂźtres de tout ce qui est dans la nature, lâindustrie quâils ont acquise, par la nĂ©cessitĂ© de bĂątir, a Ă©tĂ© pour eux le premier degrĂ© pour parvenir Ă la connoissance des autres arts, et pour passer dâune vie sauvage Ă la politesse et Ă la civilisation qui convient Ă la nature humaine. Ainsi Ă©levant leur courage et donnant Ă leurs conceptions progressives tout lâessor que la variĂ©tĂ© des sciences leur inspirait, ils abandonnĂšrent leurs cabanes pour bĂątir des maisons dont ils construisirent les murs de briques ou de pierres, et les couvrirent de bois et de tuiles ,* ils rĂ©flĂ©chirent ensuite sur leurs premiĂšres observations dâaprĂšs ce& rĂ©flexions, ils fixĂšrent leur jugement et parvinrent Ă connoĂźtre trĂšs-exactement les vĂ©ritables rĂšgles de la proportion dont ils nâĂ©toient pas certains dans le principe. Ayant remarquĂ© que la nature leur fournissoit abondamment les matĂ©riaux nĂ©cessaires pour les Ă©difices , ils ont tellement cultivĂ©, par la pratique, lâart de bĂątir, quâils lâont portĂ© Ă la plus haute perfection; avec le secours des autres arts, ils ajoutĂšrent, 1 au nĂ©cessaire, les ornemens et les commoditĂ©s qui peuvent contribuer aux agrĂ©mens de la vie. Je me propose dâexpliquer ces divers objets avec toute lâattention dont je suis capable; je rapporterai tout ce quâon peut dire sur les propriĂ©tĂ©s, la commoditĂ© et 1 usage des Ă©difices. Quelques personnes, peut-ĂȘtre, critiqueront lâordre que jâai suivi pour placer mes livres, et prĂ©tendront que celui-ci devrait ĂȘtre le premier; je leur rĂ©pondrai que mon projet Ă©tant dĂ©crire sur toute lâarchitecture en gĂ©nĂ©ral, jâai cru devoir parler, dâabord, des diffĂ©rentes connoissances qui sont nĂ©cessaires Ă cet art, des parties qui le composent, et quelle a Ă©tĂ© son origine. Câest ce que jâai fait en exposait les qua- 56 L'ARCHITECTURE -DE V I T R U V E. lires que doit avoir un architecte. Tellement quâaprĂšs avoir parlĂ© de ce qui dĂ©pend de lâart, je vais, dans ce second livre, mâoccuper des diffĂ©rens matĂ©riaux que la nature fournit pour la construction des Ă©difices. Je ne dirai donc plus rien de 1 origine de lâarchitecture, mais bien de celle des hĂątimens; et comme on est parvenu Ă les perfectionner, au point oĂč nous les voyons aujourd'hui, il est Ă©vident, daprĂšs cela, que ce second livre est Ă sa place. Pour~revenir aux objets qui sont nĂ©cessaires pour bĂątir, je vais raisonner sur les diverses matiĂšres quâon y emploie, et expliquer le plus clairement qu il me sera possible, comment la nature les produit, ou par quelle combinaison dĂ©lĂ©mens, elle les forme telles que nous les voyons car il nây a rien sur la terre , dont ils ne soient le principe; tout ce qui appartient Ă la nature ne peut sâexpliquer clairement en physique, si l'on ne dĂ©montre, par de bonnes raisons, quels sont les principes de chaque chose. CHAPITRE IL Des principes de toutes choses , d aprĂšs le sentiment des Philosophes. JT h A lĂšs, le premier, a cru que feau Ă©toit le principe de toutes choses. Heraclite dâEphĂšse , qui fut surnommĂ© 'scoleinos i, Ă cause de lâobscuritĂ© de ses Ă©crits, disoit que câĂ©toit le feu. DĂ©mocrite , et aprĂšs lui Epicure, vouloient que ce fussent les atomes , qui sont des corps qui ne peuvent ĂȘtre coupĂ©s ni divisĂ©s. Ceux qui sui T vent la doctrine de Pythagore , outre lâeau et le feu, mettent encore au nombre des Ă©lĂ©mens lâair et la terre. Quoique DĂ©mocrite ne donne pas des noms particuliers aux principes quâil admet, et se borne Ă les dĂ©finir comme des corps indivisibles, il semble que par lĂ il a voulu aussi entendre ces mĂȘmes Ă©lĂ©mens; car ce nâest quâau- tant quâils sont sĂ©parĂ©s les uns des autres quâils les suppose incapables de s'altĂ©rer et de se corrompre, et quâil leur donne une nature Ă©ternelle , infinie et solide. Il paraĂźt donc que tout ce que contient la nature, est composĂ© de ces Ă©lĂ©mens, et leur doit 1 existence ; quâils y sont rĂ©pandus et divisĂ©s de toutes les maniĂšres. Jâai cm quâil falloit faire connoĂźlre leurs variĂ©tĂ©s , leurs diffĂ©rentes propriĂ©tĂ©s, lâusage quâon en fait, et le parti qu on en tire pour construire les Ă©difices, afin que ceux qui bĂątissent ne soient pas dans le cas de se tromper, mais quâils puissent faire un bon choix dans les matĂ©riaux dont ils auront besoin. ĂŻ Câest-Ă -dire, iĂ©nĂ©breu», CHAPITRE LITRE IX, Ch-a p, ni, ;>. CHAPITRE III. Des Briques. , * Parlons dâabord des briques , et de quelle terre elles doivent ĂȘtre faites. Celle, qui est pleine de gravier, de cailloux, ou de sable , ne vaut rien, parce qu elle les rend trop pesantes , et quâensuite elles sont sujettes Ă se dĂ©tremper et se fondre ; lorsquâelles sont mouillĂ©es par la pluie car cette terre, quoique, rude, nâest pas assez liante pour faire corps avec les pailles quâon y met. Il faut les faire avec de la terre blanche semblable Ă la craie, ou rouge, ou mĂȘlĂ©e de sable; parce que ces matiĂšres, Ă cause de leur douceur , sont plus compactes, ne pĂšsent pas tant sur lâouvrage , et se prĂ©parent aisĂ©ment. Le printemps et lâautomne sont les temps les plus propres pour mouler les briques ; parce que , pendant ces saisons , elles peuvent se sĂ©cher Ă©galement par - tout ; au lieu quâen Ă©tĂ© , le soleil les sĂ©chant tout de suite, en dehors, on croit qu elles le sont aussi intĂ©rieurement, mais ce nâest quâĂ la longue et en se rĂ©trĂ©cissant qu elles sĂšchent, ce qui fait fendre et rompre leur superficie , et les gĂątent entiĂšrement. Le mieux seroit de les garder deux ans entiers , avant de sâen servir car si on les emploie lorsquâelles sont nouvelles , avant dâĂȘtre sĂšches ; lâenduit quâon met dessus , se sĂ©chant plus vite , et prenant de la consistance , les briques sâaffaissent et sâen sĂ©parent en se resserrant. Par-lĂ , lâenduit nâest plus attachĂ© Ă la muraille, et nâĂ©tant plus capable de se soutenir de lui-mĂȘme, Ă cause de son peu dâĂ©paisseur, il se rompt. La muraille sâaffaisse Ă©galement çà et lĂ , se gĂąte et se ruine. Câest pourquoi, dans Utique, on ne met les briques en Ćuvre quâaprĂšs que le magistrat les a visitĂ©es, et quâil a reconnu quâil y a cinq ans quelles sont moulĂ©es. On fait trois sortes de briques; la premiĂšre est celle dont nous nous servons , on lâappĂšle en grec Didoron ; i elle est longue dâun pied , et large dâun demi- pied; D les deux autres , qui sont le Pentadoron , 2 * A. et le Tetradoron, 3.C sont celles que les Grecs emploient habituellement. Les Grecs appellent le palme Do- ron , parce que Doron signifie un prĂ©sent, et que le prĂ©sent se porte ordinairement dans la paume de la main. Ainsi la brique qui a cinq palmes en carrĂ© sâappĂšie Pentadoron ; celle qui en a quatre, Tetradoron. Les ouvrages publics se font avec le 1 De deux palmes. 2 De cinq palmes. * Planclie lll. mc fig. 1. S De quaire palmes. * 8 58 L â 4 II C H I ĂŻ E C T U K E DE V I T R U Y E. Pentadoron, et ceux des particuliers en Tetradoron. Avec ces diffĂ©rentes espĂšces de briques, on fait aussi des demi-briques et lorsquâon Ă©lĂšve une muraille , on met, alternativement dâun cĂŽtĂ©, un rang de briques, et de 1 autre un rang de demi-briques, de sorte qu'Ă©tant rangĂ©es en ligne Ă chaque parement , celles d'une assise sâentrelacent avec celles dâune autre , et de plus le milieu de chaque brique se rencontre sur un joint montant ; cela rend la structure plus ferme et plus agrĂ©able Ă la vue. Celles quâon fait Ă Calente , ville dâEspagne , et Ă Marseille dans la Gaule , comme aussi Ă Pitane ville dâAsie , surnagent sĂŒr lâeau quand elles sont sĂšches ; Ă cause que la terre, dont on les faits , est spongieuse; outre sa lĂ©gĂšretĂ©, ses ports externes sont tellement fermĂ©s , que lâeau ne peut les pĂ©nĂ©trer ; elle est forcĂ©e de les soutenir par la loi de la nature , comme si câĂ©toit des pierres ponces. Ces qualitĂ©s dans les briques sont de la plus grande utilitĂ© pour la maçonnerie car elles ne chargent pas trop les murailles et ne sont pas sujettes Ă se dĂ©tremper par la violence des orages. REMARQUE S. Les Grecs et les Romains employoient beaucoup de briques dans la construction de leurs grands Ă©difices. Le PanthĂ©on , le ColisĂ©e , les diffĂ©rons thermes , les théùtres , les cirques , le palais des empereurs , tous ces Ă©difices Ă Rome , Ă©loient bĂątis de briques ; mais revĂȘtus de pierres, de taille et de marbre. Leur maniĂšre de maçonner en brique Ă©loit toute diffĂ©rente de la nĂŽtre ; les briques qu'ils employoient , sont celles que Vitruve appelle la Didoron ; elles sont beaucoup plus minces que les nĂŽtres , et , comme on fa vu , beaucoup plus longues et plus'larges ; ils melloient une quantitĂ© prodigieuse de mortier, tant entre les assises quâentre les jointures latĂ©rales des briques; tellement, comme le dit Yitruve , que dans une muraille , il y avoit plus de mortier que de briques. Pendant mon sĂ©jour Ă Rome , je mâassurois que des ruines Ă©loient dâun Ă©difice ancien , lorsque je les voyois maçonnĂ©es de la sorte. Il faut donc considĂ©rer des murs faits de briques , dâabord quant ^ aux murs mĂȘmes , et ensuite quant Ă leur revĂȘtement ; ayant soin dây comprendre aussi le plancher et le pavĂ©. Les murs des grands Ă©difices de Rome ne sont cependant pas tous entiĂšrement construits de briques ; plusieurs en sont seulement garnis , pour former les assises ; câest ce quâon appelle mĂ»ri a cortinci. LâintĂ©rieur en est rempli de petites pierres , de morceaux de pots cassĂ©s , et dâautres choses semblables , avec du ciment , dont il y avoit toujours un tiers plus que de pierres. Yitruve appelle ceiiĂ© espece de maçonnerie y^emplecton 1 , Ă cause quâelle Ă©loit remplie et garnie par fe milieu ; mais il ne parle alors que des murs de pierres , et non pas des murs de briques , ce qui nous prouve manifestement qu apres celte description , il a omis de parler de cette mĂ©thode , dont ni lui ni ses commentateurs , n ont fait mention. Câest en pratiquant cette maniĂšre de bĂątir , que les Romains sont parvenus Ă faire des murs si prodigieusement solides , et qui avoient jusquâĂ neuf et treize palmes d Ă©paisseur. Les modernes , Ă la vĂ©ritĂ© , ont construit aussi de pareilles murailles , et cela i Lib. II. Ch. 8. LIVRE II, Chap. ni. bâo de briques seules ; telle que celle sur laquelle porte la coupole de FĂ©glise de St. PiĂ«rrĂȘ Ă RĂčffiĂ«, qui a quatorze palmes dâĂ©paisseur. II paroĂźt que câest dâune semblable maçonnerie quâĂ©toient faits les murs de Babylone car le mot Ă ipcKTiat dans HĂ©rodote i, Ă la place duquel, d^aulres lisent apvÂŁ%ov indique cette espĂšce de maçonnerie , et non pas, comme le prĂ©tend M. Wesseling 2 , des murs faits de pierres jetĂ©es au hasard ; mais on en faisoit , comme chez les Romains , avec des assises de briques arrangĂ©es symĂ©triquement. Je ne puis affirmer que ces derniers aient fait usage de briques polies ; cepeadan* on trouve , aujourdâhui , tous les murs extĂ©rieurs de quelques Ă©difices , faits de ces briques , tels sont , entrâautres , ceux de lâĂ©glise de la madonna de Monli Ă Rome j les murs extĂ©rieurs du palais du duc dâUrbin 5 sont de mĂȘme de briques polies. Les briques quâon vouloit employer aux murs et non aux pavĂ©s , Ă©toient un .peu plus larges aux deux bouts , afin de pouvoir les poser solidement les unes sur les autres , sans se servir de ciment , car on metloit du ciment seulement dans lâendroit oĂč les briques ne se touchoient point voilĂ pourquoi les joints des murs faits de briques polies, sont , pour ainsi dire , imperceptibles. Dans le principe , les briques nâĂ©toient pas cuites au four ; mais seulement sĂ©chĂ©es pendant quelques annĂ©es au soleil $ les Grecs , ainsi que les Romains , en faisoient un grand usage. Câest de pareilles briques quâĂ©toient faits les murs de MantinĂ©e et ceux de Eione, au bord du fleuve Strymond dans la Thrace4 , un temple Ă PanopĂ©e 5, un autre temple de CĂ©rĂšs 6 , tous deux dans la Phocide , un pĂ©ristyle dans Epidaure 7 , et un tombeau de la ville dĂ©truite de LĂ©preos en ElidĂ©. Il paroĂźt , suivant ce chapitre de Yitruve , que la plupart des maisons de Rome et des environs de cette ville , etoienl construites de pareilles briques $ cependant Pausanias nous apprend que ces briques se dĂ©composoient par le soleil et par lâeau. A la terre destinĂ©e Ă faire des briques cuites , on meloit du tuf pile , connu aujourdâhui a Rome sous le nom de sperone y il est jaunĂątre , mais il devient rougeĂątre dans le feu j couleur dont est encore le grain intĂ©rieur de la brique. Ces briques, pour la construction des murs , nâĂ©toient pas Ă©paisses , mais fort longues. Leur Ă©paisseur nalloit pas au-dela dâun pouce, tandis quâelles avoient jusquâĂ trois et quatre palmes de superficie 5 elles servoient particuliĂšrement pour les voussures. 1 Lib, I. Ch. 180. 2 Euitath. ad. od. 6, p. i85i. liv. a5. 3 Memorie dâurbino. Roma 1724- fol* p* 46, ĂȘ Pausanias. Liv. VIII. C, 8. 5 Ibid. Liv. X. 6 Id. Liv. VIII. 7 Id. Liv. II. C. 27. fio LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. CHAPITRE IV. Des dijjĂ©rens Sables. ^uĂ nd on bĂątit, surtout en moellons , il faut sâattacher Ă choisir du bon sable, pour faire le mortier. Le plus grand dĂ©faut quâil puisse avoir est dâĂȘtre terreux. Les diffĂ©rentes espĂšces de sable fossile , sont le noir , le gris , le rouge et le carbon- culus. i Le meilleur de tous ces sables en gĂ©nĂ©ral est celui qui fait du bruit Ă©tant frottĂ© entre les mains ; il ne vaut rien sâil est terreux, sâil nâa pas dâĂąpretĂ©, et si, Ă©tant jnis sur une Ă©toffe blanche, il y laisse des marques, aprĂšs en avoir Ă©tĂ© secouĂ©. Manque-t-on dâendroit dâoĂč lâon puisse, en creusant la terre, tirer de bon sable? il faut prendre alors le meilleur quâon pourra trouver parmi le gravier. On peut mĂȘme en tirer du bord de la mer ; ce sable , cependant , a un dĂ©faut, le mortier quâon en fait, reste long-temps Ă sĂ©cher; et les murailles quâon en bĂątit, ne peuvent pas porter une grande charge , Ă moins quâon ait la prĂ©caution de les maçonner Ă plusieurs reprises. En aucune maniĂšre , il ne peut servir pour lâenduit des plafonds. Il a encore le dĂ©sagrĂ©ment de faire suinter les murailles qui en sont crĂ©pies, Ă cause du sel qui se dissout et fait tout fondre ; au contraire, le mortier fait avec le sable fossile, sĂšche trĂšs-vite. Quand on emploie ce dernier pour enduire les murailles et plafonner, ces ouvrages durent long-temps, il est vrai, pourvu quâon le mette dâabord en Ćuvre car si on le garde long-temps, le soleil et la lune lâaltĂšrent , la pluie le dissout et le change presquâen terre ; ce qui fait quâil ne vaut plus rien pour lier les pierres , faire des murailles fermes et capables de soutenir de grands fardeaux. Cependant ce sable , quoique nouvellement tirĂ© de terre , vaut mieux pour maçonner que pour faire des enduits ; parce quâil est si gras , et sĂšche si vite , quâĂ©tant mĂȘlĂ© avec la chaux et la paille , il fait un mortier quâon ne peut empĂȘcher de gerser. Pour les enduits, on doit donc prĂ©fĂ©rer le sable de riviĂšre, qui est au contraire trĂšs-maigre, mais il faut quâon le batte avec le maillet, comme on fait pour les pavĂ©s de Smalthe , ce qui les rend on ne peut pas plus durs. 2 REMARQUES. La soliditĂ© d J une muraille dĂ©pend surtout du mortier, et le mortier ne sera bon , quâautanl quâon y emploiera le meilleur des sables ; le plus mauvais de tous est celui qui est terreux, comme O Voyez le G . 1 " 6 Ch. de ce Livre. sont Ă la fin , et celles qui sont Ă la fin du i. er chap. 2 Voyez, Livre V. Chap. II, le» remarques qui du Yll. me Liv. LIVRE II, C h Ă p. iy. \ 6i lâobserve trĂšs-bien Yilruve. On peut dire que le dĂ©faut gĂ©nĂ©ral de tous ceux qui bĂątissent , dans ce pays, est de se servir de cette espĂšce de sable ; on croit nâemployer que du sable, et on emploie beaucoup de terre. Rien nâest plus aisĂ© cependant que de le rendre bon , voici comment on choisit le sable le plus blanc quâon puisse trouver ; .car câest celui dans lequel il se trouve moins de terre ; ensuite on le lave dans lâeau de riviĂšre, qui emporte toutes les parties terreuses , il vous reste un sable trĂšs-pur, qui rĂ©sonne, qui est dur lorsquâil est frottĂ© dans les mains et qui a toutes les qualitĂ©s que Yilruve exige. Nous admirons la soliditĂ© des murs des anciens ; le ciment en est si dur , quâon brise plutĂŽt les pierres , que de les dĂ©tacher ; tout leur secret consistoit dans le choix du sable. On peut regarder les sables comme les dĂ©bris des plus grandes pierres , ou comme les premiers matĂ©riaux de la formation des pierres. En effet du grĂšs brisĂ© devient du sable ; et celui-ci sert , pour ainsi dire , de base Ă la plupart des pierres, sur-tout au grĂšs. Jâai souvent employĂ© , principalement pour les enduits , du mortier , oĂč , au lieu de sable , je meltois du grĂšs pilĂ© , mĂ©lĂ©^avec de bonne chaux ; ce mortier , lorsquâil Ă©loit sec , avoit la duretĂ© et la soliditĂ© du grĂšs meme ; ce qui faisoit lâadmiration de tous les ouvriers. Yilruve parle des autres espĂšces de sable , de leurs dĂ©fauts, et. de leurs qualitĂ©s. Il parle dâabord de celui quâon trouve en creusant dans la terre , quâil nomme arena fossicia , auquel il donne la prĂ©fĂ©rence. Jâai traduit ce nom, comme Galiani, par sable fossile ; il entend , sous cette dĂ©nomination , celui que nous connoissons sous le nom de sable vilrifiable qui est composĂ© de fragmens de silex et de quartz. Câest celui dont on se sert dans la composition de la terre Ă faĂŻence , de certaines porcelaines , des glaces , mĂȘme pour nettoyer le verre , pour polir le marbre , lâalbĂątre , etc. 11 a sur-tout la propriĂ©tĂ© de donner de la duretĂ© aux cimens et Ă la brique etc. Lorsquâon nâa pas de sable fossile , Yilruve dit quâil faut se servir de sable de riviĂšre , et mĂȘme de celui de mer. Le dĂ©faut du sable de riviĂšre est dâavoir le grain extrĂȘmement gros ; il nâest composĂ© , le plus souvent , que de silex trĂšs-dur , qui ne peut se lier ni faire corps avec la chaux,. Quant au sable quâon prend au bord de la mer , comme il y reste beaucoup de sel , il a le grand dĂ©faut , comme lâobserve Yilruve , dâempĂȘcher le mortier , oĂč il sâen trouve , de sĂ©cher , Ă moins quâon ne lâait bien lavĂ© dans lâeau de riviĂšre , avant de le mettre en oeuvre , pour en faire sortir les parties salines. MalgrĂ© cela , il en reste toujours une partie , ce qui fait que ce mortier sĂšche difficilement, et je prĂ©fĂšre le sable fossile. Pour les enduits , Yilruve prĂ©fĂšre que lâon emploie le sable de riviĂšre , qui a le grain plus gros ; mais il veut quâon batte ces enduits avec le maillet , comme on fait en Italie les pavĂ©s de smalte ; ces pavĂ©s se font de la sorte aprĂšs avoir rendu le terrain trĂšs-uni, on Ă©tend dessus une couche de mortier fait de chaux , de sable ou de pouzzolane ; on arrange , sur cet enduit , des fragmens de marbre cassĂ©s ou dâautres pierres , de diffĂ©rentes couleurs ; on les dispose en cornpar- timens ou dessins , dâaprĂšs les couleurs ; chaque morceau de pierre , comme dit Yilruve , Liv. Yiir. Ch. 7. ne doit pas excĂ©der le poids dâune livre. Lorsque cet arrangement est terminĂ© , on remplit tous les vuides avec le mĂȘme mortier , auquel on a donnĂ© une couleur semblable Ă celle des dif- fĂ©rens marbres ou pierres ; on bat le tout avec un maillet plat ou une dame , Ă mesure quâil sĂšche; on polit le tout avec un gros grĂšs ; on le lustre ensuite comme si câĂ©loit du marbre, et il en 02 L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. prend tout le brillant. Ces paves sont de la plus grande beautĂ© ; on diroit que la salle qui en est pavĂ©e , lâest dâun seul morceau de marbre. Câest ainsi que sont pavĂ©es presque toutes les salles du palais ducal Ă Milan; celle de lâarsenal Ă Venise ; de la villa BorgbĂšse Ă Rome , et de presque tous les palais en Italie. Vitruve en parle aussi dans le Ch. 7. du Liv. VIII. , de mĂȘme que Pline dans le I2. m0 Ch. du XXXV. me Liv. de son histoire , et dit quâon y employoit aussi , au lieu de pierres , des fragmens de tuiles , et de vases de terre cuite , cassĂ©s. Jâai entendu nommer ces sortes de pavĂ©s , dans la Lombardie et a Rome , paves de smalte , ou en scctgnuli; a JNaples , on nomme celte composition lastrichi. Ils y emploient lâespĂšce de pierre nommĂ©e rapillo, qui, Ă cause de sa grande porositĂ© , se lie Ă merveille avec la chaux. On en fait aussi une autre avec des pierres ponces ; on choisit toutes celles qui sont de rebut , et qui ne peuvent entrer dans le commerce ; on les mĂȘle avec de la chaux ; ce mortier est em* ployĂ© dans la construction des terrasses il a la mĂȘme propriĂ©tĂ© que le ciment fait avec la pouz-? zolane ; il prend corps avec un tel degrĂ© de duretĂ© , quâĂ peine les ferremens y ont prise , quelque temps aprĂšs quâil a Ă©tĂ© mis en Ćuvre. >-1 CHAPITRE V. ti - b De la Chaux. r avoir indiquĂ© de quel sable on doit se servir, je vais rechercher avec soin , tout ce qui concerne la chaux ; il faut la faire de pierres blanches , ou de cailloux. Il est bon quâon sache , que celle faite , avec les pierres les plus dures et les plus pesantes , est la meilleure pour maçonner ; et quâau contraire , celle quâon fera de pierre un peu spongieuse , sera prĂ©fĂ©rable pour les enduits* Lorsque la chaux est Ă©teinte , il faudra la mĂȘler avec le sable , dans la proportion suivante. On met trois parties de sable de cave, ou deux de sable de riviĂšre ou de mer sur une de chaux câest la proportion la plus juste quâon puisse garder dans leur mĂ©lange ; elle sera encore meilleure, si on ajoute au sable de mer et de riviĂšre, une troisiĂšme partie de tuiles pilĂ©es et cassĂ©es. Si lâon veut savoir pour quelles raisons ce mĂ©lange de chaux , de sable et dâeau forme un corps si dur et si solide , il faut considĂ©rer que les pierres, ainsi que tout ce qui existe, sont composĂ©es dâĂ©lĂ©- mens. Les corps, oĂč lâair domine , sont plus tendres ; ceux oĂč câest lâeau, sont plus tenaces ; ceux oĂč câest la terre sont plus durs ; et lorsque câest le feu , ils sont plus fragiles. Il faut encore observer que si on piloit des pierres Ă chaux, sans ĂȘtre cuites, et qu on mĂȘlĂąt cette poudre avec du sable , elle ne vaudroit rien pour la maçonnerie ; \ L I Y- R E II, C h A p. y. ,63 mais si on les fait dissoudre par la force du feu, elles deviennent poreuses, se percent de plusieurs ouvertures ; leur humiditĂ© naturelle sâĂ©puise , et lâair qu elles contiennent se retire et nây laisse quâune chaleur cachĂ©e. On conçoit aisĂ©ment quâĂ©tant plongĂ©es dans lâeau , avant que cette chaleur soit dissipĂ©e , elles acquiĂšrent une nouvelle force , sâĂ©chauffent au moyen de lâeau qui pĂ©nĂštre leurs cavitĂ©s ; le froid fait Ă©vaporer la chaleur qu elles renfermoient ; câest ce qui fait que les pierres Ă chaux sont beaucoup plus lĂ©gĂšres, lorsquâon les tire du fourneau , quâavant de les y mettre. Car si on les pĂšse aprĂšs qu elles sont cuites , on trouvera leur poids diminuĂ© dâun tiers quoiqu'elles aient conservĂ© leur premiĂšre grandeur ; ainsi les ouvertures quelles ont dans toutes leurs parties , sont cause quelles sâattachent avec le sable , quand on les mĂȘle ensemble , et quâen se sĂ©chant, elles joignent et lient fermement les pierres, pour en faire une niasse fort solide. REMARQUES. Le mortier est destinĂ© a remplir les intervalles qui se trouvent nĂ©cessairement entre les pierres ou les briques , dans les lieux oĂč elles se joignent ; son propre- est de sây attacher fortement en se coagulant , et de former un ciment , qui , lorsquâil est bon , devient aussi dur que les pierres quâil unit ; de maniĂšre quâils ne forment .ensemble quâun mĂȘme corps. Lâunion de la chaux avec le sable produit cet effet. La chaux nâest autre chose que la pierre calcaire calcinĂ©e par lâaction du feu. DâaprĂšs les principes des chimistes , la concrĂ©tion et la soliditĂ© de tous les corps viennent de leur sel. La violence du feu dans la fournaise fait Ă©vacuer la plus grande partie des sels volatils et sulphurĂ©s , ainsi que les parties humides qui se trouvoient dans la pierre , et qui contribuoient Ă unir , lier, et ne former quâun seul tout , des parties qui composent la pierre 1 . Quant Ă la portion des sels qui ont rĂ©sistĂ© Ă lâaction du feu et ne se sont pas volatilisĂ©s , ils se trouvent dĂ©sunis et divisĂ©s par la perte des parties qui les unissoient en remplissant les vuides , et nâen faisoient quâun mĂȘme corps , mais dont' ils se trouvent privĂ©s par lâĂ©vacuation que le feu en a faite. Lâeau que lâon jette sur ces pierres , ainsi calcinĂ©es , pĂ©nĂštre dans toutes les divisions et vuides que ces parties ont laissĂ©s; la chaleur qui reste dans ces pierres calcinĂ©es , produit une Ă©bullition , dilate lâair que contient lâeau , et fait Ă©clater ces pierres calcinĂ©es en une infinitĂ© de petites paities qui deviennent une poudre extrĂȘmement fine ; mais celte poudre de chaux , qui a pu rĂ©sister au feu , nâest autre chose quâun sel qui peut se fondre dans lâeau. En rĂ©unissant cette poudre avec une certaine quantitĂ© de sable et dâeau, elle reprend une soliditĂ© Ă©gale , lorsquâelle est bien faite , Ă celle de la pierre car lâeau et la chaux forment un corps compacte , qui remplit tous les vuides qui sĂ©parent les grains de sable ; lâeau met en fusion les sels qui forment la chaux, et qui, unis avec ceux que contient le sable , font un seul corps trĂšs-solide. t Voyez Descartes , art. 55 de la seconde partie de ses prin- soliditĂ©' des corps, cipes, Mallebranche , Rech, de la vĂ©ritĂ©' , Liv. VI. Ch. g , sur la 64 L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. Les effets de la nature ont dâabord suffi pour rĂ©gler , avec quelques succĂšs , le travail des ouvriers. La physique expĂ©rimentale les a perfectionnĂ©s dâĂąge en Ăąge par de nouvelles remarques. Elle a , de bonne heure , aperçu que lâinsinuation des liquides , entre les masses des corps solides, y pbrloit une action et un effort capables de les dĂ©sunir, Ă proportion de la quantitĂ© , ou de lâactivitĂ© de ces liquides. Elle a observĂ© que câĂ©toit, au contraire, Ă lâĂ©coulement des liquides , quâĂ©loit due la cohĂ©sion des masses petites ou grandes , de quelque façon que la chose sâexĂ©cutĂąt dans le secret de la nature , qui semble attentive Ă nous en dĂ©rober la connoissance. Lâeau par elle-mĂȘme nâest pas un liquide elle ne le devient que par lâinsinuation de lâair et du vrai principe des liqueurs qui est le feu lâĂ©coulement de celui-ci la ramĂšne Ă sa condensation naturelle. Il en est de mĂȘme du sang , des huiles , des sels , et de bien dâautres corps qui sâĂ©paississent Ă proportion de la sortie du feu , et avec lesquels le feu agit trĂšs - diffĂ©remment ; comme la mĂȘme main frappe des coups trĂšs - diffĂ©rens avec une baguette , avec un marteau , et avec une massue. Câest par un effet de cette remarque quâon emploie le grand feu pour soulever toutes les petites parties dâun mĂ©tal et les mettre en fusion. Câest par une suite du mĂȘme principe expĂ©rimental que le grand feu a Ă©tĂ© mis en Ćuvre pour Ă©branler toutes les parties de la pierre Ă diaux , et de la pierre Ă plĂątre , ce qui en facilite dâabord la pulvĂ©risation et lâobĂ©issance Ă nos souhaits. Lâeau , qui les retient dans un Ă©tat de dĂ©sunion , venant Ă se dissiper , elles reprendront leur premiĂšre tĂ©nacitĂ©. Câest donc lâĂ©coulement des liquides, câest-Ă -dire , de lâair , de lâeau et du feu , qui cause la roi- deur et la tĂ©nacitĂ© du mortier. Les liquides ne peuvent sâĂ©chapper totalement dâentre deux surfaces voisines , sans donner lieu Ă ces surfaces de se toucher immĂ©diatement dans un grand nombre de points , et de sâunir, comme si elles ne faisoient quâun corps. Lâair retirĂ© par la succion de la machine pneumatique dâentre deux hĂ©misphĂšres qui sont unis , nây exerce plus son ressort, et ne travaille plus Ă les dĂ©sunir. Alors la pression universelle agit sur ces deux parties de globes , sans y trouver aucune action , ni liquide intermĂ©diaire qui lui rĂ©siste , et elle les comprime si fortement lâune contre lâautre , que les plus grands efforts ont peine Ă les dĂ©tacher. La mĂȘme cohĂ©sion, ou du moins, un commencement dâunion se fait apercevoir dans deux marbres polis , ou entre deux ardoises quâon couche de biais en les glissant lâune sur lâautre , de façon ;Ă nây laisser entrer presquâaucun air. Lâaction des liquides, dont nous avons observĂ© les diffĂ©rĂȘns progrĂšs, et sans la faire tourner Ă notre profit , nous est dâun secours infini. La sĂ©cheresse ou le feu , dans un certain degrĂ© , pousse et dissipe lâeau sans violence. Celle-ci, en sâĂ©vaporant , emporte avec elle une grande quantitĂ© dâair quâelle contient, et dont elle est presque toujours saisie. Les ouvriers ont vu ces effets et il suffit pour les regler. 11 nous est impossible de sucer lâair qui est entre deux pierres , ou entre une multitude de grains de sable , pour en unir plus Ă©troitement les surfaces sans lâeffort de la gravitation qui est toujours retarde par lâobstacle de lâair dispersĂ© dans les interstices. Nous avons recours Ă un expĂ©dient nous jetons entre les pierres une couche de ciment, qui produit un double effet ; savoir, de faciliter par son obĂ©issance lâexacte position de la pierre quâon veut asseoir , et ensuite de tenir entre les pierres une multitude innombrable de petites surfaces, immĂ©diatement appliquĂ©es lâune sur lâautre , 65 Y L;I VUE til, C h a p. V, ]âautre , par le dĂ©part de lâhumiditĂ© du ciment, que la sĂ©cheresse ou le feu en fait sortir lâextrĂȘme tĂ©nuitĂ© de ces parcelles ne cause aux matiĂšres conjointes aucun affaissement sensible. Câest encore une autre expĂ©rience trĂšs-bien connue aujourdâhui, que lâeau se glisse avec lâair dans de petites ouvertures, oĂč lâair seul he T peut outrerâ; et quâbn se sert de lâeau pour dissiper lâair qui sâĂ©coule avec elle ; mais que le parfait dessĂšchement donne lieu Ă une application si exacte des petites surfaces, quâaprĂšs cela , ni lâair ni lâeau ne se jettent plus entre deux. Ce que la sĂ©cheresse produit entre les masses de pierres et les couches de ciment , elle lâopĂšre pareillement enre les parties sableuses et la chaux du ciment celui-ci en est lui-mĂȘme une premiĂšre maçonnerie composĂ©e de parties dures et inflexibles , qui est le sable , et de parties souples et pliantes , formant un limon trĂšs-fin qui est la chaux. On nâignore pas quâun petit globe touche aux corps voisins par un plus grand nombre de parties, quâun trĂšs-grand, eu Ă©gard Ă lâextrĂȘme disproportion des parties que celui-ci renferme. .Ainsi plus la chaux qui entre dans le ciment est fine et attĂ©nuĂ©e , plus elle prĂ©sente de surface au sable auquel on lâa joint. Elle donne dâautant plus de prise Ă la pression de la gravitĂ© , lorsque le feu } fera Ă©couler. Jâair et lâhumiditĂ© qui se tenoit entre surface et surface. , * ; âą . Ainsi la pierre Ă chaux quâon unit au sable ou aux masses demi-vitrifiĂ©es de la brique et de la tuile, est composĂ©e principalement dâĂŒn limon . trĂšsrfm propre Ă remplir les interstices du sable; cnsorie que lâeau sâabsorbant entre les petites surfaces, çle limon ^ lâunit dâabord, en masse avec les, sables , et durcit le tout avec les pierres voisines par t 1âéçlutppement de lâhumide et de lâair dâentre- une infinitĂ© de points qui demeurent ainsi collĂ©s, et avec le temps presquâinsĂ©parables. Quelques-uns en ont conclu quâau lieu de lier les pierres ou les briques par un lit de ciment, on pourroit bĂątir sans ciment en polissant bien les pierres , aprĂšs les avoir taillĂ©es dâune coupe trĂšs-Ă©gale , et en les glissant horisontalement lâune sur lâautre ; mais lâexĂ©cution de cette mĂ©thode seroit peut ĂȘtre plus difficile et moins sure. Autre chose est- de. bĂątir philosophiquement autre chose de bĂątir solidement. Ou croit cependant voir des Ă©difices antiques dont les pierres sont immĂ©diatement posĂ©es lâune sur lâautre; peut-ĂȘtre aprĂšs avoir Ă©tĂ© long-temps frottĂ©es lâune contre lâautre, et sans, apparence de ciment entre deux. Telle Ă©toit Ă Reims la porte RasĂ©e , quâon disoit ĂȘtre, une de ces six arcades qui Ă voient Ă©tĂ©^consiruĂŻtes , soit pour honorer lâempereur Probus, par un mouvement de reconnoissance , lorsquâil fit planter la vigne dans lĂšs Gaules soit pour honorer le sĂ©jour que Garus ou Julien firent dans la Belgique/Vrtruve^pĂ fĂŻe amplement, dans le-huitiĂšme chapitre de ce livre, de diffĂ©rentes maniĂšres de maçonner dĂ©s anciens ; nous- Ăż renvoyons le lecteur. On en admirĂ© encore les restes Ă Rome , dans la Campanie, Ă VĂ©rone , JNfismes, TrĂȘves et dans nos grandes roules. A Paris mĂȘme , on joit encore des restes de la maçonnerie des anciens Romains, entre lâhĂŽtel de Cluny et la rue de la Harpe., quâon dit.'ĂȘtre les ruines dâanciens Thermes. , âąâą . âą - - " o h'ttt ' ' /; s ; âą t. .. ; V ";r f ; . -//'âą U 0 /' 9 66 LâARCHITECTURE DE V I T RĂVE. C IliA P I T R E Y I. ! OC I! âą '"1 âą ' âą i Je la Pouzzolane. S, I i Il existe une espĂšce de poudre , Ă laquelle la nature a donnĂ© une qualitĂ© admirable ; elle se trouve dans les environs de Baies , et dans les ; terres qui entourent le Mont-VĂ©suve. Cette terre mĂȘlĂ©e avec la chaux et les pierres , rend la maçonnerie si solide, que non-seulement, dans les Ă©difices- ordinaires , mais mĂȘme au fond de la mer, elle fait des masses de la plus grande duretĂ©. Ceux qui en ont cherchĂ© la cause, ont remarquĂ© que , 1 sous ces montagnes et dans tout lĂ© territoire, il se trouve quantitĂ© de fontaines dâeau chaude ; ce quâils attribuent Ă la quantitĂ© dâalun, de souffre et de bitume , qui alimente sous la terre un grand feuj La*vapeur de ce feu, passant Ă travers de cette terres, la rend plus lĂ©gĂšre*et donne au tuf une sĂ©cheresse qui attire lâhumiditĂ©; alors la chaux , a la pouzzolane et le tuf qui *sont engendrĂ©s par le feu se mĂȘlent etâsĂ© li ioignent 'Ă©iiSĂ«iĂčhle ;'par le ' ihoyĂšn de J lâĂ©aĂŒ ; elles sâendurcis- â A . âąâąyy .. toll â* * n - i0 ; cil-,-. i âą sent fort vite , et font une masse si solide que les Ilots ne peuvent ni la rompre ni la dissoudre.' âą âąâą* -bd I IS0 1 li u i* j d - nr - 0 1 . âąâą"j 1 V tiiJ 1 > »JĂŻ r t. M La preuve quâil y a du feu sous les montagnes qui sont auprĂšs de Cumes et de Baies, câest que Mans des grottes qui sont-* creusĂ©es ÂŁ pour servir dâĂ©tuves , il sâĂ©lĂšve naturellement deis vapeurs chaudes 0 iptĂ« lĂ©âfeu occasionne ', aprĂšs avoir pĂ©nĂ©trĂ© la terre ; elles s'amassent ! dans ces lieux et sont dĂ© lajpĂźus J grande utilitĂ© pour la transpiration. Ce quâon raconte du Mont-VĂ©suve le prouvĂ© encore; on dit que les. feux qui brĂ»lent continuellement dans cette montagne , j ont autrefois Ă©clatĂ© et formĂ© de grandes Ă©ruptions, et i quâelles ont. r^pauddi une matiĂšre, [enflammĂ©e dans tous,, les lieux dâalentour ; cet embrasement produisit les pierres que Ton appĂšle spongieuses ; ou ponces pompeĂŻanes. Câest une espĂšce de pierres auxquelles le feu donne p par la cuisson, une qualitĂ© ! particuliĂšre , qui ne se rencontre point'dans dâautres , si ce nâest dans celles qui sont autour du Mont - Etna et 1 des collmes de Mysie, appelĂ©es Catake - kaumenie , i [par les Grecs, Ces Fontaines dâeau bouillantes , ces bains de vapeurs, qui sont dans les montagnes , les flammes qui ont autrefois ravagĂ© ces contrĂ©es , prouvent, Ă nâen pas douter, que câest la vĂ©hĂ©mence du feu qui a dessĂ©chĂ© et Ă©puisĂ© i C'est-Ă -dire brĂ»lĂ©es* U LIVRE I I, C ii v p. vi. 67 toute lâhumiditĂ© de la terre et du tuf, comme il dessĂšche celle de la chaux dans les fournaises. On sait que les matiĂšres , quoique de diffĂ©rentes espĂšces , lorsquâelles sont brĂ»lĂ©es ensemble , ne font plus quâune mĂȘme nature ; la chaleur Ă©vapore promptement lâeau quâelles contiennent, confond et mĂȘle les parties qui sont semblables ; la force du feu les rĂ©unit et les rend trĂšs - dures. On pourroit mâobjecter, et me demander pourquoi lâon ne trouve pas en Toscane cette poudre, dont la qualitĂ© est dâendurcir le mortier au fond de lâeau , quoiquâil y ait dans ce pays beaucoup de fontaines ! dâeau chaude. Avant de me condamner, il faut savoir que dans tous les pays , les terres non plus que les pierres, ne sont pas de la mĂȘme nature. Dans certains endroits, la terre a beaucoup de profondeur ; dans dâautres , il nây a que du sable , du gravier , ou de l'argile ; ainsi les qualitĂ©s de la terre changent dâun lieu Ă un autre , et sont presque aussi diversifiĂ©es que les rĂ©gions qui sont sur le globe. Par exemple dans la Toscane , et dans les autres pays dâItalie , que renferme lâAppennin , on trouve presque par-tout du sable fossile , tandis quâau-delĂ de ces montagnes vers la mer Adriatique , il ne sâen trouve pas plus que dans lâAchaĂŻe , ni au-delĂ de la mer en Asie , oĂč mĂȘme on nâen a jamais ouĂŻ parler. Il nây a donc rien d Ă©tonnant, si, dans les lieux oĂč il se voit des fontaines bouillantes , les dispositions nĂ©cessaires pour produire cette poudre ne se rencontrent pas toujours. Car un heureux hasard dirige bien plus la nature dans ses productions , que la volontĂ© de lâhomme. Lorsque ce sont les rochers qui forment les montagnes ; et non pas la terre , la force du feu pĂ©nĂštre leurs veines, consume ce quâil y a de plus tendre , et nây laisse que les choses dures qui lui rĂ©sistent. Câest ainsi que dans la Campanie , la terre brĂ»lĂ©e se rĂ©duit en cendres , et dans la Toscane , oĂč elle n est que cuite , elle se convertit en ^charbon ; ces deux espĂšces de terre sont excellentes pour bĂątir; mais lâune est prĂ©fĂ©rable pour les Ă©difices quâon construit sur la terre , et lâautre pour les ouvrages qui se font dans lâeau de la mer. Quant Ă cette matiĂšre qui est plus molle que le tuf, et plus dure que la terre ordinaire , lorsquâelle est rĂ©duite en cendres par les feux souterrains, elle forme une espĂšce de sable , quâon nomme Carbunculus. REMARQUES. Le ciment se prĂ©parent chez les anciens Romains , ainsi quâon le fait encore prĂ©sentement Ă Rome , avec la pouzzolane. Cette terre avoit anciennement le mĂȘme nom quâon lui donne aujourdâhui ; savoir pulvis puteolanus, sans doute Ă cause quâon lâa dĂ©couverte , pour la premiĂšre fois , a PutĂ©oli, aujourdâhui Pozzuolo prĂšs de Naples , et non pas comme lâa avancĂ© Philander, Ă cause quon lâa dĂ©couverte en creusant des* puits. Sidonius Apollinaris nomme cette poudre die e arche a , 9 * 68 L â A R C H TT E C T U R E D E YITRUVE. parce que Dicearchos Ă©ioit lâancien nom 4 e Pouzzole, lorsquâelle faisoit partie dâune colonie grecque; Vitruve parle encore de la pouzzolane dans le douziĂšme chapitre du cinquiĂšme livre , oĂč il dit, que pour les ouvrages de maçonneries , qui doivent se trouver dans lâeau , il faut se servir de la poudre qui se trouve dans les environs de Cumes et du promontoire de Minerve; cependant Yitruve pe nomme nulle part cette poudre, pouzzolane. Dans toutes les Ă©ditions, ce chapitre est intitulĂ© de la pouzzolane ; mais on sait que cette division , par chapitre , nâest pas de Yitruve, et quâelle a Ă©tĂ© faite dans les temps modernes. Pline , Liv. XXXY, chapitre i 3 , et SĂ©nĂšque , Liv. III de ses questions naturelles , nomment tous deux , la pouzzolane , et disent , quâĂ©tant employĂ©e sous,.lâeau, mĂȘlĂ©e avec de la chaux, elle acquiert la duretĂ© de Ja pierre. La pouzzolane est ou noirĂątre, ou rougeĂątre; celle qui est noirĂątre est plus i ferrugineuse , plus pesante et plus sĂšche que lâautre , et lâon sâen sert principalement pour les Ă©difices exposĂ©s Ă lâeau car comme elle est aigre, elle se crevasse facilement Ă lâair; lâautre est plus- terreuse et vaut mieux pour les bĂątimens sur terre. La premiĂšre espĂšce se trouve dans les environs de Naples, et non pas la seconde; mais on fouille lâune et lâautre Ă Rome, et dans le voisinage de cette ville ; il nây en a point dans tout autre endroit de lâItalie. Il faut observer, cependant, que les anciens ont fait peu dâusage de la pouzzolane rouge j tandis quâon lâestime maintenant beaucoup plus Ă Rome que la noire. On ne trouve pas non plus la pouzzolane dans les terres de Rome , sur le bord de la mer ; et il faut que les anciens qui lâont employĂ©e Ă Antium , lâaient tirĂ©e de Naples, ainsi quâon doit encore lây aller chercher aujour- s dâhui. Il en coĂ»te moins de faire venir cette terre par mer de Naples , que de la transporter par voiture de Rome. On lâapporte en Toscane , par vaisseau , jusquâĂ Livourne , et on en fait mĂȘme passer dans dâautres pays. Alberli 1, dans ses ouvrages sur lâarchitecture , parle de la pouzzolane , comme dâune chose quâil ne connoissoit que par ouĂŻ-dire; et, Ă la vĂ©ritĂ©, elle ne pouvoit pas lui ĂȘtre connue autrement, parce quâil Ă©ioit Florentin. Il confond mĂȘme souvent cette terre avec le rapillo. Il parort dâailleurs que la pouzzolane ne sâest, non plus, jamais trouvĂ©e en 'GrĂšce , comme Yitruve le remarque ; et câest faute dâavoir cette terre, que les Grecs nâont pas pu donner Ă leurs voĂ»tes la'mĂȘme lĂ©gĂšretĂ©, que les Romains. Il faut nĂ©anmoins quâils aient eu le secret de faire un trĂšs-bon ciment, 2 ainsi que nous le prouve encore le grand rĂ©servoir de Sparte, fait de cailloux qui font corps ensemble par nn ciment aussi dur que les cailloux mĂȘmes. Les deux espĂšces de pouzzolane se changent Ă©galement en pierre , et lâon peut dire que le ciment en devient plus dur que la pierre mĂȘme quâil joint ensemble ; câest ce quâon peut voir aux ruines des bĂątimens placĂ©s sur le bord de la mer, et quâelle baigne de ses - ^ eaux , tant Ă Pozzuolo quâĂ Raies et dans tout ce pays ; ainsi quâĂ Porto dâAnzio , qui est lâancien Antium, dont les piliers qui formoienl le port et le fermoient, ainsi que les bĂątimens dont nous j. venons de parler, Ă©toient construits de briques. Jâai vu , dans les jardins de la ville dâEst Ă Tivoly, j des statues faites de pouzzolane, exposĂ©es, depuis plus de deux cents ans, aux injures de lâair, et parfaitement conservĂ©es. Câest aussi avec la pouzzolane que les anciens construisaient les rues de 1 Liv. II. Ch. 9 , p. 5 i. Liv. III. Ch. 16. p. g 5 , cd. Firenz 2 Hast. de lâacad. des inscript. T. XVI, p. 3 , câd. de Paris. sS5o fol. LIVRE' II, C h A p. vu. 4 6 9 Rome i et les grands chemins de lâempire ; mĂ©thode quâon a conservĂ©e jusquâĂ nos jours. Les couches de pouzzolane sâĂ©tendent fort avant dans la terre , et quelquefois jusquâĂ quatre-vingts palmes de profondeur. Tout le terrain de la ville de Rome est minĂ© par la fouille de cette terre , et les paieries ont plusieurs milles de long ; câest dans ces galeries que sont les catacombes. Lorsquâon travailla aux fondemens du palais de la Yilla du cardinal Alexandre Albani , on trouva trois de ces galeries lâune au-dessus de lâautre ; de sorte quâon fut obligĂ© de jeter les fondemens encore pluĂż- avant sous terre , câest- Ă -dire, Ă plus de quatre-vingts palmes de profondeur. CHAPITRE VIL Des CarriĂšres doĂč Ton tire la Pierre. Jâai parlĂ© des diffĂ©rentes qualitĂ©s de la chaux et du sable ; il convient, pour suivre lâordre des matiĂšres, que je parle des carriĂšres dâoĂč lâon tire les pierres qui sont nĂ©cessaires pour bĂątir tant les pierres de taille que le moellon. Toutes les pierres diffĂšrent beaucoup en espĂšces et en qualitĂ©s; il y en a de tendres , comme sont les pierres rouges des environs de Rome, celles quâon nomme pallienses , fidenates et Albanes. Dâautres sont un peu plus dures , comme les pierres tiburtines , celles dâ Anitemes , les Soractines et autres semblables. Nous avons finalement les pierres dures comme le silex ou caillou. Il existe encore plusieurs autres espĂšces, comme le tuf rouge et noir dans la Campanie , le blanc dans lâOmbrie , le Pisantin et prĂšs de Venise ; on les coupe avec la scie comme le bois. Les pierres tendres ont cet avantage on les taille aisĂ©ment, et elles sont dâun bon usage , lorsquâon les emploie dans des lieux couverts ; mais placĂ©es en dehors , la gelĂ©e et les pluies les rĂ©duisent en poussiĂšre ; et si elles sont employĂ©es dans des lieux prĂšs de la mer , lâair saumĂątre les ronge. La grande chaleur leur fait aussi beaucoup de tort. Les pierres tiburtines, qui sont du mĂȘme genre, conviennent pour porter de grands poids , et rĂ©sistent trĂšs-bien aux injures de lâair, tandis que le feu leur est trĂšs-nuisible ; sa chaleur les fait Ă©clater , Ă cause que lâair et le feu dominent dans les Ă©lĂ©mens qui les composent, tandis quâil sây trouve peu dâeau et de terre. Le peu quelles ont de ces deux derniers Ă©lĂ©mens , ne suffit pas pour empĂȘcher la force du feu et des vapeurs de lâair de pĂ©nĂ©trer leurs porositĂ©s, oĂč ne trouvant aucun Ă©lĂ©ment contraire, il sâallume aisĂ©ment. H y a encore dâautres carriĂšres, sur les confins du territoire des Tarquiniens ; les pierres quâon en tire se nomment aniliĂšnes ; elles ont la mĂȘme cou- * + 7 o LâARCHITECTURE DE V I T R U V Ă Leur que celles dâAlbe ; la plus grande partie se taille sur les bords du lac de BolsĂšne, et dans la prĂ©fecture de Statonie. Elles ont plusieurs qualitĂ©s; comme de rĂ©sistera la gelĂ©e et au feu , parce qu elles contiennent peu dâair et de feu , beaucoup de terre et mĂ©diocrement dâeau ; ainsi leur nature compacte fait quelles rĂ©sistent aux injures du temps , comme on en voit la preuve dans les anciens monumens , qui existent encore auprĂšs de la ville de Ferentino, faite avec cette pierre car on y voit de grandes statues qui sont trĂšs-belles , dâautres plus petites et plusieurs ornemens trĂšs - dĂ©licats qui reprĂ©sentent des roses et des feuilles dâacanthe ; ces ouvrages, malgrĂ© leur vieillesse, nâont encore rien souffert, et paroissent encore ĂȘtre nouveaux. Ces pierres sont encore trĂšs-utiles pour les fondeurs en bronze , qui les trouvent fort bonnes pour faire leurs moules de sorte que si ces carriĂšres Ă©toient plus prĂšs de Rome, on nâem- ployeroit pas dâautres pierres pour tous les ouvrages quâon y fait. Mais puisque les carriĂšres de pierres rouges et celles de Palliennes sont fort prĂšs de la ville, et quâil est aisĂ© de sâen procurer des pierres , on prĂ©fĂšre les employer, en prenant nĂ©anmoins certaines prĂ©cautions , pour empĂȘcher quâelles ne se gĂątent ; les principales sont de les tirer plutĂŽt pendant lâĂ©tĂ© que dans lâhiver ; de les exposer Ă l'air dans un lieu dĂ©couvert, deux ans avant de sâen servir, afin de jeter dans les fondemens celles que le mauvais temps aura endommagĂ©es ; celles qui rĂ©sistent Ă cette Ă©preuve , la nature elle-mĂȘme prouvant leur bontĂ© , on les emploie Ă la maçonnerie faite hors de terre. On suit cette mĂ©thode tant Ă lâĂ©gard du moellon que des. pierres de taille. REMARQUES. Les premiĂšres pierres dont on se servit pour les Ă©difices publics , tant dans la GrĂšce quâĂ Rome, Ă©toient une espĂšce de tuf ; le temple de Jupiter Ă Elis en Ă©toit bĂąti. Un temple de Girgenti en Sicile , le temple et lâĂ©difice de Pestum , sur le bord du golfe de Salerne , ainsi que les murs carrĂ©s de celte mĂȘme ville , Ă©toient tous construits avec de pareilles pierres. Cette concrĂ©tion pierreuse est de deux espĂšces la premiĂšre se Forme dâune humiditĂ© lapidifique ; elle est blanchĂątre et verdĂątre , dâune nature spongieuse , et par cette raison plus lĂ©gĂšre'que les autres espĂšces de pierres , et que le marbre , cette pierre est connue sous le nom de Travertin , et se trouve prĂšs de Tivoli. La seconde espĂšce est une terre pĂ©trifiĂ©e ; elle est quelquefois dâun noir grisĂątre et quelquefois rosacĂ©e on lâappelle en Italie tufo > et en France , tuf. Vilruve lui donne le nom de pierre rouge , quâon trouve aux environs de Rome j, câest ce que Perrault a ignorĂ©. Lâune de ces espĂšces est enlevĂ©e du roc , au-dessus de la terre ; lâautre se tire du sein de la terre mĂȘme. Celle-ci se trouve gĂ©nĂ©ralement dans les endroits oĂč il y a des sources sulfureuses, telles que celles de Tivoli et de Pestum ; câest prĂšs de cette ville que le ruisseau sulfureux dont parle Strabon se jette dans la mer. LIVRE II, C h A p. vu. Le travertin , en particulier , se forme des eaux de lâAnio , aujourdâhui le Tcvcrone , Ă qui Ă»n attribue une qualitĂ© pĂ©trifiante. Dans les carriĂšres dâoĂč lâon tire les pierres liburtines , il se forme , en assez peu de temps , une nouvelle masse de pierre qui remplace celle quâon en a tirĂ©e Ăż ce qui prouve ce fait , câe*t quâon a trouvĂ© enfermĂ© dans ces masses , en les faisant Ă©clater , des outils de fer qui avoient servi autrefois Ă des ouvriers qui y avoient travaillĂ©. Le marbre croĂźt de mĂȘme de nouveau car on a trouvĂ© un pied de chĂšvre de fer dans un bloc de marbre , de lâespĂšce appelĂ©e marbre dâAfrique , quâon vouloit scier pour lâemployer Ă lâĂ©glise dĂ©lia Morte derriĂšre le palais FaimĂšse Ă Rome. Cette croissance est nĂ©anmoins plus remarquable encore dans le porphire , puisquâon y trouva , il y a trente ans, une mĂ©daille dâor dâAuguste. La seconde espĂšce de pierre , savoir le tuf, est dâune qualitĂ© terreuse et beaucoup plus tendre que le travertin $ on en trouve prĂšs de Naples une espĂšce quâon travaille avec la coignĂ©e. Lâautre espĂšce de tuf se fouille aussi dans les environs de Naples , et sâappelle rapillo ; mais peut - ĂȘtre faudroil-il dire lapiĂŻlo. Câest un moellon plus lapidifiĂ© et plus noir , qui sert Ă faire le plancher dans plusieurs maisons, et Ă couvrir tous les toits liorisontaux. Ce moellon se trouve aussi Ă Frascali prĂšs de lâancien Tusculum., oĂč il est connu sous le nom de rapillo. Câest probablement une ancienne production volcanique des montagnes de ce canton , oĂč lâon en trouve une grande quantitĂ©. Lorsquâon lit dans lâancienne histoire romaine quâon a quelquefois vu tomber Ă Albano des pluies de pierres , il faut , sans doute , attribuer ce phĂ©nomĂšne Ă quelque Ă©ruption volcanique des montagnes voisines. Les anciens enlevoient le tuf par masses carrĂ©es , et lâemployoient non-seulement pour les fondemens , mais ils en construisoient aussi des Ă©difices entiers. Les aqueducs , hors de Rome, qui ne sont pas de briques , sont faits de tuf. LâintĂ©rieur des rĂčurs du ColisĂ©e est de la mĂȘme pierre. Aujourdâhui on tire le tuf des carriĂšres en petits blocs , tels que le hoyau les sĂ©pare de la masse ; on le fait servir 'pour les fondemens et les voĂ»tes , ou pour garnir les rĂŻiurs , comme je le ferai voir plus bas. > - ; h . On employa aussi pour les premiers bĂątimens Ă Rome , et dans les environs de celle ville , la pierre appelĂ©e peperino , qui est une espĂšce de pierre , dâun gris foncĂ© , plus dure que le tuf , et plus tendre que le travertin , par-consĂ©quent plus facile Ă travailler que cette derniĂšre. Les anciens lui donnoient le nom de pierre dâAlbano , comme dit Vilruve , parce quâon en enlevoit beaucoup a Albano ; ce que les commentateurs et les traducteurs des Ă©crivains que nous avons citĂ©s , nâont pas remarquĂ©. Aujourdâhui on lâappelle Ă Rome peperino > et Ă Naples pipemo , ou pipiemo , nom qui vient., probablement dĂ© Pipemo y Privernum J oĂč cette pierre se trouvoit en grande abondance. Câest de cette pierre que sont faits les fondemens du capitole , jetĂ©s lâan de Rome 367 , dont On voit encore de nos jours cinq hauteurs de grosses pierres au-dessus de la terre , que Ficorini ^a fait graver 1. La plupart de ces pierres ont cinq palmes et demie de longueur. La cloacca 1 Roma antiqua. p. 6a Ăż2 \ LâARCHITECTURE DE VITRĂĂVE. massima , le plus ancien tombeau romain quâon connoisse 1 , prĂšs dâAlbano , et un autre des plus anciens monumens romains 2 , de lâan 358 de la ville de Rome , savoir un conduit pour lâĂ©coulement des eaux du lac dâAlbano , nommĂ© prĂ©sentement lago di Castello 3 sont tous construits de celte espĂšce de pierre. Il faut que le travertin nâait pas Ă©tĂ© connu dans les premiers temps de Rome car on ne gravoit, alors les inscriptions que sur le peperino y telle est celle Ă lâhonneur de L. Corn. Scipio Barbatus, le plus digne homme de son siĂšcle 3. Cette inscription a Ă©tĂ© faite pendant la seconde guerre punique , et se voit aujourdâhui dans la bibliothĂšque du palais Barberin ; elle est du mĂȘme Ăąge que celle de Duillius , qui Ă©toit sans doute gravĂ©e aussi sur la mĂȘme espĂšce de pierre , et non pas sur le marbre 4, comme on a prĂ©tendu le prouver par un passage de Silius ; car les fragmens de marbre ne sont pas du mĂȘme temps ; et Selden 5, ainsi que plusieurs autres savans, nâauroient pas Ă©tĂ© dans le doute sur la date de ce monument , sâils avoient pu voir eux-mĂȘmes cette inscription. Le marbre a Ă©tĂ© connu fort tard Ă Rome ; mais il le fut cependant avant lâan 676 de cette ville, comme un Ă©crivain lâa avancĂ© 6 car Pline , 7 que lâon cite Ă ce sujet , parle du marbre de Numidie , et du premier seuil de porte quâon en a fait ; mais il assure, au mĂȘme endroit, que lâart de scier le marbre nâa pas Ă©tĂ© connu en Italie avant le temps d ? Auguste , ce qui paroĂźt Ă * peine croyable. Quoiquâil en soit, on a employĂ© le marbre, sans se servir de la scie , Ă deux monumens du temps de la rĂ©publique ; ce sont le tombeau de Cecilia MetĂšlla , appelĂ© aujourdâhui Capo di Bove , çt la pyramide de Ceslius. Le peperino , ou la pierre dâAlbano % servit aussi aux principaux Ă©difices publies , dans le mĂȘme temps quâon employoit avec tant de profusion le marbre Ă Rome. Ceux qui se sont conservĂ©s du temps des empereurs , sont le forum transitorium de Nerva , le temple de Pallas au forum de cet empereur , et le temple dâAnloniii et de Fausline j un petit temple hors de Rome , prĂšs le lac Pantano , de soixante palmes de long , sur trente de large , dont les quatre murs sont encore sur pied , et peut-ĂȘtre dâun temps plus reculĂ©. Ces temples cependant Ă©loient revĂȘtus de tables de marbre , ainsi quâil paroĂźt par les dĂ©bris, qui nous j Bartoli Sepulcr. a tib. V. Chap. 19. 3 Jac. Simondi veluslissima fnscrip. ; qua. L. Com. Scipionis Elo giam contineUir. Romts 1617. 4- 4 Ryck de tapit . c. 33 -. ed Gandm\ 1617. 5 Marm. Ărundel p. io 3 . 6 Gozze , inscrip , dĂ©lia colon, rosi, di Duillio. Rom. x 633 . 4 - p. 8. 7 Liv. XXXVI. 68. VV* V\ uttut CHAPITRE LIVRE II, C h a p. y m. CHAPITRE VIII. Des diffĂ©rentes espĂšces de Maçonneries. *Ăl existe deux espĂšces de maçonneries, la maillĂ©e L , quâon emploie prĂ©sentement par-tout, et lâirrĂ©guliĂšre I qui est lâancienne maniĂšre. La maillĂ©e est plus agrĂ©able Ă la vue ; mais elle a le dĂ©faut de se fendre , parce que les lits et les joints rompent et sâĂ©cartent aisĂ©ment de tous cĂŽtĂ©s au lieu que la maçonnerie irrĂ©guliĂšre , dans laquelle des pierres inĂ©gales , posĂ©es les unes sur les autres , sont liĂ©es sans rĂ©gularitĂ© , est beaucoup meilleure , quoique le parement nâen soit pas si beau. Dans l une ou lâautre de ces maniĂšres de bĂątir , il faut y employer les plus petites pierres car plus il y aura de mortier , plus lâouvrage sera solide la pierre Ă©tant fort poreuse, enlĂšve trop vite lâhumiditĂ© qui se trouve dans la chaux ; câest pourquoi il faut que le mortier domine , le mur Ă©tant alors plus humide , ne sĂšche pas aussi vite , et les matĂ©riaux , qui le composent, sont bien mieux liĂ©s ensemble ; tandis que sâil nây en a pas beaucoup , les pores des pierres absorbant dâabord lâhumiditĂ© qui sây trouve , le sable se sĂ©pare de la chaux , et cause la ruine de la muraille. Nous remarquons cela dans plusieurs bĂątimens anciens qui sont prĂšs de Rome ; leurs murailles faites de marbre ou de grandes pierres de taille Ă©quarries, travaillĂ©es en dehors ne sont liĂ©es dans lâintĂ©rieur que par un peu de remplage ; la chaux qui sây trouve , sĂšche Ă la longue ; le mortier perd alors toute sa force , il tombe et se dissipe Ă cause quâil y en a peu ; les pierres sâĂ©branlent dans leurs joints, qui se dĂ©sunissent, et ces murailles tombent en ruine. Pour obvier Ă ces inconvĂ©niens , il faut laisser un vuide entre les paremens ; remplir le dedans de pierres rouges Ă©quarries ou de briques , ou de cailloux communs ; donner aux murailles deux pieds dâĂ©paisseur , et joindre les deux paremens par des crochets de fer plombĂ©s. Si on fait ces murailles avec ordre et sans confusion , elles nâĂ©prouvent aucun dĂ©gĂąt, et durent Ă©ternellement ; parce que les lits de pierres et les joints se rapportent Ă©galement, et lient lâouvrage ensemble. Le mur par lĂ ne peut sâaffaisser , et les paremens qui sont si bien liĂ©s lâun Ă lâautre ne peuvent sâĂ©branler. Pour la mĂȘme raison, nous ne devons pas rejeter lâespĂšce de ma- * Planche flg. IO / 74 LâARCHITECTU-RE DE Y I T R TJ V E. çonnerie, dont les Grecs se servent quand ils n emploient pas les pierres de taille bien Ă©quarries et Ă©galement polies ; ils se contentent, dans ce cas, d arranger des cailloux , ou des pierres dures posĂ©es alternativement les unes sur les autres, comme si c Ă©toient des briques. Cela rend les murailles si solides qu elles durent Ă jamais. * Ils font ces constructions ordinaires de deux maniĂšres. Lâune appelĂ©e Isodome , G quand les assises sont d Ă©gale Ă©paisseur , lâautre Pseudisodome H quand elles sont inĂ©gales. Ces deux façons de bĂątir sont trĂšs-solides. PremiĂšrement la qualitĂ© dure et compacte des pierres fait qu elles ne peuvent absorber de suite toute 1 humiditĂ© du mortier, qui sây conserve trĂšs-long-temps ensuite lĂ©galitĂ© et le niveau des lits de pierres posĂ©s horizontalement, empĂȘchent les matĂ©riaux de sâaffaisser ; le mur Ă©tant de plus liĂ© dans toute son Ă©paisseur , il ne peut crĂ©vasser , et sa durĂ©e est infinie. La troisiĂšme maniĂšre est appelĂ©e Emplecton i, M dont nos villageois se servent aussi voici comme elle se fait. On rend les paremens le plus unis quâil est possible ; on remplit le milieu de mortier , on y jette les pierres pĂȘle-mĂȘle , comme elles viennent, sans aucunes liaisons. Nos maçons , qui ne cherchent quâĂ terminer le plutĂŽt possible leur ouvrage , lorsquâils Ă©lĂšvent les assises , nâont Ă©gard quâau parement , et remplissent le milieu de pierres mĂȘlĂ©es avec le mortier , quâils couchent de trois façons deux sont pour lâenduit des paremens , et la troisiĂšme sert pour remplir le milieu ; mais les Grecs ne font pas ainsi. Ils posĂšnt leurs pierres couchĂ©es, et ils font les assises tout le long de la muraille, avec dâautres pierres , qui, de deux en deux ? , vont dâun parement Ă lâautre , sans remplissage au-dedans. Par le moyen de ces pierres Ă double parement, qu'ils appellent Diatonoiis 2 , NN ils maintiennent la muraille dâun bout Ă lâautre dans une Ă©gale Ă©paisseur, et en liant ensemble les deux paremens lui donnent la plus grande soliditĂ©. Ceux qui suivront mes principes trouveront que câest la vraie maniĂšre de construire des Ă©difices qui durent long-temps. La maçonnerie qui paroĂźt belle Ă la vue , Ă cause qu elle est faite de pierres faciles Ă tailler , nâest pas la meilleure , ni celle qui dure le plus ; pour cette raison , les experts nommĂ©s pour apprĂ©cier les murs extĂ©rieurs , ne les estiment pas dâaprĂšs le prix quâils ont coĂ»tĂ© ; mais aprĂšs sâĂȘtre assurĂ©s de lâĂ©poque oĂč on les a faits , par les baux des loyers , ils dĂ©duisent , du prix quâils ont coĂ»tĂ© , autant de quatre-vingtiĂšmes parties, quâil y a dâannĂ©es que le mur est achevĂ©, et ne font payer que ce qui reste de toute la somme , Ă©tant dâavis quâelles ne peuvent durer plus de de quatre-vingts ans. ~ * * Planche III. me fig. i; 1 Câest-Ă -dire, entrelassĂ©e. a Câest-Ă -dire, Ă©tendue. 1 LIVRE II, C h a p. vin. 7 5 Il nâen est pas de mĂȘme pour les murailles de briques si elles sont encore bien dâaplomb , on ne dĂ©duit rien ; mais on les estime toujours ce quâelles ont coĂ»tĂ©. Câest pourquoi , dans beaucoup de villes , les Ă©difices , tant publics que particuliers , et mĂȘme les maisons royales , sont bĂąties en briques. Tels sont Ă AthĂšnes , les murs qui regardent le mont Hymette et le mont Pentelesien , et ceux de toutes les maisons. Les murailles de Cella , des temples de Jupiter et dâHercule , sont de briques , quoiquâen dehors , les architraves et les colonnes soient de pierre. On voit dans la ville dâArezzo en Italie , un ancien mur de briques trĂšs-bien bĂąti. La maison des rois Atalliques , prĂšs de Tralis , est bĂątie de mĂȘme ; elle sert aujourdâhui de logement Ă celui que les habitans de la ville ont choisi pour remplir les fonctions sacerdotales. Pendant la magistrature des Ediles Varron et Murena , on a apportĂ© , dans cette ville , pour en dĂ©corer le lieu des assemblĂ©es , des peintures quâon avoit sciĂ©es Ă Sparte hors d un mur de briques , et on les a enchĂąssĂ©es dans du bois. La maison de CrĂ©sus , que les Sardiens ont consacrĂ©e Ă ceux de leurs concitoyens , qui, par leur grand Ăąge, ont acquis le privilĂšge de vivre en repos dans un collĂšge de vieillards appelĂ© Geronsie , est aussi de briques. Dans la ville dâHalicarnasse , le palais du puissant roi Mausole, a des murailles de briques , quoiquâil soit par-tout ornĂ© de marbre de ProconĂšse. Elles sont encore aujourdâhui trĂšs-belles et trĂšs - entiĂšres , couvertes dâun enduit si bien poli , quâil ressemble Ă du verre. On ne peut dire , cependant, que ce soit par Ă©conomie que ce roi ne les a pas fait faire d une matiĂšre plus riche, lui qui Ă©toit si puissant et qui commandoit Ă toute la Carie ; et si lâon considĂšre les Ă©difices quâil a construits , on ne peut pas dire non plus que câĂ©toit faute de con- noĂźtre la belle architecture. Quoique ce roi fĂ»t nĂ© Ă Mylas , il prĂ©fĂ©roit la ville dâHalicarnasse , Ă cause de sa situation qui lui paroissoit trĂšs - avantageuse pour le commerce , ayant un trĂšs - bon port, ce qui le dĂ©termina dây bĂątir un palais. Lâemplacement de cette ville est courbĂ© en forme dâamphithéùtre ; il destina le bas, qui est prĂšs du port, pour en faire la place publique ; dans le milieu de ce circuit, sur la pente de la colline , se trouve une grande place , oĂč fut bĂąti ce superbe ouvrage , nommĂ© le MausolĂ©e , lâune des sept merveilles du monde ; dans le milieu du chĂąteau qui occupe plus loin , dans la mĂȘme direction , le lieu le plus Ă©levĂ© , il fit bĂątir le temple de Mars , et Ă©lever la statue colossale de ce dieu appelĂ©e Acrolithos 1 elle fut faite par un excellent ouvrier, nommĂ© TelochĂąles , ou comme dâautres croient, par TimothĂ©e. Sur la pointe , qui est Ă droite de la colline , il fit bĂątir les temples de VĂ©nus et de Mercure , auprĂšs de la fontaine Salmacis , Ă laquelle on attribue une qualitĂ© singuliĂšre ; on prĂ©tend que 1 Câest-Ă -dire, pierre Ă©levĂ©e. 7 G LâARCHITECTURE DE VITRUVE. ceux qui boivent de son eau , deviennent malades dâamour. On ne sera peut - ĂȘtre pas fĂąchĂ© de savoir comment une opinion aussi absurde s est rĂ©pandue dans le monde car il est certain , que ce quâon dit des effets de cette fontaine, pour rendre effĂ©minĂ©s et porter Ă la luxure ceux qui en boivent, nâest fondĂ© que sur la qualitĂ© de son eau, qui est trĂšs - agrĂ©able Ă boire. Lorsque MĂȘlas et Arevanias conduisirent une partie des habitans de la ville dâArgos et de TrĂ©zĂšne pour habiter dans ce lieu, ils en chassĂšrent les barbares Cariens et les LĂ©legues ; ces peuples se retirĂšrent dans les montagnes , dâoĂč ils firent des courses sur les Grecs , et ravagĂšrent tout le pays par leurs brigandages. A cette Ă©poque , lâun des habitans reconnut la bontĂ© de cette fontaine ; il y bĂątit une taverne pourvue de tout ce qui Ă©toit nĂ©cessaire , dans 1 espĂ©rance d y faire quelques profits ; il rĂ©ussit si bien dans cette entreprise , que les barbares y vinrent comme les autres , et sâhabituĂšrent, en vivant avec les Grecs , Ă la douceur de leurs mĆurs ; et, sans aucune contrainte , ils changĂšrent leur naturel farouche ; de sorte que par la vertu quâon attribue Ă cette fontaine , on ne doit pas entendre une mollesse qui corrompt les Ăąmes , mais qu elle a contribuĂ© Ă adoucir les mĆurs des barbares. Pour en revenir Ă la description de la ville , et des bĂątimens de Mausole , je dirai que, comme le temple de VĂ©nus et la fontaine dont nous avons parlĂ©, se trouvoient du cĂŽtĂ© droit, Ă gauche , du cĂŽtĂ© opposĂ©, se trouvoit le palais de ce roi , quâil avoit disposĂ© dâaprĂšs son goĂ»t ; il est situĂ© de maniĂšre quâĂ droite, il a la vue sur la place publique , sur le port , et gĂ©nĂ©ralement sur tous les remparts de la ville ; Ă gauche il regarde sur un autre port qui est cachĂ© par la montagne, de sorte quâon peut voir ce qui sây passe , sans ĂȘtre aperçu. Le roi, de son palais , donne ses ordres aux soldats et aux matelots. AprĂšs la mort de Mausole , la reine ArtĂ©mise son Ă©pouse prit les rĂȘnes du gouvernement. Les Rhodiens ne purent souffrir quâune femme rĂ©gnĂąt sur toute la Carie ; ils armĂšrent une Hotte pour sâemparer du royaume. ArtĂ©mise en fut avertie ; elle fit cacher, dans ses ports, une armĂ©e navale avec les forçats et tous les soldais de marine , et fit paroĂźtre le reste de lâarmĂ©e sur les remparts. Les Rhodiens firent approcher leur armĂ©e navale fort bien Ă©quipĂ©e ; comme elle Ă©toit prĂȘte dâentrer dans le grand port, la reine fit donner un signal de dessus les murailles , comme pour faire entendre que la ville vouloit se rendre. AussitĂŽt les Rhodiens sortent de leurs vaisseaux pour entrer dans la ville ; ArtĂ©mise fait de suite ouvrir le petit port, son armĂ©e navale en sort et entre dans celui oĂč Ă©toient les vaisseaux des Rhodiens qui Ă©toient vuides ; on les garnit de matelots et de soldats , et on les emmĂšne en pleine mer ; en mĂȘme - temps les Rhodiens , qui nâont plus aucun moyen de se retirer , sont tous massacrĂ©s sur la place publique , oĂč iis se trouvent enfermĂ©s. La LIVRE II, C h a p. vin. 77 reine de son cĂŽtĂ© , avec les navires Rhodiens qu elle avoit remplis de matelots et de ses soldats, sâen va droit Ă l isle de Rhodes. Les liabitans voyant venir leurs vaisseaux couronnĂ©s de lauriers , reçurent leurs ennemis , croyant que câĂ©toient leurs gens qui revenoient victorieux. ArtĂ©mise , aprĂšs sâĂȘtre emparĂ©e de la ville de Rhodes , et fait massacrer les principaux hahitans de cette Ăźle , Ă©leva un trophĂ©e dans la ville , composĂ© de deux statues de bronze , dont lâune reprĂ©sentoit la ville de Rhodes ; lâautre Ă©toit celle de cette reine , qui imprimoit, sur le front de celle qui reprĂ©sentoit la ville, les signes qui marquent la servitude. Long-temps aprĂšs , les Rhodiens nâosant abattre ' ces statues , parce que la religion fait un crime de renverser les trophĂ©es qui dĂ©diĂ©s aux dieux , sâavisĂšrent, pour en ĂŽter la vue, de bĂątir, tout autour, un Ă©difice fort Ă©levĂ©, Ă la maniĂšre des Grecs , quâils apelĂšrent Abaton, câest-Ă -dire oĂč lâon ne pĂ©nĂštre pas. Si des rois aussi puissans nâont pas dĂ©daignĂ© dâemployer les briques dans les bĂąti- mens , ce nâĂ©toit pas par Ă©conomie; lâargent quâils levoient dans leurs Ă©tats, et celui qui provenoit des dĂ©pouilles de lâennemi , Ă©toit plus que suffisant pour subvenir aux dĂ©penses nĂ©cessaires pour bĂątir non-seulement en moellons , mais en pierres de taille et mĂȘme en marbre. On ne doit donc pas mĂ©priser la maçonnerie en briques , si toutefois elles sont bien faites. Il est vrai quâon ne peut sâen servir dans la ville de Rome. Mais en voici la raison les lois dĂ©fendent de donner aux murs extĂ©rieurs, plus dâun pied et demi dâĂ©paisseur ; pour gagner plus dâespace dans sa maison , on ne veut pas en donner davantage aux autres murs. Ceux de briques ne sont bons quâau- tant quâil sâen trouve deux ou trois rangs dans lâĂ©paisseur , et on ne peut en mettre autant puisquâelle nâa quâun pied et demi dâailleurs Ă©tant aussi minces, ils ne pour- roient soutenir quâun Ă©tage, ce qui seroit fort mal entendu dans une ville qui contient autant dâhabitants, et oĂč il faut que la hauteur des Ă©difices supplĂ©e au dĂ©faut de place. On doit mĂȘme placer , de distance en distance , des pilastres de pierre , bĂątis avec des tuileaux , ou bien dâautres murs faits avec le moellon , pour fortifier ceux des maisons, en les liant Ă ceux-ci par des solives, afin quâils puissent sâĂ©lever assez haut, tant pour procurer lâavantage des cĂ©nacles , que lâagrĂ©ment de la vue i. La quantitĂ© dâĂ©tages et de balcons quâon y peut faire, rendent les habitations de Rome fort belles, sans occuper beaucoup de place. LâĂ©conomie du terrain est donc la seule raison pourquoi cette maçonnerie nâest pas en usage dans Rome ; mais comme la mĂȘme x Le cĂ©nacle Ă©toit le plus haut Ă©tage dâune maison , quâon louoit au menu peuple , et oĂč il alloit faire ses repas. In cĆnaculum rarus venit miles. Le soldat monte rarement jusquâau dernier Ă©tage, dit Juvenal, parce qu'il nây avoit que le menu peuple qui y logeoit. 7 s LâARCHITECTURE DE Y I T R U V E. * raison nâexiste pas hors de la ville, si on vent bĂątir dâune maniĂšre qui dure longtemps, il faut lâemployer. Sur le haut des murailles, sous le toit, on fait un massif avec des tuiles, de la hauteur dâun pied et demi, qui doit dĂ©border en forme de corniche ; ce moyen garantit les murailles de tout ce qui peut leur nuire car si une des tuiles de lâentablement vient Ă se casser ou Ă ĂȘtre emportĂ©e par le vent , la pluie coule par cette ouverture sur la muraille ; mais ce massif de tuiles empĂȘche que les briques nâen soient endommagĂ©es, parce que la saillie de la corniche fait tomber lâeau plus loin, et empĂȘ- che qu elle ne touche la muraille, tellement que la maçonnerie reste intacte. Quant aux tuiles, on ne peut guĂšre juger de leur bontĂ©, quâaprĂšs les avoir Ă©prouvĂ©es ; on nâen est assurĂ© quâautant quâelles ont rĂ©sistĂ© aux chaleurs de lâĂ©tĂ© et Ă toutes les injures du temps car si elles sont faites avec de mauvaise terre , et quelles soient mal cuites, la gelĂ©e et les pluies feront bientĂŽt connoĂźtre leurs dĂ©fauts ; et les tuiles qui se gĂątent dâabord sur les toits , ne sont pas propres pour maçonner. Lors donc quâon veut sâen servir pour cet usage , pour le faire de longue durĂ©e, il faut prendre celles qui sont depuis long-temps sur les toits. Il seroit Ă souhaiter quâon nâeĂ»t jamais pensĂ© Ă faire des murailles de bois entrelacĂ© ; si elles ont quelquâavantage Ă cause du peu dâespace qu elles occupent , et du peu de temps quâil faut pour les fabriquer, elles sont si dangereuses, Ă cause du feu, pour lequel elles semblent ĂȘtre un aliment tout prĂ©parĂ© , quâil vaut beaucoup mieux faire la dĂ©pense des murailles maçonnĂ©es que de sâexposer Ă un danger continuel qui ne sera jamais compensĂ© par la facilitĂ© de cette construction. Celles-mĂȘmes qui sont couvertes dâenduit se fendent nĂ©cessairement le long des montants et des travers car le bois qui sâenlle dâabord par lâhumiditĂ©, lorsquâon le couvre de mortier, se rĂ©trĂ©cit ensuite lorsquâil sĂšche, ce qui fait casser lâenduit. Cependant, si pour la promptitude, par Ă©conomie, ou pour remĂ©dier Ă quelque hors dâĂ©querre, on a besoin de pareilles murailles , voici comme on doit faire il faut les asseoir sur un empĂątement un peu Ă©levĂ© au-dessus du niveau de la terre , afin quâils ne touchent pas au pavĂ© ; autrement ils se pourrissent, et, en sâaffaissant, ils rompent et gĂątent la beautĂ© de lâenduit du mur. VoilĂ ce que jâavois Ă dire sur la construction des murailles , sur les matĂ©riaux quâon y emploie en gĂ©nĂ©ral , et sur leur bonne ou mauvaise qualitĂ©. Jâai traitĂ© cette matiĂšre le mieux que j ai pu ; il me reste Ă parler des planchers, des matĂ©riaux qu on y emploie, et comment il les faut choisir pour en faire un ouvrage durable, autant quâon en peut juger dâaprĂšs les lois de la nature. LIVRE II, C h a p. vin. REMARQUES. 79 Galiani remarque que Vitruve, , dans ce chapitre , parle dâabord des façons de maçonner en usage chez les Romains, ensuite de celle des Grecs, et quâil divise lâune et lâautre en deux espĂšces, savoir celle des Romains en maillĂ©e et irrĂ©guliĂšre, et celle des Grecs en pierre Ă©quarrie ou de taille , et la maçonnerie ordinaire lâune quâil nomme isodoma , et lâautre pseudlsodoma. Il est vrai , dit-il , que Vitruve parle encore dâune autre espĂšce de maçonnerie quâil nomme Emplectori; mais je crois quâil nâentend par celle-ci, quâune maniĂšre particuliĂšre dâexĂ©cuter celles dont il a dĂ©jĂ fait mention. CâĂ©toit lorsque lâintĂ©rieur des espĂšces de murs, dont il vient de parler , Ă©toit rempli , entre les deux paremens , de petites pierres , de morceaux de pots cassĂ©s et autres choses semblables , avec du ciment dont il y avoit toujours un tiers plus que de pierres. RĂ©unissant ensuite la maçonnerie des Grecs et celle des Romains , voici, Ă ce quâil] me semble , continue Galiani , la vraie maniĂšre de les diviser. Toutes les murailles sont bĂąties en massif ou en remplissage ; ces deux maniĂšres sâexĂ©cutent eii pierres de taille, en maçonnerie ordinaire, en maillĂ©e et irrĂ©guliĂšre le maçonnage ordinaire peut ĂȘtre isodome et pseudisodome. Il ne parle pas de celle en brique , parce quâil en a dĂ©jĂ fait mention dans le troisiĂšme chapitre de ce livre. Je suis de son avis , et je trouve sa division assez exacte ; mais avant de traiter des diffĂ©rentes constructions des bĂątimens , je vais commencer par celle des fondemens ils Ă©loient faits ou de grosses masses carrĂ©es de tuf , ou bien de petits moellons de ce mĂȘme tuf ; ce qui Ă©toit mĂȘme la maniĂšre la plus ordinaire, comme elle lâest encore aujourdâhui. La platĂ©e de cette derniĂšre maniĂšre se faisoit de la façon suivante , comme on le voit encore aux ruines qui sont Ă Rome. On jetoit le ciment , câest-Ă -dire la chaux et la pouzzolane mĂȘlĂ©es ensemble , par baquet dans la fosse , ce quâon recouvroit ensuite de morceaux de tuf; manoeuvre quâon recommençoit jusquâĂ ce que la fosse fĂ»t pleine. Ce fondement se consolidoit en deux jours de temps ; il devenoit mĂȘme si dur par le moyen de la pouzzolane , quâon pouvoit bĂątir dessus , immĂ©diatement aprĂšs cette opĂ©ration. Il faut que je rĂ©pĂšte ici une observation que jâai dĂ©jĂ faite , qui regarde les murailles mĂȘme celles hors de terre ; câest que les anciens , considĂ©rant la qualitĂ© solide de la pouzzolane , em- ployoient toujours plus de ciment que de pierre ; et câest, suivant cette mĂ©thode , que sont faites toutes les anciennes voĂ»tes ; comme nous lâobservons dans nos remarques sur les chapitres premier et dixiĂšme du cinquiĂšme livre. On Ă©levoit , sur les fondemens , les murailles ; celles de petites pierres Ă©toient en gĂ©nĂ©ral faites ' de morceaux de tuf, en forme de coin, ou de diamants taillĂ©s; la surface au parement Ă©toit carrĂ©e, on les plaçoit un angle en haut et un autre en bas , en forme de losange ; cette espĂšce de maçonnerie sâappeloit chez les anciens , opus reticulatum ; câest-Ă -dire ouvrage en rĂ©seau, ou maillĂ©e , Ă cause des joints des pierres , dont la figure Ă©toit semblable Ă un rĂ©seau. Chaque pointe de ces coins reprĂ©sentĂ©s dans la figure i. re de la planche XII.â, Lit. E. , Ă©toit enfoncĂ©e dans le mortier, qui , avec des pierres de la mĂȘme espĂšce , formoit le remplissage de lâintĂ©rieur de la muraille. Quand les anciens employoient , Ă cette sorte dâouvrage, des pierres tendres , comme le tuf, les carrĂ©s Ă©toieni 8o LâARCHITECTURE DE VITRUVE. tous trĂšs-Ă©gaux et bien travaillĂ©s.; cette rĂ©gularitĂ© plaisoit Ă la vue tels sont ceux quâon voit sur les restes du mausolĂ©e dâAuguste Ă Rome; mais quand ils se trouvoient clans un endroit, oĂč ils ne pouvoient se procurer cette espĂšce de pierre , et quâils Ă©taient obligĂ©s dâen employer de plus dures, comme celles quâon voit Ă lâamphitliéùtre de Theano , clans le labour a 6 lieues de Capoue , les carrĂ©s ne sont pas, Ă beaucoup prĂšs, aussi bien travaillĂ©s , et lâouvrage nâoffre pas un coup-dceil aussi agrĂ©able. Quoique Vitruve , et mĂȘme Pline 1 assurent que cette espĂšce de muraille nâĂ©st pas solide, cependant on voit , quâil sâest conservĂ© des bĂątimens entiers , construits uniquement de cette façon tels sont entrâautres la maison de campagne dite de MĂ©cĂšne a Tivoli , les ruines du temple cl Hercule , au mĂȘme endroit, les restes de la maison de campagne de Lucullus Ă Frascati, et de grands pans de murs de celle de Domitien , Ă Caslel-Gandolio , dans la villa Barberin. J ai trouve par toute Fltalie , des ruines d*opus reticulatum ; jâen ai vu sur-tout dans lâancienne Campanie , et dans une infinitĂ© dâautres endroits du royaume de JNaples. On en trouve aussi beaucoup en dâautres pays hors de lâItalie et, maigre 1 opinion de Vitruve , les ouvrages de ce genre qui se sont conservĂ©s jusquâĂ nous , sont en plus grand nombre , et plus intactes que ceux de tous les autres ; cela vient , sans doute , suivant les principes avances par notre auteur , de ce que les pierres en sont fort petites , mĂȘlĂ©es dans une grande quantitĂ© de chaux , ou pour mieux dire de mortier. Passons prĂ©sentement Ă lâautre espĂšce de maçonnerie en usage chez les Romains , qui, dâaprĂšs ce que dit Vitruve , et ce que nous montrent les monumens antiques qui nous restent , Ă©toit la maniĂšre de bĂątir des plus anciens temps. Vitruve nomme celte maniĂšre incerta , et,je lâai traduit par maçonnerie irrĂ©guliĂšre. Je nâai pas fait comme Perrault et dâautres qui ont voulu corriger ici le texte de Yitruve; au lieu dâincerta , ils ont mis inserta ; ils entendent par lĂ , une maçonnerie faite en liaison y dans laquelle les pierres sont posĂ©es les unes sur les autres comme des tuiles y ce que Vitruve nâa certainement pas voulu dire ici ; car cette espĂšce de maçonnerie est celle quâil nomme plus loin, isodome et pseudisodome. Perrault, et ceux qui ont suivi son sentiment, ne con- noissoient certainement pas cette maniĂšre que Vitruve nomme incerta et dont il existe encore un fragment considĂ©rable qui forme une partie des murs de la ville de Fondi dans le royaume de Naples , a droite de la porte de celle ville , nommĂ©e la porte de Rome. Cette muraille est faite de pierres blanches Ă paremens polis ; mais ces pierres sont toutes dâune forme diffĂ©rente car il y en a de pentagones , dâhexagones 3 et dâheptagones , et câest de cette maniĂšre quâelles sont emboitĂ©es les unes dans les autres. Elle est reprĂ©sentĂ©e lettre I. re , fig. i. re , pl. Ill. me Ce morceau est exĂ©cutĂ© avec clĂ©s pierres trĂšs-grosses, et si elles nâĂ©loient dâune autre espĂšce ^ que celles qui composent le pavĂ© de la voie AppiĂ©nne, on pourroit croire que câest une partie de cette voie qui a Ă©tĂ© transportĂ©e lĂ y et Ă©levĂ©e dâaplomb , tant les pierres de ce mur ressemblent Ă celles de ce pavĂ©, soit par lâirrĂ©gularitĂ© , soit par la grandeur. Les murs de Corinthe et dâEretria en EubĂ©e , Ă©toient construits de cette maniĂšre. Il y a voit aussi de pareils murs Ă Ostia , ville de lâEpire , dont San Gallo , ancien architecte de son temps on en voyoit encore quelques restes a donnĂ© le dessin et la description, 0 PU ne - Reticulata structura, qua frequentissimĂš slruunl nimis oporluna est, Liv. XXXVI, Ch. 5i. - 1 ;" A. qui LIVRE I I, C il Ă p. vin. 81 qui se trouvent sur vĂ©lin dans la bibliothĂšque du palais Barberin Ă Rome; VY inkelman a parlĂ© de ces murs dans sa description des pierres gravĂ©es de Stoseh page 175. Ou voit aussi reprĂ©sentĂ©s sur la colonne de Trajan les murs dâune ville construits de semblables pierres. Outre ces deux espĂšces de maçonneries , les Romains se servoient aussi de celles que les colonies. Grecques avoient introduites anciennement en Italie. Vitruve commence par indiquer les murs faits entiĂšrement de pierres de taille carrĂ©es, sans rem- plage ni moellon. Tous les murs de clĂŽture de la ville de Pestum , situĂ©e Ă un mille et demi du bord du golfe de Salerne , avec les quatre tours des angles , sont bĂątis de celle maniĂšre , avec de trĂšs-grandes pierres quadrangulĂ ires ou oblongues , jointes ensemble , Ă ce quâil paroĂźt, sans ciment ; de maniĂšre que le cĂŽtĂ© extĂ©rieur de ces pierres offre une surface taillĂ©e en forme de diamant. Les uns prĂ©tendent que cetlĂȘ ville a Ă©tĂ© bĂątie par les Sybarites ; dâautres par les Dauriens ce quâil y a de certain , câest que ces murs sont de la plus haute antiquitĂ© ; et malgrĂ© le dĂ©faut que Vitruve reproche Ă cette maçonnerie , ils se sont conservĂ©s en entier ; quoiquâil y ait deux mille ans quâils sont bĂątis. Ces murs de pierres carrĂ©es , soit de tuf, de peperin , de travertin , ou de marbre , se faisoient en posant simplement ces pierres les unes sur les autres , et quoiquâen dise Yilruve , Ă ce* quâil paroĂźt , sans ciment ; de sorte quâils se soutenoient par leur propre poids. Dans les temps les plus reculĂ©s , on prenoit, pour construire , les plus grosses pierres quâon pou- voit trouver; câest ce qui a fait dire que câĂ©toit des ouvrages de Cyclopes. 1 Câest pour celte mĂȘme raison que les gens du pays donnent encore aujourdâhui le nom de Palais des GĂ©ants 2 aux ruines du temple de Jupiter Ă Girgenti en Sicile. Les pierres sont en gĂ©nĂ©ral dâune Ă©querre si juste et les arrĂȘtes si vives , que les joints ressemblent Ă un fil mince ; et câest ce que quelques Ă©crivains ont appelĂ© apfiovia- art quâon admiroit particuliĂšrement au temple que Scopas , 3 bĂątit Ă TĂ©gĂ©e les joints dâun temple de Cmcum Ă©toient couverts de listeaux dâor 4. On a remarquĂ© que les grandes pierres dâautres bĂąlimens Ă©toient liĂ©es ensemble avec des ou des clefs , comme Yitruve lâenseigne dans ce chapitre ; ces clefs Ă©toient de mĂ©tal pour le marbre , parce que le fer y cause des taches de rouille. Alberti dit aussi avoir trouvĂ© des clefs ou des crampons de bois dans des bĂątimens anciens 5 ; M. Le Roi les a remarquĂ©s aux ruines dâun temple dans le territoire dâAthĂšnes ; on en a trouvĂ©s aussi au temple de Jupiter Ă Girgenti. Lâautre espece de maçonnerie en usage chez les Grecs, que Yitruve indique ensuite, est la mĂȘme que la prĂ©cĂ©dente , si ce nâest quâon nây employoit pas de pierres taillĂ©es , mais telles qttâelles se trouâ voient naturellement ; on les lioit en les posant alternativement les unes sur les autres , comme' si C etoient des briques. LâintĂ©rieur du mur nâĂ©toit pas rempli avec du moellon jetĂ© Ă bain de mortier , comme lâEmpiecton ; mais avec la mĂȘme espĂšce de pierre , qui Ă©toit liĂ©e comme celles des paremens. Voyez la j. re fig. H de la III. rae planche. 1 Pausan. Liv. II. 2 Fazell. rer. Sici. Bec. Liv. "VI, p. ,127. ed, Panor, i 568 . 3 Pausan. Liy. YIII. 4 Plin. Liv, XXXVI. Ch. 22. Il parle dans le mĂȘme chapitre des maniĂšres de bĂątir en usage chez les Grecs , dites Isodome et Emplectone. 5 Archit, Liv. III, Ch. a. II 82 LâARCHITECTURE DE VITRTJVE. Les couclies minces et assez Ă©gales de pierre calcaire et du grĂšs schist, convenoient extrĂȘmement pour faire ces sortes dâouvrages ; et dans les Apennins , il se trouve beaucoup de pierre calcaire. Lorsque les assises ou rangs de pierres Ă©toient tous dâune Ă©gale Ă©paisseur , comme ils sont reprĂ©sentĂ©s dans la 1." fig, lettre G de la III. me planche , on nomme cet ouvrage Isodome y et lorsquâils Ă©toient inĂ©gaux , comme dans la mĂȘme fig. lettre H, on les nommoit Pseudisodome . CHAPITRE IX. Des bois propres Ă bĂątir. Le temps le plus propre Ă la coupe du bois pour bĂątir , est depuis le commen- ment de lâautomne jusquâau printemps ; câest-Ă -dire , avant que le vent Favonius ne commence Ă souffler car au printemps , la tige de tous les arbres est pleine de la sĂšve vigoureuse qui reproduit tous les ans leurs feuilles et leurs fruits. Cette saison qui les remplit dâhumiditĂ© , les gonfle et les rend beaucoup plus foibles , semblables aux femmes, qui, pendant leur grossesse , ne sont ni aussi fortes, ni en aussi bonne santĂ© ; ce qui fait quâon ne garantit pas la santĂ© des esclaves quâon vend pendant qu elles sont enceintes. Voici la raison dĂ© tout cela lorsque le germe qui a Ă©tĂ© conçu vient Ă croĂźtre , il attire Ă lui la plus grande partie de la nourriture ; de sorte que plus les fruits se fortifient en mĂ»rissant , plus ils diminuent les forces et la santĂ© de celle qui les porte'; mais aprĂšs les couches , toute cette nourriture qui nâest plus employĂ©e Ă lâaccroissement et Ă la nutrition dâun corps Ă©tranger , se retire dans les veines qui Ă©toient vuides ; alors le corps de la mĂšre se fortifie et revient dans son premier Ă©tat Câest ainsi quâen automne , lorsque les fruits sont mĂ»rs , qĂŒe les feuilles commencent Ă se flĂ©trir, lĂšs arbres retiennent tous les sucs que leurs racines tirent de la terre ; ils reprennent leur ancienne force ; le froid de 1 hiver qui survient , les resserre et les affermit. Câest pourquoi le temps que j indique est le meilleur pour couper le bois. Pour le bien couper, il faut cerner les arbres par le pied, de maniĂšre que le tronc de lâarbre , dans son rayon, reste intact depuis le coeur jusquâĂ la moitiĂ© de sa circonfĂ©rence , on le laisse ainsi pendant quelque temps , afin que lâhumiditĂ© en sorte et quelle sâĂ©coule de lâaubier par cette entaille , tellement quelle ne puisse corrompre ni gĂąter le bois par la suite. Quand lâarbre sera bien sec, et quâil nâen sortira LIVRE I I, C h a ÂŁ>. ix. 83 plus dâhumiditĂ©, il le faut abattre ; .alors il sera excellent Ă mettre en Ćuvre. Ce qui se pratique Ă lâĂ©gard des arbustes, prouve combien cette mĂ©thode est utile dans une certaine saison de l'annĂ©e , pn les perce par le bas , pour ĂŽter cette humiditĂ© superflue; cela les fortifie et les fait durer plus long-temps. Si on nĂ©glige de le faire, elle sâamasse et se pourrit, dans lâintĂ©rieur de leur tige , ce qui fait quâils demeurent foibles et languissans. Les .arbres donc, que lâon fera ainsi sĂ©cher sur pied , avant quâils soient morts, ou Ă©puisĂ©s par la vieillesse , seront exeeUens pour bĂątir, et dureront long-temps aprĂšs qu ils seront employĂ©s. Sâil existe plusieurs espĂšces dâarbres , leur qualitĂ© diffĂšre aussi beaucoup. Nous employons dans les bĂątimens le chĂȘne , lâorme, le peuplier , le cyprĂšs et le sapin ; ils ne conviennent cependant pas Ă©galement Ă tous les ouvrages car on ne peut pas faire du chĂȘne ce quâon fait du sapin , ni du cyprĂšs ce quâon fait de lâorme ; les propriĂ©tĂ©s de chacun de ces bois Ă©tant diffĂ©rentes, Ă cause des Ă©lĂ©mens dont ils sont composĂ©s, ils ne peuvent Ă©galement servir au mĂȘme ouvrage. Le sapin qui renferme beaucoup dâair et de feu , qui contient peu dâeau et de terre , Ă©tant composĂ© dâĂ©lĂ©mens aussi lĂ©gers , pĂšse lui-mĂȘme trĂšs-peu ; sa nature est dâĂȘtre ferme et tendu ; il plie sous le faix et tient le plancher fort droit; mais sa trop grande chaleur est cause quâil engendre des vers qui le gĂątent, quâil sâenflamme aisĂ©ment , Ă cause de sa nature aĂ©rĂ©e , et quâil occasionne souvent des incendies. Si on remarque le sapin avant de le couper , on verra que, prĂšs de la terre, il est uni et nâa pas de nĆuds Ă cause de lâhumiditĂ© que tirent ses racines ; mais la partie dâen haut qui jette beaucoup de branches, parce que la chaleur y abonde, est fort noueuse; quand on lâa coupĂ©e Ă la longueur de vingt pieds , et Ă©quarrie, on lâappelle fusterna , pour marquer la duretĂ© de ses nĆuds. Quant Ă la partie infĂ©rieure , si elle est assez grosse , pour ĂȘtre partagĂ©e en quatre , on la dĂ©charge de son aubour, et ce qui reste est trĂšs-bon pour la menuiserie, on lâappelle sapinea. LâĂ©lĂ©ment terrestre compose presque tout seul la nature du grand chĂȘne ; il a peu dâeau, dâair et de feu, aussi dure-t-il Ă©ternellement dans la terre ; parce que sa soliditĂ© fait quâil ne reçoit presque pas dâhumiditĂ© dans ses pores ; il la fuit tellement et il en contient si peu , quâil se tourmente , se gerse et se fend lorsquâon lâemploie hors de terre. Le petit chĂȘne , dont les principes sont beaucoup plus tempĂ©rĂ©s, est dâun trĂšs-bon usage dans les Ă©difices il ne rĂ©siste pas, il est vrai, Ă lâhumiditĂ©; elle sâinsinue aisĂ©- ii. 84 âą L'ARCHITECTURE DE VITRĂVE. ment dans ses'pores , en fait sortir l'air et le feu quâil contient , et avance par-lĂ sa corruption. Le cerrus, le liĂšge et le hĂȘtre qui ont beaucoup dâair , peu dâeau , de terre et de feu, sont dâune substance si peu solide , quâils se gĂątent , pour peu quâils soient humides. Le peuplier , le blanc comme le noir, le saul, le tilleul et le gatilier i, qui contiennent beaucoup de feu et dâĂ ir, mĂ©diocrement dâeau et un peu de terre, conviennent beaucoup , Ă cause de leur lĂ©gĂšretĂ© , pour faire des ouvrages dĂ©licatsâ; leur bois nâĂ©tant pas dur, parce quâil contient peu de terre, ils sont au contraire trĂšs-blancs, Ă cause quâils sont trĂšs-poreux; câest pourquoi ils conviennent beaucoup pour la sculpture. Lâaune qui croĂźt au bord des riviĂšres , et dont le bois nâest pas fort estimĂ©, est souvent trĂšs-utile ; comme lâair et le feu composent principalement son essence , il est excellent pour soutenir les fondemens , quâon bĂątit dans les marais les pilotis quâon fait de ces arbres , mis fort prĂšs les uns des autres , ont lâavantage de pouvoir prendre beaucoup dâhumiditĂ© sans qu elle leur nuise , parce quâils en ont peu naturellement sans se gĂąter ils soutiennent la charge des bĂątimens les plus massifs. Ainsi le bois qui se corrompt le plus facilement sur la terre , est celui qui dure le plus long-temps dans lâeau ; on en voit lâexpĂ©rience dans la ville de Havenne , oĂč toutes les maisons, tant publiques que particuliĂšres , sont fondĂ©es sur ces pilotis. La propriĂ©tĂ© de forme et du frĂȘne , qui ont beaucoup dâeau, peu dâair et de feu, et mĂ©diocrement de terre , est de sâĂ©clater difficilement quand on les emploie ; leur bois est aussi moins roicle que celui des autres arbres; câest pourquoi il plie plus facilement, si ce nâest lorsquâils sont tout-Ă -fait dessĂ©chĂ©s par le temps , ou par le moyen que nous avons indiquĂ© pour ĂŽter aux arbres lâhumiditĂ©, en les cernant pendant quâils sont encore sur pied ; cette fermetĂ©, qui les empĂȘche dâĂ©clater, fait quâils conviennent beaucoup pour les assemblages par tenons et par mortaise. Le charme , Ă cause quâil a peu de feu et de terre , mĂ©diocrement dâeau et dâair se rompt difficilement ; mais en revanche il plie aisĂ©ment. Câest pourquoi les Grecs, qui en font le joug de leurs bĂȘtes, lâappellent sigia, ziga, qui est le nom quâils donnent Ă cette espĂšce de joug. On remarque que les bois de cyprĂšs et de pin se courbent ordinairement, lorsqu ils sont mis en oeuvre ; leur excessive humiditĂ© en est cause car la grande quantitĂ© i Autrement Yugnus caslus. 85 TUI V R'E I I, C h k *. ikji J ĂŻi A d d'eau quâils contiennent nâest tempĂ©rĂ©e quelpar .la*mixtion des autres principes ; cependant ils existent long temps sans se gĂąter, Ă âcause qĂŒe lâextrĂȘme amertume de cette humiditĂ© empĂȘche la vermoulure , iet tue les vĂȘts -qui les"rongent ; par-lĂ les ouvrages quâon en fait durent toujours, f mn .ou o h-.^au Le cĂšdre et le genĂ©vrier ont la mĂȘme qualitĂ© et sont rĂ©sineux comme le pin et le cyprĂšs. Lâhuile du, cĂšdre qui sâappelle cedrium , sert Ă conserver tout ce que lâon veut; tellement que les livres quâon en frotte, ne, sont pas dans le cas dâĂȘtre gĂątĂ©s par les vers ni de se moisir. Les feuilles du cĂšdre ressemblent,Ă celles du cyprĂšs , et les fibres de son bois sont fort-droites. La sta^e de LiĂąne. dans fie temple dâEphĂšse, est de bois de cĂšdre,; le plafond est aussi dejce,bmsWdeimĂȘmĂš .que ceux de tous les plus grands temples. Cet arbre croĂźt principalement dans l Ăźle de Candie , en Afrique, et dans quelques endroits de la Syrie. r . '»⹠a ; i . ? nod â r " U-> ; Le larix , quâon ne voit guĂšre quâau bord du P© et- prĂšs dĂ©s cĂŽtes de la mer Adriav tique , est si amer , que les vers et la pourriture ne lâattaquent jamais ; mais il a une qualitĂ© bien plus essentielle , câest quâil est incombustible . pour le brĂ»ler , il faut le mettre dans le feu avec de lâautre bois , comme on fait des pierres pour les rĂ©duire en chaux; encore ne produit-il, ni flammes ni charbons , et il ne se consume quâĂ la longue car lâeau et la terre dominent dans sa composition , { qui nâa que peu de feu et dâair ; ce qui rend son bois si solide et tellement serrĂ© que le feu ne peut pĂ©nĂ©trer dans ses pores ; il lui rĂ©siste et ne peut ĂȘtre endommagĂ© quâĂ la longue ; il est dâailleurs si pesant quâil ne peut flotter sur lâeau. On ne peut le faire venir quâĂ lâaide des bateaux , ou sur des radeaux faits de sapin voici comme on a dĂ©couvert cette particularitĂ© ; lâĂąnecdote mĂ©rite dâĂȘtre connue. Dans le temps que Jules - CĂ©sar campoit prĂšs des Alpes , il commanda Ă tous les lieux circonvoisins de fournir les choses nĂ©cessaires pour la subsistance de son armĂ©e. Dans un chĂąteau-fort nommĂ© Larignum , il se trouva des gens assez hardis pour refuser de lui obĂ©ir , parce quâils Ă©toient persuadĂ©s , que , par sa situation avantageuse , cette place Ă©toit imprenable. CĂ©sar fit approcher ses troupes , et trouva devant la porte du chĂąteau , une tour faite de ce bois , mis en travers lâun sur lâautre en forme de bĂ»cher ; sa hauteur Ă©toit telle , que ceux qui Ă©toient dedans pour la dĂ©fendre , pouvoient aisĂ©ment en empĂȘcher lâapproche avec des leviers et des pierres. On remarqua quâils n avoient dâautres armes que des leviers, quâils ne pouvoient lancer bien loin, Ă cause de leur pesanteur. On ordonna donc Ă ceux qui faisoient les approches , de jeter au pied de la tour quantitĂ© de fagots, et dây mettre le feu, ce quâils exĂ©cutĂšrent de suite. Comme elle Ă©toit environnĂ©e dâune flamme qui sâĂ©levoit fort haut, on crut que toute la tour' 86 L â ARCHITECTURE DE V IT R U V E. Ă©toit consumĂ©e; mais le feu venant Ă s Ă©teindre , quelle fut la surprise de CĂ©sar en revoyant la tour toute entiĂšre ! il rĂ©solut alors de lâentourer dâune tranchĂ©e , qui mĂźt ses troupes hors dâatteinte des traits des ennemis, qui, dans la crainte dâĂȘtre forcĂ©s , furent obligĂ©s de se rendre. On leur demanda dâoĂč ils tiroient ce bois incombustible ? ils montrĂšrent cette espĂšce de bois, trĂšs - commun dans le pays, qui e-nomme larix, dâoĂč ils avaient appelĂ© leur chĂąteau LĂ rignum. On en fait venir, par le PĂŽ , Ă Ravenne , Ă Fano , Ă Pesaro , Ă AncĂŽne et autres villes des environs. Si lâon pouvoit sen procurer aisĂ©ment Ă Rome, rien 11e seroit plus avantageux ; il y se- roit de la plus grande utilitĂ© pour les bĂątimens sur tout pour ceux qui terminent les groupes ,des maisons. Si on" lâemployoit pour les boiseries des entablemens qui sont sous les tuiles 1 , il en rĂ©Sulteroit que , pendant les incendies , le feu ne passeroit r pas dam groupe Ă lâautre , puisque ce bois nâest pas susceptible de sâenflammer, ni de se convertir en charbon. Les feuilles de cet arbre ressemblent Ă celles dn pin ; le bois a le fil long ; il est aussi bon pour la menuiserie , que le sapin ; sa rĂ©sine liquide ressemble au miel attiquĂ©. On sâen sert pour guĂ©rir les phthisies. Ăź .. â OU . Ce que jâai dit sur les propriĂ©tĂ©s clĂ©s arbres et sur , leur s Ă©lĂ©mens., suffit Ă ce que je crois. Il me reste Ă expliquer pourquoi la qualitĂ© du sapin , quâonnomme Ă Rome Supemas , nâest .pas aussi bonne que celle quâon nomme Infemçis dont on se sert cependant beaucoup dans, la construction des Ă©difices, Ă cause quâil duce long-temps. Je vais faire voir n par les principes .qui me paraĂźtront les plus Ă©vidents , comment les qualitĂ©s ou les dĂ©fauts de cet arbre dĂ©pendent des lieux qui, les produisent. REMARQUES . Je vais rapporter les principes des naturalistes modernes , sur les causes de lâaccroissement des arbres , et sur les diffĂ©rentes espĂšces de bois, pour les opposer Ă ceux de Yilruve qui nâabĂ ndonne jamais son systĂšme des Ă©lĂ©mens. On remarque dans un arbre coupĂ© transversalement , le bois , lâaubier et lâĂ©corce. Toutes ces parties se font voir dans les branches 5 mais la moelle qui est au centre sây fait mieux remarquer. Cette moelle est un amas de petites chambrĂšttes sĂ©parĂ©es par des interstices on y trouve beaucoup de sĂšve. Autour de celle moelle , sont rassemblĂ©s , suivant la longueur du tronc , plusieurs vaisseaux, que lâon distingue en vaisseaux lymphatiques , vaisseaux propres , et trachĂ©es, dont nous dĂ©taillerons lâusage. La moelle rassemblĂ©e au centre jette des productions qui vont, ep quelque façon, sâĂ©panouir dans 1 ecorce ; ainsi 1 entrelacement des vaisseaux longitudinaux, avec les productions mĂ©dul* laires , forment la substance du bois et de lâĂ©corce. 11 faut observer dans 1 Ă©paisseur de lâecorce, trois parties diffĂ©rentes entrâelles cette peau fine qui touche immĂ©diatement le bois t et que lâon nomme liber , Y Ă©piderme ou la peau extĂ©rieure , et s âą LIVRE II, Cdap. iĂź. 87 lâĂ«corce moyenne qui se trouve deux prĂ©cĂ©dentes. Il est digne de remarque , que cette premiĂšre peau ou Ă©corce intĂ©rieure se dĂ©tache au printemps, et forme une nouvelle ceinture dâaccroissement au bois dans toute sĂ longueur. La prĂ©uve en est , que cette Ă©corce Ă©tant arrachĂ©e , le liber dans un endroit, le bois nây prend plus le moindre accroissement. .al . On distingue facilement, en coupant un arbre en travers , les divers accroisseihens annuels par ces cercles concentriques , câest-Ă -dire , ces couches ligneuses , qui sont des cĂŽnes- inscrivis , ou qui sâemboĂźtent les uns dans les autres, on peut compter le nombre de ses annĂ©es, parce quâil se forme tous les ans, comme il est dit ci-dessus , une couche ligneuse qui sâapplique sur lâancien bois, pendant quâil se forme pareillement une couche corticale sous lâancienne Ă©corce , dont lâextĂ©rieur tombe' par Ă©cailles dans les uns, comme lâorme, le plane , etc., ou se roule en feuillets comme dans le bouleau et le chĂšvre-feuille, etc. La oirconfĂ©rence dâun arbre Ă©tant formĂ©e par la- rĂ©volution entiĂšre de chaque couche , chaque couche est rĂ©pĂ©tĂ©e deux fois lorsquâon prend le diamĂštre de lâarbre ; câest pour cela quâon ne compte que lĂš demi-diamĂštre ou le rayon , pour avoir le- nombre rĂ©el dĂ©* ses couches; ou pour en juger exactement, on doit compter les cercles dâun arbre, dâune certaine* grosseur, assez prĂšs de son pied; câest lâendroit oĂč elles sont plus distinctes. Il'est de fait quĂ© dani les premiĂšres annĂ©es de lâarbre , les couches qui se forment sont trĂšs-Ă©paissĂ«s , tandis quâelles sont fort minces dons les derniers temps de son accroissement. Ges cercles ligneux nâont donc pas Ă©galement tous la mĂȘme largeur. Il y a plus ; la mĂȘme couche varie d^Ă©paisseiir-^ suivant lĂ 1 Situation des racines , et les diverses 1 expositions ĂŽĂč lâarbre a Ă©tĂ© plantĂ©; Le cĂŽtĂ© du'nord' J Ă©st Ăš'n ^ gĂ©nĂ©ral plus Ă©troit dans les climats tempĂ©rĂ©s et froids. Les derniers Cercles qui touchent Ă FéÚoreĂš sont plus minces, et dâune consistance plus lĂ©gĂšre ; câest ce quâon nomme lâanbief, que les ĂŽUdriĂ©rs rejettent comme peu propre Ă ĂȘffĂ© ; mis en Ćuvre. âą> âą '»âąâ ... Ă© ' Nous avons vu le moyen que Yitruve nous fournit pour, donner, Ă cet aubier , la qualitĂ© du bon bois nous verrons, dans la suite de cet article , ceux . que lâexpĂ©rience & aussi fournis Ă -M. de Buffon pour la^ mĂȘme chose. Lâarbre ,, en grossissant % force les libres de lâĂ©corceq Ă sâĂ©tendrer,; il rompt quelquefois les dehors avec un bruit Ă©clatant câest ce qui cause les crevasses quâon voit souvent Ă lâextĂ©rieur de lâĂ©corce. . 'âą -a ,oi> r fo ligneux , et quâon relire les morceaux rompus en sens opposĂ© , on aperçoit, entre les. deux morceaux , des filamens trĂšs-fins, qui, vus au microscope , paroissent ĂȘtre des bandes brillantes, roulĂ©es en tire-bourre. Câest par ces trachĂ©es , analogues, pour la forme, Ă celles des insectes , quâil proit que lâair entre dans les plantes , pour aider sans doute Ă lâascension des- liqueurs. f Ces trachĂ©es viennent aboutir Ă la surface extĂ©rieure n dĂ« lâĂ«corce. ;> 'p; ' ; âą T , ..,,rn ol Les vaisseaux propres sont des canaux creux , qui r sâĂ©lĂšvent dans toute la longu"â" de lâarbre i et ' ^_ ,tiennent le suc particulier Ă chaque espĂšce dâarbre. Câest de ces dilfĂ©rens sucs que dĂ©pend la qualitĂ© du bois, et non des Ă©lĂ©mens dont ils sont composĂ©s, comme dit Vitruve. Dans les uns, c est une rĂ©sine; dans dâautres uue gomme; dans celui-ci un; lait; 1 dans cet autre une huile y quelquefois câest un miel ou un sirop, ou une manne,â . 88 L \\ R C II I T E C T U IV E 1 E VIT R TJ V E. Les vaisseaux lymphatiques contiennent une lymphe qui diffĂ©rĂ© peu de lâeau pure, dans quelque peu dâarbres ; la vigne en donne'hure grande quantitĂ©, lorsquâelle pleure au printemps 5 mais elle cesse dâen donner quand lĂ©s feuilles sont Ă©panouies. La lymphe , ainsi quâon le voit, diffĂšre du suc propre, dans lequel il paroĂźt que rĂ©side principalement la vertu et la saveur des plantes. La mĂȘme organisation se retrouve dans les racines, dans leurs chevelus, dans les branches. Fous ces vaisseaux rĂ©unis dans les pĂ©dicules des feuilles , se distribuent ensuite en plusieurs gros faisceaux , dâoĂč il part un'nombre de faisceaux moins gros , qui se divisent et se subdivisent en une prodigieuse quantitĂ© rde ramifications qui forment un rĂ©seau,-quâon peut regarderâ comme le squelette des feuilles. Les maillĂ©s* de cds rĂ©seaux sont remplies dâune substance cellulaire. - * * ; t ⊠⹠? r* .uj * Toutes les parties. ainsi. organisĂ©es servent et concourent a la nourriture, au dĂ©veloppement et a lâaccroissement de .lâarbre 5 les racines divisĂ©es en une infinitĂ© de rameaux vont chercher dans les diffĂ©rens sucs nourriciers que la terre contient, ceux qui sont propres Ă chaque espĂšce dâarbre. Dire t cela se - lait, if ; est impossible; 5 câest encore un secret de la nature que lâintelligence" humaine ira pu encore pĂ©aĂ©trfcr.,,M.^Pluche fait,.Ă cet Ă©gard , une comparaison trĂšs-ingĂ©nieuse , tirĂ©e dâune expĂ©rience de physique. 11 compare la terre dâun potager , avec tous ses diffĂ©rens sucs , Ă un vase dans lequel on a jetĂ©, pĂȘle-mĂȘle , de lâhuile, de lâeau et du vin prenez, dit-il , trois bandelettes de dinge trempe? le bout .de lâune dans lâeau, trempez le boiit de lâautre dans quelques gouttes dâhuile, et celui .de la troisiĂšme dans si du vin mettez ensuite ces trois bandelettes dans le vase, de façon que le? bouts ffabibĂ©s plongept dans la. liqueur ,. et , que les bouts secs amenĂ©s et rebattus en haut sur les; jbprds duâvase descendent un peu au-dessous de la surface du liquide la bandelette qui a Ă©tĂ© trempĂ©e dans lâeau sâemplira dâeau en entier et distillera de lâaaju, Celle dont le bout a Ă©tĂ© mis dans lâhuile vous distillera de lâhuile lâautre rougira peu-Ăą-peu, et vous distillera du vin elles ne 1 se 'mĂ©prendront point-. Vous ' trĂ©uverez quelque * chose ! de tout semblable dans les plantes. Celui qĂčF les a faites et qui les a pourvues de tous j lĂ«s vaisseauxnĂ©cessaires Ă leur entretien et Ă leur propagation, nâa pas manquĂ© dĂ© mettre au bas de ces*vaisseaux certains cribles dont lĂ©s diverses ouvertures admettent facilement 1 certains sucs et rejettent tous les autres. eu ' / La sĂšve monte par les fibres du bois , vers toutes les extrĂ©mitĂ©s ; elle parvient jusques dans les feuilles oĂč elle se perfectionne , parce quâune multitude' de trachĂ©es ouvertes vers le ciel , dans le dessus de. la feuille Ă©iĂŻ reçÎivĂ©nt sans cesse de lâeĂ u oĂč quelque fraĂźcheur , un nouvel air , des nouveaux mires ,a r es parcelles de feu, et des esprits bienfaisants ,. qui' se mĂȘlent Ă la sĂšve, la volatilisent, et contribuent ainsi, soit par leur forme , ou par leur organisation qui varie dans chaque espĂšce dâarbre , Ă donner aux diffĂ©rens bois ,' les diverses qualitĂ©s quâon leur trouve , et qui est due Ă cette belle' organisation, que nous admirons dans tous les ouvrages du crĂ©ateur, et non comme Je croyoit Vitruve dâaprĂšs Aristote, aux Ă©lĂ©mens qui composoient les bois. Nous allons prĂ©sentement parier ,jĂ esj diverses espĂšces quâon emploie dans les bĂąlimens et de leurs qualitĂ©s , en remplaçant les principes de la physique ancienne , par les dĂ©couvertes de la physique moderne. Le bois proprement dit lignum , varie en pesanteur , en densitĂ© , en duretĂ© dans les divers arbres 3 et mĂȘme dans les mĂȘmes .espĂšces dâarbres- qui t ont>cru dans diffĂ©rens terrains, ou dans des climats diffĂ©rens. La densitĂ© du bois a toujours un rapport avec le temps de son accroissement les arbres LIVRE I I, C h Ă p, ix. 89 arbres qui croissent le plus lentement , ont le bois le plus dur , au contraire des autres. Les couches ligneuses commencent dâabord par ĂȘtre molles et tendres avant dâacquĂ©rir la soliditĂ© , quâelles ne prennent que peu-Ă -peu ; et comme elles sâappliquent extĂ©rieurement les unes sur les autres , il sâensuit que les intĂ©rieures , dans un arbre bien sain , sont plus dures et plus colorĂ©es que les extĂ©rieures , et ont leurs fibres plus resserrĂ©es ; ce sont ces couches intĂ©rieures quâon appelle bois les couches extĂ©rieures , qui sont plus tendres , et communĂ©ment dâune couleur diffĂ©rente , sâappellent aubier ; ainsi lâaubier nâest lui-mĂȘme quâun bois nouveau , fort imparfait , qui nâa pas encore acquis toute sa soliditĂ© ; mais qui en est susceptible comme on le verra ci-aprĂšs. \Iaubier nâest bien distinct que dans les bois durs comme lâĂ©bĂšne , le gaĂŻac , la grenadille mĂȘme , le chĂȘne et le pin , etc. Dans les arbres mous , au contraire , qui ne peuvent pas prendre beaucoup de soliditĂ© , tels que le tilleul, le bouleau, lâaune , le cciba , le boubal, etc, il nây a pas d 1 aubier ou, pour mieux dire , il nây a pas de bois ; parce que le corps ligneux resteâ toujours dans son premier Ă©tat dâaubier, sans jamais se durcir. Câest cet aubier, quâattaquent et rongent les insectes qui sây logent, et sâen nourrissent. Les arbres vigoureux ont plus Ă ?aubier ,âą mais en moindre nombre de couches que ceux qui languissent. Le chĂȘne a communĂ©ment depuis sept jusquâĂ vingt-cinq de ces couches, qui se rejettent dans lâemploi quâon fait de ce bois pour la menuiserie. Les diffĂ©rentes natures des bois, dont les uns se conservent mieux dans lâeau , dâautres dans lâair, les rendent propres Ă divers usages. 11 y en a qui sont susceptibles dâun beau poli, et dâune grande divisibilitĂ© , ainsi quâon le voit dans les ouvrages de placage. Plus les bois ont de duretĂ© , de soliditĂ© , plus ils sont bons pour toutes sortes dâouvrages , et sur-tout pour le pilotage et la menuiserie. Les Allemands, chez qui les Iiollandois vont chercher leurs bois de menuiserie , ont un secret bien simple pour leur procurer ces qualitĂ©s ; ce moyen ressemble et produit le mĂȘme effet que celui indiquĂ© par Yitruve dans ce chapitre , qui est de cerner les arbres long-temps avant de les couper. Au printemps , lorsque la sĂšve monte en abondance , On enlĂšve lâĂ©corce , qui se dĂ©tache facilement , et on les laisse ainsi sur pied pendant toute lâannĂ©e; le printemps suivant, ils poussent encore quelques bourgeons , des feuilles , des fleurs et mĂȘme des fruits , la seconde annĂ©e il ne paroĂźlra plus de fruits et lors de la saison de la coupe, on abat ces arbres qui, pour lors, fournissent un bois bien meilleur pour la duretĂ©. Suivant les expĂ©riences quâa faites M. de Buffon , lâaubier de lâarbre ainsi Ă©corcĂ© , et laissĂ© sur pied , devient aussi dur que le cĆur ; il augmente de fo rce et dâintensitĂ© ; par-consĂ©quent cet aubier , qui auroit Ă©tĂ© perdu , devient propre Ă ĂȘtre 4 tra- vaillĂ© comme le reste du bois , et" nâest point alors plus sujet Ă la piqĂ»re des vers. La connoissance de la force des bois , auxquels on fait supporter tous les jours des fardeaux, Ă©normes , Ă©tant un objet important dâutilitĂ© , a mĂ©ritĂ© lâattention des yeux philosophiques du savant acadĂ©micien que nous venons de citer. Il a fait sur ce sujet un trĂšs-grand nombre dâexpĂ©riences , dont on peut voir un ample dĂ©tail dans les mĂ©moires de lâacadĂ©mie. Suivant ses observations , la force du bois nâest pas proportionnelle Ă son volume une piĂšce double , pour la grosseur , dâune autre dâĂ©gale longueur , est beaucoup plus du double plus forte. Le bois de mĂȘme nature qui , dans le mĂȘme terrein , a cru plus vite , est de plus fort ; celui qui a crĂ» plus lentement , dont les cercles annuels sont plus minces, est moins fort. La force du bois est proportionnelle Ă sa pesanteur. De deux piĂšces de mĂȘme grosseur'et longueur, la plus pesante est la plus forte, Ă -peu-prĂšs dans la mĂȘme proportion quâelle est plus pesante. Une piĂšce de bois, chargĂ©e simplement des deux tiers 12 9 o LâARCHITECTURE DE VITRUVE. du poids , capable de la faire rompre , ne rompt pas dâabord ; mais bien au bout dâun certain temps. Il rĂ©sulte de ces ingĂ©nieuses expĂ©riences , que dans un bĂątiment qui doit durer long-temps , il ne faut donner au bois , tout au plus , que la moitiĂ© de la charge qui peut le faire rompre. La plus grande attention quâon doit avoir, comme dĂźt Yitruve , câest dâĂ©viter de couper le bois lorsquâil est plein de sĂšve , non pas pour la raison quâil dit ; mais parce quâĂ©tant coupĂ© plein de sĂšve , il est bien plus sujet aux vers. Il est probable , que la sĂšve mĂȘlĂ©e aux diffĂ©rens sucs qui se trouvent dans les vaisseaux propres dont nous venons de parler , venant Ă sĂ©cher , attire les vers auxquels elle sert de nourriture. Un autre avantage, câest que le bois qui nâest pas coupĂ© en pleine sĂšve , sĂšche beaucoup plus vite. Ainsi le meilleur temps pour abattre les arbres , est depuis la fin du mois dâoctobre jusquâĂ la fin de dĂ©cembre ; car immĂ©diatement aprĂšs ce temps , la sĂšve commence dĂ©jĂ Ă monter. Mais si on a la prĂ©caution dâabattre les arbres dans la saison que jâindique , je puis assurer , dâaprĂšs lâexpĂ©rience , que ceux mĂȘmes les plus sujets Ă la vermoulure , tels que le sycomore, le plane , etc. ne seront jamais attaquĂ©s par les vers. * YitriĂŻVe parle ensuite , dâaprĂšs ces principes , des qualitĂ©s des diffĂ©rentes espĂšces de bois ; il commence par le sapin , parce que câĂ©toit le bois dont on faisoit le plus dâusage de son temps. U çn distingue deux espĂšces dans le second chapitre du premier livre. Nos naturalistes les divisent aussi en deux ordres , savoir les sapins proprement dits , et les Piceas ou EpicĂ©as , Peee ou Pesse. Les sapins proprement dits, ont la pointe de leurs fruits , ou cĂŽnes, tournĂ©e vers le ciel; leurs, feuilles 6ont longuettes, Ă©moussĂ©es, Ă©chancrĂ©es par le bout, assez souples , blanchĂątres en-dessons , et rangĂ©es Ă -peu-prĂšs sur un mĂȘme plan des deux cĂŽtĂ©s dâun filet ligneux, ainsi âque les dents dâun peigne ; ils fournissent la tĂ©rĂ©benthine liquide. Les feuilles des EpicĂ©as ou Piceas sont Ă©troites , assez courtes , roides , piquantes et rangĂ©es autour dâun filet commun , en sorte quâelles forment toutes ensemble , par leur pointe, une espĂšce de cylindre ; leurs cĂŽnes ont la pointe tournĂ©e en bas. Ces arbres ne donnent point de tĂ©rĂ©benthine ; mais ils font de leur ecorce un suc Ă©pais , ou une rĂ©sinĂ© qui sâĂ©paissit, devient concrĂšte et semblable Ă des grains dâencens commun câest avec cette rĂ©sine que lâon fait ce quâon nomme poix de Bourgogne. Le sapin a cela de contraire aux autres arbres , câest que le bois de ses branches , et de la cime de son tronc qui les porte , que Yitruve nomme fusterna , est beaucoup plus dur que le reste du tronc ; câest-Ă -dire que plus ce bois est jeune , plus il est dur , et quâau lieu de durcir en vieillissant , il devient tendre. Ses branches , et la cime de son tronc sont aussi dures que lâintĂ©rieur du bois de chĂȘne, tandis que le reste du plus tendre que lâaubier. LIVRE II, ChĂ p. x. 9 1 CHAPITRE X. Des diffĂ©rentes espĂšces de Sapins qui se trouvent des deux cĂŽtĂ©s de' l Apennin. Lâapennin commence Ă la mer TyrhĂšne, et sâĂ©tend le long de lâEtrurie jusquâaux Alpes. Les croupes de cette montagne forment ensuite une espĂšce de demi-cercle , qui touche presque , dans le milieu de sa courbure , la mer Adriatique , et sâĂ©tend jusquâau dĂ©troit qui sĂ©pare lâItalie de la Sicile. La Campanie et lâEtrurie sont comme entourĂ©es de ces montagnes ; leur pente de ce cĂŽtĂ© est dĂ©couverte , et trĂšs- exposĂ©e aux ardeurs du soleil. La pente opposĂ©e, qui descend vers la mer supĂ©rieure, regarde le nord ; tellement quâelle est toujours Ă lâombre , et couverte des plus Ă©pais brouillards. Les arbres qui se trouvent dans cette partie sont nourris par une humiditĂ© continuelle , ce qui fait quâils croissent extrĂȘmement hauts, et que leurs fibres, qui en sont trop remplis , se gonflent jusquâau moment oĂč ils sont abattus et Ă©quar- ris ; comme ils perdent alors leur facultĂ© vĂ©gĂ©tative , ils se dĂ©ssĂšchent ; leurs fibres nâont plus de consistance ; leur grande porositĂ© les rend foibles et sans force ; ce qui fait quâils subsistent peu lorsquâon les employĂ© dans les Ă©difices. Ceux qui croissent, au contraire , dans des lieux dĂ©couverts , exposĂ©s aux ardeurs du soleil, nâĂ©tant pas aussi poreux , sâendurcissent en sĂ©chant , parce que le soleil en tire lâhumiditĂ© , comme il fait celle de la terre. Câest pourquoi, on prĂ©fĂšre, pour bĂątir, les arbres qui croissent dans les lieux dĂ©couverts; leurs fibres Ă©tant plus serrĂ©es , ils sont beaucoup plus fermes ; et nâaspirant pas autant dâhumiditĂ©, ils sont moins poreux et subsistent bien plus long-temps. Câest pour cette raison que lâespĂšce de sapin , nommĂ©e sapin dâen bas , qui croĂźt Ă lâexposition du soleil , est prĂ©fĂ©rĂ©e Ă cette autre espĂšce qui croĂźt dans une exposition contraire et quâon nomme sapin dâen haut. Jâai rapportĂ© de mon mieux , aprĂšs beaucoup de recherches , ce qui concerne les diffĂ©rens matĂ©riaux quâon emploie pour bĂątir. Jâai fait connoĂźtre les Ă©lĂ©mens qui les composent ; quelles sont leurs bonnes ou leurs mauvaises qualitĂ©s , afin dâen instruire ceux qui bĂątissent ; mes leçons leur pourront ĂȘtre utiles pour choisir ces matĂ©riaux et les mettre en Ćuvre, selon les diffĂ©rens genres dâouvrages. Jâai dâabord parlĂ© des prĂ©paratifs qui sont nĂ©cessaires pour bĂątir ; jâexpliquerai dans le reste de lâouvrage les rĂšgles quâon doit suivre dans la structure des Ă©difices ; je commence , comme il est juste, par les temples des dieux ; je fais connoĂźtre, dans le livre suivant, leurs proportions et les rapports de leurs mesures. . 12. t D E y IT RU y{ \ i ' LIVRE TROISIEME. il cfe ' r- m 'INTRODUCTION. Socrate, quâApollou lui-mĂȘme, par son oracle de Delphes , dĂ©clara le plus sage de tous les hommes , disoit avec raison , quâil seroit Ă souhaiter que nous eussions une ouverture Ă la poitrine, afin quâon pĂ»t y lire nos pensĂ©es et nos desseins. Si la nature, d aprĂšs le sentiment de ce grand homme , nous avoit donnĂ© les moyens de dĂ©couvrir les conceptions des uns des autres , outre favantage quâon auroit de voir le fort et le foible de tous les esprits ; la science, et la capacitĂ© de chacun se connoissant Ă lâoeil, on ne les jugeroit plus dâaprĂšs des conjectures incertaines. Les leçons des savans en auroient bien plus dâautoritĂ©. Mais puisque la nature ne lâa pas voulu , et quâil ne nous est pas permis de pĂ©nĂ©trer dans lâesprit de lâhomme, pour connoĂźtre avec certitude les sciences quâil renferme et qui y sont souvent cachĂ©es, les meilleurs artistes auront beau promettre dâemployer tous les talens possibles pour faire rĂ©ussir les ouvrages quâils entreprennent, sâils ne sont pas douĂ©s des biens de la fortune , sâils ne se sont pas créés dâavance une grande rĂ©putation , sâils nâont pas les talens de se faire valoir et une facilitĂ© de sâexprimer , proportionnĂ©e Ă leur science ; on ne croira jamais quâils connoissent Ă fond leur art. Lâexemple des anciens peintres et sculpteurs prouve cette vĂ©ritĂ© ; en voyons-nous parmi eux qui ont transmis leurs noms Ă la postĂ©ritĂ©, si ce nest ceux qui jouirent Introduction. de quelques recommandations ou de quelques marques d honneur ? Myron, PolyclĂšte, Phydias , Lysippe et tous ceux qui ont Ă©tĂ© anoblis par leur art, ne doivent leur cĂ©lĂ©britĂ© quâaux ouvrages quâils ont faits pour les rois, pour les grandes villes et pour des particuliers puissans et Ă©levĂ©s en dignitĂ©s. Il sâen est cependant trouvĂ© plusieurs autres qui nâavoicnt pas moins dâesprit, dâadresse et de capacitĂ© quâeux ; leurs ouvrages Ă©toient aussi bons que les leurs; mais parce qu'ils travailloient pour des personnes moins distinguĂ©es, ils ne se sont fait aucune rĂ©putation ce nâest pas faute d industrie et de talent ; mais faute de bonheur. C'est ce quâont Ă©prouvĂ© Hellas dâAthĂšnes, Cliion de Corinthe , Miagras de PhosĂšne , Pharax dâEphĂšse , Bedas de Bisance, et beaucoup dâautres. La mĂȘme chose est arrivĂ©e aux peintres car AristomĂšne de Rhodes , PolyclĂšs dâAtramide, et Nicomachus, ne sont pas les seuls qui , malgrĂ© leurs Ă©tudes , leurs talens et lâapplication la plus assidue Ă leur art, soit quâils Ă©toient peu fortunĂ©s , soit par leur mauvais destin , ou par le malheur dâavoir eu du dĂ©savantage dans quelques contestations avec leurs adversaires , ont trouvĂ© des obstacles insurmontables Ă leur avancement. Il nây a rien d Ă©tonnant que des personnes de mĂ©rite restent dans lâobscuritĂ© , parce quâil y a peu de gens capables de les apprĂ©cier ; mais il est insupportable de voir quâune quantitĂ© dâignorans soient applaudis , et leurs ouvrages estimĂ©s, parce quâon les a prĂŽnĂ©s dans quelques festins, aux dĂ©pens de la raison et de la vĂ©ritĂ©. Si donc, comme le dĂ©siroit Socrate, les sentimens des hommes, leurs talens, leurs sciences avoient Ă©tĂ© visibles , la faveur et la brigue ne prĂ©vaudroient pas comme elles font. On occuperoit de prĂ©fĂ©rence ceux qui, par leurs Ă©tudes et leurs sciences , sont parvenus Ă la perfection de leur art ; mais puisque les choses ne sont pas ainsi , et que lâexpĂ©rience mâa fait connoĂźtre que les ignorans lâemportent bien souvent, par lâintrigue, sur les plushabiles ; moi qui nâaime pas ces derniers moyens, je ne veux pas me compromettre avec eux, mais je vais tĂącher dâĂ©tablir, par des raisonnemens solides, les principes de la science dont je fais profession. Dans mon premier livre, ĂŽ CĂ©sar, jâai traitĂ© de tout ce qui appartient Ă lâarchitecture en gĂ©nĂ©ral ; des qualitĂ©s nĂ©cessaires pour rendre un architecte parfait ; jâen ai fait connoĂźtre les raisons ; jâai divisĂ© les diffĂ©rentes parties de cet art, et je les ai dĂ©finies ; j'ai raisonnĂ© ensuite sur le choix quâon doit faire de l'emplacement pour y bĂątir une ville , afin que lâhabitation en soit saine ; ce qui est trĂšs - important. Jâai fait voir , par les figures , quels sont les vents , leurs rĂ©gions , et dâoĂč ils viennent ; jâai enfin enseignĂ© la maniĂšre de disposer les rues et les places publiques. AprĂšs mâĂȘtre Ă©tendu sur tout cela dans le premier livre , je parle , dans le second , des matĂ©riaux 94 L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. de leurs qualitĂ©s naturelles , et de lâimportance de leur choix pour la soliditĂ© des ouvrages. Mon dessein est de traiter , dans le troisiĂšme , de la construction des temples quâon Ă©lĂšve aux dieux immortels , et de dire quelle forme on doit leur donner. CHAPITRE PREMIER. De la construction et des proportions des Temples. La belle construction dâun Ă©difice dĂ©pend, surtout, de la proportion; un architecte ne sauroit trop ÂŁn Ă©tudier et suivre les rĂšgles. La proportion dĂ©pend des rapports de grandeur, i que toutes les parties de lâouvrage ont entrâelles , et avec le tout, rĂ©glĂ© par une mĂȘme mesure. Câest ce rapport que les Grecs appellent analogie. Pour quâun bĂątiment soit bien ordonnĂ© , il faut donc que toutes les proportions sây trouvent et se rapportent entrâelles ; comme il est nĂ©cessaire , pour quâun homme soit bien fait, que tous ses membres soient bien proportionnĂ©s les uns avec les autres. * La nature donne ordinairement au corps humain les proportions suivantes le visage , depuis le bas du menton jusquâau haut du front, câest-Ă -dire , jusqu Ă la racine des cheveux , fait la dixiĂšme partie de la hauteur de lâhomme ; cette mĂȘme longueur se trouve depuis le pli du poignet , jusquâĂ lâextrĂ©mitĂ© du doigt, qui est au milieu de la main toute la hauteur de la tĂȘte , câest-Ă -dire , depuis le bas du menton jusquâau sommet, est la huitiĂšme partie de tout le corps ; la mĂȘme mesure se trouve par derriĂšre , depuis lâextrĂ©mitĂ© infĂ©rieure du cou depuis le haut de la poitrine jusqu'Ă la racine des cheveux , on trouve la sixiĂšme partie , et jusquâau sommet la quatriĂšme le visage se divise en trois parties Ă©gales. La premiĂšre est depuis le bas du menton jusquâau dessous du nez ; la seconde depuis le dessous du nez jusquâaux sourcils ; la troisiĂšme depuis les sourcils jusquâĂ la racine des cheveux qui 4. i Par le mot Symetria , comme nous lâavons dit dans nos remarques sur le 3. me chapitre du premier livre , les anciens entendent la proportion et par proportio , ce que les mathĂ©maticiens appellent raison ; ainsi jâai Ă©tĂ© obligĂ© , avec Perrault, de rendre le mot Symetria par % celui de proportion , et proportio par celui de rapport de grandeur. Je ne pourrois que rĂ©pĂ©ter ici ce que jâai dĂ©jĂ dit dans ces remarques oĂč la chose est suffisamnĂŻent expliquĂ©e ; jây renvoie donc le lecteur, * Planche lV.^hg. i et terminent le front. La longueur du pied est la sixiĂšme partie de la hauteur de tout le corps humain ; le coude , de mĂȘme que la poitrine, en sont la quatriĂšme partie. Toutes les autres parties ont chacune leurs mesures et leurs proportions. Câest sur elles que les plus fameux peintres et sculpteurs de lâantiquitĂ©, qui font lâadmiration de lâunivers , se sont toujours rĂ©glĂ©s. Il faut de mĂȘme quâil y ait Ă©galitĂ© de mesure dans toutes les parties qui composent un temple, et que leurs diffĂ©rentes grandeurs correspondent avec le tout. Le centre du corps humain est naturellement au nombril car quâun homme soit couchĂ©; quâil ait les pieds et les mains Ă©tendus ; quâon mette alors le centre dâun compas au nombril, et quâon dĂ©crive un cercle , il touchera lâextrĂ©mitĂ© des doigts des mains et des pieds. Comme le corps de lâhomme ainsi Ă©tendu a rapport avec un cercle , on trouvera quâil en a aussi avec un carrĂ© car si on prend la distance qui se trouve depuis lâextrĂ©mitĂ© des pieds jusquâau sommet de la tĂȘte, et quâon la rapporte sur celle qui se trouve depuis lâextrĂ©mitĂ© dâune des deux mains qui se trouvent Ă©tendues jusquâĂ lâautre, on trouvera que cette longueur et celte largeur sont Ă©gales , comme sont celles dâun carrĂ© fait avec une Ă©querre. Puisque la nature a composĂ© le corps de lâhomme , de maniĂšre que chacun de ses membres est proportionnĂ© avec le tout; câest pour cette raison que les anciens, ' ont voulu que, dans les ouvrages perfectionnĂ©s, on observe exactement ce mĂȘme rapport des parties avec lâensemble. De tous les ouvrages dont ils ont rĂ©glĂ© les mesures, ils se sont sur-tout attachĂ©s Ă perfectionner celles que doivent avoir les temples des dieux ; parce que tout ce qui sây trouve de bien ou de mal fait , reste exposĂ© Ă jamais aux jugemens de la postĂ©ritĂ©. Les diffĂ©rentes espĂšces de mesure dont on se." sert pour rĂ©gler tous les ouvrages, sont elles-mĂȘmes prises sur les parties du eĂšrps humain ; tels sont le doigt , le palme , le pied , la coudĂ©e ces divisions ont Ă©tĂ© rĂ©duites en nombres parfaits que les Grecs appellent telion. Le nombre parfait Ă©tabli par les anciens , est celui de dix * Ă cause du nombre des dix doigts qui composent la main ; de mĂȘme que la mesure du palme a Ă©tĂ© prise des doigts , et celle du pied des palmes. Comme la nature nous a donnĂ© dix doigts aux deux mains , Platon a cru que ce nombre Ă©toit parfait, parce que les unitĂ©s qui sont appelĂ©es monades , par les Grecs , formoient la dixaine de sorte que si lâon passe outre, en allant de onze Ă douze etc. , on ne trouvera pas de nombre parfait, jusquâĂ ce quâon soit parvenu Ă lâautre dixaine , Ă cause que les parties de ce nombre sont lâunitĂ©. Les mathĂ©maticiens prĂ©tendent au contraire que le nombre le plus parfait est celui de six , parce que suivant eux , tous ces diviseurs rĂ©unis ensemble , font aussi le % 'ARCHITECTURE DE Y I T R U V E. & nombre de six tellement que le sextant i contient une de ses parties; le trient 2 en contient deux ; le sentisse 3 trois ; le bes, 4 quâils appellent dimoiron , quatre ; le quintarium 5 quâils appellent pentamoiron cinq ; et le nombre parfait six ; si on y ajoute une sixiĂšme partie qui fait sept , ils appellent ce nombre ephecton 6. Si on va jusquâĂ huit, en ajoutant la troisiĂšme partie de six , on a le tertiaire appelĂ©' epi- tritos ; 7 et en ajoutant Ă six , la moitiĂ© qui fait neuf, on trouve le sesquialtere 8 quâils appellent hemiolios ; 9 et ajoutant encore deux tiers de six , pour faire la dixaine, on fait le besalterum , 10 appelĂ© epidimoiron . 11 Si on fait onze en ajoutant cinq , on a le quintarium alterum , 12 appelĂ© epipeqtamoiron ; i3 et on fait enfin la douzaine quâils appellent diplasiona , i4 en joignant les deux six simples ensemble. De plus pour faire voir la perfection du nombre six , ils ont observĂ© que la longueur du pied de lâhomme , est la sixiĂšme partie de toute sa hauteur , et que, suivant le nombre des pieds , que cette hauteur contient, on a cru que la proportion la plus parfaite Ă©toit celle oĂč la hauteur contenoit six fois la grandeur du pied. On a observĂ© encore que la coudĂ©e est composĂ©e de six palmes , et par-consĂ©quent vingt-quatre doigts. Il paroĂźt que câest Ă cause que la coudĂ©e contient six palmes, que les villes Grecques ont partagĂ© la drachme en six , et quâils lâont composĂ©e de six piĂšces dâairain , marquĂ©es de mĂȘme que les as i5 que lâon appelle oboles; pour reprĂ©senter les vingt- quatre doigts, ils divisĂšrent les oboles en quatre quartans, appelĂ©es par les uns dicha - lea , u6 et par les autres triçhalea 17. Nos ancĂȘtres ont dâabord adoptĂ© la dixaine, comme un nombre trĂšs - ancien ; ils ont fait le dĂ©nier de dix as dâairain , et câest pour cela que la monnoie qui en est composĂ©e a toujours Ă©tĂ© appelĂ©e jusquâĂ prĂ©sent 1 Le sextant faisoit la sixiĂšme partie de lâas qui Ă©toit le numme de cuivre , ou la livre , la plus ancienne monnoie des Romains. Voyez nos rĂ©flexions Ă la fin de ce chapitre. 2 Le tiers de 6 , câest-Ă -dire 2. 3 La moitiĂ© de 6 , câest-Ă -dire 3 . 4 Les deux tiers de 6 , câest-Ă -dire 4 * 5 Les cinq. 6 Un par dessus 6 , câest-Ă -dire 7. 7 La troisiĂšme partie de 6 ajoutĂ©e Ă 6, câest-Ă -dire 8. 8 Un et demi. 9 La] moitiĂ© avec le tout, câest-Ă -dire 9. 10 Deux tiers de 6 par-dessus 6 , câest-Ă -dire xo, 11 Le second dimoiron. 12 Les cinq parties de 6 ajoutĂ©es Ă 6, câest-Ă -dire 11. 1 3 Le second pentamoiron. 1 4 Le double. 1 5 Nous verrons dans nos remarques, Ă la fin de ce chapitre , que ce mot a signifiĂ© un poids comme la livre commune; dfe-lĂ on lâa transportĂ© Ă quelquâautre chose que ce fĂ»t , et as signifioit partout la chose entiĂšre. Nous voyons comme on a donnĂ© ce nom Ă une monnoie. 16 Câest-Ă -dire, double de cuivre. 17 Triple de cuivre. denarius, LIVRE III, C h a p. i, 97 denarĂźus , et sa quatriĂšme partie sesterce , qui valoit deux as et demi. Ensuite ayant conside're' que les deux nombres parfaits sont six et dix , de ces deux - lĂ ils en composĂšrent un plus parfait encore qui est le decussis sexis i ou seize. Câest le pied qui leur en a donnĂ© lâidĂ©e , puisquâen ĂŽtant deux palmes de la coudĂ©e , les quatre palmes qui restent font le pied, et le palme ayant quatre doigts, le pied doit en avoir seize , qui est autant que le dĂ©nier contient dâas dâairain. Sâil est Ă©vident que tous les nombres doivent leur origine aux doigts et aux autres membres de lâhomme , et quâil existe un rapport de mesure entre les diffĂ©rentes parties de son corps et son ensemble , combien ne devons-nous pas estimer ceux , qui, dâaprĂšs ces principes , disposĂšrent les plans des temples des dieux, de maniĂšre que les parties correspondant avec le tout , nous offrent, sĂ©parĂ©es , comme dans leur ensemble , les plus belles proportions ! On distingue chaque sorte de temple , par les diffĂ©rentes formes quâils prĂ©sentent Ă notre vue. La premiĂšre est le temple Ă antes , que les Grecs appellent Naos en Paratasin ; les autres sont le prostyle , lâamphiprostyle , le pĂ©riptĂšre , le pseudodiptĂšre , le diptĂšre , lâhypĂŠtre. Je vais expliquer et faire connoĂźtre leurs diffĂ©rentes formes. * On appelle temple Ă antes , celui qui a deux antes DD Ă son frontispice qui servent Ă terminer les murs qui enferment la Cella. Entre ces deux antes se trouvent deux colonnes FF un fronton sâĂ©lĂšve sur le tout. E Nous prescrirons ci-aprĂšs, dans ce livre, ses proportions et ses mesures. Les trois temples de la fortune , et principalement celui qui est prĂšs de la porte Colline 2 sont construits de cette maniĂšre. ** Le prostyle diffĂšre du temple Ă antes , Ă cause que des colonnes D sont opposĂ©es aux antes angulaires ; G ces colonnes soutiennent les architraves qui retournent de chaque cĂŽtĂ© le temple de Jupiter et celui de Faune dans lâisle du Tibre sont bĂątis de cette maniĂšre 3. *** Lâamphiprostyle 4 a toutes les parties du prostyle. De plus il doit avoir Ă la face de derriĂšre, H comme Ă celle de devant, des colonnes et un fronton. 1 Câest-Ă -dire , si» ajoutĂ© Ă dix. * Planche V. me , fig. i. 2 Porte de Homme , nommĂ©e aujourdâhui la porte Salare. ** Planche V. me , fig. i et 2 . 3 Tite-Liv. parle de ce temple de Jupiter dans le 4- me liv. de la 4 me dĂ©cade, et de celui de Faune dans le 3. mc liv. de la 4- me dĂ©c. *** Planche V. rac , fig. 2 . 4 Câest-Ă -dire , qui a des colonnes aux deux cĂŽtĂ©s. 1 2 3 i3 9 S LâARCHITECTURE DE VITRUVE. * Le pĂ©riptĂšre i doit avoir, tant Ă sa face de devant quâĂ celle de derriĂšre , six Colonnes , et onze de chaque cĂŽtĂ© , y compris celles des angles. Il faut que ces colonnes soient placĂ©es de façon que lâespace qui se trouve entre les murailles et le rang des colonnes qui les environnent, soit Ă©gal Ă celle de lâentre-colonnement, laissant Ăčn passage pour sây promener , comme lâon voit au portique que MĂ©tellus a fait bĂątir par Hermodore autour du temple de Jupiter Stator, et Ă celui que Mutins a ajoutĂ© au temple de lâHonneur et de la Vertu , prĂšs du trophĂ©e de Marius , non-compris le frontispice de derriĂšre. ** Le pseudodiptĂšre 2 doit avoir huit colonnes Ă la face de devant, autant Ă celle de derriĂšre , et quinze de chaque cĂŽtĂ© , y compris celles des coins ; de plus les murailles de la Cella doivent correspondre aux quatre colonnes du milieu de la face de devant, et aux mĂȘmes colonnes de la face de derriĂšre. Depuis les murailles jusquâau rang des colonnes , il reste lâespace de deux entre-colonnemens et la grosseur dâune colonne. On ne voit point Ă Rome de pareil temple ,* ** *** mais il sâen trouve deux dans la ville de MagnĂ©sie , qui sont celui d Apollon construit par HermogĂšne Alabandin, et celui de Diane construit par Mneste. *** Le diptĂšre 3 est octostyle 4 tant au-devant quâau derriĂšre du temple ; il a, tout Ă 1 entour, deux rangs de colonnes. Tel est le temple de Quirinus, dâordre dorique. Tel est celui de Diane Ă EphĂšse, dâordre ionique , construit par CtĂ©siphon. L hypĂŠtre 5 est dĂ©castyle 6 devant et derriĂšre ; du reste il est comme le diptĂšre ; mais il a cela de particulier , que dans lâintĂ©rieur il rĂšgne tout autour deux ordres de colonnes, posĂ©es les unes sur les autres MM et sĂ©parĂ©es de la muraille pour faire des portiques , comme aux pĂ©ristyles ; 7 le milieu II est dĂ©couvert; il a des portes Ă la face de devant et Ă celle de derriĂšre. Nous n avons point non plus un pareil temple Ă Rome ; mais le temple octostyle 8 de Jupiter Olimpien Ă AthĂšnes est de ce genre. * Planche YI me , fig. i. 1 Câest-Ă -dire , qui a d,es colonnes tout Ă lâentgur. ** Planche VII. me , fig. 2. 2 Câest-Ă -dire, faux diptĂšre. *** Planche VII.âą , fig. i. 3 Câest-Ă -rdire , oĂč les colonnes sont doublĂ©es dans les ailes. 4 Qui a huit colonnes. **** Planche VI.âą, fig. 2. 5 Câest-Ă -dire , dĂ©couvert. 6 Qui a dix colonnes. 7 Qui ont des colonnes tout Ă lâentour. 8 A huit colonnes. LIVRE III, C h a p. i. 99 * REMARQUES. Ce chapitre et ceux qui suivent jusquâau septiĂšme livre, sont les plus imporlans pour lâarcliitecture, puisquâils contiennent les rĂšgles dâaprĂšs lesquelles on doit proportionner les divers Ă©difices dâoĂč, dĂ©pend surtout leur beautĂ©. Car la proportion seule ne fait pas le beau ; mais sans elle il nây a point de beau. Ce livre et le suivant Ă©toient bien plus imporlans encore pour les anciens , puisquâils traitent de la construction des temples ; objet auquel lâarchitecture doit son origine , et pour lequel ils dĂ©ployĂšrent toute sa magnificence. Nous avons dĂ©jĂ vu que les proportions de lâarchitecture ont Ă©tĂ© prises sur celles du corps humain, le chef-dâĆuvre de la nature. Ses parfaites proportions le rendant le plus beau de tous les ĂȘtres, les anciens le choisirent pour rĂ©gler celles des Ă©difices. Ainsi il faut, comme dans un homme bienfait, que chaque partie dâun bĂątiment soit bien proportionnĂ©e , quâelle le soit avec le tout, et avec les autres parties. Câest pourquoi Yitruve rapporte les proportions de quelques-uns de nos membres, pour faire voir comme on a pris celles des Ă©difices. Ceux qui voudront les connoĂźtre entiĂšrement et dans le plus grand dĂ©tail , doivent consulter le traitĂ© dâAlbert Durer sur la symĂ©trie du corps humain. H est bon dâobserver, cependant, que les proportions que Yilruve assigne-aux diffĂ©rentes parties de notre corps, ne sont pas toutes exactes par exemple il dit, que la partie qui se trouve depuis le haut de la poitrine jusquâĂ la naissance des cheveux , fait la sixiĂšme partie de la hauteur de lâhomme; tandis quâelle en fait quelquefois la sixiĂšme et demie. 11 ajoute que cette mĂȘme partie, jusquâau sommet de la tĂȘte, fait la quatriĂšme partie de la hauteur de lâhomme , ce qui fait dire avec raison , Ă Philander , quâil y a ici une faute dans les manuscrits , et quâau lieu de lire une quatriĂšme parde , il faut lire une cinquiĂšme partie et quelque chose en sus , autrement il sâensuivroit- que lâespace , qui est depuis la racine des cheveux jusquâau sommet de la tĂȘte , seroit presquâaussi grand que tout le visage. La proportion du pied est encore mal Ă©tablie , puisquâil lui donne une longueur Ă©gale Ă la sixiĂšme partie de toute la hauteur de lâhomme , tandis que dans un çorps bien fait, dont la tĂȘte est la huitiĂšme partie de tout le corps, le pied nâa que la septiĂšme partie. La longueur quâil donne Ă la poitrine est aussi disproportionnĂ©e. Catane , qui a Ă©crit un ouvage italien sur lâarchitecture, saisit trĂšs-mal le sens de ce passage, oĂč Yitruve fait voir comme on a rĂ©glĂ© les proportions des Ă©difices sur celles du corps humain , et comme la figure dâun homme ayant les bras Ă©tendus peut se placer dans un carrĂ©. Il donne Ă ce passage lâinterprĂ©tation la plus ridicule, puisquâil prĂ©tend que le plus beau plan pour un Ă©difice, est celui qui ressemble Ă un homme Ă©tendu par terre ayant les bras en croix; aussi, câest, dit-il, celui de presque toutes les cathĂ©drales i. Jean Zhan 2 , avec le secours de quelques'figures, nous a fait voir comme on pouvoit dessiner la figure dâun homme dans un cercle , dans un carrĂ©, dans un pentagone , dans un triangle Ă©quilatĂ©ral. Celui qui a quelque teinture de gĂ©omĂ©trie, 1 Cataneo archit. liy. III., ch. 1, 3 SpĂ©cula phiĂźico-mathematico hisloria de Ăź. Zhan. IOO L'ARCHITECTURE DE VITRUYE. comprendra facilement que , si l'on peut tracer un homme dans un cercle, on pourra Ă©galement le tracer dans toutes les autres figures qui s'inscrivent dans ce cercle. Outre les proportions et les mesures , les anciens ont encore pris sur les parties du corps humain Jâusage des nombres. Yilruve nous apprend dans ce chapitre que lâarithmĂ©tique doit son origine aux dix doigts de nos mains ; la plupart des peuples, avec leur secours, ont commencĂ© Ă compter en additionnant des dixaines dâunitĂ©s, dont ils lormoient des dixaines de dix, ou des centaines, puis des dixaines de cent ou des mille. Celte maniĂšre de compter Ă©toit la plus simple , et sembloit dictĂ©e par la nature. C'est pourquoi Platon trouvoit que le nombre dix Ă©loil le plus parfait j cependant en divisant le nombre dix , on ne trouve pas ces rapports de proportions entre les diffĂ©rentes quantitĂ©s qui le divisent, et la totalitĂ©, quâon trouve dans dâautres nombres, que les mathĂ©maticiens, trouvĂšrent plus parfaits, dont les divisions proportionnĂ©es entr'elles, et avec le tout, formoient ces proportions quâon nomme harmoniques, oĂč le premier nombre est au troisiĂšme , comme la diffĂ©rence du second et du troisiĂšme. Tel est le nombre six, dont les diviseurs i, 2 , 3 , sont en proportions harmoniques entrâeux et avec lui, parce que 2 6 i 3 , ce nombre six , comme on voit, se compose âą de la somme de tous ses diviseurs, puisque tous ses diviseurs additionnĂ©s font ensemble le nombre de six. Ses diviseurs sont lâunitĂ© qui le divise en six parties Ă©gales ; 2 qui le divise en trois , et 5 . qui le divise en deux. Qu'on additionne ensuite 1 , 3 , 2 , le total sera six. Le nombre 12 est encore parfait par la mĂȘme raison , puisqu'il est Ă©gal Ă 6 , 2,4, lesquels additionnĂ©s ensemble , font 12. 11 y a encore plusieurs nombres de cette espĂšce. Celle proportion qui est dans la nature et quâon trouve dans les nombres parfaits , a Ă©tĂ© saisie par les architectes qui sâen sont servis pour proportionner de mĂȘme les Ă©difices et les parties qui les composent, ce qui fait rĂ©gner eatrâelles la plus- belle harmonie. Ainsi la plupart des rapports de proportions , dans les Ă©difices, sont tirĂ©s de ces nombres, parfaits. On verra par exemple que les divisions pour espacer les colonnes dans Ăźâeustyle , qui est lâentre-colonnement qui a le plus de grĂące, se fait par ces nombres, puisque pour un temple lĂ©trasiyle , on divise la longueur du frontispice en 12 parties, moins, une demie, pour un temple exastyle en 18 parties , et pour un ©etastyle en 24 .. Afin de prouver aux Romains lâavantage quâon pouvoiĂź tirer dâun nombre parfait, Ă cause de ses divisions , comme celui de six. Yitruve cite lâapplication quâon en fit pour diviser lâas romain , qui, Ă©toit un poids et en mĂȘme temps la plus ancienne de leur mormoie. Les nations, dans le principe, nâavoient pas l'usage des monnoies frappĂ©es a aucun coin elles eornmerçoient entrâelles par LâĂ©change de leur marchandises , comme des brebis , des Ăąnes, des chevaux , etc. , ou bien on emplovoit des mĂ©taux estimĂ©s au poids. Câest de lĂ que viennent les diffĂ©rens nouas donnĂ©s aux monnoies ; noms qui marquent lâancien poids, comme lâas chez les Romains, et toutes les parties dans lesquelles on lâa divisĂ© ; comme le talent et la mine chez les Grecs, le sicĂźe chez les HĂ©breux , la livre tournois en France , la livre sterling en Angleterre , etc. Servius Tullius fut le premier qui fit frapper le cuivre Ă Rome ; il y fit mettre un animal , dâoĂč les latins appelĂšrent cette monnoie pecunia , parce que dans leur langue pecus signifie bĂ©tail. Par lâas les Romains entendoiĂȘat un tout solide solidum , divisible eu parties aliquotes. Cet as % 1 I Y R E ĂŻ I I, C h A p. 1. toi Ă©loit, dans le commencement, dâune livre 1, et on avoit coutume de le peser, si la somme dont il sâagissoit Ă©loit considĂ©rable. Câest de-lĂ que les Romains disoient peser, pendere pour payer} de-lĂ viennent aussi nos mots François dĂ©penser, compter, etc. Ils divisoient lâas en 12 parties} chaque portion portoit le nom des parties de lâas quâelle contenoit ; ainsi le quart de lâas sâappe- loil un trient, parce quâil contenoit trois parties de lâas le tiers, parce quâil en contenoit quatre , sâappeloit le quadrant, etc. Nous voyons par ce passage de Yitruye que les mathĂ©maticiens divisoient leur as en six , au lieu de le diviser en douze comme lâas ordinaire , et quâils se servoient des mĂȘmes dĂ©nominations pour dĂ©signer les parties quâelle contenoit. Cependant elles ne signifiaient pas le mĂȘme nombre ainsi le sextant, qui dĂ©signe la sixiĂšme partie de leur as , conliendroit deux parties de lâautre le trient , qui dĂ©signe le tiers, en contiendroit quatre parce que, suivant les mathĂ©maticiens, lâas ou le tout est de six 5 par-consĂ©quent le sextant signifie» le sixiĂšme de six, câest-Ă -dire lâunitĂ© , le tiers, etc. PhilandĂ©r observe, avec raison , quâau lieu de lire , comme dans toutes les Ă©ditions , cĂčm ad suppu - tationem crescat, supra sex adjecto asse , il faut lire, adjecto sextants car Yitruve ne dit cela, que pour continuer Ă faire voir , comment tous les nombres , suivant les mathĂ©maticiens , tiroienfc leur nom du rapport quâils avoient avec celui de six. Ainsi puisque lâunitĂ© , ajoutĂ©e au nombre six , fait sept , ils ont nommĂ© ce dernier nombre stpsuro» comme qui diroit stti sktov , le sixiĂšme en sus, et que le nombre 2 qui est le tiers de 6, ajoutĂ© Ă 6 fait 8 , ils ont nommĂ© ce dernier nombre tertiarium en latin, et en grec ĂȘnirpirov le tiers en sus. Si on lisoit adjecto asse , alors Yitruve ne feroit pas connoĂźtre la raison pourquoi ce nombre est nommĂ© stpsxrov, chose quâil observe si exactement pour les autres nombres. âą , f On croit apercevoir, dans ce chapitre, une contradiction au sujet du dĂ©nier , quâil dit dâabord ĂȘtre composĂ© de dix as , et ensuite de seize. Câest que , dansâlĂ© principe , le dĂ©nier ne contenoit effectivement que dix as dâairain ; mais pendant la guerre punique , le besoin dâargent se faisant sentir dans la rĂ©publique , elle haussa le prix de lâargent , au point que le dĂ©nier fut portĂ© jusquâĂ ; seize as. Pline et Feslus nous ont appris ce trait dâHistoire. AprĂšs avoir citĂ© lâas des Romains, Yitruve cite aussi la drachme des Grecs. Fa drachme Ă©loit com-» posĂ©e de trois scrupules , et chaque scrupule de deux oboles ; les oboles Ă©loient de six ĂŠreoles ou chalques , et chaque eereole de sept minutes , que les Grecs appeloient lepta. On divisoit aussi lâobole en trois siliques, chaque silique en quatre grains, et chaque grain avoit une lentille et demie', de sorte que la drachme contenoit six oboles, ou dix-huit siliques, ou soixante-douze grains,, ou 108 lentilles. AprĂšs avoir parlĂ© , en gĂ©nĂ©ral , des mesures et des proportions , sur lesquelles on a> rĂ©glĂ© celle des temples et des autres Ă©difices , Yitruve parle des diffĂ©rens . genres de temples 5 il en distingue sept , qui sont le temple Ă antes , le proslyle , lâamphiprostyle , le pĂ©ripiĂšre , le pseudodiptĂšre , le diptĂšre et lâhypĂŠtre. t t Tons ces temples , exceptĂ© celui Ă antes, et lâhypĂŠtre , tirent leur nom" des deux mots grees çuAoç stilos colonne , ou de jrrqj ou pteron, aile. noms de ceux qui ne sont pas entourĂ©s de* h xl Pline hiv. XXXIII. Ch. & 102 LâARCHITECTURE DE V I T R U Y F, colonies * dont les rangs des cĂŽtĂ©s sont comme les ailes des temples , ne sont pas terminĂ©s par ] mot dĂ© pteron ; mais par celui de stylos. Tels sont le prostyle, qui nâa dâautres colonnes que celle qui sont au frontispice de devant , et lâamphiprostyle qui nâen- a quâĂ ses deux frontispices. Tous les autres sont terminĂ©s en pteron , pour dĂ©signer les ailes latĂ©rales , que forment les rangs des colonnes qui sont sur les cĂŽtĂ©s. On les nomme en gĂ©nĂ©ral temples pĂ©riptĂšre , nom quâon donne Ă tous les temples qui sont entourĂ©s de colonnes. Cependant dans son acception la plus stricte, il signifie le temple , qui nâest entourĂ© que dâun seul rang dd r colonnes car celui qui est entiĂšrement entourĂ© de deux rangs, se nomme le diptĂšre celui qui paroĂźt avoir deux rangs de colonnes et nâen a cependant quâun seul , se nomme pseudodiptĂšre, câest-Ă -dire faux diptĂšre. LâhypĂŠtre Ă©toit un temple dont lâintĂ©rieur Ă©toit dĂ©couvert. On appeloit Cella , lâintĂ©rieur dâun temple, câest-Ă -dire cette partie qui Ă©toit entiĂšrement entourĂ©e de murs , et qui avoit une porte. Les temples avoient ordinairement quatre parties le pronaos ou porche, appelĂ© aussi prodomos et propylax , et mĂȘme vestĂŻbulum dans lâintroduction du VII. livre. CâĂ©toit le vestibule ou la partie antĂ©rieure du temple , quâon trouvoit avant dâentrer dans la cella. Le posticum ou opistodomos , qui Ă©toit opposĂ© au pronaos. Les ailes ou galeries latĂ©rales Ă©toient des portiques formĂ©s par une colonnade double ou simple, qui, avec les colonnes de devant et celles de derriĂšre, rĂ©gnoit tout autour du temple ; on la nommoit pteroma. Enfin la cella ou secos , appelĂ©e aussi naos par les Grecs , Ă©toit au milien des trois autres parties. Quelques temples Envoient que le pronaos ou le vestibule , comme on le voit dans la i. re fig. de la Y. planche, et dans la 1/ et 2. de la VIII. e Dâautres temples, outre le vestibule de devant, avoient aussi le posticum , qui Ă©toit un autre vestibule semblable qui Ă©toit par derriĂšre, comme on le voit dans dâautres figures de temples. Quelques temples nâavoient pour ainsi dire que la seule cella , comme sont les temples reprĂ©sentĂ©s dans les figures i. re et 2. de la Y. planche , et i. re et 2.* de la VIII.* Dâautres enfin Ă©toient entourĂ©s de galeries, quâon nommoit pteroma , qui rĂ©gnoient tout autour de la cella elles Ă©toient formĂ©es, comme on vient de le dire, par un ou deux rangs de colonnes. Dans les planches Y, YI, YII , VIII et IX qui reprĂ©sentent les diffĂ©rens temples , la lettre Ă Indique toujours la cella , ou lâintĂ©rieur du temple; la lettre B le pronaos ; la lettre H le posticum; et la lettre P les galeries latĂ©rales ou pteroma. Jâai prĂ©fĂ©rĂ©, pour le temple Ă antes, la figure que Galiani en a donnĂ©e, Ă celles quâen ont donnĂ©es Perrault, Barbaro , Rusconi et autres ; parce quâelle mâa paru plus conforme au texte de Yitruve. Les autres suppriment, je ne sais pourquoi , le pronaos ensuite ils ont placĂ© , dans le milieu du frontispice, deux colonnes , qui soutiennent un petit fronton , autre que celui qui termine tout le temple. Ce petit fronton nâa jamais existĂ© que dans leur imagination. Sâils avoient Ă©tĂ© consĂ©quents, ils auroient du mettre un pareilfronton au prostyle; puisque jTitrave dit que cette espĂšce de temple a toutes les parties du temple a antes , ,et le mĂȘme entablement ĂȘpistylia quemadmodum et in antis . Il ne diffĂ©rĂ© quâen ce quâil a, de plus , deux colonnes vis-Ă âvis des antes des coins Ă 1 exception de ces deux colonnes, ils dçvoient donner la mĂȘme figure au prostyle; mais ils ont fait LIVRE III, Chap. i. Ăźo3 tout le contraire ils ont reprĂ©sentĂ© le prosiyle , Ă -peu-prĂšs comme celui de la 2.» fĂźg. de la planche V e . Les antes, dâoĂč cette espĂšce de temple a pris sa dĂ©nomination , sont des espĂšces de colonnes carrĂ©es qui ont les mĂȘmes proportions, bases ,. chapiteaux et autres ornemens , que les colonnes de lâordre avec lesquelles On les emploie. Quelquefois ils terminent les murs latĂ©raux des cella , qui se prolongent jusquâĂ lâentrĂ©e du pronaos > comme est celui marquĂ© D , dans la i. re figure de la planche Y\. Dâautres terminent aussi les murs des cella , et ont place vis-Ă -vis une colonne qui forme lâentrĂ©e du pronaos, comme dans la fig. 2, lettre P. Presque toujours ils sont ainsi opposĂ©s aux colonnes dâoĂč ils ont pris le nom dâante ; parce que avri, contra > signifie contre , opposĂ©, comme qui diroit opposĂ© Ă la colonne. Lorsquâils terminent de cette façon les murs , ils ont la forme dâun gros pilier carrĂ© ils ont presque toujours ahlant de largeur par le haut que par le bas. Tel est celui des thermes de DioclĂ©tiezz qui se trouve reprĂ©sentĂ© dans la XYII. e planche des parallĂšles de lâarchitecture ancienne et moderne de M. Chambray , et ceux delĂ planche Y.* de notre traduction. Dâautres sont quelquefois diminuĂ©s par le haut comme les colonnes. Lorsque les antes ne terminent pas un mur , ils sont ordinairement engagĂ©s dedans , nâayant de saillie que le tiers ou le quart, ou le cinquiĂšme ou le sixiĂšme de leur Ă©paisseur ; alors nous les appelons aussi des pilastres tels sont ceux des figures t. Ie , planche YI.* , i. r * 2.*, planche YII.* Le mot epistyle, dont se sert Yitruve dans ce chapitre, et ailleurs, est composĂ© des mots grecs ijn'quXoç -, qui signifient sur les colonnes. 11 lâemploie quelquefois pour signifier uniquement lâarchitrave et quelquefois tout lâentablement. Les proportions et les mesures du fronton , annoncĂ©es dans ce chapitre , et quâon trouvera Ă la fin du troisiĂšme chapitre de ce livre , sont, que la pointe de lâangle , qui termine la hauteur du tympan, doit ĂȘtre Ă©levĂ©e au-dessus de la corniche , de la neuviĂšme partie de toute la largeur du fronton , tel est celui de la 3 . e fig. de la planche YlII. e , et ceux de tous les autres frontispices reprĂ©sentĂ©s dans les figures de cet ouvrage. Perrault a fait son temple Ă antes , dâordre toscan, et dâaprĂšs sa maniĂšre dâinterprĂ©ter le passage du Ch. 7 , Liv. IY , oĂč il est traitĂ© de cet ordre , qui dit stilliciclium tecti absoluii terliario respondeat. Il a fait un fronton , dâune hauteur disproportionnĂ©e. Moi qui ai suivi encore ici lâinterprĂ©tation de M. Galiani quâon trouvera ci-aprĂšs , lorsquâil sera parlĂ© du 7/ chapitre du Liv. IY' S jâai fait ce fronton semblable Ă ceux de tous les autres temples. ^ Yitruve dit, dans ce chapitre, que le temple pĂ©riptĂšre doit avoir six colonnes Ă son frontispice de devazzt , aulazit Ă celui de derriĂšre , et onze de chaque cĂŽtĂ© en comptant celles des coins. Dans le troisiĂšme chapitre de ce livre , il dit, que les cĂŽtĂ©s des temples doivent ĂȘtre le double plus larges que les frontispices , et en dâautres termes quâils doivent avoir deux fois autant dâentre- colonnemens quoi inter colomnia sunt in fronte totidem bis inter colomnia fiant in laterĂŻbus. Câest-Ă -dire que sâil y a six colonnes au frontispice , et par-consĂ©quent cinq entre-colonnemens , il doit y avoir onze colonnes de chaque cĂŽtĂ©, et par-consĂ©quent dix intervalles $ câest-Ă -dire , deux fois autant quâil y en, a au frontispice. ,o4 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. II nous cite ensuite pour exemple deux Ă©difices de cette espĂšce le portique que MĂ©tellus fit construire autour du temple de Jupiter Stator , par Ilermodore ; et le temple de lâHonneur et de la Vertu, prĂšs du trophĂ©e de Marins , bĂąti par Mutius. LâĂ©pithĂšte de Stator fut donnĂ©e Ă Jupiter, po'ur avoir arrĂȘtĂ© les Romains qui fuyoient devant les Sahins. Ce temple lui fut alors vouĂ© par Romulus. Te Jupiter Stator . cujus templum Ă Romulo victis Sabinis . est coĂźlocatum. Cic. Mais il ne fut bĂąti que sous le consulat de Poslumius Metellus , dâou le portique a sans doute pris son nom et de Marcus Atilius Regulus. Tite-Live , dâun autre cĂŽtĂ© , dit que ce temple a Ă©tĂ© dĂ©diĂ© Ă Jupiter Stator , par Postume MegelĂźus Templum Jovi Statori vovet } si constitisset a fugĂą Romana acies . vincisselque regiones Samnitium. Tellement quâil faut croire quâil* y avoit deux temples de Jupiter Stator, ou, ce qui est plus apparent, que le Jcopiste de Tite-Live a mis MegelĂźus au lieu de Metellus. Quoique lâarchitecte de ce temple soit nommĂ© Hermodius , dans le texte , je lâai nommĂ© Her- raodore dans la traduction , parce que jâai cru , avec tous les autres interprĂštes , que câĂ©loit une faute du copiste j car il nâest parlĂ© nulle part dâun architecte nommĂ© Hermodius , tandis que Her- modore est trĂšs-connu , tant par la construction du temple de Mars dans le cirque de Flaminius, que par la contestation quâil eut avec un autre architecte pour la construction dâun grand arsenal ; cette contestation est remarquable, Ă cause du jugement qui intervint en faveur du compĂ©titeur dâHerrnodore , parce quâil Ă©toit plus Ă©loquent que lui. CicĂ©ron rapporte cet exemple pour prouver quâun excellent orateur parlera trĂšs-bien des choses quâil entend mĂ©diocrement , quâil en parlera mĂȘme mieux que ne pourroit faire celui qui les possĂšde parfaitement, et qui seroit un orateur mĂ©diocre. Mariana Monumenta , vulgairement les trophĂ©es de Marius , câest ainsi quâon appela le lieu oĂ on Ă©leva des trophĂ©es en mĂ©moire des victoires remportĂ©es par Marius sur Juguiâtha , les Cimbres et les Teutons. A Rome, on nomme prĂ©sentement trophĂ©es de Marius, des anciens murs, qui existent encore prĂšs de lâĂ©glise de S. EusĂšbe , le long de la rue qui conduit de S. te Marie Majeure Ă lâĂ©glise de la Sainte-Croix de JĂ©rusalem , et cela parce quâon y a trouvĂ© quelques trophĂ©es, quâon croit ĂȘtre ceux de Marius ; cependant rien nâest moins certain que ce soit ceux-lĂ ; tellement quâon ignore aussi oĂč Ă©toit ce temple de lâHonneur et de la Vertu. S. 1 Augustin en parle ; il dit que k premiĂšre partie Ă©toit dĂ©diĂ©e Ă la Vertu , et lâautre Ă lâHonneur. Vitruve cite encore Mutius, comme architecte de ce temple, dans lâintroduction du livre, oĂč il dit A, C. Mutio , qui magna scientia confis us Ćdes Honoris et Virtutis Marianoe cellĆ ... perfecit. " En jetant un coup dâĆil sur la deuxiĂšme figure de la septiĂšme planche , on verra , que les temples quâon appelle pseudodiptĂšre', ou faux diptĂšre , sont ainsi nommĂ©s , Ă cause quâen dehors ils paraissent ĂȘtre diptĂšre , câest-Ă -dire avoir sur les cĂŽtĂ©s des ailes formĂ©es par des doubles colonnades , parce quâayant huit colonnes Ă leur frontispice, et la largeur de la Cella nâoccupant que lâespace Ăąes quatre colonnes du milieu , on croit quâils ont double rang de colonnes sur leurs cĂŽtĂ©s tandis quâen effet ils ne les ont pas. On verra dans le chapitre suivant quTIermogĂšne , en laissant subsister la colonnade extĂ©rieure qui fiysoit le tour du temple , imagina dĂ© supprimer celles qui se trouvoient ! '* i ^ iV-J^-ĂżA; frT^P g- T r?.vv., ^ ,+JW*»;^ »*»**âą* ,-âą** S' , '.K t ? 4"r SW* y^. >- >*>?***âą ; k?feffĂŻ iSs&Sfr TJEMJPJLIE MK JD'" /'Tf/C to 5 MJ âĂżffm ".'H, mmm 'tlsĂąi imi.'.'ii imiiiiimii i ! 1 . '"" 1111 ' 1 11 - .ii â Tinminini - ... âąp Ăź iin i wr nT "-iiiii ^FtiiiiiJMJi j i iinuim^- r Mrutdtb 101E PME SE !!!!!!!! SwßßmTĂimiHiiimwitmT ifminiiiiiiii mwHmwmnmiui mm t ;Ti- .f? *&?''*k V* v v !f- ĂŻ ,w'. LIVRE I li ĂŻ, c fĂź -V PY l trouvoient entre celle-ci et les murailles -de la. Cella, sans rien changer aux proportions , tellement que ce portique .offre un bel espace pour se,promener autour du temple, puisquâil a la largeur de deux entre-colonnemens , et de-plus celle de lâĂ©paisseur dâune colonne. Le diptĂšre, comme nous venons de le voir, avoit deux rangs de colonnes isolĂ©es Ă son pourtour, et huit colonnes de front Ă chaque extrĂ©mitĂ© tel Ă©toit le temple de Liane Ă EphĂšse, dont je donne ici le plan. 0 . ' ' f . r Ce temple bĂątiâ par CtĂ©siphon , Ă©toit dâordre ionique. Pline dit quâil a Ă©tĂ© rebĂąti jusquâĂ sept fois* Il paroĂźt quâil Ă©toit eĂŒstyle , câest-Ă -dire avec des entre-colonnemens de deux diamĂštres de colonne et un quart , dâaprĂšs les proportions que Pline 1 en donne. Lâentre-colonnement du milieu Ă©toit aussi plus grand que les autres , puisque le mĂȘme auteur dit que lâarchitrave du milieu Ă©toit dâune* grandeur si extraordinaire, quâon feignit que la dĂ©esse lâavoit posĂ© elle-mĂȘme j lâarchitecte dĂ©sespĂ©rant de pouvoir manier j une aussi grande pierre. r ..... f . diffĂ©rens genres 1 de temples il commence par ceux qiii Ă©toient lĂšs plus simples , Ăšt qui conienoient >le moins de colonnes 5 il les nomme Ă mesure qĂŒâun plus ; grand nombre de colonnes devient nĂ©cessaire Ă leur dĂ©coration ; et il termine par lâhypĂšlre , celui cpri en- contient le plus grand nombre'$ pnisquâoutre les deux rangs qui ornĂšnt son pourtour, il se trouve 1 dans lâintĂ©rieur de sa Cella, qui doit ĂȘtre dĂ©couverte , deux rangs de colonnes lâun au-dessus de lâautre pour former des galeries , - comme on peut* voir dans la 2. mC fig. de la VI. me planche. Entre les deux ordres de colonnes qui sont dans lâintĂ©rieur du temple , je nâai mis que la seule architrave, parce que câĂ©toil lâusage des anciens en pareil cas, comme Vitruve lui-mĂȘme nous lâapprend, Liv. V. Chap. 1. ' . La raison en est , que les ornemens dâarchitecture doivent ĂȘtre fondĂ©s sur quelque usage , et particuliĂšrement sur la convenance. Or il est certain que toute corniche rappelle lâidĂ©e dâun toit, et consĂ©quemment quâelle ne doit avoir lieu quâau plus hauf"Ă©tage. Elles nâont Ă©tĂ© imaginĂ©es que pour servir dâappui aux avances des toits, destinĂ©es Ă Ă©carter du mur ou des colonnes la chute des eaux ; elles sont en effet inutiles dans les lieux couverts , oĂč elles ne font que dĂ©rober le jour des fenĂȘtres qui sont au-dessus. Perrault rapporte pour exemple de cette suppression dâornemens } le superbe Ă©difice des tutelles de Bordeaux , 2 quâon croit avoir Ă©tĂ© bĂąti peu de temps aprĂšs le rĂšgne dh4uguste. Les colonnes ne soulenoient quâune architrave , sur laquelle , au lieu dâun second ordre de colonnes , il se trouvoit des cariatides. Perrault donne une belle gravure de cet Ă©difice , qui a Ă©tĂ© dĂ©moli, lorsquâon a construit les fortifications des dehors de la citadelle, vers lâan 1680. Galiani en rapporte un autre exemple qui est de la plus haute antiquitĂ©. Câest celui dâun des temples de Peslum, dont nous avons dĂ©jĂ parlĂ© ; ce temple est hypĂšlre 5 une grande partie de la colonnade intĂ©rieure subsiste encore ; elle soutenoit un autre ordre de colonnes , qui Ă©toit au-dessus j mais , entre les deux, il nây a que Parchitrave seule. INous avons vu que les temples prĂ©voient leur dĂ©nomination de leur forme , ou de la quantitĂ© des colonnes quâils avoient Ă leur frontispice. Ils la prennent encore de la diversitĂ© des entre- colonnemens. 1 Pline , Liv. XXXYI. Chap. 1 4 . 2 Yftruve de Perrault. Liv. VL Chap. 4. * 4 LâARCHITECTURE HE Y I T R U Y E. 106 Vitruve a expliquĂ© , clans ce chapitre , les diffĂ©rens- noms quâon a donnĂ©s Ă sept genres. de temple , Ă cause de leur diffĂ©rente forme; il va expliquer, dans Je chapitre suivant , les noms quâon a donnĂ©s Ă cinq espĂšces de temples , Ă cause de la grandeur plus ou moins resserrĂ©e de leur entre- colonnemenl. Il nâexplique nulle part, pourquoi on a donnĂ© tel nom Ă un temple , Ă cause du nombre des colonnes ; parce quâil suffit dâavoir la moindre teinture de la langue grecque pour le comprendre ainsi on appelle un temple tetrast vie,, paijpe quâil a 4 colonnes Ă son frontispice, un autre exastyle, parce quâil eu a six, un autre oclaslyle, parce quâil eu a huit, un autre dĂ©caslyle , parce quâil en a dix , etc. ; Il nous reste Ă voir prĂ©sentement , pourquoi Yitruve prescrit un de ces diffĂ©rens nombres de colonnes Ă chaque genre de temple , comme si câĂ«toit choses insĂ©parables et dĂ©pendantes lâune de lâautre ainsi il assigne six colonnes au pĂ©riptĂšre 3 huit au diptĂšre , dix Ă YhypĂštre , etc. Je suis persuadĂ© , quant Ă moi , que ces deux choses sont trĂšs-indĂ©pendantes lâune de lâautre ; car rien nâempĂȘche YhypĂštre dâĂȘtre ociastyĂźe ou idĂ©caslyle , le pĂ©riptĂšre dâĂȘtre exastyle ou octaslyle. Ce nâest pas sans raison cependant que Yitruve a dit cela. Outre quâil a voulu indiquer que câĂ©toit lâusage de mettre tel nombre de colonnes Ă tel genre de temple,, il avoit encore une raison par exemple le pĂ©riptĂšre ne peut ĂȘtre moins quâexastyle, car sâil Ă©toit tĂ©trastyle voy. la fĂźg. 1 , planche VI , la Cella nâauroit de largeur que la longueur dâun entre-colonnement. La CeĂźla du diptĂšre nâen auroit pas davantage , sâil Ă©toit exastyle au lieu dâĂȘtre octastyle mais je rĂ©pĂšte que le pĂ©riptĂšre peut ĂȘtre octastyle , que le diptĂšre peut aussi bien ĂȘtre dĂ©castyle , que lâhypĂštre octastyle , comme il lâest dans lâexemple citĂ© par Vitruve , quoiquâil lui prescrive le dĂ©caslyle. Le temple hypĂšlre de Pestum nâest aussi quâexastyle. On pourroit ajouter aux diffĂ©rens genres de temples que lâauteur noinme dans ce chapitre, ceux dont il parle dans le 7 . rae chapitre du IV.âą livre tels que les temples pseudo- pĂ©riptĂšre , les templyioscans 3 et les temples ronds. Leurs proportions Ă©tant rĂ©glĂ©es par dâautres principes , que celles des temples dont il vient- de parler , il en a fait un article sĂ©parĂ©. mvnm wvvwmvvmvui uv> K X \ 7 , . 1 C H A P I T II E I I. Des cinq especes de Temples. Ăl existe cinq espĂšces de temples , dont voici les difĂźerens noms i.° le Pycnos- tyle 1 , lorsque les colonnes sont fort prĂšs les unes des autres; 2. 0 le Systyle 2 , lorsquâelles sont un peu plus sĂ©parĂ©es ; 3.° le Diastyle 3 , lorsquâelles lç sont encore davantage ; 4 ° l'ArĂ©oslyie 4, lorsquâelles sont sĂ©parĂ©es plus quâelles ne doivent lâĂȘtre ; et l Eustyle 5, lorsquâelles le sont par un juste intervalle. Un temple est pycnostyle , lorsque lâentre-colonnement a la longueur dâun diamĂštre et demi de la colonne; tel est le temple du divin Jules, et celui de VĂ©nus dans le forum de CĂ©sar, et plusieurs autres. Un temple est systyle, quand lâentre - colonnement a la longueur de deux diamĂštres de colonne, et que les plinthes des bases sont Ă©gales Ă lâespace qui se trouve entre deux plinthes 6 . Tel est le temple de la Fortune Ă©questre, auprĂšs du théùtre de pierres, et plusieurs autres. Ces deux maniĂšres ont un grand dĂ©faut, puisque les mĂšres de famille, lorsquâelles vont au temple, pour aller faire leur priĂšre, ne peuvent passer par les entre-colonnemens en se tenant par la main, et sont obligĂ©es de se suivre Ă la file. De plus, les colonnes ainsi serrĂ©es, obstruent presque les portes; elles empĂȘchent de voir les statues des dieux et de se promener autour du temple. Un temple est diastyle, quand lâentre-colonnement a la longueur de trois diamĂštres de colonne, 7 comme au temple dâApollon et de Diane; cette espĂšce de 1 Câest-Ă -dire, colonnes serrĂ©es. 2 Colonnes jointes. 3 Colonnes distantes. 4 Colonnes rares. 5 Colonnes bien placĂ©es. * Planche VI. mc fig. 2 . ** Planche VI. me fig. 1. 6 Vitruve dit, un peu plus bas, que la saillie des bases doit ĂȘtre Ă©gale au quart du diamĂštre lâentre-co- ĂŻonnement, cest-Ă -dire, lâespace qui se trouve entre deux fĂ»ts, est de deux diamĂštres; quâon ĂŽte de cet espace, celles occupĂ©es par la saillie des deux bases qui font un demi - diamĂštre, le vide, entre les deux plinthes, sera dâun diamĂštre et demi, et sera par consĂ©quent Ă©gal Ă la grandeur du plinthe ; qui contient le diamĂštre et deux quarts pour les saillies. *** Planche V. me fig. 2. 7 Il nomme ici Diastyle un entre-colonnement de 3 diamĂštres; dans le Chap. 3 du Liv. IV, il donne le mĂȘme nom Ă un dorique qui a deux diamĂštres et trois quarts. 4. io8 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. *âą temple a le dĂ©faut que lâintervalle des colonnes, Ă©tant fort grand, les architraves rompent trĂšs-souvent. * Quant au temple arĂ©ostyle **, lâintervalle des colonnes est si grand, quâil est impossible de faire des architraves de pierre ou de marbre, comme dans les autres; on ne peut les faire quâavec de longues poutres , ce qui fait que lâaspect de ces Ă©difices paroĂźt Ă©crasĂ©, bas et trop large. On a coutume, Ă lâexemple des Toscans; dâorner leurs frontispices i de sculptures en craie, ou en bronze; tels sont auprĂšs du grand cirque, le temple de CĂ©rĂšs, et celui dâHercule bĂąti par PompĂ©e ; tel est aussi le Capitole. *** 11 me reste prĂ©sentement Ă faire connoĂźtre les proportions de lâeustyle. Sans contredit câest la meilleure de toutes les maniĂšres, la plus suivie et la plus commode; elle rĂ©unit la beautĂ© et la force ; ses entre-colonnemens doivent avoir la longueur de deux diamĂštres de colonne et un quart, hormis lâentre-colonnement du milieu du frontispice de lâentrĂ©e, et celui du milieu du frontispice de laniĂšre-temple, auxquels on donne trois diamĂštres de colonne ; celte maniĂšre en rend lâaspect agrĂ©able, lâentrĂ©e plus dĂ©gagĂ©e, et lâon nâest pas gĂȘnĂ© pour se promener autour du temple. **** Voici les proportions quâon doit suivre. Quand on met quatre colonnes dans le frontispice, on divise sa longueur en onze parties et demie, sans y comprendre la saillie des socles ni celles des bases; quand on en met six, on la diyise en dix-huit parties; quand on en met huit, on la divise en vingt-quatre parties et demie. La premiĂšre de ces divisions sâappelle tĂ©trastyle 2 , la seconde hexastyle 3, et la troisiĂšme octastyle 4. Que dans lâune ou lâautre, on prenne une de ces parties, ce sera le module qui sera toujours Ă©gal au diamĂštre dâune colonne ; tellement que chaque entre-colonnement aura deux modules et un quart, exceptĂ© les deux entre-colonnemens qui sont au milieu des deux frontispices, et qui auront trois modules ; la hauteur des colonnes sera de huit modules et demi ainsi avec cette distribution, on aura la juste mesure des entre-colon- nemens et de la hauteur des colonnes. 11 ne se trouve pas Ă Home de temple de cette espĂšce ; mais on en voit un en Asie t qui est le temple de Bac chus dans la ville de Teo, lequel a * Planche V."' 6 fi g. i . ** Planche VIII. me fig. i, O Par frontispice, il entend le fronton ou plutĂŽt le timpan. Les anciens avoient coutume de sculpter , dans cette partie, un bas relief, qui reprĂ©sentait quelque fait mĂ©morable de la divinitĂ© Ă laquelle le temple Ă©toit dĂ©diĂ©, ou la maniĂšre dont on y fiaisoit lĂ©s sacrifices. Tel est le fronton du temple de Diane dâEphĂšse, dont la figure se trouve page io5. Planche Vil. ,ne fig. i et 3 . **** Planche Xll. we fig. 5. . 2 Câest-Ă -dire, Ă quatre colonnes. 3 A six colonnes. 4 A huit colonnes. LIVRE III, C h a p. il io 9 huit colonnes Ă son frontispice. Câest HermogĂšne i qui a trouvĂ© toutes ces proportions ; câest lui qui a inventĂ© lâoclastyle et les temples pseudodiptĂšres, en ĂŽtant, au temple diptĂšre, le rang des colonnes du milieu qui sont au nombre de trente-quatre, afin de diminuer lâouvrage et la dĂ©pense. Il a augmentĂ© lâespace destinĂ© Ă se promener autour du temple , sans diminuer le nombre des colonnes qui sont en dehors et qui en rendent lâaspect agrĂ©able. Tellement quâil nâa rien ĂŽtĂ© au diptĂšre de ce quâil avoit de bon, et qui pourroit causer du regret; mais seulement ce quâil avoit de superflu car on a inventĂ© ces ailes de colonnes, qui sont autour des temples, pour leur donner plus de majestĂ©, par lâeffet que produit lâĂąpretĂ© des enlre-colonne- mens ; et aussi, lorsquâil survient une pluie, pour mettre Ă lâabri le peuple qui sây trouve souvent rĂ©uni en grand nombre, et qui peut alors se rĂ©fugier sous le portique et dans le temple. Ce grand avantage, quâon trouve dans le pseudodiptĂšre , fait voir quel Ă©toit le gĂ©nie dâHermogĂšne, et avec quelle sagacitĂ© , quelle intelligence il diri- geoit les ouvrages quâil a laissĂ©s Ă la postĂ©ritĂ© ; on peut les regarder comine la vĂ©ritable source oĂč il faut puiser les meilleurs principes de lâarchitecture. Dans le temple arĂ©ostyle ** , la grosseur des colonnes doit avoir la huitiĂšme partie de leur hauteur. Dans le diastyle ***, il faut diviser la hauteur de la colonne en huit parties et demie , et en donner une Ă la grosseur. Quant au systyle **** , on doit diviser la hauteur de la colonne en neuf parties et demie , pour en donner une Ă la grosseur. Dans le pycnostyle *****, il faut diviser la hauteur en dix parties, et en donner une Ă la grosseur. Dans lâeustyle ****** , on la divise en huit parties et demie, comme au diastyle , et lâon en donne une Ă la grosseur. Ces proportions observĂ©es , elles serviront pour donner aux entre-colonnemens celles quâils doivent avoir; plus les entre-colonnemens sont larges, plus il faut aussi grossir les colonnes; en effet, si dans un arĂ©ostyle , le diamĂštre des colonnes nâĂ©toit que la neuviĂšme ou la dixiĂšme partie de leur hauteur, elles paroĂźtroient trop minces et trop dĂ©liĂ©es , parce que lair, qui se trouve dans le large espace des entre-colonnemens, diminue et dĂ©robe Ă la vue une partie de la grosseur de la tige de la colonne; au contraire, si dans le pycnostyle on faisoit la colonne grosse de la huitiĂšme partie de sa hauteur , des entre-colonnemens aussi Ă©troits feroient paroĂźtre des colonnes, qui sont si prĂšs les unes des autres , tellement enflĂ©es , que cela auroit la plus mauvaise grĂące câest pourquoi on ne sauroit trop s'attacher Ă suivre et Ă©tudier les proportions , chaque maniĂšre ayant la sienne car il est encore nĂ©cessaire de grossir les colonnes des i Il en a parlĂ© dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, Planche VI. me fig. i. * Planche Vll. me fig. i et 2. ***** Planche Vl. raĂ© fig. 2. ** Planche V. rae fig. 1. ****** Planche VII. me fig. tel 2. *** Planche V.** fig. 2. IIO LâARCHITECTURE DE VITRUVE. angles dans une cinquantiĂšme partie de leur diamĂštre ; parce quâil semble que lâair et le grand jour auquel elles sont plus exposĂ©es que celles du milieu, les mangent et les rendent plus petites ; du moins elles paroissent telles aux yeux , et il faut que l'art remĂ©die Ă lâerreur de la vue. * La partie supĂ©rieure des colonnes doit aller en diminuant vers le gorgerin idans les proportions suivantes. Les colonnes ont-elles moins de quinze pieds de long? on divise le diamĂštre dâen bas en six parties, et on en donne cinq au diamĂštre dâen haut. Ont elles depuis quinze jusquâĂ vingt pieds de long ? on divise alors le diamĂštre dâen bas, en six parties et demie, et on en donne cinq et demie Ă celui dâen haut ; ont-elles depuis vingt jusquâĂ trente pieds de long? on divise le diamĂštre dâen bas en sept parties , et on en donne six Ă celui d en haut. Dans celles qui ont depuis trente jusquâĂ quarante pieds de long, on divise le diamĂštre dâen bas en sept parties et demie, et on en donne six et demie Ă celui dâen haut ; et dans celles qui ont depuis quarante jusquâĂ cinquante pieds de long, on divise le diamĂštre den bas en huit parties , et on en donne sept Ă celui dâen haut. Enfin sâil sâen trouve encore qui soient plus hautes, il faut les diminuer Ă proportion. Il est nĂ©cessaire de diminuer ainsi les colonnes , parce que lâĆil, qui regarde dâen bas vers le haut, se trompe facilement sur les objets qui sont fort Ă©levĂ©s. LâĆil aime ce qui est beau, il faut donc le satisfaire par la justesse des proportions ; ainsi lorsquâun objet paroĂźtra trop long Ă cause de son peu dâĂ©paisseur, il faudra augmenter le module. On remĂ©die par cet accroissement Ă lâerreur quâoccasionne lâĂ©loignement ; sans cela, un ouvrage paroĂźtra toujours disproportionnĂ© et sera dĂ©sagrĂ©able Ă la vue; câest pour cela que, milieu de la colonne, on ajoute quelque chose Ă sa grosseur; les Grecs appellent ce renflement enlasis. ** Je mets , Ă la fin de ce livre , une figure qui fera comprendre la mĂ©thode quâil faut employer pour le rendre doux et imperceptible, REMARQ UES. Dans le chapiire prĂ©cĂ©dent, Vitruve parle des diffĂ©rentes formes des temples et du plus ou moins de colonnes qui se trouvoienl, soit aux divers frontispices, soit aux ailes. Câest ce quâil appelle, dans ce premier chapitre, principia . . . Ćdium , les divers principes, les diverses rĂšgles des temples; et dans lâintro- duciion du , il dit , que , dans le troisiĂšme livre , il a traitĂ© des divers genres de temples et de leurs diffĂ©rentes espĂšces, de Ćdium. . . . generum varietate ... .et quot habeant ppecies. Il rend donc synonymes les deux mots gĂ©nĂ©ra et principia on voit donc que par genre de temple , il entend les diffĂ©rentes formes -dp temples dĂ©finies dans le premier chapiire , taudis que * Planche X. me fig. 4. sert ici Vitruve ; câest ce que nous nommons le gorgerin, i Tpa%>jXcç signifie le cou ou la gorge, dâoĂč ** Planche X. me fig. 3. l'on a fait le mot latin Hyputruchtliuni dont se LIVRE III, C h a p. h. m par espĂšce de temple il entend les diffĂ©rentes maniĂšres d J espacer les colonnes. Dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, il a donc parlĂ© des diffĂ©rens genres de temples; il distingue, dans celui-ci, leurs diffĂ©rentes espĂšces, par la gradation des enlre-colonnemens. Genre , en logique, dĂ©signe ce qui est commun Ă diverses espĂšces , et qui a sous soi plusieurs espĂšces diffĂ©rentes. Quoique plusieurs espĂšces de temples conviennent Ă diffĂ©rens genres , elles ne conviennent cependant pas indistinctement Ă tous les genres. Le pyenostyle , par exemple , ne convient pas pour le temple Ă antes , ni lâarĂ©o- style pour le diptĂšre et le pseudodiptĂšre Pun seroit beaucoup trop Ă©troit , et lâautre beaucoup trop large ; lâexĂ©cution en seroit presquâhnpossible. Comme tous les autres traducteurs , jâai rendu le mot Ćdes , dans ce chapitre , par celui de temple. Les anciens appeloient du nom de temple par excellence, celui qui Ă©loit de fondation royale , et oĂč se faisoient rĂ©guliĂšrement les exercices de la religion ; Ćdes , ceux qui nâĂ©toient pas consacrĂ©s ; Ćdicula , ceux qui Ă©toient plus petits et qui Ă©toient dĂ©couverts; sctcella } ceux qui Ă©toient petits et couverts ; et enfin dâautres fana , delubra , destinĂ©s Ă leurs mystĂšres. Le mot templum signifia dâabord tout lâespace que nous pouvons apercevoir i. Dans la suite on le prit dans un sens plus Ă©troit , et il se dit seulement de cette partie du ciel dĂ©signĂ©e par les augures enfin il exprima un lieu environnĂ© de murailles et destinĂ© au culte de quelque dieu , et consacrĂ© par les augures. Câest pourquoi on clonnoit le nom de templa augusta Ă ceux quâon avoit Ă©levĂ©s Ă son honneur. Il y avoit cette diffĂ©rence entre les lieux que les anciens appeloient templa, et ceux quâils nommoient Ćdes , sacra , que ceux-ci Ă©toient, Ă la vĂ©ritĂ© , destinĂ©s au culte de quelque dieu, mais quâils nâĂ©toient point consacrĂ©s par les augures. MĂ©nage , jaris cioilis amĆniâ tĂątes , p. 3 g , prĂ©tend que le mot templum vient dâun mot grec qui veut dire positus. On faisoit vĆu de bĂątir des temples pour plusieurs raisons 2. AprĂšs le vĆu fait , on marquoit les limites du temple 3 , ce quâils appeloient effari , ou tenninare templum 4. Lorsque ces temples Ă©toient achevĂ©s, celui qui avoit fait le vĆu, en faisoit aussi la dĂ©dicace. CâĂ©toit ordinairement un consul ou un gĂ©nĂ©ral dâarmĂ©e. Cela , ne se pouvoit faire sans lâordre du sĂ©nat , ou de la plus grande partie des tribuns du peuple 5 . Un pontife prononçoit la formule ordinaire de la dĂ©dicace 6, pendant que celui qui dĂ©dioit le temple tenoit la porte 7. AprĂšs quoi des augures venoient en faire la consĂ©cration , câest ce quâon appeloit inauguration. Tacite nous apprend quâon mettoit ordinairement de lâargent monnoyĂ© , ou en lingots , dans les fondemens des temples. Il nâĂ©toit pas permis ou du moins cela arrivoit trĂšs-rarement de consacrer un mĂȘme temple Ă deux divinitĂ©s 8. Cette dĂ©fense ne subsista pas toujours. Les dieux quâon adora ensuite dans un mĂȘme temple se nommĂšrent contubernales 9. Le fameux temple de Rome, nommĂ© le PanthĂ©on 10 , fut mĂȘme dĂ©diĂ© Ă tous les dieux, par Agrippa , gendre de lâempereur Auguste. Les lieux nommĂ©s fana chez 1 Plaut. Mil. 61 . 1. 5 . et Rud. 4 - 2. t. 4 - Templa Nepiuni. 2 Tite-Liv. , Liv. I. Chap. 3 . 3 Ibid. Chap. 9. 4 Id. Liv. V. Chap. 5 o. Yarr. de L. L. Liv. V. Chap. 7. 5 lite-Liv. Liv. IX. Chap. 36 . 6 Tacit. Ilist. Liv. IV. Chap. 53 . 7 Cicero pro domo, 46. Dans cette oraison, il nous fait la description des ce're'monies qui sâobservoient dans ces circonstances. 8 Tite-Liv. Liv. II. Chap. 25 . Plut, vie de Marcellus. 9 Cic. ad Att. 11 , i 3 et 28. 10 PanthĂ©on, signifie en grec tous les Dieux. Ce temple dont nous avons dĂ©jĂ parle' plusieurs fois , existe encore Ă Rome sous le nom de Sainte Marie de la Rotonde. 112 LâARCHITECTURE DE V I T R D Y E. 1 Ascon. ad Divin. Gcer. ad Verr. i. 2 Vairon donne une Ă©tymologie assez singuliĂšre dn mot dclubrum. Câest, dif-ii, parce quâon metĂźoit lĂ statue du dieu au milieu du temple comme un grand chandelier candelabrum, dâoĂč on a dit ddubrnn. Juvenal çn parle aussi , Sat. XIII. y. 6$. 3 Macrob. Satur. II. Chap. 4.. 4 Deut. Chap. 16. v. 21. Reg, Liv, I.. Chap. 1,4. n a 3 . Homer. Iliad. lay. V. y. 5o6. Vilruye les Romains, Ă©toient en gĂ©nĂ©ral toutes les maisons consacrĂ©es parles pontifes. On peut consulter les Ă©tymologies de Yossius sur le mot fanum. Delubrum Ă©toit un endroit oĂč ils mettoient la statue dâun ou de plusieurs dieux .1 y ou bien une ! fontaine qui Ă©toit devant le temple, dans laquelle ils alloient se laver avant dâentrer dans le temple, cleluebant . Mais ce mot se prend pour toute sorte de maison sacrĂ©e 2. Le sacellurn, diminutif de sacrum , nâĂ©toit autre chose quâun lieu consacrĂ© et environnĂ© seulement dâun mur sans toit. On se servoit aussi de ce mot, pour exprimer toutes sortes de temples, lorsquâils Ă©toient petits 3 . Enfin ce quâils appeloienl lucus , Ă©toit des forĂȘts consacrĂ©es Ă quelque dieu. On leur donnoit ce nom, Ă eause dâun grand nombre de feux quâon y allumoit en lâhonneur des dieux qui y Ă©toient adorĂ©s 4. En expliquant les diffĂ©rentes maniĂšres dâespacer les colonnes des temples , Vilruve fait connoĂźtre les avantages et les inconvĂ©niens de chacune. Dans les deux premiĂšres, elles sont trop serrĂ©es. Si elles ne sont dâun trĂšs grand module , deux personnes de front ne sauroient passĂšr entre elles, et lâespace Ă©troit quâelles laissent, vis-Ă -vis des portes, permet, Ă peine, Ă ceux qui sont dehors, de voir la statue du dieu. Les deux derniĂšres ont le dĂ©faut contraire lâespace entre les colonnes est si grand , que les entablemens sont dans le cas de rompre sâils sont en pierre ; on est obligĂ© de les faire en bois avec de grosses poutres, et lâĂ©difice paroĂźt bas et Ă©crasĂ©. Lâeustyle , inventĂ© par HermogĂšne , lient un juste milieu entre les autres 5 il mĂ©rite la prĂ©fĂ©rence, â Ă cause de ses belles proportions. Dans les premiers temps de lâarchitecture , oit suivoit en gĂ©nĂ©ral les deux premiĂšres maniĂšres on laissoit trĂšs-peu dâintervalle entre les colonnes. Les entre-colonnemens du temple de Jupiter Ă Girgenti en Sicile , nâont qnâun diamĂštre et demi , et ceux du grand temple de Pestum nâont guĂšre plus dâun diamĂštre car le diamĂštre des colonnes est de sept palmes et cinq huitiĂšmes , et les entre-colonnemens ont huit palmes entiers ; cette variĂ©tĂ© dâombres et de lumiĂšres, produite les unes parla multitude des colonnes, et les autres parles ouvertures des entre-colonnemens, avoit quelque chose de gracieux qui plaisoit aux anciens; câest ce quâon appelle lâĂąpretĂ© des entre-colonnemens. Ceux qui se sont promenĂ©s entre les colonnes qui entourent la place de la Basilique du Vatican, peuvent sâen faire une idĂ©e. LâĂąpretĂ© des entre- colonnemens , dit Vilruve , donne infiniment de majestĂ© Ă lâĂ©difice. Ut aspectus propter asperita- tem intercolumniorum , habet auctoritatem. Asperitcis est lâopposĂ© de levitas y ce dernier mot signifie proprement le poli dâun mur sur lequel est rĂ©pandue une lumiĂšre Ă©gale 5 lâautre exprime, au contraire ', lâinĂ©galitĂ© du jour rĂ©pandu sur une colonnade. Dans le cinquiĂšme chapitre du septiĂšme livre , Vilruve dit, en parlant de la peinture dâune scĂšne, j oĂč lâon avoit multipliĂ© les ornemens cĂ m aspectus ejus scĂŠnĆ propter atem eblanĂąi- retur omnium visĆ, etc. Câest pour louer lâeffet produit par le rapprochement des colonnes que j T l ^i M COM; 1 serrtp re elfe dehors es cĂš, i est si prĂ©fet! t eu g* liamÚßre iauiĂštreJ es entiej lesaĂ©li i mie sâ CĂ»loHD les euii sur lĂšf in sw* Ăź ! 1 1 LIVRE I I I», C ii a p." u. Vitruve emploie la phrase, ĂąpretĂ© des entre-colonnemens. Celte façon de parler est assez significative pour reprĂ©senter lâinĂ©galitĂ© de superficie quâun grand nombre de colonnes donne aux cĂŽtĂ©s- dâun temple, lorsquâon le regarde par les angles. Lâeffet de cet aspect est de faire paroĂźtre les colonnes serrĂ©es lâune contre lâautre; cette maniĂšre plaisoit beaucoup aux anciens, parmi lesquels on trouve beaucoup moins de diasiyle et dâeustyle que de et de syslyle; la commoditĂ© seule leur fit rechercher des maniĂšres plus dĂ©gagĂ©es. Dans la dĂ©cadence de lâart, on a donnĂ© dans lâexagĂ©ration; on aimoit lâair, le jour et les dĂ©ga-~ gemens ; on a multipliĂ© les arĂ©ostyle ; on a mĂȘme ajoutĂ© Ă cette maniĂšre jusquâau point de sâapprocher dĂ©jĂ du gothique , avant que les barbares lâeussent fait .connoĂźtre. La sage multiplication des colonnes sera toujours le plus grand agrĂ©ment de lâarchitecture. Le cĂ©lĂšbre HermogĂšne trouva la juste proportion de lâintervalle quâil falloit laisser entrâelles ; il le fixa Ă deux diamĂštres et un quart, hormis pour les deux entre-colonnemens du milieu des deux frontispices, vis-Ă -vis des portes, quâil fixa Ă trois diamĂštres; cette maniĂšre nâa aucun dĂ©faut ; elle convient au lĂ©trasiyle, Ă lâexastyle, Ă Iâoctastyle. Il indique la maniĂšre de diviser la largeur de ces trois sortes de temples, de façon que chaque division est Ă©gale au diamĂštre de la colonne qui sert de module. Le compte est facile Ă faire si le temple est tĂ©trastyle , câest-Ă -dire sâil a 4 colonnes au frontispice , on le divise en onze parties et demie, et le module est une de ces onze parties. En voici le compte DiamĂštre ou module. Epaisseur^des quatre colonnes . . . . .4 » Deux entre-colonnemens, de deux diamĂštres et un quart chacun ....... 4 \ Lâentre-colonnement du milieu . . 3 > - â il 1 Dans lâexastyle, le module ou le diamĂštre de la colonne est une des 18 parties; dans lâoctasiyĂŻe, eâest une des 24 ~ , ce quâon trouve en additionnant ensemble les diamĂštres et les entre-colonnemens y comme jâai fait pour le tĂ©trastyle. En suivant la meme rĂšgle , on trouvera Ă©galement , que, dans un frontispice dĂ©castyle, le module est une des trente-une parties, et ainsi des autres, dâaprĂšs le plus grand nombre des colonnes qui sây trouvent. Voyez la 5. figure de la XII.° planche qui reprĂ©sente les entre-colonnemens et les divisions rapportĂ©es dans le texte. "V ilruve, comme On voit , se sert ici pour module , du diamĂštre entier de la colonne ; dans le 5. me chapitre du IV. e livre , oĂč il traite de lâordre dorique , il se sert pour module du ravon ou demi-diamĂštre de la colonne. Nous avons dĂ©jĂ observĂ© dans nos remarques sur le a. chapitre du l. n livre, quâaujourdâhui, pour Ă©viter toute confusion, on nâemploie plus dâautre module , que le demirdiamĂšlre ou rayon de la colonne. Quoique les entre-colonnemens du milieu des deux frontispices soient de trois diamĂštres, qui est la grandeur du diasiyle , celle exception nâĂŽle pas au reste de lâĂ©difice la dĂ©nomination dâeustyle. n4 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. La largeur de lâentre-colonnement du milieu contribue , de deux maniĂšres, Ă rendre Paspect du temple plus agrĂ©able. Dâabord lâentrĂ©e du milieu nâest pas serrĂ©e comme dans les autres , oĂč cet entre-colonnement est toujours ^beaucoup plus Ă©troit que lâouverture de la porte. Ensuite la largeur du temple , augmentĂ©e par un entre-colonnement plus grand , ajoute Ă la beautĂ© de ses proportions, Ce quâon peut remarquer au frontispice du temple de la Rotonde a Rome , ou lâentre-colonnĂ©ment du milieu est plus grand que les autres. ^ ^ 1 ' u ~- Il me reste prĂ©sentement Ă parler de la plus belle invĂšntion des architectes modernes , ou, pour mieux dire, de la'seule dĂ©couverte qui ait 1 ajoutĂ© quelque beautĂ© Ă leur art et quâils ne doivent pas aux anciens. Je parle de lâaccouplement dĂšs colonnes; idĂ©e heureuse qui nâĂ©toit venue Ă aucun dâeux. ' i -'" r r - r HermogĂšne dans lâeustyle Ă©largĂźt lâentre-colonnernent du milieu , qui rendoil lâentrĂ©e des temples trop Ă©troite, et dĂ©gageant le diptĂšre dâun rang de colonnes , en fil le pseudodiptĂšre. A son exemple le cĂ©lĂšbre Perrault trouva le moyen dâĂ©largir tous les entre-colonnemens , sans rien ĂŽter Ă lâĂ©difice de sa soliditĂ©. Ce que le premier lit en ĂŽtant un rang de colonnes dans chaque aile, lâautre le fit dans chaque rang , en ĂŽtant une colonne du milieu des deux autres colonnes ou elle Ă©toit , pour la ranger contre une de ses voisines. Cette maniĂšre offre en quelque sorte lâĂąprĂ«lĂ© et le serrement des colonnes que les anciens aimoient, et le dĂ©gagement que les modernes cher- client , sans que la soliditĂ© souffre car les architraves des anciens, faites dâune seule pierre , por- toient dâune colonne Ă lâautre , et leurs extrĂ©mitĂ©s ne posoient cpie sur la moitiĂ© de la colonne ; eeux-ci sont bien mieux affermis, puisquâils posent spr toute la colonne ; et les poutres Ă©tant doublĂ©es , ainsi que les colonnes , elles ont beaucoup plus de force pour soutenir les planchers. Câest avec le plus grand succĂšs quâil a exĂ©cutĂ©, de celte ntaniĂšre , les deux portiques qui sont Ă la façade du Louvre. Les colonnes , qui ont plus de trois pieds et demi de diamĂštre, sont jointes deux Ă deux ; leurs entre-colonnemens sont de onze pieds ; cette distance est Ă©gale Ă celle qui se trouve entre les colonnes et leurs pilastres qui sont adosses au mur. On a Ă©tĂ© obligĂ© de les faire de cette grandeur , Ă cause de la largeur des croisĂ©es , qui sont ornĂ©es de chambranles , de consoles et de frontons qui exigeoient cette distance entre les pilastres ; et ces grandes distances dans les portiques nâauroient pas Ă©tĂ© supportables , si les colonnes nâavoient Ă©tĂ© doublĂ©es. 1 i i La façade du Louvre est un des plus beaux morceaux dâarchitecture qui existe, et fera toujours infiniment dâhonneur Ă Perrault. Une chose'assez intĂ©ressante , câest quâon a dĂ©couvert, aprĂšs la mort de cet habile architecte , une galerie semblable Ă celle du Louvre, dans les ruines de Palmyre, sauf que les colonnes nây sont pas accouplĂ©es, i Vitruve , en parlant des temples arĂ©ostyles , dit quâil faut ofner leur fronton de bas-relief, Ă la maniĂšre des Toscans ; il cite , pour exemple , plusieurs Ă©difices ' tels sont , dit-il , prĂšs du grand cirque ', le temple de GĂ©rĂ©s et celui dâHercule , bĂątis par PompĂ©e ; tel est aussi le Capitole. Ăti est ad circum maximum Cereris et Herculis Pompejani , item Capitolii i Volney, Voyage dâEgyple. > ; / LIVRE III, ⏠h a p. ' ii. na 'f'Oaliam tĂ©moigne sa 'surprise sur la maniĂšre dont tous ;les traducteurs'ret= interprĂštes ont rendu ce passage , puisquâils appliquent lâĂ©pithĂšte de Pompejani Ă Capitolii , et comprennent par-lĂ que 1 lâancienne ville de Poâmpeya prĂšs de Naples., Ă lâexemple de la ville de Rome, avoit aussi son Capitole. Le mot item qui se trouve entre Pompejani et Capitolii suffit .dĂ©jĂ pour sĂ©parer ces deux objets. Nous savons de plus que, prĂšs du grand Cirque;y il existoit un temple. d ? Hercule bĂąti par PompĂ©e, preuve quâil faut appliquer le. mot Pompejani Ă Jlerculis , et non; Ă Capitolii. Pline dit que le sculpteur Myron fit la statue dâHcrcule , pour le temple que PompĂ©e lui fit construire prĂšs du grand cirque. Fecit .... Herculem etiam qui est apud circum maximum in Ćde Pompei magni. Pline parle aussi du temple de CĂ©rĂšs , situĂ© Ă©galement prĂšs du grand cirque, et citĂ© ici par Vitruve de DamophiĂźus et Gorgafus , tous deux peintres cĂ©lĂšbres etsculpteurs Ăš ! n craie qui ont travaillĂ© Ă ce temple. Cereris Ćdem RomĆ^ ad^ circum maxinium 'utroqpe genereartjs suĆ . exçoluerunt i . Il confirme, donc ce quâavance Vitruve , gue ]e 0 fronton de. ce, tçuiple Ă©pil.,oroĂ© de b as-relief sculptĂ© en craie 2. ,, .. 1 ; r , âą ?. . ' . âą âą ! 1 ' . '' -p ; ^Les interprĂštes ne sont pas non plus biery dâaccord sur le passage de ce chapitre , oĂč il dit quâHermogĂšne ĂŽta du diptĂšre les ^trente-huit colonnes ,qui formoient les rangs intĂ©rieurs. Dans quelques manuscrits , au lieu de 54 colonnes, on lit 38. Il est assez clair cependant quâon doit lire 34, parce que câest ce nombre, ; et pas davantage , qui forme le rang intĂ©rieur du diptĂšre. Il est aisĂ© de voir lâorigine de cette erreur. Le nombre des colonnes Ă©tant marquĂ© de celte maniĂšre , en chiffres romains, XXXVIII, le premier 1 aprĂšs le X Ă©tant inclinĂ© V , le copiste lâaura pris pour un V; Cette diffĂ©rence dans le nombre des colonnes peut aussi venir, de ce que vis-Ă -vis des antes qui terminent les murs latĂ©raux des Celia , an y auroit placĂ© 4 colonnes , ce qui se faisoit quelquefois, comme on le >verra dans le 7.* chapitre du IV. e livre , et dans la fig. 1 et 2 de la VI. e planche marquĂ©e G S. Vitruve peut lâavoir compris comme cela ; alors ce seroit 38 colonnes quâil faudroit lire. ' âą i Revenons prĂ©sentement aux diffĂ©rentes maniĂšres dâespacer les colonnes ; notre auteur qui , aprĂšs en avoir tirĂ© diverses Ă©onsĂ©quences , Ă©tablit en principe , quâil faut donner aux colonnes de lâarĂ©o- style , 8 diamĂštres de hauteur ; au diastyle J 8 et demi ; au systyle , g et demi ; au pycnostyle 10 ; et Ă lâeustyle , 8 et demi, comme au diastyle. - le pĂšre Laugier qui voudroit ramener lâarphitecture Ă la puretĂ© de ses premiers principes , tous tirĂ©s de la nature , telle quâelle Ă©toit dans les siĂšcles de PĂ©riclĂšs et dans celui dâAlexandre , * condamne les piĂ©destaux 1 câest un grand dĂ©faut, dit - il , de » guinder les colonnes sur des piĂ©destaux , au lieu de les faire porter immĂ©diatement sur le pavĂ©. » Les colonnes, continue-t-il, Ă©tant, si je puis parler ainsi, les jambes de lâĂ©difice, il est absurde » de leur donner Ă elles-mĂȘmes dâautres jambes. Les piĂ©destaux dont je parle , nâont Ă©tĂ© imaginĂ©s » que par misĂšre. Quand on a eu des colonnes trop courtes , on a pris le parti de les monter » sur des çchasses , pour supplĂ©er Ă leur dĂ©faut dâĂ©lĂ©vation. En un mot, les piĂ©destaux ne sont » bons que pour porter une statue , et câest manquer essentiellement de goĂ»t que de les destiner » Ă un autre usage ». AprĂšs avoir parlĂ© des piĂ©destaux, Vitruve parle, comme il est dans lâordre , des bases des colonnes, et fait la description des deux espĂšces employĂ©es dans lâordre ionique ; la premiĂšre est la base attique ou atticurge, ainsi nommĂ©e parce quâelle fut inventĂ©e Ă AthĂšnes câest pour la mĂȘme raison sans doute , que dans le sixiĂšme chapitre du quatriĂšme livre , il appelle porte attique , celle qui est propre Ă lâordre corinthien. Lâautre est la base ionique , qui appartient proprement Ă cet ordre dont elle porte le nom ; nĂ©anmoins, dans les Ă©difices anciens comme dans les modernes, on nâemploie guĂšre dans cet ordre que la base attique. Celle-ci rĂ©unit de si belles proportions , quâil nâest pas Ă©tonnant quâelle ait fait entiĂšrement oublier lâautre. Galiani observe que les proportions de cette base sont toutes harmoniques dâapres les principes quâil a indiquĂ©s , comme nous , dans les remarques sur le i. r Chap. du I. er Liv. Il promet de dĂ©montrer la chose dans un autre ouvrage , si toutefois il nâest pas prĂ©venu par un autre. Comme j ignore sâil a tenu parole , je vais essayer de faire voir comment la base attique est faite d aprĂšs les principes harmoniques , pour donner quelque idĂ©e au lecteur des rapports qui se trouvent entre lâarchitecture et la musique. ? Essai* sur lâarchitecture , Chap. 1. art. ?. Une * / LIVRE III, ⏠K a p. ni. I2 lies interrompues par deux lĂ©gers astragales , est horriblement dĂ©fectueux. En bonnes rĂšglesle » plus pesant doit toujours ĂȘtre au-dessous et le plus lĂ©ger au-dessus. » Ici cet ordre naturel est renversĂ© , et copsĂ©quemment la soliditĂ© en souffre. Cette base bien n loin dâavoir sa diminution par le haut, est au contraire diminuĂ©e par le bas. Plus Ă©troite auprĂšs » de sa plinthe , elle sâĂ©largit monstrueusement du cĂŽtĂ© oĂč elle se joint au fĂ»t de la colonne. » 1 Câest Ă cause de ces dĂ©fauts quâon lui substitue presque toujours la base attique. La maniĂšre de prescrire les grandeurs des membres dâarchitecture , en les dĂ©terminant par le double , le triple , etc., comme fait Vitruve , est, Ă mon avis , bien plus facile et plus certaine que celle dont nous avons coutume de nous servir aujourdâhui. Nous partageons le module en plusieurs petites parties que nous nommons minutes ; on en prend ce quâil faut pour chaque membre ; cela est incommode , parce que souvent il faut subdiviser ces minutes en beaucoup cfautres particules. 1 Essai sur l'architecture, Chap. a. art. 3 . I Ni la 'SOli .1 , â/l 1 %\ Md sailĂŻ 16 1 1 ne H Pmetid,! 1 1 Cette dl q ĂȘQS IjĂŒ la tas; il netit;-1 la tj i - de ]>[. ipas dti i teat ! Ăźoindre lit, il ai uec le a qae ci ie ouvei vUes d rĂšgles ,i base fc âąolte af anne. fl liant p iertaic f Ăź en pb* libre j ^ partit LIVRE III, C h a p. ni. * i3i » On se perd aisĂ©ment dans toutes ces fractions, et la mĂ©moire a bien de la peine Ă retenir toutes ces petites parties divisĂ©es en tant de nombres diffĂ©rens. Lâautre maniĂšre est bien prĂ©fĂ©rable ; lâesprit et lâĆil sâaccoutument aisĂ©ment Ă donner Ă tous les membres des proportions qui correspondent entre elles ; lâune est le double , lâautre le triple , lâautre la moitiĂ© etc. On les donne plus prĂ©cises et plus exactes ; on est moins dans Je cas de les oublier , et consĂ©quemment dâaltĂ©rer lâharmonie des proportions qui fait tout le charme de lâarchitecture. Avec la maniĂšre actuelle , lâĆil saisit difficilement ces rapports rĂ©ciproques de grandeur j on ne comprend pas quâon ait assignĂ© Ă un membre autant de parties de module , afin que sa grandeur corresponde avec celle dâun autre membre $ les uns par oubli , les autres par ignorance , sâĂ©cartent des justes mesures , et Ă la honte des architectes modernes , la belle harmonie des proportions nâexiste pas dans leurs ouvrages. La position , ou plutĂŽt la taille des colonnes dâun temple , nâĂ©toit pas la meme pour tout lâĂ©difie» suivant Yiiruve. Dans le deuxiĂšme chapitre de ce livre , il nous enseigne comme on doit attĂ©nueras colonnes depuis le tiers de leur hauteur jusquâen haut. Les seules colonnes du milieu des deux frontispices doivent ĂȘtre posĂ©es Ă plomb sur leur centre , et leur rĂ©trĂ©cissement doit ĂȘtre Ă©gal de tous cĂŽtĂ©s ; quant aux colonnes latĂ©rales , cette diminution doit ĂȘtre toute Ă lâextĂ©rieur , et la partie qui regarde lâintĂ©rieur, ĂȘtre absolument dâaplomb. Il nous reste Ă savoir sâil entend que le rĂ©trĂ©cissement de cette partie extĂ©rieure soit seulement Ă©gale Ă celui que prĂ©sente lâun des cĂŽtĂ©s des autres colonnes , ou si elle doit avoir toute la diminution prescrite dans le 2. me chapitre de ce livre , laquelle seroit le double. Lâexpression de Yiiruve nâest pas bien claire Ă cet Ă©gard ; mais puisquâil conclut que ce rĂ©trĂ©cissement produit un effet qui rend lâaspect de tout lâĂ©difice trĂšs-agrĂ©able , on doit supposer quâil doit ĂȘtre assez sensible , et parlant ĂȘtre aussi fort lui seul que le seroient rĂ©unis ensemble , les deux qui sont aux cĂŽtĂ©s des autres colonnes. Je le crois dâautant plus que cela lui donne une forme plus pyramidale, forme que les Egyptiens, les maĂźtres de toute lâantiquitĂ© pour lâarchitecture , ramenoient sans cesse dans toutes les parties de lâĂ©difice , comme Ă©tant la base de toute soliditĂ©. Si les Grecs se sont par la suite Ă©cartĂ©s de cette forme, câest lorsquâils ont cessĂ© de suivre les principes de leurs maĂźtres ; mais dans les Ă©difices des premiers temps de leur architecture , on reconnoĂźt par tout celte forme. Le chapiteau ionique est la partie de tout lâordre oĂč il rĂšgne le plus dâinvention et qui en marque le plus vivement le caractĂšre. Un astragale , un ove, une Ă©corce qui se replie en volute par les deux extrĂ©mitĂ©s , et qui est surmontĂ©e dâun talon et dâun tailloir carrĂ© , en font toutes les richesses. La grande beaulĂ© de ce chapiteau vient des deux volutes qui se contournent dâune maniĂšre infiniment gracieuse. Lâordre ionique, comme nous lâapprend Yiiruve, dans le i. er chapitre du livre suivant, fut employĂ© pour la premiĂšre fois au temple de Diane Ă EphĂšse , bĂąti par ClĂ©- siphon vers le temps des premiĂšres olympiades ; son chapiteau nâavoit alors que deux de ses faces parallĂšles ornĂ©es de volutes. Les deux autres faces ressembloient Ă une espĂšce de coussin ou dâoreiller en usage chez les anciens pulvinatus , ou Ă deux montants de balustre , rĂ©unis par une pomme intermĂ©diaire quâon nomme ceinlure ou baudrier. Cette diversitĂ© de faces nâavoit aucun inconvĂ©nient, tandis que les faces Ă volutes se reprĂ©senloient de front mais au premier angle saillant, au premier retour du portique , le chapiteau de la colonne angulaire ne pouvoit manquer de prĂ©senter de front , sa face Ă balustre , dâoĂč il rĂ©sultoil deux inconvĂ©nients inĂ©vitables. Il falloit ou que les 17. V i32 LâARCHITECTURE DE V I T R U Y E. chapiteaux de toute une rangĂ©e de colonnes prĂ©sentassent de front leurs faces Ă baĂźustres , comme j on les voyoit au portail dâun temple prĂšs de lâĂ©glise de S. 1 Nicolas in carccre Ă Rome, dont RaphaĂ«l j a donnĂ© le dessin , ce qui faisoit un trĂšs-mauvais elfet ; ou que les chapiteaux des deux colonnes angrdaires prĂ©sentassent une face diffĂ©rente de tous les autres chapiteaux , ce qui se praliquoit ph s ordinairement, quoique cela ne pĂ»t manquer de grimacer dâune maniĂšre Ă©trange. Les Grecs se sont servis long-temps de ce chapiteau, sans trouver le moyen dâobvier Ă ses inconvĂ©niens. Dans la derniĂšre Ă©poque de lâantiquitĂ© , on inventa dâen faire les quatre faces pareilles et toutes a volutes ; comme on peut le voir , entrâautres , au temple de la Concorde Ă Rome 1 , bĂąti sous le consulat de Furius Camille, aprĂšs le rĂ©tablissement de la paix entre le peuple et le sĂ©nat ; ce temple fut consumĂ© par un incendie , et rĂ©tabli par le sĂ©nat et le peuple Romain, comme le porte lâinscription qui existe encore dans la frise. Vitruve connoissoit certainement ce chapiteau , quoiquâil nâen donne aucun dĂ©tail , puisque les colonnes du temple de la Concorde existoient, de son temps , telles que nous les voyons aujourdâhui, et lâexpression dont il se sert, Si pulvinata erunt, prouve quâil connoissoit dâautres chapiteaux ioniques que ceux en forme dâoreiller. Câest donc une erreur de croire , comme quelques auteurs modernes lâont cru, que Michel-Ange ou Scamozzi aient inventĂ© le nouveau chapiteau ionique. Ce chapiteau ainsi perfectionnĂ© nâoffre plus dâinconvĂ©nient , câest pourquoi on le prĂ©fĂšre Ă lâancien , que les architectes modernes emploient trĂšs-rarement. Revenons prĂ©sentement Ă lâancien chapiteau ionique , puisque câest celui dont parle Vitruve. Il est incroyable combien les amateurs dâarchitecture se sont donnĂ©s de peines pour parvenir Ă dĂ©couvrir la maniĂšre de tracer la volute reprĂ©sentĂ©e dans la figure que Vitruve annonce Ă la fin de ce livre , et qui se trouve perdue avec toutes les autres. Les interprĂštes ont cherchĂ© par tous les moyens possibles de la remplacer quelques-uns mĂȘme , comme Goldman et Talviati , ont Ă©crit des traitĂ©s entiers sur ce sujet, et tous, suivant moi , se sont Ă©cartĂ©s du vrai sens de Vitruve. Toutes leurs inventions pour tracer la volute sont trĂšs-belles, et on ne peut pas plus ingĂ©nieuses ; mais elles ne ressemblent pas Ă celle quâenseigne lâauteur latin. La preuve Ă©vidente de ce que jâavance , ce sont toutes les corrections quâils sont obligĂ©s de faire au texte pour le forcer de dire comme eux ; iis le croyent falsifiĂ© , parce quâils ne le comprennent pas, et veulent nĂ©anmoins le forcer de dire la mĂȘme chose quâeux. Perrault qui a tant de droit Ă notre reconnoissance , Ă cause de ses soins pour interprĂ©ter Vitruve , est de ce nombre il prĂ©tend quâau lieu de duocĂźevigesima , il faut lire duodecimci y quâau lieu d âunins et dimidiata , il faut lire unius dimidiatĆ y quâau lieu Ă âactionibus , il faut lire anconibus etc. Jâai dĂ©jĂ parlĂ© dans mes noies de ces corrections , et jâen parlerai encore dans la suite de ces remarques. Toute leur erreur vient de ce quâils ont tracĂ© des volutes diaprĂ©s les monumens antiques , ou dâaprĂšs les rĂšgles de la geometrie , et dâavoir voulu y appliquer les paroles de Vitruve. Nous avons suivi la rĂšgle Ă©tablie par Galiani qui est entiĂšrement liree du texte , oĂč il nâa pas changĂ© une virgule , comme il le dit lui- meme. Comme lui , nous avons placĂ© des lettres, dans la traduction, qui correspondent avec celles de la figure , et indiquent la façon de tracer la volute. Ceux qui voudront se donner la peine de comparer celte mĂ©thode avec les autres , pourront voir qui a mieux saisi le sens de lâauteur. J ai dĂ©jĂ place au bas de la traduction quelques notes nĂ©cessaires pour bien la comprendre j js 1 Voyez le plan de ce temple , planche fig. 2. ' 1 1 "B k ; Htct;; elles ^ luâiltotĂŻ croire our puf nce iiĂź lĂ© parfej ont jitruve, 1 aieuses; igĂ©s h . compKĂź it deĂš e il la, ĂŒ 1 [ans mes te le r es rĂ©gi; de Ă©u$ t avec peine k iieor.^ IIDpI^ LIVRE III, C h a p. in. ĂŻ33 vais traduire ici ce que Galiani ajoute sur la construction de la volute et sur le reste du chapiteau ionique , dâautant que jâai adoptĂ© sa mĂ©thode.. Le vrai sens du texte, dit Galiani, est quâen traçant chaque quart de cercle , in singulis tetran- torum actionibus , il faut diminuer chaque fois leur rayon , clâun demi-diamĂštre de lâoeil de la volute, climidiatum oculi spatium minuatur.' Il est clair, dâaprĂšs sa mĂ©thode, reprĂ©sentĂ©e dans la 4. e fig. de la XII. ° planche, que prenant pour centre le point 7 , pour tracer le quart du cercle fig. 1. Le point 1 sâapproche du centre de lâĆil h dâun demi-diamĂštre de lâĆil. On trace le second quart 12 avec le centre 8 et avec le rayon 8,1, dâoĂč il suit que le point 2 sâapproche du centre h dâune quantitĂ© Ă©gale Ă une des huit parties qui divisent la hauteur de la volute , en traçant les deux quarts de cercle 2 , 5. 3 , 4. on approche le point 4 dâune autre partie. On approche encore le point 6 , dâune autre partie en traçant les deux quarts 4,5. 5,3. Alors il ne reste plus , en plaçant le centre au point 9 , quâĂ tracer le demi-cercle 6,7 , qui termine la spirale de la volute directement sous le point de lâabaque , oĂč on a commencĂ© Ă tracer le premier quart de cercle , donicum in eumdem tetrantem qui est sub abaco veniat. f Cette opĂ©ration facile est si conforme aux paroles du texte , quâelle nâa pas besoin de justification , si je ne me trompe ; plus on lâexaminera , plus elle paroĂźtra vraie , sur-tout si on la confronte avec les mĂ©thodes donnĂ©es par les autres interprĂštes. Par exemple Perrault pour expliquer ce passage Ă sa maniĂšre , veut quâau lieu de lire actionibus , on lise anconibus il veut encore davantage comme ancon signifie une Ă©querre , ou bien un angle droit , il prĂ©tend que ancon signifie ici la pointe de lâangle droit. Combien voilĂ de licences , pour pouvoir soutenir une idĂ©e mal conçue dâabord ! a r Nous avons vu que câĂ©toit sur la largeur de lâabaque quâon rĂ©gloit toutes les proportions du chapiteau ; câest pourquoi Yitruve commence par dĂ©terminer sa mesure 5 comme il faut que sa saillie soit proportionnĂ©e Ă la grosseur de la colonne , et que plus celle-ci sera Ă©levĂ©e , plus elle paroĂźtra mince par le haut , chose Ă laquelle on remĂ©die en retranchant de lâattĂ©nuation du haut des colonnes , Ă mesure quâelles sont plus Ă©levĂ©es , comme nous lâavons vu dans le chapitre prĂ©cĂ©dent ; il faut par-consĂ©quent augmenter aussi alors la largeur de lâabaque ; tellement quâayant donnĂ© Ă lâabaque des colonnes qui ont moins de quinze pieds , la grandeur dâun diamĂštre et une dix-huitiĂšme partie , il donne Ă celui des colonnes qui sont plus hautes , un diamĂštre et une neuviĂšme partie , partant une dix-huitiĂšme partie de plus quâaux autres. Par-consĂ©quent toutes les proportions des diffĂ©rens membres du chapiteau sont augmentĂ©es et deviennent plus fortes Ă proportion de leur Ă©lĂ©vation. Il dit ensuite comme on doit poser les chapiteaux au-dessus des colonnes. Les expressions dont il se sert Ă cet Ă©gard , ont dâautant plus embarrassĂ© les interprĂštes , quâil emploie Ă peu prĂšs les mĂȘmes dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, en parlant des stylobates , quâil 11e faut pas placer Ă la file , non ad libellant. Il rĂ©pĂšte ici quâil faut que les chapiteaux rĂ©pondent Ă ces stylobates ; ce qui a fait croire Ă ceux qui, comme nous, ont pensĂ© que'Yitruve entendoit par-lĂ quâil falloit faire un piĂ©destal Ă chaque colonne , quâon clevoit aussi avancer les entablemcns sur les colonnes, et les retirer dans les entre-colonnemens comme on le voit aux arcs de triomphes de Septime SĂ©vĂšre et i34 I/ARCHĂTECTURE DE V I T R U V E. de Constantin Ă Rome , et Ă celui de Trajan Ă AncĂŽne. Ils nâont pas fait attention que Yitruve ne parle ici des entablemens que par hasard; quâil sâagit principalement des chapiteaux. Je crois, quant Ă moi, quâil a entendu que la face des chapiteaux d e du profil fig 3. me planche XII ne soit pas placĂ©e directement avec la partie la plus extĂ©rieure de la tige de la colonne ; mais quâelle fasse deux saillies Ă©gales des deux cĂŽtĂ©s de la colonne , et que les volutes rĂ©pondent aux angles des stylobates. Je crois dâautant plus que câest le sens de Yitruve , quâil a parlĂ© de lâastragale comme faisant partie de la colonne et non du chapiteau ; si lâastragale avoit tenu au chapiteau , son diamĂštre Ă©tant Ă -peu-prĂšs le mĂȘme que celui du haut de la colonne , le chapiteau se plaçoit naturellement comme il devoit ĂȘtre ; mais puisque câest lâove qui doit poser immĂ©diatement dessus et quâelle doit faire une saillie assez forte en avant de la tige , il Ă©toit nĂ©cessaire dâindiquer que celle saillie devoit ĂȘtre Ă©gale de chaque cĂŽtĂ© , et câest ce que Yitruve a voulu dire par ces mots , in equedem modulant ; et par le mot capitulum, je crois quâil entend la face du chapiteau, parce quâil indique que la saillie de lâove sur la face doit ĂȘtre Ă©gale Ă lâĆil de la volute. AprĂšs avoir parlĂ© des chapiteaux, Yitruve nous donne les proportions des Ă©pystiles ou entablemens. Nous avons vu que les architectes Grecs et Romains , persuadĂ©s que la beautĂ© des Ă©difices dĂ©pen- âdoit sur-tout de la belle harmonie des proportions, mettoient la plus grande importance Ă les observer exactement ; non-coniens de cela , ils ont cherchĂ© Ă obvier Ă la diminution apparente qui rĂ©sulte de lâĂ©loignement des objets ; câest pourquoi ils ont retranchĂ© quelque chose de lâattĂ©nuation des colonnes lorsquâelles Ă©loient trĂšs-Ă©levĂ©es , et ont aussi augmentĂ© alors la grosseur du chapiteau , pour que ces objets paroissent Ă la vue avoir la mĂȘme grosseur quâils auroient sâils nâĂ©loient pas si Ă©levĂ©s. Pour la mĂȘme raison , Ă mesure que les colonnes sont plus hautes , iis augmentent la hauteur de lâarchitrave et des autres parties de lâentablement, puisque câest sur elle quâils les rĂ©gloient toutes , comme nous lâavons vu. Deux causes contribuent Ă ce quâun objet Ă©loignĂ© paroisse plus petit Ă la vue quâil nâest en effet; lâune est le rĂ©trĂ©cissement de lâangle visuel ; lâautre est la masse intermĂ©diaire de lâair , dont le volume augmente Ă mesure de la distance ; sa densitĂ© dĂ©robe alors Ă lâoeil les contours et lâextrĂ©mitĂ© des objets , et les fait par-consĂ©quent paroĂźtre plus petits. Suivant sa coutume , Perrault reprend encore ici Yitruve , et prĂ©tend que la diminution des objets dĂ©pend uniquement de lâangle visuel. Les personnes instruites connoĂźtront aisĂ©ment qui raisonne le mieux , Perrault ou Yitruve ? Lâentablament se compose de trois parties principales ; celle qui pose immĂ©diatement Sur les chapiteaux des colonnes, se nomme en latin Ă©pistyle , composĂ© des mots grecs câest-Ă -dire sur les colonnes. Câest ce quâon nomme maintenant lâarchitrave , mot moitiĂ© grec, moitiĂ© latin. Archi dans la composition des mots grecs signifie ce qui est le premier, le principal. Trabs signifie en latin une poutre , ce qui convient fort bien Ă la piĂšce de bois que reprĂ©sente aujourdâhui lâarchitrave , N et qui se met sur les colonnes , cette piĂšce Ă©tant la premiĂšre et la principale , et celle qui soutient toutes les autres. Yitruve nous dit que la largeur du bas de lâarchitrave doit ĂȘtre Ă©gale au diamĂštre du haut de la colonne , et que sa largeur par en haut doit ĂȘtre, Ă©gale au diamĂštre du bas de la colonne. Je ne LIVRE III, C h a p. ni. i35 i anol^l' ^ 4 iSĂŒs eti > celte I ? n quâla ilĂšs om li&ces j$ uce Ă le appa ,t en $i ĂŒevok irĂ©miiĂ©i tend fin visuel 1 puis comprendre quelle sera la saillie des diverses bandes de lâarchitrave^ lorsque les colonnes auront plus de 5o pieds dâĂ©lĂ©vation ; puisque dâaprĂšs ce que Yilruve a dit tout Ă lâheure , leur grosseur en haut Ă©tant peu diffĂ©rente alors de celle quâelles ont en bas , la partie supĂ©rieure de lâarchitrave sera aussi prĂšsquâĂ©gaĂźe Ă lâinfĂ©rieure , la premiĂšre ne surpassant lâautre que dâune quantitĂ© Ă©gale Ă celle de lâattĂ©nuation de la colonne. Par les mots summum epistylium on doit entendre la partie supĂ©rieure de lâarchitrave, non compris la cymaise, qui doit, avoir la saillie quâil indique immĂ©diatement dans la phrase suivante. LâĂ©largissement du haut de lâarchitrave doit ĂȘtre bien plus considĂ©rable que ne le dit ici Yilruve, Ă©tant dâabord produit par la saillie des parties supĂ©rieures sur les infĂ©rieures, et ensuite par lâinclinaison que doit avoir toute la face de lâentablement , comme nous lâavons vu vers la fin du chapitre , et de quoi nous parlerons tout-Ă -lâheure. Le fronton est la derniĂšre piĂšce de lâĂ©difice ; il reprĂ©sente le pignon du toit. Les anciens ne lâont jamais employĂ© que sur la largeur du bĂątiment, conformĂ©ment Ă lâobjet quâil reprĂ©sente, puisque tous leurs temples Ă©toient terminĂ©s par deux frontons, lâun Ă lâentrĂ©e, lâautre Ă la sortie. Ils se seroient bien gardĂ©s , comme on a fait de nos jours , dâen construire sur la longueur du bĂątiment, parce que le pignon du toit est toujours pris sur la largeur et jamais sur la longueur du bĂątiment. Yilruve nous donne les proportions et la maniĂšre de construire le tympan , ou dedans du fronton , câest-Ă - dire cette partie triangulaire qui se trouve enfermĂ©e par les deux corniches qui sâĂ©lĂšvent des deux cotĂ©s , et forment une pointe Ă leur rĂ©union , et un triangle avec la corniche de lâentablement. Le tympan dans sa plus grande hauteur , câest-Ă -dire depuis la corniche de lâentablement jusquâĂ la pointe , sans y comprendre la corniche qui est au-dessus , doit avoir la neuviĂšme partie de toute la longueur du larmier du frontispice , pris dâune extrĂ©mitĂ© de sa cymaise Ă lâautre, comme il est reprĂ©sentĂ© dans la 3. e fig. de la YIII. Ă planche. Scamozzi a trĂšs-mal interprĂ©tĂ© ce passage; il trouve le fronton dont parle Yitruve , abaissĂ© de trop de la moitiĂ© ; de sorte quâau lieu dâune des neuf parties il voudroit en mettre deux. Cela vient de ce quâil entend que Yitruve parle de la hauteur de tout le fronton y compris la corniche 3 tandis tquâil ne parle que de celle du tympan sans la corniche ; si lâon ajoute lâĂ©paisseur de celle-ci, toute la hauteur du fronton, depuis sa pointe , aura effectivement alors deux des neuf parties de la longueur du larmier. SurM st-Ă -^ latin- iâ lifie 1 farci 1 qui Vitruve est trĂšs-consĂ©quent dans ses principes; il Ă©toit nĂ©cessaire quâil donnĂąt la hauteur du tympan que rien nâindiquoit, câest ce quâil a fait. Quant Ă la corniche , il Ă©toit trĂšs-inutile quâil indiquĂąt sa hauteur , puisque cette corniche est semblable Ă celle de lâentablement dont il a dĂ©jĂ fait connoĂźtre les proportions, sauf quâelle doit avoir une cymaise ou gorge de plus , dont il donne aussi la proportion. Câest donc bien Ă tort que Scamozzi veut corriger ici Yitruve en disant quâil faut lire deux neuviĂšmes au lieu dâun, pour que cette hauteur soit Ă©gale Ă celle du tympan y compris sa corniche. Je sms persuadĂ© que cette cymaise ou gorge, dont Yitruve nous donne les proportions, est celle qui termine le fronton , sur les deux petits cotĂ©s du triangle que forme le frontispice ; il dit que les Grecs les appeloient ĂȘpitĂ©thedes , câest-Ă -dire mises au-dessus et au plus haut. Comme il ne dorme i3G . L â A U ⏠H I T E C T U R E ĂE'YI T R U V E. pas les proportions des cymaises ou gorges posĂ©es horizontalement sur les Ă©nlablemens , telles que celles des cĂŽtĂ©s de lâĂ©difice qui se joignent Ă celle-ci dans les angles , on pourroit croire quâil veut quâon leur donne la mĂȘme hauteur quâĂ celle-ci ; mais je crois plutĂŽt que la hauteur des cymaises latĂ©rales se trouve naturellement rĂ©glĂ©e par celles du frontispice quâil vient dâĂ©tablir. Dans ce cas, il est clair, comme le montre la 5 . e fig. de la XIII. 6 planche, que la cymaise a du frontispice sera toujours plus haute que la cymaise latĂ©rale h 3 parce que la premiĂšre est dĂ©terminĂ©e par lâhypo- thĂ©nuse , et lâautre par le cĂŽtĂ© du triangle qui est toujours plus petit, Ă moins quâon ne veuille unir les cymaises inclinĂ©es avec les horizontales de la maniĂšre marquĂ©e c , qui fait quâelles peuvent avoir, dans ce cas , la mĂȘme hauteur lâune et lâautre ; mais je crois cpiâon nâen trouve aucun exemple dans les monumens antiques qui nous restent. Les acrotĂšres sont de petits piĂ©destaux placĂ©s sur la corniche aux extrĂ©mitĂ©s et au milieu du fronton, ou au-dessus dâautres parties Ă©levĂ©es dâun Ă©difice , comme lâindique leur nom tirĂ© du grec l; Ils servent de base aux statues ; on les a indiquĂ©s par les lettres a a b , dans la fig. 5 de la planche yill, ; voyez aussi les planches V. , VI. , VII. On diroit par les mots tympanum medium , que iVitruve entend quâil faut donner aux acrotĂšres des angles , une hauteur Ă©gale Ă celle de la plus grande hauteur du tympan qui est celle du milieu 5 mais comme cette hauteur seroit disproportionnĂ©e pour les acrotĂšres , il faut entendre le mot medium comme indiquant le milieu entre le summum et Vimum 3 par-consequent la moitiĂ© de la hauteur du tympan. Vitruve veut que toutes les parties qui sont au-dessus des chapiteaux des colonnes , câest-Ă -dire lâentablement et le fronton , soient inclinĂ©s en avant , la douziĂšme partie de leur hauteur parce que des deux lignes qui partent de lâoeil lorsquâon regarde un Ă©difice , celle qui sâĂ©tend vers le haut sera beaucoup plus longue que celle qui louchera le bas , et fera que les objets Ă©levĂ©s paroi- iront renversĂ©s en arriĂ©re. Perrault veut encore donner ici une leçon Ă Vitruve , mais trĂšs-mal Ă propos , suivant sa coutume, La vĂ©ritable raison de ce raccourcissement des choses Ă©levĂ©es a Ă©tĂ©, dit-il, expliquĂ©e ci-devant quand > on a parlĂ© de la diffĂ©rente diminution du haut des colonnes suivant leur diffĂ©rente hauteur, qui est le rĂ©trĂ©cissement de lâangle. Celle que Vitruve rapporte ici , qui est la longueur des lignes, nâest point vraie par ce que , quelques soient les lignes visuelles , tant quâelles feront un mĂȘme » angle ,t elles reprĂ©senteront toujours Ă lâoeil une mĂȘme grandeur ; > ce qui est vrai et Vitruve savoir comme lui , que la longueur plus ou moins grande des lignes visuelles cpii forment un angle, nâapporte aucun changement dans lâinclinaison de lâangle aussi ce nâest pas cela quâil a voulu dite ici ; il entend que quand on regarde un Ă©difice , sur-tout si câest dâun peu prĂšs, les objets qui sont Ă©levĂ©s paroissent renversĂ©s en arriĂšre 2 ; et câest pour obvier en quelque façon Ă ce mauvais effet, quâil veut que tous les membres Ă©levĂ©s soient un peu inclinĂ©s en avant , câest-Ă -dire la douziĂšme 1 d'xpCĂčTiĂźptOV signifie le faĂźte , le sommet, en ge'ne'ral les extrĂ©mitĂ©s dânn objet. 2} "Voici comme sâexprime "Vitruve, Cum steterimus contra frontps , quand on est vis-Ă -vis dâun e'difice ; ab oculo lineĆ duĆ si fuerint eUmaieiigeritimam operis parlent, altĂ©ra summam, quĆsunmam teiigerit longior fict ; des deux lignes qui partent de lâĆil, celle qui s âĂ©teud vers le haut sera beaucoup plus longue que celle qui touchera le bas; ce qui est trĂšs- vrai. Mais on voit quâil ne dit pas ici un seul mot des angles continue en ces termes ita quo longior visas lineĆ in superioremperlent ftf cedit ces parties supĂ©rieures e'tant plus Ă©loigne'es de lâĆil , resupimlt* j fucit speciem , fait que ces membres paroissent renversĂ©s en arriĂšre. ji partie veut,! i eseimi! ĂŒeu ii du greeJ 5 de kj i meik celle lil âąeroit Ăšjr milieu âą mes, t'jj ir liaul l sâ-Ă©lenili Ăźls Ă©tel LIVRE III, G. h AP. in. r i 3 7 partie de leur hauteur, la ligne visuelle Ă©tant, par ce moyen , un peu raccourcie, et la partie supĂ©rieure du frontispice avancĂ©e , ils paroissent moins renversĂ©s en arriĂšre , comme la 5. e fig. de la X. e planche le fait voir. Le dĂ©faut auquel Yilruve veut ici remĂ©dier , nâest donc pas, comme Perrault lâa cru abusivement, que les membres les plus Ă©levĂ©s paroissent plus petits en comparaison des autres , Ă cause de iâĂ©loi- gnement ; chose dont il a dĂ©jĂ parlĂ© plusieurs fois , Ă propos des architraves et de la diminution des colonnes , comme on lâa vu dans ce chapitre et Ă la fin du prĂ©cĂ©dent. Il parle ici dâun inconvĂ©nient tout different , qui est, que les membres Ă©levĂ©s paroissent renversĂ©s lorsquâon les regarde dâen bas trop prĂšs du bĂątiment, ou immĂ©diatement dessous ; on y remĂ©die en les inclinant sur le devant. Non seulement on obvie par-lĂ Ă ce quâils paroissent renversĂ©s, mais en accourcissanl la ligne visuelle, comme on le voit dans la figure que je viens de citer, lâobjet paroĂźt plus grand, et toutes les parties supĂ©rieures Ă©tant inclinĂ©es , les parties saillantes ne cachent pas autant le parties enfoncĂ©es qui sont immĂ©diatement au-dessus dâelles. Yilruve parle ensuite des cannelures des colonnes ; voyez la 3. e fig. de la XI. e planche. Celles dont il est ici question sont propres Ă lâordre ionique et corinthien. Leur creux plus enfoncĂ© forme un demi-cercle ; elles sont sĂ©parĂ©es les unes des autres par des intervalles. Striges en latin, signifie proprement les cannelures , et strias les intervalles. Il dit, dans ce passage , que la largeur des intervalles doit ĂȘtre Ă©gale Ă celle du gonflement ou bien entasi qui forme le ventre de la colonne. A la fin du chapitre prĂ©cĂ©dent, il a dit Ă©galement que le gonflement de la colonne entasi devoit ĂȘtre Ă©gal Ă lâintervalle des cannelures; il annonçoit une figure qui indiquoit cette grandeur; mais comme elle est perdue, nous devons avoir recours aux monumens antiques pour la prĂ©ciser. Yoyez nos remarques Ă la fin du chapitre prĂ©cĂ©dent. aut sa 4 -dire r vwvwaaa \ AA t'vww wvvmmvuU .jltW' Irnot ,,ii wM ,eĂ j^ jsfd Ă ple ^ usa'*" i mot !d^ h 0^ 1 } 4i la ville fie Smyrne prit sa place et fut reçue au nombre des villes ioniennes , par une grĂące particuliĂšre du roi Attalus et de la reine ArsinoĂ©. Ces treize villes , aprĂšs avoir chasse' les Cariens et les LĂ©legues , appelĂšrent ce pays Ionie, Ă cause dâion leur conducteur. Ils y dĂ©signĂšrent des lieux quâils consacrĂšrent aux dieux immortels , et commencĂšrent Ă y bĂątir des temples ; le premier fut celui qu'ils dĂ©diĂšrent Ă Apollon Pano- nien ; ils le construisirent dans le genre de ceux quâils avoient vus en AchaĂŻe, et ils appelĂšrent ce genre dorique, parce quâil y en avait de pareils bĂątis dans les villes des Doriens; mais comme ils ne savoient pas bien quelle proportion il falloit donner aux colonnes quâils vouloient mettre Ă ce temple, ils cherchĂšrent le moyen de les faire assez fortes pour soutenir le faix de lâĂ©difice, et de les rendre en meme temps agrĂ©ables Ă la vue ; pour y parvenir , ils prirent la mesure du pied dâun homme , qui est la sixiĂšme partie de sa hauteur. Câest sur cette proportion quâils formĂšrent leurs colonnes; quelle que fĂ»t la grosseur de la tige , ils la firent six fois aussi haute, en comprenant le chapiteau câest ainsi que la colonne dorique fut la premiĂšre quâon employĂąt dans les Ă©difices , ayant la proportion , la force et la beautĂ© du corps de lâhomme. * Voulant dans la suite Ă©lever un temple Ă Diane , et cherchant, par la meme mĂ©thode , quelque nouvelle maniĂšre qui fut aussi agrĂ©able , ils firent des colonnes qui avoient la dĂ©licatesse du corps dâune femme. Pour qu elles sâĂ©levassent avec plus de grĂące , ils donnĂšrent dâabord Ă leur diamĂštre la huitiĂšme partie de sa hauteur ; ensuite ils y mirent des bases faites en forme de cordes entortillĂ©es , pour imiter la chaussure , et taillĂšrent des volutes au chapiteau pour reprĂ©senter cette partie des cheveux qui pend par boucles Ă droite et Ă gauche ; les cymaises et les guirlandes Ă©toient comme des cheveux arrangĂ©s sur le front des colonnes; outre cela ils firent des cannelures i tout le long du tronc , comme si câeĂ»t Ă©tĂ© les plis dâune robe. Ainsi ils inventĂšrent ces deux genres de colonnes , dont les unes imitoient la simplicitĂ© nue et nĂ©gligĂ©e du corps de l'homme , et les autres la dĂ©licatesse de celui de la femme ornĂ©e de toutes ses parures. Le goĂ»t des architectes qui succĂ©dĂšrent Ă ceux - ci , se perfectionna ; ils prĂ©fĂ©rĂšrent des proportions 2 plus dĂ©licates ; ils donnĂšrent donc Ă la colonne dorique , une hauteur Ă©gale Ă sept de ses diamĂštres , et huit et demi Ă bionique ; ils la nommĂšrent ainsi, parce que les Ioniens lâavoient inventĂ©e. * Planche XII. 1 Voyez les cannelures de la colonne corinthienne , PI. XIIl.âą q u ; son t j es xnĂšmes pour lâordre ionique. * Planche XIII. 2 Jâai rendu ici le mot modulis par celui de proportion , parce que les proportions se mesurent et. se trouvent avec le module. Perrault lâa rendu par le mot module , auquel il ne peut adapter, malgrĂ© ce qu'il dit dans sa note , lâĂ©pithĂšte de graciUoribiis , qui nâa aucun rapport avec le module, ou le diamĂštre de la colonne. 4* LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. * Le troisiĂšme genre que nous appelons lâordre corinthien , imite la beautĂ© dâune fille dans le jeune Ăąge ; il a la dĂ©licatesse de ses membres , et convient bien mieux que tous les autres pour recevoir les ornemens qui peuvent ajouter aux charmes de la nature. Voici lâanecdote Ă laquelle on attribue lâinvention de son chapiteau. Une jeune fille de Corinthe vint Ă mourir au moment oĂč elle alloit se marier ; sa nourrice recueillit dans une corbeille plusieurs petits vases auxquels cette fille avoit Ă©tĂ© attachĂ©e pendant sa vie; pour les metlre Ă fabri des injures du temps et les conserver , elle couvrit la corbeille dâune tuile , et la posa ainsi sur son tombeau. Dans ce lieu se trouvoit, par hasard, la racine dâune plante dâacanthe. Au printemps elle poussa des feuilles et des tiges comme la corbeille Ă©toit au milieu de la racine , elles sâĂ©levĂšrent tout autour. La rencontre des coins de la tuile força leurs extrĂ©mitĂ©s de se recourber , ce qui forma le commencement des volutes. Le sculpteur Callimaque, que les AthĂ©niens appelĂšrent calatechnos i , Ă cause de ses talens et de lâadresse avec laquelle il tailloit le marbre , passant prĂšs de ce tombeau, vit le panier , et remarqua comme il Ă©toit couronnĂ© par ces feuilles naissantes ; cette forme nouvelle lui plut beaucoup ; il limita dans les colonnes quâil fit par la suite Ă Corinthe , et il Ă©tablit, dâaprĂšs ce modĂšle , les proportions et les rĂšgles de lâordre Corinthien. ** Les proportions du chapiteau corinthien doivent ĂȘtre prises de la maniĂšre suivante il faut que le chapiteau avec lâabaque ait autant de hauteur que le bas de la colonne a dâĂ©paisseur ; que la largeur de lâabaque soit telle que la diagonale qui est depuis un de ses angles jusquâĂ lâautre , ait deux fois la hauteur du chapiteau ; cette extension donne la juste mesure aux quatre cĂŽtĂ©s de lâabaque; ensuite la courbure de ces cĂŽtĂ©s en dedans sera la neuviĂšme partie du cĂŽtĂ© Ă prendre de lâextrĂ©mitĂ© dâun des angles Ă lâautre. Le bas du chapiteau sera de mĂȘme largeur que le haut de la colonne sans le congĂ© de lâastragale. LâĂ©paisseur de lâabaque sera de la septiĂšme partie de tout le chapiteau ensuite on divise en trois parties la hauteur du chapiteau, non compris cette Ă©paisseur de lâabaque on en donnera une Ă la feuille dâen bas, une autre Ă la seconde feuille , et le mĂȘme espace restera pour les caulicoles dâoĂč sortent dâautres feuilles qui sâĂ©tendent pour aller soutenir lâabaque. Il faut que des feuilles des cauli- coles , il sorte des volutes qui sâĂ©tendent vers les angles du chapiteau , et quâil y ait encore dâautres volutes plus petites au-dessous de la rose qui est au milieu de la face de lâabaque. Ces roses, quâon met aux quatre cĂŽtĂ©s, seront aussi grandes que lâĂ©paisseur de lâabaque telles sont les proportions que doit avoir le chapiteau corinthien pour ĂȘtre bien fait. * * On met aussi sur ces mĂȘmes colonnes dâautres chapiteaux qui * Planche XIII.âą ** Planche XIII.âą fig. 2 . 1 Câest Ă -dire le premier ouvrier. *** Planche XIII, 8 fig. 3. mi c Si pĂźteau, ; Ăe ^ fit les 1 racine,, ^strĂ©mifĂ© Calliit; de l'if njnoiif rinl ii d'un jjlidi giide de L iontf je ai > [ent dĂŻ jĂȘs dfj ! jet fl e*l n coi* kf L I V R E I V , C h a p. i. 43 ont diffĂ©rens noms ; mais ils ne doivent point faire changer celui des colonnes, puisquâelles ont les mĂȘmes proportions ; si on leur a donnĂ© dâautres noms, câest Ă cause de quelques parties quâon a prises , soit des chapiteaux corinthiens, soit des ioniques, ou des doriques , dont on a assemblĂ© les diffĂ©rentes proportions pour composer plusieurs espĂšces de chapiteaux qui nâont dâautres agrĂ©mens qui les distinguent, si ce nâest celui dâoffrir de nouvelles sculptures. REMARQUES. Lâordre que les Grecs employĂšrent le premier pour leurs temples , fut le dorique , comme lâobserve Vitruve dans ce chapitre ; cet ordre , tel quâils le pratiquĂšrent dans ces anciens temps , nâĂ©toit quâune copie de quelque morceau de lâarchitecture Ă©gyptienne , que les colonies amenĂ©es en GrĂšce par CĂ©crops, leur avoient sans doute fait connoĂźtre. Ses proportions alors nâĂ©toient pas les mĂȘmes que celles quâon lui donna ensuite , elles nâĂ©toient fixĂ©es par aucune rĂšgle. La forme du chapiteau de sa colonne Ă©toit toute diffĂ©rente de celle quâil a aujourdâhui. Il nous reste plusieurs temples de cet ancien dorique , tels que ceux de Pestum } dans le royaume de Naples , celui de Girgenti en Sicile et plusieurs en GrĂšce. On ne peut douter que ce ne soit de cette ancienne architecture que Vitruve veuille parler , quand il dit , dans ce chapitre , que Dorus , fils dâHĂ©lĂšnes , bĂątit un temple Ă Diane , dans la ville dâArgos , et quâon ne connoissoit alors en GrĂšce que lâordre auquel Dorus avoit donnĂ© son nom , câest-Ă -dire lâordre dorique ; il ajoute ensuite , que tous les temples quâon Ă©leva , vers celte Ă©poque ,. dans les autres villes de lâAchaĂŻe , Ă©toient semblables Ă celui dâArgos , quoique leurs vraies proportions nâavoient pas encore Ă©tĂ© fixĂ©es par des rĂšgles certaines. Ce qui se rapporte parfaitement Ă ce que Pline nous dit des premiers temps de lâancienne architecture grecque , et Ă ce que nous font voir les anciens temples dont je viens de parler. On remarque en effet, que le nombre des diamĂštres qui forment la hauteur des colonnes, varie dans ces diffĂ©rens temples. Pline leur donne quatre diamĂštres 1 ; celles du temple de Corinthe nâen ont pas quatre y compris le chapiteau , et celles des temples de Pestum en ont Ă peine cinq. 11 paroĂźt donc dâaprĂšs ces monumens , et dâaprĂšs ce que nous dit Vitruve, quâil nây eut dâautre architecture en GrĂšce que ce dorique massif, jusquâĂ lâĂ©poque oĂč elle envoya des colonies en Asie. Vitruve nous apprend que les habilans de plusieurs de ces villes grecques de lâAsie , voulant Ă©lever un temple Ă Apollon Panonien, le firent dâordre dorique , comme ceux quâils avoient vus dans la GrĂšce. Mais ayant oubliĂ© les proportions quâil falloit donner aux colonnes , par le plus heureux des hazards , ou par la combinaison la plus sage , ils les rĂ©glĂšrent dâaprĂšs ce quâil y a de plus parfait dans la nature j câest-Ă -dire dâaprĂšs celles de lâhomme. La beautĂ© produite par ces proportions rĂ©pandit des grĂąces nouvelles sur tout leur ouvrage ; enhardis par ce premier succĂšs, sans sâĂ©carter du mĂȘme principe , ils cherchĂšrent un nouveau genre de colonnes pour orner le temple quâils Ă©levĂšrent Ă Diane , dans la ville dâEphĂšse. Comme ils avoient donnĂ© aux premiĂšres colonnes 0 Pline, Ilist. Nat. Liv. XXXVI. Cbap. 56. ,44 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. les proportions du corps de lâhomme , ils donnĂšrent Ă celles-ci les proportions du corps de la femme, et inventĂšrent ainsi un nouveau genre de colonne qui, cĂźu nom de leur pays, fut appelĂ© ionique. f On reproche Ă Yitruve de nâavoir rien dit de lâancien dorique, on voit que câest Ă tort, et quâil connoissoit cette ancienne architecture , puisquâil fixe lâĂ©pocjue Ă laquelle on a perfectionnĂ© ses proportions , en donnant Ă la colonne dorique huit de ses diamĂštres. Cette Ă©poque comme nous venons de le voir, fut celle oĂč les colonies grecques sâĂ©tablirent eu Asie. Il fait , Ă 1 ' Ă©gard de cet Ă©tablissement, un anachronisme assez considĂ©rable , quand il dit quâIon fils de Xutus , et petit-fils dâHĂ©lĂšnes , conduisit dans lâAsie mineure la colonie qui construisit le temple de Diane Ă EpliĂšse ; car ce ne fut pas Ion qui les y amena , elles ne sây transportĂšrent que quatre cents ans aprĂšs lui , sous la conduite de NylĂ©e et des autres fils de Codrus , mĂ©cori- lens de leur frĂšre MĂ©don Ă qui la Pythie avoit adjugĂ© le royaume dâAthĂšnes 1. Suivant Yitruve , ce fut pour le temple de Diane Ă EphĂšse que ces colonies grecques , Ă©tablies en Asie , trouvĂšrent le chapiteau ionique , et quâelles inventĂšrent une base pour les colonnes j car, dans les premiers temps, la colonne dorique nâavoit pas de base, comme on le voit encore dans les anciens monumens qui nous restent de cette architecture particuliĂšrement dans les temples de Pestum , de Girgenti et dâAthĂšnes ; et comme le dit lui-mĂȘme Yitruve , les colonnes posoient immĂ©diatement sur un socle ou sur un piĂ©destal , tel quâelles sont reprĂ©sentĂ©es dans la pl. XI. fig. 1 ; câest pourquoi lâauteur latin nous dit que les Ioniens formĂšrent lâordre ionique sur lâordre dorique, eu embellissant celui-ci par lâagrandissement de sa colonne, et sur-tout en ajoutant une base ronde , qui pour cela fut sans doute appelĂ©e spira. MalgrĂ© tout ce que raconte Yitruve des heureuses inventions des Ioniens, il paroit, aprĂšs les derniĂšres dĂ©couvertes quâon vient de faire en Egypte , que les Grecs ont cherchĂ© mal Ă propos Ă sâattribuer ces inventions , puisquâils nâont fait que copier quelque partie de lâarchitecture Ă©gyptienne 2. Mais ils ont eu la sage discrĂ©tion de choisir seulement trois genres de colonnes ; parmi toutes les variĂ©tĂ©s que leur offroient les colonnes Ă©gyptiennes, ils se bornĂšrent Ă ceux-lĂ , et les employĂšrent chacune, suivant la convenance de leurs qualitĂ©s, pour les divers Ă©difices quâils construisirent. Continuons prĂ©sentement Ă parler de lâordre ionique. Le mot encarpi dont Yitruve se sert pour dĂ©signer les festons de fleurs ou de fruits qui ornent la volute ionique , a tourmentĂ© beaucoup tous les interprĂštes ; Philander croit quâil signifie une guirlande de fruits xaptcog en grec veut dire des fruits , il dit quâen Italie ces guirlandes sâappellent des festons. Perrault a rendu ce mot par celui de gousse , croyant que câetoit cet ornement du chapiteau ionique , formĂ© de trois gousses de fĂšves quâon voit sortir de lâangle oĂč la volute rencontre lâove. Yoyez la 3. e fig. de la XI. planche. Lune et 1 autre de ces opinions sont assez plausibles , puisque nous voyons de ces gousses et de semblables festons dans les chapiteaux antiques. Cependant Galiani croit , avec plus de vraisemblance , que encarpi signifie celte vignette cou-* tournĂ©e , formĂ©e de feuilles ou dâautres choses , dont les anciens ornoient le creux ou lâenfoncement 1 Pausanias, Liy. VIL Chap. 1, a , 3 et 4. 2 Voyages de Desnon , explication des Pl. LIX et LX. de LIVRE IV, C h a p. i. de la volute ; il a suivi ce sentiment, parce quâil trouve cette phrase dans le texte ĂȘncarpis prĂ© crinibus , expressions qui ne peuvent sâadapter ni aux gousses , ni aux festons ; si par feston on entend les guirlandes de fleurs et de fruits qui sont attachĂ©es aux yeux des volutes et pendent sur le gorgerin du chapiteau , ce qui nâa aucun rapport avec la chevelure. Yitruve rapporte , dans ce chapitre , lâhistoire intĂ©ressante Ă laquelle nous devons lâorigine de lâordre corinthien. Son chapiteau est un chef-dâĆuvre , et câest sur-tout par cet endroit que lâordre corinthien est sensiblement au-dessus de tous les autres. Il a une grĂące parfaite ; il est de la plus grande richesse ; câest un grand vase rond , couvert dâun tailloir recourbĂ© sur les quatre faces. Le vase est couvert dans le bas , de deux rangs de feuilles dont les courbures ont une mĂ©diocre saillie âŠ, du sein de ces feuilles sortent des tigettes ou caulicoles qui vont former de petites volutes sur les coins du tailloir et sur les quatre milieux. Tout est admirable dans cette composition ce vase qui sert de champ sur lequel les feuilles sont artistement disposĂ©es ; les courbures de ces feuilles dont la saillie va par gradation ; les tigettes qui sâĂ©lĂšvent naturellement , et dont la flexibilitĂ© semble se prĂȘter au dessein de lâouvrier qui les plie en volutes pour donner Ă la saillie du tailloir un appui des plus Ă©lĂ©gans. Il rĂšgne dans tout cet assortiment une douceur , une harmonie , un naturel, une variĂ©tĂ©, une grĂące quâen vain voudrois-je exprimer, et que le goĂ»t seul peut faire sentir. M. de Cordemoi condamne , avec raison , lâusage qui a prĂ©valu parmi nos architectes de prĂ©fĂ©rer pour le chapiteau corinthien , les feuilles de laurier et dâolivier aux feuilles dâacanthe , et de rĂ©server ces derniĂšres pour Je chapiteau composite. Je ne saurois comprendre sur quoi cet usage est fondĂ© , si ce nâest sur un aveugle caprice. La feuille dâacanthe fournit naturellement tous les contours et toutes les courbures qui conviennent aux feuilles du chapiteau corinthien ; celle plante pousse avec ses feuilles des tiges tendres qui donnent trĂšs-naĂŻvement les caulicoles du chapiteau , et dont ces caulicoles , avec les volutes qui les suivent , ont Ă©tĂ© originairement lâexpression. Nous avons vu que la premiĂšre idĂ©e du chapiteau corinthien est due au hazard qui fit dĂ©couvrir au sculpteur Callimaque un vase , autour duquel une plante dâacanthe avoit nĂ©gligemment Ă©levĂ© son feuillage et ses tiges. Pourquoi nous faisons-nous un plaisir de corrompre la plus heureuse idĂ©e qui fut jamais. Les petites feuilles de laurier ou dâolivier ne peuvent que forcĂ©ment se prĂȘter par leur assemblage Ă la composition du chapiteau corinthien. Les substituer aux grandes et larges feuilles dâacanthe , câest quitter le naturel pour courir aprĂšs le frivole $ câest rendre une grande pensĂ©e par une expression foible et puĂ©rile. Vitruve ne dit pas quâil faille Ă©corner les quatre angles de lâabaque de ce chapiteau , comme on le fait ordinairement aujourdâhui , dâoĂč jâai cru quâil parloit ici des abaques terminĂ©s par des angles aigus et en effet nous avons plusieurs exemples des chapiteaux ainsi terminĂ©s dans les monumens antiques , entre autres ceux du temple de Testa Ă Rome. Voyez la 2 . me fig. de la XIll. me planche. Vers la fin de ce chapitre , Yitruve parle des diffĂ©rens chapiteaux quâon avoit coutume de placer sur les colonnes corinthiennes ; les ornemens seuls les distinguent du chapiteau corinthien dâoĂč lâauteur latin conclut, malgrĂ© les divers noms quâon leur donnoit, que cette diffĂ©rence ne suffisoit pas pour former un autre ordre , ce qui me fait croire , malgrĂ© lâopinion de Perrault , que ce n est pas de lâordre que nous avons appelĂ© composite , dont il parle ici $ on ne le connoissoit pas probablement alors. 11 parle donc de ces chapiteaux qui sont semblables et ont toutes les prĂ©parai LâARCHITECTURE DE VITRUVE. lions du chapiteau corinthien , qui nâen diffĂšrent que par la bizarrerie des emblĂšmes dont ils Ă©toient ornĂ©s. CâĂ©toient des symboles qui faisoient allusion Ă la divinitĂ© du temple ou Ă la destination de lâĂ©difice. M. Jean-Baptiste Montano a publiĂ© un recueil considĂ©rable de dessins , qui reprĂ©sentent une infinitĂ© de ces chapiteaux antiques , remarquables par leurs bizarreries. Celui de la 3. me fig. de la XIII. me planche est du nombre ; il reprĂ©sente un des chapiteaux du temple de Jupiter tonnant au Capitole ; on le voit encore Ă Rome aujourdâhui. Dans les uns , ce sont des cornes dâabondance qui tiennent lieu de volutes , câest pour un temple de CĂ©rĂšs 5 dans dâautres ce sont des aigles, câest pour un temple de Jupiter ; pour un temple de Neptune ce sont des tridens qui remplacent les fleurs. Si lâon rĂ©flĂ©chit bien aux paroles du texte , câest de ces chapiteaux dont il parle, et rien de plus. Que diroit prĂ©sentement Vitruve en voyant que non content dâavoir portĂ© le nombre des ordres jusquâĂ cinq, il se trouve, dans ces siĂšcles derniers, des personnes qui cherchent Ă les mu bip Ă lâinfini , osant appeler ordre nouveau , un soi-disant ordre espagnol, qui nâa dâautre distinction quâune tĂȘte de lion au lieu de la fleur ou rose quâon a coutume de sculpter au milieu de lâahaquĂ©; des cornes dâabondance et des globes dans la frise , parce que ce sont des symboles ou des attributs de la monarchie espagnole de mĂȘme un soi-disant ordre françois , parce que dans le chapiteau il sây trouve des palmes , des fleurs de lis et un coq ; nâcst-ce pas lĂ confondre le genre avec lâespĂšce ? > C II A P I T R E I I Des ornemens i des Colonnes. prĂšs avoir fait connoĂźtre lâorigine des diffĂ©rais genres de colonnes , je crois quâil convient de parler de leurs ornemens , et faire voir comment on les a dĂ©couverts. Dans tous les Ă©difices , les parties supĂ©rieures sont faites en charpente; on leur donne diffĂ©rens noms , selon lâusage auquel elles sont destinĂ©es. On nomme poutre , la piĂšce de bois qui se met ou sur les colonnes ou sur les pilastres , ou enfin sur le faĂźte des murs. Les solives et les ais sont pour les planchers. Si lâespace des toits est fort large , on met sous le faĂźtage ** a a , un poinçon, en latin columen e dâoĂč les colonnes ont pris leur nom , des traverses b b et des contre- fiches d d ; mais si lâespace nâest pas considĂ©rable , le seul faĂźtage suffit. Dans tous les toits se trouvent les forces a qui forment une saillie jusquâĂ la gouttiĂšre; 1 Par ornement, Vitruve entend ici lâentablement, * Planche IV.âą fig. 3 . -»t / n âą \ i r» » 1 âą e t on les fait avancer autant quâil faut pour couvrir les murailles. Ainsi chaque chose dans un Ă©difice doit occuper la place qui lui convient dâaprĂšs son usage. Câest pour imiter cet assemblage de plusieurs piĂšces de bois qui composent la charpente des maisons ordinaires , que les architectes ont inventĂ© , pour les temples , la disposition des parties quâils exĂ©cutent en pierre ou en marbre. Dans les temps les plus reculĂ©s , les ouvriers avoient coutume de poser une extrĂ©mitĂ© des poutres sur les murs intĂ©rieurs , et lâautre sur les murs extĂ©rieurs , de maniĂšre qu elles passoient jusquâen dehors. Ils remplissoient de maçonnerie lâespace qui Ă©toit entre chaque poutre , et plaçoient par-dessus , la corniche et les frontispices quâils embellissoient de ce que lâart offre de plus dĂ©licat. Les bouts des poutres qui sor- toient du mur , Ă©toient coupĂ©s Ă plomb , et comme cela sembloit choquer la vue , ils clouoient sur ces bouts des poutres coupĂ©s , de petits ais taillĂ©s de la façon que nous voyons les triglyphes ; ils les couvraient ensuite de cire bleue , pour cacher les coupures qui avoient mauvaise grĂące. Câest de cette maniĂšre de couvrir les bouts des poutres quâest venue la disposition des triglyphes et les intervalles des mĂ©topes , dans les ouvrages doriques. Dans dâautres Ă©difices , quelques-uns ont ensuite laissĂ© sortir, au-dessus des triglyphes , les bouts des forces , et ont contournĂ© la partie qui faisoit saillie , de sorte que comme la disposition des poutres a fait imaginer celle des triglyphes , les saillies des forces ont aussi donnĂ© lieu Ă la disposition des mutules qui soutiennent les corniches ; et assez souvent, dans les ouvrages de pierre et de marbre, ces mutules sont taillĂ©es en penchant, pour reprĂ©senter la pente des forces , qui doivent avoir cette position pour faire Ă©goutter les eaux. On ne peut donc douter que lâidĂ©e des triglyphes et des mutules , dans lâordre dorique , ne soit due Ă ces imitations , et non pas , comme quelques - uns lâont cru mal-Ă -propos , Ă ce que les triglyphes reprĂ©sentent des fenĂȘtres car on met des triglyphes dans les encoignures et sur le milieu des colonnes , lieu oĂč il ne peut y avoir des fenĂȘtres ; parce que sâil y avoit des ouvertures aux angles , ils ne pourroient ĂȘtre liĂ©s avec le reste de lâĂ©difice ; et si , comme on le prĂ©tend, les triglyphes occupent la place oĂč Ă©toient les ouvertures des fenĂȘtres , on pourroit dire par la mĂȘme raison , que les denticules dans lâordre ionique , sont les ouvertures des fenĂȘtres , puisque les espaces qui sont entre les denticules , aussi bien cpie ceux qui sont entre les triglyphes , sâappellent mĂ©topes. Les Grecs appellent opes , lâespace oĂč les poutres sont placĂ©es ; et nous autres, nous 19. 48 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. les appelons colombaria. Câest pour cela quâon appelĂ© mĂ©tope , lâintervalle , qui est entre les deux opes. La cause qui fit imaginer de placer les triglyphes et les mutules dans lâordre dorique , fit aussi placer les denticules dans lâordre ionique ; comme les mutules reprĂ©sentent lâextrĂ©mitĂ© des forces , ainsi, dans l'ordre ionique , les denticules reprĂ©sentent la saillie du bout des chevrons. Câest pourquoi , dans les Ă©difices des Grecs , on nâa jamais mis des denticules sous les mutules , parce que les chevrons ne peuvent pas ĂȘtre sous les forces et câest une grande faute dans l imitation de les placer ainsi sous les forces et sous les pannes, tandis que , dans la vraie construction , ils sont posĂ©s au-dessus. Pour la mĂȘme raison , les anciens nâont jamais approuvĂ© quâon mĂźt des mutules ni des denticules aux frontons. Ils nây vouloient avoir quâune simple corniche , parce que ni les forces ni les chevrons ne peuvent ĂȘtre placĂ©s dans un sens convenable sur les frontons , et leurs extrĂ©mitĂ©s peuvent encore moins y former des saillies ; ces piĂšces de bois doivent ĂȘtre inclinĂ©es sur les deux cĂŽtĂ©s , et avoir leur pente vers les gouttiĂšres. Iis croyoient , avec raison , quâen reprĂ©sentant une chose rĂ©elle , on ne pouvoit sâĂ©carter de la vĂ©ritĂ©. En effet tous leurs ouvrages , mĂȘme dans les plus petits dĂ©tails , sont fondĂ©s sur la nature ; en elle ils ont trouvĂ© toutes les beautĂ©s qui perfectionnent les arts ; ils en ont fait lâapplication et nâont jamais approuvĂ© que ce quâils pouvoient soutenir et expliquer par la raison et dâaprĂšs la vĂ©ritĂ©. C est sur ces rĂšgles quâils Ă©tablirent , dans chaque ordre , les rapports et les proportions qu ils nous ont laissĂ©s. Jâai dĂ©jĂ expliquĂ© ces principes pour lâordre ionique et corinthien , je vais continuer de le faire * en peu de mots, pour lâordre dorique, et parler en mĂȘme-temps de tout ce qui concerne la construction de cet ordre. REMARQUES. Dans ce chapitre et dans plusieurs autres endroits de son ouvrage , Yitruve entend par ornemens des colonnes , lâarchitrave , la frise et la corniche ; en françois , ces trois parties se nomment lâentablement j sâil entendoit la rĂ©alitĂ© de ces objets, on pourroĂźt croire que câest improprement quâil appelle ornement des parties qui sont si essentielles dans les bĂątimens , et pour lesquelles mĂȘme on y place les colonnes quYsont destinĂ©es Ă les soutenir. Puisque par ornement on entend proprement des choses qui sont ajoutĂ©es aux membres essentiels , telles que les sculptures taillĂ©es dans les frises, les moulures des architraves , des corniches , des tailloirs , des bases , etc. ; mais il faut faire attention que ce nâest pas tant de lâobjet mĂȘme dont Yitruve parle ici , que de la reprĂ©sentation quâelles en font , et dans ce sens on peut les appeler des ornemens. La nature , notre modĂšle universel, nous offre deux rĂšgles admirables dont elle ne sâĂ©carte jamais ; 1 une de ne rien faire entrer dâinutile clans la composition des ĂȘtres $ et lâautre , de tout soumettre a la loi d un accord parfait et dâune unitĂ© bien marquĂ©e. Câest Ă lâaide de ces deux LIVRE IV, C h a v. n. 49 rĂšgles quâelle parvient Ă Ă©tablir par-tout un ordre invariable , et le SystĂšme dâune Ă©conomie rigoureuse , au sein dâune intarissable profusion et dâune richesse infinie. Les premiers maĂźtres de lâart , dĂšs les temps les plus reculĂ©s , suivirent celte combinaison de la nature ; ils ne voulurent rien dâinutile dans un Ă©difice ; tout y Ă©toit destinĂ© Ă quelquâobjet ; tout nĂ©anmoins foruioit un accord parfait et un seul ensemble. Nâoublions jamais ces rĂ©gies , et ne nous en Ă©cartons pas ; elles sont les vrais guides de lâarchitecture. Ainsi ce que Yitruve appelle orne- mens , ne sont , comme il le dit lui-mĂȘme , que la reprĂ©sentation des parties les plus essentielles dâun bĂątiment quâon exĂ©cute en pierre ou en marbre , pour reprĂ©senter celles qui sây trouvent naturellement en bois. Tellement donc que les diverses parties de lâentablement reprĂ©sentent le toit ; les modifions , les denticules , les triglyphes et les mutules , reprĂ©sentent les extrĂ©mitĂ©s des diffĂ©rentes piĂšces de charpente. Nous voyons dans ce chapitre que câĂ©toit lâopinion des anciens ; toutes les piĂšces de bois qui composoient la charpente des toits chez les Romains , y sont nommĂ©es ; ce sont les mĂȘmes que lâon emploie encore aujourdâhui en Italie pour le mĂȘme usage , dâoĂč lâon peut conclure que la maniĂšre de couvrir les maisons nâa pas changĂ© dans ce pays. Celte maniĂšre diffĂšre beaucoup de celle employĂ©e en France celle-ci nâa presquâaucun rapport avec lâentablement. Au lieu de fermes qui soutiennent nos toits , les Italiens emploient ce quâils appellent chevalets cavalleto ; mais dans la longueur dâun bĂątiment , ils mettent un bien plus grand nombre de chevalets que nous ne mettons de fermes. On nâemploie pas toujours le mĂȘme nombre de piĂšces debois pour composer celte charpente ; lorsque les toits sont Ă©troits , on en retranche plusieurs. Les chevalets des toits qui sont fort larges se composent des piĂšces suivantes * i.° dâune grande poutre posĂ©e de plat dans le fond , que les latins nomment transtrum les Italiens asticcinola , et nous autres poutre de traverse j 2. 0 de deux poutres qui sâĂ©lĂšvent diagonalement des deux cĂŽtĂ©s , sâunissent en pointe en se rencontrant dans le milieu , et forment un triangle avec la premiĂšre 5 on les nomme caleri en latin , puntoni en italien , et forces en françois ; 3 .° de la piĂšce de bois du milieu qui tombe Ă plomb de celte pointe sur la poutre de traverse ; elle sâappelle columna en latin , monaco en italien , et poinçon en françois 5 4 .° de deux petites piĂšces de bois emmor- taisĂ©es dans le poinçon et les forces ; on les nomme en latin capreoli en italien razze y et en françois contre-fiches. s *- Tous les chevalets qui composent la charpente dâun long toit, sont ensuite unis ensemble par des poutres couchĂ©es de long sur le comble du toit. Ces poutres se nomment en latin columen , en italien cisinello, et en français faĂźtage. Ceci Ă©toit pour les grands toits , si majora spatia sunt y dans les petits toits , si commocla , on nây employoit pas autant de bois. Les chevalets Ă©toient composĂ©s seulement du transtrum et canterii y câest-Ă -dire de la poutre traversiĂšre et des forces, sans poinçon ni contre-fiches. Les autres parties telles que les pannes , les chevrons , les tuiles , etc. 1 , se trouvoient dans tous les toits , si grands et si petits quâils fussent. Cette interprĂ©tation du texte me paroĂźt si naturelle que je ne puis comprendre comment Perrault a pu imaginer que Yitruve , * Planche gg_ 3 fi Les pannes , en latin templa , en italien paradossi. Les chevrons en latin asseres , en italien panconcelli. Les tuiles en latin tegulĆ, en italien tegole. i5o L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. qui Ă©crivoit Ă Rome , ait voulu dĂ©crire , dans ce passage , lâespĂšce, de toit quâon emploie aujourd'hui en France. DâaprĂšs cela je trouve trĂšs-inutile de faire aucuns commentaires sur lâĂ©trange interprĂ©tation quâil a donnĂ©e aux termes latins de cette phrase. Les triglyphes sont placĂ©s Ă lâendroit, oĂč, dans les plus anciens temps, les poutres du plafond intĂ©rieur des temples avanç,oient en dehors, et repassoieni pareillement sur une poutre de bois, laquelle portoit immĂ©diatement sur les colonnes. Suivant toutes les apparences, lâentablement portoit encore, du temps de Pindare , sur des colonnes de bois , ainsi que ce poĂšte semble le faire entendre clairement dans çe quâil appelle son Enigme, i Vitruve dit, daus ce chapitre , quâon clouoit, comme un ornement, des triglyphes sur la partie saillante des poutres; mais ce nâest quâune pure conjecture car, de son temps , il ne subsisteit plus de ces anciens temples , et il ne donne aucune raison de cette espĂšce dâornement. Dans le triglyphe , se trouvent deux rainures , et deux demi-rainures, quâon faisoit Ă lâextrĂ©mitĂ© des poutres, pour en rendre lâaspect plus agrĂ©able , puisquâon les peignoit avec de la cire teinte en bleu , façon de peindre des anciens , dont il sera parlĂ© dans le YIl e . livre. Il semble aussi quâon faisoit } au bout des poutres 3 des entailles , afin de prĂ©venir quâelles ne se fendissent, que lâeau des pluies ne pĂ©nĂ©trĂąt les pores du bois et ne pourrĂźt lâextrĂ©mitĂ© des poutres; rĂ©unie dans ces rainures , elle ne pouvoit y sĂ©journer, elle couloit de suite par-dessous, et sây rĂ«u- nissoit en gouttes. Ce sont ces gouttes que les architectes ont imitĂ©es avec le marbre ; jamais les triglyphes nâont reprĂ©sentĂ© des fenĂȘtres ; si quelques personnes lâont cru , comme le dit Yiiruve, câest quâelles ont confondu les triglyphes avec les mĂ©topes. Ces deux parties composent les frises de lâordre dorique. Les triglyphes , comme nous lâavons dit, reprĂ©sentent les extrĂ©mitĂ©s des poutres et les mĂ©topes lâintervalle qui se trouve entre deux poutres et entre deux triglyphes câest pourquoi Yiiruve appelle ici les mĂ©topes intertignium , et le triglyphe opa , parce que opa signifie en grec, le lit ou la place de la poutre , comme il lâexplique trĂšs-clairement un peu aprĂšs. Lâintervalle entre deux poutres , appelĂ© mĂ©tope , Ă©toit revĂȘtu de maçonnerie, comme le remarque notre architecte Romain ; mais il paroit que , dans les plus anciens temps , cet espace resloit vuide ; ce qui donnoit du jour Ă lâentablement. Câest un passage dâEuripide qui me donne cette idĂ©e car au moment oĂč Oresie et Pylade concertent ensemble sur les moyens dâentrer dans le temple de Diane , en Tauride, pour enlever la statue de cette dĂ©esse , Pylade propose Ă son ami de passer entre les triglyphes , Ă lâendroit oĂč il y a ouverture , ainsi que je crois devoir lâinterprĂ©ter, O'p a Ssy e'/çu TpiyXĂ»Cpccv , ottoi Ă^s[Jmq xaSrtiycti. ' \ 1 âQiyĂźvsiĆ v, Ă©v ravpoiç . qi%. ii 3. j Suivant le vĂ©ritable sens de ce passage, les mĂ©topes des plus anciens temples, dont Euripide nom i donne ici lâidĂ©e , Ă©toient sans doute ouvertes , et offroient par-consĂ©quent le seul chemin quâil y eĂ»t pour entrer dans la nef ou cella de ce temple. On aura sans doute confondu ces ouvertures des j mĂ©topes avec les triglyphes ; câest ce qui a probablement fait croire que ceux-ci reprĂ©sentoient des fenĂȘtres. Voyez la 3. e fig. de la IV. e planche. i Nous ne voyons pas trop clairement quelle Ă©toit lâespĂšce de contour sinuare dont les anciens t erobellissoieut lâextrĂ©mitĂ© des forces; je crois nĂ©anmoins que Yiiruve entend par-lĂ , cette sinuositĂ© i Pyth, 4 , y. 475 et 477. I.I LIVRE IV, C h a p. h. dont le contour agrĂ©able ressemble Ă une gorge droite, comme elle est reprĂ©sentĂ©e planche IV, fig. 5, lettre C. Le denticule dans lâordre ionique reprĂ©sente, comme nous avons vu, lâextrĂ©mitĂ© des cbevrons qui ne peuvent jamais ĂȘtre plaçés sous les forces ; câest pour cela que Vitruve loue les Grecs de ce quâils ne les employaient pas en meme temps que les mutules. Aujourdâhui, tout au contraire, personne nâoseroit en cela suivre lâexemple des Grecs ; parce que parmi les monnmens antiques qui nous sont restĂ©s, il se trouve plusieurs belles corniches qui toutes ont des denticules sous les modilĂźons, tellement que lâusage a prĂ©valu sur la raison il en est de mĂȘme pour celui de placer des modilĂźons et des denticules dans la corniche des frontons , parce que, comme je le crois, ces corniches auroient eu trĂšs-mauvaise grĂące , si elles nâavoient pas ressemblĂ© Ă celles qui formoient le tour du reste de lâĂ©difice. Quâauroit dit Vitruve sâil avoit vu construire des frontons sur la longueur du bĂątiment , comme cela se pratique de nos jours. Puisque le fronton nâest que la reprĂ©sentation du pignon du toit , il doit ĂȘtre placĂ© conformĂ©ment Ă lâobjet quâil reprĂ©sente. Or , le pignon du toit est toujours sur la longueur du bĂątiment. Que nos architectes rĂ©flĂ©chissent un peu sur ce raisonnement , qui est de la plus grande simplicitĂ© , et il ne leur arrivera pas de placer , au milieu dâune longue façade, des frontons postiches qui ne signifient rien. Ils pensent donner plus dâagrĂ©ment en interrompant ainsi lâuniformitĂ© ; mais quâils sachent que dans tous les arts , câest pĂ©cher contre les rĂšgles que de mettre des inutilitĂ©s. Puisque les frontons reprĂ©sentent les toits , ils doivent toujours couvrir la partie la plus Ă©levĂ©e du bĂątiment et ne jamais se trouver dans le milieu de leur hauteur , tel que le chĂ©tif fronton qui est au milieu du frontispice de la basilique du Vatican , au-dessus duquel se trouve un attique. Dans le plan de Michel Ange, le frontispice de cette Ă©glise devoit ĂȘtre le mĂȘme que celui de la rotonde ; cette idĂ©e Ă©toit vraiment digne de ce grand homme; combien ne devons-nous pas regretter quâon ne lâait pas suivie, et que son plan nâait pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© en entier ! Câest encore un grand dĂ©faut de faire des frontons qui ne soient pas triangulaires. Le toit se termine toujours en pointe plus ou moins aigue ; le fronton qui en est la reprĂ©sentation , doit imiter servilement cette forme donc , les frontons ceintrĂ©s sont contre nature donc , Ă plus forte raison , les frontons brisĂ©s sont dĂ©testables , puisquâils annoncent un toit enirâouvert donc , Ă plus forte raison encore, les frontons Ă volute sont de toutes les dĂ©raisons la plus consommĂ©e. PĂčen nâest plus absurde encore que de mettre des frontons les uns au-dessus des autres. Il est vrai quâon remarque au-dessus du portique du PanthĂ©on , les restes dâun fronton qui est inhĂ©rent aux murs de ce temple, et se trouve par-consĂ©quent derriĂšre le portique quâAgrippa y ajouta; mais il est probable que ce sont les restes du frontispice qui Ă©toit avant celui-ci. Dâailleurs si les archU tectes romains ont commis celte faute, ils nâen ont pas moins pĂ©chĂ© contre les rĂšgles, comme nous lavons dĂ©jĂ observĂ©. Les siĂšcles, oĂč ils ont cultivĂ© les arts , Ă©toient dĂ©jĂ loin de ceux oĂč la GrĂšce les avoit vu fleurir dans toute leur puretĂ©. Un fronton en bas suppose un toit, un fronton en haut suppose encore un toit voilĂ donc deux toits lâun sur lâautre. Le portail de Saint Gervais a ce dĂ©faut qui dĂ©grade beaucoup son mĂ©rite. 152 I/ARCHITECTURE DE VITRUVE. Quelque grande que soit la prĂ©vention en faveur de cet Ă©difice , je ne crois pas , aprĂšs la raison que je viens dâen donner, quâaucun homme sensĂ© puisse approuver le double fronton haut et bas que lâon y remarque. Câest bien pire encore quand le fronton se trouve au-dessous de lâentablement. En user de la sorte , câest mettre le toit dans la maison , et le plancher au-dessus du toit. Cependant combien nâen trouve-t-on pas dâexemples l combien de portes, combien de fenĂȘtres surmontĂ©es dâun ridicule fronton ! CHAPITRE III. De l'ordre Dorique . * Quelques architectes, parmi les anciens, crurent que lâordre dorique ne con- venoit pas pour les temples, dâautant quâil a quelque chose dâincommode et dâembarrassant dans ses proportions. Tarchesius et Pytheus Ă©taient de ce sentiment ; lâon dit mĂȘme quâHermogĂšne, aprĂšs avoir dĂ©jĂ prĂ©parĂ© beaucoup de marbres pour Ă©lever Ă Racchus un temple dâordre dorique , il changea de projet , et le fit ionique. Ce nâest pas que lâordre dorique ne soit beau et majestueux ; mais la distribution des triglyphes et des plafonds gĂȘne beaucoup , parce quâil faut nĂ©cessairement que les tri- glyphes se rapportent sur le milieu des colonnes i , et que les mĂ©topes qui sont entre les triglyphes soient aussi longues que larges ; de plus, les triglyphes des colonnes des angles , se placent Ă lâextrĂ©mitĂ© et non sur le milieu des colonnes. Le triglyphe de lâangle ne peut ĂȘtre carrĂ© , mais il faut ajouter Ă sa longueur la moitiĂ© de la largeur dâun triglyphe 2 , ou si lâon veut que les mĂ©topes soient Ă©gales , il faut que le dernier entre-colonnement soit plus Ă©troit que les autres , de la moitiĂ© de la longueur dâun triglyphe. Soit donc quâon Ă©largisse la mĂ©tope , soit quâon Ă©trĂ©cisse lâen- tre-colonnement, il y a toujours du dĂ©faut. YoilĂ pourquoi les anciens ne se sont point servis des proportions de lâordre dorique dans les constructions des temples ; nous les mettons nĂ©anmoins ici dans leur rang, telles que nous les avons apprises de nos maĂźtres , afin que si quelquâun veut sâen servir malgrĂ© les difficultĂ©s , il puisse bĂątir * Planche XI. 1 La largeur du triglyphe est dâun module , celle de la colonne est de deux , par-consĂ©quent , les triglyphes qui doivent correspondre avec le milieu des colonnes , occupent de chaque cĂŽtĂ© de la cathĂšte qui les partage , le quart de la largeur pu du diapaĂštre de la colonne câest ce que signifie les mots contra mĂ©dius telrantes. 2 Ce nâest pas prĂ©cisĂ©ment, la largeur de la moitiĂ© dâun triglyphe. Voyez les remarques Ă la fin de ce chapitre. dei i LIVRE IV, C h a p. ni* ** i53 des temples dâordre dorique dans les justes proportions , et avec toute la perfection dont cet ordre est susceptible. * On doit diviser en vingt-sept parties la face dâun temple dâordre dorique , dans laquelle les colonnes sont placĂ©es, si lâon veut quâelle soit tĂ©trastyle ; et en quarante- deux pour ĂȘtre hexastyle lune de ces parties sera le module que les Grecs appellent emhates i , et ce module Ă©tabli doit rĂ©gler toutes les mesures de la distribution de lâĂ©difice. ** Le diamĂštre des colonnes doit ĂȘtre de deux modules ; la hauteur, de quatorze ; compris le chapiteau , la hauteur du chapiteau dâun module ; la largeur , de deux modules et une sixiĂšme partie. Le chapiteau doit ĂȘtre divisĂ© , selon sa hauteur , en trois parties , dont lâune est pour le plinthe avec sa cymaise , lâautre pour le quart de rond avec les annelets , et la troisiĂšme pour la gorge du. chapiteau. La diminution de la colonne doit ĂȘtre pareille Ă celle de la colonne ionique , telle [qu elle a Ă©tĂ© indiquĂ©e dans le troisiĂšme livre. La hauteur de lâarchitrave, avec sa plate-bande et les gouttes , doit ĂȘtre dâun module ; les gouttes, sous la plate-bande au droit des triglyphes avec la tringle , doivent pendre de la sixiĂšme partie d un module. Le dessous de lâarchitrave sera aussi large que le haut de la colonne sous le gorgerin 2 . Sur l'architrave seront placĂ©s les triglyphes avec leurs mĂ©topes ; ils doivent avoir un module et demi de haut, et un module de large. Lâordre quâon doit suivre , dans la distribution des triglyphes , est de les placer de maniĂšre quâil y en ait sur le milieu des colonnes angulaires, et quâil sâen trouve aussi qui rĂ©pondent au droit des colonnes du milieu; dans les entre-coionnemens, il doit y en avoir deux, et aux entre-colon- nemens du milieu , tant Ă lâentrĂ©e quâĂ la sortie , trois, afin que ces intervalles soient assez larges pour quâon puisse entrer aisĂ©ment dans les temples. *** La largeur des triglyphes doit ĂȘtre divisĂ©e en six parties , dont les cinq sont pour le milieu , laissant deux demi-parties , lâune Ă droite et lâautre Ă gauche dans la partie du milieu , on tracera une rĂšgle que nous appelons fĂ©mur 3, et les Grecs * Planche XI. 10 fig. ÂŁ. 1 Voyez lâexplication de ce mot dans nos remarques sur le 2. me Chapitre du I. er livre. ** Planche XI.âą fig. i. 2 Le texte dit hypotracheĂŒum. Voyez lâexplication de ce naot, page i io. *** Planche XI. me fig. 3 Femuren latin et /xypoçen grec signifient la cuisse dâun homme. On nomme ainsi les trois parties du triglyphe , parce quâelles sont droitescommejxois jambes ou cuisses. 20 ! i54 LâARCHITECTURE DE Y I T R TJ V E mĂȘros. A cĂŽtĂ© de cette rĂšgle , on creusera , Ă droite et Ă gauche , deux canaux enfoncĂ©s selon la came de lâĂ©querre ; de chaque cĂŽtĂ© des canaux il y aura encore un fĂ©mur, et Ă leur cĂŽtĂ© il y aura des demi-canaux tournĂ©s en dehors. Les triglyphes placĂ©s , on fait les mĂ©topes entre les triglyphes ; il faut qu elles soient aussi hautes que longues ; et aux angles , il doit y avoir des demi-mĂ©topes, auxquelles on donne la largeur dâun demi-module. Par ce moyen, toutes les divisions des mĂ©topes, des entre - colonnemens et des plafonds se rapportent, et il ne sây trouve plus dâinconvĂ©nient. Le chapiteau du triglyphe doit avoir de haut, la sixiĂšme partie dâun module. Sur ces chapiteaux on place le larmier; sa saillie doit ĂȘtre dâun demi-module et une sixiĂšme partie de module sa hauteur , y compris la cymaise dorique qui est au-dessous, et lâautre cymaise qui est par-dessus , doit ĂȘtre d un demi-module, et une sixiĂšme partie i. * On partage le plafond de la corniche pour y tracer des especes de chemins droits , au-dessus des triglyphes et des mĂ©topes, ainsi que les gouttes. On dispose les gouttes de maniĂšre quâil sâen trouve six dans la longueur et trois dans la largeur. Un certain espace reste vide; les mĂ©topes Ă©tant plus grandes que les triglyphes , on doit le laisser uni ou y sculpter des foudres. Sous la corniche vers le bord, il faudra tailler un enfoncement en forme de scotie. Les autres membres, comme tympans, cymaises et corniches, sont semblables Ă ceux quâon a dĂ©crits pour lâordre ionique. ** Toutes ces mesures sont pour les ouvrages diastyles si au contraire, on fait un systile, et monotriglyphe, on doit diviser la face du temple en vingt-deux parties, si elle est tĂ©trastyle, ou en trente-deux, si elle est hexastyle, et une de ces parties sera le module avec lequel on mesure tout lâouvrage, comme on lâa dĂ©jĂ dit. Au-dessus de chaque entre-colonnement 2 il y aura seulement deux mĂ©topes et un triglyphe ; depuis le "dernier triglyphe jusquâaux angles , il ne reste que 1 espace d un demi- triglyphe 3. Lâentre-colonnement du milieu, qui est sous la pointe du frontispice, doit avoir lâĂ©tendue nĂ©cessaire pour contenir trois triglyphes et quatre mĂ©topes; par-lĂ l entrĂ©e du temple est beaucoup plus large, et 1 aspect des statues des dieux a aussi plus de majestĂ©. ^ x Voyez les remarques Ă la fin. chaque architrave. Voyez les remarques Ă la fin du * Planche XI." 56 fig. 3. chapitre. ** Planche XLâą" fig. 4-. 3 Ce nâest pas. prĂ©cisĂ©ment la largeur dâun demi- 2 Le texte dit supra singula tpislylia , au-dessus de triglyphe voyez les remarques Ă la fin du chapitre» I LIVRE IV, C h a p. m. WsJ s soient l „\ ons i f! ' trouv- e parti; Ăźdicj Jiquifil "»i,f ^estJ * g* r]les Ivl 3 COP o]âoĂ , 9'fi M ft serai _ issus i ;ljk f i det ii„\ /ta ÂŁ> i ;>. Sur les chapiteaux des triglyphes il faut mettre ,1a corniche qui doit avoir , comme on a dit, une cymaise dorique au-dessous , et une autre cymaise par-dessus ; cette corniche , y compris les cymaises , sera haute dam demi - module et une sixiĂšme partie i. On * tracera aussi sous la corniche , directement sur les triglyphes et les me'topes , des chemins droits , avec des rangĂ©es de gouttes et tous les autres objets qu on a prescrits pour le diastyie. ** Il faut faire vingt cannelures aux colonnes , lesquelles formeront vingt angles , si on veut seulement les avoir Ă pans ; mais si lâon veut que les cannelures soient creusĂ©es , il faudra les faire de la maniĂšre suivante. On tracera un carrĂ© dont le cĂŽtĂ© sera aussi grand que toute la cannelure , et ayant mis le centre du compas au milieu du carrĂ© , on tracera dâun angle de la cannelure Ă lâautre , une ligne courbe qui sera la forme de sa cavitĂ© ; câest ainsi quâon donne Ă la colonne dorique , la cannelure qui lui est particuliĂšre. Le renflement que doit avoir le milieu de la colonne ionique , et que jâai indiquĂ© dans le troisiĂšme livre , se fait Ă©galement Ă celle-ci. Jâai dĂ©crit les proportions des colonnes corinthiennes , doriques et ioniques , et tout ce qui concerne lâextĂ©rieur des temples ; il me reste maintenant Ă montrer de quelle maniĂšre on doit distribuer et ordonner l'intĂ©rieur des Cella ou dedans des temples , ainsi que leurs vestibules. R E M A R Q U E S. Lâordre dorique offre des difficultĂ©s quâon ne rencontre pas dans les autres. Le mĂ©lange alternatif des triglyphes et des mĂ©topes qui dĂ©corent sa frise , en rendent lâexĂ©cution extrĂȘmement gĂȘnante. Les triglyphes doivent toujours avoir la forme dâun carrĂ© long , et les mĂ©topes celle dâun carrĂ© parfait. Un triglyphe doit toujours ĂȘtre placĂ© au-dessus de chaque colonne ; tellement quâon ne sait comment se tirer dâaffaire dans les angles rentrans. On ne peut Ă©viter lâun de ces deux inconvĂ©niens, ou de plier un triglyphe en mutilant les deux mĂ©topes voisines , ou de joindre deux mĂ©topes ensemble sans aucun triglyphe intermĂ©diaire. Jusquâici les ignorans nâont point Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s par ces deux difficultĂ©s , parce quâils nâont point senti les inconvĂ©niens dont je parle. JNous ne manquons pas dâĂ©difices oĂč lâordre dorique est employĂ© ; mais il nâen est aucun oĂč lâon ne trouve ou des trigly- phes pliĂ©s, ou des demi-triglyphes , ou des mĂ©topes mutilĂ©es, ou des mĂ©topes beaucoup plus larges que hautes. Les proportions de lâordre dorique donnĂ©es dans ce chapitre par Vitruve ne conviennent quâaux temples car elles sont toutes diffĂ©rent^ pour les théùtres t comme il nous lâapprend dans le 0 Dans le texte on lit seulement un demi-module. Jâai ajoutĂ© une sixiĂšme partie pour les mĂȘmes raisons qui me lâont fait ajouter plus haut. Voyez nos remarques Ă la fin de ce chapitre. * Planche XI. me fig. 3. ** Planche XI. ,ae fig. 3. i56 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. chapitre du V. me livre. Aliam enim in deorum templis debent hctbere gravitatem y aliam in porticibus et cĆteris operibus subtilitatem. Dans les temples, il ne se renconlroit guĂšre dâangles rentrans , oĂč lâon dut placer des triglyplies ; les quatre angles de lâintĂ©rieur des Cella des temples hypĂšlres pouvoient seuls en avoir , comme on le voit aux temples de Pestum. On nâen mettoit pas en dedans des portiques ; sâil y en avoit eu, c ? Ă©toit manquer Ă la convenance ; puisque les triglyphes reprĂ©sentent lâextrĂ©mitĂ© des forces , iis rie doivent paraĂźtre quâĂ lâextĂ©rieur. Les triglyphes se rencontrant rarement dans les angles rentrans des temples , Vitruve ne nous parle pas ici des inconvĂ©niens qui en rĂ©sultoient ; ils sont nĂ©anmoins bien plus grands que ceux qui rĂ©sultent des triglyphes placĂ©s Ă lâextĂ©rieur contre les angles saillans. LâinconvĂ©nient venoit de lâancien usage qui Ă©toit de placer ces triglyphes non au-dessus des colonnes des coins, mais Ă lâextrĂ©mitĂ© des angles ; usage qui subsistoit probablement encore du temps de Vitruve , mais auquel on avoit dĂ©jĂ commencĂ© Ă remĂ©dier en plaçant ce triglyphe , comme les autres, perpendiculairement au-dessus du milieu de la colonne , et ajoutant au-delĂ une partie de mĂ©tope qui terminoit la frise , comme on le voit un peu plus loin dans ce chapitre. Cette correction a fait disparaĂźtre sans doute le plus grand des inconvĂ©niens , qui dĂ©goutoit les anciens dâemployer lâordre dorique pour les temples. Antoine Labacco , et autres , nous ont conservĂ© des dessins de temples doriques avec les triglyphes placĂ©s sur les coins 5 dans ces dessins, la mĂ©tope voisine de ces triglyphes nâest pas Ă©largie, mais lâentre-colonnemcnt est rĂ©trĂ©ci. Parmi les temples de Pestum qui se sont conservĂ©s prĂšsquâin- tacts jusquâĂ prĂ©sent , on remarque'des triglyphes qui sont Ă©galement placĂ©s Ă lâextrĂ©mitĂ© des angles. Je ne puis comprendre pourquoi, sans aucune nĂ©cessitĂ© , les anciens éßargissoient ainsi la derniĂšre mĂ©tope pour placer , Ă lâextrĂ©mitĂ© de lâangle , le triglyphe , tandis que donnant Ă la mĂ©tope sa vraie grandeur , le triglyphe serait naturellement tombĂ© au milieu de la colonne et pourquoi dâun autre cĂŽtĂ© rĂ©trĂ©cir le dernier entre-colonnement pour placer le triglyphe Ă lâextrĂ©mitĂ© de lâangle, tandis quâil serait prĂ©cisĂ©ment tombĂ© au milieu de la colonne , si lâentre-colonnement avoit eu sa juste grandeur. Le passage oĂč Vitruve veut quâon rĂ©trĂ©cisse le dernier entre-colonnement de la largeur dâun demi triglyphe , ne se trouve pas de meme dans les anciennes Ă©ditions ; au lieu de latitudine , on lit altitudine } ce qui est une faute manifeste de copiste , comme lâa remarquĂ© Philander et tous les autres. Nous nâavons fait aucune difficultĂ© de substituer comme eux le mot latitudine / on ne peut douter que celte correction ne soit juste , parce quâun peu plus haut, en parlant de ceux qui Ă©largissent la derniĂšre mĂ©tope , il dit triglyphi dimidia latitudine ; Ă prĂ©sent il dit que d autres , au lieu de toucher Ă la mĂ©tope, rĂ©trĂ©cissent lâentre - colonnemenl ; il est tout naturel que lâespace de ce rĂ©trĂ©cissement doit ĂȘtre Ă©gal au premier , câest-Ă -dire dimidia triglyphi latitudine. Il faut observer , toutes les fois quâon trouve dans ce chapitre dimidia ou semitriglypho > quâon ne doit pas entendre exactement la moitiĂ© dâun triglyphe , mais un Ă peu prĂšs ; parce que , dans le fait, il manque quelque chose Ă celte grandeur , pour quâelle soit prĂ©cisĂ©ment Ă©gale Ă ua LIVRE IV, C h Ă p. m. 1S7 demi-triglyphe , ce qui vient de lâattĂ©nuation des colonnes , qui varie Ă proportion de leur hauteur , comme il le dit dans le 2 . me chapitre du III. rae livre. Viiruve se sert donc ici de la quantitĂ© la plus approximative pour en indiquer une qui est incertaine. Nous avons dit, dâaprĂšs lâĂ©dition de Philander , que la face des temples doriques , sâils Ă©toient tĂ©trastyles, câest-Ă -dire Ă quatre colonnes, devoit ĂȘtre divisĂ©e en XXVII parties , ou contenir XXVII modules. Dans les Ă©ditions antĂ©rieures Ă la sienne , et dans les manuscrits quâil dit avoir vus , il y en avoit XXVIII ; ce qui ne peut ĂȘtre quâune faute de copiste , comme le prouve le calcul suivant ; qui fait voir clairement que la chose ne peut ĂȘtre autrement que nous ne lâavons dit. Lâentre-co- lonnement du temple dont parle ici Yilruve est le diastyle. Lâentre-colonnement du milieu a trois triglyphes et quatre mĂ©topes de chaque cĂŽtĂ© ; il y a deux entre-colonnemens qui ont chacun deux triglyphes et trois mĂ©topes ; par-consĂ©quent il y a en tout onze triglyphes, dix mĂ©topes et deux demi-mĂ©topes; ceux-ci terminent la frise dans les angles, ce qui fait en tout vingt-sept modules. Yoyez la 4- me hg. de la XI. me planche. tes parties de mĂ©topes qui terminent les deux extrĂ©mitĂ©s de la frise, loin dâĂȘtre des demi-mĂ©topes, comme les nomme Yilruve , nâont pas mĂȘme un demi-module de large , Ă cause de la diminution des colonnes , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ©. Les mĂȘmes Ă©ditions et manuscrits en parlant des temples doriques hexaslyles, disent quâil faut diviser leur face en XLIY parties , au lieu de XLII que nous avons mises depuis la correction de Philander et des autres auteurs. Il est encore aisĂ© de prouver par le calcul , combien celle correction est nĂ©cessaire, et que dans le nombre XL11 se trouve exactement le compte de tous les modules contenus dans la largeur des triglyphes et des mĂ©topes, comme on peut le voir dans la mĂȘme figure. Ce qui prouve encore en faveur de notre opinion , câest que Perrault nous apprend quâil avoit , entre les mains, un manuscrit oĂč. ces deux nombres Ă©toient indiquĂ©s conformĂ©ment Ă notre correction câest- Ă -dire par XXYII et XLII. Comme nous lâavons dĂ©jĂ remarquĂ© dans le 2 .e Chap. du I. er Liv., la proportion des Ă©difices dĂ©pend de la correspondance de mesure que les parties qui le composent ont entrâelles ; elle se connaĂźt et se rĂšgle par le module. Le module est une grandeur quâon prend sur lâun ou lâautre des membres, ordinairement le diamĂštre ou le demi-diamĂštre de la colonne ; jusquâĂ prĂ©sent Yitruve sâest servi du diamĂštre ; mais iĂŻ se sert ici pour lâordre dorique du demi-diamĂštre , et nous venons de voir comment le module dâun triglyphe fait juger de la grandeur dâun temple ainsi quâil lâa dit dans le 2 . e Chap. du I. er Liv. Perrault a cru que les copistes avoient^fait une faute dans lâendroit oĂč le texte dĂźt que la largeur du chapiteau dorique doit ĂȘtre de deux modules et une sixiĂšme partie, latitudo duorum et modulĂ© sextĆ partis. Il a cru que , dans le manuscrit dont on sâĂ©toit servi pour imprimer la premiĂšre fois 1 Yilruve , aprĂšs le mot moduli , il y avoit une S avec un point, qui signifioit, suivant lui , semĂźssis f et,quâon avoit mal-Ă -propos interprĂ©tĂ© par sextĆ partis. Le peu de largeur quâon donne ici au chapiteau lui a sans doute fait supposer cette erreur ; mais il est plus naturel de croire que les propor- 58 L â A 11 C II ITEC T U 1\ E DE V I T R U Y E. {ions quâon employa dâabord du temps de Yitruve, diffĂ©roient de celles que les Romains employĂšrent ensuite , lorsquâils furent plus perfectionnĂ©s dans les arts. Je ne crois donc pas que le texte soit altĂ©rĂ© ici. Dans la i. re fig. de la XL C planche , on voit un chapiteau qui nâa que deux modules et une sixiĂšme partie de large; on ne-peut pas dire cependant que cette grandeur soit si insuffisante, et fasse mauvais effet Ă la vue. La hauteur du chapiteau se divise en trois parties ; la partie supĂ©rieure est pour lâabaque et sa cymaise ; celle du milieu pour lâove et les anneleis. On appelle armelets , annulis y ces petites moulures , qui sont ordinairement trois filets qui ressemblent Ă des anneaux , et nous voyons cependant des monumens antiques et des Ă©difices modernes , oĂč , au lieu de ces trois annelets , on a placĂ© une gorge et un listel ou autres moulures semblables. Triglyphe est un mot grec composĂ© de rpĂżig trois et de y A ĂŽ et combien elles conviennent aux. diffĂ©rons temples , dont il a parlĂ© , ce qui prouve Ă©videmment que les Cella , dont il est ici question , sont celles des temples dont il a parlĂ© dans le livre prĂ©cĂ©dent. ,Par le mot latitudo , jâai entendu la largeur de tout le temple et non celle de la Cella > comme dâautres lâavoient interprĂ©tĂ©; la phrase prouve assez que câest de cette premiĂšre largeur que Vitruve a voulu parler et non de lâautre car en dessinant les plans de ces temples avec leur Cella, il faut naturellement que la Cella seule soit un quart plus longue que la largeur de tout le temple. Nous avons vu au commencement de ce chapitre que la longueur du temple doit ĂȘtre double de sa largeur tellement quâayant assignĂ© Ă la Cella une longueur Ă©gale Ă cette largeur , et un quart en sus , il suit quâelle nâoccupe que cinq huitiĂšmes de la longueur du temple , et quâil en reste trois en sus ces trois parties sont pour le pronaos ou vestibule , ou comme dâautres ont dit, pour traduire plus littĂ©ralement le mot pronaos > pour lâavant-temple. Beaucoup de temples nâavoient quâun seul vestibule qui Ă©toit toujours par devant, dâautres en avoient deux, câest-Ă -dire un par devant et un autre par derriĂšre ; par-consĂ©quent ils avoient aussi alors deux portes. 11 est clair , dâaprĂšs cela, que ne pouvant rien ĂŽter ni ajouter, tant Ă la longueur du temple quâa celle de la Cella j lorsquâil nây avoil quâun vestibule , ce vestibule Ă©toit le double plus long que ceux des temples qui en avoient deux ; parce que le mĂȘme espace restoit toujours , on lâemployoit tout entier par un seul vestibule et dans lâautre cas on le divisoit en deux , une moitiĂ© Ă©toit pour le vestibule de devant et lâautre pour celui de derriĂšre. Nous avons observĂ© dans nos remarques sur le livre prĂ©cĂ©dent, que dans les sept genres de temples dont parle Vitruve , trois seulement nâĂ©toient pas entourĂ©s de colonnes. Ces trois genres sont le temple Ă antes , le prostyle , et lâamphiprostyle ; il ne peut ĂȘtre ici question de ces trois derniers genres dont il a dĂ©jĂ parlĂ© ; il nâest pas question , non plus dâun genre nouveau. Tout prouve donc quâil sâagit uniquement des Cella proprement dites , câest-Ă -dire de la partie fermĂ©e par une muraille qui est au milieu des temples entourĂ©s de colonnes , dĂ©crits dans le troisiĂšme livre. Ce qui a sans doute induit Perrault en erreur, câest que Vitruve se sert de lâexpression cĂ©dĂ©s , lorsquâil dit que quand celte partie a plus de 20 pieds de large , il faut placer deux colonnes entre les antes. Au lieu Ă âĆdes il auroit dĂ» dire Cella. Mais rien nâempĂȘche quâon nâemploie lâexpression dâĆdes en parlant de la Cella. Nous avons vu quâon nommoit les temples Ćcles sacrĆ lorsquâils avoient Ă©tĂ© consacrĂ©s. La Cella Ă©toit vraiment la principale .partie du temple , parce que câĂ©toit lĂ oĂč se trouvoient les statues des dieux ; le reste comme les vestibules et les galeries nâĂ©toient que des accessoires. 4 Câest donc de la Cella quâil est ici question, et non dâune espĂšce particuliĂšre de temple comme lâa cru Perrault. Nous voyons clairement par une phrase du 2 . me chapitre du livre, que Pteroma signifie tout le circuit des portiques qui entourent le temple puisquâil y est employĂ© pour dĂ©signer les genres des temples entourĂ©s de colonnes tels que le pĂ©riptĂšre , le diptĂšre et le pseudodiptĂšre ; et si Ion veut rĂ©flĂ©chir davantage sur les termes de cette phrase ainsi conçue Pteromatos enim ratio 21 . i64 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. et columnarum circum oedem dispositio , etc. On en sera encore convaincu davantage, puisqu e la seconde pĂ©riode , columnarum circa oedem dispositio , explique la premiĂšre pteromatos ratio. MalgrĂ© tout cela , Perrault, qui sâest trompĂ© dĂšs le commencement de ce chapitre , parce quâil n â a pas compris quâil sâagissoit des Cella des temples dĂ©crits dans le III. me livre , a cru quâil Ă©toit ici question dâune espĂšce de temple particuliĂšre qui nâetoit pas entoure de portiques , mais qui avoit un vestibule en avant, formĂ© par deux murailles terminĂ©es par des antes , entre lesquelles se trouvoient les deux colonnes dont parle Vitruve. Comme il nâa point entoure cette nouvelle espĂšce de temple de portiques, et quâil voit cependant que Vitruve se sert ici de 1 expression pteroma , qui signifie , comme nous venons de le voir , le portique pour se tirer d affaire, il prĂ©tend que le mot pteroma signifie les murailles qui ferment les cĂŽtĂ©s du proizaos , et cela en dĂ©pit de Vitruve qui , dans le 7.âą chapitre de ce livre, appelle ces murs humeri ; il ajoute ensuite, quâil ne peut comprendre comment , dans un pareil temple , il peut ĂȘtre question de portique âą il comprend encore moins comment des colonnes peuvent sĂ©parer le vestibule du portique et pour sortir dâembarras , il rend le mot disjungere , par le mot français fermer parce que , dit-il , ce qui sĂ©pare 5 un espace dâavec un autre , peut ĂȘtre dit , le fermer et quâun mur ferme la cour dâane maison > quand il la sĂ©pare dâavec la rue. Ainsi , dit-il , les colonnes sĂ©parent ou ferment le vestibule » avec le dehors du temple ; mais les mots dehors du temple , ajoute-t-il , ne sont pas dans le texte. 11 nâauroil pas trouvĂ© toutes ces difficultĂ©s, sâil avoit appliquĂ©, comme cela devoit ĂȘtre, les paroles du texte de Vitruve dans ce chapitre, aux Cella des temples, entourĂ©s de colonnes dont il a donnĂ© la description dans le III. e Liv. Ce qui prouve encore en faveur de cette assertion , câest que Vitruve indique dans ce chapitre les proportions de la longueur de la Cella , mais quâil ne dit rien de leur largeur, ce qui Ă©toit inutile, parce quâelle occupe lâespace qui est entre les deux ailes des colonnes ou galeries latĂ©rales, largeur quâil a dĂ©terminĂ©e dans le 2. e Ch. du Liv. III. 11 le dit expressĂ©ment en parlant du pseudodiptĂšre a Les murailles, du devant de la Cella , doivent rĂ©pondre , n dit-il, » » aux quatre colonnes du milieu des frontispices , tant devant que derriĂšre, n Les ailes ou galeries occupent donc entiĂšrement les deux cĂŽtĂ©s latĂ©raux du temple ; mais cette galerie ayant une Ă©gale largeur par-tout , et la Cella nâayant de longueur que cinq huitiĂšmes de la longueur de tout le temple , il suit quâil reste un espace quelconque entre cette galerie et lâentrĂ©e de la Cella , qui est plus ou moins grand , suivant le genre et lâespĂšce du temple ; plus la galerie sera large , moins il restera de ces trois huitiĂšmes. Par exemple il en restera moins , Ă proportion , dans un temple simple pĂ©riptĂšre, dont lâentre-colonnement sera de lâespĂšce eustyle je dis Ă proportion, parcs que la longueur du temple Ă©tant le double de sa largeur , plus les entre-colonnemens seront grands, et plus les galeries seront larges , plus le temple sera grand ainsi que la Cella. Mais il nâen est pas moins vrai que , dans le temple pĂ©riptĂšre dont je viens de parler , lâespace sera plus grand Ă proportion entre la Cella et la galerie de devant le temple que dans un temple diptĂšre. En un mot, dans tous les temples, il reste toujours un espace entre la galerie et le devant de la Cella , pour complĂ©ter les trois huitiĂšmes dont je viens de parler ; comme on peut le voir dans tous les plans de temples entourĂ©s de colonnes que jâai fait graver. Câest dans cet espace que se trouve le vestibule ou pronaos dont parle ici Vitruve. Si ce vestibule a plus de 20 pieds de large, Ieiendue Ă©tant trop grande pour faire 1 architrave dune seule piĂšce, il la; fait soutenir par deux colonnes qui h divisent en trois. Les colonnes FF qui se trouvent entre les pilastres DD du temple Ă antes, fig. 1 de la planche V , peuvent en donner une idĂ©e. Ce sont ces deux derniĂšres colonnes dont nous venons de parler , qui sâĂ©levoient , comme on le voit, entre le pronaos et la galerie. Sur la mĂȘme ligne que le centre de ces colonnes , rĂ©gnoit une balustrade de marbre ou de bois qui sĂ©paroit ces 'deux parties ; nous lâavons reprĂ©sentĂ©e dans la 2. e fig. de la YI. e planche ; elles y sont indiquĂ©es GG. DD. Yitruve , toujours constant dans ses principes, saisit encore ici lâoccasion de faire remarquer Ă lâarchitecte , au sujet des colonnes qui sont enfoncĂ©es dans un lieu obscur, que la perspective altĂšre souvent les plus belles proportions ; il a fait une remarque dans le mĂȘme genre , dans le 2 . 6 Chap. du III. livre. Vitruve termine ce chapitre en parlant des espĂšces de maçonnerie que lâon emplovoit dans la construction des murs des Cella. Perrault a trĂšs-mal compris deux endroits de ce passage. Le premier est celui oĂč Yitruve sâexprime en ces termes media coagmenta medii lapides continentes , etc. Il nâest pas difficile de juger , dit Perrault, que Yitruve a mis medii et medios , pour mediocria et mĂ©diocres et moi je ne puis comprendre comment Perrault a pu imaginer cela , tandis quâen laissant Ă ce mot sa signification naturelle qui veut dire le milieu , la phrase est claire comme le jourj le milieu de la pierre supĂ©rieure doit ĂȘtre placĂ©e sur lâassemblage des pierres du rang de dessous, tellement que le joint montant de ces deux pierres soit immĂ©diatement Ă plomb sous le milieu de la premiĂšre , et le joint montant des deux pierres supĂ©rieures perpendiculairement au-dessus. Toutes les pierres doivent ĂȘtre ainsi posĂ©es alternativement dans toute lâĂ©tendue du parement de la muraille. Câest ainsi que Pline parle de cette maçonnerie Liv. XXXYI, Ch. 22 , et son traducteur a rendu le passage tout comme nous. Dans le 3 . Chap. du 2. e Liv. on trouve une expression semblable medii lateres supra coagmenta collocati. Pourquoi Perrault dans cet endroit nâa-t-il pas aussi traduit medii par le mot mĂ©diocres ? Le second est au sujet du mot expressio, qui est sans doute tirĂ© du mot exprimerez deux termes qui appartiennent proprement aux liquides. Dans le q X Chap. du YIII. e Liv. on lit ces mots expri- mantur aquĆ. Jâai donc cru qu âexpressiones signifioit ici ces filets de chaux qui paroissent entre les joints montants et ceux des assises , le mortier comprimĂ© entre les pierres formant naturellement des saillies , dâautant plus que le texte dit circum coagmenta , qui sont les jointures verticales , et cubilia , les jointures horizontales. Si ces filets sont proprement tirĂ©s et bien disposĂ©s , on peut dire avec raison quâils rendent lâaspect de lâĂ©difice tracĂ© dâune maniĂšre plus agrĂ©able. Graphicoteram clelec- tationem graphicotera est tirĂ© du mot grec ypatpstv Ă©crire , dessiner avec des lignes ou le simple trait, autrement dĂ©linĂ©ation. On pourroit donc appliquer lâĂ©pithĂšte clelineata , Ă un bĂątiment dont toutes les pierres auroient offert cet arrangement. Pline qui parle de cette maniĂšre de bĂątir , dans le 22. c Chap. du XXXYI. livre , nous apprend que dans un temple de Cizicum , les joints des pierres Ă©toient couverts de listels dâor. Perrault a cru que le mot expressiones signifioit des pierres taillĂ©es eu bossages Barbaro , avant lui, avoit cru la mĂȘme chose ; mais comme ces paroles du texte circum cubilia ex coagmenta eminentes expressiones, sont absolument opposĂ©es Ă cette interprĂ©tation, il a prĂ©fĂ©rĂ©, suivant son usage , le mutiler et le bouleverser, pour le forcer de signifier ce quâil vouloir , que de chercher Ă dĂ©couvrir le vrai sens ; ainsi il prĂ©tend quâil faut lire circum coagmenta et cubilia depressa. i66 L â A R C H I T E CT U II E DE Y I T R TJ Y E. CHAPITRE V. Quelle position il faut donner aux temples. I l faut, autant quâon peut, placer les temples dans des lieux oĂč la statue du dieu qui sây trouve , regarde le couchant, afin que ceux qui vont sacrifier , soient tournĂ©s vers lâorient et la statue qui est dans le temple ; et quâils puissent, en adressant leurs voeux et leurs priĂšres , voir en mĂȘme-temps le temple et la partie du ciel qui est au levant ; tellement quâau lever du soleil, les statues paroissent avec lui et semblent regarder ceux qui les prient et leur offrent des sacrifices. En un mot, il faut toujours que les autels soient tournĂ©s vers le levant. Si nĂ©anmoins on ne peut le faire commodĂ©ment, alors on leur donne une position dâoĂč lâon puisse voir une grande partie de la ville ; ou si le temple est prĂšs dâun fleuve , comme en Egypte , oĂč ils sont bĂątis sur le bord du ISiil, il faut quâil regarde vers la rive du fleuve. On observe la mĂȘme chose , si on le bĂątit prĂšs clĂ©s grands chemins , car il doit ĂȘtre placĂ© de maniĂšre que les passans puisse le contempler et le saluer en face. C H A P I T R E Y I. Proportions des portes des Temples . _/V van T de faire les portes dâun temple et leurs chambranles , il faut dâabord dĂ©cider de quel genre on veut les avoir car il existe trois sortes de portes , qui sont la dorique , bionique et lâatticurge. * La porte dorique a les proportions suivantes la corniche supĂ©rieure qui est au-dessus de la partie du chambranle qui traverse le haut de la porte , doit ĂȘtre dâalignement avec le haut des chapiteaux des colonnes qui sont au frontispice. * Planche XIâ me fig. 5, LI,VRE IV, ⏠h A p. vi. 1G7 Pour avoir la grandeur du vide de la porte , il faut partager la hauteur du temple , depuis le pave' jusquâau plafond , en trois parties et demie ; on donne deux de ces parties Ă la hauteur de lâouverture de la porte ; on divise ensuite cette hauteur en douze parties pour en donner cinq et demie Ă la largeur du bas de lâouverture ; elle doit se rĂ©trĂ©cir par en haut, et voilĂ la rĂšgle quâon doit suivre Ă cet Ă©gard. Quand lâouverture, depuis le bas jusquâau haut, a moins de seize pieds, on doit rĂ©trĂ©cir de la troisiĂšme partie de la largeur du chambranle ; de la quatriĂšme, quand elle est de seize Ă vingt-cinq; de la huitiĂšme, quand elle est de vingt-cinq Ă trente; et ainsi plus elle sera grande , plus les jambages doivent approcher de la ligne Ă plomb. La largeur de lĂ face du chambranle doit avoir la douziĂšme partie de la hauteur de lâouverture de la porte; on doit Ă©trĂ©cie ce chambranle , par le haut!, de la quatorziĂšme partie de sa largeur. Le chambranle qui traverse sera de la mĂȘme largeur que le haut des jambages il faut faire la cymaise de la sixiĂšme partie du chambranle , et sa saillie doit ĂȘtre Ă©gale Ă sa hauteur. Cette cymaise doit ĂȘtre lesbienne avec un astragale. Sur la cymaise, qui est Ă la partie du chambranle qui traverse, il faut placer I hyperlhyron qui doit avoir la mĂȘme largeur que le chambranle qui traverse ; et Ă cet hyper- thyron, il faut faire une cymaise dorique avec un astragale lesbien, qui aient lâun et lâautre peu de saillie ; enfin il faut poser la corniche plate avec sa cymaise , qui aura autant de saillie que le chambranle dâen haut a de largeur ; celui-ci doit avancer ses extrĂ©mitĂ©s Ă droite et Ă gauche , autant que les pieds du chambranle ; et les cymaises doivent se joindre exactement. Quand on veut faire des portes ioniques, on observe, pour la hauteur du vide, les mĂȘmes proportions que pour les portes doriques ; mais pour en avoir la largeur il faut diviser la hauteur en deux parties et demie, et en donner une et demie Ă la largeur dâen bas ; le rĂ©trĂ©cissement du haut doit se faire comme aux portes doriques la largeur du chambranle sera de la quatorziĂšme partie de la hauteur de lâouverture de la porte ; la cymaise du chambranle sera de la sixiĂšme partie de sa largeur; le reste de cette largeur Ă©tant divisĂ© en douze parties, 011 en donnera trois Ă la premiĂšre face y comprenant son astragale ; quatre Ă la seconde, et cinq Ă la troisiĂšme ces faces, avec leur astragale, rĂ©gneront aux trois cĂŽtĂ©s du chambranle. Lâhyper- tbyron aura les mĂȘmes proportions que celui de la porte dorique. Les consoles appelĂ©es protyrides 1 seront taillĂ©es Ă droite et Ă gauche, et descendront jusquâau bas de la partie du chambranle qui traverse, sans comprendre le feuillage quelles ont au bas. Leur largeur, par le haut, doit avoir la troisiĂšme partie de celle du cham- I tanche XIl. ffie fig. 6. 1 Câest-Ă -dire., les devants de la porte. K/W *68 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. branle , et par le bas , il faut qu elles soient plus Ă©troites d une quatriĂšme partie que par le haut. * Voici prĂ©sentement pour la menuiserie des portes. Il faut que les montans [ 6 ] oĂč sont les gonds, soient forges de la douziĂšme partie de la largeur de tout le vide de la porte ; que les panneaux [8], qui sont entre les montans, aient chacun trois de ces douze parties. On espace les travers de maniĂšre que, divisant toute la hauteur en cinq parties Ă©gales , deux de ces parties seront au-dessus , et trois par-dessous le travers du milieu [ 9 ]. Il y aura dâautres travers tant dans la partie dâen haut que dans celle dâen bas [99]. Le travers du milieu doit ĂȘtre aussi large que le tiers des panneaux [8] ; et sa cymaise, que la sixiĂšme partie de sa largeur. La largeur de chaque montant du milieu ne doit pas surpasser la moitiĂ© 1 de celle des travers. Les feuillures des panneaux [7] auront de large la moitiĂ© de la largeur de ces panneaux, et une sixiĂšme partie en sus enfin les montans qui font le second assemblage 2} contre les chambranles, auront la moitiĂ© du traversant. Quand la porte nâa quâun battant, on ne change rien Ă sa hauteur , . mais ou ajoute Ă sa largeur celle de lâautre battant si câest au contraire une porte brisĂ©e, qui ait quatre parties, câest la hauteur qui devient plus grande Ă proportion de la largeur de ces parties. ** Les portes atiiques se font de la mĂȘme maniĂšre que les doriques; la seule diffĂ©rence consiste dans des plates-bandes quâon fait aux chambranles sous les cymaises ; voici leur mesure. Hors la cymaise 3, on divise le. reste du chambranle en sept parties ; on en donne deux Ă la plate-bande. Ces portes ne sont point non plus ornĂ©es de marqueteries; elles ne sont point aussi Ă deux battans, nâen ayant quâun qui sâouvre en dehors. * Planche XI. mo fig. 5. Planche Xlt. 1 â 6 fig. 6 , et Planche XIIĂ. fig. 6. i Nous avons vu que les montans oĂč sont les gonds, acapi cardinales , doivent occuper la douziĂšme partie de la largeur du vide de la porte. Nous avons encore vu que le travers du milieu devoit ĂȘtre aussi large que ces montans, puisque la largeur de ce travers est' Ă©gale au tiers de celle des panneaux qui contient trois de ces douziĂšmes. Vitruve assigne ici Ă chaque montant du milieu une largeur ' Ă©gale Ă celle de la moitiĂ© du travers qui a la mĂȘme largeur que les montans oĂč sont les gonds. DâoĂč il rĂ©sulte que les battans Ă©tant fermĂ©s, ces deux mon- % tans joints ensemble paroĂźtront de la mĂȘme largeur quâun des montans oĂč sont les gonds. 2 Les portes des temples Ă©toient formĂ©es dâun double assemblage , comme je le ferai voir ; voilĂ pourquoi il y avoit ces autres montans , dont il indique la largeur , qui formoient avec lâĂ©paisseur des autres morx- tans celle de toute la porte. ** Planche e fig. 6. 3 Quoiquâil ne le dise pas , il est clair que cette cymaise doit occuper la sixiĂšme partie de la largeur du chambranle. AprĂšs LIVRE IV, Chap/vi. t% AprĂšs avoir expliquĂ© les maniĂšres de bĂątir les temples , selon 1 ordre dorique , ionique et corinthien , suivant les rĂšgles que jâai trouvĂ©es les plus certaines, je vais traiter de ce qui appartient au toscan , et comme il le faut ordonner. REMARQUES . Les anciens employoient trois sortes de portes pour les temples. Les deux premiĂšres , la porte dorique et la porte ionique correspondoient aux deux ordres de colonnes grecques du mĂȘme nom. On a dit que la porte attique correspondoit avec lâordre corinthien , ce qui nâest pas absolument exact. Lâordre corinthien ne. forme proprement pas un ordre particulier, puisquâil ne diffĂšre de lâordre ionique que par le chapiteau, comme nous lâavons vu dans le i. er Chap. de ce livre. On lui a donnĂ© le nom de chapiteau corinthien , parce quâil a Ă©tĂ© inventĂ© Ă Corinthe , comme on a nommĂ© base attique celle qui a Ă©tĂ© inventĂ©e Ă AthĂšnes. On aura de mĂȘme nommĂ© cette porte, porte attique parce quâelle a Ă©tĂ© inventĂ©e dans celte ville. Il nâexistoit donc que deux ordres de colonnes , et ils avoient chacun leur porte ; câĂ©toit le dorique et lâionique mais lâon employoit quelquefois lâordre ionique ave c le chapiteau corinthien , et dâautres fois avec le chapiteau ionique ; quelquefois avec la base attique et dâautres fois avec la base ionique. â11 en Ă©toit de mĂȘme pour la porte ; on plaçoit quelquefois dans cet ordre la porte attique et dâautres fois la porte ionique. De la porte Dorique. Les portes doriques, un peu plus Ă©troites par le haut que par le bas , telles que les dĂ©crit Vitruve , sont aussi anciennes que lâordre mĂȘme. La fermeture des portes dans quelques temples des plus anciens temps, tels que ceux de Girgenti en Sicile , et de Pesium dans le royaume de Naples , a Ă©tĂ© enlevĂ©e j mais on ne peut douter quâelles nâĂ©toient de ce genre , puisque dans un autre petit temple de Girgenti , auquel les habitans ont donnĂ© le nom de chapelle de Phalaris , et qui est dâune antiquitĂ© aussi haute que les premiers, la porte a cette espĂšce de fermeture. Je crois mĂȘme que cette espĂšce de porte est plus ancienne que lâordre dorique des plus anciens temps, puisquâelle Ă©toit en usage chez les Egyptiens , comme on peut sâen convaincre par la porte quâon voit sur la table Isiaque et sur plusieurs pierres Ă©gyptiennes gravĂ©es. Pococlce , Ă cause de leur forme , les appelle portes pyramidales 1. La soliditĂ© Ă©toit le motif qui leur faisoit donner cette forme ; car le poids et le fardeau de lâĂ©difice ne portent pas seulement sur lâarchitrave de la porte , mais encore sur les deux montans des cĂŽtĂ©s placĂ©s de biais. Quoique cette espĂšce de* porte paroisse avoir Ă©tĂ© , pendant trĂšs long-temps, particuliĂšre aux temples doriques , comme on le diroit en voyant la porte du temple de Cori , faite de celte maniĂšre j quoique ce temple ne soit pas fort ancien , on les a aussi employĂ©es par la suite aux temples corinthiens , tel est celui de Tivoli. Dans des temps plus modernes , on a employĂ© ces portes Ă des ouvrages de fortification et aux chĂąteaux dont les murs vont en talus. Ce rĂ©trĂ©cissement toutefois n est pas bien considĂ©rable ; il ne doit pas passer le tiers de la largeur du chambranle , et nâa 0 Descript. of ihe Tast. t. i, p. 107. 22 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. 170 jamais Ă©tĂ© Ă©gal aux deux tiers de cette largeur, comme Perrault lâa reprĂ©sentĂ© dans toutes les portes de ses planches , soit parce quâil a mal compris le texte , soit parce quâil lâa mal expliquĂ© Ă soa dessinateur. Il les a rĂ©trĂ©cis dâun tiers de chaque cĂŽtĂ© , ce qui fait que toutes les portes doriques de ces planches , ont , on ne peut pas plus mauvaise grĂące. Dans bien dâautres points elles n e sont pas non plus tracĂ©es conformĂ©ment au texte. Jâai choisi pour les miennes, les dessins de Galiani qui a suivi exactement le texte et les y a rendus trĂšs- conformes. La hauteur de lâouverture de la porte dorique se prenoit en partageant en trois parties et demie, lâespace qui se trouve entre le pavĂ© et le plafond du portique. On donnoit deux de ces parties Ă la hauteur de lâouverture de la porte , câest-Ă -dire quâelle avoil quatre septiĂšmes de toute la hauteur jusquâau plafond. Le plafond de lâintĂ©rieur du portique Ă©toit de niveau avec celui formĂ© par la saillie du larmier, au-dessus des mĂ©topes et des triglyphes , dont on a parle dans le 3. me Chap. de ce livre. Vitruve lui donne le mĂȘme nom quâau premier , il lâappelle lacunaria. Ce plafond nâetoit pas toujours plat j il formoit quelquefois une voĂ»te qui sâĂ©levoit au-dessus du niveau des plafonds du larmier. Comme on prenoit alors cette hauteur qui rĂšgle toutes les proportions de la porte depuis le pavĂ© jusquâau faĂźte de la voĂ»te , les proportions des portes doriques varioient entre deux temples dâune mĂȘme grandeur , quand le plafond du vestibule de lâune Ă©toit plat , et lâautre en voĂ»te ; telle est la porte du PanthĂ©on Ă Rome aujourdâhui la Rotonde ; elle a Ă©tĂ© construite suivant les rĂšgles rapportĂ©es dans ce chapitre ; elle nous en offre toutes les proportions rĂ©glĂ©es par la hauteur prise depuis le pavĂ© jusquâau dessous du faĂźte de la voĂ»te du vestibule. La hauteur de lâouverture de la porte dorique nâoccupoit que quatre septiĂšmes de la hauteur jusquâau plafond ; il restoit trois septiĂšmes dont les deux tiers Ă -peu-prĂšs Ă©toient occupĂ©s par le dessus du chambranle., par lâhyperthyron , la cymaise plate et la cymaise supĂ©rieure $ ces parties formoient ensemble ce que nous appelons un dessus de porte 5 celle qui Ă©toit la plus Ă©levĂ©e , que Vitruve nomme la corniche supĂ©rieure , corona summa , devoit ĂȘtre de niveau avec les chapiteaux des colonnes du frontispice. La distance de cette corniche avec le chambranle du haut de la porte paroit exorbitante. On ne peut cependant placer celte corniche autrement que dâalignement avec les chapiteaux premiĂšrement , parce que le texte dit clairement ici Ćque librata sit capitula summis ; secondement , parce que la hauteur de lâhyperthyron de la corniche supĂ©rieure et des autres moulures sont indiquĂ©es par Vitruve , Ă lâexception dâune seule quâil nomme corona plana, corniche pleine ou unie. Cette corniche doit donc occuper elle seule lâespace qui nâest pas occupĂ© par les autres dans la hauteur qui est au-dessus de la porte , ainsi elle offre une grande superficie plate Ă laquelle la nouvelle Ă©pithĂšte de plana que Vitruve emploie celle seule fois en parlant de cymaise , convient Ă merveille , comme on peut le voir dans la fig. 5 de la XI. me planche. Vitruve veut que la saillie de toutes les moulures soit Ă©gale Ă leur hauteur j mais il dit ici que celle de la cymaise plate doit ĂȘtre Ă©gale Ă la hauteur du chambranle du haut de la porte. 11 donne celte autre dimension a la saillie de celle corniche , parce quâil seroit impossible de la faire Ă©gale Ă sa hauteur qui est trop considĂ©rable. Si lâon veut savoir pourquoi cette cymaise est si grande, et pourquoi tout ce dessus de port occupe un si grand espace dans la hauteur de lâĂ©difice , il faut se reporter au temps de la plus ancienne architecture , lorsque la colonne dorique nâaYoit pas cinq diamĂštres de haut , comme celles des LIVRE IV, Cii a p. vi. i 7 i temples de Pestum. La hauteur de l'ouverture de la porte occupoit prohahiement alors , comme du temps de Vitruve , quatre septiĂšmes de la hauteur du temple , prise depuis le pavĂ© jusquâau plafond 5 mais dans ces temples-lĂ , lâarchitrave et la frise , câest-Ă -dire la partie de lâentablement depuis les chapiteaux des colonnes jusquâau plafond ' lacunaria occupoit deux septiĂšmes de cette hauteur , tellement que tout le dessus de porte nâen occupoit alors quâun septiĂšme. On a donnĂ© par la suite sept diamĂštres et demi de hauteur Ă la colonne dorique , et on nâa rien ajoutĂ© Ă la hauteur de lâarchitrave ni de la frise,, de sorte que ces deux parties nâont ensemble quâenviron un diamĂštre et demi de haut , comme elles avoient dans les plus anciens temps. Avec cette diffĂ©rence quâanciennement , la hauteur de la frise et de lâarchitrave occupoit deux septiĂšmes de la hauteur depuis le pavĂ© jusquâau plafond , et quâĂ prĂ©sent ces parties nâen occupent plus quâun et peu de chose en sus , dâoĂč il rĂ©sulte quâil reste un espace bien plus considĂ©rable depuis le haut de la porte jusquâĂ la cymaise supĂ©rieure , qui doit ĂȘtre de niveau avec les chapiteaux des colonnes ; et au lieu dâoccuper un septiĂšme de la hauteur depuis le pavĂ© jusquâau plafond, cet Ăšspsrce en occupe prĂ©sentement prĂšs de deux. La corniche pleine , corona plana > devant occuper tout lâespace qui se trouve depuis la. cymaise de lâhyperthyron jusquâĂ la corniche SupĂ©rieure qui est restĂ©e de niveau avec le haut des chapiteaux des colonnes, sâest trouvĂ©e par-lĂ considĂ©rablement augmentĂ©e. Le dessus de la porte du petit temple de Girgenti qui est de la plus haute antiquitĂ© , offre toutes les proportions que je viens de dĂ©crire 3 la cymaise supĂ©rieure y est dâalignement avec les chapiteaux, mais la cymaise plate nây est guĂšre aussi forte que dans les portes doriques dĂ©crites par Vitruve. Le chambranle devoit aussi sâĂ©trĂ©cir par le haut ; mais seulement de la quatorziĂšme partie de sa largeur ; il Ă©toit bordĂ© dâune cymaise que Vitruve nomme lesbyenne et dâun astragale. Les interprĂštes ne sâaccordent pas pour dĂ©terminer ce que câĂ©toit que cette cymaise lesbyenne. Vitruve, dans ce chapitre , nomme deux sortes de cymaise , la cymaise dorique et la cymaise lesbyenne. Baldi a cru quâelles correspondoient aux deux moulures , nommĂ©es doucine droite et doucine renversĂ©e j mais il ne spĂ©cifie pas laquelle est la lesbyenne. Si je ne me trompe, Vitruve la dĂ©termine ici car autour du chambranle des portes , il ne peut y avoir que des doucines renversĂ©es et jamais de droite il est clair, dâaprĂšs cela, que cymatium lesbium signifie une doucine renversĂ©e , et cymatium doricum une doucine droite. Philander a cru que la doucine dorique acquĂ©roit le nom de lesbyenne, lorsquâon y avoit taillĂ© quelquâornement en sculpture. Celte cymaise ou doucine doit avoir , suivant le texte , la sixiĂšme partie de la largeur du chambranle. Perrault trouve cette largeur insuffisante et prĂ©tend quâau lieu de VI qui se trouve dans lâoriginal, il devroit y avoir III. Cette critique est trĂšs-inconsĂ©quente de sa part , puisque dans ce mĂȘme chapitre en parlant de la cymaise du chambranle de la porte ionique , il convient avec Vitruve que la cymaise ne doit avoir que la sixiĂšme partie de sa largeur. Si la sixiĂšme partie convient a lâune , je ne vois pas pourquoi elle seroit insuffisante pour lâautre , vu lâanalogie de leurs proportions. Comme Galiani , jâai fait aux coins du chambranle de la porte dorique des retours en crosseites ou orillons. On en voit Ă beaucoup de chambranles dans les anciens Ă©difices, entrâautres Ă ceux des feneires du dedans du temple de la Sibylle Ă Tivoli. Cependant je crois que la pĂ©riode de ce chapitre qui termine lâarticle de la porte dorique, a rapport Ă la grande cymaise plate dont il Ă©toit 22 . \ 172 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. question alors, et non au chambranle , comment lâannoncent ces paroles du texte dextera ac sinistra projeclurĆ , sic sunt faciendĂŠ , uti crepidines excurranl et in ungue ipsa cymatia conjungantur. Le mot crepidines signifie le bord infĂ©rieur dâune chose , câest le sens naturel quâon donne Ă ce mot. Tous les grammairiens et les .interprĂštes en conviennent. Je ne sais pourquoi Baldi , le pĂšre dâAquino , et Pbilander ont cru quâil signifioit ici toute autre chose , câest-Ă -dire le chambranle mĂȘme , ou bien la cymaise qui rĂšgne tout autour , au point q ue le pĂšre dâAquino conclut en ces termes imo ut castigatius loquar ipsĆ eminentiĆ , sive pro- jecturĆ quarumcumque partium , crepidines vocantur. Aggetti , sporti. Je crois inutile de rĂ©futer cette opinion. Jâai suivi lâinterprĂ©tation de Galiani , qui entend par ce passage , quâil faut que lâarchitrave du chambranle fasse Ă droite et Ă gauche les petites saillies indiquĂ©es 5 dans la 5â' fig. de la XI. me planche , dâautant plus que ces saillies se trouvent trĂšs-souvent aux portes des plus anciens Ă©difices. Ces saillies doivent avancer autant que les pieds des chambranles. Excurrant extra crepidines. On a vu que les chambranles latĂ©raux ne sont pas posĂ©s dâaplomb , mais un peu inclinĂ©s vers le centre de la porte dâabord Ă cause que lâouverture de la porte est rĂ©trĂ©cie par le haut ; ensuite parce que les chambranles eux-mĂȘmes doivent sâamincir Ă mesure quâils sâĂ©lĂšvent ; tellement que la longueur de lâarchitrave y compris ces accroissemens , projecturĆ fait Ă droite et Ă gauche , doit Ă©galer celle de la partie infĂ©rieure de la porte , depuis lâextrĂ©mitĂ© latĂ©rale dâun des chambranles jusquâĂ lâautre. La cymaise des chambranles Ă cause de ces saillies latĂ©rales de lâarchitrave , devoit former plusieurs contours , en suivant leur bord extĂ©rieur. On ne pouvoit donc les joindre dans les angles, de la maniĂšre ordinaire ; Vitruve pour indiquer la nouvelle espĂšce de jointure dont on doit se servir pour les unir ensemble , emploie les mots ad unguern ; câest pourquoi je ne crois pas quâil les emploie ici comme une expression gĂ©nĂ©rale qui signifie exactitude } perfection comme on le fait ordinairement ; mais je crois quâils ont ici un sens particulier qui signifie lâencastrement qui se fait dans les angles par entaille ou feuillure. * De la porte Ionique. La porte ionique Ă©toit plus large Ă proportion de sa hauteur que la porte dorique. La largeur de la porte dorique contient cinq douziĂšmes et demi de sa hauteur 5 tandis que la largeur de la porte ionique en contient sept et demi, câest-a-dire un et demi de large , sur deux et demi de haut, pour parler comme Vitruve. Nous 11e voyons pas que lâarchitrave , autrement dite la partie supĂ©rieure du chambranle de h porte ionique , devoit avancer ses extrĂ©mitĂ©s Ă droite et Ă gauche , et former des saillies , projecturĆ dextera ac siriistra. Cette espĂšce dâornement ne se trouvoit pas Ă celte porte. Les consoles IL fig. 6. rae , planche XTI. Ă©toient un Ă©quivalent qui les remplaçoit ; elles sont Ă©galement placĂ©es a droite et a gauche de 1 architrave, dextera ac sinistra prĆpendeant. Celle rĂ©flexion prouve beau- â LIVRE IV, C h a p. vi. i 7 3 / coup en faveur de la maniĂšre dont nous avons interprĂ©tĂ© le passage oĂč Vitruve parle de ces saillies formĂ©es par les extrĂ©mitĂ©s de lâarchitrave Ă la porte dorique. Il seroit trop long dâentrer dans tous les dĂ©tails qui concernent la menuiserie des portes anciennes , et de rapporter les diverses opinions des interprĂštes ils sont loin dâĂȘtre dâaccord Ă cet Ă©gard. Les ' personnes qui ne seront pas contentes de la maniĂšre dont nous avons traitĂ© ce sujet , pourront la confronter avec celle des autres , et choisir parmi toutes les interprĂ©tations , celle qui leur plaira davantage. On peut cependant ĂȘtre assurĂ© que mon seul but a Ă©tĂ© de ch e/cher le vrai sens de lâauteur. Dans les figures de Perrault et des autres interprĂštes, on ne retrouve ni les parties ni les mesures qui sont indiquĂ©es dans lâouvrage de Vitruve $ on les retrouvera toutes dans les miennes ; et lâon verra combien ma traduction est exacte, si on se donne la peine de la confronter avec le texte, et dâen suivre les dĂ©tails sur les figures. Pour faciliter cette recherche, jâai placĂ© dans la traduction les renvois qui correspondent Ă chaque partie. â Mon interprĂ©tation diffĂšre principalement des autres , en ce quâau lieu du mot altitudine , jâai substituĂ© celui de latitudine , dans le passage oĂč lâauteur dit , que les montans oĂč sont les gonds, doivent ĂȘtre aussi larges que la douziĂšme partie de toute la largeur du vuide de la porte , 1 tellement que câest sur la largeur et non sur la hauteur que je rĂšgle les proportions de toute la menuiserie des portes. Jâai supposĂ© quâil y avoit infailliblement en cet endroit du texte une faute qui venoit de la simple transposition dâune lettre , ce que jâai corrigĂ© en effet si les proportions de ces portes se rĂ©gloient dâaprĂšs leur hauteur, elles auraient la plus mauvaise grĂące il ne seroit pas mĂȘme possible de les exĂ©cuter de celte maniĂšre. Voyez les dessins des portes qui sont rĂ©glĂ©es sur la hauteur dans lâĂ©dition de Perrault, malgrĂ© les nombreuses corrections quâil a faites Ă la partie du texte qui en traite, oĂč il suppose des fautes Ă lâinfini. Les proportions de ces portes nâont aucune grĂące et elles ne ressemblent en rien aux portes antiques. Au contraire celles que jâai fait graver dans les XI. e , Xll. e et XIII. e planches , offrent les proportions les plus belles ; et si on les confronte avec le texte , on les y trouvera trĂšs-conformes. Je nây ai nĂ©anmoins fait dâautre changement que celui de substituer le mot latitudine , Ă celui Ă âaltitudine. Elles sont dans le vrai *mĂ»t . o antique , comme on peut sâen convaincre en les comparant avec les portes de bronze du PanthĂ©on, aujourdâhui la Rotonde. x Les portes des Grecs , dit M. r de Winkelmau , a ne sâouvroienl pas , comme les nĂŽtres , en dedans , mais en dehors voilĂ pourquoi les personnages des comĂ©dies de Plaute et de TĂ©rence 3 qui veulent sortir des maisons, donnent en dedans un signe Ă la porte ; comme un grand critique 4 nous lâa dĂ©jĂ fait observer car il faut se ressouvenir que les comĂ©dies de ces auteurs romains sont, pour la plus grande partie, imitĂ©es ou traduites du grec. La cause de ce signe quâon donnoit en dedans des maisons , avant dâen sortir , Ă©toit pour avertir ceux , qui , dans la rue , passoient le long des maisons, quâils eussent Ă Ă©viter dâĂȘtre heurtĂ©s par la porte quâon voulait ouvrir. Dans les premiers 1 S en pi cardinales sint ex lalitudine Ăźuminis totius duodecima parte. 4 > 7 ; v. 20. Bauh. 2 , 2 ; v. 56 , etc. 2 Remarques sur lâareh. des anc. p. 56 . iv T ... . . T - t ri n n. ... ». 1 4 Muret, var. iect. Liv. I. Chap. 17. Cons. lurneb. Anvers.â 3 Ampbitr. 1, 2. v. 3 , 4. Art 4, 5 ; Cas. 2 , 1 ; v. i 5 . Cure. IV , Chap. i 5 . * L'ARCHITECTURE DE VI T R U V E. j 74 temps de la rĂ©publique , M. Valerius , frĂšre de Publicola , obtint, comme une marque singuliĂšre dâhonneur , la permission dâouvrir sa porte en dehors , comme celles des Grecs ; et lâon assure i que câĂ©toit la seuls porte a Rome qui fĂ»t faite de cette maniĂšre. On voit cependant sur quelques prnes funĂ©raires de marbre qui sont dans la Villa MattĂ©i 2 et dans la Villa Ludovisi, que la porte qui y marque lâentrĂ©e des Champs-ElysĂ©es, sâouvre en dehors- et dans le Virgile du Vatican, la porte dâun temple y est faite comme celle de la boutique des marchands ou des artisans. Dâailleurs, des portes qui sâouvrent ainsi en dehors, ne peuvent pas ĂȘtre forcĂ©es ni enfoncĂ©es aussi facilement que jes autres ; et comme elles ne prennent point de place dans les maisons, elles y gĂȘnent moins que pelles qui sâouvrent en dedans. On trouve nĂ©anmoins des exemples de portes qui sâouvrent en dedans; il y en a une pareille reprĂ©sentĂ©e sur un des plus beaux bas-reliefs de lâantiquitĂ© qui est dans la Villa Negroni. Ceux qui cherchent Ă Ă©piloguer, prĂ©tendent et soutiennent que les portes de bronze de la Rotonde, pâont pas Ă©tĂ© faites pour ce temple, mais quâon les a enlevĂ©es dâailleurs ; et câest ce que Keyssler pâest laissĂ© persuader aussi , sans dire pourquoi il v a une grille au-dessus de cette porte. Suivant eux, celle grille devroit aller jusquâaux poutres dâen haut. .Les personnes qui ont, sous la main, les peintures dâHerculanum , verront sur le tableau* de la mort de Didon 5 une pareille porte , au haut de laquelle une pareille grille est attachĂ©e. Elle y sert pour donner du jour Ă lâintĂ©rieur de lâedifice, Ap maisons des particuliers, il y avoit , au-dessus de la porte , une plate-forme en saillie que les Italiens appellent ringhiera, et Ă laquelle les François ont donnĂ© le nom de balcon. Cette partie du bĂątiment est appelĂ©e en grec çyĂŽĆtcv 4. Dans quelques temples il y avoit, pendu devant la porte, un Ă©pais rideau, lequel, dans le temple de Diane , Ă .ĂphĂšse , se levoit du bas en haut. 5 Mais dans le temple de Jupiter Ă Elis , on le faisoit descendre du haut en bas. Pendant lâĂ©tĂ© , les portes des maisons Ă©loient fermĂ©es avec du crĂȘpe. 6 Nous remarquerons encore ici que les portes des anciens ne rouloient point sur des gonds ; mais quâelles se mouvoient par le bas dans le seuil , et par le haut dans le linteau , sur ce que nous pommons un pivot de porte , ou crapaudine. Le montant de la porte mobile , placĂ© le plus prĂšs du mur } portoit, Ă ses deux extrĂ©mitĂ©s , une emboxture de bronze , qui y Ă©toit encastre'e , et Ă laquelle Ă©toit appliquĂ©e en dedans une pointe saillante pour lâarrĂȘter et la fixer sur le bois. Cette emboĂźture Ă©toit ordinairement formĂ©e en cylindre; mais on en trouve aussi de carrĂ©es, dâoĂč, naissent, gur chaque cĂŽtĂ© des bandes de fer allongĂ©es, qui sâavancent et qui fortifient, dans toute leur longueur, les planches dont les portes Ă©loient construites ; sur quoi je remarquerai que ces portes extrĂȘmement Ă©paisses Ă©toient intĂ©rieurement creuses. Je crois que ce sont les doubles monlans de ces portes que Vilruve indique par ces mots ; scapi^qui surit ante secundum pagmentum , etc. I/enjboĂźture Ă©toit Ă©tablie, tant par le haut que par le bas , sur une plaque Ă©paisse de bronze, ayant la forme dâun coin , soudĂ©e en plomb , et elle rouloit sur cette plaque , de maniĂšre que , quand lâemboĂźture prĂ©senioit un mamelon, il y avoit dans la plaque un creux ou renfoncement, dans 1 Dionis. Hal. Liv. V. Plut. vit. PuLli, a DĂŻontfaucon , Ant. expliq. t. Y. j». 1 32. ÂŁ 3 Plante » 3 . 4 Moscop. b Pausan. Liv. V. 6 Casaubon , in Yopisç, LIVRE IV, C h a p. y i. lequel ce mamelon rouloit, comme on le voit Ă la porte du PanthĂ©on; et lorsque ce renfoncement se trouvoit dans lâemboĂźture , alors la plaque portoit le mamelon saillant qui sâajustoit exactement dans lâouverture de lâemboĂźture. Cette emboĂźlure avec la plaque se nommoit eardo. On en trouvĂ© quelques-unes dans le cabinet du roi de Naples, Ă Porlici, dont le diamĂštre est dâun palme; ce qui fait juger de la grandeur que dĂ©voient avoir les portes ; leur poids est de vingt , trente , jusquâĂ quarante livres. Cette notice peut Ă©claircir plusieurs passages des anciens auteurs quâon avoit peine Ă entendre , parce quâon sâĂ©toit fait une idĂ©e fausse ou obscure de celte partie des portes. Lorsque les portes des anciens Ă©toient Ă deux battants {bivalvĂŠ , alors chaque battant en particulier Ă©toit ajustĂ© comme je viens de le dire , sur des pivots , ainsi quâon le voit au PanthĂ©on Ă Rome ; mais lorsque les deux baltans pliĂ©s en deux formoient ce que nous nommons une porte brisĂ©e , qui nĂ© tourne que sur un des cĂŽtĂ©s , ils Ă©toient âliĂ©s ensemble , par le moyen de gonds de bronze , avec' pentures , dont les charniĂšres Ă©toient placĂ©es dans lâĂ©paisseur du bois ; et quoiquâapparents , on nĂ©' pouvoit voir les deux mamelons de ces gonds ; ils Ă©toient couverts des deux cĂŽtĂ©s par les battĂąns de la porte. Ces observations sont prouvĂ©es clairement par un gond de cette espĂšce sur les deux cĂŽtĂ©s duquel on voit encore du bois que le temps a pĂ©trifiĂ©. yitruve parle, dans ce chapitre, de ces diverses maniĂšres de partager les portes en un ou plusieurs battans. Les interprĂštes ont rendu diffĂ©remment ce passage. Barbaro, par exemple , prĂ©tend que valvakt signifie une porte brisĂ©e, dont la moitiĂ© se replie sur lâautre , tandis que Ailruve dit absolument le contraire Ă la fin de ce chapitre, en parlant des portes attiques ; ces portes , dit-il, ne sont pas h deux baltans , elles nâen ont quâun. Ipsaque forium ornamerita non fiunt bifora , sed valvata ; et ce quâil dit , en parlant des portes quâil appelle valvatĆ , ne convient quâaux portes qui nâont quâuri battant puisquâil dit , quâil ne faut rien changer Ă la hauteur de leurs montans , de leurs chĂąssis' et de leurs panneaux etc. , qui est la mĂȘme que dans les portes Ă deux battans ; altitudines itd manebunt. Mais ce battant occupant lui seul toute la largeur de lâouverture de la porte , il fauf Ă©largir les chĂąssis et les panneaux , Ă proportion , et agrandir les travers parce quâils occupent lĂ 5 largeur dâune extrĂ©mitĂ© Ă lâautre ; in latitudinem adjiciatur ampliĂčs foris latitudo . La 6, me fig. deâ la XIII. me planche fait voir la chose plus clairement encore. Si on suit le mĂȘme raisonnement , il est aisĂ© dâexpliquer ce qui concerne les portes brisĂ©es quadri foris futura est câest-Ă -dire parlagĂ©e en quatre parties , dont deux battans se pliaient Ăźâun ! sur lâautre Ă droite et les deux autres Ă gauche. Ces portes ont toujours la mĂȘme hauteur ; mais- la largeur Ă©tant partagĂ©e en quatre , la hauteur devient plus grande Ă proportion de la largeur de chaque ballant , qui est diminuĂ©e de la moitiĂ© ; câest dans ce sens que lâauteur sâest servi de eetlĂ© expression altitudo adjiciatur. On ne peut , me paroĂźt-il , lui donner dâautre interprĂ©tation il ne' sâagit ici que de la menuiserie des portes ; partant il ne peut ĂȘtre question dâaugmenter la hauteur' de leur ouverture , comme la plupart des interprĂštes lâont cru. Si câeĂ»t Ă©tĂ© dâailleurs lâintention dĂ©â lâauteur , il falloit nĂ©cessairement quâil indiquĂąt les changemens quâil falloit faire aux proportions di* chambranle , chose dont il ne dit cependant pas un mot. De la porte Attique. Nous ne parlerons pas beaucoup de la porte attique qui diffĂšre , trĂšs-peu des autres. Le i&q$ cerostrota que Yitruve emploie en parlant de la menuiserie de ces portes , a beaucoup tourment , 7 0 L'ARCHITECTURE DE Y I T R U V E. les interprĂštes. Pline emploie le mĂȘme mot , en parlant des ouvrages en marqueterie que lâon faisoit avec la corne de buffle teinte de diffĂ©rentes couleurs i. Barbaro prĂ©tend avoir vu un manuscrit oĂč , au lieu de ce mot , se trouvoil clathratĆ , et il traduit ainsi ce passage on ne met pas de jalousies Ă ces sortes de portes. Mais il avoue que celte traduction ne lui plaĂźt pas , et ĂŒ prĂ©fĂšre conserver le mot cerostrota , quâil interprĂšte aussi par un ouvrage en marqueterie , exĂ©cutĂ© avec des cornes teintes de diverses couleurs. Baldo prĂ©tend quâil faut lire clostrata ou claustrata qui, suivant son idĂ©e, signifierait une porte Ă un seul battant , comme aussi, suivant lui, bifora signifierait une porte qui en aurait deux , et valvata une qui en auroit davantage. Les opinions des autres interprĂštes sont toutes dans le mĂȘme genre , câest-Ă -dire , quâelles nâeclaircissent en rien ce passage ; câest pourquoi je me dispense de les rapporter j ceux qui seront curieux de les connoĂźtre peuvent avoir recours Ă leurs ouvrages. Jâai rendu ce mot par ouvrage en marqueterie , comme Perrault et Barbaro , et dâaprĂšs lâexplication que Pline donne de ce mot. Je suis loin cependant dâassurer que cette interprĂ©tation soit exacte j je mâen suis servi en attendant quâon en trouve une meilleure. Les temples carrĂ©s nâavoient en gĂ©nĂ©ral point de fenĂȘtres et ne recevoient de jour que par la porte , cela pour leur donner un air plus auguste en les Ă©clairant par des lampes. Lucien 2 dit, dâune maniĂšre expresse , que les temples nâĂ©toient Ă©clairĂ©s que par la porte. Quelques temples ronds, tels que le PanthĂ©on Ă Rome , recevoient le jour dâen haut par une ouverture circulaire , laquelle nây a pas Ă©tĂ© percĂ©e par les ChrĂ©tiens, comme le prĂ©tendent quelques Ă©crivains ignorans ; car le contraire est prouvĂ© par le rebord ou Ăźâenchassure curieuse de mĂ©tal quâon y voit encore actuellement, et qui nâest point un ouvrage des temps barbares. Lorsque, sous le pape Urbain YIIJ , on pratiqua un grand cloaque pour lâĂ©coulement des immondices jusquâau Tibre , on trouva Ă quinze palmes au- dessous du pavĂ© intĂ©rieur de la Rotonde , une grande ouverture circulaire pour lâĂ©coulement des eaux qui pouvoient se rassembler dans le temple par lâouverture du comble ; ce temple nâĂ©toit pas le seul qui prenoit ainsi le jour 5 celui de Mercure , que jâai vu dans les ruines de Baya, dont la voĂ»te parfaitement conservĂ©e est absolument semblable Ă celle du PanthĂ©on, reçoit aussi le jour par une ouverture circulaire qui se trouve au sommet, pareille Ă celle du temple de Rome ; il y avoit cependant des temples ronds qui nâavoient pas cette ouverture. 1 Plin. Liv. XI. Chap. 37. nĂ©s, dit le Parthenos , qui subsiste encore en grande partie,'ne reccvoitle domo. p. ig 3 t opp. t. 3 , eĂą. Reilz. Le temple de Minerve Ă ĂthĂš- jour que par les portes. M. Chateaubriant , ItinĂ©raire de Paris , etc. VVVVVtA'VVVVl VVVVVVVVVVVVVVA'VVWW t N CHAPITRE LIVRE IV, ChĂ p. vu. I 77 CHAPITRE VIL Des Temples h la maniĂšre Toscane. * O N divise, en six parties Ă©gales, la longueur de lâespace dans lequel on veut bĂątir un temple Ă la maniĂšre Toscane on donne cinq de ces parties Ă la largeur, ensuite on partage encore toute la longueur en deux , pour employer la partie de derriĂšre aux Cella, et celle de devant pour y placer les colonnes. La largeur doit se diviser en dix parties, dont il faut laisser trois Ă droite, et trois Ă gauche, qui seront pour les petites chapelles , ou pour les ailes , si l'on en fait. Les quatre autres seront pour la nef du milieu. Lâespace qui forme le vestibule devant les Cella, doit ĂȘtre partagĂ© de maniĂšre quâon puisse placer les colonnes des angles d directement vis-Ă -vis des antes qui sont au bout des murs extĂ©rieurs c les deux colonnes du milieu, e qui sont vis-Ă -vis des murs / qui sâĂ©lĂšvent entre lesdites antes et le milieu du temple, se placent de façon quâentre les antes f et ces colonnes de devant {e , il y en ait d autres de chaque cĂŽtĂ© placĂ©es au milieu et dans la mĂȘme direction g . ** La grosseur des colonnes par en bas , doit ĂȘtre la septiĂšme partie de leur hauteur , et cette hauteur doit ĂȘtre la troisiĂšme partie de la largeur du temple. La colonne doit sâĂ©trĂ©cir par le haut, de la quatriĂšme partie de la grosseur quâelle a par le bas. La hauteur des bases doit ĂȘtre Ă©gale Ă la moitiĂ© de la grosseur du bas des colonnes5 elle sont composĂ©es dâun socle circulaire, dont lâĂ©paisseur occupe la moitiĂ© de leur hauteur ; d un tore qui pose dessus avec un listel ; et lâĂ©paisseur de ces deux parties rĂ©unies, Ă©gale celle du socle. La hauteur du chapiteau aura la moitiĂ© de la grosseur de la colonne , et on fera lâabaque aussi large que toute cette grosseur i . La hauteur du chapiteau Ă©tant divisĂ©e en trois , il faut en donner une Ă la plinthe qui lui sert dâabaque, lâautre Ă lâĂ©chine, et la troisiĂšme Ă la gorge, y compris lâastragale et le listel, On mettra , sur les colonnes , des piĂšces de bois jointes ensemble , afin que la hauteur de cet assemblage soit dâun module proportionnĂ© Ă la grandeur de lâouvrage, * Planche VIII. me fig. i. *** Planche X. me fig. i et 2. ** Planche X. m e fig. 1 ]] entend la grosseur du bas de la colonne, 23 LâARCHITECTURE DE Y I T R U V E. 178 et quâĂ©tant ainsi jointes, elles Ă©galent la largeur du haut des colonnes. Cet assemblage fait par le moyen de chevilles et tenons en queue d'hironde , doit laisser , entre chaque piĂšce de bois, un vide large de deux doigts car si elles se touchoient, le dĂ©faut dâair feroit tellement Ă©chauffer le bois quâil se pourriroit bientĂŽt. Sur ces piĂšces de bois et sur les murs de la frise se placent les mutules; leur saillie doit Ă©galer la quatriĂšme partie de la largeur de la colonne, et lâon doit clouer des orne- mens Ă leurs extrĂ©mitĂ©s. Au-dessus sâĂ©lĂšve le fronton avec le reste du frontispice ; celui-ci soutiendra le faĂźtage, les forces et les pannes qui formeront un toit , dont lâĂ©coulement aura sa pente de trois cĂŽtĂ©s. Il existe aussi beaucoup de temples auxquels on donne une forme circulaire. Ceux qui n ont que des colonnes et qui nâont pas de Cella, sâappellent monoptĂšres, et ceux qui en ont, se nomment pĂ©riptĂšres. *** Aux premiers qui nâont point de Cella, il faut que le tribunal et les deux cĂŽtĂ©s des degrĂ©s occupent chacun la troisiĂšme partie du diamĂštre du temple. La hauteur des colonnes au-dessus de leurs piĂ©destaux doit ĂȘtre Ă©gale au diamĂštre du temple pris en dehors. Leur grosseur est la dixiĂšme partie de toute la colonne , y compris la base du chapiteau ; la hauteur de lâarchitrave 1 est de la moitiĂ© du diamĂštre de la colonne ; la frise et la partie qui est au-dessus doivent avoir les proportions prescrites dans le troisiĂšme livre. ** Si le temple est pĂ©riptĂšre, * ** * on construit dâabord deux rangs de degrĂ©s sur lesquels on Ă©lĂšve les piĂ©destaux. Le mur de la Cella doit sâĂ©loigner de ces piĂ©destaux, environ la cinquiĂšme partie de tout le temple , laissant , au milieu , un espace pour la porte. Le diamĂštre de la Cella , non compris lâĂ©paisseur du mur , doit ĂȘtre Ă©gale Ă la hauteur de la colonne, non compris le piĂ©destal. Les colonnes qui sont autour du temple ont Jes mĂȘmes proportions que celles du monoptĂšre. La couverture du milieu du temple doit ĂȘtre proportionnĂ©e de maniĂšre que la coupole ait la hauteur de la moitiĂ© du temple , non compris le fleuron. La grandeur du fleuron qui est sous la pyramide , doit ĂȘtre Ă©gale Ă celle d un des chapiteaux des colonnes ; le reste selon les proportions qui ont Ă©tĂ© prescrites. Il existe encore dâautres espĂšces de temples qui ont, Ă la vĂ©ritĂ© , les mĂȘmes propor- * Planche VIII.âą fig. 4. ** Planche IX;âą e fig. 1. *** Planche lX. me fig. 2, V Je ne crois pas quâil prescrive ici la hauteur dâun demi-diamĂštre pour toutes les colonnes, quelque soit leur hauteur cette proportion est pour celles qui nâont que i 5 pieds de haut , dâaprĂšs ce quâil enseigne dans le 2. m chapitre du lIl\ niB livre. Pour les autres qui ont plus de i 5 pieds, on doit augmenter lâĂ©paisseur de lâarchitrave Ă proportion de la grandeur des colonnes, comme il lâenseigne dans le chapitre citĂ©. **** Planche IX"-. fig. 2. lions que celles que nous avons enseignĂ©es ; mais ils diffĂšrent $ cause de la disposition , comme on le voit au temple de Castor dans le cirque de Flaminius, Ă celui de Vejovis qui est entre les deux bois sacrĂ©s , et Ă celui de Diane chasseresse qui offre une invention bien plus ingĂ©nieuse encore , puisquâil a des colonnes ajoutĂ©es Ă droite et Ă gauche , aux cĂŽtĂ©s du pronaos. Les premiers temples qui furent exĂ©cutĂ©s de la maniĂšre dont est bĂąti le temple de Castor qui est au cirque, sont celui de Minerve dans la forteresse dâAthĂšnes i , et celui de Pallas sur la montagne de Sunium dans lâAltique. Dâailleurs leurs proportions ne diffĂšrent pas des proportions ordinaires du reste des temples puisque leurs Cella sont deux fois aussi longues que larges, et quâon a exactement suivi 2 pour les cĂŽtĂ©s , les mĂȘmes proportions quâon a observĂ©es pour le devant. Il y en a aussi quelques-uns, oĂč lâon a disposĂ© les colonnes Ă la maniĂšre Toscane , quoiquâils soient dâordre corinthien ou ionique car aux temples oĂč les murs sâavancent des deux cĂŽtĂ©s , terminĂ©s par des antes , pour faire un vestibule , on a placĂ© , au lieu de ces antes , deux colonnes , vis-Ă -vis des murs de la Cella , et on a ainsi mĂȘlĂ© la maniĂšre Toscane avec celle des Grecs 3. Dâautres ont Ă©loignĂ© davantage les murs des Cella , en les plaçant dans lâcntre- colonnement des ailes ; et ajoutant lâĂ©paisseur du mur qui a Ă©tĂ© ĂŽtĂ© , ils ont Ă©largi considĂ©rablement le dedans du temple ; du reste ils ont conservĂ© les mĂȘmes rapports et proportions. Il paroĂźt quâon pourroit donner Ă ce nouveau genre de figure quâils ont inventĂ©, le nom de pseudopĂ©riptĂšre 4. On a introduit ces cliangemens pour la 1 Les ruines de ce temple existent encore. On en voit une belle description dans lâitinĂ©raire de Paris Ă JĂ©rusalem, par M. r de Chateaubriand. 2 La signification du mot exisona , qui se trouve ici dans le texte , est ignorĂ© des grammairiens ; il paroit formĂ© du grec ĂŻ. vu. X 83 Sculpteur PolyclĂšte , el que Pausanias acheva ; on lux avoil donnĂ© le nom cle Tholus , Ă cause de ses voĂ»tes le troisiĂšme de ces Ă©difices se trouvoit Ă Sparte , et câĂ©toit dans ce temple quâĂ©toient placĂ©es les statues de Jupiter et de TĂ©nus.' 1 Le quatriĂšme Ă©loit Ă Elis. 2. Le cinquiĂšme Ă ManlinĂ©e 3 ; il sâappeloit le commun foyer E tria ; il y avoil aussi, dans dâautres endroits, des Ă©difices qui porioient le mĂȘme nom , tel que celui de Rhodes 4 , et celui de Cannus 5 dans la Carie. Enfin le sixiĂšme Ă©loit le trĂ©sor de Mynias Ă OrchomĂšne 6 ; mais quoique sur les pierres gravĂ©es, oĂč le corps dâHector est traĂźnĂ© autour des murs de Troie , on voie des temples ronds , ce nâest pas une raison pour en conclure que ces temples avoient cette forme. Sur le vaisseau dâune grandeur extraordinaire que PtolomĂ©e Philopator, roi dâEgypte, fit construire, il y avoil un temple rond , consacrĂ© Ă VĂ©nus 7 ; et lâon sait que sur les vaisseaux des anciens ^ 8 il y avoit des tours rondes avec des toits en voĂ»tes, ou des coupoles, ainsi que des tours carrĂ©es dâune forte maçonnerie g. Lâancien architecte San Gallo , dans son livre de dessins sur vĂ©lin , qui est dans la bibliothĂšque du palais Barberin , parle dâun temple rond de Delphes consacrĂ© Ă Apollon. On ne peut pas assurer que le temple que PĂ©riclĂšs 10 fit construire Ă Eleusis , ait eu une forme circulaire ; mais quand il auroil Ă©tĂ© dâune forme carrĂ©e , il n est pas moins certain quâil Ă©loit couronnĂ© par une coupole , et une espĂšce de lanterne. On voit cette lanterne et une coupole sur le tambour dâun temple carrĂ© , reprĂ©sentĂ© sur le plus grand sarcophage quâon ait conservĂ© de lâantiquitĂ© , qui se trouve Ă Rome dans la Villa Moirani, prĂšs de la porte de S. SĂ©bastien. Le tambour ou dĂŽme nâest donc point dâune invention moderne. Les temples ronds Ă©toient plus communs chez les Romains que chez les Grecs quelques-uns dĂ©voient cette forme Ă un motif allĂ©- gorique, tel que le temple de Testa 11, bĂąti par Romulusj comme celui de ManlinĂ©e semble avoir dĂ» le sien au foyer du feu. Un temple circulaire de la Thrace } dĂ©diĂ© au soleil , avoit pour objet le symbole du disque de cet astre. 12 â Les temples ronds sâappeloient monoplĂšres, lorsque le toit Ă©toit posĂ© sur les colonnes, sans avoir de muraille qui formoit lâenceinte dâune Cella dans le milieu on les nommoit pĂ©riptĂšre, lorsquâils avoient cette Cella. Nous avons vu que le mot nTEpĂčv signifioit lâaile dâun oiseau , et que, par analogie, on a aussi donnĂ© ce nom aux rangs de colonnes qui enlouroient les temples , parce que sâĂ©tendant sur les cĂŽtĂ©s , ils Ă©toient comme les ailes de lâĂ©difice 5 la Cella , ou intĂ©rieur du temple en Ă©toit comme le corps ainsi le mot monoplĂšre signifie un temple, qui a seulement les ailes sans avoir Je corps , parce quâil lui manque celte enceinte de murs qui forme la Cella et non parce que lâon suppose que ce temple nâa quâune seule aile ou un rang de colonnes, qui tourne tout autour ces temples sâappefient pĂ©riptĂšre, et on se servoit de la mĂȘme expression , pour dĂ©signer les temples ronds, 1 Id. Liv. II. 7 Athen. Deipnos, Liv. V. ' 2 Id. Lit. V. 8 Descjdpt. des pierres grave'es du cab. de Stosch, , par Winkelman 3 ld. Liv. VIII. 9 4 Exempt. Polib. Liv. XXVIII. 10 Plutarch. vit. Pe'ricl. 5 Appian. Mithridat. 11 Festus. V. Jtolunda Ćdes. 5 Pausan, , Liv. IX. n Macrob. Saturn. Lib. I,* r Chap. 18. r \ I/ARCHITECTURE DE YITRUVE. comme ĂŻes temples quadrangulaires ; ce quâon voit dans le i. er Chap. du III. e Liv. JJept signifie autour, ainsi pĂ©ripiĂšre signifie entourĂ© dâailes. Le temple de Testa Ă Rome et celui de la Sybille Ă Tivoli, Ă©toient des pĂ©riptĂšres ronds. Dans un temple monoptĂšre , la plus grande partie du plan intĂ©rieur Ă©toit remplie par les degrĂ©s, puisquâils occupoient tout autour une portion de rayon Ă©gale au tiers du diamĂštre. Dans le centre, au-dessus de tous ces degrĂ©s , sâĂ©levoit une petite plate-forme , que Vilruve appelle le tribunal ; il occupoit le tiers du diamĂštre du plan du temple , tandis que les degrĂ©s de chaque cĂŽtĂ© occupoient les deux autres tiers. La fi gure du temple fait clairement voir que le tribunal ne pouvoit ĂȘtre autre chose que cette plate-forme , et lâexpression de sur diamĂštre dont Yitruve se sert ensuite , a persuadĂ© Ă M. de Galiani , que lâescalier Ă©toit compris dans le diamĂštre mĂȘme du temple , câest-Ă -dire en-dedans des colonnes, comme on le voit dans la i. re fig. de la IX. me plane., et non-en dehors, comme on ? le voit dans la figure que Perrault en a donnĂ©e. Jâai dit dans ma traduction que la hauteur des colonnes , non compris celle des stylobates , devoit ĂȘtre Ă©galĂ© Ă la grandeur du diamĂštre du temple pris en dehors dâaprĂšs la signification des mots ab extremis. Perrault rend tout autrement ce passage ; il prend , en dedans des colonnes , ce diamĂštre , qui sert de mesure Ă leur hauteur ; et dans celle hauteur il comprend aussi celle des j piĂ©destaux. Si câeĂ»t Ă©tĂ© cependant lĂ lâintention de lâauteur, il nâauroit pas dit insuper stylobatis, J puais cum stylobatis. Ce quâil dit ensuite prouve encore davantage que nous avons bien saisi son f intention. Le diamĂštre de la colonne doit ĂȘtre , dit-il, la dixiĂšme partie de sa hauteur, y compris sa base et son chapiteau , altitudinis suce cum capitulis et spiris decimce partis sans parler du â piĂ©destal quâil nâentend donc pas comprendre dans la hauteur quâil assigne Ă la colonne. Perrault trouve encore que dix diamĂštres seroient trop pour la hauteur des colonnes , et quâau lieu de decimce , il devroit y avoir nonce , parce que dans les proportions assignĂ©es dans le i. er Chap, de ce livre , Ă la colonne corinthienne , on lui donne neuf diamĂštres de haut il suppose que dans les premiers manuscrits, le nombre Ă©toit marquĂ© en chiffres romains IX, et que lâI , qui Ă©toit devant X, auroit Ă©tĂ© elfacĂ©. JNe seroit-il pas bien Ă©trange, dit-il, que les colonnes des monoptĂšres fussent moins massives que celles des autres temples qui ont des murailles qui aident les colonnes j Ă soutenir le toit ? celles-ci peuvent raisonnablement ĂȘtre plus grĂȘles que celles des monoptĂšres qui f portent toutes seules la coupole qui sert de couverture au temple cependant comme Galiani lâobserve trĂšs-judicieusement Ă cet Ă©gard , il arrive trop frĂ©quemment Ă Yitruve dâaltĂ©rer les proportions particuliĂšres quâil assigne Ă chaque ordre , afin dĂš suivre les proportions gĂ©nĂ©rales de quelque Ă©di- \ fice , pour quâon puisse croire que le texte soit ici altĂ©rĂ©. Les temples ronds pĂ©riptĂšres, et les temples monoptĂšres, avoient une couverture qui leur Ă©toit particuliĂšre câĂ©toit une espĂšce de coupole formĂ©e par une voĂ»te sphĂ©rique , que Yitruve nomme tholus. Celte espĂšce de couverture , Ă©toit trĂšs-ancienne chez les Grecs , puisquâil paroĂźt que c etojt .celle du trĂ©sor de Mynias Ă OrchomĂšne , bĂąti par Trophonius et AgamĂšde 1. HomĂšre parle aussi dâune espĂšce de bĂątiment nommĂ© tholus 2 , lorsquâil dit que TĂ©lĂ©maque fit sortir, hors du palais r Trophonius et AgamĂšde e'toiept fils dâErginus un des Argonautes. a Odysse'e, Liv. XXII. dâUlysse LIVRE IV, Ch a p. vu. i85 dâUlysse , les femmes qui avoient manquĂ© au respect et Ă la fidĂ©litĂ© qu'elles dĂ©voient Ă Ulysse , et quâil les enferma entre le tholus et le mur de la cour, Les scholies sur HomĂšre quâon attribue Ă Didyme dâAlexandrie , remarquent , Ă ce sujet , que le tholus Ă©toit un petit bĂątiment rond qui Ă©toit dans la basse-cour, et dont le toit Ă©toit terminĂ© par une pyramide. On y enfermoit tous les ustensiles du mĂ©nage , tout ce qui servoit Ă la cuisine et au buffet. Nous avons aussi vu quâĂ AthĂšnes on ĂŻiommoit tholus , 1 lâĂ©difice oĂč les Prytanes sâassembloient. CâĂ©toit une espĂšce de rotonde qui fut ainsi nommĂ©e Ă cause de sa figure, du mot grec SoKia qui signifie une espĂšce de chapeau. Il ne nous reste aucun exemple dâancien temple morioptĂšre il en existe plusieurs , Ă la vĂ©ritĂ© , de pĂ©rip- tĂšre ; tels que le temple de Vesta Ă Rome , aujourdâhui de S. te Marie du Soleil, qui est vis-Ă -vis de lâĂ©glise de S. te Marie in Cosmedin, celui de la Sibylle Ă Tivoli, et autres dans dilfĂ©rens endroits mais ils sont dĂ©truits , au point quâil ne reste plus rien de la coupole j ainsi on ne peut dĂ©couvrir ce que câest que la fleur et la pyramide dont parle Vilruve ainsi dans les deux figures de la IX. m * planche , nous les avons tracĂ©s comme nous'avons pu dâaprĂšs le texte. AprĂšs avoir parlĂ© des temples rĂ©guliers , Vilruve dit quelque chose de ceux pour lesquels on nâa pas suivi ces rĂšgles , ou dont on sâest Ă©cartĂ© en quelque chose , soit en y ajoutant ou diminuant. Palladio , Serlio , Montano et autres, ont conservĂ© , dans leurs dessins, les plans de plusieurs temples antiques dont les formes singuliĂšres ne ressemblent pas Ă celles dĂ©crites par notre auteur. i Pauaan., Lir. I.* r Cbap. 5. WVVW IWW\ WWWWWA'WVWVWW 4 ĂŻ86 LâARCHITECTURE DE YITRUVE. CHAPITRE VIII. Comment les Autels des 'Dieux doivent ĂȘtre placĂ©s. Les autels doivent ĂȘtre tourne's vers l'orient ; mais il faut les Ă©lever moins haut que les statues des dieux qui sont dans les temples, afin que , selon la qualitĂ© de chaque divinitĂ© , elles soient plus ou moins au-dessus de ceux qui leur font des priĂšres ou des sacrifices. Ces diffĂ©rentes hauteurs se combinent de la maniĂšre suivante les autels de Jupiter et des autres dieux du ciel doivent ĂȘtre trĂšs-Ă©levĂ©s. Au contraire ceux de Vesta , des dieux de la terre et de la mer doivent ĂȘtre fort bas. Ces mĂȘmes principes rĂšglent aussi la forme et la situation des autels quâon place dans lintĂ©rieur des temples. J'ai expliquĂ© dans ce livre la maniĂšre dont on devait construire les Ă©difices sacrĂ©s dans le suivant, je traiterai de la distribution des Ă©difices publics. REMARQUES. On sait que les autels des anciens varioient dans leur hauteur ; ceux des divinitĂ©s cĂ©lestes Ă©toient les plus Ă©levĂ©s j on les appeloit spĂ©cialement altaria 1. Ceux des divinitĂ©s terrestres Ă©toient trĂšs- bas et sâappeloient arĆ ; et Ton creusoit des fosses pour sacrifier aux dieux infernaux 2. i Yirgil. Eclog. 65. etibid. Serrius. 2 Ovid. MĂ©tam. Liy. VII, v. a43. LâARCHITECTURE D E V I T R U y E. LIVRE CINQUIĂME. INTRODUCTION. Les ouvrages un peu considĂ©rables , sâils sont bien Ă©crits et sâils contiennent de bons principes , attirent presque toujours une grande rĂ©putation Ă leur auteur. Jâau- rois peut-ĂȘtre pu prĂ©tendre Ă cette gloire ! Les connoissances que jâai acquises par mes longues Ă©tudes , me fournissoient assez de matiĂšres pour augmenter ce traitĂ© la chose n'est cependant pas aussi aisĂ©e pour moi quâon pourroit le croire ; car , faire un traitĂ© dâarchitecture, Ă©crire une histoire et composer un poĂ«me , sont des choses bien diffĂ©rentes. Lâhistoire intĂ©resse par elle-mĂȘme ; elle amuse le lecteur , puisquâelle lâentretient toujours dans lâattente de nouveaux Ă©vĂ©nemens. Dans un poĂšme la mesure et la cadence des vers , les ornemens dâun langage particulier Ă la poĂ©sie, les entretiens des diffĂ©rentes personnes que bon y introduit , remplissent lâesprit dune douce sensation dont on ne se lasse pas , quelque long que soit lâouvrage. Il nâen est r de mĂȘme dâun traitĂ© dâarchitecture ; les termes dont on est obligĂ© de se servir , sont, pour la plupart, si peu connus , et si Ă©loignĂ©s de lâusage ordinaire, quâil est impossible de donner Ă son style toute la clartĂ© quâon __1 âą âą 1 âą . T 1 r , ' âą V C I aesireroit cie sorte longs que celui qui voudroit expliquer des prĂ©ceptes , dĂ©jĂ fort vagues , par raisonnemens , hĂ©rissĂ©s de termes tirĂ©s dâune langue Ă©trangĂšre , ne produir de oit souvent que de la confusion dans lâesprit des lecteurs , qui demandent dans ces sortes de matiĂšres peu de mots et beaucoup de clartĂ©. 24. i88 Introduction. Lors donc que je devrai me servir de termes peu connus pour expliquer les mesures des Ă©difices , je serai le plus bref quâil me sera possible , pour ne point trop gĂȘner lâesprit de ceux qui Ă©tudient cette science , ' et pour quâils les retiennent plus aisĂ©ment. Je sens dâailleurs , combien les affaires publiques et particuliĂšres occupent tout le monde en cette ville ; ce qui me persuade plus encore , que le style concis est le seul qui convienne Ă mon ouvrage , si je veux quâon le lise et quâon puisse en saisir les idĂ©es , dans les intervalles de loisir. G est pour la mĂȘme raison que Pythagore et ses partisans se servirent des quantitĂ©s cubiques pour enseigner leurs principes. Ils rĂ©duisirent les vers qui contiennent toute leur doctrine Ă deux cents seize , qui est un nombre cubique , et chaque sentence Ă©toit contenue dans trois vers. Le cube est un corps composĂ© de six faces , qui font un carrĂ© par leur Ă©gale largeur ; lorsque le cube est jetĂ© , si on nây touche plus , il demeure immobile sur le cĂŽtĂ© quâil sâest arrĂȘtĂ© , comme font les dĂ©s jetĂ©s par des joueurs. Il paroit qu ils ont saisi cette similitude qui se trouve entre ce nombre de vers et la figure cubique; celui-ci sâarrĂȘtant toujours sur un cĂŽtĂ© , et ceux-ci offrant continuellement des repos qui impriment chaque pensĂ©e dans la mĂ©moire. Les poĂštes comiques Grecs , pour procurer aux acteurs quelques repos aprĂšs de longs rĂ©cits , partageoient aussi leurs piĂšces de théùtre , en plusieurs parties , en introduisant des choeurs qui prĂŽduisoient le mĂȘme effet que la figure cubique. Puisque les anciens ont suivi cette mĂ©thode pour se conformer Ă lâordre Ă©tabli dans la nature , et voyant que je devois Ă©crire sur une matiĂšre obscure et inconnue Ă la plus grande partie des lecteurs, jâai jugĂ© , que, pour ĂȘtre intelligible , je devois abrĂ©ger mes Ă©crits , sĂ©parer mes matiĂšres , et rĂ©unir dans le mĂȘme livre toutes celles qui sont d'un mĂȘme genre , afin que lâon nâait pas la peine de les aller chercher en plusieurs endroits. ; Dans les troisiĂšme et quatriĂšme livres , jâai traitĂ© , ĂŽ CĂ©sar, de la construction des temples je vais expliquer dans celui-ci , quelle doit ĂȘtre la disposition des Ă©difices publics , et en premier lieu , de quelle maniĂšre on doit construire le forum , parce que câest le lieu oĂč les magistrats rĂšglent lqs affaires publiques et celles des particuliers. REMARQUES . Dans le i.* r chapitre du livre 3 nous avons vu que les Platoniciens regardoient le nombre dix comme un nombre parfait ; mais que les mathĂ©maticiens , et avec eux les Pythagoriciens, regardoient le nombre six comme le plus parfait, et par-consĂ©quent le nombre 216; parce que 6, multipliĂ© par lui-mĂȘme fait le nombre carrĂ© 56 , qui, multipliĂ© par son cĂŽtĂ© 6 , fait le nombre cubique 216. Câest pourquoi les Pythagoriciens avoient rĂ©duit Ă 216 les vers qui contenoient toute leur doctrine- LIVRE V C h a p. i. 189 CHAPITRE PREMIER. Du Forum 1. * T Ă E Forum, chez les Grecs, est carrĂ©; tout autour rĂ©gnent des doubles et amples portiques , dont les colonnes sont trĂšs-serrĂ©es les unes contre les autres ; elles soutiennent des architraves de pierre ou de marbre avec des galeries en haut. Il nâen est pas de mĂȘme dans les villes dâItalie , parce que lâancien usage est de faire voir, au peuple dans ces places les combats des gladiateurs. Pour de semblables spectacles, il faut que les entre-colonnemens qui sont tout autour, soient beaucoup plus larges ensuite que , sous les portiques , on puisse placer les bureaux des banquiers , et que les galeries au-dessus aient lâespace nĂ©cessaire pour faire le trafic en public. La grandeur de ces places doit ĂȘtre proportionnĂ©e au nombre des habitans , 'de crainte quelle ne soit trop petite , si beaucoup de personnes y ont Ă faire, oĂč quelle ne paroisse trop vaste, si la ville nâest pas assez peuplĂ©e. On dĂ©termine sa largeur , en divisant la longueur en trois parties , dont on lui en donne deux par-lĂ , la forme est plus longue que large ; ce qui est bien plus commode pour y donner des spectacles. Les colonnes du second Ă©tage doivent ĂȘtre moins grandes dâune quatriĂšme partie que celles du premier ; parce que celles dâen bas Ă©tant plus chargĂ©es , doivent ĂȘtre plus fortes en cela nous imitons la nature de qui il faut que lâart se rapproche autant quâil est possible. Toutes les productions qui sortent de la terre , et sâĂ©lĂšvent perpendiculairement Ă son sol, comme les arbres , entre autres les sapins , les cyprĂšs, les pins , sont beaucoup plus gros vers les racines ; Ă mesure quâils croissent et quâils sâĂ©lĂšvent , la nature les attĂ©nue insensiblement jusquâĂ la cime dâaprĂšs cela , les architectes ont Ă©tabli pour rĂšgle , que les parties les plus Ă©levĂ©es dans les Ă©difices , seroient plus petites et plus minces que celles dâen bas. On doit exposer les basiliques , qui sont sur le forum , dans l'aspect , oĂč elles recevront le plus de chaleur , afin que les nĂ©gocians puissent sây rĂ©unir pendant ĂŻ On appeloit ainsi chez les anciens la place publi- * Planches XIY et XV. que , ou celle du marchĂ©. l9 o LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Oiiver , sans y Ă©prouver les rigueurs de la saison. Leur largeur doit ĂȘtre au moins de la troisiĂšme partie de leur longueur , ou de la moitiĂ© tout au plus ; Ă moins que la nature du lieu ne le permette pas , et force de changer cette proportion. Si lâespace Ă©toit beaucoup plus long quâil ne doit ĂȘtre , on devroit alors placer les calcidi- ques aux extrĂ©mitĂ©s , comme on le voit dans la Basilique Julienne Ă AquilĂ©e. La hauteur des colonnes de la Basilique doit ĂȘtre Ă©gale Ă la largeur des portiques. La largeur du portique doit avoir le tiers de lâespace du milieu. Les colonnes dâen haut , comme on lâa dĂ©jĂ dit , seront plus petites que celles dâen bas. La cloison entre les colonnes du rang supĂ©rieur doit sâĂ©lever jusquâaux trois quarts de la hauteur de ces colonnes, alin que ceux qui se promĂšnent sur cette galerie , ne soient pas vus des gens qui trafiquent en bas. Les proportions de lâarchitrave , de la frise, et de la corniche , se rĂšglent sur celles des colonnes,, comme nous lâavons expliquĂ© dans le troisiĂšme livre. - son! F Cette sorte de Basilique sera au moins aussi majestueuse et aussi belle que celle de la colonie julienne de Fano , construite d aprĂšs mes dessins et sous ma direction; pour laquelle j'ai observĂ© les proportions suivantes. La voĂ»te du milieu , entre les deux rangs de colonnes , est longue de cent vingt pieds, et large de soixante; le portique qui rĂšgne tout autour, a, entre le mur et les colonnes, la largeur de vingt pieds; les colonnes, y compris leurs chapiteaux , ont cinquante pieds de hauteur et cinq de diamĂštre. DerriĂšre ces colonnes se trouvent des pilastres hauts de vingt pieds, larges de deux pieds et demi, et Ă©pais dâun pied et demi, pour soutenir les poutres qui portent les planchers des galeries. Sur ces pilastres il sâen Ă©lĂšve dâautres, hauts de dix-huit pieds, larges de deux, et Ă©pais dâun , qui soutiennent les poutres qui portent les forces et tout le toit des portiques , dont le faĂźte ne sâĂ©lĂšve pas jusquâĂ la voĂ»te. Les espaces qui sont entre les poutres posĂ©es sur les pilastres, et celles qui sont sur les colonnes, sont laissĂ©es pour donner du jour par les entre-colonnemens. Les colonnes Ă droite et Ă gauche dans la largeur de la grande voĂ»te , sont de chaque cĂŽtĂ© au nombre de quatre ; dans la longueur adjacente Ă la place publique , il sâen trouve huit, y compris celles des coins et dans le cĂŽtĂ© opposĂ© , y compris aussi celles des coins , il nây en a que six ; parce que de ce cĂŽtĂ© , on a supprimĂ© les deux du milieu , pour qu elles nâempĂȘchent point la vue du vestibule du temple dâAuguste , qui est placĂ© au centre du mur de cette face, vis-Ă -vis du milieu de la place publique et du temple de Jupiter i ; dans ce temple dâAuguste , se trouve un tribunal qui forme une i La longueur et la largeur de l'Ă©difice Ă©tant prĂšs- le voit dans la XIV. me planche. Ils sont tous Ă©gaux hormis crite ainsi que la grosseur des colonnes , il suit quâon les deux qui sont au milieu des petits cĂŽtĂ©s, a aussi Ja. largei^r des entre -colonnemens , comme on Cftl câf! et! des] âąe taire espĂšce de demi-cercle ; il a quarante-six pieds de front et nâen a que quinze de profondeur, afin que les gens qui sont dans la Basilique pour trafiquer , nâincommodent point les plaideurs qui sont devant les juges. Un assemblage composĂ© de trois poutres de deux pieds d Ă©paisseur chacune , posĂ© sur les colonnes , rĂšgne tout autour de la Basilique ; les parties de cet assemblage qui sont sur les trois colonnes de lâintĂ©rieur , se retournent directement Ă la troisiĂšme, vers les antes du vestibule du temple , et vont rejoindre le demi-cercle , tant Ă droite qu Ă gauche. Sur ces poutres assemblĂ©es , sâĂ©lĂšvent , perpendiculairement aux chapiteaux , des piles hautes de trois pieds , et larges de quatre dans tous les sens elles soutiennent un autre assemblage de charpente bien travaillĂ© , composĂ© de deux poutres qui ont deux pieds dâĂ©paisseur, sur lesquelles sont posĂ©es les poutres de traverse et les contre- fiches , qui correspondent dans la frise sur les pilastres ou murs du vestibule du temple elles soutiennent le faĂźtage du toit le long de la basilique , et un autre qui la traverse au milieu et sâĂ©tend jusques sur le vestibule du temple. Lâaspect de ce double Ă©tage de frontispices formĂ©s par les toits latĂ©raux et par celui de la grande voĂ»te qui s Ă©lĂšve au-dessus, est des plus agrĂ©ables. Dâailleurs on diminue, par-lĂ , le travail et la dĂ©pense , puisquâon supprime la partie de lâentablement qui est au- dessus de farchitrave , les balustrades , et le second rang de colonnes. Cependant ces hautes colonnes dont la tige sâĂ©lĂšve jusquâaux poutres de la voĂ»te , ajoutent beaucoup Ă la majestĂ© et Ă la magnificence de lâouvrage. REMARQUES. Les premiers essais de lâarchitecture, chez les Grecs , furent consacrĂ©s aux temples de leurs dieux ; c est pour les temples que cet art fut inventĂ© ; ce fut pour eux quâil se perfectionna. Les colonnes et les autres dĂ©corations qui en font la principale beautĂ© , furent long-temps rĂ©servĂ©es Ă ces sortes d Ă©difices. Mais la GrĂšce Ă©tant devenue opulente , aprĂšs avoir triomphĂ© des innombrables armĂ©es des Perses, et reconquis , pour ainsi dire , sa libertĂ© , toutes les villes Ă lâenvi, et sur-tout AthĂšnes , firent Ă©clater leurs richesses dans tous les Ă©difices publics. Les colonnes et les autres ornemens cĂźe 1 architecture quâils avoient employĂ©s avec tant de succĂšs Ă dĂ©corer les temples, furent dĂšs lors employĂ©s a dĂ©corer aussi les autres Ă©difices. Le forum 3 câest-Ă -dire la place du marchĂ© oĂč ils lenoient les assemblĂ©es dans lesquelles ils disculoient les intĂ©rĂȘts de la patrie , cpii leur Ă©toit devenue plus chĂšre , aprĂšs lâavoir sauvĂ©e des Perses , furent les premiers endroits quâils cherchĂšrent a embellir la grande Ă©tendue de ces places olfroit Ă leur gĂ©nie un bien plus vaste champ pour faire Ă©clater toute la magnificence de lâarchitecture. Les temples dâailleurs ne formoient quâun seul Ă©difice. Dans le forum , se trouvoient rĂ©unis la basilique , des temples , le trĂ©sor public , la maison 193 L'ARCHITECTURE UE Y I T R U V E. de ville , les prisons ; celle variĂ©lĂ© permelloit Ă lâarchitecte dâĂ©taler les divers genres de beautĂ©s rĂ©unies dans son art. Chez les anciens, I e forum Ă©loit ce que sont aujourdâhui, parmi nous, nos places publiques; avec la diffĂ©rence quâil Ă©loit ordinairement entourĂ© de galeries portĂ©es par des colonnes , comme elles sont dĂ©crites dans ce chapitre ; le fond de ces galeries Ă©loit occupĂ© par des boutiques rangĂ©es les unes contre les autres , tel quâon le voit dans les XIV.* 2 et XV. me planches , et tel quâest aujourdâhui le palais royal Ă Paris. Lâon y vendoit toutes sortes de marchandises. Ainsi lorsque Vilruve dit quâon doit laisser un espace suffisant pour placer les bureaux des banquiers , il nâentend pas quâil ne sây irouvoit autre chose que des bureaux de banquiers , il les cite pour un exemple, comme sâil avoit dit , pour placer les bureaux des banquiers et des autres commerçans. Dan» les petites villes , il est probable quâil nây avoit que deux ou trois boutiques dans le forum , oĂč lâon irouvoit rĂ©unis toutes les choses nĂ©cessaires k la vie. Mais dans le forum dâune grande ville, tel que celui dont parle Vilruve , il y avoit une boutique pour chaque espĂšce de marchandise -, par exemple , Ă Rome on irouvoit 1 âargentarium , le boarium , Volitorium 3 le piscarium 3 le piscatorium 3 le pistorium 3 le suarium 3 et autres. Deux rangs de colonnes Ă©levĂ©s lâun sur lâautre , rĂ©gnoient tout autour des forum, tant en GrĂšce quâen Italie. Vilruve veut que les colonnes du rang supĂ©rieur soient le quart moindres que celles . du rang infĂ©rieur. Galiani trouve quâon ne voit pas clairement dans le texte , si câest la hauteur ou lâĂ©paisseur de la colonne , quâon doit diminuer dâun quart ; je crois que ce doit ĂȘtre lâun et \ lâautre , puisque , comme lâobservent Philander et Galiani lui-mĂȘme , la hauteur de la colonne est toujours relative Ă son Ă©paisseur qui lui sert de module. Parlant si les colonnes du rang supĂ©rieur sont du mĂȘme ordre que celles du rang infĂ©rieur, et quâelles soient le quart moins Ă©paisses, elles j seront aussi un quart moins grandes , et vice versa. Mais comme lâusage est de faire les colonnes du second rang , dâun ordre plus dĂ©licat , si la diminution est faite Ă la hauteur , ces colonnes seront plus du quart plus minces que les autres. Lâon peut dâautant moins douter que ce ne soit Ă la hauteur que Vilruve entend que cette diminution soit faite , quâil dit expressĂ©ment, dans le j . . LIVRE V , C il a p. i. ic3 grosses que les infĂ©rieuresmais que si ces parties sont fort Ă©levĂ©es , et que par lĂ elles parois- sent, Ă la vue , beaucoup plus minces quâelles ne doivent ĂȘtre , Ă cause de leur grandĂ© Ă©lĂ©vation , il entend quâa lors un architecte sache , avec adresse , les diminuer un peu moins , ou y ajouter quelque chose , afin quâelles paroissent avoir les proportions requises. De tous les Ă©diiices placĂ©s sur le forum , les basiliques Ă©toient les plus considĂ©rables ; elles Ă©toient destinĂ©es Ă deux usages , comme on le voit clairement dans ce chapitre ; dâabord pour le commerce ; câĂ©toit lĂ que les nĂ©gocians avoiem coutume de sâassembler , comme ils Je font aujourdâhui dans les lieux nommĂ©s bourse qui se trouvent dans les villes les plus commerçantes ensuite câĂ©toit lĂ que lâon rendoit la justice ; lâendroit nommĂ© le tribunal y Ă©toit spĂ©cialement destinĂ©. Par la description que Vitruve fait de ces sortes dâĂ©difices , on voit* quâils ressembloient parfaitement aux premiĂšres Ă©glises du Christianisme , qui , pour cela , furent aussi appelĂ©es basiliques , et servirent de modĂšle Ă la plupart des Ă©glises quâon bĂątit par la suite. Elles diffĂšrent des temples des anciens , en ce que les colonnes sont en dedans , au lieu que les temples les avoient en dehors, faisant comme une enceinte autour de la Cellct ou dedans du temple , qui Ă©toit un lieu obscur, oĂč le jour nâentroit ordinairement que par la porte. Dans les proportions que Vitruve assigne aux basiliques , en gĂ©nĂ©ral, il dit , cpie leur largeur doit avoir , au moins , la troisiĂšme partie de leur longueur , ou la moitiĂ© tout au plus. Par celte largeur, il entend sans doute, celle de la grande nef, sans y comprendre celle des portiques latĂ©raux ; autrement il auroit transgressĂ© lui-mĂȘme cette rĂšgle dans la basilique de Fanum dont il dirigea la construction. La largeur de la nef' de cette basilique est de 60 palmes ; ce qui fait prĂ©cisĂ©ment la moitiĂ© de sa longueur qui est de 120 palmes tandis que toute la largeur , y compris les colonnes et les portiques latĂ©raux , est de 110 pieds , ce qui excĂšde de beaucoup la moitiĂ© de la longueur , qui nâa pas plus de 170 pieds. PrĂšs de la basilique , se trouvoient deux salles nommĂ©es chalcidiques ; Vitruve conseille de les placer aux deux extrĂ©mitĂ©s de ce bĂątiment , si lâemplacement oii on doit le bĂątir qui est un des cotĂ©s du forum , prĂ©sente un espace plus que suffisant pour sa longueur. On ne commĂźt pas trop bien Ă quel usage ces chalcidiques Ă©toient destinĂ©es. Ce nom Ă©toit composĂ© du mot chalcos > qui signifie en grec de lâairain , et du mot clicĂȘ , qui signifie justice , roĂŒ %akxoĂ» xc Six^g. Plusieurs savans , suivant Philander , ont cru que câĂ©toit le lieu oĂč lâon frappoit la monnoie chez les Romains ; il est plus apparent que câĂ©toit celui oĂč lâon tenoit la justice pour juger de leur poids et de leur valeur , puisque les Romains se servirent clans le commencement, pour les achats, de mĂ©tal de cuivre estimĂ© au poids, avant dâemployer les mon- noies frappĂ©es au coin, dâoĂč les monnoies ont conservĂ© les noms qui marquoient les anciens poids, tels que lâas chez les Romains , le talent et la mine chez les Grecs , le sicle chez les HĂ©breux , la livre tournois en France , et la livre sterling en Angleterre , comme^ nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© en parlant du a. e Chap. du IH. e Liv. Les anciens as des Romains Ă©toient de cuivre , ils pesoient une livre; on les nommoit libralis , as et libella y il sâen trouvoit pesant deux livres; on les nora- moit alors dupondias . On frappa , pour la premiĂšre fois , lâargent Ă Rome lâan 484 de sa fondation. Lâon commença Ă monnoyer lâor et le cuivre sous Servius Tullius, câest-Ă -dire environ fio ans plus tard. Pline, H. JN. Liv. XXXIII, Ch. 3. 25 194 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. Nous avons encoTe vu que , lorsquâil sâagissoit de somme considĂ©rable , on avoit coutume de p ese y lâae , et les parties dans lesquelles on la divisoit ; dâoĂč, les Romains disoient peser , penclere pou,, payer, apporter les billets ou registres du reçu du pesĂ©, pour dire du payĂ© expensas ferre. P] u â sieurs mots latins qui regardent la monnoie , tirent leur origine de cette façon de peser lâargent. Il est donc trĂšs-probable que, dans les clialcidiques , se trouvoit un magistrat pour juger du poids et de la valeur des monnoies. Comme nous avons dans plusieurs villes de Hollande et des Pays-Bas W des bĂąlimens nommĂ©s le poids public, oĂč les marchandises sont pesĂ©e* pur des gens sermeniĂ©s. dus, Quelques-uns prĂ©tendent quâon donnoit le nom de chalcicĂźica Ă une sorte de bĂątiment inventĂ© ! Ă Chalcis dans lâisle dâEubĂ©e ; dâautres quâil signifĂźoit une salle dâairain. v j inteI Nous voyons effectivement que le plus cĂ©lĂšbre des temples de Minerve Ă Sparte, se nommoit chah oi cioecos , des deux mots grecs %a,KyJç., airain , et olxog, maison. Presque tous les auteurs latins et grecs ' bl ont parlĂ© de ce temple. 1 Tite-Live assure quâon lâa nommĂ© ainsi parce quâil Ă©toit tout de cuivre, i Pausanias dit la mĂȘme chose , et câest en parlant du temple clâApollon , Ă Delphes , quâon disoit » 202 Lâ architecture de VIĂRUYE. spectateurs assis ; ce cpii pourroit faire croire que ces prologues ne sont point de Plaute. On Ă©leva dans la suite des théùtres en diffĂ©rentes occasions ; tel fut celui dâEmilius Scaurus qui Ă©toit dâu ne extrĂȘme magnificence 5 il contenoil , dit Pline , quatre-vingt mille personnes 1. PompĂ©e est ] e premier qui , dans son second consulat , fit faire un théùtre de pierre de taille , qui contenoit quarante mille placĂ©s. Dans la suite on Ă©leva Ă Rome plusieurs théùtres permanens dont les pfi]]. cipaux furent ceux de Marcellus et de Ealbus , qui Ă©toient de marbre. On voit combien les théùtres des anciens Ă©toient diffĂ©rons des nĂŽtres ; tous ces gradins construits en briques , couverts de marbre ou de pierre , et surmontĂ©s de portiques , formoient une masse Ă©norme qui demandoit les fondemens les mieux appuyĂ©s. Vitruve dit quâil est aisĂ© de les construire sur une montagne , parce que des couches de roches ou de pierres dures les composent la plupart ; mais si lâon est obligĂ© , dit-il , de les bĂątir dans un terrain plat et marĂ©cageux , il recommande quâon ait soin , pour rendre le fond du terrain solide , dâemployer les moyens quâil indique dans le i. er Chap. du troisiĂšme livre. Moyens qui furent employĂ©s pour les fondemens du temple de la Diane dâEphĂšse. Le comte de Maffei 2 en parlant de lâamphithéùtre de Pola , que mal-Ă -propos il prend pour un théùtre , observe quâil se trouve immĂ©diatement au pied dâune colline , quâon sâest adroitement servi de sa pente pour y construire les gradins , et que les anciens avoient coutume de choisir des lieux semblables quand ils bĂątissoient de tels Ă©difices , afin dâĂ©pargner une grande partie des fraix de construction en effet , le grand cirque Ă Rome remplissoit le fond de la vallĂ©e entre les monts Palatin et Aventin , et les gradins, des deux cĂŽtĂ©s, sâĂ©levoient sur la pente de ces deux montagnes. Pour faciliter lâintelligence de tout ce que lâauteur dit des théùtres , dans ce livre, 5 e vais donner une idĂ©e gĂ©nĂ©rale de ces Ă©difices dans la description suivante. Il convient, en la lisant , dâavoir les planches XVI et XVII sous les yeux. Le plan du théùtre , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© , avoit Ă -peu-prĂšs la figure dâun demi- cercle ; celle de lâamphithéùtre Ă©toit circulaire ou elliptique , ou, pour mieux dire, câĂ©toit dĂ©ni théùtres unis ensemble , comme lâindique son nom ; mais notre auteur ne parle pas de cette sorte dâĂ©difice , qui nâexistoit probablement pas encore de son temps, ou câest un oubli de sa part, comme il a fait pour le cirque et pour beaucoup dâautres objets. La partie infĂ©rieure du théùtre qui formoit une place en demi-cercle au milieu de tous les gradins , sâappeloit Y orchestrĂ©e , du mot grec cp%yça'i sauter, parce que câĂ©toit lĂ que sâexĂ©cutoient les danses. Les Romains lui laissĂšrent le mĂȘme nom, quoique cet espace , chez eux, ne fĂ»t pas destinĂ© pour les danses. Il Ă©toit occupĂ© par les siĂšges des sĂ©nateurs , des magistrats , des vestales et des autres personnes de distinction. Tout autour de la, courbure du demi-cercle , sâĂ©levoient les gradins appelĂ©s gf'adationes sur lesquels sâasseyoient les spectateui's. Les siĂšges ou gradins des chevaliers , etoient garnis de coussins 3 5 les autres Ă©toient assis sur la pierre nue. Le mĂȘme usage etoit chez les Grecs 5 de lĂ vient le bon mot dâArislippe quelquâun lui demandant Ă 1 Plin. Hist. nat. Liv. XXXVT. Chap. i5. . 3 Juven, Sat. lit. t* i53. 2 Tratialo de "U anfiteaiiĂŻ. LIYllE V, C h a p. ni. servoit la culture de lâesprit? il rĂ©pondit Ă empĂȘcher quâau théùtre une pierre ne soit pas sur une pierre. Dans les théùtres fort grands et Ă©levĂ©s , ces gradins Ă©loient interrompus par une ou deux prĂ©cinctions , suivant la proportion ou grandeur du théùtre ; on les appeloit en grec diazomata , et en latin prĆcinctiones. Plusieurs ont traduit ce mot en françois par palier , parce quâils font le mĂȘme effet entre les gradins , que les paliers entre les degrĂ©s d.âun escalier. Je suis persuadĂ© que par ces mots pro rata parte ad altitudines , lâauteur nâentend pas, comme quelques-uns lâont cru , que la grandeur des prĂ©cinctions devoit varier suivant que le théùtre Ă©toit plus ou moins grand , plus ou moins Ă©levĂ©; parce que la grandeur des prĂ©cinctions doit toujours ĂȘtre la mĂȘme dans les grands et dans les petits théùtres , comme nous le voyons dans le septiĂšme chapitre de ce livre , oĂč il dit expressĂ©ment sunt enim res quas in pusillo et in magno theatro necesse est eadem magnitude fieri propter usum uti gradus diazomata ce dernier mot, comme nous lâavons vu , signifie la mĂȘme chose en grec que prĆcinctiones en latin. Câest donc le nombre des prĂ©cinctions et non leur grandeur particuliĂšre qui doit ĂȘtre proportionnĂ©e avec la hauteur des théùtres ; tellement que dans un théùtre mĂ©diocre il nây aura quâune prĂ©cinction , dans un autre qui sera plus grand il y en aura deux , et dans les grands théùtres il y en aura trois. La hauteur des prĂ©cinctions dĂ©pendoit de celle des gradins , puisquâune corde tendue, depuis le haut jusquâen bas , devoit loucher lâangle de tous les degrĂ©s. Parlant il falloit que les gradins et les prĂ©cinctions fussent proportionnĂ©s ensemble. Si cependant on prend Ă la lettre lâexpression latine , ils ne le seroient pas ; puisquâelle semble dire , que la hauteur des prĂ©cinctions doit Ă©galer leur largeur , et dâun autre cĂŽtĂ© , Ă la fin du 6. me Chap. de ce livre , lâauteur fixe la proportion des gradins Ă deux pieds et demi de large et un pied six doigts de haut pour les plus petits. Ainsi il nây aucun rapport entre la proportion des gradins et des prĂ©cinctions , et il seroit impossible quâune ligne droite tirĂ©e du bas en haut touchĂąt lâangle de tous ces degrĂ©s. Pour ne pas mettre lâauteur en contradiction avec lui-mĂȘme , il faut supposer , dâaprĂšs la raison quâil dit immĂ©diatement aprĂšs , quâil a entendu que la hauteur des prĂ©cinctions ne devoit pas surpasser leur largeur , sans vouloir pour cela dĂ©terminer prĂ©cisĂ©ment leur hauteur. Quelle que fĂ»t lâĂ©tendue des théùtres , la partie au-dessus des degrĂ©s Ă©toit toujours terminĂ©e par une espĂšce dâesplanade ou palier , sur lequel sâĂ©levoit un portique ; câĂ©toit lĂ oĂč se plaçoient les femmes , et ceux qui Ă©toient en deuil 1 . Chaque partie du théùtre avoit son entrĂ©e et sa sortie distincte lâune de lâautre ; plusieurs corridors conduisoient de plein pied Ă lâorchestre ; leurs ouvertures ou portes de ce cĂŽtĂ© sâappeloient vomitoria 2 , parce que la multitude du peuple sembloit ĂȘtre vomie par ces portes 3. e- Pour monter parmi ces degrĂ©s ou siĂšges , on les avoit coupĂ©s de distance en distance par des 1 Calp. B. Chap. v. 2C. 2 Macrob. saturna. 6. Chap, 4. 3 Yirgil..georg, liv. II. v. 462. LâARCHITECTURE DE YITRUYE. 204 chemins qui formoient autant de petits escaliers appelĂ©s scalaria ; chacun avoit sa destination p ar _ ticuliĂšre , câest-Ă -dire que lâun conduisoit jusquâĂ la premiĂšre prĂ©cinclion , un autre jusquâĂ la seconde , si le théùtre avoit trois prĂ©cinctions , un autre y conduisoit aussi ; finalement un autre encore conduisoit dans le portique supĂ©rieur. Lâespace , entre deux chemins, sâappeloit cunei coins 1 , Ă cause de leur forme , et ces coins Ă©toient destinĂ©s pour les personnes dâun rang diffĂ©rent 2 ; câest pour cela que dans ApulĂ©e , on trouve excuneare 3 pour dire chasser une personne de sa place. Les parties du théùtre Ă©toient la scĂšne ou proscenium et le postscenium . La scĂšne ou proscenium Ă©toit le lieu oĂč les acteurs reprĂ©sentoient 5 il sâĂ©lendoit dâun cĂŽtĂ© du théùtre Ă ,1âautre ; partant il occupoit le diamĂštre en entier. Au lieu de celte toile , qui , aujourdâhui , couvre le théùtre , avant le commencement de la piĂšce, et quâon lĂšve aussitĂŽt quâelle commence , chez les anciens câĂ©toit une tapisserie qui, pendant la reprĂ©sentation de la piĂšce , Ă©toit Ă terre 3 , et que lâon Ă©levoit lorsquâelle Ă©toit jouĂ©e ; ce qui Ă©toit tout simple , parce que leurs théùtres nâavoient pas de toits. Le postscenium Ă©toit le derriĂšre du théùtre , oĂč se passoit ce qui ne pouvoit convenablement se passer sur la scĂšne. Le fond du théùtre Ă©toit rempli par une superbe façade dâarchitecture, Perrault et dâautres interprĂštes ajoutent deux autres parties au théùtre le pupitre, pulpitum , et la scĂšne , scena 3 parce quâils nâont pas compris que ces deux mots indiquoient la mĂȘme chose que le proscenium , comme nous le ferons voir dans nos remarques sur le \ I. mc Chap, de ce livre. Cette courte description des théùtres suffit pour commencer Ă comprendre ce que lâauteur dit dâabord dans ce chapitre. A mesure quâil dĂ©crira les diffĂ©rentes parties de ces Ă©difices , dans les chapitres suivans , nous tĂącherons de dĂ©velopper ses idĂ©es , et de les expliquer. On aura remarquĂ© combien les théùtres des anciens diffĂ©roient des nĂŽtres ; leur Ă©tendue sur-tout Ă©toit nien plus considĂ©rable. Le théùtre quâon a dĂ©couvert dans les ruines dâHerculanum prĂšs de Naples, a 75 pieds de diamĂštre ; celui de Marcellus Ă Rome avoit 366 pieds de diamĂštre et pouvoit contenir trente mille spectateurs. On est Ă©tonnĂ© , que, dans un aussi grand espace , qui Ă©toit entiĂšrement dĂ©couvert , la voix des acteurs Ă©toit entendue de tous les spectateurs. Ce nâest aussi quâaprĂšs avoir Ă©tudiĂ© , avec la plus grande attention , comment le son se propage , comme il est possible de lâarrĂȘter en le concentrant et de lâaugmenter par lâeffet de la rĂ©sonnance , que les anciens sont parvenus Ă rendre la voix si sonore dans leur théùtre. Vitruve compare lâeffet du son qui sâĂ©tend dans lâair , Ă celui que produit un caillou jetĂ© dans une eau paisible ; il fait naĂźtre autour du centre quâil a mis en mouvement , un petit cercle-, qui ensuite sâĂ©tend , se multiplie , et deyient toujours plus grand , sâil nâest arrĂȘtĂ© par la rive qui contient lâeau. Cette comparaison'nâest pas bien exacte. Quand lâagitation commuaiquĂ©e Ă lâair par la collision dâun corps frappĂ© par un autre, parvient jusquâĂ lâorgane auditif, elle y produit une sensation quâon 1 Juren. Sat. 6. v. 61. 3 Horat. Ep. I. t. 189. 2 Suet. v. Aug. Chap. 44 - v LIVRE V, Ch ap. ĂŻiĂŻ. 20S Il bruit II faut supposer , il est vrai , quelque soit la nature du bruit ou du son , que son vĂ©hicule nâest autre chose que lâair mĂȘme premiĂšrement , parce que lâair est le seul corps intermĂ©diaire de lâexistence duquel on soit parfaitement assurĂ© , entre le corps sonore et lâorgane auditif i, faut nas multiplier les ĂȘtres sans nĂ©cessitĂ© ; que lâair suffit pour expliquer la formation du son * et de plus, parce que lâexpĂ©rience nous apprend quun corps sonore ne rend pas de son dans un lieu tout-Ă -fait privĂ© dâair. Mais lâagitation que produit le son dans lâair ne se communique point par des ondes , comme lâagitaiion de lâeau. Celles-ci se font sur la superficie dâun corps fluide Ă la vĂ©ritĂ© comme lâair; mais beaucoup lus dense et plus pesant , presque incompressible et trĂšs-peu Ă©lastique ; elles ne paraissent que sur P np sâĂ©tendent crue sur sa superficie un autre fluide qui est lâair se trouve au-dessus. Celui-ci Ă cause de son extrĂȘme rarĂ©faction, qui obĂ©it a la moindre impulsion, et dont 1 Ă©quilibrĂ©, sans cesse rompu, cherche sans cesse Ă se rĂ©tablir, ne gĂȘne pas plus lâimpulsion donnĂ©e aux ondes que ne feroit le vuide. Le son au contraire , se transmet par les vibrations de lâair qui est un corps singuliĂšrement Ă©lastique, qui remplit tout, Ă©tant serrĂ© contre tous les corps , et tellement entassĂ©, quâil est impossible que tes impulsions quâil souffre soient vaines et sans effet. Ses vibrations nous transmettent dans un mĂȘme moment tes sons dans tous tes sens , horizontalement, verticalement , etc. Il nâest pas plus difficile Ă lâair de transmettre Ă lâoreille, sans confusion , mille agitations Ă la fois, quâune seule. Il est possible, cependant , dâaugmenter le son en lâarrĂȘtant, et 1e concentrant , en passant par un tube , comme un porte-voix il sâaugmente et devient plus fort* Le son des instrumens, la voix de lâhomme , font plus d effet et sont bien plus sonoies dans un appartement quâen plein air. Les salles dâune forme circulaire , sur-tout couvertes dâune voĂ»te concave , sont tes plus propres pour cela. 11 paroĂźt quâelles rassemblent le son , 1e grossissent et le rĂ©flĂ©chissent, Ă -peu-prĂšs comme il arrive aux rayons de lumiĂšre rassemblĂ©s dans un miroir concave. Il existe des rotondes , tels que le tambour du dĂŽme de S. 1 Pierre du Vatican, au-dessus de la grande corniche ; celte qui forme le temple de Mercure dans tes ruines de Baya ; cette voĂ»te en Sicile , prĂšs de Siracuse, quâon nomme lâOreille de Denis le tyran. La voix de quelquâun qui parte, mĂȘme fort bas , contre 1e mur dâune de ces rotondes , est entendue tout autour , meme a 1 extrĂ©- miiĂ© opposĂ©e , aussi distinctement que si lâoreille Ă©toit placĂ©e devant la bouche qui parte. 11 paroĂźt donc que tes enceintes circulaires sont plus propres que les'autres pour augmenter le son de la voix , et que câest pour cela que tes anciens ont prĂ©fĂ©rĂ© cette forme pour le plan de leurs théùtres. 3 o6 LâARCHITECTURE DE V I T R U Y E. "I CHAPITRE IV. De lHarmonie i. L A musique harmonique est une science obscure et difficile , sur-tout pour ceux qui ne savent pas la langue grecque. Nous ne pouvons cependant expliquer ici, ce quâil est nĂ©cessaire d'en savoir , sans nous servir dâune quantitĂ© de mots grecs , parce quâil y a beaucoup de choses , que notre langue , faute de termes propres , ne peut signifier. Je ferai cependant mon possible pour rendre dâune maniĂšre intelligible , ce quâen a Ă©crit AristoxĂšne ; je rapporterai mĂȘme sa table , et dĂ©terminerai, avec exactitude , la diffĂ©rence des sons , afin que ceux qui y voudront apporter un peu dâattention, comprennent aisĂ©ment ce que jâen dirai. > La voix change ses inflexions ; les unes sont graves , et les autres aiguĂ«s elle a en outre deux sortes de mouvemens ; lâun se fait quand elle est continue et toujours Ă©gale , l'autre quand elle procĂšde par des intervalles sĂ©parĂ©s. Le mouvement que fait la voix continue , ne sâarrĂȘte nulle part ; il nâest bornĂ© par aucuns termes ; ses deux extrĂ©mitĂ©s sont insensibles Ă lâouĂŻe ; il nây a que les seuls intervalles du milieu qui s'entendent, comme il arrive quand on prononce les mots , sol , lux , flos, nox car alors on ne discerne point, ni dâoĂč elle part, ni oĂč elle se termine ; lâoreille ne sâaperçoit dâaucune inflexion , ni quâelle passe du grave Ă lâaigu , ni de lâaigu au grave. Tout le contraire arrive dans les mouvemens qu elle fait par des intervalles sĂ©parĂ©s car quand la voix fait des inflexions diffĂ©rentes , elle devient alors tantĂŽt haute , tantĂŽt basse ; elle sâarrĂȘte Ă un certain son dĂ©terminĂ© ; puis elle passe Ă un autre ; et ainsi parcourant souvent divers intervalles , elle paroĂźt inĂ©gale Ă lâoreille , comme il arrive lorsquâon chante et que la voix se rĂ©flĂ©chit par diverses modulations. En effet ; quand elle parcourt diffĂ©rens intervalles , ses sons sont tellement marquĂ©s et dĂ©terminĂ©s , quâil est aisĂ© de connoitre d'oĂč elle vient, par oĂč elle commence , et oĂč elle finit ; tandis que les sons du milieu sont obscurcis , parce quâil nây a pas d intervalles 2 . j Pour bien comprendre ce chapitre , il faut lire 2 Tous les musiciens distinguent ces deux mouve- auparavant lâexplication de la table dâAristoxĂšne, qui se mens de la voix lâun continu et Ă©gal ; lâautre , par des trouve Ă la fin» intervalles sĂ©parĂ©s le mouvement coniinu et Ă©gal de la J i LIVRE V, C h A p. iv. Ăźtoj Il existe trois genres de chant les Grecs appellent le premier Ă©narmonique i, le second chromatique 2 , et le troisiĂšme diatonique 3. La modulation Ă©nĂąrmo- nique doit son origine Ă lâart; aussi prĂ©fĂšre*t-on sa grave mĂ©lodie Ă celle des autres genres. Le genre chromatique , par les douces nuances de ses sons serrĂ©s * est le plus agrĂ©able. Enfin le diatonique , qui doit tout Ă la nature , est le plus facile de tous, Ă cause de la distance des intervalles. Ces trois genres forment les trois diffĂ©rentes dispositions du telracorde 4 , puis- que le tĂ©tracorde de l enarmonique se compose dâun diton h et de deux diĂšses 6 , Le diĂšse est la quatriĂšme partie dâun ton , ainsi deux diĂšses font un demi-ton. Dans le chromatique ; il y a deux demi-tons , et le troisiĂšme est un intervalle de trois i demi-tons 7 . Dans le diatonique, il y a deux tons de suite, et le troisiĂšme qui est ; un demi-ton termine lâintervalle du tĂ©tracorde. Ainsi tous les tĂ©tracordes , dans chacun des trois genres, sont composĂ©s de deux tons et dâun demi-ton B. Mais si lâon considĂšre comment chaque genre, pris sĂ©pĂą- ? voix , câest quand on parle simplement sans chanter ; Ăź on lâappelle ainsi , parce que la voix ne passe pas Ă diffĂ©rens tons , et ne forme aucune cadence au con- r traire!, quand on chante elle passe par diffĂ©rens tons ; ou , comme dit lâauteur , effectus distantes. 1 Câest-Ă -dire tempĂ©rĂ©. 2 ColorĂ©. 3 Tendu. 4 La voix modifie les sons quâelle rend , elle les Ă©lĂšve vers lâaigu ou les fait descendre au grave. La distance dâun son Ă un autre sâappelle intervalle. Lâintervalle principal, celui qui rĂšgle tous les autres, sâappelle ton. Les tons mineurs sont le demi-ton , et le diĂšse , qui est le quart de tons Les tons majeurs sont le trieâ miton , câest-Ă -dire un ton et demi ; le diton , câest-Ă - dire deux tons, etc. Ce principe Ă©tabli , on verra tout Ă lâheure que tous les tĂ©tracordes , dans chacun des trois genres, contenoient toujours un intervalle de deux tons et demi ; ou , si lâon veut , ils Ă©toient composĂ©s dâun demi-ton et de deux tons , comme dans le diatonique, ou de deux demi-tons et dâun triemiton, comme dans le chromatique âą, ou finalement de deux diĂšses et dâun diton, comme dans lâĂ©narmonique. Câest donc dans la disposition des demi-sons des tĂ©tracordes , quâexiste la variĂ©tĂ© dont il est ici parlĂ©. 5 Diton dans la musique grecque est un intervalle composĂ© de deux tons , câest-Ă -dire une tierce majeure. 6 AristoxĂšne divisoit le ton en deux parties Ă©gales* en trois ou en quatre de cette derniĂšre division rĂ©sul- toit le diĂšse Ă©narmonique mineur ou quart de ton , qui est celui dont parle ici Vitruve; de la seconde le diĂšse mineur chromatique , ou le tiers dâun ton ; et de la troisiĂšme le diĂšse majeur, qui faisoit juste,un demi-ton. Le diĂšse chez les modernes nâest pas proprement comme' chez les anciens , un intervalle de musique , mais un signe de cet intervalle qui marque quâil faut Ă©lever le son de la note devant laquelle il se trouve au-desSus de celui quâelle devroit avoir naturellement ; sans cependant 1 faire changer de degrĂ© ni mĂȘme de nom. 7 En parlant des genres diatonique et Ă©narmonique ,- Vitruve nomme les tons ou les intervalles, en commençant par les bas et allant vers les hauts, comme dans la? table, ou bien par les aigus et descendant aux gravĂ©s. 8 Dans tous les tĂ©tracordes , les deux cordes extrĂȘmesâ formoient un accord de quarte la consonnancĂ© deâ quarte est produite par un intervalle de deux tons et demi, par-consĂ©quent tous les tĂ©tracordes, dans chacun 1 des trois genres , contenoient toujours un intervalle de' deux tons et demi ou si lâon veut ils Ă©toient composĂ©s 1 dâun demi-ton et de deux tons ; comme dans le diatonique , ou de deux demi-tons , et dâun triemiton', comme' dans le chromatique ou finalement de deux diĂšses Ă©t dâun diton comme dans lâĂ©narmonique. 2q8 LâARCHITECTURE DE VIT RU VE. rĂ©ment, se termine , on verra quâils le font tous par des intervalles diffĂ©rens. La nature qui a dĂ©terminĂ© le ton , le demi-ton , et le tĂ©tracorde quâexprime la voix humaine , a fixĂ© leur mesure , la quantitĂ© des intervalles , et Ă©tabli le mode et la qualitĂ© des distances les ouvriers qui font des instrumens de musique , suivent ces rĂšgles Ă©tablies par la nature , pour leur donner des justes mesures. Dans chacun de ces genres, il y a dix - huit sons, appelĂ©s pĂŽiyyoi par les Grecs ; de ces sons il y en a huit qui ne varient point et sont toujours stables dans les trois genres. Les dix autres varient selon les modulations i. Les stables sont ceux qui placĂ©s entre les mobiles , unissent les tĂ©tracordes les uns aux autres, et qui, dans tous les genres occupent toujours la mĂȘme place. On les appelle Proslambanomenos, Hypate-hipaton, Hypate-meson , MesĂ© , NetĂ©-sinemmenon, ParamesĂ©, JSĂ©tĂ©-diezeug- menon, NetĂ©-hyperbolĆon. Les mobiles sont ceux , qui, placĂ©s dans les tĂ©tracordes, entre deux immobiles , changent de place , selon les lieux , et les diffĂ©rens genres ; ils sâappellent ParhypatĂ© - hypaton , Lichanos - hypalon , ParypatĂ© - meson , Licanos- meson, TritĂ©-synemmenon , ParanetĂ© - synemmenon , TritĂ©-diezeugmenon, TritĂ©- hyperbolĆon, ParanetĂ© - hyperbolĆon. Ces sons mobiles, dans chaque espĂšce de genres, avoient diffĂ©rentes valeurs, parce que les intervalles et les Ă©tendues varioient. Ainsi, la parhypatĂ© , qui, dans l'Ă©nar- monique , est distante de XhypatĂ© dâun diĂšse , se change dans le chromatique , et a lâintervalle dâun demi-ton ; et dans le diatonique aussi dâun demi-ton 2 . Celle quâon appelle lichanos est distante de 1 liypate d un demi-ton dans lâĂ©narmonique ; dans le chromatique elle avance jusquâĂ deux demi-tons ; et dans le diatonique , elle avance jusquâĂ trois tellement que ces dix sons transposĂ©s et placĂ©s diversement dans chaque genre , produisent trois modulations diffĂ©rentes, Il existe cinq espĂšces de tĂ©tracordes ; le premier qui est le plus grave , sâappelle en grec Hypaton 3 le second , parce quâil est au milieu , sâappelle Meson 4 le troisiĂšme sâappelle Synemmenon,, câest-Ă -dire joint aux autres le quatriĂšme sâappelle 1 Quoique Vitruve mette ceux-ci gĂ©nĂ©ralement au yiombre de dix , ils nâĂ©toient quelquefois quâau nombre de neuf et mĂȘme de huit; parce que deux sons voisins quelquefois se confondoient et quelquefois se sĂ©paroient. 2 On lisoit dans les premiĂšres Ă©ditions , in diatono çpro tonum ; comme Perrault et Galiani , jâai suivi la ©Direction de Meibomius , qui lit , in diatono quoque JieinitonĂźunh 3 LâĂ©pithĂšte dâHypaton, qui signifie supĂ©rieur , ne convient pas prĂ©sentement Ă ce tĂ©tracorde qui contient les sons les plus bas ; mais les anciens le nommoient ainsi, parce que la disposition de lâĂ©chelle qui contenoit leurs sons, Ă©toit toute contraire Ă celle qui contient les nĂŽtres les sons graves dans la leur Ă©tant placĂ©s en haut comme on le voit dans la table Ă la fin de ce livre. 4 Câest-Ă -dire moyen. Diezeugmenon 2°9 LIVRE V; C h A p. it. Diezeugmenon i; câest-Ă -dire disjoint le cinquiĂšme , qui est le plus aigu, sâappelle pour cela HypcrbolcBon 2 . Les consonnances que la voix humaine peut exprimer , et que les Grecs appellent symphonies , sont au nombre de six , savoir la quarte , la quinte , lâoctave , la quarte redoublĂ©e , la quinte redoublĂ©e , et la double octave. On leur a donnĂ© ces noms , Ă cause du nombre des sons oĂč la voix sâarrĂȘte en changeant ses inflexions ; comme lorsquâelle passe de son premier ton au quatriĂšme , on lâappelle quarte si elle passe au cinquiĂšme on lâappelle quinte si elle passe au huitiĂšme , on lâappelle octave si elle passe au huitiĂšme et demi, on lâappelle quarte sur lâoctave si elle passe au neuviĂšme et demi , on lâappelle quinte sur lâoctave si elle passe au quinziĂšme , on l'appelle double octave car dans la musique vocale , comme dans lâinstrumentale , on ne peut tirer aucune consonnance du premier ton au second , ni au troisiĂšme, ni au sixiĂšme , ni au septiĂšme on les peut seulement tirer comme nous lâavons dit plus haut, Ă la quarte , Ă la quinte, et consĂ©cutivement jusquâĂ la double octave qui est toute lâĂ©tendue que la voix peut avoir sans trop se forcer lâunion de ces diffĂ©rens sons forme les accords que les Grecs appellent QQĂŽyyoĂŻ. 3 REMARQUES. LâĂ©pithĂšte dâharmonique , que Yiiruve ajouie au mot musique , la premiĂšre fois quâil lâemploie au commencement de ce chapitre , indique quâil traitera seulement de la musique harmonique qui est diffĂ©rente de la rhytbmique , de la mĂ©trique , de lâorganique, de la poĂ©tique et de lâhipo- critique , qui contiennent les prĂ©ceptes de la danse , de la rĂ©citation , du jeu des instrumens , des vers et des gestes des pantomimes , de mĂȘme que lâharmonique contient les prĂ©ceptes du chant; les six objets que nous venons de citer Ă©toient le sujet de six espĂšces de musique , selon la division de Porphyre sur lâharmonie de PtolomĂ©e. Revenons prĂ©sentement Ă lâharmonie. Toute celte science consiste principalement dans la comparaison des sons du grave Ă lâaigu de sorte que , comme le nombre des sons est infini , lâon peut dire , dans le mĂȘme sens , que celte science est infinie dans son objet. On ne connoĂźt point de bornes prĂ©cises Ă lâĂ©tendue des sons du grave Ă lâaigu , et quelque petit que puisse ĂȘtre lâintervalle qui est entre deux sons , on le concevra toujours divisible par un troisiĂšme son ; mais la nature et lâart ont limitĂ© celte infinitĂ© dans la pratique de la musique. On trouve bientĂŽt , dans les instrumens , les bornes des sons praticables , tant au grave quâĂ lâaigu. Alton gez ou raccourcissez jusquâĂ un certain point une corde sonore , elle nâaura plus de son. Lâon ne peut pas non plus augmenter ou diminuer Ă volontĂ© la capacitĂ© dâune flĂ»te ou dâun 00 Ce tĂ©tracorde se nommoit en grec diezeugmenon, 2 Câest-Ă -dire extrĂȘme, eâest-Ă dire sĂ©parĂ© , parce quâil nâĂ©toit pas liĂ© au tĂ©tra- 3 L a ta bl e dâAristoxĂšne se trouve Ă la fin des recorde synemmenon, comme celui ci lâĂ©toit au tĂ©tracorde marques de ce chapitre, meson , et ce dernier Ă lâHypaton. a 7 210 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. tuyau dâorgue , ni sa longueur; il y a des bornes, passĂ© lesquelles, ni lâun ni lâautre ne rĂ©sonne plus. L'inspiration a aussi sa mesure et ses loix trop foible elle ne rend point de son , trop forte elle ne produit quâun cri perçant quâil est impossible dâapprĂ©cier. Enfin il est constatĂ© par mille expĂ©riences que tous les sons possibles sont renfermĂ©s dans une certaine latitude , passĂ© laquelle , ou trop graves ou trop aigus , ils ne sont plus apperçus , ou deviennent inapprĂ©ciables Ă lâoreille. Dâun autre cĂŽtĂ© , lâon voit par la gĂ©nĂ©ration harmonique des sons , quâil nây en a , dans leur infinitĂ© possible , quâun trĂšs-petit nombre qui puissent ĂȘtre admis dans le systĂšme harmonieux , car tous ceux qui ne forment pas des consonnanoes avec les sons fondamentaux , ou qui ne naissent pas , mĂ©diatement ou immĂ©diatement des diffĂ©rences de ces consonnances , doivent ĂȘtre proscrits du systĂšme. On appelle donc systĂšme , la somme de tous les sons qui peuvent ĂȘtre employĂ©s dans la musique ; on appeloit encore systĂšme , une mĂ©thode de calcul qui dĂ©terminoit leurs rapports , câest dans ce dernier sens , que les anciens distinguoient le systĂšme pythagoricien et le systĂšme aris- toxĂ©nien ; il ne sera ici question que du second , qui est le seul dont parle Yitruve. Les pythagoriciens fixoient tous les intervalles , tant consonnans que dissonans , par le calcul des rapports. Les aristoxĂ©niens , au contraire , disoient sâen tenir au jugement de lâoreille. Leur dispute comme lâobserve Jean-Jacques Rousseau nâĂ©toit dans le fond quâune dispute de mots , puisquâils rendoient tous deux les mĂȘmes idĂ©es , mais avec des termes diffĂ©rens. Les anciens avoient formĂ© des tables ou modĂšles , qui prĂ©sentoient Ă lâoeil lâĂ©tendue gĂ©nĂ©rale de tous les sons dâun systĂšme; ils nommoient ces tables, diagrame 3 câest ce que nous appelons aujourdâhui Ă©chelle , gamme , clavier. Celle qui reprĂ©sentoit le systĂšme dâArisloxĂšne , que Yitruve avoit placĂ© dans son ouvrage , est perdue , elle ne se trouve pas non plus dans les trois livres des Ă©lĂ©mens de la musique harmonique dâAristoxĂšne , qui est le seul ouvrage de ce cĂ©lĂšbre philosophe , disciple dâAristote , qui soit parvenu jusquâĂ nous ; quoique , dâaprĂšs ce que dit Suidas , il avoit Ă©crit quatre cents cinquante- trois volumes. Tous les interprĂštes ont cherchĂ© de supplĂ©er Ă celte table , par une autre quâils ont composĂ©e sur son systĂšme. Je donne ici celle de M. Galiani. Pour bien comprendre cette table , ou diagramme , il faut savoir , avant tout , que par son , sonitus 3 pĂŽcyyoi , on* entend la position dâun son, ou, pour parler comme lĂšs modernes , la position dâune note. Les anciens Grecs avoient donnĂ© aux diffĂ©rens sons , ou plutĂŽt aux cordes de leurs lyres , comme on le verra toutâĂ -lâheure , les noms suivans ; jây joins leur signification françoise proslcimbanomenos 3 ajoutĂ©e HypatĂ© 3 supĂ©rieure ; ParhypatĂ© 3 prĂšs de la supĂ©rieure ; ' Lichanos 3 Ă©loignĂ©e ou indexte ; JMese 3 moyenne; P arcanes e 3 prĂšs de la moyenne; Trite, troisiĂšme ; Paranete 3 prĂšs de la derniĂšre ; Nete 3 la derniĂšre. La musique moderne a abandonnĂ© tous ces noms ; elle y a suppléé dâabord par les premiĂšres lettres de lâalphabet, et ensuite par les notes dont nous nous servons aujourdâhui. Ainsi on appelle le premier A mi la 3 ou simplement la j le second B fa si 3 ou si ; le troisiĂšme C sol ut 3 ou > LIVRE V, C h a p. iy. 211 âąK ut j le quatriĂšme D la re , ou re y le cinquiĂšme E si mi, ou mi; le sixiĂšme F ut fa, ou fa y le septiĂšme G re sol , ou sol. Ensuite on commence dâautres octaves, en haut ou en bas, avec les mĂȘmes notes. La position des sons ou des notes, variant continuellement du grave Ă lâaigu, et de lâaigu. au grave , dans la musique ancienne comme dans la moderne , on entend par intervalle , la diffĂ©rence dâun son Ă un autre , entre le grave et lâaigu ; câest - Ă - dire tout lâespace que lâmi des deux auroit Ă parcourir pour arriver Ă lâunisson de lâautre. Souvent la distance dâun son Ă un autre nâest pas dâun ton entier , mais dâun demi-ton ou dâun quart de ton ; pour indiquer cela , on se sert de ce signe X , qui signifie un diĂšse proprement dit , qui Ă©quivaut Ă un intervalle dâun quart de ton ensuite de cet autre signe ^ qui indique le demi-ton que nous appelons trĂšs-improprement le diĂšse. Les lettres a , b , c , d , etc., placĂ©es Ă cĂŽtĂ© de chaque nom ancien , font connoitre les notes modernes qui correspondent aux anciens termes grecs ; et la colonne des lettres majuscules , avec celle des noms des notes modernes , qui sont mises Ă cĂŽtĂ© de la table , font connoitre les notes que ces lettres indiquent. Celte table forme le recueil complet de tous les sons que les anciens employoient dans les trois dilfĂ©rens genres. Les anciens divisoient lâĂ©chelle , qui contenoit tous les sons dont ils se servoient , en plusieurs tĂ©tracordes , composĂ©s chacun de quatre sons ou cordes , qui formoient lâaccord de leur lyre ou C3 , thare. Chacune des cordes ne rendoit quâun son , ainsi le terme de corde ou de son , en parlant de la musique des anciens , signifie la mĂȘme chose , parce quâils ne touchoient pas les cordes pour leur donner des sons dilfĂ©rens comme nous faisons. Chaque son avoit sa corde , comme il lâa encore aujourdâhui dans la harpe , le forlĂ©-piano , etc. Voici les noms de ces tĂ©tracordes le plus grave de tous, et qui se trouvoit placĂ© un ton au- dessus de la corde proslambanomenos, sâappeloit le tĂ©tracorde-hypaton , ou des principales ; le second en montant , lequel Ă©toit toujours conjoint au premier , sâappeloit le tĂ©tracorde-meson ou des moyennes ; le troisiĂšme , quand il Ă©toit conjoint au second et sĂ©parĂ© du quatriĂšme , sâappeloit le tĂ©tracorde-synemmenon ou des conjointes ; mais quand il Ă©toit sĂ©parĂ© du second , et conjoint au quatriĂšme , alors ce troisiĂšme lĂ©lracorde prenoit le nom de diezeugmenon ou des divisĂ©es ; enfin le quatriĂšme sâappeloit le tĂ©tracorde-hyperbolĆon ou des excellentes. LâArĂ©tin ajouta Ă ce systĂšme , un cinquiĂšme tĂ©lracorde que Meibomius prĂ©tend quâil ne fit que rĂ©tablir. Quoiquâil en soit, les systĂšmes particuliers des tĂ©tracordes firent enfin place Ă celui de lâoctave qui les fournit tous. Celui-ci est composĂ© de huit sons comme lâautre lâĂ©toit seulement de quatre. Les anciens distinguoient en outre trois dilfĂ©rens genres , qui sont le diatonique , le chromatique et lâenharmonique, nommĂ© simplement harmonique par Vitruve. Par genre, les anciens entendoieut la division et la disposition du tĂ©tracorde , considĂ©rĂ© dans les intervalles des quatre sons qui le composent. La bonne constitution de lâaccord du tĂ©tracorde , câest-Ă -dire, lâĂ©tablissement dâun genre rĂ©gulier, dĂ©pendoit des trois rĂšgles suivantes tirĂ©es dâAristoxĂšne , et rapportĂ©es par Vitruve dans ce chapitre. La premiĂšre Ă©toit , que les deux cordes extrĂȘmes du tĂ©tracorde dĂ©voient toujours rester immobiles , afin que leur intervalle fĂ»t toujours celui dâune quarte juste ou du diatessaron. Quant aux deux cordes moyennes , elles varioient Ă la vĂ©ritĂ© j mais lâintervalle de la lichanos Ă la mĂšse ne 2 7 . DES TETRA CO R DE S. 212 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. devoit jamais passer deux tons , ni diminuer au-delĂ dâun ton j de sorte quâon avoit prĂ©cisĂ©ment lâespace dâun ton pour varier lâaccord de la lichanos , et câest la seconde rĂšgle. La troisiĂšme Ă©loit que lâintervalle de la parypate ou seconde corde Ă lâhypate, nâexcĂ©dĂąt jamais celui de la meme parypate Ă la lichanos. Comme en gĂ©nĂ©ral cet accord pouvoit se diversifier de trois façons , cela constituoit les trois principaux genres dont parle Vilruve , savoir le diatonique , le chromatique et 1 enharmonique. Ces deux derniers genres, oĂč les deux premiers intervalles faisoient toujours ensemble une somme moindre que le troisiĂšme intervalle , sâappeloient , Ă cause de cela j genres serrĂ©s ou Ă©pais. Chaque genre avoit son Ă©chelle particuliĂšre. Pour faciliter lâintelligence de tout ceci, jâai cru devoir employer les signes , ou caractĂšres , dont on se sert pour Ă©crire aujourdâhui la musique , et auxquels nous sommes accoutumĂ©s. On trouvera donc ci-dessous indiquĂ©s , avec les notes modernes , tous les sons ou cordes , tels quâils etoient divisĂ©s et disposĂ©s dans les trois genres des anciens. Les notes blanches indiqueront les extrĂȘmes de chaque tĂ©tracorde qui sont les sons immobiles qui ne changent point et sont toujours les mĂȘmes dans tous les genres. Les noires indiqueront les sons mobiles qui varient selon les diffĂ©rens genres. /mmĂ timm,' ifnzmmeww / Quoique Yitruve dise quâil y a dix-huit sons dans chacun des trois genres , ce nâest que dans ! le seul genre enharmonique quâon trouve vraiment dix-huit sons diffĂ©rens , comme on le voit dans i la table placĂ©e Ă la fin des remarques de ce chapitre. Car dans le genre chromatique , on nâen trouve que dix-sept 5 puisque le son de la paramĂšse du tĂ©tracorde - diezeugmenon est le mĂȘme que celui de la paranete du tĂ©lracorde-synemmenon. Dans le genre diatonique , il y a seulement seize sons -, parce que celui de la trite et de la paranete du tĂ©lracorde-diezeugmenon , sont les mĂȘmes que ceux de la paranete et de la nete du tĂ©tracorde - synemmenon. MalgrĂ© cela, Vitruve a raison de dire que , dans chaque genre , il y a dix-huit sons ; car ceux-ci , quoique rĂ©pĂ©tĂ©s deux fois dans le mĂȘme genre , doivent toujours faire nombre , puisque dans chaque tĂ©lracorde oĂč ils se trouvent , ils ont des rapports diffĂ©rens avec les sons qui les composent. Nous avons vu , tout-Ă -lâheure 3 que , nonobstant que le genre enharmonique procĂšde par deux diĂšses et un diton , le chromatique par deux demi - tons et un triemiton et le diatonique par un demi ton et deux tons ; que cependant dans tous les trois genres , ces trois intervalles de chaque tĂ©lracorde Ă©galoient ensemble un intervalle de deux tons et demi , ce qui forme la consonnance de quarte. Il est clair , ensuite , que si les trois genres commencent par la mĂȘme corde ou son , qui est la proslambanomĂšne , ou si lâon veut , lâhypaie-hypalon , un mĂȘme son , par-consĂ©quent , doit commencer toute quarte ou tous les tĂ©lracordes de chaque genre , le son qui termine un tĂ©tracorde Ă©tant celui qui commence le suivant. * Les tĂ©tracordes nâĂ©tant quâau nombre de cinq , il semble quâil ne devroit y avoir que six cordes immobiles ; cependant il sâen trouve huit, comme le dit lâauteur , et comme on peut le voir dans la table, parce que le tĂ©tracorde diezeugmenon , câest-Ă -dire des sĂ©parĂ©es ne commence pas par la nete 3 ou derniĂšre corde du tĂ©lracorde synemmenon , comme les autres tĂ©lracordes ; mais par une corde particuliĂšre , nommĂ©e paramese , qui forme la septiĂšme corde immobile. La huitiĂšme est la proslambanomĂšne, la premiĂšre de toutes et la surnumĂ©raire ou ajoutĂ©e, comme son nom le signifie , laquelle nâentre dans aucun des tĂ©tracordes. Dans la table Ă la fin des remarques de ce chapitre , on a dĂ©signĂ© toutes les cordes immobiles avec des lettres majuscules, comme ProslambanomĂšne 3 Hypate, etc. Dans la table avec les signes de la musique moderne , elles le sont par des notes blanches. Il faut encore remarquer que , quoique les sons nâeussent que neuf noms diffĂ©rens comme nous lâavons vu dans la table citĂ©e , ils Ă©toient cependant au nombre de dix-huit dans chaque lĂ©lraâ corde ; et cela , parce que les sons du deuxiĂšme tĂ©tracorde avoient les mĂȘmes noms que ceux du premier ; et ceux des trois derniers avoient les mĂȘmes noms entre eux , tellement que pour les distinguer on ajouloit, au nom de chaque son , celui de leur tĂ©tracorde aiusi lâon disoit lâhypate- liypalon , câest-Ă -dire du tĂ©tracorde hypaton , hypate-meson , câest-Ă -dire du tĂ©lracorde meson. On disoit de mĂȘme la trite du synemmenon , la trite du diezeugmenon , et la trite de lâhyperbolĂŠon. Mous observerons enfin que les huit sons consians ou immobiles , ont , dans tous les trois genres , un nom et une valeur commune ; et les dix autres , qui sont les mobiles , ont des noms communs, mais des valeurs diffĂ©rentes par exemple, la tierce de lâhypate-hypaton , sâappelle dans les trois genres , lichanos - hypaion cependant sa valeur diffĂšre dans chacun , puisque la lichanos est un demi-ton plus haut que celui de lâenharmonique , et la lichanos du diatonique est L'ARCHITECTURE DE VITE EVE. 2l4 encore un demi-ion pins haut que celle du chromatique. Il rĂ©sultoit de cela , que quelques tons qui se trouvoient dans un genre , ne se trouvoient pas dans un autre , et que rĂ©unissant ensemble tous les sons dont les anciens se servoient dans les trois genres , au lieu de dixâhuit, ils en avoient vingt-cinq ? diffĂ©rons lâun de Pautre , rĂ©pandus dans les trois genres, comme Pindiquent les lettres majuscules placĂ©es en marge de la table ciiĂ©e. Les anciens, comme nous le voyons Ă la fin de ce chapitre , comploient six consonnances. i.° Le diatessaron , que nous nommons la quarte ; 2 .° la diapente , que nous nommons la quinte ; 5.° Ic diapason , que nous nommons Poctave ; 4-° le diapason avec le diatessaron que nous nommons la quarte redoublĂ©e ; 5.° le diapason avec la diapente que nous nommons la quinte redoublĂ©e ; 6.° le disdiapason que nous nommons la double octave. Si lâon examine bien la chose , il nâexiste cependant que trois consonnances , qui sont la quarte , la quinte et lâoctave ; parce que les trois autres sont du mĂȘme genre , et ont les mĂȘmes valeurs que les premiĂšres ^ comme leurs noms le dĂ©montrent. Elles ne different de ceux-ci que parce que les sons forment un octave plus aigus. Nous avons introduit dans la musique moderne , des sons trĂšs-aigus , ce qui a rendu notre Ă©chelle beaucoup plus Ă©tendue que celle des anciens , en lui donnant plus de deux octaves , et par- consĂ©quent plus de six consonnances ; mais lâĂ©chelle des anciens, nâayant que deux octaves, Yitruve a raison de dire quâil nây avoit que six consonnances , parce que dans celte Ă©chelle , il ne pouvoit y en avoir davantage. Dans ce chapitre et dans le suivant , nous avons conservĂ© beaucoup de termes grecs , parce que notre musique diffĂšre trop de celle des anciens , pour que nous y puissions trouver des exemples et des termes qui nous donnent des idĂ©es exactes de tous les objets qui faisoient, chez eux , partie de cette science. Si Yitruve sâexcuse dâavoir employĂ© des termes grecs , parce quâils nâavoient pas dâĂ©quivalent en latin , quoique la musique latine fĂ»t la mĂȘme que la grecque, son excuse sera bien plus valable pour nous , dont la musique est si diffĂ©rente. Ce nâest pas que les latins , ni nous , nous manquassions dâexpressions pour rendre les mots grecs ; car on les trouve tous traduits en italien dans Barbaro et autres ; mais Yitruve enlendoit, ainsi que nous , que ces termes , devenus techniques, Ă©toient alors tellement propres et identiques Ă lâart , que pour ĂȘtre entendus , lorsquâon en parloit , il falĂźoit sâen servir tels quâils Ă©toient , et non en les traduisant. Encore aujourdâhui dans tous les arts que nous avons appris des Grecs , nous avons conservĂ© presque tous les termes techniques de leur langue. Ainsi un gĂ©omĂštre dira un cube et non un dĂ©. Quoique y-tĂ«oq en grec signifie en françois un dĂ© Ă jouer. Câest Ă ceux qui enseignent les arts Ă expliquer ces termes. Par exemple , nous avons dit que ce que les anciens appeloient diagramme nous lâappelons gamme ou Ă©chelle , et quâils avoient des Ă©chelles pour chacun des trois genres. 1 en p LIVRE V, Chap. i n5- ARISTOXĂNE. GENERA. A / la . ut re la Y la Xk ut g DIĂTONICUM. hemitonium. tonus, tonus. A Proslambanomenos. b Hypate hypaton. c Parhypate hypaton. d Lichanos hypaton. e Hypate meson. f Parhypate meson. g Lichanos meson. A MeSE. ÂŁÂŁa Trite synemmenon. ef B PARAMESE CHROMATICUM. hemitonium. hemiton. trihemiton. a Proslambanomenos. c Paranete E {syn. re ^ D Nete syn. > § b Hypate hypaton. c Parhypate hypaton. ÂŁÂŁ c Lichanos hypaton, \ - e Hypate meson. f Parhypate meson. ^[f Lichanos meson. _ a Mese. ^ a Trite synemmenon. B Parames. HARMONICUM. diesis. diesis. ditonus. A Proslambanomenos. b Hypate hypaton. X b Parhypate hypaton. c Lichanos hypaton. e Hypate meson. X e Parhypate meson. f Lychanos meson. c Trite diez. b Paranete synemm. E q X E X mi g F fa " i J - g G s °/ A g la ^ d Paranete die- zeug. e -l e Nete diez. f Trite hyperbolĆon. g Paranete hyperbolĆon. A Nete hyperbolĆon. I l n Nete sy~ nemm. c Trite diez. Paranete diez. - a Mese. X a Trite synemmenon. Paranete synemmenon. 1 b Paramese. Xb Trite. c Paranete diez. e-, e Nete diez. f Trite hyperbolĆon. Paranete hyperbolĆon. A Nete hyperbolĆon. . d Nete syn. / e â- e Nete die, X e Trite hyperbolĆon. f Paranete hyperbolĆon. A Nete hyperbolĆon. LâARCHITECTURE DE VITRUVE. \ Ăąt6 CHAPITRE Y. Des Vases du Théùtre, Suivant ces principes et les rĂšgles de mathĂ©matiques, on fait des vases d'airain proportionnel Ă la grandeur du théùtre ; câest-Ă -dire quâon les fabrique de façon quâen les frappant, ils rendent lâun le son de la quarte , lâautre celui de la quinte, et ainsi jusquâĂ la double octave. On les place ensuite dans les petites cases pratiquĂ©es entre les siĂšges du théùtre; en observant les rĂšgles Ă©tablies par la musique i, et de maniĂšre quâils ne touchent pas le mur , mais quâil rĂšgne un espace vuide tout autour et au - dessus ; il faut aussi quâils soient inclinĂ©s, ayant le cĂŽtĂ© , qui regarde la scĂšne, Ă©levĂ© par un soutien qui ne peut avoir moins dâun demi-pied de haut. On laisse devant ces petites cases, perpendiculairement, au degrĂ© dâen-bas , des ouvertures longues de deux pieds , et hautes dâun demi-pied. Voici la rĂšgle dont on se sert pour dĂ©terminer la place oĂč il faut les faire. Si le théùtre nâest pas bien grand , au milieu de sa hauteur 2 on trace une ligne, autour de laquelle on dispose les voĂ»tes des treize petites cases quâon sĂ©pare par douze intervalles Ă©gaux. Les vases dont nous avons parlĂ© plus haut, qui sonnent la netĂ©-hyperbolĂŠon , se placent dans les premiĂšres cases Ă l une et Ă f autre extrĂ©mitĂ©s. Les secondes cases , Ă cĂŽtĂ© des premiĂšres seront pour les vases qui sont accordĂ©s Ă la quarte avec les premiers , et qui sonnent la netĂ© - diezeug- menon. Les troisiĂšmes seront pour ceux qui sont accordĂ©s Ă la quarte 3 qui forme la paramĂšse. Les quatriĂšmes seront pour ceux qui sont accordĂ©s Ă la * Planche XVII. me fig. 3 et 4- 1 Câest-Ă -dire que celui qui sera placĂ© dans la deuxiĂšme case , rendra un ton qui sera la quarte de celui qui sera placĂ© dans la premiĂšre ; teĂŻui de la troisiĂšme case rendra un ton qui sera la quinte du deuxiĂšme, et ainsi de suite , comme on le verra tout-Ă -lâheure, 2 Il faut faire attention que par le mot Théùtre les Romains entendoient proprement la masse de tous les degrĂ©s sur lesquels les spectateurs Ă©toient assis, et qui > formoicnt plusieurs demi-cercles ; la place oĂč les acteurs rĂ©citoient leur rĂŽle , se nommoit pulpitum , scena ou proscenium. Ainsi lorsque Yitruve dit quâil faut tracer un ligne au milieu de la hauteur du théùtre , media altitu- dinis transversa regis designetur , câest-Ă -dire , en traduisant littĂ©ralement , quâil faut Ă©tablir un plan qui traverse le milieu de la hauteur du théùtre , il entend quâil faut tracer au milieu de la hauteur de toute la masse des degrĂ©s , une ligne qui suive le contour du demi-cercl que forment les degrĂ©s, dans toute son Ă©tendue. 3 11 faut entendre que câest avec les seconds que ces troisiĂšmes vases sont accordĂ©s Ă la quarte. quarte LIVRE V , C h a p. y. 217 1 âąf b* quarte et qui sonnent la nele-synemmenon. Les cinquiĂšmes seront pour ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent la mese. Les sixiĂšmes seront pour ceux qui sont Ă la quarte et qui forment 1 hypate - meson enfin il y en aura une au milieu dans laquelle sera le vase accordĂ© Ă la quarte qui sonne lâhypate-hypaton. La disposition de ces vases fait que la voix qui vient de la scĂšne comme dâun centre , sâĂ©tend en rond, rĂ©sonne dans la cavitĂ© des vases et devient plus sonore et plus harmonieuse Ă cause des consonnances que forment ces diffĂ©rens accords. Mais si cest un théùtre ample et fort grand , on divise alors sa hauteur en quatre parties , pour y faire trois rangs de petites cases ; le premier pour le genre enharmonique , le second pour le genre chromatique et le troisiĂšme pour le genre diatonique. Le premier rang, commençant par en bas, sera destinĂ© aux tons enharmoniques ; on le dispose dâaprĂšs les rĂšgles que nous venons de prescrire pour les petits théùtres. Quant au rang du milieu , voici comme on le dispose on placera dâabord aux deux extrĂ©mitĂ©s, dans les coins, les vases qui sonnent lâhyperbolĂŠon du chromatique ; dans les deux cases suivantes , ceux qui sont accordĂ©s Ă la quarte et qui sonnent le diezeugmenon du chromatique; dans les troisiĂšmes, ceux qui sont accordĂ©s Ă la quarte et qui sonnent le synemmenon du chromatique ; dans les quatriĂšmes , ceux qui sont accordĂ©s Ă la quarte et qui sonnent le meson du chromatique ; dans les cinquiĂšmes, ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent 1 hypaton du chromatique ; dans les sixiĂšmes, ceux qui sonnent la paramĂšse, qui , par une mĂȘme conson- nance , sont accordĂ©s Ă la quinte avec lâhyperbolĂŠon et Ă la quarte du meson du chromatique. On ne place rien dans la case du milieu , parce que les tons quâon vient de nommer, sont les seuls dans le genre chromatique , dont on puisse tirer des consonnances. Dans la division ou le rang des cases dâen-haut, on placera dans les premiĂšres, qui sont aux extrĂ©mitĂ©s , les vases qui sonnent 1 hyperbolĂŠon du diatonique ; dans les secondes , ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent le diezeugmenon du diatonique ; dans les troisiĂšmes, ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent le synemmenon du diatonique ; dans les quatriĂšmes , ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent le meson du diatonique ; dans les cinquiĂšmes, ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent lâhypaton du diatonique ; dans les sixiĂšmes, ceux qui sont Ă la quarte et qui sonnent la proslambanomenos. Le vase de la case du milieu sonnera la mese , qui est accordĂ©e Ă lâoctave de la proslambanomenos et Ă la quinte de lâhypaton diatonique. Si lâon veut mieux et plus aisĂ©ment comprendre ceci , il faut jeter un coup-dâĆil sur la table diagrammatique qui se trouve Ă la fin de ce livre , dans laquelle Aris- loxĂšne , avec un travail infini et la plus grande intelligence , est parvenu Ă rĂ©unir 28 218 LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. tous les accords et les consonnances qui peuvent entrer dans les modulations de la h musique ; si lâon fait attention aux rĂšgles qu elle contient, Ă lâeffet que produit la i'L voix et Ă ce qui peut la rendre plus agrĂ©able, il sera aisĂ© de donner aux théùtres ;U toute la perfection possible. On dira , peut-ĂȘtre , que dans tous les théùtres quâon Ă©lĂšve tous les ans Ă Rome, on ne remarque pas quâon ait employĂ© aucuns de ces moyens. On se trompe en cela , puisque si on rĂ©flĂ©chit que tous nos théùtres publics sont entiĂšrement faits de bois et couverts de planches , on trouvera quâils rĂ©sonnent naturellement; comme les musiciens nous le font assez connoĂźtre , lorsquâils veulent entonner des tons aigus car ils se tournent alors vers les portes de la scĂšne , ce qui contribue Ă rendre leur voix plus sonore ; mais chaque fois quâon bĂątit un théùtre avec des matĂ©riaux solides , câest-Ă -dire , oĂč lâon emploie le ciment avec les pierres de tailles, le marbre , ou dâautres matiĂšres qui ne produisent aucune rĂ©sonnance , il est indispensable , alors , dâobserver toutes les rĂšgles que je viens de prescrire. Si lâon nous demande lâexemple dâun théùtre oĂč ces choses sont pratiquĂ©es , nous ne pouvons le montrer dans Rome ; mais il en existe dans plusieurs endroits de lâItalie , et dans beaucoup de villes de la GrĂšce. INous savons de plus , que Lucius Murmuras, aprĂšs avoir dĂ©truit le théùtre de Corinthe , transporta Ă Rome les vases dâairain qui sây trouvoient, et quâil les consacra avec les autres dĂ©pouilles dans le temple J dc la Lune. Plusieurs architectes trĂšs-habiles , qui ont construit des théùtres dans de petites villes qui nâavoient pas de moyens sufiisans, se sont aussi servis de vases de poterie, quâils ont choisi bien sonores , et les ont disposĂ©s de la maniĂšre indiquĂ©e , ce qui a produit le meilleur effet. REMARQUES. Les premiers théùtres dans la GrĂšce Ă©toient de charpente , elle nâen ent pas dâautre jusquâau temps de Craterus ; mais un jour que ce poĂšte faisoit jouer une de ses piĂšces , la partie du théùtre oĂč les spectateurs Ă©toient assis , se trouvant trop chargĂ©e-, se rompit et fondit lout-Ă -coup. Cet accident engagea les AthĂ©niens Ă Ă©lever des théùtres plus solides , comme nous le voyons dans ce, livre ; ils en firent construire qui ne le cĂ©doient en magnificence Ă aucun Ă©difice public, pas mĂȘme aux temples des dieux. On a dĂ©jĂ vu quâĂ Rome aussi, les théùtres ne se bĂątissoient anciennement que de bois , et ne servoient que pendant quelques jours. Lucius Mummius fut le premier qui rendit ces théùtres de bois plus splendides , en enrichissant les jeux quâon fit Ă son triomphe , des dĂ©bris du théùtre de Corinthe. Ensuite Scaurus Ă©leva le sien avec une telle magnificence , que la description du théùtre paroĂźt appartenir Ă lâhistoire des fĂ©es. Le théùtre suspendu et brisĂ© de Scribonius Curion , moins magnifique que celui-ci , mais bien plus Ă©tonnant , par le Vf âą>*' J* jldlf .lĂ©lti' 0 ;lal 1 , j ami Ă© ' twa Ăźiilffl fi* j j 1 il- LIVRE V, Chap. y. 219 ĂŻ genre dâindustrie quâil offroit , Ă©toit de bois , et composĂ© de deux hĂ©micycles de gradins , aussi considĂ©rables que ceux des deux autres théùtres ; ces deux parties se tournoient Ă volontĂ© , par le moyen dâun pivot qui les supportoit ; de plus , elles sâĂ©loignoient et sâapprochoient comme on le jugeoit Ă propos. Les fĂȘtes et spectacles que Curion donnoit avant le repas , Ă©tant terminĂ©s , crainte que ceux qui Ă©toient sur les deux théùtres ne se moquassent les uns des autres , il fit t tourner les faces de ces deux théùtres , et ensuite les remettre de front lâun vis-Ă -vis de lâautre 1. PompĂ©e bĂątit, le premier, un magnifique théùtre de pierre et de marbre, Ă lâimitation de celui de MitylĂšne, dont il rapporta le plan. Nous voyons dans ce chapitre que câĂ©toit le seul qui existoit du temps de Yitruve. Marcellus en construisit un autre, dans la neuviĂšme rĂ©gion de Home, et ce fut Auguste qui le consacra. Les théùtres de pierres se multipliĂšrent bientĂŽt ; on en comptoit jusquâĂ quatre dans le seul camp de Flaminius. Trajan en Ă©leva un des plus superbes quâAdrien fit ruiner. '[ Ces théùtres de pierres nâĂ©toient pas favorables Ă la voix, comme le dit Vitruve dans ce chapitre; elle ne pouvoit y retentir comme dans ceux faits de bois , qui Ă©toient entiĂšrement revĂȘtus de plan- ^ ffi. ches ; ce qui formoit une caisse immense qui produisoit , en grand , un effet semblable Ă celui que produit la caisse dâun violon , ou dâun autre instrument de ce genre. Pour obvier Ă ce dĂ©faut des théùtres de pierres , les anciens employoient un moyen trĂšs-ingĂ©nieux , dont nous avons perdu lâusage. Nous retrouvons , dans ce chapitre , tous les dĂ©tails de cette industrie on pratiquoit de petites cases sous les gradins, ou siĂšges; elles aVoient une ouverture dans le plan vertical des siĂšges , en face de la scĂšne ; on y plaçoit des vases de bronze faits en forme de doche , et de diffĂ©rentes grandeurs , cependant proportionnĂ©s les uns avec les autres, afin de rendre les dilfĂ©rens tons du grave Ă lâaigu. On verra leur forme , et la maniĂšre de les placer, dans la troisiĂšme et quatriĂšme figures de la XVII e pl. Vitruve nous apprend dans ce chapitre que tous les théùtres , mĂȘme faits de pierres , nâavoient ! pas toujours des vases de cette espĂšce. Je ne sache pas quâon en ait trouvĂ© , non plus que les cases f qui les contenoient , dans les théùtres dâHerculanum ni de Pompeia quâon vient de dĂ©couvrir. ^ 1 Les petits théùtres nâavoient quâun seul rang de vases , qui rendoient les sons du genre enharmo- nique , et qui formoientwdes accords de quarte , les Tins avec les autf%s ; mais, dans les grands ^ théùtres , il y en avoit trois rangs , un pour chaque genre , et qui formoient les mĂȘmes accords. uslq Mut x Ă* 0^ [ jdI 1 Ces vases Ă©toient uniquement lĂ , pour augmenter le son de la voix , en la faisant retentir, et non pour ĂȘtre frappĂ©s avec des marteaux , comme Cesarini et le pĂšre Kirker lâont cru mal-Ă -propos. On plaçoit les vases qui rendoient les sons les plus aigus', vers les extrĂ©mitĂ©s des coins du théùtre, et ceux qui rendoient les tons graves, au milieu. Le retentissement se faisant sentir avec plus de force dans le milieu oĂč la voix est ramassĂ©e , il convenoit de donner cette situation avantageuse aux vases qui Ă©toient pour les sons graves qui ne se portent pas loin avec la mĂȘme force que les aigus. Dans les trois rangs y le deuxiĂšme Ă©toit accordĂ© Ă la quarte avec le premier , et ainsi des autres. i { 1 Pline ,Liv. XXXVI, Ch. x5. 28. 220 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Le pĂšre Kirker , dans son traitĂ© intitulĂ© De arte magna consoni et dissoni , se vante dâavoir corrigĂ© une faute dans le texte , oĂč Vitruve dit, que le quatriĂšme vase accordĂ© Ă la quarte, sonnera la netĂ© synemmenon. Reperd hoc loco , dit-il , insignem errorem , qui cum musicis prĆceptis consistere non potest , estque diatessaron ad netem synemmenon. Sâil avoit bien compris le texte, il nây auroit pas trouvĂ© de faute , ni ajoutĂ© , mal - Ă - propos , quâil falloil supprimer le mot dia- tessaron , sans cependant se donner la peine de le remplacer par un autre , ou de donner quelque raison pour sa prĂ©tendue correction. Perrault soupçonne ici la mĂȘme erreur , et dâaprĂšs Meibomius , il substitue le mot diapente , Ă celui de diatessaron , et traduit, comme si lâauteur avoit voulu dire , que la nelĂ©-synemmenon sâac- cordoit Ă la quinte avec la netĂ©-liyperbolĂŠon. Ils prĂ©tendent tous deux que la mĂȘme erreur sâest encore glissĂ©e , deux autres fois , dans les cas absolument semblables , oĂč Yiiruve parle des rangs des vases destinĂ©s aux sons chromatiques et diatoniques quâon plaçoit dans les grands théùtres; ils veulent quâon les corrige de mĂȘme, en lisant diapente, au lieu de diatessaron celte mĂȘme expression, constamment rĂ©pĂ©tĂ©e dans les mĂȘmes circonstances , auroit cependant dĂ»'les persuader du contraire. Ce nâest pas quâils eussent tort de dire que la nelĂ©-hyperbolĂŠon sâaccorde Ă la quinte avec la nelĂ©-hyperbolĂŠon ; mais lâauteur ne parle pas de cela , et a voulu dire toute autre chose en examinant bien le sens du texte, on trouvera quâil nâa rien que de trĂšs-naturel , comme je vais le dĂ©montrer. 11 faut considĂ©rer les cinq lĂ©tracordes , dont se servoient les anciens , comme divisĂ©s en deux parties ; lâune contenoit les trois premiers, câest-Ă -dire lâhypate, le meson et le synemmenon ; lâautre le diezeugmenon , et lâhyperbolĂŠon. DâaprĂšs cela , lâauteur nomme dâabord les trois sons de nelĂ©- hyperbolĂŠon, nelĂ©-diezeugmenon et paramĂšse , en ajoutant quâils sâaccordoient entre eux Ă la quarte, comme ils le font en effet. Il nomme ensuite les sons des deux autres tĂ©tracordes, comme dĂ©tachĂ©s, et nâayant aucuns rapports avec ceux-ci ; tellement que , quand il dit que la netĂ© - synemmenon sâaccorde Ă la quarte , il nâentend pas que câest avec les sons dont il a dĂ©jĂ parlĂ© ; mais avec celui quâil va nommer ensuite, câest-Ă -dire avec la mese , qui sâaccorde aussi Ă la quarte avec lâhypate. YoilĂ , comme lâauteur a eu raison de le dire diatessaron ad neten synemmenon. Et si ces critiques avoient un peu rĂ©flĂ©chi , ils ne se seroient pas avisĂ©s de toucher ici au texte, en substituant le mot diapente Ă celui de diatessaron. Nous reviendrons sur cet objet en parlant de la distribution des vases pour les deux autres genres. Yoici comme les tons du genre enharmonique Ă©toient distribuĂ©s dans les petits théùtres , qui aâavoient quâun seul rang de vases. 2 te H tel f es te! cy- o I 4 O a S w h „ a, ĂN , H N 1 § O a > tel g H CB tel S te H tel i a CS a CS a o a H CB El ffl K} tel Ăź> H tel i w 3 H tel a I *i tel Ă> H tel i es Co i tel CB tel ' 5S tel H tel i CS es a o a > tel n» K tel CB tel S! tel H tel i 8 CS ta CS ! CS a o a 3 tel H âąF § es te* o* o o a iitro il ĂŻfliokp St en n - 0as Ăźen'iu LIVRE V, C ii A p. y. 221 Dans les grands théùtres , on plaçoit trois rangs de vases , pour les trois genres ; ceux du rang dâen bas, destinĂ©s Ă rendre les sons du genre enharmonique , Ă©toient distribuĂ©s de la mĂȘme maniĂšre que nous ayons vu quâils lâĂ©toient dans les petits théùtres ; ceux du rang du milieu Ă©toient pour les sons du genre chromatique , et ceux du rang dâen haut, pour ceux du genre diatonique. Lâauteur, en parlant des vases qui composent le second rang , soit pour la briĂšvetĂ©, ou par oubli, nĂ©glige de nommer quels Ă©toient les sons qui dĂ©voient rendre parmi ceux qui composent le genre chromatique ; il se contente de nommer les tĂ©tracordes dâoĂč ils Ă©toient tirĂ©s. Il est aisĂ© cependant de connoĂźlre aussi les sons , parce quâil en spĂ©cifie quelques-uns , et lâon trouve les autres par les intervalles de quarte , de quinte et dâoctave dont il exprime la distance de ceux qui sont spĂ©cifiĂ©s. Par exemple il dit que le vase de la sixiĂšme case de ce rang sonnoit la paramĂšse , et quâil Ă©toit accordĂ© avec celui qui sonnoit lâhyperbolĂŠon dans la premiĂšre , et Ă la quarte "avec lĂ© meson or la quinte de la paramĂšse dans lâhyperbolĂŠon , est la trite , et sa quarte dans le meson est la lichanos. DâaprĂšs cela , puisque tous les autres sons sâaccordoient entre eux , Ă la quarte , il est aisĂ© de les trouver tous , par le moyen de la table. Les premiers vases dĂ©voient donc sonner la trite- hyperbolĂŠon qui est la quinte de la paramĂšse; les seconds la trite - diezeugmenon , et formoient, entre eux , un accord de quarte ; les troisiĂšmes sonnoient la paranĂšle-synemmenon ; les quatriĂšmes la lichanos-meson ; les cinquiĂšmes la lichanos-hypaton ; ces trois derniers sâaccordoient Ă la quarte entre eux et avec la lichanos-meson , qui est la quarte de la paramĂšse fixĂ©e par lâauteur. Perrault, Kirker et Meibomius lisent encore diapente oĂč lâauteur dit diatessaron ad chromaticum diezeugmenon; par-lĂ ils forment une Ă©chelle toute diffĂ©rente de la nĂŽtre. Je crois inutile dâajouter quelque chose , pour la rĂ©futer , Ă ce que jâai dit tout-Ă -lâheure , dans la mĂȘme circonstance , en parlant des vases du premier rang. La disposition des vases du deuxiĂšme rang , pour le genre chromatique, Ă©toit comme il suit, 6 6 H >â âą O 6 3. O I a H "7 N âą c§ a O a hd P >-S p a o r* CD I a cd o ET* ÂŁ0 P O en I S CD CO O a CD et » Ci O en ? a s. O a TJ âș pi âș g bd os bd *âą0 Pi g bd en ba p a o 'T i a § a o CT* P ÂŁ3 O f » *-! P ÂŁ3 fl> a CO I O- es*. ta ! s a o a H â-s h* âą CD $ o s o* o s* o a En parlant des sons du genre diatonique , employĂ©s pour le troisiĂšme rang de vases , lâauteur se borne encore , cette fois , Ă nommer seulement les tĂ©tracordes et non les cordes mais comme il spĂ©cifie pour la sixiĂšme case la proslambanomene, et pour celle du milieu la meson , qui fait lâoctave de la proslambanomene, et la quinte avec une des cordes du tĂ©tracorde hypaton , on comprend aisĂ©ment que celle-ci ne peut ĂȘtre autre que la lichanos-hypaton , qui forme un accord de quinte avec la meson. 222 L ARCHITECTURE DE V I T R U V E. DâaprĂšs cela , puisque tous les autres sons doivent sâaccorder Ă la quarte avec quelques-uns de ceux-ci, on trouvera facilement, avec un peu dâintelligence et le secours de la table , que ces autres sons doivent ĂȘtre ceux de la paranĂšte-hyperbolaeon, et de la paranĂšle-diezeugmenon , qui sâaccordent entre elles Ă Ja quarte , et avec la meson qui est spĂ©cifiĂ©e ensuite ceux de la paranĂšte-synemmenon , de la lichanos-meson et de la lichanos-hypalon , qui sâaccordent entre elles aussi Ă la quarte et avee la lichanos dont lâauteur fixe lui-mĂȘme le ton en lâappelant la quinte de la mese. On a vu la disposition des vases dans les rangs qui contiennent les sons des genres enharmoniques et chromatiques voici celle du genre diatonique. 4 3 âąa âąn P âą-S P S CD r- CD Ă Cfc 3 - O §* O » *0 fi? P D CD CD I B- CD ta CD Psi Cfq âT » »-s P CS CD a CD o cr sa a O O a* W a O en 4 a ? a *0 ÂŁ o en ĂŻ> g td ï» Z O g fcd Z a a en a a o on a ĂŻ> g a z o g a z a o tr sa a o en I t a O a o ET 63 a o âș0 63 "S 63 a CD 63 63 a CD O, N . CD ta CD S CD a o a p â-S P 3 CD r-p CD t CD >* O O §* a CHAPITRE VI. Zte la construction du Théùtre. On dessine le plan du théùtre de la maniĂšre suivante. AprĂšs avoir tracĂ© le circuit de la partie infĂ©rieure, on place un centre dans le milieu a et lâon dĂ©crit tout autour un cercle FFF on inscrit, dans ce cercle , quatre triangles Ă©quilatĂ©raux, et disposĂ©s par intervalles Ă©gaux , i de maniĂšre que lâextrĂ©mitĂ© de leurs angles touche sa circonfĂ©rence. Câest ainsi que les astronomes divisent le cercle pour placer les douze signes cĂ©lestes , dâaprĂšs le rapport qui se trouve entre la musique et les constellations. ** Planches XVI et XVII. gles marquent sur cette circonfĂ©rence douze points qui i Câest-Ă -dire que les pointes des angles de ces trian- la divisent en douze parties Ă©gales. ^ Le cĂŽtĂ© gg de ces triangles qui est le plus prĂšs de la scĂšne , dans l'endroit oĂč .il fait une section dans ce cercle, marque lâĂ©tendue de la façade qui termine la scĂšne. On tirera ensuite une autre ligne parallĂšle bb Ă celle-ci, qui, passant par le centre, a sĂ©parera le pupitre du proscenium, G i de lâemplacement de lâorchestre A. Ainsi le pupitre sera bien plus Ă©tendu que celui des Grecs 2 , ce qui est nĂ©cessaire ; puisque chez nous, tous ceux qui reprĂ©sentent, le font sur la scĂšne, lâorchestre Ă©tant rĂ©servĂ© pour les siĂšges des sĂ©nateurs. Le pupitre ne doit pas avoir plus de cinq pieds de hauteur , afin que ceux qui sont dans Y orchestre puissent voir tous les gestes des acteurs. * On divise les amas de degrĂ©s 3 oĂč sont placĂ©s les spectateurs au théùtre, dans tous les endroits oĂč les angles eee des triangles touchent la circonfĂ©rence du cercle; ces angles dirigent lâalignement des escaliers qui sĂ©parent ces amas jusquâĂ la premiĂšre prĂ©cinction , G au-dessus de laquelle dâautres escaliers sĂ©pareront les amas des degrĂ©s supĂ©rieurs , se dirigeant alternativement sur le milieu des amas dâen bas ; les angles dans le plan dâen bas , qui dĂ©signent les escaliers , sont au nombre de sept ; les cinq autres dĂ©signent les parties qui composent la scĂšne celui du milieu doit ĂȘtre vis-Ă -vis de la porte royale H les deux qui sont auprĂšs , lâun Ă droite , lâautre Ă gauche , doivent correspondre aux portes des Ă©trangers II les deux autres seront en face des passage's LL qui sont dans les coins. La hauteur des degrĂ©s, sur lesquels sont placĂ©s les siĂšges des spectateurs, ne peut avoir moins dâun pied et un palme 4 , ni plus dâun pied et six doigts leur largeur ne peut avoir plus de deux pieds et demi ni moins de deux pieds. REMARQUES. Lâauteur nous apprend dans ce chapitre de quelle maniĂšre les anciens traçoient les plans de leurs théùtres. Ils dĂ©crivoient dâabord un cercle qui marquoit le fond du théùtre , ou lâorchestre câest-Ă -dire lâespace qui est entourĂ© par les degrĂ©s. Jâai entendu du moins comme cela les expres- 1 Le proscenium ou le pupitre du proscenium Ă©toit la mĂȘme chose. Par pupitre on entendoit lâĂ©chafaud ou la masse de maçonnerie sur laquelle la scĂšne Ă©toit Ă©levĂ©e. Ainsi câest comme si Vitruve avoit dit lâĂ©chafaud du proscenium. 2 En jetant un coup-dâĆil sur la planche XVI qui reprĂ©sente le théùtre des Romains , et sur la XVII e qui reprĂ©sente celui des Grecs, on verra dâabord combien le pupitre du théùtre romain Ă©toit plus large que celui des Grecs, et, au contraire, combien lâorchestre grec Ă©toit plus grand que celui des Romains. * Planches XVI. e et XVII.» 3 En latin cunei. Voyez lâexplication de ce mot dans nos remarques Ă la fin de ce chapitre. 4 Un pied et un palme des anciens romains faisoient un peu moins que quatorze pouces de France , et un pied sis doigts un peu plus de quinze. 224 L â A R C H I T E C T U R E DE Y I T R U V E. sions perimetros imi. Perrault et Galiani leur ont donnĂ© le mĂȘme sens , au lieu que Philander , Barbaro et autres ont cru , irĂšs-mal-Ă -propos , que ce cercle devoit contenir toute lâĂ©tendue du plan du théùtre prise en dehors ; aussi nâont-ils pu parvenir Ă en tracer la figure , ou celles quâils en ont tracĂ©es , dâaprĂšs ce principe , sont si opposĂ©es avec le reste du texte , quâil est inutile de prendre la peine de les rĂ©futer. On divisoit ensuite la circonfĂ©rence de ce cercle en douze parties Ă©gales par le moyen de quatre triangles ou de trois carrĂ©s pour les théùtres grecs comme les astronomes , dit Yitruve , ont coutume de tracer les douze signes du zodiaque suivant le rapport quâil y a entre la musique et les constellations. On voit que lâauteur en revient encore aux principes des pythagoriciens. Dans le i. er chapitre du I. er livre , nous avons vu que ces philosophes prĂ©tendoient que les mouvemens des corps cĂ©lestes formoient une harmonie. Pour comprendre donc comment ils trouvoient un rapport entre la musique et une circonfĂ©rence divisĂ©e en douze parties Ă©gales , comme le zodiaque , soit par le moyen de quatre triangles Ă©quilatĂ©raux , soit par le moyen de trois carrĂ©s quâon employoit pour former le théùtre des Grecs , il suffit de connoĂźtre ce passage de PlolomĂ©e le soleil , dit-il , en parcourant le zodiaque , forme trois carrĂ©s , parce quâil y a autant de consonnances de quarte. Il forme aussi quatre triangles, parce que câest le nombre des consonnances de quinte. 1 Le cĂŽtĂ© dâun de ces triangles marquoit le fond de la scĂšne , dont le devant sâavançoit chez les Latins jusquâau centre du cercle quâon avoit tracĂ© dâabord par consĂ©quent le devant de la scĂšne Ă©toit aussi Ă©tendu que le diamĂštre de ce cercle. La partie que nous appelons aujourdâhui proprement théùtre, câest-Ă -dire, celle destinĂ©e aux acteurs, se divisoit en deux, le proscenium et le postscenium. La plupart des interprĂštes ont cru , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© , que par les mots scena et pulpitum que Yitruve emploie quelquefois, il entendoit autre chose que le proscenium y mais ils se sont trompĂ©s , ces trois mots Ă©tant synonymes jâai fait voir dans les notes sur ce chapitre , que ces mots signifioient toujours la mĂȘme chose que le proscenium, a Jâen ai Ă©tĂ© sur-tout convaincu en voyant les ruines des théùtres dâHerculanum et de Pompeia prĂšs de Naples. Ils ont Ă©tĂ© ensevelis tous deux sous les laves du YĂ©suve. Les couches qui couvrent le premier , ont plus de quatre-vingt pieds dâĂ©paisseur. On est parvenu par des excavations Ă dĂ©couvrir une grande partie de ce théùtre. Pour parvenir dans le vaste souterrain , sous lequel on le voit aujourdâhui , il faut suivre de longues galeries quâon a creusĂ©es dans les laves. Mais on ne peut le voir tout entier , parce quâon a Ă©tĂ© obligĂ© dĂ©laisser, de distance en distance, des piles pour soutenir lâĂ©norme masse qui sâĂ©lĂšve sur sa voĂ»te. Ensuite on a dĂ» remplir une partie des excavations , parcequâon craignoit pour la ville de Portici qui est bĂątie en partie au-dessus prĂ©caution dâautant plus nĂ©cessaire , que ce terrain , situĂ© au pied du mont YĂ©suve, est sujet Ă ĂȘtre Ă©branlĂ© par des frĂ©quens tremblemens de terre. Les ingĂ©nieurs de Naples qui ont dirigĂ© ces fouilles , ont eu lâattention de faire exĂ©cuter un petit modĂšle, en relief, de ce théùtre, et lâont placĂ© dans le souterrain. Il reprĂ©sente exactement toutes les parties quâon en a dĂ©couvertes, et en facilite la recherche aux observateurs. Quant Ă doit particuliĂšrement lâc'le'vation de la scĂšne , câest-Ă -dire , la hauteur depuis le p&ve' de lâorchestre jusquâĂ celui de la sçÚne. 1 Harmonie , liv. III , Ch. 9. ĂĂź Sauf cependant que par le mgt pulpitum > il paroĂźt quâon enten- celui LIVRE V, G h a p. ti. o 2 celui de Pompeia , les cendres du YĂ©suve qui lâont enseveli comme tout le reste de celte ville , ne le couvre pas au-dessus du faĂźte de ses murailles ; lorsque je lâai vu, il Ă©toit presquâenliĂšrement dĂ©couvert ; toutes ses parties Ă©tant en plein jour , on nâest pas gĂȘnĂ© comme dans celui dâHcrcu- lanum j on le voit tout entier au premier coup-dâoeil. Dans lâun et lâautre de ces deux théùtres , jâai remarquĂ© toutes les parties dont parle Vitruve , entre autres le -proscenium , et je nâen ai rencontrĂ© aucune autre, Ă laquelle on pĂ»t donner le nom de pulpĂŻtum ou de scena. Les angles des triangles tracĂ©s dans le cercle indiquoient la place des escaliers qui sĂ©paroient les amas de degrĂ©s sur lesquels les spectateurs Ă©toient assis. Les escaliers , qui tendoient droit au centre du théùtre , donnoient une forme de coin Ă tout cet amas de degrĂ©s qui Ă©toient compris entre les prĂ©cinctions et les escaliers , Ă cause que dâune base large , ils aboient en Ă©trĂ©cissant, dâoĂč on les a nommĂ©s en latin cunei. Nous nâavons pas de terme propre en françois pour rendre celte expression latine ; parce que nous ne nous servons plus de pareils théùtres. Cette division de siĂšges ou de degrĂ©s servoient, comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© , pour sĂ©parer les diffĂ©rĂ©es ordres de citoyens. Un de ces coins Ă©toit occupĂ© par les magistrats , dâoĂč on lâappeloit bulenticos y un autre par les jeunes gens , dâoĂč on le nommoit ephebeos y un autre par les chevaliers , dâautres enfin par le peuple. Câest de-lĂ que sont venues ces expressions cuneaio et discunectto , pour dire que Quelquâun Ă©toit admis dans sa place au théùtre , ou quâil en Ă©toit chassĂ©. Nous avons dĂ©jĂ observĂ© quâune grande façade dĂ©corĂ©e de colonnes et dâautres ornemens dâarchitecture , occupe le fond de la scĂšne des théùtres anciens 1. Dans le milieu de cette façade se trouve une grande porte quâon nomme la porte royale j aux deux cĂŽtĂ©s de celle - ci , il y en a deux plus petites nommĂ©es portes des Ă©trangers. Lâusage des jeux scĂ©niques est venu Ă Rome de la GrĂšce. Les piĂšces de théùtre latines sont presque toutes traduites ou imitĂ©es du grec , aussi retrouve-t-on, dans les théùtres romains, toutes les parties qui composent celui des grecs. On leur a mĂȘme laissĂ© les noms quâelles avoient dans cette langue. Hormis la grandeur de lâorchestre et celle de la scĂšne, tout le reste est semblable , et a bien plus de rapport aux usages des Grecs quâĂ ceux des Romains. * Dans le dixiĂšme chapitre du VI. e livre, nous verrons que, dans les maisons grecques , il y avoit dans le milieu , un grand bĂątiment occupĂ© par le propriĂ©taire , et sur les cĂŽtĂ©s deux plus petits destinĂ©s Ă loger les Ă©trangers , ayant chacun leur porte particuliĂšre , ce quâon peut voir dans la XX. c planche. Comme dans la plupart des piĂšces de théùtre , le principal personnage est censĂ© avoir son habitation sur la scĂšne, il convenoit, suivant lâusage des Grecs , que celles destinĂ©es aux Ă©trangers sây trouvassent aussi ; puisque ceux-ci interviennent souvent dans les piĂšces câest pourquoi la grande porte du milieu reprĂ©sentoit la principale entrĂ©e de la maison du maĂźtre ; et les deux petites sur les cĂŽtĂ©s, celles des Ă©trangers. Je ne sais , dit Galiani , oĂč M. r Boindin a Ă©tĂ© trouver que la seule porte Ă gauche Ă©toit destinĂ©e aux Ă©trangerset que lâautre lâéùoit Ă dâautres personnages. 2 Outre lâentrĂ©e du maĂźtre de la maison , et celles des Ă©trangers, qui Ă©toient logĂ©s chez lui^ il y avoit, pour 1 On a trouvĂ© les ruines de cette façade , et la plupart des colonnes qui sây trouvoient, en dĂ©terrant le théùtre dâHerculanum. 2 Discours sur les théùtres antiques. MĂ©m. de lâacad. des insc. et belles lettres. T. 1. 29 2^6 LâARCHITECTURE DE V I T II TJ V E. paroĂźtre sur la scĂšne , deux autres issues aux deux extrĂ©mitĂ©s de la façade du fond ; lâune Ă©toit pour les personnages quâon suppose venir du forum ou des autres quartiers de la ville , et lâautre pour ceux quâon suppose venir de la campagne. CHAPITRE VIL Du Portique et dautres parties du Théùtre , La couverture du portique D quâon e'iĂšve au-dessus du dernier gradin, doit ĂȘtre de niveau avec celle qui termine le haut de la scĂšne ; parce que le son de la voix se rĂ©pandant dâune maniĂšre Ă©gale , sâĂ©lĂšve jusquâau dernier, degrĂ© et parvient jusquâau toit ; il se perdroit bientĂŽt, si, parvenu Ă cette hauteur , elle se trouvoit moins Ă©levĂ©e que celle de la scĂšne. ** On prend ensuite la sixiĂšme partie du diamĂštre AF de lâorchestre quâon porte sur les degrĂ©s infĂ©rieurs, et on coupe Ă plomb de cette mesure, tant aux extrĂ©mitĂ©s que dans le circuit, pour y percer les entrĂ©es ; et dans lâendroit oĂč lâon aura fait cette coupure, on placera les chambranles des portes qui, comme cela, seront assez Ă©levĂ©es. *** Il faut que la scĂšne GG soit deux fois aussi longue que le diamĂštre de l'orchestre. i Le piĂ©destal, posĂ© sur le pupitre, doit avoir de hauteur, y compris sa base et sa corniche , la douziĂšme partie du diamĂštre de lâorchestre. Sur ce piĂ©destal,, on pose les colonnes , qui , avec leurs chapiteaux et leurs bases, auront la quatriĂšme partie de ce diamĂštre. Les architraves et les autres ornemens auront ensemble la cinquiĂšme partie de la grandeur des colonnes. LĂ dessus il y aura un autre piĂ©destal qui, avec la base et sa corniche , nâaura que la moitiĂ© du piĂ©destal dâen bas. Les colonnes , quâon posera sur ce piĂ©destal , seront moins hautes du quart que celles dâen bas. * Les architraves et les autres ornemens de ces colonnes seront de la cinquiĂšme partie de la colonne et si lâon met un troisiĂšme ordre de colonnes sur la scĂšne , il faudra que le piĂ©destal dâen haut soit de la moitiĂ© du piĂ©destal du Planche XVI. me pitre, que, par le diamĂštre de lâorchestre, il entend le ** Planche XVl. me demi-diamĂštre du cercle , sur lequel on a tracĂ© le plan *** Planche XVI. me fig. 3. du théùtre. i On verra dans les remarques Ă la fin de ce cha- Planches XYI. mc et XVII. me %!âą r , lĂŒle,J LIVRE V, Ch A p. r i i. âą'! rp milieu. Les colonnes du dernier ordre doivent ĂȘtre plus courtes de la quatriĂšme partie que celles du second , et il faut que leurs architraves avec la corniche et les autres ornemens rĂ©unis , soient de la cinquiĂšme partie de la colonne , comme les autres. Il ne faut cependant pas croire que ces proportions et ces rĂšgles produiront toujours les mĂȘmes effets , et conviendront Ă©galement Ă tous les théùtres ; mais lâarchitecte doit connoĂźtre ces proportions et Ă©tudier ces rĂšgles pour savoir les appliquer suivant la nature des lieux , et la grandeur de lâĂ©difice. Il y a beaucoup de choses que lâusage , auquel elles sont destinĂ©es , oblige de faire de la mĂȘme grandeur dans les petits théùtres , comme dans les grands. Tels sont les siĂšges , les prĂ©cinctions , les balustrades , les passages, les escaliers, le pupitre , les tribunes et autres choses semblables , que leur destination particuliĂšre empĂȘche dâassujĂ©tir Ă la proportion gĂ©nĂ©rale. On peut Ă©galement, lorsquâon nâa pas de piĂšces de marbre ou de charpente , ou dâautres matiĂšres d une grandeur suffisante, retrancher ou ajouter un peu Ă lâouvrage , pourvu quâon le fasse avec intelligence et discrĂ©tion ; ce qui exige dans lâarchitecte beaucoup dâexpĂ©riences , dâhabiliiĂ© et de talent. La scĂšne doit ĂȘtre dĂ©gagĂ©e et disposĂ©e de maniĂšre quâau milieu, il y ait une porte ornĂ©e comme celle dâun palais royal ; H * Ă droite et Ă gauche deux autres portes pour les Ă©trangers II; i Ă cĂŽtĂ© de celles-ci les espaces K destinĂ©s aux dĂ©corations. Les Grecs appellent cet endroit periactous 2 Ă cause quâon y place les machines M triangulaires qui tournent Ă volontĂ©. Chacune de ces machines a trois diffĂ©rentes espĂšces de dĂ©corations, qui procurent des changemens en tournant leurs diffĂ©rentes faces , soit lorsquâon change de piĂšce , soit lorsquâon fait paroĂźtre les dieux accompagnĂ©s de leur tonnerre. Au-delĂ sont les galeries LL qui conduisent sur la scĂšne ; on suppose que par lâune on vient de la ville , et par lâautre de la campagne. REMARQUES. Nous avons remarquĂ© quâon pĂ©nĂ©iroit dans lâorchestre et sur les prĂ©cinctions , par plusieurs issues qu on appeloit vomitoires > vomitorium y parce quâelles sembloient vomir la foule du peuple qui enlroit par-lĂ sur lâorchestre , et les prĂ©cinctions , pour aller se placer ensuite sur les degrĂ©s. j ^ Il falloit naturellement que les degrĂ©s fussent interrompus , par une coupure , dans les endroits u taot i 1 toit »? »***â! * Planches XVI. me et XVII. me 1 Voyez le io. me Chap. du Vl. me Liv., et les remar= ques qui sont Ă lĂ fin. 2 Câest-Ă -dire que lâon fait tourner. 29. 228 L'ARCHITECTURE DE VIT R U VE. oĂč se irouvoient les portes des issues. Vitruve dit quâil faut avancer cette coupure dans les degrĂ©s, de la longueur de la sixiĂšme partie du diamĂštre de lâorchestre. Orchestra inter gradus irnos quam diametron habuerit. * Par diamĂštre , on entend littĂ©ralement une mesure qui passe par le milieu ainsi par le diamĂštre de lâorchestre , Vitruve entend une ligne qui passe par son milieu ; et comme il nâoccupe que la moitiĂ© du cercle e , F , a , b , g , g , b , e , FF , qui a servi Ă tracer le théùtre , ce ne peut ĂȘtre que le demi-diamĂštre de ce cercle a , e , et non le diamĂštre b , a , b ; dâailleurs une coupure de la sixiĂšme partie de ce dernier diamĂštre seroit disproportionnĂ©e. Comme Galiani, jâai placĂ© ces portes , ou vomitoires , au milieu de chaque amas de degrĂ©s en F ; et non dans la place des escaliers , scalĂŠ en e , comme Perrault lâa fait en dĂ©pit de la raison et du bon sens car le peuple , comme nous lâavons dit , entroit dans lâorchestre par ces portes, et ensuite montoit. par les escaliers , pour aller se placer et sâasseoir sur les degrĂ©s ; ce qui lui eĂ»t Ă©tĂ© impossible de faire avec les escaliers du premier rang, placĂ©s immĂ©diatement au-dessus des portes , comme ils le sont dans les dessins du traducteur françois , oĂč ils semblent conduire les gens pour se prĂ©cipiter. Le meme auteur ayant aussi oubliĂ© de placer des portes ou vomitoires sur les prĂ©cinctions , les spectateurs suivant lui dĂ©voient dâabord monter au portique dâen haut par les escaliers 5,4, 5. Plane. XVII , fig. l et 2 ; et descendre ensuite par les escaliers dans les gradins. Quelle incommoditĂ© pour le beau-sexe qui se plaçoit dans cette galerie , et pourquoi faire monter et descendre aussi inutilement lĂšs spectateurs ? "Vitruve sâest dâabord principalement attachĂ© Ă donner les principes dâaprĂšs lesquels on devoit construire la partie du théùtre occupĂ©e par les spectateurs ; câest-Ă -dire lâhĂ©micycle des gradins sur lesquels on Ă©loit assis. ĂŻl sâattache ensuite Ă dĂ©crire la partie destinĂ©e aux acteurs , que nous nommons la scĂšne câest la portion du théùtre des anciens sur laquelle les savans sont le moins dâaccord , et sur laquelle il leur reste encore bien des recherches Ă faire. De tous les monĂ»mens antiques dont la conservation eĂ»t Ă©tĂ© si utile pour lâintelligence des auteurs anciens , et qui ont Ă©tĂ© renversĂ©s par la main destructive du temps , et plus encore par celle de la barbarie et de lâignorance , nous devons sur-tout regretter la perte des théùtres. 11 est vrai que dans le midi de la France , en Allemagne et sur-tout en Italie , il nây a pas de petite contrĂ©e oĂč lâon ne trouve les ruines de quelque théùtre , sur lesquelles les savans ont plusieurs fois exercĂ© leurs lalens , mais il faut convenir que presque toutes leurs recherches ont eu pour objet lâhĂ©micycle de degrĂ©s occupĂ©s par les siĂšges des spectateurs la chose la plus aisĂ©e Ă comprendre , puisque celte partie ressemble en tout Ă lâamphithéùtre , dont plusieurs sont encore sur pied en grande partie. Il Ă©loit bien plus intĂ©ressant de connoĂźtre la situation de la scĂšne et de tout ce qui la concerne,' cet objet Ă©toit bien plus digne de leurs recherches ; ils auroient pu , peut-ĂȘtre , parvenir Ă en tracer un plan exact , en comparant les dĂ©couvertes quâils auroient faites parmi les restes Ă©pars des diffĂ©rentes ruines de théùtres qui existent encore. Les difficultĂ©s les auront sans doute dĂ©goĂ»tĂ©s * Planche SVI. me LIVRE V , C H A P. VIL je ne connois , Ă cet Ă©gard , que le cĂ©lĂšbre Clerisseau , arcbitecie françois , qui ait des droits Ă l a reconnoissance des amateurs des beaux-arts , pour ses recherches sur le proscenium du théùtre dâOrange. Il les a poursuivies avec un courage unique, sans ĂȘtre rebutĂ© par les peines , ni les fatigues, ni sur-tout par le spectacle affreux que les prisons , qui occupent ce monument , renouveloient sans cesse Ă sa vue. On ne peut assez apprĂ©cier le mĂ©rite de ce travail rebutant et difficile ; son rĂ©sultat a Ă©tĂ© des plus»utiles et des plus curieux. Il laisse cependant encore beaucoup Ă desirer. Galiani , qui a fait imprimer sa traduction de Vitruve en 1768 , dit avoir vu les plans de plusieurs théùtres qui avoient Ă©tĂ© engloutis et quâon avoit dĂ©terrĂ©s ; mais que dans la plupart, la scĂšne ne se trouvoit pas dessinĂ©e , ou , ce qui Ă©toit pire encore , quâon lâavoit ajoutĂ©e dâaprĂšs le caprice de quelque architecte. Depuis lors , on a dĂ©couvert le théùtre de Pompeia , que jâai vu en 179a ; jây ai remarquĂ© le proscenium , tel que le dĂ©crit Vitruve , et tel quâil est reprĂ©sentĂ© dans les planches de lâĂ©dition de Perrault et de Galiani ; jâaurois dĂ©sirĂ© le dessiner sur les lieux et en prendre les dimensions âą mais cela Ă©toit dĂ©fendu. Les fouilles que lâon continue dans cet endroit produiront peut-ĂȘtre un jour de nouvelles lumiĂšres en attendant je tĂącherai dâexpliquer cette partie de lâancien théùtre , telle que nous la connoissons. Les anciens avoient , comme nous , des dĂ©corations versatiles ; câĂ©toit des triangles suspendus , faciles Ă tourner , et portant des rideaux oĂč. Ă©loient peints diffĂ©rents objets suivant les trois genres de piĂšces, comme nous le verrons dans le chapitre suivant. Tous les interprĂštes , avant Galiani, avoient placĂ© ces dĂ©corations derriĂšre les trois portes qui sont dans la façade qui termine la scĂšne, câest-Ă -dire derriĂšre la porte royale et les deux portes des Ă©trangers. Us nâauroient pas commis cette erreur , comme lâobserve le traducteur italien , sâils avoient bien rĂ©flĂ©chi sur les paroles tlu texte, et fait altĂ«nlion sur-tout Ă lâordre que lâauteur suit en dĂ©crivant cette partie de la scĂšne. On voit en effet quâil commence par le milieu , et continue ensuite Ă dĂ©crire , iâun aprĂšs lâautre, les objets qui se suivent sur les cĂŽtĂ©s Ă droite et Ă gauche. MecliĆ vcilvĆ ornatus habeant aulĆ regiĆ , dit-il} la porte du milieu aura la magnificence de celle dâun palais royal. Il continue ensuite en disant dextra ac sinistrci hospitalia. VoilĂ donc quâil parle immĂ©diatement aprĂšs ces deux objets qui Ă©toient aux deux cĂŽtĂ©s de celle-ci , câest-Ă -dire des portes des Ă©trangers. Il continue toujours, et dit secundum ea , câest-Ă -dire ensuite de celle-ci, Ă cĂŽtĂ© de celle-ci. Spatia ad ornatus comparata , se trouve lâespace oĂč lâon place les dĂ©corations. 11 continue encore en disant secundum ea câest-Ă -dire aprĂšs cet espace , en suivant toujours la mĂȘme ligue sur les cĂŽtĂ©s Ă droite et Ă gauche , versurĆ sunt procurrentes , etc. , sont les deux galeries qui conduisent en dehors et qui forment deux chemins pour les acteurs ; lâun quâon suppose venir de la ville et lâautre de la * campagne. Lâauteur comme nous voyons se sert deux fois du mot secundum si cette expression , comme on lâa cru jusquâĂ prĂ©sent , avoit pu signifier , la premiĂšre fois quâil lâemploie , le derriĂšre et non le cĂŽtĂ© des portes , elle auroil du signifier la mĂȘme chose la seconde lois , et dans ce cas il nâĂ©toit plus possible de placer les galeries. * De plus , les portes de celle façade reprĂ©senloient, comme nous avons vu , les portes de vĂ©ri- 2 3o LâARCHITECTURE DE VITRUVE. tables habitations ; ne seroit-il pas souverainement ridicule dâaller placer dedans , des dĂ©corations qui reprĂ©sentant tantĂŽt un bois, tantĂŽt des habitations , et dâautres fois des rochers , auroient empĂȘchĂ© lâentrĂ©e de la maison du maĂźtre , et celle du logement des Ă©trangers ? On dira peut-ĂȘtre quâil nây avoit pas beaucoup plus de convenance Ă placer sur les cĂŽtĂ©s de la scĂšne, les dĂ©corations qui reprĂ©sentent des bois , des rochers on des maisons , tandis que le milieu est occupĂ© par la façade dâun palais jâen conviens ; mais il faut avouer cependant , que cela ne rĂ©pugne pas autant que de placer ces dĂ©corations sous des portes. On sait que ces dĂ©corations chez les anciens servoient plutĂŽt Ă indiquer le genre de spectacle quâĂ reprĂ©senter 3 comme elles le font aujourdâhui , le lieu ou la scĂšne se passe , tel que la vue dâune ville , lâappartement dâun palais , une forĂȘt t etc. Il nây a pas long - temps quâon est parvenu , avec le secours de 1 la perspective , Ă faire que le théùtre reprĂ©sente aussi exactement tous les changemens de scĂšne. MĂȘme encore Ă prĂ©sent , dans les théùtres de petites villes dâItalie , le fond de la scĂšne ne change jamais , et reprĂ©sente toujours des habitations ; câest pourquoi on lâappelle il domo , tirĂ© de domus , tandis que les dĂ©corations sur les cĂŽtĂ©s changent et reprĂ©sentent , suivant les circonstances , ou des les de la bois , ou des maisons , ou dâautres objets. Un passage de lâElectre de Sophocle vient encore Ă lâappui de notre opinion. Dans la premiĂšre scĂšne du premier acte, le gouverneur dâOreste lui dit cette ville qui est Ă notre droite , câest lâancienne ville dâ que vous voyez Ă votre Ăź gauche , câest le cĂ©lĂšbre temple de Junon. et ce palais , câest le malheureux palais des fils de PĂ©lops. Il indique absolument le lieu de toutes les parties de la scĂšne , comme nous avons cru devoir les placer dâaprĂšs le texte de Yilruve. Le palais est au milieu. La ville et le temple de Junon sont reprĂ©sentĂ©s sur les dĂ©corations ? lâune Ă droite et lâautre Ă gauche, ainsi sur les cĂŽtĂ©s de la scĂšne, CHAPITRE VIII Des trois espĂšces de ScĂšnes et des Théùtres Grecs. N ous avons trois diffĂ©rentes espĂšces de scĂšne , savoir la tragique ; la comique; et la satirique. Leurs dĂ©corations ne se ressemblent pas ; la scĂšne tragique est ornĂ©e de colonnes , de frontispices , de statues et autres ornemens qui conviennent aux palais des rois, La scĂšne comique reprĂ©sente des maisons particuliĂšres avec leurs balcons , leurs fenĂȘtres , disposĂ©es comme le sont les habitations ordinaires. La scĂšne satirique enfin reprĂ©sente des arbres, des rochers , des montagnes , des lieux agrestes elle imite , en un mot, des situations champĂȘtres. ! i JlftC li ! i Ifk U LIVRE V, C h a p, vin. sSi ' Dans les théùtres grecs, tout n'est pas exactement fait comme dans les nĂŽtres; dâabord, au lieu de quatre triangles, qui font la distribution du théùtre des Latins', et quâon inscrit dans le cercle tracĂ© sur la terre , ils mettent trois carrĂ©s dont les angles touchent la circonfĂ©rence du cercle ; le cĂŽtĂ© [ hh ] de ces carrĂ©s, qui est lĂ© plus proche de la scĂšne , et fait une section dans le cercle, termine le devant de la scĂšne; on trace ensuite une autre ligne [gg] parallĂšle Ă celle-ci et qui touche lâextrĂ©mitĂ© du cercle , pour terminer le fond de la scĂšne on tire encore une autre ligne [bb] parallĂšle aux deux autres, qui passe par le centre de lâorchestre, vis-Ă -vis du proscenium, et oĂč cette ligne coupe la circonfĂ©rence; Ă droite et Ă gauche, on marque les points [bb] on place ensuite le compas dans le point [b] Ă droite , et avec lâintervalle gauche [bb] on trace la portion du cercle [b i ] jusqu'au cĂŽtĂ© droit du proscenium. On place Ă©galement le compas dans le point [$] Ă gauche, et avec lâintervalle droit [bb] on trace une autre portion de cercle [b 2 ] jusquâau cĂŽtĂ© gauche du proscenium. Par le moyen des trois centres que nous venons de dĂ©crire , les Grecs ont un orchestre plus spacieux; leur scĂšne est plus Ă©loignĂ©e , et leur pupitre, qu'ils appellent logeion , plus Ă©troit. C'est pourquoi , chez eux, il nây a que les seuls acteurs des tragĂ©dies et des comĂ©dies qui jouent sur la scĂšne; tous les autres sont dans lâorchestre. DelĂ vient que les Grecs appellent leurs acteurs, les uns scĂ©niques et les autres thymĂ©iĂ©ens. Le logeion ne doit pas avoir moins de dix pieds de hauteur ni plus de douze. Les escaliers qui sĂ©parent les amas de degrĂ©s jusquâĂ la premiĂšre prĂ©cinction , seront dirigĂ©s sur les angles des carrĂ©s, [ eee ] * et on dirigera sur le milieu de ces amas de degrĂ©s, les escaliers de ceux qui seront au-dessus de la prĂ©cinction si lâon en fait encore dautres au-dessus de ceux-ci, on dirigera les escaliers de la mĂȘme maniĂšre. AprĂšs avoir soigneusement combinĂ© tout ceci, il faut sâappliquer Ă choisir un local oĂč la voix sâarrĂȘte doucement et oĂč lâĂ©cho nâoccasionne aucune confusion lorsquâelle parvient Ă lâoreille car, dans plusieurs endroits , les mouvemens de la voix sont naturellement interrompus. Tels sont les lieux dissonans que les Grecs appellent cathe- chondes , les circonsonnans quâils appellent pĂ©richondes , les rĂ©sonnans quâils appellent antechondes , et les consonnans quâils appellent synechondes. Les endroits dissonnans sont ceux dans lesquels les premiĂšres syllabes sâĂ©tant Ă©levĂ©es jusquâen haut, sont repoussĂ©es par quelques corps solides , de sorte quâen retom- * Planche XVI. me et XVIl. iai! ** Planche XVlI, Ine LâA Ăźi C H I T E C T U R E DE V I T R U Y E. bant, elles Ă©touffent celles qui les suivent. Les circonsonnans sont ceux dans lesquels la voix Ă©tant renfermĂ©e, se perd en tournoyant et ne paroĂźt pas bien articulĂ©e ; les rĂ©sonnans sont ceux oĂč quelques corps durs produisent une rĂ©flexion qui imite la voix, tellement que les derniĂšres syllabes sont rĂ©pĂ©tĂ©es; les consonnans enfin sont ceux qui aident Ă la voix, augmentent sa force Ă mesure quelle sâĂ©lĂšve, la conduisent nette et distincte jusquâaux oreilles. Ainsi, dĂšs quâon met tout le soin et le discernement nĂ©cessaire pour le choix dâun lieu propre, la voix produira lâeffet convenable dans le théùtre. Quant Ă la forme des théùtres , la diffĂ©rence consiste en ce que ceux, Ă lâusage des Grecs , sont tracĂ©s par le moyen des carrĂ©s; et que ceux, Ă lâusage des Latins, le sont par le moyen des triangles. Ceux qui veulent construire, avec toute la perfection possible, des théùtres, nâont quâĂ suivre ces principes. REMARQUES . Les anciens nâavoient pas multipliĂ©, comme nous, les changemens de dĂ©corations dans leurs théùtres; ils nâen avoient que de trois espĂšces* La premiĂšre reprĂ©sentoit des palais , et ofFrĂŽit toutes " les richesses de lâarchitecture ; elle Ă©toit destinĂ©e pour la tragĂ©die. La seconde reprĂ©sentoit des habitations privĂ©es; câĂ©toit pour la comĂ©die. La troisiĂšme reprĂ©sentoit des forĂȘts, des rochers, des lieux agrestes, pour les scĂšnes satiriques; genre de piĂšce dramatique, qui est absolument abandonnĂ©e et presquâoĂ»bliĂ©e prĂ©sentement. De tous les ouvrages que les anciens ont composĂ©s en ce genre, il ne nous reste plus que le Cyclope dâEuripide. 11 paroĂźt que les piĂšces satiriques Ă©toient pleines de libertĂ©s brutales et grossiĂšres, comme il sâen trouve en effet dans le Cyclope. / II faut remarquer que chez les anciens, le lieu oĂč se passoit la scĂšne Ă©toit toujours censĂ© ĂȘtre un lieu public , et jamais un lieu fermĂ© ; parce que , dâaprĂšs les rĂšgles Ă©tablies pour le théùtre , la comĂ©die, et surtout la tragĂ©die, doit reprĂ©senter une action publique et visible. Ce nâest que dans une profonde ignorance des rĂšgles , quâon a Ă©tabli la coutume de mettre la scĂšne dans lĂšs chambres et dans les cabinets, comme le remarque trĂšs-bien le traducteur françois de la poĂ©tique dâAristote. Le lieu de la scĂšne, dans presque toutes les piĂšces de Sophocle et dâEuripide, est dans une place publique, vis-Ă -vis dâun palais. La grande façade, qui remplissait le fond du théùtreconvenoit donc Ă presque toutes ces piĂšces. Si quelquâobjet particulier , comme un temple, une statue , un tombeau, etc. , devoit se trouver sur le théùtre, on le plaçoit parmi les dĂ©corations mobiles sur le cĂŽtĂ© ce qui se voit clairement par les piĂšces des auteurs grecs que je viens de citer. L I Y R E V, C h A p. y i ii. a33 im ifs,fcH d ^ .5 cba s* 11 La principale diffĂ©rence qu'il y avoit dans la distribution des théùtres grecs, et ceux des Latins , câest que la scĂšne ou proscenium, de ces derniers Ă©toit bien plus Ă©tendue quâelle ne FĂ©toit dans les premiers} et quâen revanche lâorchestre occupoit un plus petit espace} parce que, dans les théùtres latins , câĂ©loit en grande partie aux dĂ©pens de lâorchestre que le proscenium sâavançoit aussi fort. Nous avons vu que lâorchestre droit son nom du mot grec ĂŽpXio'xai qui signifie sauter, parce que chez les Grecs , câĂ©toit lĂ que sâexĂ©cutoient les danses , que se tenoit le chĆur , et les autres accessoires du drame. Le proscenium qui , comme on peut le voir sur le plan , Ă©toit trĂšs-Ă©troit dans leurs théùtres, Ă©toit rĂ©servĂ© pour les acteurs qui rĂ©citoient. II paroĂźt mĂȘme quâen avant du proscenium dans le milieu , il y avoit une tribune qui * sâavançoit vers le milieu a de lâorchestre qui sâappe- loit le thymĂ©lĂ© , destinĂ©e particuliĂšrement Ă placer lâacteur au moment oĂč il rĂ©citoit son rĂŽle ; Ă©tant ainsi placĂ© en avant de la scĂšne , presquâau milieu des spectateurs , il en Ă©toit bien plus aisĂ©ment entendu. Yitruve nous parle bien de certains acteurs , qui , chez les Grecs , sâappeloient les thymĂ©- lĂ©ens} mais il ne nous dit rien de lâespĂšce de tribune qui sâappeloit le thymĂ©lĂ©. On peut en voir le dessin dans le plan du théùtre que M. lâabbĂ© BarthĂ©lemy a joint au voyage du jeune Anacharsis. Le pupitre, câest-Ă -dire la scĂšne, Ă©toit beaucoup plus Ă©levĂ©e chez les Grecs que chez les Romains, parce que chez les premiers il nây avoit point de spectateurs dans lâorchestre } ainsi les Grecs Ă©le- voient leur scĂšne jusquâĂ douze pieds , tandis que lâorchestre des théùtres romains Ă©tant occupĂ© par les personnages les plus respectables qui se trouvoient au spectacle , ils nâĂ©levoient pas leur scĂšne au-delĂ de cinq pieds , pour que tous ceux qui Ă©toient dans lâorchestre pussent voir tout ce qui' se passoit sur la scĂšne. Nous venons dâobserver , dâaprĂšs les rĂšgles quâAristote rapporte dans sa poĂ©tique , et dâaprĂšs lâexemple des meilleurs poĂštes grecs , quâils plaçoient toujours la scĂšne dans un lieu public 5 la tragĂ©die , sur-tout , Ă©tant la reprĂ©sentation dâune action publique et visible , qui se passe entre des personnages illustres , et de la plus grande Ă©lĂ©vation ; il nâest ni vraisemblable , ni possible , que cette action se passe en public , sans quâil y ait beaucoup de gens , autres que les acteurs , qui y soient intĂ©ressĂ©s , et dont la fortune dĂ©pende de celle des premiers personnages. Aussi toutes les tragĂ©dies des poĂštes grecs sont-elles toujours accompagnĂ©es dâun chĆur composĂ© de diffĂ©rens ordres de citoyens , soit de prĂȘtres , de vierges , dâenfans , etc. Ils Ă©toient censĂ©s ĂȘtre le public prĂ©sent et intĂ©ressĂ© Ă lâaction. CâĂ©toit au chĆur que les acteurs sâadressoient lorsquâils paroissoient interroger le public câĂ©loit le chĆur qui leur rĂ©pondoit , et se trouvant placĂ©s , comme nous le dirons loul-Ă -lâheure , dans lâorchestre au milieu des spectateurs , ceux-ci se trouvoient , pour ainsi dire , ne faire quâun avec lui j ils sâidentilioient bien davantage avec la scĂšne qui Ă©toit reprĂ©sentĂ©e. Le chĆur se plaçoit dans lâorchestre , dĂšs le commencement de la piĂšce , et y restoit jnsquâĂ la fin. Il en faisoit tellement partie que , sans le chĆur , il nây auroit plus eu de tragĂ©die. Sa j^rincipale fonction Ă©toit de marquer , par ses chants , les intervalles des actes, pendant que les acteurs , que la nĂ©cessitĂ© de lâaction avoit fait sortir de la scĂšne , Ă©toient absens. Un autre motif rendoit le chĆur encore plus nĂ©cessaire au théùtre des Grecs } on sait que les jeux et les spectacles tenoient chez eux intimement Ă la religion. On donnoit les spectacles les jours des fĂȘtes quâon cĂ©lĂ©broit en lâhon- Planche 3o LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. neur des dieux. La plupart reprĂ©sentoient des actions quâon atlribuoient aux dieux et aux hĂ©ros. Le but de ces piĂšces Ă©toit dâinculquer dans lâesprit des spectateurs les maximes et les principes de leur religion. Câest pour cela quâAristote dit , que la tragĂ©die nâa Ă©tĂ© inventĂ©e que pour lâinstruction des hommes ; il falloit donc quâelle rĂ©pondĂźt Ă ce dessein. Lâancienne tragĂ©die atteignoit parfaitement le but de son institution par le moyen des chĆurs , comme on le voit dans les piĂšces de Sophocle et dâEuripide. Ces poĂȘles se conforment toujours Ă lâesprit de la religion qui rĂ©gnoit dans leur pays ; et quand ils font avancer , Ă leurs acteurs , des choses contraires Ă cet esprit , comme cela arrive souvent , et comme il le faut meme , le chĆur ne manque jamais de les corriger par des rĂ©flexions pleines de sagesse et de piĂ©tĂ© ; et câest ce quâon ne sauroit bien faire dans les tragĂ©dies oĂč il nây a point de chĆur car lorsque les acteurs , emportĂ©s par la passion , parlent et agissent selon les maximes du monde , qui sont ordinairement opposĂ©s aux rĂšgles de la religion , il nây a personne qui les corrige ; ces maximes pernicieuses se forlifient dans lâesprit des spectateurs , qui eu sont dĂ©jĂ prĂ©venus , et y nourrissent les passions , au lieu de les Ă©teindre ; et quand il nây auroit que celle seule raison , elle dcvroit suffire pour quâon rĂ©tablisse le chĆur , comme Racine lâa fait dans ses deux derniĂšres tragĂ©dies , Esther et Alhalie. Les personnages qui composoient ce chĆur , si nĂ©cessaires aux drames des anciens , Ă©toient trĂšs- nombreux ; ils occupoient lâorchestre, y restoient pendant toute la piĂšce, et rĂ©citoient leurs chants, tels quâon les voit dans les tragĂ©dies des auteurs grecs. Il nây avoit que les acteurs principaux qui paroissoient sur le proscenium , dâoĂč ils rĂ©citoient leurs rĂŽles. Lâorchestre et le proscenium Ă©tant les seules parties du théùtre grec , qui diffĂ©rassent de celui des Romains, Vilruve indique , dans ce chapitre, les principes dâaprĂšs lesquels dĂ©voient opĂ©rer les architectes grecs, lorsquâils Iraçoient les plans de leurs théùtres. AprĂšs avoir dit quâau lieu des quatre triangles employĂ©s par les Latins , pour tracer leur théùtre * , les Grecs employoient trois carrĂ©s , et que le cĂŽtĂ© de ces carrĂ©s hh , qui Ă©toit le plus prĂšs de la scĂšne , en marquoit le devant 3 il ajoute quâon traçoit ensuite une autre ligne gg parallĂšle Ă ce cĂŽtĂ© , qui marquoit le fond de la scĂšne. Il est bon de remarquer ici la diffĂ©rence que cela apportoit entre le théùtre grec et celui des Romains. ** Le fond de la scĂšne , dans le théùtre romain , Ă©toit terminĂ© par le cĂŽtĂ© du triangle gg tracĂ© dans Je cercle , et le devant lâĂ©toit par le diamĂštre bb de ce cercle tandis que dans le théùtre grec *** , le fond de la scĂšne Ă©toit terminĂ© par la ligne gg tracĂ©e hors du cercle, et le devant lâĂ©loit par le cĂŽtĂ© du carrĂ© hh tracĂ© dans le cercle tellement que la ligne qui marquoit le fond de la scĂšne dans le théùtre romain , marquoit Ă -peu-prĂšs le devant de la scĂšne chez les Grecs ; ce qui rendoit leur orchestre bien plus Ă©tendu. Yoici comme Yitruve veut quâon trace les cĂŽtĂ©s de lâorchestre depuis les degrĂ©s bb jusquâĂ la ligne qui marque le devant de la scĂšne 12, on trace, dit-il, une troisiĂšme ligne bb parallĂšle aux deux autres, cpii passe par le centre de lâorchestre, vis-Ă -vis du proscenium , et oĂč cette ligne coupe la circonfĂ©rence Ă droite et Ă gauche , on marque les points bb ; on place ensuite Je compas dans le point b Ă droite , et avec lâintervalle gauche bb , on trace la portion du cercle 61 jusquâau cĂŽtĂ© droit du proscenium j on fait la mĂȘme chose de lâautre cĂŽtĂ©. * Planche Planche J 1 Ăź reliai ; j Es s P e d g. Celle interprĂ©tation est de Galiani; il la trouve si naturelle, quâaprĂšs une simple lecture du texte confrontĂ©e avec la ligure citĂ©e , tout Je monde , dit-il , sera Ă©tonnĂ© que tous les autres avant lui , sans en excepter , ajouie-l-il , rinlelligent Perrault , aient pu lui donner une autre interprĂ©tation , en formant des figures composĂ©es dâune quantitĂ© de cercles qui ne produisent rien de nouveau , puisque ces figures seroient toujours telles , quand mĂȘme on nâauroit pas tracĂ© ces cercles. Voici, suivant lui, ce qui a fait Ă©quivoquer les autres interprĂštes sur le vrai sens de lâauteur. Ils Ăźont lu, comme il est elfectivement prescrit, quâil falloit placer le compas dans le point Ă droite, et. dĂ©crire ensuite un cercle avec lâintervalle gauche vers la partie droite du proscenium ils ont cru que lâintervalle gauche Ă©toit le demi-diamĂštre du grand cercle , et quâavec ce demi-diamĂštre, il falloir dĂ©crire un demi-cercle sur le mĂȘme cĂŽtĂ© droit , oĂč ils avoienl placĂ© leur centre ; mais comme ces deux demi-cercles , quâils ont ainsi tracĂ©s Ă droite et Ă gauche , sont absolument inutiles , Galiani a cherchĂ© et dĂ©couvert la nouvelle forme quâil donne Ă cette partie du théùtre grec , en interprĂ©tant le texte de la maniĂšre suivante lorsque lâauteur dit , circino collocato in dextra , il entend la droite des spectateurs, comme il entend leur gauche , lorsquâil dit intervallo sinistro et cela parce que ces deux points quâil nomme , sont Ă lâextrĂ©mitĂ© des siĂšges ou gradins , sur lesquels les spectateurs sont assis au contraire lorsquâil dit ensuite quâon doit tracer le cercle vers la partie droite du proscenium , on doit entendre la droite des acteurs qui correspond Ă la gauche des spectateurs ; et cela parce quâelle se termine en joignant le proscenium. AprĂšs avoir distinguĂ© ces deux espĂšces de droite et de gauche , on trouve cette construction simple et naturelle , ainsi que lâinterprĂ©tation quâil donne Ă ce passage. CHAPITRE IX. Des Portiques qui sont derriĂšre la ScĂšne et des Promenoirs. I l faut construire, derriĂšre la scĂšne , un portique , afin que sâil survient une pluie pendant le spectacle , le peuple puisse sây mettre Ă lâabri en sortant du théùtre ; il faut quâil soit assez spacieux pour que les directeurs des choeurs puissent les y exercer commodĂ©ment. Tels sont les portiques de PompĂ©e ; tels sont Ă AthĂšnes les portiques dEumenes , le temple de Bacchus, et lâOdĂ©on 1 quâon rencontre Ă gauche en sortant du théùtre. Cet OdĂ©on Ă AthĂšnes fut dĂ©corĂ© de colonnes de pierre par PĂ©ri- clĂšs , qui le fit couvrir avec les mĂąts et les antennes des navires pris sur les Perses; mais cet Ă©difice ayant Ă©tĂ© brĂ»lĂ© pendant la guerre de Mithridate , il fut rebĂąti par 1 Câest-Ă -dire place destinĂ©e pour chanti 3o. * Planches XYl ." 16 et XYII." 236 LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. le roi Ariobarsane. Le strdlegeum i de Smyrne est encore de ce genre et Ă Traites on remarque, des deux cĂŽtĂ©s du stade, des portiques semblables Ă ceux des théùtres en un mot dans toutes les villes qui ont eu des architectes habiles, on voit, prĂšs des théùtres, des portiques et promenoirs qui sont construits de cette maniĂšre, câest-Ă -dire qui sont doubles , ayant les colonnes extĂ©rieures dâordre dorique , ainsi que les architraves et les corniches , et rĂ©unissent toutes les proportions qui sont propres Ă cet ordre. Il paroĂźt que la largeur du portique doit ĂȘtre telle , que la distance, depuis le bas des colonnes de dehors jusquâĂ celles du milieu, Ă©gale la hauteur des colonnes de dehors , et quâil ait une distance Ă©gale Ă celle-ci , depuis les colonnes du milieu jusquâau mur qui enferme les portiques des promenoirs. Les colonnes du milieu sont plus hautes dâun cinquiĂšme que les colonnes extĂ©rieures , mais elles sont dâordre corinthien ou ionique. ' torp W e Ces colonnes doivent avoir dâautres proportions que celles que nous avons donnĂ©es aux colonnes des temples car celles-ci doivent avoir plus de gravitĂ© ; et celles des portiques plus de dĂ©licatesse. Tellement que si les colonnes sont dâordre dorique, il faut partager toute leur hauteur , y compris le chapiteau , en quinze parties , dont lâune sera le module sur lequel on rĂ©glera tout lâouvrage , en donnant deux de ces modules Ă ! Ă©paisseur du bas de la colonne, cinq et demi Ă Feutre-colonnement , et quatorze Ă la colonne sous le chapiteau. La hauteur du chapiteau sera dâun module, et la largeur de deux et une sixiĂšme partie. On suivra , pour le reste de lâouvrage , les mesures que nous avons indiquĂ©es pour les temples dans le quatriĂšme livre. iliienâ Si ce sont des colonnes ioniques , on divise alors sa tige , non compris le chapiteau ni la base , en huit parties et demie , pour en donner une Ă la grosseur de la colonne la base avec sa plinthe aura un diamĂštre et demi de large la forme du chapiteau sera telle qu elle est dĂ©crite dans le troisiĂšme livre. Si les colonnes sont corinthiennes , leurs tiges et leurs bases seront semblables Ă celles des colonnes ioniques, et leurs chapiteaux se feront dâaprĂšs les rĂšgles qui sont prescrites dans le quatriĂšme iivre. Les piĂ©destaux auront aussi des saillies inĂ©gales en forme dâescabeaux, comme on lâa expliquĂ© dans le troisiĂšme livre. Lâarchitrave , la corniche et tous les autres! membres seront proportionnĂ©s sur les colonnes, dâaprĂšs les rĂšgles quâon a donnĂ©es * dans les livres prĂ©cĂ©dens. I Lâespace qui reste dĂ©couvert au milieu des portiques , doit ĂȘtre ornĂ© dâune plantation dâarbres verds; les promenades qui se font dans ces lieux dĂ©couverts, sont trĂšs- i Câest-Ă -dire lâarsenal. LIVRE V , Chap. i x. salutaires ; premiĂšrement pour les yeux, parce que lâair devenu plus subtile, et purifie par la verdure , sâinsinue aisĂ©ment dans le corps , dont le mouvement a fait ouvrir les pores ; les humeurs grossiĂšres se dissipent ; la vue sâĂ©claircit et devient plus pĂ©nĂ©trante. Secondement, la chaleur quâoccasionne lâexercice, consume et attire hors du corps les humeurs et gĂ©nĂ©ralement tout ce qui sây trouve superflu et Ă charge Ă la nature ; cette vĂ©ritĂ© se prouve par les eaux qui sont Ă couvert et les sources souterraines , dâoĂč il ne sâĂ©lĂšve aucune vapeur ; tandis quâau contraire , le soleil attire beaucoup dâhumiditĂ© , dont il forme les nuages , de celles qui sont dans des endroits dĂ©couverts et exposĂ©es Ă lâair. Sâil est donc prouvĂ© que , dans les lieux dĂ©couverts * les mauvaises humeurs sont attirĂ©es hors du corps , comme les vapeurs le sont hors de la terre, on ne peut douter de la nĂ©cessitĂ© dâĂ©tablir , dans toutes les villes , des lieux spacieux, agrĂ©ables , et qui soient Ă dĂ©couvert pour servir Ă la promenade. Voici ce quâon fait pour que ces allĂ©es soient toujours sĂšches et jamais boueuses ; on creuse et on vuide le terrain par-dessous , aussi profond quâil est possible ; on construit ensuite , Ă droite et Ă gauche , des Ă©gouts , et dans le mur de ces aqueducs , qui est du cĂŽtĂ© de lâallĂ©e , on place des tuyaux inclinĂ©s vers lâĂ©gout, comme les pendentifs dâun frontispice. Cela achevĂ© , on remplit avec du charbon le reste de lâespace quâon a vuidĂ© , et lâon finit par le couvrir de sable pour applanir l'allĂ©e i tellement quâau moyen de la porositĂ© naturelle du charbon , et des tuyaux inclinĂ©s , lâhumiditĂ© sera Ă©puisĂ©e ou conduite dans les Ă©gouts , et lâailĂ©e sera toujours sĂšche, Lâintention de nos ancĂȘtres Ă©toit encore que ces plantations fussent une ressource, en cas de nĂ©cessitĂ©, pour les citoyens. On sait que, pendant un siĂšge , il nây a rien dont on manque plutĂŽt, que de bois ; de toutes les provisions , câest la plus difficile Ă faire. En effet il est aisĂ© de- sâapprovisionner de sel en temps ; de remplir de bled les greniers publics , et ceux des particuliers ; et, en cas de disette , les herbages , la viande et les lĂ©gumes peuvent y supplĂ©er de mĂȘme, si les eaux viennent Ă manquer , on peut faire des puits , ou recueillir les eaux de pluie mais le bois , si nĂ©cessaire pour faire cuire les alimens, est de toutes les provisions la plus difficile * Ă faire , parce quâil faut employer bien du temps pour en amasser une quantitĂ© suffisante. Dans des besoins pressans , on peut couper les arbres de ces promenoirs et en distribuer Ă chacun sa part. Ainsi lâon tire de ces promenoirs deux grands avantages ; ils entretiennent la santĂ© pendant la paix , et sont une ressource pour le bois en temps de guerre 5 il seroit Ă propos qu il sâen trouvĂąt dans toutes les villes , non seulement derriĂšre les théùtres , mais encore prĂšs de tous les temples. Il me semble que jâai suffisamment expliquĂ© ces objets ; nous allons donc passer Ă la description des bains. *38 I/ARCHITKTURE DE V I T R U V E. REMARQUE S. IĂŠs théùtres des anciens Ă©tant dĂ©couverts , on Ă©levoit, par derriĂšre , des portiques , oĂč le peuple pouvait se mettre Ă lâabri, quand il survenoit des pluies pendant les jeux. Le milieu de ces portiques Ă©toit occupĂ© par une plantation dâarbres, qui servoit de promenade en tout temps, et oĂč lâon se rĂ©unissoit sur-tout, en attendant le spectacle. Le dessin que Perrault donne de ces portiques et promenoirs , diffĂšre beaucoup de celui quâen donne Galiani et que nous avons adoptĂ©. Dans le plan de Perrault, le double portique de colonnes se trouve placĂ© en dehors dâun mur qui les sĂ©pare des allĂ©es dâarbres qui forment le promenoir; au contraire dans le nĂŽtre , le mur est en dehors , et il renferme les portiques et les promenoirs. Yoici les raisons qui ont fait adopter ce plan Ă Galiani lâauteur sâexprime ainsi parietes qui circumclu- dunt porticus ambuĂźationes. Sâil avoit voulu sâexprimer dans le sens que lui prĂȘte Perrault, il auroit dit, hypĆthras ambuĂźationes, dâautant plus quâil dit un peu aprĂšs , media vero spatia quĂŠ erunt sub divo inter porticus il dit inter porticus 3 tandis que, pour parler dans le sens de Perrault, il auroit dĂ» dire inter parietes. Perrault ayant placĂ© ce mur dans lâintĂ©rieur , a dĂ» changer plusieurs choses dans la suite du texte pour le mettre dâaccord avec son plan. En plaçant ce mur Ă lâextĂ©rieur, comme Galiani et nous lâavons fait, tous ces changemens deviennent inutiles; le reste du texte est parfaitement dâaccord avec le nĂŽtre. Ces portiques , comme on lâa vu , formoient un genre dâĂ©difice diffĂ©rent des autres ; quelques- unes de ses dimensions , il est vrai , Ă©toient rĂ©glĂ©es sur celles des temples ; mais la plupart PĂ©ioient par des rĂšgles particuliĂšres , comme lâobserve Vilruve. De toutes ces particularitĂ©s , la plus remarquable Ă©toit cet assemblage de colonnes ^de diffĂ©rĂ©es ordres dans le mĂȘme portique ; Ă droite , il en avoit de doriques, Ă gauche dâioniques ou corinthiennes ; les unes Ă©toient plus hautes , les autres plus basses. .Nous voyons, dans le'texte, que les colonnes ioniques ou corinthiennes de lâintĂ©rieur, doivent ĂȘtre plus hautes , dâune cinquiĂšme partie , que les colonnes doriques de lâextĂ©rieur. Cette diffĂ©rence dâune cinquiĂšme partie donneroit, aux colonnes de lâintĂ©rieur, une hauteur excessive en comparaison des autres ; câest pourquoi Perrault a raison de dire quâil faut lire XY au lieu de Y, ce qui au lieu dâune cinquiĂšme partie feroit seulement la quinziĂšme ; et quâon doit croire que, du nombre quinze, le caractĂšre X Ă©toit effacĂ© dans la copie , et quâil nâĂ©toit restĂ© que le Y. Vitruve cite dans ce chapitre les principaux portiques de la GrĂšce ; il parle entre autres de lâOdĂ©on que PĂ©riclĂšs fit bĂątir Ă AthĂšnes câĂ©toit lĂ oĂč on disputoit des prix de musique , dâoĂč lui vient son nom dĂ©rivĂ© du grec qui signifie chanson. Plutarque fait la description de çet Ă©difice le dedans, dit-il, Ă©toit occupĂ© par plusieurs rangs de siĂšges ou gradins , et portĂ© par une infinitĂ© de colonnes, mais la couverture Ă©toit un seul comble rond , qui se courboit tout autour , et se terminoit en pointe. On dit, ajoute-t-il , que la tente ou pavillon du roi XercĂšs lui servit de modĂšle. 11 rapporte ensuite la plaisanterie que le poĂšte Cratinus fait de PĂ©riclĂšs dans sa comĂ©die des Thraciens , oĂč se moquant de la tĂȘte de ce grand personnage , qui Ă©toit pointue , il dit quâelle fut le modĂšle sur lequel il fit construire la coupole de lâOdĂ©on» LIVRE V, C ii a p. x. 2 3 9 Perrault traduit le passage oĂč Vilruve parle de lâOdĂ©on , comme sâil entendoit quâon dut en Taire un auprĂšs de tous les théùtres . Galiam , suivant moi , a bien mieux saisi le sens de lâauleur , en Ă»iilt; citant cet Ă©difice comme un exemple câest-Ă -dire que lâOdĂ©on Ă©toit prĂšs du théùtre dâAthĂšnes, det* comme auprĂšs des autres Ă©loient les portiques -, ou pour mieux dire lâOdĂ©on servoit de portique ai* tps, tt théùtre dâAthĂšnes. Nous pouvons tirer de-lĂ , une preuve de plus en faveur de la figure que Ga- liani a donnĂ©e Ă ce portique , puisque Plutarque dit positivement que dans lâOdĂ©on , les colonnes Ă©loient dans lâintĂ©rieur de lâĂ©difice. ! JĂźil C kt errai vatia çi ; de P. CHAPITRE X. De quelle maniĂ©rĂ© il faut disposer les bains, et quelles sont leurs parties. DH. et dW de^. ht ter * Il faut, avant tout, choisir la situation la plus chaude possible, câest-Ă -dire , qui ne soit exposĂ©e ni au nord, ni au nord-est. Les places oĂč sont les bains chauds et les bains tiĂšdes , doivent avoir leurs fenĂȘtres au couchant d'hiver ; ou si remplacement ne le permet pas , il les faut tourner vers le midi ; parce que le temps oĂč lâon a coutume de se baigner, est principalement depuis le midi jusquâau soir il faut aussi faire en sorte que le bain chaud pour les hommes et celui pour les femmes, soient prĂšs lâun de lâautre , et quâils tirent le jour du mĂȘme cĂŽtĂ©, pour quâon puisse Ă©chauffer lâeau dans les vases de ces deux bains avec le mĂȘme fourneau. On mettra sur le fourneau trois vases dâairain ; lâun sera pour lâeau chaude, lâautre pour lâeau tiĂšde , et le troisiĂšme pour lâeau froide ; il faut placer et disposer ces vases de maniĂšre que de celui qui contient lâeau tiĂšde , il aille dans le vase qui contient lâeau chaude , autant dâeau quâon en aura tirĂ© de chaude ; et quâil entre la mĂȘme quantitĂ© du vase qui contient la froide, dans celui qui contient la tiĂšde. Par-lĂ le mĂȘme feu Ă©chauffera tous les fourneaux. ** Le pavĂ© des Ă©tuves se fait de la maniĂšre suivante. Il faut premiĂšrement faire un pavĂ© avec des carreaux dâun pied et demi , qui soit inclinĂ© vers le fourneau , de sorte que si lâon y jette une balle , elle nây puisse demeurer , mais quâelle retourne * Planches XY.âą et XYIII. m ** Planche XY. me LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. 24° vers lâentre'e du fourneau par ce moyen , la llamme se rĂ©pand plus facilement sous le pave' on e'iĂšve sur le pavĂ© des piles avec des briques de huit pouces , quâon espace et arrange de maniĂšre qu elles puissent soutenir des carreaux de deux pieds. Ces piles auront deux pieds de hauteur , et seront maçonnĂ©es avec de lâargile, mĂȘlĂ©e avec de la bourre ; elles porteront, comme on a dit, des carreaux de deux pieds sur lesquels sera le pavĂ©. Quant aux voĂ»tes des bains , le mieux est de les maçonner en pierre ; mais si elles sont en charpente , il faut les garnir et lambriser de poterie de la maniĂšre suivante. On fait des tringles ou des arcs de fer quâon attache Ă la charpente avec des crampons de la mĂȘme matiĂšre , placĂ©s prĂšs les uns des autres , de façon que les carreaux de poteries puissent se poser sur deux arcs ou tringles de fer sans les dĂ©border tellement que tout le lambris ne forme quâune seule voĂ»te , soutenue par du fer; on Ă©tend au-dessus de ce lambris un enduit dâargile mĂȘlĂ©e avec de la bourre, et par-dessous, sur le cĂŽtĂ© opposĂ© qui regarde le pavĂ©, on en met un autre composĂ© de chaux et de ciment quâon recouvre de stuc ou de quelque autre enduit. Il convient quâau-dessus des bains chauds , il y ait une double voĂ»te , pour que la vapeur qui pĂ©nĂštre se dissipe dans lâintervalle qui les sĂ©pare et ne pourrisse pas aussi vite la charpente. On doit proportionner la grandeur du bain , dâaprĂšs la population , et lui donner les dimensions que voici la largeur, non compris le reposoir qui est autour de la baignoire et de la loge , doit avoir un tiers moins que la longueur. Le bain doit ĂȘtre Ă©clairĂ© par en haut, afin que lâombre de ceux qui sont Ă lâentour nâintercepte pas la lumiĂšre. Il faut que lâespace qui entoure le bain , soit assez large pour contenir ceux qui attendent que les premiers venus qui sont dans le bain , en sortent. La loge depuis le mur jusquâĂ la cloison ne peut avoir moins de six pieds de large, parce que le degrĂ© infĂ©rieur et le coussin en emportent deux. Le laconicum et son Ă©tuve pour faire suer, doivent ĂȘtre auprĂšs de la chambre tiĂšde ; 1 la largeur du laconicum doit Ă©galer sa hauteur jusquâĂ lâendroit oĂč commence la convexitĂ© de sa voĂ»te qui forme un hĂ©misphĂšre au milieu de cette voĂ»te , on doit laisser une ouverture pour y suspendre avec des chaĂźnes un bouclier dâairain , par le moyen duquel en le baissant ou haussant , on pourra augmenter ou diminuer la chaleur qui fait transpirer. Il faut quâil forme une rotonde, pour que la vapeur chaude $e rĂ©pande Ă©galement dans le milieu et tout autour. 1 Voyez nos remarques Ă la fin du chapitre suivant, REMARQUES. LIVRE V, C h a p. x. 241 REMARQUES. L'USAGE clĂ©s bains , si rĂ©pandu chez la plupart des nations , Ă©toit sur-tout trĂšs-frĂ©quent chez les anciens. Les Grecs sâen servoient beaucoup , ainsi que les Romains , pour entretenir la propretĂ© , parce quâils portoient des chemises de laine , le linge Ă©tant alors fort rare. Outre les bains des particuliers , il y avoit plusieurs bains publics dans Rome. Yilruve dĂ©crit dans ce chapitre les Ă©difices qui y Ă©loient destinĂ©s ; on connoĂźt encore lâemplacement de plusieurs qui existoient de son temps , entre autres les thermes de Paul Emile , sur les ruines desquels est aujourdâhui bĂąti le palais Cera. Mais par la suite les empereurs en firent Ă©lever dont rien nâĂ©gala la magnificence ; tels furent les thermes de NĂ©ron , de Titus , de DioclĂ©tien , dont les ruines existent encore en grande partie. Ces superbes Ă©difices Ă©loient non-seulement destinĂ©s aux bains , mais encore Ă tous les exercices du corps , et Ă lâĂ©lude de toutes les sciences ; ils renfermoient de plus de grandes places , de grandes galeries , des portiques ornĂ©s de peintures et des statues grecques , des allĂ©es dâarbres , et des espĂšces de bois pour la promenade , des jardins , des fontaines et toutes sortes de magnificences et dâagrĂ©mens. Les thermes de DioclĂ©tien Ă©toient les plus magnifiques et les plus cĂ©lĂšbres de tous ; ils occupoient un terrain immense , qui renferme aujourdâhui le couvent des Chartreux , lâĂ©glise S. 1 Bernard , les gre'niers de la chambre apostolique , la place de Termini ; ce qui forme une enceinte de 1200 pas. Une grande partie des bĂąlimens subsistent encore ; la grande salle a Ă©tĂ© convertie en une superbe Ă©glise nommĂ©e Sainte Marie des Anges , qui est celle des Chartreux. Dans une autre partie des Ă©difices, on a placĂ© les grenieiâs de la chambre apostolique , etc. Le nombre des statues quâon a trouvĂ©es dans ces thermes , les incrustations des salles , les grandes colonnes , dont les Chartreux se sont servis pour orner leur Ă©glise , et les ruines quâon voit encore , ne permettent pas de douter des richesses quâils renfermoient , non plus que de leur magnificence. On voit par-lĂ combien les anciens Ă©toient recherchĂ©s dans leurs bains ; ils en avoient de plusieurs espĂšces ; outre ceux dâeau chaude et dâeau tiĂšde , ils prenoient encore des bains secs , en entrant dans des Ă©tuves, ou chambres chaudes destinĂ©es Ă exciter la transpiration ; ces sortes de bains sont encore fort en vogue en Russie. Dans les environs de Naples , prĂšs de Pouzzole , jâai vu les Ă©tuves , dites de b.* Janvier , dont on continue Ă faire usage pour se faire suer , Ă la maniĂšre des anciens. CicĂ©ron et Celse appeloient cette sorte de bain asseum, pour le distinguer du bain dâeau chaude quâils nomment calidam lavationem 3 qui est celui que Yilruve dĂ©signe ici sous le nom de caldarium. Comme il nâexiste plus dâĂ©difices semblables Ă ceux des anciens pour contenir ces diffĂ©rens bains, ce chapitre, oĂč Yilruve en fait la description , Ă©toit assez difficile Ă expliquer; aussi les interprĂštes ont peu dâaccord dans la maniĂšre de le rendre. Nous voyons que lâeau destinĂ©e pour les bains , Ă©toit chauffĂ©e par un fourneau nommĂ© liypo- eauste , placĂ© sous les salles des bains ; il Ă©chauffoit aussi , Ă ce quâil paroĂźt , la chambre chaude ou lâĂ©tuve Ă faire suer , et mĂȘme les autres places , par des tuyaux qui circuloient sous le pave. 3i LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. 242 Celle eau , Ă ce que dit Yitruve , Ă©toit contenue dans trois vases ; un pour lâeau chaude , n n pour lâeau tiĂšde , et lâautre pour lâeau froide. Galiani trouve que ces trois vases ne dĂ©voient pas suffire pour contenir lâeau dâun bain public , ce qui lui fait croire que par lĂ , lâauteur entend trois diffĂ©rentes especes de vases, dont il y auroit eu un certain nombre pour chaque sorte dâeau. 11 ne connoissoit pas , sans doute , la capacitĂ© des vases que les anciens employoient Ă cet usage ; jâen ai vu plusieurs dans diffĂ©rens endroits de Rome , entre autres dans la cour du monastĂšre des BĂ©nĂ©dictins prĂšs de la basilique de S. 1 Paul, hors des murs et dans les jardins de la Yiila Borghese j on avoil ajoutĂ© Ă ceux-ci des pieds et des piĂ©destaux , pour en faire, de trĂšs-beaux vases qui dĂ©co- roient , avec dâautres ornemens , le tour dâune des belles fontaines de ce jardin. Ces vases ont au moins six pieds de diamĂštre ; ils conienoient autant dâeau tiĂšde et dâeau chaude quâil en faut pour un trĂšs-grand bain ; ils ont assez la forme de ceux qui sont reprĂ©sentĂ©s dans la peinture trouvĂ©e dans les thermes de Titus , qui est gravĂ©e Ă la fin de ce livre. Il nâest pas aisĂ© de retrouver comment ces vases Ă©toient disposĂ©s , pour que , comme le veut Yitruve, de celui qui contient lâeau tiĂšde, il aille, dans celui qui contient lâeau chaude, autant dâeau quâon en aura tirĂ© de chaude, et quâil entre la mĂȘme quantitĂ© du vase qui contient la froide, dans celui qui contient la tiĂšde. Cesarianus et Caporali ont reprĂ©sentĂ© ces trois vases placĂ©s les uns sur les autres. Celui qui contient lâeau froide en haut ; celui qui contient la tiĂšde au milieu , et celui qui contient la chaude sur le fourneau. Quand mĂȘme tout iroit bien de cette façon , il sây Irouveroit toujours un grand inconvĂ©nient, comme lâobservĂ© trĂšs-bien Perrault ; câest quâil est impossible que la chaleur, qui monte trĂšs-vĂźte, ne se communique bientĂŽt , en passant du vase infĂ©rieur qui est immĂ©diatement sur le feu , dans celui du milieu et dans celui dâen haut , et que lâeau nây devienne mĂȘme plus chaude que dans celui dâen bas. Pour Ă©viter cet inconvĂ©nient , Perrault a imaginĂ© de placer ces trois vases lâun derriĂšre lâautre sur un mĂȘme niveau ; et pour faire communiquer lâeau de lâun Ă lâautre , comme le veut Vitruve , il place deux siphons dont lâun conduit lâeau froide dans la tiĂšde, et lâautre lâeau tiĂšde dans la chaude. Galiani, peu satisfait de ces deux moyens , en imagine un troisiĂšme beaucoup plus simple , oĂč il nâemploie le secours dâaucun instrument. Il place le dessus des trois vases de niveau , comme on le voit dans la 3. BlÂŁ fĂźg. de la XY.â* planche. Celui qui contient lâeau chaude est immĂ©diatement posĂ© sur le fourneau; celui qui contient lâeau tiede est un peu plus loin , et participe un peu de la chaleur , au moyen dâun rĂ©verbĂšre ; finalement celui qui contient lâeau froide est le plus en arriĂšre , posĂ© sur une masse de maçonnerie , oĂč il ne peut ressentir aucune impression de la chaleur. Des tubes placĂ©s au fond des vases , font communiquer lâeau de lâun Ă lâautre ; tandis que dâautres tuyaux conduisent lâeau de chaque vase dans la baignoire , dâoĂč , par le moyen des robinets , on en pouvoil tirer Ă volontĂ©. Finalement il place un autre conduit au niveau de lâembouchure du vase oĂč est lâeau froide , lequel y amĂšne lâeau pour le remplir Ă mesure quâil se vuide. Galiani observe que toutes les figures quâon avoit imaginĂ©es , avant la sienne , exigeoient toutes le secoursâ de quelquâun , pour faire passer lâeau fjoide dans la tiĂšde, et la tiĂšde dans lâeau chaude ; tandis quâon voit clairement, par les expressions Ă AĂŒS HTf O m' fjei^tubie antique tieke mes tiiimes uhe tittus 5 LIVRE V, C h A p. x. 243 de VitruvĂ© , que Cetle opĂ©ration se doit faire dâelle-mĂȘme , sans le secours de personne. lia collo- canda , uli ex tepidario in caldarium > quantum aquĆ caldĆ exierit, influĂąt de frigidaria in tepidarium ad eumdem modum ; or , dit-il, on voit clairement, dans la maniĂšre que jâai inventĂ©e ci-dessus , que les trois vases Ă©tant de niveau , aussitĂŽt que lâeau diminue dans lâun , lâautre lui en fournit de suite , autant quâil en est sorti et comme les dessous des vases ne sont pas exactement de niveau , le froid Ă©tant un peu plus Ă©levĂ© que le tiĂšde , et celui-ci un peu plus haut que le chaud , on conçoit aisĂ©ment que, lorsque lâeau tiĂšde diminue , lâeau froide y entrera plutĂŽt que lâeau chaude , dont le fond est plus bas si lâon suppose sur-tout quâon a placĂ© des soupapes au bout des tubes de communication qui empĂȘcheroient lâeau de sortir. \ Galiarii, dans sa traduction , a placĂ© , Ă la fin de ce livre , une gravure qui reprĂ©sente les bains des anciens ; il lâa fait graver dâaprĂšs une peinture antique qui a Ă©tĂ© trouvĂ©e Ă Rome dans les thermes de Titus dans celte peinture que jâai aussi fait graver , on voit les trois vases situĂ©s lâun au-dessus de lâautre , sur trois degrĂ©s , de maniĂšre que le fond du deuxiĂšme se trouve plus Ă©levĂ© que lâembouchure du premier, et le fond du troisiĂšme, plus Ă©levĂ© que lâembouchure du second; tellement quâil est aisĂ© de voir comment le vase supĂ©rieur verse son eau dans le vase infĂ©rieur. Je ne serois pas Ă©loignĂ© , dit Galiani , dâadopter cetle disposition des vases , si je ne çroyois que le peintre les a placĂ©s ainsi par pure fantaisie , pour mieux exprimer comment lâeau passe dâun vase dans un autre , ce qui Ă©toit trĂšs-difficile Ă rendre en peinture ou bien que du temps de Titus , ou du moins dans ses thermes , ils Ă©toient placĂ©s de cetle maniĂšre car il est impossible , dit-il, dây rapporter aucune parole du texte de Yitruve. Câesi pourquoi il a imaginĂ© la maniĂšre que jâai rapportĂ©e tout-Ă -lâheure , quâil soumet au discernement des lecteurs Ă©clairĂ©s. On doit convenir , cependant , que cette peinture trouvĂ©e dans les thermes de Titus , est dâun grand secours pour expliquer ce que Yitruve rapporte clans ce chapitre sur les bains des anciens. La chambre chaude , ou lâĂ©tuve pour faire suer , sây trouve reprĂ©sentĂ©e avec tous ses dĂ©tails , telle que Tilruve lâa dĂ©crite. 11 nomme suspensurĆ caldarium , et ensuite suspensio , le pavĂ© de cetle chambre ou Ă©tuve ; parce quâil Ă©toit supportĂ© par quelques petits piliers , dont il fait immĂ©diatement la description , et quâon voit reprĂ©sentĂ©s dans cette peinture des thermes de Titus. Ce vuide , qui se trouvoit sous le pavĂ© , Ă©toit Ă©chauffĂ© par un fourneau nommĂ© hypocauste ; ce qui procuroit dans la chambre qui Ă©toit par-dessus, une partie de la chaleur nĂ©cessaire pour faire suer. Dans le deuxiĂšme volume des nouvelles littĂ©raires de Florence de lâan 1741 , on lit dans une lettre , Ă©crite de Rome 1 , que lorsquâon dĂ©molit une partie de la petite Ă©glise de S. Etienne in piscipola , pour lâagrandir , M. Palazzi , homme trĂšs-instruit , et versĂ© sur-tout dans les connoissances qui concernent lâantiquitĂ© , remarqua , sous les fondemens , un pavĂ© formĂ© avec des tuiles cassĂ©es ; il Ă©toit soutenu par plusieurs petits piliers isolĂ©s , formant dans tous les sens des lignes droites , ayant chacun la grosseur dâun palme carrĂ©, faits avec des briques qui avoient exactement celte mesure, et quâon avoit placĂ©es lâune sur lâautre, sans y mettre de la chaux , mais seulement de lâargile ; la distance de lâun Ă lâautre Ă©toit dâun palme et demi, et leur hauteur de trois palmes ils soulenoient 1 Page 180. 3i. LâARCHITECTURE DE VITRUVE. 44 des carreaux de terre cuite , qui avoient prĂšs de trois palmes carrĂ©s ; ce qui formoit un pavĂ© trĂšs- rĂ©gulier , sur lequel Ă©toit le pavĂ© formĂ© avec la mastique composĂ© de tuiles pilĂ©es et de plĂątre, semblable Ă lâenduit qui couvre les murs de la piscine admirable quâon voit au cap de MiscĂ©ne prĂšs de Naples. Il est aisĂ© de voir que ce pavĂ© Ă©toit celui dâune Ă©tuve ou dâune chambre chaude, comme celle que dĂ©crit ici "Vitruve; elle faisoit sans doute partie de quelque palestre ou de thermes. Cependant lâauteur de la lettre nâest pas de ce sentiment ; il la termine en disant que M. Palazzi est persuadĂ© que cette fabrique est celle dâune piscine ou dâun rĂ©servoir dâeau. Outre ces tuyaux de chaleur, qui Ă©toient sous le pavĂ© des Ă©tuves pour faire transpirer , il y avoit encore le laconicum qui servoit Ă lâĂ©chauffer davantage, en augmentant la chaleur de diffĂ©rens degrĂ©s, suivant le dĂ©sir des personnes qui sây trouvoient. Ce laconicum nâĂ©toit autre chose quâune petite rotonde terminĂ©e en coupole qui convroit une ouverture pratiquĂ©e dans le pavĂ© de lâĂ©tuve , pour y laisser passer la flamme de lâhypocauste , ou du fourneau. On augmenloit, par-lĂ , la chaleur dans lâĂ©tuve , autant quâon le jugeoit Ă propos , par le moyen dâun bouclier dâairain , quâon Ă©levoit ou baissoit avec une chaĂźne , Ă laquelle il Ă©toit attachĂ©. Le laconicum ressembĂźoit assez Ă certains poĂȘles modernes, et produisoit le mĂȘme effet, puisque, au lieu de la clef ou tiroir avec le secours desquels nous augmentons ou diminuons la chaleur des nĂŽtres, les anciens se servoient dâune espĂšce de bouclier. Avant Galiani, tous les interprĂštes avoient fait du laconicum 3 une chambre assez spacieuse , diffĂ©rente de lâĂ©tuve, mais destinĂ©e au mĂȘme usage. La peinture trouvĂ©e dans les thermes de Titus, et lâexamen plus particulier que ce traducteur italien a fait du texte , lâont persuadĂ© que ses prĂ©dĂ©cesseurs avoient pris la'partie pour le tout. Voici comme il sâexprime Ă cet Ă©gard * Vitruve, dans le chapitre suivant , met lâĂ©tuve pour faire transpirer , au nombre des parties qui composent la palestre concamerata suclatio longitudine duplex , quam latitudine. En dedans de cette Ă©tuve se trouvoit, dâun cĂŽtĂ© , le laconicum , o , plane. XVIII et de lâautre , le bain dâeau chaude o 3 quĂŠ habeat in versuris ex una parte laconicum . ex adverso laconici caldam lavationem . Si donc le laconicum se trouve sur un des cĂŽtĂ©s de lâĂ©tuve , il est clair quâil nâest pas lâĂ©tuve, mais quâil en fait partie dâailleurs si ce laconicum Ă©toit lâĂ©tuve, Ă quoi auroit servi la chambre pour faire suer, concamera sudatio , ou plutĂŽt Ă quoi auroit servi deux Ă©tuves? 11 est certain, ajoute Galiani , que le passage du dixiĂšme chapitre est obscur; mais que ces expressions du chapitre suivant laconicum ad eumdern modum , uti suprd scriptum est cornpositum , prouve que lâauteur nâa dĂ©crit dans ce passage du X. e chapitre, que le seul laconicum , malgrĂ© ces expressions dont il se sert, laconicum suclalionesque , quâil a employĂ©es sans doute pour celles-ci laconicum in sudationibus , qui eussent Ă©tĂ© beaucoup plus claires. La maniĂšre dont est reprĂ©sentĂ©e dans la peinture tirĂ©e des thermes de Titus, la place destinĂ©e aux bains dâeaĂč chaude caldam lavationem , ainsi que les remarques faites par moi-mĂȘme dans les ruines des diffĂ©rents thermes, mâont engagĂ© Ă donner une nouvelle figure de cette place, qui diffĂšre assez de celles quâen ont donnĂ©es mes prĂ©dĂ©cesseurs, mais qui me paroĂźt plus conforme au sens du texte. L I Y R E V, C ii a p. x. 245 Tous ceux qui ont figurĂ© ces bains avant moi, du moins que je sache , ont reprĂ©sentĂ© la baignoire enfoncĂ©e au milieu du pavĂ© , de maniĂšre que pour y descendre, ils ont placĂ© quatre petits escaliers dans les coins. Au contraire dans la peinture trouvĂ©e dans les thermes de Titus , la baignoire forme une cuve Ă©levĂ©e au-dessus du pavĂ© ; par-dessous se trouve lâhypocauste qui entretient une chaleur douce dans la place , afin que ceux qui entrent ou sortent du bain , nâĂ©prouvent aucun froid. Jâai vu , Ă Rome , plusieurs de ces baignoires qui avoient Ă©tĂ© tirĂ©es hors des anciens thermes ; il sâen trouve deux entre autres , formĂ©es chacune dâun seul morceau de granit dâEgypte , qui servent prĂ©sentement de bassin aux deux fontaines qui sont sur la place FarnĂšse ; elles ont 17 pieds 4 pouces de longueur et 4 pieds deux pouces de profondeur ; elles sont ovales et ressemblent Ă celle qui est reprĂ©sentĂ©e dans la peinture que je viens de citer. Je ne veux pas dire par-lĂ que les baignoires des anciens Ă©toient toutes formĂ©es dâune seule pierre , et quâelles nâĂ©toient pas plus grandes que celles-ci, qui ne seroient certainement pas suffisantes pour un bain public , comme celui dont il sâagit , qui devoit ĂȘtre trĂšs- spacieux , puisque Vitruve veut quâil soit proportionnĂ© au nombre des habitans ; et dâailleurs on sait quâil y avoit des bains si grands quâon y pouvoit nager, et quâon nommoit pour celle raison colymbe - thrĆ. Mais je dis que ces bains, si spacieux quâils fussent, Ă©toient toujours Ă©levĂ©scomme celui que reprĂ©sente la peinture que jâai citĂ©e ; soit quâils fussent faits de bois ou maçonnĂ©s. Pour faire comprendre prĂ©sentement quâelle Ă©toit la construction de la salle oĂč lâon prenoit les bains, ainsi que les expressions dont "Vitruve se sert pour dĂ©signer les diffĂ©rentes parties qui la corn- posoient , je remarquerai dâabord que câest Ă celte salle quâil donne particuliĂšrement le nom de bal- neum ; tandis quâil appelle les autres, lâune tepidarium, frigidarium , etc.; il dit que-sa longueur , non compris le reposoir qui est autour de la baignoire et de la loge prceter scalam labri et alvei, doit avoir un tiers moins que sa longueur ; du moins câest ainsi que jâai interprĂ©tĂ© ce passage, parce que je crois , avec tous les autres interprĂštes , que labrum signifie les bords de la baignoire qui contenoit lâeau pour sây laver ; elle est indiquĂ©e fig. a dans la XV. e planche. Que schola tirĂ© du mot grec ç%o\y signifie, comme dans cette langue , un lieu oĂč lâon demeure sans agir et sans travailler du corps , et qui Ă©loit lâendroit dans les bains oĂč ceux qui vouĂźoient se baigner , altendoient quâil y eĂ»t place dans lâeau ; je lâai rendu comme Perrault par le mot reposoir, en supposant, dâaprĂšs la peinture des thermes de Titus, que câĂ©toit des espĂšces de gradins, et dâaprĂšs les expressions de Vitruve , quâils sâĂ©lendoient autour de la baignoire et de la loge. Jâai indiquĂ© ces gradins C. C. fig. citĂ©e. Je nâai pas cru qu âalveus vouloit dire ici autre chose quâune loge ou une niche , suivant sa vraie signification ; parce que dans la peinture des thermes de Titus , on voit , en effet, plusieurs loges ou niches , dans les salles destinĂ©es aux bains câĂ©toit sans doute lĂ oĂč lâon alloil se dĂ©shabiller; il rĂ©gnoil autour un reposoir ou banc, schola , sur lequel Ă©toit un coussin avec un degrĂ© par-dessous; par-devant, Ă©toit une espĂšce de cloison , pluteum , faite dans Je genre de celles que jâai indiquĂ©es , en interprĂ©tant le mot pluteum dans mes remarques , Ă la fin du premier chapitre de ce livre ; cette loge est marquĂ©e dd dans la figure e. / 246 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE XL De quelle maniĂ©rĂ© il faut construire les Palestres et les Xystes. *^uoique les palestres ne soient pas en usage clans lâItalie , il me semble cependant cpiâil convient de dĂ©crire ici la forme de ces Ă©difices, et de faire connoĂźtre comment les Grecs les construisent. Il faut faire clans les palestres des pĂ©ristyles carrĂ©s ou oblongs , qui aient deux stades de tour ; câest ce que les Grecs appellent diavlon i. Trois de ces portiques doivent ĂȘtre simples , et le quatriĂšme , qui regarde le midi, doit ĂȘtre double , afin que le vent ne puisse pousser la pluie jusquâau fond. Le long des trois portiques simples , on bĂątit de grandes salles , 2 oĂč sont des siĂšges , sur lesquels peuvent sâasseoir les philosophes , les rhĂ©teurs et les autres gens de lettres pour y discuter des sciences. Le long du double portique , doivent se trouver les piĂšces suivantes on place au centre , lephebeum ; câest une trĂšs-grande salle avec des siĂšges , qui doit ĂȘtre un tiers plus longue qu elle nâest large ; Ă sa droite est le coriceum , 3 et immĂ©diatement aprĂšs le conisterium 4 ; ensuite prĂšs de cette place , clans lâangle du portique , est le bain clâeau froide que les Grecs nomment latron 5 ; Ă gauche de l'e- phebeum est letĆoiesium 6. Ensuite prĂšs de ce dernier est la chambre froide, dâoĂč lâon va par un passage au prognigeum 7 qui est dans lâautre angle du portique Ă cĂŽtĂ© ; mais en dedans , vis-Ă -vis de la chambre froide , est lâĂ©tuve voĂ»tĂ©e pour faire suer ; elle doit ĂȘtre deux fois plus longue que large en dedans de cette Ă©tuve , se trouve dâun cĂŽtĂ© le laconicum , construit comme nous lâavons expliquĂ© plus haut, et de lâautre cĂŽtĂ© le bain dâeau chaude. Il faut distribuer les portiques en dedans de la palestre, dâaprĂšs les rĂšgles que nous avons dĂ©jĂ enseignĂ©es. * Planche XVIII. me 4 Le magasin fie la poussiĂšre. 1 Câest-Ă -dire long comme une flĂ»te. 5 Câest-Ă -dire le lavoir. 2 ExedrĂŠ, 6 Câest-Ă -dire le lieu oĂč lâon conserve lâhuile. 3 Câest-Ă -dire le jeu de paume. Yoyez lâexplication 7 C'est-Ă -dire le fourneau, Ă la fin de ce chapitre, LIVRE V ; C h a p. xi H 7 On fait , en dehors, trois portiques ; lâun pour sortir de la palestre , et les deux autres Ă droite et Ă gauche sont pour les stades celui de ces portiques qui regarde le septentrion , doit ĂȘtre double , et fort large 1 autre sera simple , mais construit de façon quâil se trouvera , tant le long du mur que le long des colonnes , des chemins Ă©levĂ©s qui auront au moins dix pieds de large ; entre les deux , se trouvera un chemin bas qui sera enfoncĂ© dâun pied et demi , dans lequel on descendra par deux petits escaliers ce chemin enfoncĂ© aura , dans le fond , au moins douzĂš pieds de large. Par ce moyen, ceux qui se promĂšneront habillĂ©s , tout autour, sur les chemins Ă©levĂ©s , ne seront pas dĂ©rangĂ©s par ceux qui sâexerceront dans le bas. Les Grecs appellent ce portique Ws i , il couvre un stade oĂč les athlĂštes peuvent sâexercer pendant l'hiver. Voici ensuite comme on fait les xistes on plante , entre les deux portiques , des bosquets , ou des platanes , en laissant entre les arbres , dâespace en espace , des allĂ©es, avec des places pour se reposer, faites en srnalte 2 . A cĂŽtĂ© du xiste, et du portique double , on laisse une allĂ©e dĂ©couverte , que les Grecs appellent peri- dromidas 3 qui sont nos xistes dĂ©couverts , dans lesquels les athlĂštes en sortant du xiste couvert, viennent s'exercer pendant lâhiver quand il fait beau. DerriĂšre ce xiste, on doit construire im stade qui soit assez ample pour que beaucoup de monde puisse sây placer et voir Ă lâaise les exercices de la lutte. Telles sont les rĂšgles quâon doit suivre pour construire f comme il faut, les diffĂ©rons Ă©difices qui se trouvent dans lâenceinte des villes. REMARQUE S. On sait quelle importance les Grecs allacboieni Ă la cĂ©lĂ©bration des jeux Olympiques; on les croyoit instituĂ©s par Hercule ; ils furent rĂ©tablis par iphitus , et ils avoienl lieu de 4 en 4 ans , ou pour parler exactement, de 5o mois en 5o mois , ce qui faisoit une olympiade , et câĂ©toit par les olympiades quon compioil chez eux le temps. Sâilexisloit une guerre entre quelques peuples de la GrĂšce, lors de la cĂ©lĂ©bration de ces jeux , on suspendoit, pendant ce temps-lĂ , toutes hostilitĂ©s pour les reprendre aprĂšs. Rien nâĂ©toit plus glorieux que dây ĂȘtre proclamĂ© vainqueur. CicĂ©ron , dans son plaidoyer pour i Ce mot grec signifie un lieu uni aplani. Lâauteur 2 Voyez lâexplication de ce mot Ă la fin de ce cha- entend ici le xiste proprement dit qui Ă©toit couvert , tan- pitre. dis que celui dont il parle ensuite Ă©toit dĂ©couvert et 3 Câest-Ă -dire , fait pour courir tout autour, diffĂ©rent de celui-ci. Voyez les remarques Ă la fin du chapitre , ainsi que la planche XVlIL me et son explication. 48 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Flaccus, et ailleurs , remarque que le consulat dans son ancienne splendeur, et le triomphe dans toute sa majestĂ© , nâavoient rien de plus grand Ă Rome , que la couronne olympique en GrĂšce. On proclamoit le vainqueur en prĂ©sence de toute la GrĂšce assemblĂ©e ; on lui Ă©levoit des statues, non seulement Ă Olympie , mais encore dans sa ville natale , qui partageoit la gloire de sou triomphe. On sent combien la jeunesse grecque Ă©toit jalouse de cet honneur , et comme elle devoit sâexercer pour devenir habile dans ces sortes de jeux. Dans les villes, des Ă©difices publics Ă©toient destinĂ©s Ă ces exercices ; de ce nombre Ă©toient les palestres dont Y'itruve fait la description dans ce chapitre. Ces jeux consistoient en neuf exercices, quâon ĂŻrommoit gymnastiques, de yvfxvĂ q , nu, parce quâon Ă©toit nu, ou presque nu, pour sây livrer. CâĂ©loit la lutte , le pugilat, le pancrace, la course, le saut, le disque , lâoplomachie. On les appeloit aussi jeux palestriques , parcequâon sây exerçoit dans les palestres dont nous parlons, lesquelles tiroient elles-mĂȘmes leur nom du mot grec ftaXaiçTpcc qui signifie lutte ou combat. Si lâon veut avoir une connoissance exacte de ces jeux ou combats si cĂ©lĂšbres dans lâantiquitĂ© , il faut lire les savantes dissertations que Burette a faites sur la gymnastique des anciens; elles sont imprimĂ©es dans le troisiĂšme volume des mĂ©moires de lâacadĂ©mie des inscriptions et belles- lettres. Jây renvoyĂ© donc le lecteur. La palestre , chez les Grecs , Ă©toit un Ă©difice public pour toutes sortes dâexercices tant de lâesprit que du corps. Il Ă©toit composĂ© dâune place entourĂ©e de colonnes qui avoit deux stades de tour. Le stade Ă©toit un espace de 125 pas qui faisoit environ go de nos toises. Le mot est dĂ©rivĂ© du verbe qru , qui signifie sâarrĂȘter , parce quâon dit quâHercule couroit , tout dâune haleine , cet espace au bout duquel il sâarrĂȘloit. En dehors des portiques formĂ©s par ces colonnes, se trouvoient plusieurs autrĂ©s places ou salles. Trois cĂŽtĂ©s Ă©toient occupĂ©s par les salles oĂč les philosophes et les sa- vans alloient discuter des sciences. Pausanias, en faisant la description de la palestre, ou lieux dâexercices de la ville dâElis, dit , 1 , que dans ce mĂȘme gymnase , ou lieu dâexercice, les ElĂ©ens ont leur sĂ©nat, oĂč les savans viennent donner des preuves de leur capacitĂ© , soit par des discours faits sur-le-champ , soit dans tout autre genre de littĂ©rature ce qui se rapporte , Ă ce que dit Yitruve. On retrouve Ă©galement dans celle description que fait Pausanias du gymnase dâElis , presque toutes les piĂšces qui composoient la palestre dont on vient de parler. ^ Le mot execlra } que Yitruve employĂ© ici pour dĂ©signer ces salies oĂč les savans se rĂ©unissoient , est grec. Les auteurs ne sont pas dâaccord sur sa juste signification. Alexander ab Alexandro , croit que câĂ©toit une galerie ouverte en maniĂšre de loges. Accurse le prend pour une galerie entourĂ©e de fenĂȘtres ; il signifie nĂ©anmoins, Ă la lettre, une figure qui a six cĂŽtĂ©s, comme un cube. Dans ce cas ce devoit ĂȘtre une salle couverte qui auroit six cĂŽtĂ©s et quatre murailles , le plafond et le pavĂ©. Il paroĂźt au contraire, dâaprĂšs ce que Yitruve dit dans le chapitre 5. mc du YI. me livre, et dans le g. me du YIĂ. me livre oĂč il parle encore des exĂšdres, que câĂ©toit des lieux fort ouverts , exposĂ©s aux rayons du soleil et de la lune; ce,qui sembleroit appuyer lâopinion dâAlexander ab Alexandro. O hiv- "VI. me » Cliap. 23 , DâaprĂšs » *49 DâaprĂšs cela les places dĂ©voient ĂȘtre trĂšs-Ă©clairĂ©es , soit quâelles eussent beaucoup de grandes fenĂȘtres , soit quâelles ne fussent fermĂ©es que de trois cĂŽtĂ©s , ayant lâautre ouvert , portĂ© par des colonnes , comme on voit quâĂ©loient faites celles quâon nomme encore communĂ©ment aujourdâhui les exedres y dans lâenceinte des thermes de DioclĂ©tien Ă Rome. Le long de lâautre portique de la palestre se trouvoient des places destinĂ©es Ă dâautres usages. Le milieu Ă©toit occupĂ© par V ephebeum ; câĂ©toit lĂ oĂč lâon apprenoil aux jeunes gens qui sortoient de lâadolescence , les premiers principes de la gymnastie. On appeloil ainsi cet endroit, parce que par spyÂŁov on entendoit en GrĂšce ceux qui avoient atteint la pubertĂ© qui commence Ă i4 ans. A droite de lâephebeum , se trouvoit le coriceum. Comme Perrault et Galiani , jâai suivi le sentiment de Baldus , qui fait dĂ©river ce mot du grec %opĂčxtov qui signifie une balle ou ballon. Nous C savons que le jeu de paume Ă©toit en usage chez les anciens $ comme nous ne voyons pas que lâauteur assigne , pour ce jeu , un autre emplacement que celui-ci dans la palestre , nous devons croire quâil y Ă©toit destinĂ©, dâautant quâil y convient parfaitement, Ă©tant dâune Ă©tendue convenable., plus longue que large. Dâautres interprĂštes font dĂ©river ce mot de qui signifie en grec une jeune fille , et dâaprĂšs cela , ils ont fait du coriceum un lieu dâsxercice pour les jeunes filles , sans rĂ©flĂ©chir quâen GrĂšce il Ă©toit interdit aux femmes de sâapprocher des lieux oĂč la jeunesse sâexerçoit Ă ces sortes de jeux. ImmĂ©diatement aprĂšs , du mĂȘme cĂŽtĂ© , Ă©toit le conisterium y câest-Ă -dire le lieu oĂč lâon conserve la poussiĂšre du mot grec %6viç , parce que câĂ©toit lĂ que les lutteurs en alloient prendre , pour n jeter sur leurs adversaires , dont le corps Ă©toit couvert dâhuile , afin dâavoir plus de prise. A gauche de Y ephebeum, Ă©toit YelĆotesium y lieu oĂč lâon conservoit lâhuile tĂcucv et oĂč sâalloient oindre ceux qui sâexerçoient , non seulement pour rendre leurs membres plus glissans et moins capables de donner prise , mais encore pour les rendre plus souples , et plus propres aux exercices. Outre lâhuile dont nous venons de parler , il y en avoit dâautres , quâon employoit aprĂšs la lutte , sur les membres qui avoient Ă©tĂ© froissĂ©s , et dâautres encore quâon prenoit avant dâentrer dans le bain. PrĂšs de YelĆotesium , ajoute Vitruve , Ă©toit la chambre froide , frigidarium y câest ainsi du moins que jâai interprĂ©tĂ© ce mot, qui ne peut signifier le bain dâeau froide , dont il a dĂ©jĂ parlĂ© , en lui assignant une autre place en F , et le nommant lavatioi Ce devoit ĂȘtre une place prĂšs d lâĂ©tuve et du bain dâeau chaude , oĂč se tenoient , pendant quelque temps , les personnes qui en sortoient, pour se rĂ©froidir peu-Ă -peu, avant de se trouver en plein air. Nous lisons dans PĂ©trone , itaque intravimus balneum y et sudore calefacti momento temporis ad frigidam , ou bien fri- gidariam y eximus. \ Galiani croit que le frigidarium dont il est parlĂ© dans ce chapitre , est la mĂȘme chose que le tepidarium dont il est parlĂ© dans le chapitre prĂ©cĂ©dent. On lâappeloit, dit-il , tepidarium y Ă cause quâon y jouissoit dâune chaleur tempĂ©rĂ©e , produite par le rĂ©verbĂšre de lâĂ©tuve qui Ă©toit Ă cĂŽtĂ© et on lâappeloit aussi frigidarium y parce que les personnes qui y enlroient, en sortant de lâĂ©tuve, 32 a5o L âARCHITECTURE DE VITRUVE. commençoient Ă sây refroidir. Ce qui le persuade de cela , câest que dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, il place le laconicum et JâĂ©luve pour faire suer, Ă cĂŽtĂ© du tepidarium . Laconicum , siidationescjue sunt conjungendĂŠ tepidaria tandis que dans celui-ci , il ne nomme pas le tepidarium ; mais il place le laconicum , et lâĂ©tuve auprĂšs du frigidarium. ProximĂš autem introrsus e regione frigidariĂź collocetur concamerata sudatio. DâaprĂšs cela il croit que le tepidarium et le frigidarium nâĂ©ioient quâune mĂȘme chose. Si cependant , ajoute-t-il, on oppose Ă mon opinion la peinture trouvĂ© dans les thermes de Titus , oĂč lâon voit que le tepidarium et le frigidarium forment deux places differentes , et ce quâen ont Ă©crit au contraire Mercuriale, lâAluisio , le Baccio et autres ; j rĂ©pondrai que Vitruve ne parle ici que de la palestre des Grecs dans laquelle il nây avoit pas, Ă beaucoup prĂšs , autant de piĂšces que dans les thermes, qui par la suite , furent, en quelque maniĂšre Ă Rome, ce quâĂ©toient les palestres chez les Grecs ; mais Ă cause de lâĂ©norme population âąt du luxe de cette ville, ces Ă©difices Ă©toient bien plus vastes, au point quâils paroissoient une provinc. Vitruve dit que de cette chambre froide on alloit, par un passage, au prognigeum , qui ne peut ĂȘtre autre chose que lâendroit oĂč lâon faisoit du feu pour Ă©chauffer les chambres et les bains ; du moins doit-on le croire, prognigeum Ă©tant le synonime Ă âhypocausis , et de prcefumium. Sur un des cĂŽtĂ©s de la palestre en dehors , se trouvoit un grand espace plantĂ© dâarbres, que les Romains appeloient le xiste , xystus ou xystum y quoique ce mot fut dĂ©rivĂ© du grec , il ne signi- fioit cependant pas exactement la mĂȘme chose dans cette langue quâen latin , puisque le xiste proprement dit, chez les Grecs, Ă©toit un porlique couvert, sous lequel Ă©toit un stade 1 oĂč les AthlĂštes sâexerçoient Ă la course ou Ă la lutte; il occupoit, suivant Vitruve, un des cĂŽtĂ©s du xiste dont je viens de parler , et câest celui dont il parle dans le io. me Chap. du VI. me Liv. , Ă propos des mots latins dĂ©rivĂ©s du grec, auxquels on a donnĂ© Ă Rome une signification diffĂ©rente que celle quâils ont dans celte langue. Les Grecs, dit-il, appellent xystos , un large portique, oĂč les athlĂštes sâexercent pendant lâhiver, tandis que nous autres , nous appelons xystus des allĂ©es dĂ©couvertes pour se promener , que les Grecs nomment peridrcmidas tellement que dans le chapitre que nous expliquons prĂ©sentement, Vitruve parle dâabord du xiste des Grecs , ensuite de celui des Romains , comme il le dit lui-mĂȘme. Voyez nos remarques Ă la fin du io. me Chap. du VI. m * Liv. ; et quant Ă ce pavĂ© fait en smalte dont il parle ici , voyez ce que nous en avons dit, dans nos remarques Ă la fin du 4. me Chap. du II. me Liv. 11 appelle ici cette sorte de pavĂ© signinum opus. Il en parle encore dans le I. er Chap. du VIL Liv. Pausanias fait la description du gymnase dâElis qui ressemble tant Ă la palestre et au xiste dont parle Vitruve , que je crois devoir la rapporter, pour quâon puisse les comparer ensemble , et voir en quoi elle mâa servi pour interprĂ©ter lâauteur latin. sâendurcir au travail, neitoyoit tous les jours ce lieu , et en arrachoit les ronces et les Ă©pines. Cette grande enceinte est partagĂ©e en plusieurs piĂšces, dont lâune est destinĂ©e Ă lâexercice de la » course ; on la nomme le lieu sacrĂ©. Dans une autre , on sâexerce Ă la course et au pentathle_ n PrĂšs de la grande enceinte , il y en a une plus petite qui est contiguĂ« , et qui, Ă cause de sa Ăź figure carrĂ©e , se nomme TĂ©tragone. Câest lĂ que les jeunes athlĂštes sâexercent au pugilat. 11 y a une troisiĂšme enceinte qui parce que le terrain en est plus doux et plus mou , sâappelle » Maltho ; ce lieu est ouvert aux enfans pendant tout le temps que durent les jeux Ă Olympie. Dans le mĂȘme gymnase , ou lieu dâexercice , les ElĂ©ens ont leur sĂ©nat , oĂč les savans vien- ĂŻ> nent donner des preuves de leur capacitĂ© , soit par des discours faits sur le champ , soit dans w tout autre genre de littĂ©rature. » Le gymnase a une autre issue qui conduit Ă la place publique , et Ă un endroit oĂč les direc- l teurs des jeux tiennent conseil. » La place publique nâest point faite comme celles des villes dâIonie , ni mĂȘme des villes voisines; » elle est bĂątie Ă lâancienne mode. Les portiques en sont distans les uns des autres et sĂ©parĂ©s par » des rues de traverse. Les ElĂ©ens appellent cette place lâHippodrome , parce quâen effet ils y dressent leurs chevaux. Le portique le plus exposĂ© au midi , est dâune architecture dorique ; trois rangs de colonnes le partage en trois , etc. 2 . » Ce xiste Ă©toit ornĂ© dâune infinitĂ© de statues , dont Pausanias fait la description ; je nâen parle pas , pour ne pas sortir de mon sujet. CHAPITRE XII. » Des Ports et de la Maçonnerie qui se fait dans leau. J e ne puis mâempĂȘcher de parler ici de lâutilitĂ© des ports de mer , et par quel art on parvient Ă y mettre les vaisseaux Ă lâabri des tempĂȘtes. Si la nature les a formĂ©s elle-mĂȘme ; sâils ont des rochers ou des promontoires qui sâavancent dans la mer, formant naturellement une courbe ou un coude dans le milieu, il sera bien aisĂ© de les faire , puisquâil nây aura plus quâĂ construire tout autour des portiques ou des arsenaux pour la construction des navires , et des passages pour aller du port dans les marchĂ©s , et Ă©lever, de chaque cĂŽtĂ© , des tours, dâoĂč, au moyen des machines, on puisse tendre des chaĂźnes de lâune Ă lâautre. I»; Ayste dĂ©rivĂ© 25a LâARCHITECTURE DE VITRUVE. Dans le cas que lâemplacement ne soit pas de lui-mĂȘme propre Ă mettre les vaisseaux Ă lâabri des tempĂȘtes , voici ce qu'on peut faire, pourvu quâil nây ait pas de riviĂšre qui lâempĂȘche, et quâil y ait seulement une plage convenable câest de bĂątir du cĂŽtĂ© opposĂ© un mole qui sâavance dans la mer et qui enferme le port. Voici comme on construit ces moles qui sâavancent dans la mer il faut dâabord faire venir de cette poudre i qui se trouve dans la contrĂ©e qui sâĂ©tend depuis Cume jusquâau promontoire de Minerve ; on en fait du mortier, en y mĂȘlant un tiers de chaux ; ensuite, dans lâendroit oĂč lâon veut bĂątir le mole , on enfonce dans la mer , une enceinte de pieux de bois de chĂȘne , quâon lie fortement les uns aux autres , en les affermissant bien dans le fond. AprĂšs cela on Ă©galise et on nettoye , comme il faut, la plage par-dessous lâeau entre les pieux , pour y jeter le mortier dont on a parlĂ© plus haut, et lâentasser avec des pierres, jusquâĂ ce quâon ait rempli de cette maçonnerie toute lâenceinte destinĂ©e au mole. On ne peut employer ce moyen que dans les lieux oĂč la nature le favorise tels sont ceux dont nous venons de parler. Mais si lâagitation de la mer y est si grande quâon ne puisse suffisamment y arrĂȘter ces pieux destinĂ©s Ă former lâenceinte du mole, il faut alors bĂątir sur la terre mĂȘme , au bord de la mer , un massif dont la plus grande partie sera inclinĂ©e vers la mer et le reste mis de niveau. On bĂątira ensuite, tant du cĂŽtĂ© de lâeau que des deux cĂŽtĂ©s du massif, des rebords dâenviron un pied et demi, jusquâĂ la hauteur de la partie du massif qui est de niveau , dont on vient de parler , et on emplira de sable le creux du talus jusquâau haut des rebords. On bĂątira alors sur cette esplanade une pile de maçonnerie , dâune grandeur suffisante ; et aprĂšs lâavoir laissĂ© sĂ©cher au moins pendant deux mois , on abattra les rebords qui soutiennent le sable , qui, Ă©tant emportĂ© par les vagues, laissera tomber et glisser la masse dans lâeau par ce moyen on pourra sâavancer peu-Ă -peu dans la mer % autant quâil sera nĂ©cessaire. Dans les endroits oĂč il ne se trouve pas de cette poudre , voici comme il faut diriger lâouvrage on enfoncera dans la mer un double rang de pieux , autour de 1 espace quâon aura choisi ; ensuite on liera et joindra ces pieux les uns aux autres avec des chaĂźnes et des ais , et on emplira lâintervalle entre les deux rangs , avec de lâargile, mise dans des sacs faits de joncs de marais, aprĂšs les avoir bien battus pour les affermir ; puis avec des machines hydrauliques faites en limaçon, et par des roues, i La pouzzolane dont il est parlĂ© dans le 6. mc Ghap. du Liv. 253 L I V 1\ E Y, C h a p. xii. ou par des tympans , i on vuidera l'eau qui est entre ces deux digues; cet espace Ă©tant dessĂ©chĂ©, on creusera le fondement jusquâau solide , si câest de la terre , et on les bĂątira de libage, joint avec de la chaux et du sable , les faisant plus larges que le mur quâils doivent porter. Si le lieu nâest pas ferme , on y enfoncera des pilotis de bois dâaune demi-brĂ»lĂ© , ou dâolivier ou de chĂȘne , dont les intervalles seront remplis de charbons , comme on lâa dit en parlant des fondemens des théùtres et des autres murailles. LĂ dessus , on Ă©levera le mur de pierres de taille ; celles quâon posera en boutisse , seront les plus longues quâil sera possible , afin que celles qui sont entre les boutisses soient plus fermement liĂ©es on emplira le dedans du mur avec du mortier et du moellon ou en maçonnerie ; ce qui formera une masse assez solide pour soutenir mĂȘme une tour , si on la bĂątissoit dessus. Quand on aura achevĂ© tout cela , il faut observer , en bĂątissant les arsenaux pour les navires, de les tourner vers le septentrion car la chaleur quâoccasionne lâaspect du midi, engendre et entretient les vers et autres insectes qui carient le bois ; sur tout il ne faut pas les couvrir de bois , crainte dâincendie. On ne peut guĂšre dĂ©terminer leur grandeur ; mais il faut quâils soient capables de contenir au large les plus grands vaisseaux et quâon puisse les y faire entrer facilement. Jâai traitĂ© , dans ce livre , de tout ce qui mâa paru le plus nĂ©cessaire et le plus utile pour perfectionner la construction des Ă©difices publics dans les villes. Dans le suivant, je traiterai de lâutilitĂ© et des proportions des bĂątimens que font construire les particuliers pour leur usage. REMARQUES . Nous ne pouvons pas comparer les porls de mer des anciens avec les nĂŽtres. Pour bien comprendre ce que dit Aitruve de leur construction , il faut se reporter aux temps oĂč il Ă©crivoit. Nâayant point alors de boussole , on ne pouvoit guĂšre naviguer que sur les cĂŽtes ; aussi ne se servoit-on que de petits bĂątimens plats et-Ă rames , qui nâavoient besoin que de trĂšs-peu de profondeur ; presque toutes les rades Ă©toient pour eux des porls et lorsquâils nâen trouvaient pas de naturels dans les lieux oĂč ils avoient besoin dâen avoir , ils en formoient bientĂŽt au moyen dâune simple jetĂ©e ou mole. Ainsi dans ce chapitre , qui a pour objet les ports de mer des anciens , ^ itruve ne parle que de la construction de ces moles ; de celle des arsenaux pour y construire les navires , et meme pour les y enfermer , puisquâils Ă©toient assez lĂ©gers pour pouvoir ĂȘtre tirĂ©s a terre Ă volontĂ©. Il ajoute quâils Ă©toient entourĂ©s de portiques , quâil y avoit des passages pour se rendre au marchĂ© , et quâon Ă©levoit des tours, dâoĂč on tendoit des chaĂźnes pour les fermer du cĂŽtĂ© de la mer. x Il dĂ©crit ces machines dans les 9, e , ĂŻi. me et Chap. du X. me Lir. 254 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. Dans les plans et les descriptions que Labacco et. Lucatelli nous ont laissĂ©s du port construit Ă Oslie , prĂšs de lâembouchure du Tibre , par lâempereur Claude , et achevĂ© , suivant quelques-uns , par Trajan , on voit quâil Ă©toit entourĂ© de portiques , de magasins ou arsenaux, comme ceux dont parle ici Vitruve. Câest aux recherches de ces deux savans que nous devons les connoissances que nous avons sur ce port des anciens , dont il reste si peu de vestiges , quâil a fallu toute leur intelligence et leur» lumiĂšres pour pouvoir en former les plans et la description quâils nous en ont donnĂ©s 1. Ce port si cĂ©lĂšbre autrefois, quâon appeloil Ostie , pour marquer quâil Ă©toit la porte du Tibre , ou de Rome , nâest presque plus dâaucune utilitĂ© aujourdâhui $ nâayant pas assez de profondeur , on nâa jamais pu en tirer aucun parti pour nos gros navires qui prennent beaucoup trop dâeau , et en aucuns temps on nâauroit pu sâen servir pour des navires semblables il en est de mĂȘme des ports dâAnxur aujourdâhui Terracine , de MiscĂšne , et autres ports cĂ©lĂšbres de lâantiquitĂ©. Les vaisseaux des anciens , comme nous lâavons dit, Ă©tant infiniment plus petits que les nĂŽtres , et prenant trĂšs-peu dâeau , la nature leur offroit une infinitĂ© de ports que sa main seule avoit formĂ©s * lesquels pourroient Ă peine servir prĂ©sentement pour les chaloupes de nos pĂȘcheurs. Si la nature nâen avoit pas creusĂ© elle-mĂȘme, dans les lieux oĂč on en dĂ©siroit , il, Ă©toit facile Ă lâart, ;ii e comme nous lâavons vu, dây supplĂ©er 5 une simple jetĂ©e ou mole suifisoit. Vitruve enseigne dans çe chapitre quelles Ă©toient les trois maniĂšres de faire ces jetĂ©es. Il faut faire attention quâelles n conviennent quâaux ports de la mer MĂ©diterranĂ©e , oĂč le flux et le reflux ne se font pas sentir. Par exemple, en parlant dâun emplacement oĂč lâon peut construire un port , lorsquâil nây en a pas de naturel, Vitruve dit si toutefois il nây a pas de riviĂšre qui l'empĂȘche. Ceci ne convient quâaux ports de la MĂ©diterranĂ©e , parce que leS riviĂšres sur-tout celles dâItalie qui viennent presque toutes des montagnes de lâAppennin qui sont la plupart volcaniques , composĂ©es de cendres , de pierres ponces , de terres et autres matiĂšres lĂ©gĂšres quâelles charient auroient bientĂŽt rempli de limon , de cendres volcaniques et de sable, un port qui seroit Ă son embouchure , si elle la trouvoit rĂ©trĂ©cie et en partie fermĂ©e par des moles construits en arcs , ou placĂ©s en face comme ceux dont parle Vitruve. Il nâen est pas de mĂȘme de ceux de lâOcĂ©an 5 lâagitation du flux et du reflux de la mer empĂȘche que la vase et les immondices des riviĂšres ne comblent les ports ; et le reflux qui Fait monter lâeau trĂšs-haut dans les ports , donne lieu Ă lâart de se servir avantageusement de c© secours de la nature , en retenant lâeau qui est montĂ©e pendant le reflux dans les Ă©cluses et dans les barres que lâon ouvre quand la mer est descendue, et qui, par sa chute impĂ©tueuse, achĂšve de pousser hors du port ce que le reflux a commencĂ© Ă Ă©branler. , i'tis t iflljU sut Les deux premiers moyens quâindique Vitruve pour faire les jetĂ©es ou moles , ne peuvent ĂȘtre exĂ©cutĂ©s ainsi quâen Italie , puisquâon emploie pour cela la pouzzolane , qui ne se trouve mĂȘme que dans certaines contrĂ©es de ce pays , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© dans nos remarques sur le 6. me Chap. du II."âe Liv. , en parlant des qualitĂ©s de cette poudre. Sa principale qualitĂ©, câest que le mortier quâon en fait , Ă©tant jetĂ© dans lâeau , sây durcit et acquiert la soliditĂ© de la pierre. Dans les environs de Came et de Pouzzole et sur - tout de Baia, jâai vu dans la mer beaucoup de subs- tructions dâanciens ouvrages des Romains , faits avec de la pouzzolane $ entre autres les piliers dâun { Ant Etrusques, tome YI. rac , premiĂšre Dissertation. t LIVRE V, Chap. xii. *5S pont qui traversoit la Baye, et conduisoit de Baia Ă Pouzzole. La partie de ces ruines , qui Ă©toit dans lâeau , Ă©toit parfaitement conservĂ©e. Suivant le premier moyen indiquĂ© par Vitruve , on enfonçoit dans la mer deux rangs de pieux qui formoient une enceinte Ă laquelle on donnoit la forme que le mole devoit avoir ensuite , sans Ă©puiser lâeau , on emplissoit lâintervalle qui Ă©toit entre les deux rangs de pieux avec des pierres et du mortier de Pouzzolane , qui, Ă©tant plus pesante que lâeau, la faisoit sortir; et par la propriĂ©tĂ© quâavoit ce mortier de sĂ©cher et endurcir dans lâeau , formoit comme une masse fusible jetĂ©e dans un mole. Ce mole formoit une espĂšce dâarc dont une des extrĂ©mitĂ©s tenoit Ă la cĂŽte , sâavançoit dans la tner , formoit une courbe et un angle pour prĂ©senter ensuite sa plus grande Ă©tendue en face du rivage. Du moins est-ce ainsi que Galiani a interprĂ©tĂ© les expressions dâarcĆ stipitibus dont s sert Vitruve. Voici ses rĂ©flexions Ă cet Ă©gard il semble , dit-il, dâaprĂšs ce que nous apprend Vitruve, quâou doive seulement lier , avec des chaĂźnes , toute lâenceinte de pieux ; mais comme nous nous servons aussi dâais terminĂ©s en queue dâhironde , pour unir ces pieux les uns aux autres , au moyen des rainures quâon y creuse pour y recevoir ces tenons , Perrault, qui a cru cet usage antique , sâest persuadĂ© quâici, area, signifioit un poteau dans les deux cĂŽtĂ©s desquels on avoit creusĂ© des rainures propres Ă recevoir le tenon dâune autre piĂšce de bois. MalgrĂ© toute lâĂ©rudition quâil Ă©tale dans une trĂšs - longue note , pour adapter les paroles du texte au sens quâil leur a donnĂ© , on nây trouve, ajoute Galiani , que du verbiage. 11 me semble en effet trĂšs-clair, continue le traducteur italien, quâune fois quâon donne Ă area lâĂ©pithĂšte d* inclus a , il ne peut signifier autre chose que la totalitĂ© de lâarc , formĂ© par les pieux, câest-Ă -dire toute lâenceinte mĂȘme. Lâexpression de dimittere arcam , ne doit pas apporter une difficultĂ© ; il sâen sert probablement au lieu de dimittere stipites , quibus fiunt arcĂŠ . La seconde maniĂšre de faire une jetĂ©e ou mole , dont parle Vitruve , avoit lieu dans les endroits oĂč la mer trop agitĂ©e ne permettoit pas dây enfoncer des pieux. On bĂątissoit une masse sur le rivage, dont plus de la moitiĂ© posoit sur un amas de sable soutenu par un petit mur, quâon abattoit, lorsque la maçonnerie Ă©toit sĂšche ; la mer alors emportoit le sable , et la masse , qui se trouvoit dessus , lomboit dans lâeau. Virgile dĂ©crit cette maniĂšre de faire .des moles dans le g. me Liv. de lâEnĂ©ide. Qualis in EĂŒboico Baiarum littore quondam Saxea pila cadit magnis quam molibus antĂš Constructam jaciunt porito sic ilia ruinam Prona trahit , penituaque vadis illisa recumbit. * Telle aux rives de Baie, antique enfant dâEubĂ©e , Dans le golfe de Cume avec fracas tombĂ©e , Une masse de roc quâunit un dur ciment Ăbranle au loin la rive en son noir fondement. !7. _ Trad, de ^56 1/ARCHITECTURE DE V I T R U Y E. Il paroit dâaprĂšs ce quâajoute Yitruve , quâon sâavanroit peu Ă peu dans la mer ; sans doute en y jetant de nouvelles masses. Tri ctcjuam poterit esse progressas. Et lâon voit que les anciens ne faisoient pas leurs jetĂ©es, comme nous les faisons aujourdâhui, en jetant dans la mer des gros quartiers de pierres les uns sur les autres; ils nâavoient pas remarquĂ© sans doute, comme les moules et les huitres en sâattachant aux pierres roulĂ©es sur le rivage , les attachent et les lient les unes aux autres; ce qui en fait des masses dâune soliditĂ© inĂ©branlable, supĂ©rieure peut-ĂȘtre Ă celle des rochers produits par la nature. Les anciens employoient le troisiĂšme moyen indiquĂ© par Yitruve , lorsquâils ne pouvoient se procurer de la pouzzolane; les autres matĂ©riaux nâayant pas, comme elle, la propriĂ©tĂ© de se sĂ©cher dans lâeau , on fabriquoit des batardeaux ou digues qui entouroient lâespace dans lequel on vouloir Ă©lever le mole ; ils Ă©toient composĂ©s d'un double rang de pieux et dâais; on en remplissoit ensuite lâintervalle avec des paquets dâargile ou terre grasse enveloppĂ©e dans des sacs ou cabas faits de joncs de marais. Ces joncs entrelacĂ©s empĂȘchoient lâargile, qui Ă©toit dedans , de se dissoudre trop vite dans lâeau. On avoit par-lĂ le temps nĂ©cessaire pour battre et pĂ©trir ces paquets , aprĂšs que les batardeaux en Ă©toient remplis ce qui Ă©toit nĂ©cessaire non seulement pour rĂ©sister aux vagues et au courant , mais encore pour empĂȘcher les eaux extĂ©rieures dâentrer dans lâenceinte , tandis quâon Ă©puisoit celle qui Ă©toit dedans avec les machines hidrauliques. Quand lâeau Ă©toit entiĂšrement Ă©puisĂ©e, on construisoit , dans cette enceinte , le mole Ă sec , comme on lâauroit fait sur la terre. Le mot merones que Vitruve emploie ici , en parlant de lâargile quâil faut jeter entre les deux rangs de pieux , a beaucoup embarrassĂ© les interprĂštes ; voici comme il sâexprime inter destinaias creta meronibus ex ulva palustri factis calcetur quelques-uns , au lieu de meronibus , ont lu peronibus , dâautres beronibus ; mais la vĂ©ritable signification de ce mot est trĂšs-incertaine ; câest le sens seulement qui indique quâil doit signifier des sacs ou choses semblables. Jâai donc suivi le sentiment des meilleurs interprĂštes , et jâai traduit comme eux ces expressions meronibus ex ulva palustri } par des sacs faits de joncs de marais. Ce jonc ou plante de marais que les anciens appellent ulva, est demeurĂ©e inconnue aux botanistes; "Virgile en parle dans les II.* et le VI. livre de lâEnĂ©ide , comme dâune plante aquatique. Ce doit ĂȘtre cette espĂšce de joncs trĂšs-communs dans les marais , dont on se sert en Italie , pour rempailler les chaises , et mettre autour des bouteilles ; il sâappelle en italien sala j câest le mot dont Galiani se sert dans sa traduction pour rendre celui d âulva. M. Delille le traduit comme nous par joncs de marais. WVWVVVWWVVVVmMMW LIVRE VI. LâARCHITECTURE D E Y I T R U Y E. LIVRE SIXIĂME. INTRODUCTION. Ije philosophe Aristippe , disciple de Socrate , jetĂ© sur les cĂŽtes de lâisle de Rhodes aprĂšs avoir fait naufrage , remarque des figures de gĂ©omĂ©trie , tracĂ©es sur le sahle i ; il sâĂ©crie , en sâadressant Ă ses compagnons , soyons pleins dâespĂ©rance ! jâaperçois des traces dâhommes ! aussitĂŽt il se rend Ă la ville ; il entre dans le gymnase 2 ; il y dispute de philosophie , et lâadmiration quâil inspire, fait quâon lui prodigue des prĂ©sens qui le mettent Ă mĂȘme, ainsi que ses compagnons , de se procurer des habits , et tout ce qui est nĂ©cessaire Ă la vie. Ceux-ci voulant ensuite retourner dans leur patrie , lui demandĂšrent ce quâil vouloit faire dire chez lui ? il les chargea de recommander Ă ses enfans de sâappliquer de bonne heure Ă acquĂ©rir des biens qu'ils pussent sauver avec eux , sâils faisoient naufrage ; puisquâil avoit reconnu quâon ne devoit sâassurer dans la vie , que sur ce qui est indĂ©pendant des vicissitudes de la fortune , des changemens qui surviennent dans les gouvernemens et des malheurs de la guerre. 1 Gallien rapporte aussi cette histoire dâAristippe, mais il dit que câest prĂšs de Syracuse quâil fit naufrage. A Câest ici le seul endroit de lâouvrage , oĂč lâauteur emploie le mot gymnase , quoique dans le 22. me chapitre du livre prĂ©cĂ©dent ; il dit, en dĂ©crivant la palestre, que les exĂšdres, câest-Ă -dire les salles oĂč les philosophes 7 les rhĂ©teurs et les autres savans alloient discuter des sciences , en faisoient partie. Il est probable que le mot nasium Ă©toit synonyme de palestru. 258 Introduction. ThĂ©ophraste, en soutenant ce principe que la science est prĂ©fĂ©rable aux richesses, ajoute quâil nây a que le savant seul qui nâest pas Ă©tranger hors de son pays ; que sâil vient Ă perdre ses amis , il en retrouve par-tout ; quâil est citoyen dans toutes les villes , et qui! ne doit jamais craindre les revers de la fortune quâau contraire, celui qui met toute sa confiance dans les avantages de la fortune , et croit par-lĂ ĂȘtre Ă lâabri de tout accident fĂącheux , reconnoĂźtra enfin , sâil ne possĂšde aucun talent, que le cours de la vie se fait dans un chemin peu ferme, oĂč il est impossible de ne pas tomber. Epicure pensoit de -mĂȘme , quand il disoit , que ce qu'on peut attendre de la fortune est peu de chose pour le sage , qui ne doit fonder ses espĂ©rances que sur la grandeur et sur la force de son esprit. La plupart des philosophes ont dit la mĂȘme chose , ainsi que les poĂštes qui, dans leurs anciennes comĂ©dies grecques, ont fait rĂ©citer, sur la scĂšne, ces mĂȘmes sentences quâils avoient mises en vers tels furent Euchrates, Chionides , Aristophanes , et sur-tout Alexis qui dit. que les AthĂ©niens mĂ©ritent dâĂȘtre louĂ©s , pour avoir corrigĂ© cette loi commune Ă toute la GrĂšce , qui oblige les enfans de nourrir leurs pĂšres , en ordonnant que ceux-lĂ seuls y seroient contraints, dont les parens auroient eu soin de les faire instruire dans quelque art car tous les biens que nous recevons de la fortune , elle peut les reprendre aussi aisĂ©ment qu elle nous les a donnĂ©s ; au lieu que les sciences que nous axons acquises, Ă©tant comme attachĂ©es Ă nos Ăąmes, leur possession nous est tellement assurĂ©e que nous ne saurions les perdre quâavec la vie. Jâai donc infiniment de grĂąces Ă rendre aux auteurs de mes jours , qui , persuadĂ©s de la justice de cette loi des AthĂ©niens , mâont fait Ă©tudier un art qui demande tant de connoissances , oĂč les lettres sont nĂ©cessaires , et qui , comme un cercle , renferme toutes les autres sciences. Câest donc aux soins de mes parens , aux leçons des maĂźtres qui ont augmentĂ© la masse de mes connoissances , Ă lâĂ©tude que jâai faite de la thĂ©orie , Ă la pratique , et Ă mon goĂ»t pour la lecture , que mon aine doit tous les biens quâelle possĂšde , ce qui me procure lâavantage de n avoir besoin de rien , et de ne rien dĂ©sirer ; ce qui est la principale de toutes les richesses. Bien des gens, peut-ĂȘtre, mĂ©priseront cette façon de penser, eux qui nâaccordent la sagesse quâĂ ceux qui possĂšdent beaucoup d argent, et leur admiration qu Ă ceux qui se sont faits une rĂ©putation en rĂ©unissant les richesses aux grandeurs. Quant Ă moi, ĂŽ CĂ©sar , les richesses nâont jamais Ă©tĂ© le but que je me suis pro- idrfrc ipj Ăź se Les ;r IBJDOX tonfi liai .consul -des r âątest 1 ;inn I N T R O D U C T 1 O K s5 posĂ© , en me livrant Ă mon art; jâai toujours prĂ©fĂ©rĂ© rester dans la mĂ©diocritĂ©, avec une bonne rĂ©putation, que dâĂȘtre dans lâabondance, avec une mauvaise il est vrai que, jusqu Ă prĂ©sent, la renommĂ©e a fait bien peu de chose pour moi; mais j espĂšre que quand mes livres paroitront, iis me feront connoĂźtre , mĂȘme Ă la postĂ©ritĂ©. Il nâest pas Ă©tonnant quâon ne me connoisse pas davantage les autres architectes sollicitent et se donnent beaucoup de mouvement pour ĂȘtre employĂ©s. Quant Ă moi , jâai appris de mes maĂźtres, qu il faut qu un architecte attende qu on le prie de prendre la conduite dâun ouvrage , et quâil ne peut , sans rougir , faire une demande qui le fait paroĂźtre intĂ©ressĂ© , puisquâon ne sollicite pas les gens pour leur faire du bien , mais pour en recevoir. Dans le fond , que croyons-nous que doit penser celui que nous prions de vouloir nous confier une partie de son bien , pour lâemployer Ă une si grande dĂ©pense , sinon que nous lui faisons une telle demande pour nous enrichir Ă ses dĂ©pens ? câest pourquoi les anciens ne confioient jamais dâentreprise Ă un af chi- i itej tecte sans sâĂȘtre informĂ©s auparavant de sa naissance , et sâil avoit reçu une bonne ĂŻE'ii 3H !i il s 1 ĂJ'OĂŻl I Ă©ducation ils prĂȘter oient celui qui Ă©toit modeste , Ă celui qui vouloit paroĂźtre fort capable. Les artistes alors nâenseignoient leur art quâĂ leurs enfans, ou Ă leurs parens ; s il ils s appliquoient sur-tout Ă en faire dâhonnĂȘtes gens , auxquels on pouvoit , sans crainte , confier ses richesses ; mais aujourdâhui que je vois quâune science si noble l et si importante est traitĂ©e par des gens si peu entendus , qui ignorent non-seule- y ment les rĂšgles de lâarchitecture , mais mĂȘme celles de la maçonnerie, je ne puis ' assez louer le pĂšre de famille qui se fie sur ses propres connoissances , et dirige lui** ' mĂȘme la construction des Ă©difices quâil fait bĂątir puisqu'il faut quâil confie ses ou- . vrages Ă des ignorans , il prĂ©fĂšre les conduire lui-mĂȘme et les faire Ă sa fantaisie , il puisque c'est lui qui en fait la dĂ©pense. dif i fl j 5 s* Nous ne voyons pas en effet que personne sâavise chez lui de se mĂȘler dâautres mĂ©tiers ; on se fie sur la capacitĂ© du cordonnier , du foulon et des autres ouvriers qui exercent des arts faciles , et non pas sur celle de lâarchitecte pourquoi ? parce quâon reconnoĂźt tous les jours , que ceux qui professent l'architecture , ne connois- sent pas cet art. Ces raisons mâont dĂ©terminĂ© Ă composer un traitĂ© complet de lâarchitecture , oĂč toutes les rĂšgles se trouvent rĂ©unies , et jâose me flatter que cet ouvrage pourra plaire Ă beaucoup de monde. Ăč ĂŒ'Ă 1 ai AprĂšs avoir enseignĂ© , dans le cinquiĂšme livre , les rĂšgles quâil faut suivre dans la construction des Ă©difices publics, jâexpliquerai dans celui-ci comment il faut distribuer et proportionner les maisons des particuliers. 33. 260 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE PREMIER. * Comment il faut situer les Ă©difices dans les dijfĂ©rens climats. Pour bien disposer les habitations, il faut dâabord faire attention au pays et au climat dans lequel on les veut bĂątir car on doit les construire en Egypte autrement quâen Espagne; autrement dans le royaume de Pont, quâĂ Rome ; et de mĂȘme dans les autres pays ; parce quâune partie de la terre se trouve prĂšs du cours du soleil ; quâune autre partie en est trĂšs - Ă©loignĂ©e ; et que la partie la plus tempĂ©rĂ©e se trouve au milieu de ces deux extrĂ©mitĂ©s. Lâaspect du ciel variant dans les diverses parties de la terre , Ă cause du rapport qu elles ont avec le cercle du zodiaque et le cours du soleil, la tempĂ©rature y varie Ă©galement. Câest donc dâaprĂšs elle quâil faut rĂ©gler la construction des Ă©difices dans les diffĂ©rens pays et les diffĂ©rens climats. Dans les pays septentrionaux , il faut voĂ»ter les habitations , bien les crĂ©pir ; faire les ouvertures 1 petites , et les tourner vers les parties du monde, oĂč rĂšgne la chaleur. Dans les contrĂ©es mĂ©ridionales , qui sont exposĂ©es aux ardeurs du soleil brĂ»lant, il faut au contraire faire de grandes ouvertures, et les tourner vers le septentrion et le nord-est. Câest ainsi que fart corrige les inconvĂ©niens quâoccasionne la nature ; et qu'on sait, par une bonne exposition , se procurer , dans tous les pays, une tempĂ©rature qui convient au climat. Pour y parvenir , il faut examiner la nature de chaque chose , et sur-tout celle du corps humain , parmi les. diffĂ©rens peuples. Dans les endroits oĂč le soleil nâattire pas beaucoup de vapeurs , le corps de lâhomme conserve un tempĂ©rament modĂ©rĂ© ; dans ceux quâil brĂ»le , par la proximitĂ© de son cours , il consume lâhumiditĂ© qui entretient le bon tempĂ©rament au contraire dans les pays froids , et Ă©loignĂ©s du midi , la chaleur n est pas assez forte pour Ă©puiser l'humiditĂ© , et lair y contenant beaucoup de vapeurs , remplit le corps dâhumeurs , le rend plus massif , et fait sur - tout grossir la voix. Câest pourquoi les peuples que produit le nord , ont la taille si forte , la peau blanche, les cheveux plats et roux , les yeux bleus et ont beaucoup de sang Ă cause de la- i Il entend par-lĂ celle* des portes et des fenĂȘtre*. I LIVRE VI, C h Ă p. i. 26] u bondance de lâhumeur et du froid de lâair. Ceux au contraire qui habitent vers l'Ă©quateur , prĂšs du cours du soleil, sont de petite taille , ont la peau basanĂ©e , les cheveux crĂ©pus , les yeux noirs , les jambes foibles , et peu de sang dans les veines , Ă cause de lâardeur du soleil cela fait que , quoiquâils soient plus timides dans les combats , ils supportent aisĂ©ment les chaleurs et les fiĂšvres auxquelles ils sont accoutumĂ©s. Au lieu que ceux qui naissent vers le nord , craignent les fiĂšvres et en sont affaiblis ; mais comme ils ont beaucoup de sang , ils sont plus forts au mĂ©tier des armes et ne craignent pas de le verser dans les combats. Le son de la voix nâest pas non plus le mĂȘme par-tout ; il varie de ton , suivant les diffĂ©rens peuples , parce quâaux extrĂ©mitĂ©s de la terre , Ă lâorient et Ă lâoccident, oĂč le globe paroĂźt en Ă©quilibre , la partie supĂ©rieure et infĂ©rieure du ciel, semble sĂ©parĂ©e par un cercle placĂ© de niveau , que les mathĂ©maticiens appellent lâhorizon. Si lâon se pĂ©nĂštre bien de cette vĂ©ritĂ© , et quâon tire une ligne depuis le bord septentrional de lâhorizon , jusquâau centre de lâaxe du mĂ©ridien , ou de lâĂ©quateur, et que de ce point on trace une autre ligne oblique jusquâau pĂŽle, qui est derriĂšre les Ă©toiles septentrionales, on verra clairement que ces lignes formeront, sur le globe , la figure dâun triangle , semblable Ă celui de cet instrument appelĂ© sambuque par les Grecs, Il suit de-lĂ que les peuples qui habitent l espace le plus prĂšs de la pointe infĂ©rieure de ce triangle , câest-Ă -dire sous lâĂ©quateur , et vers le midi, Ă cause du peu d Ă©lĂ©vation du pĂŽle , ont le ton de la voix mince et aigu , comme celui que rendent les tubes , qui , dans 1 instrument sont les plus prĂšs de lâangle. Les autres peuples Ă mesure quâils sâĂ©lĂšvent vers le pĂŽle, les Grecs , qui sont dans le milieu , ont la voix moins haute. Enfin ceux qui habitent depuis ce milieu jusquâĂ lâextrĂ©mitĂ© du nord, sous le pĂŽle , ont le son de la voix plus bas et plus grave. If 5s k 8 idf-f! i i]M nĂŻ F** On voit par-lĂ , comment lâobliquitĂ© du zodiaque , et les consonnances que forment les diverses influences du soleil, produisent lâharmonie qui compose le monde. Les peuples donc , qui habitent le milieu entre 1 Ă©quateur et le pĂŽle , ont, en parlant, un ton de voix moyen, semblable aux tons de musique qui occupent le milieu dans le diagramme 1. Ceux ensuite qui approchent du septentrion , parce quâils ont le pĂŽle plus Ă©levĂ© , ont le ton de la voix bas comme lâhypate ou la proslambanomenos , Ă cause que 1 humiditĂ© remplit les conduits de la voix 5 et pour la mĂȘme raison , les peuples qu on rencontre depuis la rĂ©gion moyenne , en sâavançant vers le midi, ont le ton de la voix mince et aigu , semblable Ă celui de la parallĂšle. {* Voyez les remarques Ă la fin du 4- me Chap. du V. me Liv. 262 LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. Celte vĂ©ritĂ©' que les endroits humides grossissent la voix , et que ceux qui sont chauds la rendent plus aigue , peut se prouver par celte expĂ©rience. Quâon prenne deux vases de terre cuits dans le mĂȘme fourneau , dâun mĂȘme poids , et qui rende le mĂȘme ton ; quâon en plonge un ensuite dans lâeau, et quâa- prĂšs lâen avoir retirĂ© , on les frappe tous les deux on trouvera une grande diffĂ©rence dans les sons quâils rendront lâun et lâautre et quâils ne sont plus du mĂȘme poids. Il en est de mĂȘme pour les hommes, quoiquâils naissent tous avec la mĂȘme ligure , et sous le mĂȘme ciel les uns , Ă cause de la grande chaleur du climat, auront la voix aigue ; dâautres lâauront plus grave , Ă causĂ© quâune grande humiditĂ© est rĂ©pandue dans le leur. Cette subtilitĂ© de lâair , et la chaleur qui rĂšgne dans les pays mĂ©ridionaux , fait aussi que les habitans y ont lâesprit plus vif, et plus pĂ©nĂ©trant ; tandis que les peuples du nord, assoupis par lâair Ă©pais quâils respirent, et par les vapeurs humides dont il est imprĂ©gnĂ© , ont lâesprit beaucoup plus lourd. Les serpens nous font voir cela bien clairement ; pendant la saison des chaleurs qui Ă©puisent lâhumiditĂ© froide qui est dans leur corps , ils sont fort agiles et pendant lâhiver, engourdis par le froid , ils deviennent mornes et assoupis. Il ne faut donc pas sâĂ©tonner , si la chaleur aiguise lâesprit et si le froid lâĂ©mousse. Les peuples du midi, malgrĂ© leur esprit pĂ©nĂ©trant, leur vivacitĂ© et toute leur intelligence , restent sans vigueur quand il sâagit de faire quelque action de bravoure , parce que lâardeur du soleil les Ă©nerve et leur ĂŽte la force du courage ; d'un autre cĂŽtĂ© , ceux qui naissent dans les pays froids, quoique plus propres aux armes , et que pleins de valeur , ils sâexposent sans crainte Ă toutes sortes de dangers, comme ils attaquent sans intelligence et sans prĂ©caution , ils Ă©chouent souvent dans leurs entreprises. La nature ayant donc elle-mĂȘme partagĂ© lâunivers en plusieurs climats, dâune tempĂ©rature si opposĂ©e , qui rendent les nations si diffĂ©rentes les unes des autres , elle a voulu que le peuple romain occupĂąt le centre, et quâilâfĂ»t placĂ© au milieu de tous ces peuples , entre les deux extrĂ©mitĂ©s du monde ce qui fait que la valeur et lâintelligence sont le partage des peuples dâItalie , parce quâils sont Ă©galement pourvus des forces du corps et de celles de lâesprit. Câest ainsi que la planĂšte de Jupiter parcourt un espace tempĂ©rĂ©, entre celui de Mars, qui est trĂšs-chaud, et celui de Saturne f qui est trĂšs-froid. De mĂȘme les peuples dâItalie , placĂ©s entre le nord et le midi, jouissent dâun climat tempĂ©rĂ©, et de tout ce quâil y a de plus estimable dans ces deux extrĂ©mitĂ©s du monde 5 par leur prudence , ils surmontent la force des barbares ; et par leur valeur , la ruse et lâadresse des habitans du midi. Le ciel mit la ville du peuple romain dans le meilleur et le plus tempĂ©rĂ© de tous les climats , afin quâil pĂ»t conquĂ©rir lâempire de lâunivers. LIVRE VI, C h a p. i. 263 ' Sâil esl vrai que la variĂ©tĂ© quâon remarque dans les diverses contrĂ©es , dĂ©pend de lâaspect du ciel, dont 1 influence cause des effets si diffĂ©rens sur la structure du corps et les qualitĂ©s des peuples qui les habitent, on ne peut douter quâil ne soit de la plus grande importance dâapproprier les Ă©difices aux climats des divers peuples ; ce qui est bien aisĂ©, puisque la nature elle-mĂȘme nous montre la rĂšgle quâil faut suivre. Câest pourquoi jâai fait tout mon possible pour expliquer les propriĂ©tĂ©s naturelles de chaque endroit, et de quelle maniĂšre il faut disposer les Ă©difices, suivant les aspects du ciel et la nature des peuples. Je vais prĂ©sentement indiquer, en peu de mots , la distribution, les mesures , et les proportions quâil faut donner en gĂ©nĂ©ral et en particulier Ă ces Ă©difices. RE 31 ARQUE S. Quelque mauvais que soient les raisonnemens et la physique de Aitruve pour expliquer lâinfluence des climats sur Je corps humain , il nâen est pas moins vrai quâun architecte doit diffĂ©remment construire les Ă©difices dans les diverses contrĂ©es , suivant le climat et la nature du pays ; et quoique lâauteur ne parle ici quâen gĂ©nĂ©ral , il arrive souvent que dans un trĂšs-petit espace , le climat , ou plutĂŽt la tempĂ©rature de lâair , nây est pas par-tout la mĂȘme. Les montagnes et les diverses expositions , causent cette variĂ©tĂ©. Lâarchitecte doit alors savoir appliquer , Ă ces cas particuliers , les rĂšgles gĂ©nĂ©rales quâon lui donne dans ce chapitre. Vilruve revient encore ici aux. principes de Pythagore , qui prĂ©tend quâune harmonie gĂ©nĂ©rale compose et fait mouvoir le monde. Pour dĂ©montrer , dâaprĂšs ce principe , comment la voix de lâhomme nâest pas la mĂȘme dans les diffĂ©rens climats, il se sert dâune comparaison plus ingĂ©nieuse quâexacte. Il suppose un triangle , placĂ© dans le globe , semblable Ă lâinstrument de musique appelĂ© sambuque } qui est composĂ© de plusieurs tuyaux inĂ©gaux qui vont toujours en augmentant, ce qui forme un triangle. Le dieu Pan dans ses statues, est toujours reprĂ©sentĂ© tenant en main cet instrument. Lâembarras oĂč se trouvoil lâauteur , pour expliquer, en aussi peu de mots, comment tout dans le monde se rĂ©duit aux principes de la musique , rend lâinterprĂ©tation de ce passage assez difficile. Jucundus que Perrault a suivi , lâa rendu dâune maniĂšre , et Barbaro , dont Galiani a adoptĂ© lâinterprĂ©tation , le rend dâune autre. Jâai prĂ©fĂ©rĂ© celle de ce dernier , qui me paroĂźt plus conforme au texte. Lâexplication suivante la fera comprendre aisĂ©ment pour peu quâon connoisse la sphĂšre. Soit iâhorison du monde B bb du bord septentrional B ; on tire la ligne B Ă au centre de lâaxe du mĂ©ridien ou de lâĂ©quateur A 5 et de ce point A , on tire par en haut une autre ligne i64 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. oblique , jusquâau pĂŽle C. Ensuite , quoique lâauteur ne le dise pas , on tire encore une autre ligne du point C jusquâau B , ce qui forme le triangle ABC, semblable Ă lâinstrument de musique nommĂ© sambuque. Cela posĂ© , voici son raisonnement. Les peuples qui ont le pĂŽle peu Ă©levĂ©, comme ceux , par exemple , qui , dans la figure , occupent lâespace B r , ont le ton de la voix semblable Ă celui du tuyau de la flĂ»te sambuque e e, qui est Ă©gale Ă lâĂ©lĂ©vation du pĂŽle B 1 . Ceux qui ont le pĂŽle plus Ă©levĂ© , comme seroit B 2 , ont le ton du tuyau qui est Ă©gal Ă lâĂ©lĂ©vation du pĂŽle B 2 . Ceux qui ont le pĂŽle encore plus Ă©levĂ© comme B 3, ont le ton du tuyau g g , qui est Ă©gal Ă lâĂ©lĂ©vation du pĂŽle B 3. Il en est de mĂȘme pour les autres. Nous ne nous arrĂȘterons pas davantage sur celte hypothĂšse de Pythagore , par laquelle il veut prouver que tout ce qui se fait dans le monde, est lâeffet dâune harmonie gĂ©nĂ©rale. Câest une idĂ©e des plus ingĂ©nieuses des anciens. Lâauteur pour complimenter le peuple Romain sur ce que les dieux lâont placĂ© dans le plus heureux climat de lâunivers , compare cette situation Ă celle de la planĂšte de Jupiter , qui parcourt , suivant lui , un orbite tempĂ©rĂ© entre celui de Mars qui est trĂšs-chaud, et celui de Saturne qui est trĂšs-froid. On voit quâil suit, en cela , le systĂšme qui porta par la suite le nom de PtolomĂ©e , qui place, comme on sait la terre au centre de lâunivers , et fait tourner autour dâelle toutes les planĂštes, en les supposant sâĂ©loigner de ce centre dans lâordre suivant. La Lune , la plus prĂšs dâelle ensuite Mercure , YĂ©nus, le Soleil , Mars , Jupiter, et Saturne le plus loin ainsi Mars Ă©tant trĂšs-prĂšs du Soleil , on jugeoit quâil devoit avoir trĂšs-chaud. 11 nâen est pas de mĂȘme , suivant le systĂšme des Pythagoriciens et de GĂ©ante de Samos que Copernic renouvela. Ils placent Mars beaucoup plus loin du Soleil quâils nây placent la terre , tellement que , par rapport Ă la terre , Mars seroit dans la classe des planĂštes les plus froides. CHAPITRE II Comme on doit rĂ©gler les proportions des Ă©difices dâaprĂšs la nature des lieux. I_j âarchitecte doit avoir soin sur-tout que les proportions des diffĂ©rentes parties de lâĂ©difice se rapportent entre elles pour former un bel ensemble. Quand il aura dĂ©terminĂ© , dâaprĂšs les rĂšgles , cette proportion, et quâil aura trouvĂ© les mesures par le calcul , rien ne fera paroĂźtre davantage son gĂ©nie, sâil sait adroitement en ĂŽter ou y ajouter quelque chose, suivant que la nature du lieu, lâusage et la beautĂ© le demandent , et sans que ces retranchemens , ou additions , paroissent rien dĂ©ranger aux proportions, ni que la vue en soit offensĂ©e. En effet, les objets paroissent tout autrement, lorsquâils sont sous nos yeux , que quand ils sont Ă©levĂ©s fort haut ; et ce qui est dans un lieu enfermĂ© , produit un tout autre effet que quand il est Ă dĂ©couvert. Il faut, pour bien rĂ©ussir en cela, ĂȘtre douĂ© dâun grand jugement car la vue ne nous rend pas toujours les objets tels quâils sont, et ses jugemens nous trompent souvent ; comme on lâĂ©prouve dans la peinture, oĂč des colonnes , des mutules et des statues paroissent saillantes et avancĂ©es hors du tableau , que pourtant lâon sait ĂȘtre une superficie plate et unie. De mĂȘme les rames des navires , quoique droites, paroissent rompues dans lâeau , il nây a que la partie , qui est dehors , qui paroĂźt droite , telle qu elle lâest effectivement ; et cela parce que la partie qui est enfoncĂ©e dans lâeau , devant renvoyer son image au travers du fluide transparent jusquâĂ la superficie de lâeau , ce mouvement fait quâelles paroissent rompues. Soit que nous voyions les choses par lâĂ©mission que les objets font des images , ou par les rayons que nos yeux rĂ©pandent sur les objets , comme les physiciens le prĂ©tendent , il nâen est pas moins vrai que les jugemens de nos yeux sont souvent trĂšs-faux. Si donc ce qui est vrai paroĂźt quelquefois faux, et si les choses semblent souvent ĂȘtre autrement quelles ne sont, je ne crois pas quâon puisse douter de la nĂ©cessitĂ© dâajouter ou de diminuer en changeant un peu les proportions, quand la nature des lieux le demande, pourvu toutefois quâon ne touche point aux choses essentielles ; mais il faut pour cela beaucoup dâintelligence, et bien connoĂźtre les rĂšgles de lâart. On doit donc dâabord Ă©tablir la proportion suivant les rĂšgles, afin de voir prĂ©ci- 34 - 266 LâARCHITECTURE DE Y I T R U V E. sĂšment de combien on peut sâen Ă©carter ; ensuite on trace le plan , en long et en large, de tout lâouvrage quâon entreprend, et de toutes ses parties. La chose faite, on sâoccupe de leur donner les proportions qui conviennent et qui produisent cette beautĂ© dâaspect, qui fait quâen voyant lâĂ©difice, on sâaperçoit aisĂ©ment quâon y a bien observĂ© lâeurythmie , dont je vais parler prĂ©sentement, et enseigner par quel moyen on peut y parvenir. Je commence par les cours des maisons , et je vais expliquer comme on doit les faire. REMARQUES. Lâauteur nous avertit sagement dans ce chapitre , quâil nâest pas aussi nĂ©cessaire de trouver les exactes proportions des diverses parties de lâĂ©difice que de faire en sorte quâĂ©tant chacune dans leur place , elles paroissent telles quâelles doivent ĂȘtre. LĂ maniĂšre dont la chose est situĂ©e , son Ă©lĂ©vation et dâautres causes semblables, altĂšrent souvent lâapparence ; câest pour cela , cĂŽ'mĂŻne nous lâavons vu , quâon doit faire les colonnes des angles, un cinquantiĂšme plus grosses que celles qui sont Ă leurs cĂŽtĂ©s, afin quâelles paroissent Ă©gales Ă celles-lĂ et les colonnes qui sont dans un lieu fermĂ© , plus minces que celles qui sont dans un lieu ouvert. Voyez le &. me Chap. du III. me Liv. Les raisons que Vitruve nous donne pour expliquer les causes des erreurs de notre vue , ne sont pas toutes conformes Ă celles de notre physique moderne. Pa*r exemple lorsquâil dit quâune rame Ă demi enfoncĂ©e dans lâeau , paroĂźt rompue , Ă cause dĂč mouvement que doit faire la partie qui est dans lâeau, pour renvoyer son image jusquâĂ la superficie , il se trompe. Le pli quâoffre ces rames , vient de la rarĂ©faction que souffrent les rayons visuels en passant obliquement dâun milieu plus dense, telle quâest lâeau, dans un qui lâest moins, comme est lâair. CHAPITRĂ I I I. Des Cours des Maisons. * O n distingue cinq espĂšces de cours ; on les appelle, Ă cause de leur figure, ou Toscanes , ou Corinthiennes , ou TĂ©trastyles 1 , ou dĂ©couvertes , ou voĂ»tĂ©es. Les cours Toscanes sont celles dans lesquelles les deux poutres CC. CC. traversent leur largeur en soutenant les poutres de traverses DD. DD. et les conduits des noues EB. EB. qui sont entre les angles E des murs et les croix que font les poutres. La * Planches XXI. rae et XXII. 1 Câest-Ă -dire Ă quatre colonnes. ; ri HaĂŻ .ailles J iiĂ©jalt ĂŻtas pi toile- iils prs ^pob 'aetciTx 'SIC 10, 'las sur. sur â^set K '71 269 LIVRE VI, Chap. iii. bĂąlimens qui les entourent sont trĂšs-peu Ă©levĂ©s ; ils nâont que le rez-de-chaussĂ©e ; dans les murs de la galerie , sont les portes des appartenons. On y voit aussi quelques petites ouvertures assez Ă©levĂ©es qui Ă©loient les fenĂȘtres , qui ne ressembloient pas aux nĂŽtres. Il paroĂźt que les Romains dans lâintĂ©rieur de leurs maisons , prĂ©fĂ©roient lâobscuritĂ© Ă la lumiĂšre , sans doute pour Ă©viter la chaleur. Ils ne prenoient non plus jamais le jour sur la rue ; mais toutes leurs fenĂȘtres Ă©loient dans lâintĂ©rieur ainsi ces toits avancĂ©s garantissoient de la pluie les portes et les fenĂȘtres , et empĂȘ- choient les rayons du soleil de pĂ©nĂ©trer dans les appartenons. Les gravures de Galiani nous donnent une idĂ©e assez exacte de ces cours des anciens. Il les reprĂ©sente trĂšs-petites , sans savoir prĂ©cisĂ©ment ce quâĂ©loit le compluvium, y il le reprĂ©sente au milieu de la cour , comme Ă©tant lâespace oĂč tomboit lâeau des pluies ; niais il nâindique pas lâenfoncement. Perrault, au contraire , reprĂ©sente ces cours entourĂ©es de grands bĂątimens , ayant un Ă©tage au- dessus du rez-de-chaussĂ©e, avec de grandes croisĂ©es, tant dans le bas que dans le haut, semblables Ă celles de nos plus grands hĂŽtels. On ne voit rien qui ressemble Ă cela dans les bĂątimens qui ont Ă©tĂ© dĂ©couverts jusquâĂ prĂ©sent Ă Pompeia. Il est vrai quâon nâa encore dĂ©couvert quâune rue et un quartier , qui se trouvoient lâun et lâautre aux extrĂ©mitĂ©s de la ville , et faisoient presque partie des faubourgs. Ce nâest pas lĂ oĂč se trouvent ordinairement les grands Ă©difices. II se peut que quand on dirigera les fouilles vers le centre de cette ancienne ville , on dĂ©couvrira des Ă©difices plus considĂ©rables. Mais dâaprĂšs la hauteur , que Vilruve assigne, dans le chapitre suivant , aux galeries qui entourent les cours , je suis persuadĂ© que les cours des plus grandes maisons ne seront pas beaucoup plus vastes que celles des maisons des faubourgs. Puisque la hauteur de ces galeries jusquâau faĂźte du toit doit Ă©galer toute la longueur de la cour > on sent que cette hauteur pouvoit devenir excessive si les cours avoient Ă©tĂ© un peu grandes , et quâil seroit mĂȘme impossible de faire des galeries aussi hautes j dâailleurs la plus grande longueur quâil assigne aux cours est 100 pieds. Je vais prĂ©sentement rendre compte des interprĂ©tations que jâai donnĂ©es aux mots quâemploie Vitruve , pour dĂ©signer les diffĂ©rens .objets qui enlroient dans la construction des cours des anciens. Je commence par la cour Toscane, qui devoil avoir cette forme. Voyez la T. re fig. de la XXI, rae planche. La pente du toit BBBB devoit former une saillie considĂ©rable en avant du mur , comme on le verra dans le chapitre suivant. Câest pour cela quâon le faisoit soutenir par quatre poutres. Les deux plus courtes CC , CC , traversoient la largeur 5 trabes in atrii latitudine trcijecta les deux autres qui Ă©loient plus longues, DDDD, traversoient la longueur 5 il les nomme interpensiva; elles sâappuyoient sur les deux premiĂšres. Ensuite les noues , ou Ă©gouts des noues colliquiĂŠ FB , FB Ă©loient soutenues par les chevrons , et ceux-ci par des piĂšces de bois nommĂ©es coyaux , qui posoient sur les angles EE du mur , et sur la croix formĂ©e par les poutres. Dâautres chevrons appuyĂ©s Sur le mur et sur les quatre poutres, soulenoienl le toit qui regnoit tout autour et venoit verser ses eaux dans le rĂ©ceptacle compluvium ou impluvium K } qui Ă©toit au milieu de la cour. 11 est Ă©tonnant comment M. r Galiani a pu aussi bien interprĂ©ter ce passage , sans avoir vu les cours anciennes quâon a dĂ©couvertes depuis Ă Pompeia ; il nâa pourtant pas indiquĂ© 1 enfoncement du compluvium quâil ne pouvoit connoĂźtre j et comme au-dessus du compluvium , il nây avoit pas de \ 27 ° LâARCHITECTURE DE Y I T R U V E. toit , il a cru que ce mot signifĂźoit la partie de la cour qui Ă©toit dĂ©couverte. Le reste de sa figure est si conforme aux cours des anciens que jâai vues Ă Pompeia, que je nây ai rien changĂ©. Barbaro a cru que le mot interpensipa signifĂźoit une piĂšce de bois dont une des extrĂ©mitĂ©s Ă©toit appuyĂ©e sur lâangle des murs , et lâautre sur lâangle que formoient les poutres en se croisant ; et cela parce quâil sâest imaginĂ© que les mots interpensipa et colliquice signifioient une mĂȘme chose. Sâil avoit examinĂ© le texte avec un peu plus dâattention , il auroit vu quâils indiquoient deux choses trĂšs-diffĂ©rentes. Le premier , comme nous venons de le dire , signifĂźoit les deux poutres qui traversoient la longueur de la cour DD, et lâautre les conduits des noues , fig. 1, pl. XXL Dâun autre cĂŽtĂ©, Perrault, qui suit ici lâinterprĂ©tation de PhiĂźander, croit quâinterpensipa signifĂźoit des potences ou plutĂŽt des soutiens posĂ©s diagonalement , dont lâextrĂ©mitĂ© infĂ©rieure Ă©toit enfoncĂ©e dans lâangle des murs , et la supĂ©rieure portoit les poutres dans lâendroit oĂč elles se croisoienl. Son explication tirĂ©e aux cheveux , et les corrections ou plutĂŽt les changemens quâil fait encore ici au texte, suivant sa coutume , prouve combien il sâĂ©loigne du vrai sens de lâauteur. MalgrĂ© lâautoritĂ© de ces deux savans , Galiani croit que par interpensipa , on doit entendre , comme Baldus lâa entendu , les deux poutres qui Ă©toient posĂ©es sur les deux premiĂšres , et formoient avec elles un carrĂ© long. Si lâon analyse le mot interpensipa , on verra quâil signifie proprement une poutre qui pend dans le milieu entre les deux autres ; on pourroit lâappeler , sâil mâest permis dâemployer cette expression nouvelle , poutre interpensive. Ce que dit lâauteur un peu plus loin , en parlant des cours tĂ©traslyles , prouve que nous avons saisi la vraie signification de ce mot. Des colonnes doivent ĂȘtre placĂ©es pour soutenir les pioulres, dans lâendroit oĂč elles se croisent, ce qui produit, dil-il , deux avantages lâun , que les poutres qui traversent la largeur , auront moins de fatigue , et seront moins sujettes Ă plier , quand mĂȘme la cour seroit un peu large neque ipsĆ trabes magnum impetum coguntur habere. Par trabes , comme nous lâavons vu tout-Ă -lâheure , il entend proprement les poutres qui traversent la longueur de la cour ; et quoiquâen dise Perrault , par im- petus il entend la longueur de la poutre , et non la charge qui seroit dessus. En effet, des poutres supportĂ©es par des colonnes , ne fatiguent pas autant dans leur longueur , non coguntur habere magnum impetum. Ce quâil dit ensuite , en parlant des cours couvertes ou voĂ»tĂ©es prouve encore davantage que câest le sens quâil faut donner Ă ce mot. On peut les faire ainsi, dit - il , quand la longueur de la portĂ©e ou la distance le permet, ubi non sunt impetus magni. Lâautre avantage , câest que le poids de ces poutres , nâest pas augmentĂ© par celui de celles qui traversent neque ab inter- pensipis onerantur. Ces colonnes Ă©tant placĂ©es par-dessous , immĂ©diatement dans lâendroit oĂč elles ge croisent , les empĂȘchent de plier. \ Dans les GOurs corinthiennes , il faut nĂ©cessairement faire porter ces poutres tout autour par des colonnes ; parce quâĂ©tant beaucoup plus Ă©tendues que les cours toscanes , il seroit impossible de trouver des poutres assez longues , pour les faire dâune seule piĂšce ; si mĂȘme on en trouvoit , on ne pourroit les employer, Ă cause quâelles Ă©prouveroient trop de fatigue et plieroient infailliblement, Yoye? la XXIX mc planche. Jâai donnĂ© aux cours dĂ©couvertes , dont parle Vitruve , une figure toute nouvelle , et qui me paroĂźtâ plus conforme au texte , que celles quâon leur a donnĂ©es jusquâĂ prĂ©sent. Lâauteur dit, LIVRE VI, Chap, iv. 271 displu viatĆ autem sunt , in quibus deliquiĆ arcam sustinentes stillicidia rĂżiciunt ; on a remarquĂ© que les trois cours dont on a parlĂ© jusquâĂ prĂ©sent, sont eu partie couvertes. Pour ne pas mâĂ©carter du texte et donner au mot displuviata toute son expression , je snppose que cette cour est entiĂšrement dĂ©couverte , et que la pente des toits , au lieu de verser les eaux dans la cour, les verse de lâautre cote , câest-a-dire , en dehors. Le mot stillicidium signifie ici , comme toutes les autres fois que lâemploie , la pente du toit qui est favorable Ă lâĂ©coulement des eaux. Dans le premier chapitre du second livre, il appelle les toits des cabanes des premiers hommes stillicidia ; et dans le septiĂšme chapitre du quatriĂšme livre, en parlant de la forme que doit avoir le toit dâun temple toscan , il dit stillicidium , tecti tertiario respondere debet. Pline appelle aussi stillicidia PĂ©paisseur du feuillage des arbres, quand elle est capable de mettre Ă couvert de la pluie, parce que Peau sâĂ©coule de lâextrĂ©mitĂ© des branches, comme de dessus la pente dâun toit. Jâai donc reprĂ©sentĂ© cette cour entiĂšrement dĂ©couverte , sans aucun auvent et au contraire des autres, lapente des toits nâest pas dirigĂ©e vers la cour, mais en dehors, du cotĂ© opposĂ©â, comme lâindiquent ces expressions , stillicidia rejiciunt y par lĂ rien nâempĂȘchoit la lumiĂšre de pĂ©nĂ©trer dans les salles Ă manger , non obstant luminibus tricliniorum. Si lâon fait bien attention au texte , et si lâon se rappelle lâinterprĂ©tation quâon vient de donner au mot impetus , on verra clairement que les cours voĂ»tĂ©es testudinatum , Ă©toient entiĂšrement couvertes, et non entourĂ©es de portiques voĂ»tĂ©s, et dĂ©couvertes dans le milieu, comme Perrault lâa cru ; parce que , dâaprĂšs les expressions de lâauteur, on ne pouvoit faire des cours couvertes quâautant quâelles Ă©loient peu spacieuses , ubi non sunt impetus magni / et quâon avoit besoin dâagrandir, par ce moyen, la partie supĂ©rieure de lâhabitation, qui Ă©toit augmentĂ©e de tout lâespace qui se trouvoit au-dessus de la cour. Galiani observe en outre quâil devoit naturellement y avoir une espĂšce de cour entiĂšrement couverte , et quâil auroil Ă©tĂ© Ă©tonnant que Vitruve ne lâanroit pas mise au nombre des cinq dont il parle dans ce chapitre; elle ne sây trouveroit pas en effet * si la cour voĂ»tĂ©e Ă©toit telle que Perrault la reprĂ©sentĂ©; et si elle Ă©toit 4elle, ajoute Galiani, elle ne mĂ«riteroit pas de faire une espĂšce sĂ©parĂ©e , puisquâelle ne diffĂšre pas assez de la cour corinthienne , nây ayant entre elles dâautre diffĂ©rence , sinon que la couverture des portiques de lâune Ă©toit portĂ©e par des voĂ»tes, et celle de lâautre par des poutres. » CHAPITRE IV. Des Cours , de leurs galeries , des Cabinets dĂ©lude et des PĂ©ristyles. * Les diverses dispositions de la longueur et de la largeui des cours, forment trois genres diffĂ©rens. Le premier, câest quand on divise la longueur en cinq parties pour en donner trois Ă la largeur. La seconde , câest quand on la divise en trois pour en donner deux Ă la largeur. La troisiĂšme , câest lorsquâayant tracĂ© un carrĂ© Ă©quilatĂ©ral dont un cĂŽtĂ© lait la largeur de la cour, on prend la diagonale de ce carrĂ© pour la longueur i. La hauteur jusqu'au dessous des poutres doit avoir un quart moins que la longueur ; dans ce quart qui reste, on distribue lâĂ©paisseur des plafonds et la hauteur du toit au-dessus des poutres. La largeur des galeries 2 qui sont Ă droite et Ă gauche, doit Ă©galer le tiers de la longueur de la cour 3, quand elle est de trente Ă quarante pieds ; mais quand la longueur est de quarante Ă cinquante pieds, on la divise en trois parties et demie; line de ces parties sera pour les galeries ; quand elle est de cinquante Ă soixante, les galeries en auront la quatriĂšme partie; quand elle est de soixante Ă quatre-vingts, on la divise en quatre et demie, et lâon en donnera une Ă la largeur des galeries; si enfin, la longueur est de quatre-vingts Ă cent pieds, la cinquiĂšme partie sera justement la largeur des galeries. Les poutres de cette galerie doivent ĂȘtre posĂ©es assez haut pour Ă©galer la hauteur Ă la largeur 4. * Planches XXI.â* et XXII.â* 1 La deuxiĂšme figure de la XXI.âą 8 planche reprĂ©sente une cour dont la longueur contient trois parties-, et la largeur deux. La XXIL ra * planche reprĂ©sente une cour longue de cinq parties et large de trois. Les figures i et 3 de la XXI.â e planche sont celles qui ont la largeur du cĂŽtĂ© dâun carrĂ© et qui sont aussi longues que sa diagonale. 2 Dans nos remarques sur le premier chap. du Ill. me livre, nous avons observĂ© que les anciens appeloient ailes, les galeries, portiques ou colonnades qui Ă©toient aux deux cĂŽtĂ©s des temples , câest pourquoi jâai rendu ici le mot ah , par celui de galerie. 3 La raison nous dit que celte troisiĂšme ou quatriĂšme partie de la longueur qui est attribuĂ©e Ă la largeur de* galeries , ne doit pas sâentendre pour chacune des galeries , mais pour les deux prises ensemble ; partant on en doit donner la moitiĂ© Ă chacune , de maniĂšre que chaque galerie nâa que la sixiĂšme partie de la longueur de la cour. 4 - Pour concilier la hauteur quâil assigne ici aux galeries , avec celle quâil a assignĂ©e un peu auparavant pour les cours, il faut croire que ces galeries, dont la hauteur Ă©gale la largeur, sont seulement pour les cours qui ont plus de 80 pieds de long , et quâil les cite compte faisant exception. j LITRE TI, C h a p, iy, ^ II faut donner au cabinet dâĂ©tude i les deux tiers de la largeur de la cour, quand elle est de vingt pieds ; quand elle est de trente Ă quarante, on ne lui en donne que la moitiĂ©; et quand elle est de quarante Ă cinquante , on divise cette largeur en cinq parties, et on en donne deux au cabinet dâĂ©tude. Les petites cours ne peuvent avoir les mĂȘmes proportions que les grandes , parce que si lâon suivait les proportions des grandes cours pour les petites, les cabinets d Ă©tude et les galeries des cours ne seroient dâaucun usage et si au contraire on se servoil des proportions des petites cours pour les grandes, les galeries et les cabinets dâĂ©tude seroient trop vastes. Câest pourquoi jâai cru devoir rapporter les rĂšgles gĂ©nĂ©rales qui Ă©tablissent lâexacte grandeur quelles doivent avoir pour 1 usage auquel elles sont destinĂ©es, et pour quelles parois- sent agrĂ©ables Ă la vue. La hauteur du cabinet dâĂ©tude, jusquâau dessous des poutres, doit surpasser dâun huitiĂšme la largeur on Ă©lĂšve ensuite le plafond, en ajoutant Ă cette hauteur le sixiĂšme de la largeur 2 . Les ouvertures, du cĂŽtĂ© de la cour, auront les deux tiers de la largeur des cabinets, sâils sont petits ; sâils sont grands, elles seront de la moitiĂ©. La hauteur des statues avec leurs ornemens sera proportionnĂ©e Ă la largeur des galeries. Pour la largeur et la hauteur des portes, on suit les proportions doriques quand elles sont doriques, et les proportions ioniques quand elles sont ioniques , et toutes les rĂšgles que nous avons Ă©tablies dans le quatriĂšme livre pour la construction des portes. La largeur de lâouverture , au-dessus du rĂ©ceptacle dâeau, ne peut ĂȘtre ^moindre du quart, ni plus du tiers de la largeur de la cour. La longueur doit ĂȘtre Ă proportion et suivant celle de la cour. * Planche IX 1 * 1 '. 1 Jâai traduit tablinum par cabinet dâĂ©tude. CâĂ©toit probablement ce que nous nommons les archives, oĂč lâon conservoit les registres de recette et de dĂ©pense , tabulĆ , comme dans la pinacotheca on conservoit les tableaux, GâĂ©toit lĂ oĂč lâonĂ©crivoit suivant les deux maniĂšres des anciens ; dâabord sur des tablettes enduites de cire, parce quâils traçoient ainsi leurs premiĂšres idĂ©es ; ensuite sur des feuilles de vĂ©lin ou de papier sur lesquelles ils les transcrivoient aprĂšs. Cet endroit devoit contenir plusieurs bureaux ou tables pour Ă©crire. Cependant comme tablinum est dĂ©rivĂ© de tabula , qui signifie aussi une planche , il se peut quâon appeloit tablinum x une chambre entiĂšrement planchĂ©iĂ©e. Encore aujourdâhui en Italie, o* appelle tablino , une allĂ©e pour passer dans la cour dâun logis. 2 Si par lacunaria on n'entend pas ici le plafond dâune voĂ»te cintrĂ©e que lâauteur dĂ©signe dans le chapitre suivant par ces expressions, curva acunaria ad circĂ»nim delumbala , il faut absolument supposer avec Perrault quâil y a une faute du copiste, et lire VI au lieu de III ; on aura facilement fait cette faute en Ă©crivant le six de cette façon VI en supposant que lâauteur ne veut quâun enfoncement ordinaire dans le plafond , il est Ă©vident quâen le faisant du tiers de la largeur de la galerie , il seroit plus dâune fois plus grand quâil ne doit ĂȘtre. 36 L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. 274 Les pĂ©ristyles 1 doivent ĂȘtre un tiers plus longs en travers quâils ne sont, en avant ; leurs colonnes seront aussi hautes que les portiques sont larges les entre- colonnemens ne peuvent avoir moins de trois diamĂštres de colonnes , ni plus de quatre, si ce nâest quâon veuille faire Ă ces pĂ©ristyles des colonnes dâordre dorique ; en ce cas il faut rĂ©gler les mesures , et distribuer les triglyphes, comme je l ai prescrit dans le quatriĂšme livre. RE MJ R Q UES. On a mal Ă propos sĂ©parĂ© ce chapitre de celui qui prĂ©cĂšde , parce que traitant le mĂȘme sujet, câest-Ă -dire , des cours, ils nâen devroient faire quâun. Le premier qui a fait cette division et qui a induit tous les autres en erreur , sâest imaginĂ© que le mot atrium , que lâauteur emploie dans ce chapitre pour dĂ©signer les cours des maisons, nâĂ©toit pas le synonyme de cavum Ćdium quâil emploie dans le chapitre prĂ©cĂ©dent pour exprimer le mĂȘme objet mais que atrium Ă©toit le synonyme de vestibulum. DâaprĂšs cela , ils ont fait de Yatriurn une espĂšce de vestibule. Ils auroient vu combien ils Ă©toient dans lâerreur , sâils avoient fait attention Ă ce que dit lâauteur dans le io. m * Chap. de ce liv. , oĂč lâon voit clairement que Vatrium et le vestibulum Ă©toient deux choses toutes diffĂ©rentes; comme nous le remarquerons alors; et sâils avoient rĂ©flĂ©chi, ils auroient vu que lâauteur, aprĂšs avoir distinguĂ© dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, les cinq espĂšces de cours, continue ensuite Ă donner leurs proportions, et que ce sont ces proportions quâon trouve dĂ©crites dans ce Chap. IY, quĂčm nĂčmroit pas dĂ» sĂ©parer de lâautre. Il Ă©toit cependant aisĂ© de voir que atrium cl cavum Ćdium signifioient la mĂȘme chose. Dans le chapitre prĂ©cĂ©dent on lit cava Ćdium tus- canica sunt in quĂŻbus trabes in atrii ĂŻatitudine trajectĆ , etc. ; Dans le 8. mB Chap. de ce Liv., en parlant de cette partie de la maison , dans laquelle tout le monde pouvoit entrer sans ĂȘtre invitĂ©, il dit dâabord vestibula > cava Ćdium , peristylia, etc., et un peu aprĂšs, en parlant des maisons de la noblesse il dit quâelles doivent avoir vestibula regalia , alla atrict et peristylia. En un mot, partout dans son ouvrage , on voit que les mots atrium et vestibulum signifient deux choses diffĂ©rentes , et au contraire que le mot atrium est le synonyme de cavum Ćdium. Joconde , ayant reconnu cette vĂ©ritĂ©, nâa fait quâun seul chapitre de celui-ci et du prĂ©cĂ©dent, dans son Ă©dition .Yitruye. 1 Outre la cour dont il a dĂ©jĂ parlĂ© , les maisons de la ville en avoient encore une t autre beaucoup plus grande, appelĂ©e le pĂ©ristjie , câest-Ă -dire, entourĂ©e de colonnes. Les logemens des maĂźtres se trouvoient tout autour, comme on le voit dans la XVIlI." ie planche , et comme on le comprendra mieux encore en lisant la description de toute la maison, dans le chapitre suivant. Ces pĂ©ristyles ressembloient parfaitement aux cloĂźtres des abbayes et des couvens des religieux ; usage quâils avoient pris de la maniĂšre de bĂątir des Romains, et quâils ont conservĂ© jusquâĂ notre temps. LIVRE VI ? C h A p. T. 275 CHAPITRE V. Des Salles Ă manger , des Salons, des Exedres , et des Galeries de tableaux. Les salles Ă manger doivent ĂȘtre deux fois plus longues que larges. Quant Ă la hauteur , la rĂšgle gĂ©nĂ©rale , pour toutes les chambres qui sont plus longues que larges, est de joindre la longueur Ă la largeur , et de prendre la moitiĂ© de ces grandeurs rĂ©unies pour la donner Ă la hauteur; mais si les salles et les salons sont carrĂ©s , on fera la hauteur Ă©gale Ă la grandeur et demie dâun des cĂŽtĂ©s. Les galeries de tableaux et les exedres 1, doivent ĂȘtre grandes et spacieuses. Pour bien proportionner la longueur et la largeur des salons corinthiens et des salons tĂ©trastyles quâon nomme aussi salons Ă©gyptiens , il faut suivre les rĂšgles que nous venons de prescrire pour les salles Ă manger on doit seulement les faire plus spacieuses, Ă cause des colonnes qui sây trouvent. Les salons corinthiens et les salons Ă©gyptiens diffĂšrent , en ce que les corinthiens nâont quâun ordre de colonnes posĂ© sur un socle ou mĂȘme sur le pavĂ©, et ne soutiennent que lâarchitrave et la corniche faite en menuiserie ou en stuc , sur lesquelles sâĂ©lĂšve ensuite le plafond qui forme une voĂ»te concave et cintrĂ©e, tandis que les salons Ă©gyptiens ont des architraves sur les colonnes , et sur les architraves un assemblage de charpente qui va jusquâaux murs dâalentour ; il porte un pavĂ© , et forme une galerie dĂ©couverte qui tourne tout autour ; ensuite sur lâarchitrave Ă plomb des colonnes dâen bas, sâĂ©lĂšve un second ordre de colonnes , un quart plus petites que les premiĂšres , sur lesquelles il y a des architraves , et les autres parties de lâentablement sur lesquelles posent les ornemens du plafond. Entre les colonnes dâen haut, on place les fenĂȘtres , ce qui fait quâils ressemblent bien plus Ă une basilique qu'Ă une salle Ă manger corinthienne. R E 31 J R Q U E S. Jâaurois pu 5 en traduisant , rendre le mot triclinium que lâauteur emploie au commencement de ce chapitre , par celui de incline , comme jâai rendu le mot exĆdra par exĂšdre , puisque ces expressions latines francisĂ©es, sont employĂ©es prĂ©sentement dans les ouvrages qui traitent des sciences. * Planche XlX. me des salles oĂč se l'Ă©unissoient les savans et les philosophes , 1 Les exĂšdres comme nous lâavons dit dans nos re- pour parler des sciences, marques sur le 2. me Chap. du V. me Liv. Ă©toient de granit; ilt/ ft \ 276- L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. On les trouve entre autres , avec leur explication , dans lâexcellent dictionnaire des sciences et des arts , que M. Lunier a fait imprimer en i8o5 j mais lâauteur , employant ici ce mot pour dĂ©signer une salle Ă manger, tandis quâil lâemploie ailleurs ponr dĂ©signer la table et les trois lits sur lesquels Ă©loient placĂ©s les convives , jâai cru devoir le rendre par salle a manger , pour Ă©viter toute ambiguitĂ©. Le mot triclinium est composĂ© des mots grecs rpaç trois , et jcA ivy lit ; parce que les Grecs et les Romains avoient coutume de sâasseoir ou plutĂŽt de sâĂ©tendre sur des lits pour manger , et quâil y en avoit ordinairement trois autour de la table. On meltoit, sur les lits, des maielals plus ou moins prĂ©cieux, suivant la richesse du maĂźtre de la maison. Il y avoit, sur chaque lit , trois convives et rarement quatre 1 il nâĂ©toit pas honnĂȘte dây en admettre davantage 2 ils avoient la partie supĂ©rieure du corps appuyĂ©e sur le coude 3 , et le reste Ă©tendu ; de maniĂšre que le premier convive avoit les pieds derriĂšre le dos du second , et que la tĂȘte de celui-ci Ă©loit vis-Ă -vis le milieu du corps du premier , avec un coussin entre deux les autres convives Ă©toient rangĂ©s de mĂȘme. Aux .pieds des lits Ă©toient assis ceux quâon appeloit les parasites 4 , les amis familiers et sans consĂ©quence 5 , et les enfans 6 . Quoique Vitruve , comme nous venons de lâobseryer , se serve ici du mot triclinium 3 pour dĂ©signer la salle Ă manger , on voit , dâaprĂšs ce qui prĂ©cĂšde , que ce mot signifioit proprement la table , avec les trois lits , sur lesquels les convives Ă©loient assis ou plutĂŽt couchĂ©s. Vitruve lâa entendu dans ce sens au dixiĂšme chapitre de ce livre, oĂč, en parlant des grandes salles Ă manger des Grecs , il ne les appelle point triclinia mais Ćcos 7 ; il dit quâelles Ă©loient si grandes , quâelles pouvoient contenir quatre iriclines , quatuor triclinia ; mais ici , dans ce cinquiĂšme chapitre , on ne peut pas douter que Vitruve nâait entendu par triclinium la salle mĂȘme oĂč on dressoit uri table Ă trois lits. Outre les proportions des salles Ă manger ou iriclines , Vitruve nous donne encore , dans ce chapitre , celles des pinacotĂ©es > qui correspondent Ă nos galeries de tableaux , des exĂšdres ou salles de conversations , et des deux espĂšces Ă âcecus que jâai rendu par le mot salon. âą Perrault a cru que Vitruve distinguoil jusquâĂ trois espĂšces Ă âĆcus 3 câest-Ă -dire le corinthien , le tĂ©trastyle et lâĂ©gyptien ; sâil avoit cependant bien rĂ©flĂ©chi sur les paroles du texte , il auroit bien vu quâil nâen distinguoit que deux. Eci corinihii tetrastylique s quique Ćgyptii vocantur dâaprĂšs ccs expressions , il faut que les salons lĂ©trastyles soient la mĂȘme chose que les salons corinthiens , ou la mĂȘme chose que les Ă©gyptiens. Barbaro Ă©toit du premier avis , et Galiani, avec bien plus de raison , Ă©toit du second ; puisquâun peu aprĂšs on voit, dans le texte , la diffĂ©rence quâil y avoit entre les salons corinthiens et les Ă©gyptiens , et il ne fait plus aucune mention des lĂ©trastyles ce qui prouve que ce salon Ă©toit la mĂȘme chose quâun des deux autres. 1 Virgile AEneid. L. I. V. 699. 5 Plaut. stich. , Act. III, Sce. 6. 2 Ilor. lib. I. Sat. v. 86. 6 Suet. vita Terentii. 3 Cicer. in Pis. C. 27. 7 On les appeloient Ćcos , câest-Ă -dire des maisons , et cela 4 4 Horat. sat. a lib. II. Sat. 8, Ep. I, Y. 28. eause de leur grandeur. L I Y R E VI, C h a p. v. 277 Les salons Ă©gyptiens , dont il est parlĂ© dans ce chapitre , ressemblent beaucoup Ă ce que nous appelons une chambre italienne. L essentiel de ce genre d Ă©difice consiste a ne prendre le jour que dâen haut, et Ă avoir lâexhaussement de deux Ă©tages; ce qui procure trois grands avantages le premier, câest que cette piĂšce peut ĂȘtre dĂ©gagĂ©e des quatre cĂŽtĂ©s, et rĂ©pondre Ă quatre appartenions ; le second , quâon y respire un air trĂšs-frais en ete ; le troisiĂšme , que le jour qui vient des quatre cĂŽtĂ©s , et par en haut, nâeblouit pas autant , et laisse, tout a lâentour, lâespace vuide pour y placĂ©r des tableaux et autres ornemens dont on le veut decorer espace qui est ordinairement occupĂ© en grande partie par les fenĂȘtres. INous voyons clairement , dans ce chapitre , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© dans nos remarques sur le 1." Chap. du 111 . m ' Liv. , quâentre deux ordres de colonnes , les anciens supprimoient quelquefois la frise et la corniche , nây mettant que la seule architrave. Quoiquâon voie fort peu dâexemples de cette maniĂšre , dans les Ă©difices anciens qui subsistent encore , on peut dire nĂ©anmoins quâelle est appuyĂ©e sur la raison , qui veut que les ornemens dâarchitecture soient fondĂ©s sur quelquâusage. Lâusage des corniches Ă©tant de dĂ©fendre les murs et les colonnes des injures du temps , elles sont inutiles dans les lieux qui sont couverts; elles seroient mĂȘme nuisibles dans un appartement tel que le salon Ă©gyptien dĂ©crit dans ce chapitre , oĂč elles ne feroient quâintercepter le jour dâen haut, le seul quâelle puisse recevoir. Je suis donc persuadĂ© , avec Perrault et Galiani, que , malgrĂ© que le mot epistylium signifie par fois tout lâentablement , ici il ne signifie autre chose que lâarchitrave. On peut encore ajouter, en faveur de cette opinion , comme lâobserve Galiani , que lâauteur sâest servi , un peu auparavant, de ces expressions , en par^ lant des salons corinthiens; mais lĂ , aprĂšs le mot epistylia , il ajoute celui de coronas supraque hcibeant epistylia coronas y sâil avoit aussi voulu avoir la mĂȘme chose au-dessus du premier ordre de colonnes du salon Ă©gyptien, en en parlant, il nâauroit pas nĂ©gligĂ© de citer la corniche. Perrault , Ă celte occasion , rapporte lâexemple dâun ancien Ă©difice qui exisloit encore de son temps , auprĂšs de Bordeaux , nommĂ© les Tuteles 3 dont il donne la figure ; elle reprĂ©sente une colonnade dâordre corinthien, au-dessus de laquelle rĂšgne un atlique ; entre lâattique et les chapiteaux des colonnes, il nây a que lâarchitrave. Cet Ă©difice ancien, lâun des plus beaux qui nous Ă©toient restĂ©s des Romains, en deçà des Alpes , a Ă©tĂ© dĂ©truit , comme nous lâavons dit , vers lâan 1680 , lorsquâon a construit les nouvelles fortifications uuttwuvuuiwuutiM 0 > 278 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. > ' ' 1 . CHAPITRE V I, Des Salons Ă la maniĂ©rĂ© des Grecs. * O n fait encore des salles dâune autre maniĂšre que celles quâon voit en Italie ; les Grecs les nomment cyzicĂšnes 1. Ces salles sont tournĂ©es vers le septentrion , de sorte quâ elles ont, le plus souvent, vue sur les jardins ; et leurs portes sont dans le milieu. Ces salles doivent ĂȘtre assez larges, pour contenir deux tables Ă trois lits, en face lâune de lâautre , avec lâespace nĂ©cessaire tout Ă lâentour pour le service. Elles doivent avoir Ă droite et Ă gauche des fenĂȘtres, qui sâouvrent comme des portes , afin que de dessus les lits 2 , on puisse voir dans les jardins. La hauteur de ces salles doit surpasser leur largeur de la moitiĂ©. 1 . Il faut proportionner tous ces genres dâĂ©difices , suivant la situation du lieu , et i de maniĂšre quâil nâen rĂ©sulte aucun inconvĂ©nient. Il sera aisĂ© de prendre le jour , si les murs voisins , par leur hauteur , nâinterceptent pas la lumiĂšre ; si nĂ©annoins cela arrivoit Ă cause du peu dâespace , ou pour toute autre raison , il faut alors avec beaucoup dâintelligence et dâadresse, ajouter ou diminuer les proportions que nous avons prescrites , de maniĂšre cependant que lâouvrage conserve toute sa beautĂ©, et paroisse avoir ses vĂ©ritables proportions. REMARQUES. Toutes les proportions des salles cyzicĂšnes , ne sont pas indiquĂ©es dans ce chapitre cependant dâaprĂšs la hauteur qui leur est assignĂ©e , laquelle doit Ă©galer une fois et demie leur largeur , on pour- roit supposer quâelles Ă©toient carrĂ©es , puisque nous avons vu , un peu auparavant, quâon prescrivoit cette hauteur aux salles carrĂ©es si cependant elles avoient Ă©tĂ© telles , il Ă©loit inutile de rĂ©pĂ©ter quelle devoit ĂȘtre leur hauteur. 11 est donc plus probable quâelles Ă©toient deux fois aussi longues que larges, parce que cette forme est la* plus convenable pour placer, comme lâauteur le prescrit, * Planche XIX.âą * i Suivant Perrault on appelle ces salles cyzicĂšnes, parce que la ville de Cyzique, situĂ©e dans lâisle du mĂȘme nom , qui se trouve dans la mer de Propontide, est for* renommĂ©e pour la magnificence de ses bĂątinaens , qu 1 Ă©toient tous de marbre , jusquâaux murailles de la ville. 2 Dans la plupart des exemplaires , au lieu de lectis, on lit de tçctis ce qui nâa aucun sens. Jâai donc suivi la correction de Philander, Ă©tant tout naturel de croire que- fauteur aura Ă©crit de leciis , LIVRE' VI, C h a p. VII. 2 79 deux triclines en face lâune de lâautre. Les triclines, comme nous lâavons dit , consistoient en une petite table ronde , entourĂ©e de trois cĂŽtĂ©s par de petits lits , dont chacun pouvoit contenir trois personnes , qui mangeoient Ă©tant couchĂ©es dessus. Je suis dâautant plus persuadĂ© que ces salles dĂ©voient avoir ces dimensions , que ce sont celles que Vitruve , au commencement du 5. me chapitre de ce livre , assigne aux salles destinĂ©es aux triclines. Ces salles avoient de grandes et hautes fenĂȘtres qui descendoient jusquâĂ terre ; elles ressembloient probablement Ă nos portes vitrĂ©es. 'llf CHAPITRE VII. iĂčtusj ir \ĂŻ 0 l Lafe De laspect quil convient de donner a chaque partie de lĂ©difice. Nous allons maintenant expliquer les qualitĂ©'s que doivent avoir les diffe'rens genres d Ă©difices , suivant lâusage auquel ils sont destinĂ©s , et vers quel aspect du ciel il convient de les tourner. Les salles Ă manger dâhiver, et les bains , auront la vue sur le couchant dâhiver; parce que ces places ont besoin de la clartĂ© du soir ; et que le soleil, parvenu Ă lâoccident, renvoie directement ses rayons sur elles , et y rĂ©pand , vers le soir , ylfmtiĂŻ une chaleur assez douce i. Il faut tourner les chambres Ă coucher et les biblio- iifwf thĂšques vers lâorient ; parce que leur usage demande la lumiĂšre du matin ; ensuite site" j es h vres se gĂątent moins dans ces bibliothĂšques que dans celles qui regardent le midi ou le couchant , lesquelles sont sujettes aux vers et Ă lâhumiditĂ© , produits et entretenus par le souffle des vents humides ; ce qui fait moisir les livres. D eur I" g**! Les salles Ă manger , dont on se sert au printemps et pendant lâautomne , doivent recevoir le jour de lâorient ; parce quâen tenant les fenĂȘtres fermĂ©es , jusquâĂ ce que la chaleur du soleil soit passĂ©e Ă lâoccident, ces appartenons restent tempĂ©rĂ©s pendant les heures quâon a coutume de sâen servir. Les salles dâĂ©tĂ© regarderont le septentrion , parce que , dans cette situation , on nâest pas , comme dans les autres, suffoquĂ© par la chaleur , pendant le solstice d Ă©tĂ© ; opposĂ©e au cours du soleil, on respire toujours , dans ces lieux , un air frais , sain et agrĂ©able. tl^ 0 On sait que les anciens se baignoient et faisoient leur principal repas vers le soir. Celte exposition convient egalement pour les galeries de tableaux , pour les atte- liers oĂč lâon fait les tapisseries, et pour ceux des peintres. La lumiĂšre quâils reçoivent, toujours Ă©gale en tout temps , fait que les couleurs nây changent jamais. \ CHAPITRE VIII. Des formes que doivent avoir les Biaisons , d'aprĂšs la condition de ceux qui les habitent. * A prĂšs avoir-observĂ© quel est lâaspect du ciel le plus favorable Ă chaque partie de l'habitation, il faut dĂ©terminer la maniĂšre dont on devra construire les piĂšces qui sont seulement pour loger le maĂźtre de la maison , et celles qui doivent ĂȘtre communes aux Ă©trangers ; puisquâil nây a que les personnes invitĂ©es qui entrent dans les appartemens particuliers du maĂźtre , tels que les chambres Ă coucher , les salles Ă manger , les bains et autres de ce genre tandis que tout le monde a droit dâentrer, sans ĂȘtre invitĂ© , dans celles qui sont publiques, tels que les vestibules , les cours , les pĂ©ristyles et autres endroits qui sont destinĂ©s Ă des usages communs. Les gens dâune condition mĂ©diocre nâont pas besoin dâun magnifique vestibule, ni dâun bureau, ni dâune cour , parce quâils vont ordinairement faire la cour aux autres , et quâon ne vient pas la leur faire chez eux. Ceux qui cultivent des biens de campagne , doivent avoir, Ă lâentrĂ©e de leur maison, des Ă©tables , des boutiques ; et au-dedans , des caves , des greniers , des celliers et dâautres commoditĂ©s de ce genre, plus convenables pour conserver les fruits de la terre , que pour procurer lâĂ©lĂ©gance et la beautĂ© Ă lâĂ©difice. Les banquiers et les partisans ont besoin dâappartemens plus commodes et plus beaux, et sur-tout bien fermĂ©s pour ĂȘtre en sĂ»retĂ© contre les voleurs. Les avocats et les gens de lettres veulent des habitations plus Ă©lĂ©gantes et plus spacieuses encore , Ă cause des assemblĂ©es qui se font chez eux. La noblesse enfin, qui occupe les grandes charges de lâĂ©tat et de la magistrature, devant donner audience * Planche XIX. m * au L I y R E VI, C II a P. vm. 281 au public, doit avoir des vestibules magnifiques, de grandes cours, 1 des pĂ©ristyles spacieux , des jardins plantĂ©s dâarbres , avec de longues promenades; il faut que tout chez elle soit beau et majestueux. Elle doit avoir en outre des bibliothĂšques , des cabinets de tableaux et des basiliques dont lu magnificence Ă©gale celles qui font partie des Ă©difices publics parce quâil se fait souvent dans ces maisons des assemblĂ©es pour les affaires d'Ă©tat , et pour juger et arbitrer les diffĂ©rens des particuliers. Les Ă©difices Ă©tant disposĂ©s de cette maniĂšre , selon les diffĂ©rentes conditions des personnes , on aura satisfait Ă ce quâexigent les rĂšgles de la biensĂ©ance dont on a parlĂ© dans le premier livre. On nây pourra rien critiquer , puisque , dans chaque habitation , tout sera commode et perfectionnĂ© dâaprĂšs les rĂšgles. Ceci ne doit pas seulement rĂ©gler la construction des Ă©difices qui se font en ville ; mais aussi celle de ceux qui se font Ă la campagne , avec celle seule diffĂ©rence que les maisons de la ville ont la cour contre la porte , au lieu que dans les maisons de campagne , on rencontre d'abord le pĂ©ristyle, ensuite la cour entourĂ©e de portiques avec leurs trottoirs, qui ont la vue sur les palestres et sur les promenades. AprĂšs avoir enseignĂ© briĂšvement, et le mieux que jâai pu , suivant ma promesse, la maniĂšre de construire les maisons de la ville , il me reste Ă expliquer comment on doit disposer celles de la campagne, pour y trouver toutes les commoditĂ©s quâexige leur destination. REMARQUES. A Rome , les juges et les arbitres Ă©loient toujours pris parmi les citoyens les pins distinguĂ©s. Lorsquâils survenoit un diffĂ©rent entre des particuliers , le demandeur prioit le prĂȘteur de lui donner un tribunal ou un juge sâil lui donnoit un juge , câĂ©toil , ou un juge proprement dit, ou un arbitre? sâil lui donnoit un tribunal , eâĂ©toit celui des commissaires quâon appcloit recuperaiores , ou celui des centumvirs. Ce fut dâabord parmi les sĂ©nateurs , quâon prit les juges , pour les affaires des particuliers. Mais lâan 63i de la fondation de Rome, le tribun Sempronius Gracchus publia une loi, qui ĂŽtoit aux sĂ©nateurs le pouvoir de juger ,'et le transportoit Ă lâordre des chevaliers. Cependant quelque temps aprĂšs , le droit de juger fut commun aux uns et aux autres. Ces juges sâassembloient quelquefois dans les basiliques qui faisoienl partie des Ă©difices publics , dont Vilruve a dĂ©crit la construction et la forme dans le I. er Chap. du Y. me Liv. Mais on conçoit que dans le temps de la grande richesse, de Rome, il Ă©toit impossible de rendre dans les basiliques publiques tous les jugemens quâen- traĂźnoit la quantitĂ© de diffĂ©rens qui survenoient entre les citoyens qui formoientson immense population* 1 Lâauteur se sert ici des mots alla atria , parce que , cour devoit ĂȘtre grande et spacieuse , Ă moins quâon ne comme nous lâavons vu, la hauteur Ă©tant proportionnĂ©e veuille lire lata au lieu de alla, comme on le fait. Com- , Ă la largeur , et celle-ci Ă la longueur , il suffisoit. dâin- munĂ©ment. diguer lâune de ces quantitĂ©s pour faire connoĂźtre que la 36 282 LâARCHITECTURE DE YITRUVE. Les juges et les arbitres rendoient donc celte justice chez eux. Le luxe ayant Ă©tĂ© portĂ© Ă nn point incroyable dans celle ville , la noblesse , câest-Ă -dire, les sĂ©nateurs et les chevaliers , auxquels Ă©toit rĂ©servĂ© le droit de juger , firent construire chez eux des basiliques , Ă lâinstar de celles qui faisoient partie des Ă©difices publics. VoilĂ pourquoi Vitruve , dans ce chapitre, veut quâune basilique, avec ses accessoires , se trouve au nombre des Ă©difices qui composoient lâhabitation de la noblesse romaine. CHAPITRE IX Des Maisons de campagne. ,ic r 0 i r idoi'i TJ ouk bien situer une maison de campagne , il faut dâabord examiner lâexposition la plus saine , dâaprĂšs les principes que nous avons Ă©tablis dans le premier livre , pour choisir lâemplacement des murs dâune ville ; quand on lâaura trouvĂ©e , il faut y bĂątir la maison. On doit proportionner sa grandeur aux terres qui en dĂ©pendent, et aux fruits quâon y recueille. On dĂ©termine le nombre des cours et leur Ă©tendue dâaprĂšs la quantitĂ© de bĂ©tail et des charrues qui seront nĂ©cessaires. On place la cuisine dans lâendroit de celle cour , oĂč la chaleur se fait le plus sentir , contre laquelle on bĂątira lâĂ©table pour les bĆufs. Il faut que des crĂšches on voie la cheminĂ©e et le soleil levant; par ce moyen , les bĆufs , voyant habituellement la lumiĂšre et le feu, ne deviendront pas hĂ©rissĂ©s. Ce qui est tellement vrai que les laboureurs, quoiquâigno- rant les effets des divers aspects du ciel, croient cependant quâ011 ne peut tourner les Ă©tables que vers lâorient. Ces Ă©tables ne peuvent avoir moins de dix pieds de large , ni plus de quinze. On rĂšgle la longueur , de maniĂšre que chaque couple de bĆufs puissent occuper au moins sept pieds. i ĂŻur â i 1 Bits? I, ĂȘftl'ĂźS , do il ' kdsâ KljlOJ i 'ĂŻiffirD i km 4 'loin * iit* Les bains seront encore contigus Ă la cuisine ; par-lĂ , le lavoir Ă lâusage des gens de la basse-cour , ne sera pas Ă©loignĂ©. Le pressoir Ă l'huile doit aussi ĂȘtre prĂšs de la cuisine , pour rendre plus aisĂ© , le travail nĂ©cessaire Ă la prĂ©paration des olives. Contre le pressoir sera le cellier , dont les fenĂȘtres tireront le jour du septentrion; car si elles le liroient dâun autre cĂŽtĂ© , la chaleur du soleil feroit troubler le vin et affoibliroit sa qualitĂ©. Ko- , I 1 Lâendroit oĂč lâon conserve les huiles demande , au contraire , lâexposition la plus chaude , celle du midi ; parce quâil faut Ă©viter que lâhuile ne se gĂšle , et faire quâune IX. 283 LIVRE VI, C h a p. chaleur douce l'entretienne toujours liquide. On doit proportionner la grandeur de ces celliers Ă la quantitĂ©' de fruits quâon recueille , et au nombre de vases nĂ©cessaires ; si ces vases sont de la grande jauge , ils doivent avoir dans le milieu un dia. mĂštre de quatre pieds i. Si le pressoir nâest pas vis-Ă -vis, et quâil serre avec un levier et- des poids , il faut que lâemplacement ait au moins quarante pieds de long, pour quâon puisse y travailler Ă son aise ; il ne peut non plus avoir moins de seize pieds de large , pour que lâespace ne'cessaire Ă la manutention soit libre tout autour âą si lâon vouloit cependant y placer deux pressoirs , il faudroit alors que remplacement ait vingt-quatre pieds de large. On doit donner aux bergeries et aux e'tables pour les chĂšvres, une grandeur suffisante , pour que chacune de ces bĂȘtes nâait pas moins de quatre pieds et demi de place , ni plus de six. Les greniers seront Ă©levĂ©s et tournĂ©s vers le septentrion ou la bise , afin que la fraĂźcheur du vent empĂȘche les grains de s'Ă©chauffer , et les conserve plus long-temps car les autres aspects engendrent les chalans et autres insectes qui gĂątent les bleds. Les Ă©curies pour les chevaux , sur-tout Ă la campagne , doivent ĂȘtre bĂąties dans les endroits les plus chauds, pourvu quâils ne regardent pas vers la cheminĂ©e , parce que les chevaux qui sont prĂšs du feu deviennent hĂ©rissĂ©s. Il convient "assi que les Ă©tables qui sont en dehors de la cuisine, aient leur entrĂ©e et tirent le jour du cĂŽtĂ© de lâorient, cela fait que les bĆufs quâon y met pendant 1 hiver, paroissent beaucoup plus beaux quand ils sortent le matin, lorsque le temps le permet, pour aller paĂźtre. Les granges , les fenils, les magasins de paille et les moulins , doivent ĂȘtre bĂątis assez loin de la maison pour Ă©viter le danger du feu. Si, de lâhabitation , on veut faire une maison agrĂ©able, il faut suivre les propor- i Pour bien comprendre cette phrase latine , et nu- rherum doliorum .... quĆ cum sint cullearia , il faut savoir que les Romains conservoient le vin et lâhuile dans des vases de terre , quâils appeloient dolium. Jâen ai vu plusieurs dans les ruines de Pompeia , prĂšs de Naples ; ils Ă©toient encore dans la cave oĂč on les avoit trouvĂ©s. Il y avoit des dolium de plusieurs grandeurs suivant la capacitĂ© des mesures qu'ils employoient pour les choses liquides. La plus grande des mesures romaines sâappeloit culeus , elle contenoit vingt amphores. Lâamphore qui Ă©toit la mesure principale contenoit quatre-wng/ livres pesant, ce qui faisoit deux urnes lâurne contenoit quatre conges. Le conge six septiers , le septier deux hemines ou demi septier ; le demi septier contenoit deux mesures quâon nommoit quartam; chaque quartame contenoit deux cya- et demi ; ces cyathes contenoient autant de vin quâon en pouvoit boire dâun seul trait. Pline, Liv. XXI, Ghap. dernier. Ainsi par le mot culeana , Vitruve entend que ces vases, doliorum' contenoient la plus grande mesure en usage chez les Romains pour les choses liquides. 36 . 284 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. lions que nous ayons indiquĂ©es ci - dessus pour les bĂątimens de la ville , pourvu quâon note rien de ce qui est nĂ©cessaire au mĂ©nage des champs. Il faut avoir soin que tous les Ă©difices soient bien Ă©clairĂ©s ; ce qui nâest pas difficile Ă la campagne , oĂč il n'y a pas dâautres murs assez prĂšs pour ĂŽter le jour mais en ville il nâen est pas de mĂȘme ; les murs i des maisons voisines sont souvent assez prĂšs et assez Ă©levĂ©s pour causer de lâobscuritĂ© voici le moyen quâon emploie alors pour connoĂźtre si lâon aura assez de jour. On tend une corde depuis le haut du mur qui peut ĂŽter le jour , jusquâĂ lâendroit qui doit le recevoir ; si, en regardant en haut le long de cette corde , on voit Ă dĂ©couvert un grand espace du ciel, on sera assurĂ© que rien nâempĂȘchera la lumiĂšre dans cette place mais si lâon voit que les poutres , ou le haut des fenĂȘtres , ou le haut des planchers ĂŽtent le passage Ă la lumiĂšre , il faut alors faire les ouvertures plus grandes , ou prendre le jour au-dessus des obstacles quâil rencontre. En un mot, il faut disposer les choses de maniĂšre quâon place les fenĂȘtres du cĂŽtĂ© oĂč lâon puisse dĂ©couvrir le ciel; ce qui est de la plus grande importance pour les salles Ă manger, et autres de ce genre , et sur-tout pour les passages et les escaliers qui ont besoin d ĂȘtre trĂšs-Ă©clairĂ©s , Ă cause que plusieurs personnes quelquefois chargĂ©es se rencontrent souvent l une devant lâautre dans ces endroits. Je crois avoir expliquĂ© assez clairement la maniĂšre dont nous construisons nos Ă©difices en Italie , pour ĂȘtre compris de ceux qui voudront en bĂątir. Et pour quâon nâignore pas non plus la maniĂšre dont les Grecs construisent les leurs , je vais la faire connoĂźtre en peu de mots. R E M ARQUES. La maison de campagne , dont Vilruve dĂ©crit la construction , dans ce chapitre , est uniquement destinĂ©e au mĂ©nage des champs ; câest ce que nous nommons proprement une ferme , et non pas une maison dâagrĂ©ment. Il lâobserve lui-mĂȘme , aprĂšs sa description , en ajoutant , si lâon veut y joindre une habitation agrĂ©able , il faut la construire dâaprĂšs les principes que nous avons Ă©tablis pour la construction des maisons de la ville. Si lâon veut connoĂźtre ces maisons dâagrĂ©ment, que les Romains batissoient Ă la campagne , il faut lire les descriptions que Yarron et Pline le jeune en ont donnĂ©es. Rien nâest plus intĂ©ressant que celle du Laurentum de Pline le jeune , qui fait le *»,{ ees 1 1 -' i ' Cummunium panetum . Voici encore une nouvelle preuve , pour nous convaincre que paries commuais nâĂ©- toit pas un mur mitoyen enĂŒâe deux propriĂ©tĂ©s contiguĂ«s ; mais le mur extĂ©rieur qui rĂ©gncit le long de la rue , et qui Ă©toit censĂ© public , comme nous lâavons remarquĂ© dans nos observations sur le 5. me Chap. du I. er Liv. et celles sur le 8. me Chap. du ll. me bet * L IVIĂ E VI, C h a p. ix. 2 35 sujet de la 6. rao lettre du V. me livre du recueil que nous en avons. On voit combien les Romains sâattachoient Ă choisir une situation agrĂ©able et saine pour bĂątir ces maisons ; combien ils recher- choient les agrĂ©mens de la campagne et les beautĂ©s de la nature. Ils y alloient chercher celte tranquillitĂ© et ce doux repos , dont ils ne pouvoient jouir au milieu des tracasseries de la ville de Rome. Ils cherchoient Ă rĂ©unir , dans ces sĂ©jours champĂȘtres , une partie des voluptĂ©s orientales , dont ils avoient pris le goĂ»t en Asie , pendant les longs sĂ©jours quây firent leurs armĂ©es. Ce nâest donc pas ces demeures agrĂ©ables que fauteur dĂ©crit dans ce chapitre -, il ne sâagit que de constructions rurales, Ă lâusage de lâagriculture. Par exemple lorsquâil parle des bains, il nâentend pas des bains Ă lâusage des maĂźtres , mais de ceux pour les domestiques et autres besoins ruraux , lâusage des bains Ă©tant gĂ©nĂ©ralement rĂ©pandu dans toutes les classes de la sociĂ©tĂ© , chez les anciens. Nous voyons dans la lettre de Pline , citĂ©e un peu plus haut , que , dans sa maison de campagne , il sây irouvoit des bains pour les maĂźtres , semblables Ă ceux dojat Vitruve prescrit les rĂšgles de leur construction dans le io. me Chap. du V. me Liv. Tous les riches de Rome en avoient Ă©galement, saris doute , dans leurs maisons de campagne. Dans celle de Pline , dont nous parlons , il y avoit un bain dâeau froide , un autre dâeau chaude , un bain sec , ou salle pour suer avec une Ă©tuve , sudatio , une autre plus tiĂšde tepidarium ; une chambre pour se dĂ©shabiller en un mot toutes les salles que Vitruve indique pour les bains publics dans le io. me Chap. du V. 6 Liv. Ceux qui voudront connoĂźtre plus en dĂ©tail ce qui concerne les constructions rurales des anciens , doivent avoir recours Ă lâouvrage de Varron et Ă celui de Columelle , intitulĂ©s lâun et lâautre de re rusticĂą. Dans ces deux traitĂ©s de lâagriculture des anciens , qui sont parvenus jusquâĂ nous , ils pourront acquĂ©rir une connoissance plus parfaite des moyens quâils employoient pour conserver , dans ces bĂątimens , les diverses productions de la terre ; sur-tout pour Ă©loigner des greniers, le charençon et autres insectes qui rongent le bled. Galiani nous apprend Ă cet Ă©gard quâun certain M. BarthĂ©lĂ©my Intieri , a publiĂ© une petite cĂźis-^- serlalion trĂšs-savante , sur la vraie maniĂšre de prĂ©parer toute espĂšce de grains , particuliĂšrement le bled , pour les conserver intacts trĂšs long-temps , et cela au moyen dâune nouvelle Ă©tuve trĂšs-ingĂ©nieusement construite , qui entretient un certain degrĂ© de chaleur , qui oie toute hnmidiiĂ© et tout principe de putrĂ©faction, et fait mourir les insectes. Il y a joint le plan de cette Ă©tuve , gravĂ© dâaprĂšs le dessin de M. Galiani. Ce dernier ajoute que M. du Hamel, dans son TraitĂ© sur la conservation dĂšs grains , a voulu enlever Ă lâauteur italien , lâhonneur de cette dĂ©couverte si la dissertation dâInlieri, dit-il, nâa pas Ă©tĂ© publiĂ©e avant celle de du Hamel, il nâen est pas moins vrai que bien des annĂ©es auparavant , les dessins et les modĂšles de son Ă©tuve Ă©taient rĂ©pandus dans le monde , et que le plan de lâĂ©tuve qui se trouve dans lâouvrage de du Hamel, nâest quâune copie trĂšs-exaciĂ© de celle dâIntieri. Dans mes remarques sur ce chapitre , je me suis contentĂ© dâexpliquer les passages de lâauteur , qm mâont-pai u obscurs, sans parler des moyens quâon a employĂ©s de nos jours pour perfectionner les constructions rurales. Lâouvrage que M. de Perlhuis vient de publier, intitulĂ© TraitĂ© de lâarchitecture rurale, qui est comme la suite du nouveau cours complet dâagriculture , ne laisse rien Ă desirer Ă cet Ă©gard. 286 L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE X. Comment les Grecs distribuent leurs habitations . * Les Grecs ne bĂątissent pas comme nous ,* ils nâont pas de cours ; mais de la premiĂšre porte on entre dans un corridor ou passage qui nâest pas fort large ; dâun cĂŽtĂ© sont les Ă©curies ; de lâautre les loges du portier , et Ă lâextrĂ©mitĂ© se trouve la porte de lâintĂ©rieur. Ce passage entre les deux portes sâappelle en grec thirorion i. De-lĂ on entre dans le pĂ©ristyle qui a,des portiques dĂ© trois cĂŽtĂ©s seulement, parce que du cĂŽtĂ© qui regarde le midi, il y a deux antes, fort Ă©loignĂ©es lâune de lâautre, qui soutiennent une poutre qui forme une piĂšce dont lâenfoncement Ă©gale les deux tiers de lâespace qui est entre les deux antes; les uns la nomment prostas 2 , et les autres parastas 3. Dans la partie intĂ©rieure de cette piĂšce , sont situĂ©es les grandes salies, oĂč se tiennent les mĂšres de famille avec les femmes qui filent la laine. A droite et Ă gauche du prostade , on trouve les chambres Ă coucher , avec leurs antichambres." Autour des portiques sont les salles Ă manger , dâautres chambres Ă coucher, et celles oĂč habitent les servantes et femmes de chambre. Toute cette partie de la maison sâappelle GynĂ©cĂ©e 4. Lâautre partie beaucoup plus Ă©tendue joint Ă celle-ci ; ses pĂ©ristyles sont plus spacieux ; ils ont quatre portiques, dâune hauteur Ă©gale de chaque cĂŽtĂ© , hormis celui qui regarde le midi, dont les colonnes sont quatre fois plus Ă©levĂ©es, et quâon appelle pour cela pĂ©ristyle Rhodien. Cette partie de la maison a des entrĂ©es magnifiques ; les portes en sont trĂšs-belles ; les portiques des pĂ©ristyles sont enduits et ornĂ©s de stuc ; et leurs plafonds , travaillĂ©s en bois , offrent divers compartimens , ou panneaux, enfoncĂ©s. Le long du portique qui regarde le septentrion, on trouve les salles Ă manger nommĂ©es cyzicĂšnes , et les cabinets de tableaux ; Ă lâorient sont les bibliothĂšques ; Ă lâoccident les salles de conversations , et au midi de grandes salles carrĂ©es, si vastes et si spacieuses , qu elles peuvent contenir , Ă l'aise , quatre tables Ă trois lits , avec tout lâespace nĂ©cessaire pour ceux qui font le service de la table, et pour les jeux. Les salles sont rĂ©servĂ©es aux festins que se donnent les hommes *, parce quâil nâest pas dâusage chez eux dâadmettre Ă leur table les mĂšres de * Planche XX. rae 3 Ce qui est Ă x Câest-Ă -dire qui appartient Ă celui qui garde la porte, 4 Appartement des femmes. ÂŁ 3 Ce qui est auprĂšs. LIVRE VI, Chap. x. 287 famille. Ce pĂ©ristyle et cette partie de la maison sâappelle andronitide , 1 parce que les hommes y vivent sĂ©parĂ©s des femmes. Ils Ă©lĂšvent, en outre , Ă droite et Ă gauche , dâautres maisons plus petites qui ont leurs portes particuliĂšres ; des salles Ă manger , des chambres , et des chambres Ă coucher fort commodes , oĂč ils logent les Ă©trangers qui arrivent chez eux ; parce quâils ne les reçoivent pas dans le pĂ©ristyle , mais dans ces quartiers qui leur sont destinĂ©s. Lorsque les Grecs vivoient plus dĂ©licatement dans le temps de leur opulence , les voyageurs qui survenoient, trouvoient rĂ©unies, dans ces appartemens , toutes les dĂ©licatesses possibles , tant pour la table que pour le logement. Ils les invi- toient Ă souper le premier jour ; ensuite ils leur envoyoient toutes les choses nĂ©cessaires qui viennent de la campagne comme des poulets , des Ćufs , des lĂ©gumes et des fruits. De-lĂ vient que les peintres appellent xenia 2 , les peintures qui reprĂ©sentent ces prĂ©sens quâon envoie Ă ses hĂŽtes. Ainsi ceux qui voyagent sont logĂ©s dans ces appartemens comme s ils Ă©toient chez eux ; ils y vivent en leur particulier et y jouissent dâune libertĂ© entiĂšre. Entre lâhabitation du maĂźtre et celle des Ă©trangers, il y a des passages nommĂ©s mesaulĆ 3, parce quâils sont effectivement placĂ©s entre . deux palais ; nous appelions ces passages andronas , et il est Ă©tonnant que ce mot qui est grec , ne signifie pas , en cette langue, la mĂȘme chose quâen latin car les Grecs appellent andronas , les salles oĂč les hommes donnent leurs festins , et oĂč les femmes ne sont pas admises. Nous nous servons encore de quantitĂ© de noms grecs avec le mĂȘme abus , comme de xistus , de prothyrus , de telamones et de plusieurs autre's. Le xistos 4 des Grecs est un large portique, oĂč les athlĂštes sâexercent pendant lâhiver; et nous autres , nous appelons xistes des allĂ©es dĂ©couvertes pour se promener , que les Grecs nom- 1 .Pour les hommes. 2 Choses destinĂ©es aux Ă©trangers. 3 Le mot latin aula signifie une grande salle , mais le mot grec Ăąv/.y signifioit dans son origine , la cour dâune maison, comme AthĂ©nĂ©e lâexplique par le tĂ©moignage d'HomĂšre la cour dâune maison, dit-il , est appelĂ©e ainsi Ă cause quâelle est exposĂ©e au vent , en- sorte que le mot aide vient du mot au qui signifie souffler quâensuite les palais des rois , furent appelĂ©s aidas , parce quâils avoient des cours grandes et spacieuses , et par cette raison plus exposĂ©es au vent que les cours des maisons particuliĂšres ; et peut-ĂȘtre aussi parce que le vent y repaĂźt les courtisans. Perrault croit que notre langue a suivi cette mĂȘme Ă©tymologie car nous appelons la cour , lâendroit oĂč le roi rĂ©side avec ses princes et ses officiers , Ă moins quâon ne veuille dire quâelle est prise du mot latin cuiia , qui , selon Festus, Ă©toit dit Ă cura ; comme Ă©tant le lieu oĂč lâon traitoit les affaires publiques. Locus ubi magistratas pullicas curas gerebant. 4 Nous avons vu la description du xiste Ă la fin du 2 . me Chap. du V. me livre. On voit le plan du xiste couvert et de celui qui est dĂ©couvert dans la XVHLe planche. a88 L â A R C II ITECTĂRE DE V I T R U V E. ment peridromidas x. De mĂȘme les Grees appellent prothyra 2 , les vestibules qui sont devant les portes tandis que prothyra signifie , parmi nous, la chose que les Grecs nomment diatyra 3. Nous nommons aussi telamones 4 , les figures d'hommes qui soutiennent les mutules ou les corniches ; nom qui nâa aucune origine dans fhistoire ; les Grecs appellent ces figures allantes. Les historiens reprĂ©sentent Atlas soutenant le ciel ; parce qu'il a le premier enseignĂ© aux hommes , quel Ă©toit le cours du soleil et de la lune , le lever et le coucher des Ă©toiles , et tous les mouvemens du ciel; son grand gĂ©nie lui avoit dĂ©couvert toutes ces choses. En reconnoissance de cela , les peintres et les sculpteurs le reprĂ©sentoient soutenant le ciel sur ses Ă©paules. Câest aussi pour la mĂȘme raison quâon a placĂ© ses filles Atlantides , au nombre des Ă©toiles les Grecs les nomment les Pleyades 5, et nous autres les Vergiles 6. Mon dessein toutefois nâest pas de changer les noms Ă©tablis par lâusage , ni de rĂ©former la langue j ai seulement voulu apprendre aux curieux les diffĂ©rentes significations de ces mots, Nous avons fait connoĂźtre les plans et la maniĂšre de construire les Ă©difices tant en Italie que dans la GrĂšce ; nous avons prescrit les rapports qui doivent se trouver entre leurs diverses proportions, Nous n'avons donc plus rien Ă dire sur ce quâil convient de faire pour leur donner une forme agrĂ©able ; il nous reste prĂ©sentement Ă parler de la soliditĂ© de leur construction , et des moyens quâon emploie pour les faire subsister long-temps dans un bon Ă©tat. REMARQUES. La diffĂ©rence qui existent entre les mĆurs grecques et romaines , cause celle que nous voyons dans la maniĂšre de distribuer les habitations de ces deux peuples. La principale , câest que chez les Grecs, le quartier des femmes est absolument sĂ©parĂ© de celui des hommes , ce qui fait , pour ainsi dire , deux maisons placĂ©es Ă cĂŽtĂ© lâune de lâautre. Les Grecs , dit CornĂ©lius Nepos 7 , regardent comme qui sont parmi nous dans les rĂšgles de la biensĂ©ance qui se fĂźt un dĂ©shonneur de mener sa femme au festin ? ĂŻ Promenoirs. Ăsj et 3 Par AidĂ»vpov en grec et par prothyra en latin * en entend une avant-porte , ou une barriĂšre. 4 Souffrans. 3 Qui montrent le temps propre Ă la navigation, 6 Qui annoncent le printemps. contraire Ă lâhonnĂȘtetĂ© , plusieurs usages y a-t-il , par exemple , quelque Romain Nâest-il pas dâusage que les dames 7 Conira ea pleraque nostris moribus sunt dccora quĆ apnd illos tur- pia pulantur ; quem enim Itomanorum pudet, vxorem ducere in conddum r aut cujus materfamilias non primum locum tenet adium , nique in cele- britate tersatur ? quart mulib fit aliter in Gracia; nam neque in conddum adhibetur, nisi propinquorum ; neque scdcl ni si in interiore parte adium , quĆ ginteconitis appeĂŒaiur ; quo nemo accedit, niâsi prnpinqud cognation çonjuncius , romaines LIVRE VI, C h a p. x. 289 » romaines occupent le premier appariement et le plus apparent du logis , et quâelles reçoivent et > frĂ©quentent compagnie ? > Chez les Grecs, câest tout le contraire; leurs femmes ne se rencontrent jamais Ă aucuns festins, ĂŻ> si ce n est chez leurs parens ; dans leur maison elles habitent toujours lâappartement le plus retirĂ©, qui sâappelle pour cette raison l'appartement çles femmes lâentrĂ©e en est absolument interdite y aux hommes , exceptĂ© aux plus proches parens. » Le pĂ©ristyle qui eloit dans lâintĂ©rieur du gynĂ©cĂ©e , ou appartement des femmes , avoit des galeries, portĂ©es par des colonnes, seulement de trois cĂŽtĂ©s. Le fond Ă©toit occupĂ© par une grande loge, prostas , ouverte par devant , au fond de laquelle Ă©toit lâouvroir , oĂč les femmes filoient la laine. Leurs chambres a coucher avec les antichambres occupoient les deux cĂŽtĂ©s de celte loge. Perrault place d un cote la chambre Ă coucher , thalamus , et de lâautre cĂŽtĂ© , lâantichambre ou cabinet , amphithalamus. Galiani, que jâai suivi, trouve cet arrangement trop incommode , pour croire que les choses etoient ainsi; il a prĂ©fĂ©rĂ© placer, de chaque cĂŽtĂ©, une chambre avec son antichambre, comme on les voit reprĂ©sentĂ©es dans la XX. rae planche. Nous avons placĂ© le quartier quâhabitoient les hommes , Ă cĂŽtĂ© de celui des femmes , et non comme on le voit dans les plans de Perrault, oĂč, pour pĂ©nĂ©trer dans lâappartement des hommes, il falloit traverser celui des femmes. Il a probablement suivi en cela ceux de Barbaro , ce qui est absolument contraire Ă toutes les notions que nous avons sur les moeurs grecques ; puisque , comme nous lâavons vu tout-Ă -lâheure dans un passage de CornĂ©lius Nepos , les femmes, dans leur maison, habitent toujours lâappartement le plus retirĂ©. XĂ©nophon , dans son Ă©conomie ; Plutarque , dans ses apophihegmes , et DiogĂšne LaĂ«rce , dans sa vie de DiogĂšne le Cynique , disent la mĂȘme chose. Nous voyons de plus' que les Grecs confioient Ă des portiers la garde de lâappartement de leurs femmes , et quâils avoient ordre de nây laisser entrer personne. Aussi Yitruve assigne-t-il un logement au portier , Ă lâentrĂ©e du quartier des femmes. Il se peut, cependant, que les maisons grecques Ă©toient autrement distribuĂ©es ; il est possible , par exemple , que le quartier , ou lâappartement des femmes , Ă©toit plus reculĂ© , et que pour y parvenir , il falloit traverser celui des hommes ; mais en le plaçant sur le cĂŽtĂ© , dans notre plan , nous avons cru nous rapprocher davantage du texte. Nous voyons clairement dans ce chapitre , malgrĂ© ce que dit Perrault et dâautres traducteurs , que par les mots atrium et vestibulum , Vilruve entend deux choses toutes diffĂ©rentes. En effet, nous lisons au commencement, que les Grecs nâavoient pas de cour atriis Grceci non utuntur. Ensuite, dans la description quâil fait de leurs maisons , il nomme positivement les vestibules vestibula egregia et januas } etc. Ainsi donc le vestibula Ă©toit autre chose que Vatria , puisquâil dit que , dans les maisons grecques, il nây avoit pas ftatria mais quâil y avoit le vestibula . Le vestibule Ă©toit un espace quelquefois dĂ©couvert, mais toujours situĂ© en dehors, devant la porte de la maison ; au contraire l âatrium , ou la cour , Ă©toit toujours en dedans de la maison. Ces entrĂ©es ou vestibules du quartier des hommes Ă©toient plus grands et plus magnifiques quâĂ 3 ? LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. 290 celui des femmes. Les autres piĂšces de l'habitation Ă©toient Ă proportion. La modestie rĂ©gnoit dans . celle des femmes , la grandeur et la magnificence Ă©toient rĂ©servĂ©es pour celle des hommes ; la salle oĂč ils donnoient leurs festins Ă©toit sur-tout trĂšs-spacieuse ; elle pouvoit contenir quatre inclines , câest-Ă -dire quatre tables Ă trois lits , et il restoit un espace suffisant pour le service de la table, et pour y donner des jeux et des spectacles , pour rĂ©jouir ces riches voluptueux, pendant quâĂ©tendus sur leurs lits , ils jouissoient des plaisirs de la table. Cet usage existoit aussi chez les Romains Juvenal nous apprend que , durant leurs repas, ils regardoient des danses lascives , des pantomimes, ou des combats de gladiateurs 1 ; dâautres se contentoient de la lecture dâun livre 2 , de faire jouer quelques scĂšnes de comĂ©die 5 , ou dâentendre des vers rĂ©citĂ©s par quelques poĂȘles 4. Le plus souvent ils avoient un concert durant leurs repas 5. Les Chinois font encore reprĂ©senter des comĂ©dies pendant les festins quâils se donnent 6. Le mĂȘme usage a aussi existĂ© parmi nous Olivier de la Marche fait la description des spectacles trĂšs- singuliers , conformes aux mĆurs dâalors , qui furent reprĂ©sentĂ©s devant Charles le Hardi , duc de Bourgogne, et toute sa cour, pendant un festin quâil^donnoit lâan i453 , dans la ville de Bruges 7.- Outre ces deux bĂąlimens , lâun pour le logement des hommes , et lâautre pour celui des femmes , les Grecs en avoient encore dâautres Ă cĂŽtĂ© de ceux-ci pour loger les voyageurs. LâhospitalitĂ© , dans les premiers temps , Ă©toit fort pratiquĂ©e. Ce nâĂ©toit pas seulement une vertu , mais un devoir de lâexercer envers tout le monde ; il nây avoit rien de plus sacrĂ©. NĂ©e de la commisĂ©ration naturelle , on la trouve chez les peuples que la civilisation nâa pas absolument corrompus ; elle existe encore en Ecosse , dans une grande partie de lâorient, et sur-tout en Pologne. Quâun voyageur se prĂ©sente chez un seigneur polonois , celui-ci le reçoit , lui donne tout ce dont il a besoin ; ce nâest ni politesse ni honnĂȘtetĂ© , il nâexige aucune reconnoissance ; il est persuadĂ© quâil nâa rempli quâun devoir. Nous voyons dans HomĂšre, combien, dans les anciens temps, les Grecs exerçoient lâhospitalitĂ©. Lâopulence dont ils jouirent, aprĂšs avoir repoussĂ© les armĂ©es des Perses, qui vouĂŻoient envahir leurs provinces; celte opulence accrue encore par leur commerce rĂ©pandu chez toutes les nations connues, nâĂ©touffa pas chez eux ce sentiment qui leur avoit Ă©tĂ© transmis par leurs ancĂȘtres. Ainsi la sainte hospitalitĂ© , Ă©teinte par-tout oĂč la police et les institutions sociales ont fait des progrĂšs , a subsistĂ© dans les plus beaux jours de la GrĂšce , dans les temps de sa plus grande richesse ; et ce pieux devoir sâexerçoit avec la plus grande magnificence , en un mot , dâune maniĂšre digne dâun peuple aussi riche. Les Grecs ne la nĂ©gligĂšrent pas non plus dans leurs malheurs, câest-Ă -dire, aprĂšs le triomphe de Paul Emile , et la dĂ©faite des Perses , lorsquâils passĂšrent sous la domination des Romains câest ce que Yitruve a certainement entendu par cette phrase Lorsque les Grecs , dit-il , vivoient plus dĂ©licatement dans le temps de leur opulence 8 , les voyageurs qui arrivoient chez eux , trouvoient en abondance, dans les maisons qui leur Ă©toient destinĂ©es, tout ce qui Ă©toit nĂ©cessaire, tant pour le logement que pour la nourriture. 1 Juven. S. XI. 2 Plut, sympos. 7 , quest. 8. 3 Juven. S. XI. Hin. jun. L. I. ep. i5. L. III. ep. 1. L. VI. ep. 3i. 4 Pers. Sat. I. 5 Sue'ton. Vita Terentii. 6 AbrĂ©gĂ© Je lâhistoire ge'ne'raĂźe des voyages , tome VII. Liv. IV. Chap. 6, 7 Oliv. de la Marc. Chap. 2g. 8 Fuerunt GrĆci delicatiores > et ob fortunam opulenliores. % LIVRE VI, C h A p. xi. 29 ĂŻ Perrault nâa pas bien compris ce passage; il a cru quâil signifioit que les plus riches des Grecs avoient des appariemens de reserve pour les Ă©trangers , tandis que Viiruve veut uniquement parler du temps de lâopulence de la GrĂšce. Nous avons dĂ©jĂ vu , dans le 7. me Chap. du V.âą Liv. , que dans la façade dâarchitecture qui ter- minoit la scĂšne des théùtres anciens , il y avoit deux portes qui reprĂ©sentoient celles qui servoient dâentrĂ©e aux logemens des Ă©trangers , dans les bĂąlimens qui leur Ă©toient destinĂ©s Ă cĂŽtĂ© de lâhabitation principale. Lâusage des Grecs Ă©toit que quand il survenoit des voyageurs , le maĂźtre de la maison les faisoit souper avec lui le jour de leur arrivĂ©e ; il les conduisoit ensuite dans ces appartemens sĂ©parĂ©s , oĂč il leur envoyoit toutes les provisions nĂ©cessaires pour y vivre indĂ©pendans , Ă leur particulier. Vitruve nous apprend que les peintures, qui reprĂ©sentoient ces objets , quâon envoyoit en prĂ©sens Ă ses hĂŽtes , câest-Ă -dire des fruits , des lĂ©gumes , des gibiers , etc. , sâappeloient xenia > du mot grec , qui signifie Ă©tranger. Ce genre de peinture , en gĂ©nĂ©ral, 11âĂ©toit pas des plus estimĂ©s. Cependant un certain Pyreicus, ou, suivant dâautres, Pirricus , sây est rendu trĂšs - cĂ©lĂšbre , par la dĂ©licatesse de son pinceau. Yoici comme Pline en parle dans le jo. me Chap. du XXXV. me Liv. Lâart de Pyreicus Ă©toit de reprĂ©senter les objets dont on fait le moins de cas il peignoit des boutiques de barbiers , de cordonniers , de petits Ăąnes , des vivres , et choses semblables , dâoĂč il acquit le nom de thyparographos , câest-Ă -dire peintre dâobjets mesquins 1. CHAPITRE XI. X % .. De la SoliditĂ© des Ădifices . Les Ă©difices qui sont au-dessus du rez-de-chaussĂ©e , auront toute la soliditĂ© nĂ©cessaire pour durer long-temps , si lâon construit leurs fondemens , dâaprĂšs les rĂšgles que nous avons rapportĂ©es dans le livre prĂ©cĂ©dent pour construire ceux des murs des villes et des théùtres ; mais sâils ont des souterrains voĂ»tĂ©s , il faudra faire les fondemens plus larges que les murs de lâĂ©difice quâon doit Ă©lever au - dessus. Les murs , les pilastres et les colonnes doiv ent poser bien perpendiculairement au milieu de celles qui sont par - dessous ; tellement que le solide rĂ©ponde toujours au solide car si le poids des ^niirs ou des colonnes portait Ă faux , elles ne pour- roient rĂ©sister long - temps. Il est encore bon de mettre des poteaux au - dessus de i Pyreicus acte paucis poslferenĂąus.. . . tonsirinas , sutrinasque pinxii et asellos , et obsonia, ac simili a ob hoc eognominalus thyparographos. 3 7 . L*ARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. 292 chaque linteau des portes ou fenĂȘtres, au droit de lâun et de lâautre jambage 1, afin dâempĂȘcher que les linteaux , et les solives qui sont chargĂ©es de la maçonnerie quâelles soutiennent, aprĂšs avoir pliĂ© Ă lâendroit du vuide , ne causent la ruine du mur en se rompant ; ces poteaux mis dessus , et bien arrĂȘtĂ©s , empĂȘcheront que les linteaux ne s enfoncent. On peut encore allĂ©ger le poids du mur , au moyen dâune voĂ»te faite avec des pierres taillĂ©es en coins , bien divisĂ©es , et correspondant toutes Ă un mĂȘme centre ; cette arcade formĂ©e avec des coins couvrant le linteau et les solives aux bouts desquels elle est appuyĂ©e , les empĂȘchera dâabord de plier en supportant le poids du mur; et si ensuite elles venoient Ă se gĂąter par vĂ©tustĂ©, on pourroit les remplacer, sans quâil fĂ»t nĂ©cessaire dâĂ©tayer. Dans les Ă©difices qui sont bĂątis sur des piliers , joints par des arcades formĂ©es de pierres taillĂ©es en coins , qui correspondent Ă un mĂȘme centre , il faut Ă©galement avoir soin de faire les piliers des extrĂ©mitĂ©s beaucoup plus Ă©pais , afin quâils puissent rĂ©sister Ă lâeffort des pierres taillĂ©es en coins , qui , se pressant lâune lâautre vers le centre , Ă cause du poids des murs qui sont dessus , pourroient pousser les impostes les pilastres des angles Ă©tant beaucoup plus larges , donneront plus de fermetĂ© Ă lâouvrage , en tenant les pierres taillĂ©es en coins bien serrĂ©es. Il ne suffit pas dâavoir suivi exactement tout ce que nous venons de prescrire , il faut encore avoir soin que toute la maçonnerie soit bien d aplomb, et quelle ne penche dâaucun cĂŽtĂ©. On doit sur-tout avoir le plus grand soin de bien faire les murs des souterrains , parce que ia terre quâils soutiennent peut causer une infinitĂ© dâinconvĂ©niens. L Ă©tat de la terre varie suivant les saisons , et nâa pas toujours le mĂȘme poids qu elle a pendant lâĂ©tĂ©. En hiver elle sâenfle et devient plus pesante , Ă cause des pluies qui la pĂ©nĂštrent ce qui fait qu elle presse et qu elle rompt la maçonnerie. Pour remĂ©dier Ă cet inconvĂ©nient , il faut d abord donner au mur une Ă©paisseur proportionnĂ©e Ă la terre quâil soutient * ensuite il faut faire 2 en dehors , sur le devant, des Ă©perons et arc boutans EB , qui seront bĂątis en mĂȘme temps que le mur , et sĂ©parĂ©s les uns des autresâ par une distance qui Ă©gale la hauteur du mur qui soutient ia terre ; et les faire de la mĂȘme Ă©paisseur que ce mur. Il faut / 1 Ces poteaux doivent ĂȘtre placĂ©s diagonalement au - dessus de la porte ; une de leurs extrĂ©mitĂ©s sâappuie sur le jambage, et les autres forment un angle en se rĂ©unissant au - dessus du milieu de la porte , comine font deux chevrons Ă la pointe dâun toit. Voyez nos remarques Ă la lin de ce chapitre. * Planche I. re , fig. 3 . ^ 2 In frontĂźbus. V oyez la fin des remarques qui suivent ce chapitre. LIVRE VI, C h A p. xi. s 9 3 quâils avancent dans la terre par le pied, autant que le mur mĂȘme a de hauteur; qu ils aillent en diminuant .par degrĂ©s depuis le bas , cependant en conservant autant de saillie sur le haut, que le mur a d Ă©paisseur. Puis en-dedans, il faudra joindre au mur et opposer Ă la terre des dentelures HH en forme de se le ; chaque dentelure doit avoir la mĂȘme Ă©paisseur que le mur , et sâĂ©loigner autant du mur, que la terre, que celui-ci soutient, est haute. Enfin dans les angles Ă aprĂšs s ĂȘtre Ă©loignĂ© de lâangle intĂ©rieur , dâun espace Ă©gal Ă la hauteur du mur qui soutient la terre , on fera une marque ac. ac. de chaque cĂŽtĂ© , et de lâune de ces marques* Ă lâautre , on fera une muraille diagonale cc du milieu de laquelle d il en partira une autre d a qui ira joindre lâangle du mur. Par ce moyen , les dentelures avec celte diagonale , empĂȘcheront que la terre ne presse et ne pousse le mur avec autant de force. Jâai enseignĂ© tout ce quâil falloit pour faire bĂątir , afin quâon puisse Ă©viter toute espĂšce de faute , et prendre toutes les prĂ©cautions nĂ©cessaires , sur - tout pour les premiers ouvrages. Les toits et la charpente quâon doit renouveler de temps en temps , nâexigent pas autant de soins ; puisque sâil sây trouvoit des dĂ©fauts , on peut aisĂ©ment les rĂ©parer tels sont les moyens qu'on doit employer pour rendis solides les parties de lâĂ©difice qui paroissent le moins susceptibles de lâĂȘtre. Il nâest pas au pouvoir de lâarchitecte de choisir les diffĂ©rens matĂ©riaux nĂ©cessaires pour bĂątir nous avons dĂ©jĂ observĂ© , dans le livre prĂ©cĂ©dent i , quâils ne sont pas les mĂȘmes par tout ensuite il dĂ©pend de celui qui fait bĂątir , dâemployer la brique , le moĂ«lon , ou la pierre de taille. Trois objets , dans tous les ouvrages , dĂ©terminent nos jugemens , la dĂ©licatesse et le fini du travail, la magnificence et la disposition. Quand on voit un ouvrage oĂč lâon a employĂ© tout ce que la fortune dâune personne opulente peut fournir , on loue la dĂ©pense si lâon remarque quâil est dâun travail dĂ©licat et achevĂ© , on estime 1 artiste qui lâa fait ; mais sâil est recommandable par sa beautĂ©, et lâharmonie de ses proportions , alors on en admire f architecte. Ce dernier doit cependant savoir que , pour bien rĂ©ussir, il ne faut pas nĂ©gliger les avis que les moindres artistes et ceux-mĂȘmes qui ne sont pas de sa profession peuvent lui donner car ce ne sont pas les seuls architectes, mais gĂ©nĂ©ralement tout i Dans le i2. e chapitre du livTe prĂ©cĂ©dent, en parlant des fabriques qui doivent ĂȘtre sous lâeau , il en dit quelques mots; mais il en parle bien plus au long V dans le second livre. Ce qui /ait croire Ă Galiani , quâil y auroit ici une faute dans le texte. 2 nous mettent toujours le plein sur le vuide. Si lâon veut » faire des dĂšmes, quâon les fasse autrement quâils ne sont. Un ar- » chitecte donnera idĂ©e de son gĂ©nie , sâil invente une maniĂšre de les » construire , qui en conserve les agrĂ©mens , en Ă©vitant le dĂ©faut iu- » supportable du porte-Ă -faux. Si la chose nâest pas possible , il vaut » beaucoup mieux nâen pas faire. Essais sur l'Arch ., chap. I,** , art. a. LâARCHITECTURE DE VITRĂVE. zg" Un inconvĂ©nient quâon rencontre quelquefois en bĂątissant , câest quâon ne peut pas toujours le faire en plat terrain. LâItalie sur-tout, qui est traversĂ©e dans toute sa longueur , et presque composĂ©e de» montagnes de lâApennin , nâoffre presque par-tout que les pentes de ces montagnes , pour y asseâoir les fondemens des Ă©difices. Si lâon en excepte les villes qui sont dans la belle plaine de la Lombardie , la plupart des autres sont bĂąties au milieu des montagnes. On sait que lâancienne ville de Borne Ă©toit assise sur sept de ces montagnes. Pour construire les maisons Ă mi-cĂŽte , on sent quâil falloil commencer par niveler le terrain; ce quâon faisoit en coupant dans la pente de la montagne , et en jetant les terres plus bas ensuite on soutenoit ces terres avec une muraille et des arcs-boutans ou Ă©perons. Yitruve se sert des mots grecs cintecides et erismĆ > pour dĂ©signer ces sortes dâappuis ; ils viennent du verbe spi qui signifie appuyer , rĂ©sister , pousser contre. On employoit ces espĂšces dâarcs-bouians , tels quâils sont dĂ©crits par "Yitruve et reprĂ©sentĂ©s dans la i. TC plane, fig. 5. BB. pour soutenir les terres jetĂ©es en avant, oĂč Ă©toit le frontispice, in frontibus. Ensuite, du cĂŽtĂ© opposĂ© par derriĂšre, pour soutenir les terres de la montagne, dont la cĂŽte Ă©toit coupĂ©e verticalement , on employoit les dentelures en forme de scie qui se trouvoient effectivement en dedans de lâĂ©difice ; câest pourquoi Vilruve en en parlant, se sert de lâexpression intror- sus ; elles'sont indiquĂ©es clans la mĂȘme figure par les lettres. Hoc ,. Nous reviendrons encore sur cet objet dans nos remarques sur le chapitre 4- me du YH. me livre. Quoique Vitruve ne dise pas bien positivement quâil faut se servir de ces deux espĂšces dâarcs-bou- tans , de la maniĂšre que je viens dâindiquer , je crois cette explication meilleure que celle qui fait soutenir la muraille en dedans et en dehors par des arcs-boutans , comme Perrault lâa cru. Je crois avec lui quâil sâest glissĂ© quelque faute dans ce passage ; par exemple , lorsquâon lit quâil faut que la distance entre chaque arc-boutant , Ă©gale la hauteur du fondement, cela est contraire Ă la raison , qui nous dit que plus un mur a de hauteur , plus il a besoin dâĂȘtre appuyĂ© par un grand nombre dâarcs-boutans ; Perrault a voulu rĂ©tablir le texte, mais je nâai pas trouvĂ© sa correc- â lion assez heureuse pour lâadopter. /VVVXX / LIVRE VU D E V I T R U Y E. LIVRE SEPTIĂME. INTRODUCTION. Les anciens qui ont Ă©crit les productions de leur gĂ©nie pour les transmettre Ă la postĂ©ritĂ© , ne pouvoient rien faire de plus sage ni de plus utile ; par-lĂ non seulement leurs belles dĂ©couvertes sont parvenues jusquâĂ nous ; mais ensuite chaque siĂšcle ayant ajoutĂ© quelque chose Ă la masse de nos connoissances , les arts et les sciences sont parvenus au point de perfection oĂč nous les voyons aujourdâhui. On ne sauroit donc avoir assez de reconnoissance pour ceux qui, loin de nous priver par leur silence , envieux des connoissances quâils possĂ©doient en tout genre , ont eu lâattention de nous les faire connoĂźtre par leurs Ă©crits. Sâils nâen avoient pas usĂ© ainsi , nous eussions ignorĂ© les Ă©vĂ©nemens qui se sont passĂ©s Ă Troie ; nous ne connoĂźirions pas les opinions de ThalĂšs, de DĂ©moerite 7 dâAnaxagoras , de XĂ©no- phanes , et des autres physiciens sur tout ce qui existe dans la nature. Saurions- nous quels Ă©loient les principes dâaprĂšs lesquels Socrate , Platon , Aristote , ZĂ©non, Epicure et autres philosophes vouloient que nous rĂ©glassions nos moeurs et notre conduite ? enfin nous nâaurions jamais entendu parler des actions de CrĂ©sus , dâAlexandre , de Darius ni des autres rois, si nos ancĂȘtres nâavoient pris soin d Ă©crire des livres pour conserver la mĂ©moire de ces Ă©vĂ©nemens , et les taire connoĂźtre Ă la postĂ©ritĂ©. 38 LâARCHITECTURE DE YITRUVE. *98 Si ces grands hommes mĂ©ritent notre reconnoissance , combien an contraire ne devons-nous pas mĂ©priser ceux qui ont pillĂ© leurs Ă©crits , pour les publier comme sâils en Ă©toient les auteurs ? ceux qui cherchent ainsi Ă briller aux dĂ©pens des autres , et quâune coupable envie porte h sâattribuer une gloire qui ne leur est pas due , sont non-seulement trĂšs-reprĂ©hensibles, mais ils mĂ©riteroient encore d ĂȘtre punis. On sait que les anciens ne laissĂšrent jamais une pareille faute impunie ; et je crois quâon ne sera pas fĂąchĂ© de connoĂźlrc quelques-uns des jugemens quâils rendirent Ă cet Ă©gard. Les rois Ătlaliques qui aimoient beaucoup les belles - lettres , Ă©rigĂšrent une excellente bibliothĂšque publique dans la ville de Pergame. A la mĂȘme Ă©poque le roi PtolomĂ©e , animĂ© du mĂȘme zĂšle , pour le progrĂšs des sciences , en forma une semblable Ă Alexandrie. ISon content dây avoir rĂ©uni, avec tous les soins possibles , une infinitĂ© de livres , il chercha encore Ă lâaugmenter , et voulut qu elle fĂ»t comme une pĂ©piniĂšre , qui de voit produire de nouveaux ouvrages. Il fonda , Ă cet effet, des jeux , en lâhonneur des Muses et dâApollon , comme on en avoit fondĂ© pour les AthlĂštes , et il proposa des rĂ©compenses et des distinctions pour tous les Ă©crivains qui remporteroient le prix. Ces jeux ainsi Ă©tablis , il fallut choisir des juges parmi les gens de lettres ; le roi en trouva dâabord six dans la ville ; mais il eut plus de peine Ă dĂ©couvrir quelquâun capable dâĂȘtre le septiĂšme. Pour se tirer dâembarras , il sâadressa Ă ceux qui avoient soin de sa bibliothĂšque , et leur demanda sâils ne con- noissoient personne qui fĂ»t propre pour cela ? Ils lui proposĂšrent un certain Aristophane qui Ă©toit sans cesse occupĂ© Ă lire, avec la plus grande attention, les livres de la bibliothĂšque. Ainsi les juges ayant pris place au milieu des jeux , sur leurs siĂšges, Aristophane y fut appelĂ© et placĂ© avec les autres. Les poĂštes ouvrirent la lice , et lurent chacun leurs ouvrages ; le peuple , par ses applaudissemens, lit connoĂźtre aux juges ceux auxquels il donnoit la prĂ©fĂ©rence. Ceux- ci Ă©tant priĂ©s de dire leur avis , les six dĂ©cernĂšrent le premier prix Ă celui quâils remarquĂšrent avoir plu davantage au peuple , et le second Ă celui qui le suivoit. Aristophane Ă©tant aussi priĂ© de dire son sentiment, il donna le premier prix Ă celui que le peuple avoit le moins applaudi. Ce jugement ayant excitĂ© lâindignation du roi et de toute F as semblĂ©e , Aristophane se leva, et demanda quâon lui permĂźt de parler. AprĂšs qu'on eut fait silence , il dĂ©clara que de tous ceux qui s Ă©toient prĂ©sentĂ©s , il n y en avoit quâun seul qui fĂ»t poĂšte ; que tout ce que les autres avoient rĂ©citĂ© , ils 1 avoient dĂ©robĂ© ; qu il croyoit quâon avoit Ă©tabli les juges pour rĂ©compenser les auteurs, et non pas ceux qui pilloient les ouvrages. Tandis que le peuple admiroit cette rĂ©ponse, Introduction, LIVRE VIL et que le roi indĂ©cis , ne savoit encore que penser , Aristophane fit apporter, de diverses armoires , plusieurs livres , dans lesquels il se souvenoit dâavoir lu ce quâon venoit de rĂ©citer , et lâayant montrĂ© dans ces livres , il obligea ces poĂštes dâavouer leurs larcins. Alors le roi leur fit faire leur procĂšs, et on les condamna comme des voleurs. Pour Aristophane , il le combla de prĂ©sens magnifiques , et lui confĂ©ra lâintendance de sa bibliothĂšque. Quelques annĂ©es aprĂšs , ZoĂŻie , qui se faisoit appeler le flĂ©au d HomĂšre , vint de MacĂ©doine Ă Alexandrie , et prĂ©senta, au roi , les livres quâil avoit composĂ©s contre lâIliade et lâOdyssĂ©e. PtolomĂ©e, indignĂ© de ce quâon attaquoit si insolemment le pĂšre des poĂštes, et que lâon maltraitoit ainsi, aprĂšs sa mort, celui, que tous les gens de lettres reconnoissoient pour leur maĂźtre , celui dont les Ă©crits faisoient lâadmiration de lâunivers , se retira en colĂšre , et ne lui lit aucune rĂ©ponse. ZoĂŻie ayant attendu trĂšs long-temps dans le royaume , se sentant Ă la lin pressĂ© par la misĂšre , fit supplier le roi de vouloir lui faire donner quelque chose ; on rapporte que lĂ© roi lui lit rĂ©pondre que puisquâHomĂšre, qui Ă©toit mort depuis mille ans, avoit nourri plusieurs milliers de personnes; Ă plus forte raison , ZoĂŻie devoit bien avoir lâindustrie non-seulement de se nourrir lui-mĂȘme, mais plusieurs autres encore , lui qui prĂ©- tendoit le surpasser en talent. On raconte diversement sa mort ; les uns disent que PtolomĂ©e le lit mourir en croix ; dâautres quâil fut lapidĂ© ; dâautres quâil fut brĂ»lĂ© vif Ă vSmirne ; et tous sâaccordent Ă dire quâil fut puni comme parricide. Quelle que soit la peine quâon lui ait fait subir , il mĂ©ritoit ce chĂątiment ; certes il en Ă©toit bien digne celui qui sâavisa de critiquer un auteur , qui ne pouvoit plus se faire entendre , ni expliquer le vĂ©ritable sens des pensĂ©es rĂ©pandues dans ses. Ă©crits. Quant Ă moi , ĂŽ CĂ©sar , quoique je publie cet ouvrage sous mon nom , je ne cherche pas Ă cacher , oĂč jâai pris une partie de ce quâil contient, ni Ă critiquer les inventions des autres pour faire valoir les miennes. Au contraire, jâai la plus grande reconnoissance pour tous les Ă©crivains qui, dans les diffĂ©rens Ăąges , ont employĂ© leurs talens et leurs soins Ă recueillir ce quâon avoit composĂ© dans le genre de littĂ©rature quâils cultivoient. Ce sont comme des sources abondantes dans lesquelles nous pouvons aller puiser , et profitant du travail des autres , il nous est plus aisĂ© de composer de nouveaux ouvrages. Jâavoue franchement quâils mâont ouvert la route , et facilitĂ© lâexĂ©cution du plan que jâavois formĂ© , ayant trouvĂ© une infinitĂ© de choses toutes prĂ©parĂ©es. Lâun des premiers câest Agatharque qui faisoit les dĂ©corations pour le théùtre d AthĂšnes, lorsquâEs chyle y faisoit connoĂźtre la bonne tragĂ©die. Il composa le premier traitĂ© 38 . / 3oo LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. qui parut sur lâart de les peindre ; DĂ©mocri le et Anaxagore en composĂšrent ensuite un autre dâaprĂšs le sien. Ils nous apprirent par quel artifice on pouvoit , selon le point de vue et celui de distance , si bien imiter la disposition naturelle des lignes qui sortent des yeux en sâĂ©largissant, quâon parvenoit Ă faire illusion , et Ă reprĂ©senter , sur la scĂšne, de vĂ©ritables Ă©difices ; quoique peints sur une surface droite et unie, les uns paraissent prĂšs, et les autres Ă©loignĂ©s. AprĂšs ces Ă©crivains , Silenus publia un traitĂ© sur les proportions de lâordre dorique ; Theodorus Ă©crivit sur le temple de Junon, dâordre dorique, qui est Ă Samos ; CtĂ©siphon et MĂ©tagĂšne sur celui de Diane , dâordre ionique , qui est Ă EphĂšse , Pliileos i sur celui de Minerve , d'ordre ionique , qui est Ă PriĂšne ; Ictinus et Carpion sur un autre temple de Minerve, aussi dâordre ionique, qui est Ă AthĂšnes dans la forteresse ; Theodorus PhocĂ©en sur la coupole qui est Ă Delphes ; Philorr sur les proportions des temples, et sur l'arsenal qui Ă©toit au port du PyrĂ©e ; Iler- inogĂšne , sur le temple de Diane , qui est pseudodiptĂšre et dâordre ionique , quâon voit Ă MagnĂ©sie 2 , et sur celui de Bac chu s qui est monoptĂšre, dans l'isle de ThĂ©os ; Angelius sur les proportions de lâordre corinthien, et sur le temple dâEsculape, dâordre ionique, situĂ© dans le pays des Trallicns, quâil a bĂąti, dit-on, de ses propres mains. Nous avons enfin Satyrus et Phyteus , qui ont Ă©crit sur le MausolĂ©e auquel ils ont travaillĂ© avec le plus grand succĂšs ce chef-dâĆuvre a mĂ©ritĂ© lâapprobation de tous les siĂšcles , qui nâont cessĂ© de louer et dâadmirer le gĂ©nie de ceux qui avoient conçu l'idĂ©e dâun tel ouvrage. Lcoehares , Briaxes , Scopas , PraxitĂšle, et selon quelques- uns, TimothĂ©e, travaillĂšrent, Ă lâenvi lâun de lâautre, pour orner cet Ă©difice. Chacun d eux entreprit une des faces , et lâon trouva leur ouvrage si parfait , quâil fut mis au nombre des sept merveilles du monde. Il existe encore beaucoup dâartistes moins cĂ©lĂšbres qui ont Ă©crit sur les proportions tels que Nexaris , ThĂ©ocides , Demophilos , Pollis , Leonides , Silanion , Melampus , Sarnacus , et Euphranor. Beaucoup d'autres ont Ă©crit sur les mĂ©caniques comme Cliades, Architas , ArchimĂšde, CtĂ©sibius , Nymphodorus, Pliilon de Bysance , Di philos , Democles , Charidas , Polyidos , Phyros, et Agesistratos. Jâai pris dans leurs ouvrages tout ce que jây ai trouvĂ© d'utile , pour le rĂ©unir et en former ce recueil , dâautant que jâai remarquĂ© que les Grecs ont composĂ© beau- 1 Dans le premier chapitre du premier livre , il Ă©crit diffĂ©remment le nom de l'architecte de ce temple de Minerve. Il Ă©crit Pythius ; mais on doit croire que dans lâun ou lâautre endroit, il y a une faute de copiste. a Yitruve se sert de lâancien nom de cette ville ; car de son temps elle sâappeloit DemĂ©triade, parce que DemĂ©trius-PoliorcĂšle lâavoit rebĂątie et augmentĂ©e considĂ©rablement. Introduction, LIVRE VIL 3oi coup de livres sur ce sujet, tandis que nos auteurs en ont Ă©crit fort peu. Puisque Fussitius est le premier , parmi nous , qui ait publiĂ© un bon ouvrage sur ces matiĂšres. Il est vrai que dans les neuf livres que Terentius Varro a Ă©crits sur les sciences , il sâen trouve un qui traite de l'architecture. Publius Septimius en a aussi Ă©crit deux ; mais hors ceux-ci , je ne crois pas que nous ayons , jusquâĂ prĂ©sent, dâautres Ă©crivains qui aient travaillĂ© dans ce genre. Ce nâest pas quâil y ait eu autrefois de trĂšs-* grands architectes , parmi les citoyens romains , qui auroient pu Ă©crire fort pertinemment sur cette science de ce nombre sont les architectes Antislates, Calleschros, Antimachides , et Porinos. Ils avoient jetĂ© Ă AthĂšnes les fondemens du temple que Pisistralc faisoit bĂątir Ă Jupiter Olympien , et qui demeura imparfait, aprĂšs sa mort i Ă cause des troubles qui survinrent dans la rĂ©publique ; deux cents ans aprĂšs, le roi Antiochus promit de faire la dĂ©pense nĂ©cessaire pour lâachever, Ce fut encore un citoyen romain , nommĂ© Cossutius , qui montra tout le talent possible dans le plan quâil fit pour sa vaste nef , pour la distribution des colonnes qui lâentourent, en formant un diptĂšre , et pour lâarchitrave et les autres parties de lâentablement. Cet ouvrage si cĂ©lĂšbre doit ctre comptĂ© parmi ce quâil y a de plus beau dans lâunivers. Nous ne connoissons en effet que quatre temples bĂątis en marbre , qui ont rendu cĂ©lĂšbres les endroits oĂč ils se trouvent. Leur plan en est si parfait quâon les a mĂȘme admirĂ©s dans rassemblĂ©e des dieux. Le premier est le temple de Diane Ă EphĂšse , dâordre ionique , commencĂ© par CtĂ©siphon de Gnose , et par son fils MetagĂšne , et achevĂ© par DemĂ©trius servant de ! Diane, et par PĂ©onius d EphĂšse. Le second est celui que le mĂȘme Peonius et Daphnis MilĂ©sien bĂątirent Ă Apollon dans la ville de Milet, oĂč ils ont aussi suivi les proportions de lâordre ionique. Le troisiĂšme est le temple de CĂ©rĂšs et de Proserpine Ă Eleusis , construit par Ictinus 5 il donna Ă la nef qui est dâordre dorique, sans colonne Ă lâextĂ©rieur , une grandeur extraordinaire, pour laisser un plus grand espace Ă lâusage des sacrifices. Par la suite, dans le temps que DemĂ©trius de PhalĂšre commandoit Ă AthĂšnes, PhiĂźon fit ce temple prostyle, en plaçant des colonnes sur le devant du frontispice , ce qui rendit cet Ă©difice beaucoup plus majestueux , et procura aussi une place plus convenable Ă ceux qui nâĂ©toient pas encore initiĂ©s aux mystĂšres des sacrifices de ces dĂ©esses. Le oua- triĂšme enfin est le temple de Jupiter Olympien , que Cossutius construisit Ă AthĂšnes 1 comme nous lâavons dit , et oĂč il a rĂ©uni tout ce que lâordre corinthien a de plus magnifique , et observĂ© la belle harmonie de scs proportions. x Dans le latin on lit Asiy , qui signifie en grec pour la dĂ©signer. Les Romains les ont imitĂ©s en disant une ville ; parce que le* AthĂ©niens appeĂźoient leur v ille, urls, au lieu de Rome, la ville par excellence , et disoient .simplement Asty I/ARCHITECTURE DE V I T R U V E. 3Q3 Cependant on ne trouve pas que Cossutius ait rien Ă©crit sur ce sujet ; ce nâest pas le seul ouvrage qui nous manque ne devons-nous pas regretter de nâen avoir aucun de Gains Mutius , qui a Ă©talĂ© toute la science de son art , dans la construction des temples de lâHonneur et de la Vertu , que Marins fit bĂątir ; on voit avec quelle exactitude , il en a suivi les rĂšgles, pour proportionner la nef, les colonnes et les architraves. Ce temple i pourvoit ĂȘtre mis au nombre des ouvrages les plus magnifiques, sâil Ă©toit bĂąti en marbre , et si la richesse de la matiĂšre rĂ©pondoit Ă la perfection du travail, * Puisque les grands architectes que nous avons eus autrefois, ainsi que les modernes, qui sont en assez grand nombre , ont si peu e'crit sur leur art, en comparaison des Grecs , jâai cru que je ne pouvois mieux faire que dâentreprendre cet ouvrage , oĂč jâai sĂ©parĂ© chaque objet, pour traiter de chacun eh particulier dans lâun des livres qui le composent. Tellement, quâaprĂšs avoir prescrit la maniĂšre dont il faut bĂątir les Ă©difices des particuliers, dans le sixiĂšme livre, je vais dans le suivant 3 qui est le septiĂšme, traiter des diffĂ©rentes façons de faire les enduits, et faire voir comment ils contribuent en mĂȘme temps Ă lâembellissement et Ă la soliditĂ© des Ă©difices. REMARQUES Vitruve commence ce livre par lâĂ©loge des lettres , et rend hommage aux savans , qui , avee leur secours , nous ont transmis les Ă©vĂ©nemens passĂ©s , et les dĂ©couvertes quâon avoit faites de leur temps. Il cite les artistes et les premiers poĂštes qui ont commencĂ© Ă faire fleurir les arts et les belles-lettres dans la GrĂšce , oĂč les siĂšcles de la belle littĂ©rature furent aussi ceux qui produisirent les plus fameux artistes. Il parle dâabord dâHomĂšre quâil appelle le pĂšre des poĂȘles. Il fleurissoit environ cent ans avant la premiĂšre olympiade ; si lâon excepte peut-ĂȘtre HĂ©siode , qui , suivant quelques-uns, Ă©crivait trente ans avant lui; nous ne connoissons aucun autre ouvrage grec plus ancien que les siens. Rien ne peut ĂȘtre comparĂ© Ă sa poĂ©sie ; il sâessaya dans le genre Ă©pique , le chef- dâeeuvre de lâesprit humain , et prenant un vol dâaigle , sâĂ©lança au plus haut degrĂ© oĂč peuvent atteindre les forces humaines , en composant son immortelle Iliade. En vain les plus grands gĂ©nies ont cherchĂ© Ă lâimiter ; et la GrĂšce , qui, pac la suite , nous donna encore tant dâexcellents poĂštes , en dâautres genres , ne produisit plus rien de semblable tellement que le plus ancien de ses poĂštes fut aussi le meilleur. Ce qui fait dire Ă Velleius Pater" oulus , quâil ria eu personne avant lui quâil ait pu imiter ni personne aprĂšs lui qui ait pu le suivre 2 . 1 R ^ parlĂ© de ,ce temple , quil cite comme peiip- 2 Neque anle ilium quem ille tmitaretur ; neque post ilium qui euv 1Ăšre dans le i. cr Chap. du 111, e Ifiv. Voyez les remar- imilail posset, imenlus nsi, ques qui sont Ă la fin, Introduction, LIVRE VIL 3 o 3 Les beaux-arts , et sur-tout lâarchitecture , Ă©toient dĂ©jĂ connus dans le temps dâHomĂšre j il noĂčĂż apprend , quâavant le siĂšge de Troie , la ville dâOrchestre Ă©loit cĂ©lĂšbre Ă cause du temple de Neptune , qui sây trouvoit , et que Minerve en avoit un magnifique Ă AthĂšnes i. Nous voyons dans 1 * 3 Pline que le temple de 'Diane en Aulide , fut bĂąti plusieurs siĂšcles avant la guerre de Troie 2.. HomĂšre parle aussi de plusieurs palais qui existaient en GrĂšce avant cette guerre. Les Grecs , comme nous lâavons dĂ©jĂ observĂ© , dâaprĂšs les savantes dĂ©couvertes de M. Desnon S ,- avoient appris lâarchitecture des Egyptiens. Les colonies Ă©gyptiennes que CĂ©crops , et ensuite Danaiis, amenĂšrent en GrĂšce, en faisant connoĂźtre le culte de leurs dieux, y firent aussi connoĂźtre cet art,' qui, chez eux , y Ă©toit entiĂšrement consacrĂ© 4 . Nous voyons effectivement que peu aprĂšs le temps de CĂ©crops, Deucalion fit bĂątir un temple, en lâhonneur de Jupiter Pbixius , câest-Ă -dire de Jupiter, par le moyen de qui il sâĂ©toit sauvĂ© des eaux du dĂ©luge. Ce temple subsista environ neuf-cents- cinquante ans , jusquâĂ la cinquantiĂšme olympiade 5 Ă©tant tombĂ© en ruine , Pisistrate entreprit dâen, bĂątir un autre , sous le nom de Jupiter Olympien , qui est celui dont parle Vitruve dans lâintroduction de ce livre. Lâhistoire parle ensuite de deux cĂ©lĂšbres architectes , Trophonius et AgamĂšde, qui Ă©toient lâun et lâautre fils dâErginus , postĂ©rieur Ă Hercule et Ă ThĂ©sĂ©e , dâune gĂ©nĂ©ration ; ils avoient bĂąti le temple de Neptune' Hippius , Ă©loignĂ© dâun stade de MantinĂ©e. Pausanias 5 nous apprend que lâempereur Adrien fit enfermer cet ancien temple dans un nouveau quâil fit bĂątir. 4 Les Grecs ne sont donc pas les inventeurs de lâarchitecture j ils la doivent aux Egyptiens , auxquels ils doivent Ă©galement les autres arts. Nous savons par les tĂ©moignages de lâantiquitĂ© , et HĂ©rodote sur-tout nous lâassure , que la plupart des noms des dieux ont Ă©tĂ© portĂ©s dâEgypte en GrĂšce , avec leur culte. Aussi HomĂšre, avant de composer ses poĂšmes, parcourut-il lâEgypte, pour sâinstruire plus particuliĂšrement de la thĂ©ologie mythologique , et apprendre des prĂȘtres Ă©gyptiens quantitĂ© de choses inconnues en GrĂšce , sur la gĂ©nĂ©alogie , les dignitĂ©s et lĂšs emplois de leurs dieux. Ce qui fait dire au savant Huet Ă©vĂȘque dâAvranche , quâIIomĂšre , qui avoit visitĂ© les Egyptiens , rapporta de chez eux , cet esprit fabuleux qui lui fit inventer, non seulement les admirables poĂšmes quâil nous a laissĂ©s , mais encore mille nouveautĂ©s dans la gĂ©nĂ©alogie , les dignitĂ©s et les emplois des divinitĂ©s grecques ; et ce fut lĂ quâil se perfectionna dans la poĂ©sie qui y a toujours Ă©tĂ© soigneu- > sement cultivĂ©e 6. » Ainsi ce nâest pas seulement Ă cause de son anciennetĂ© que Yitruve cite HomĂšre le premier j câĂ©toit encore parce que les anciens ne regardoient pas les Ă©vĂ©nemens qui se sont passĂ©s Ă Troie , comme une simple histoire, mais comme le fond de leur thĂ©ologie. Câest pourquoi les livres dâHomĂšre , oĂč ces Ă©vĂ©nemens sont rapportĂ©s, Ă©toient en grande vĂ©nĂ©ration ; on estimoit son histoire , on admiroit sa poĂ©sie, et ses livres Ă©toient rĂ©putĂ©s sacrĂ©s 5 aussi Yitruve les nomme avant de parler des ouvrages qui traitent de la philosophie et de la morale , avant de citer lâhistoire de CrĂ©sus , dâAlexandre et de Darius , et si lâon a infligĂ© Ă ZoĂŻle , surnommĂ© le flĂ©au dâHomĂšre , ce chĂątiment dont il parle ,>> 1 Iliade, IJv. VI. 4 Idem. Ăź Pline, Liy. XVI, Ch. 14. 5 Liv. VIII, Ch. 10. 3 Voyage dans la haute et basse Ăgypte , t. III. Descript. de 6 TraitĂ© de lâorigine des romans , p. 16. la 5 g c et 60. e plane , Ă©dit, in-12. t 3o4 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. pour avoir Ă©crit contre ce poĂȘle , câest parce quâil avoit tournĂ© en ridicule un ouvrage qui iraiioit de la religion. La plupart des tragĂ©dies, chez les Grecs, reprĂ©sentant les actions des dieux, Ă©toient aussi regardĂ©es comme des ouvrages sacrĂ©s. Lâorigine de ces spectacles , cliez eux , Ă©toit due aux fĂȘtes de Bacclius. La partie de ces fĂȘtes , qui se cĂ©lĂ©broient dans les temples , consistant en choeurs , câest-Ă -dire en chants graves et monotones , Ă©toit nĂ©cessairement triste ; Thespis essaya dâintroduire dans ces chĆurs, un personnage qui rĂ©citoit quelquâun des exploits de Bacchus ; ce qui fit un Ă©pisode , câest-Ă -dire un morceau Ă©tranger dans le chĆur. Eschyle essaya dâajouter un second personnage qui forme un dialogue avec le premier. Les beaux jours de la GrĂšce commençoient alors Ă paroĂźtre ; vainqueurs des Perses , dans les âąjournĂ©es de Salamine et de PlatĂ©e , on vit les Grecs assemblĂ©s en Elide pour les grands jeux , Ă©couter HĂ©rodote cjui avoit quittĂ© la Carie pour venir leur lire son histoire câĂ©toit dans la 77.° olympiade. Eschyle donna alors sa premiĂšre tragĂ©die rĂ©guliĂšre ; et les beaux-arts virent naĂźtre Ageladas dâArgos , maĂźtre de Phidias ; Onalus qui fit la statue de Gelon , Agenor , et Glaucias dâEpiie. Agalharque qui faisoit les dĂ©corations pour le théùtre sur lequel Eschyle faisoit reprĂ©senter ses tragĂ©dies, composa, suivant Yitruve , le premier traitĂ© de perspective. Perrault a trĂšs-mal saisi ce passage de Vin uve , suivant sa coutume; lorsquâil ne comprend pas. bien , il suppose une faute dans le texte , et se sert ici dâune correction que Barbaro a faite dans son Ă©dition latine. Au lieu de tragĆdiam scenam , il lit tragicam scencim. Barbaro a certainement reconnu son erreur par la suite, puisque, dans sa traduction italienne, il a remis le mot tragĆdiam. Perrault seul met tragicam au lieu de tragĆdiam y par-lĂ il fait Eschyle peintre de dĂ©coration. On sait quâEsehyle rĂ©forma la tragĂ©die, et introduisit le bon goĂ»t dans ce genre de poĂ©sie Ă AthĂšnes; mais quâil ne fut jamais peintre de dĂ©coration. DâaprĂšs cela , le vĂ©ritable sens de celte phrase , est que IorsquâEschyle faisoit reprĂ©senter ses tragĂ©dies Ă AthĂšnes, Ăschylo docente tragĆdiam , Agalharque en peignoit les scĂšnes , scenam fecit Agatarchus. La clartĂ© de ce passage est plus que suffisante pour convaincre ceux qui ont voulu douter si les anciens connoissoient lâart de la perspective. En effet Agalharque, DĂ©mocrite et Anaxogore , sont ici. citĂ©s comme ayant composĂ© des traitĂ©s de perspective ; puisque Vilruve dit quâils enseignoient la maniĂšre de reprĂ©senter , sur la scĂšne , des vĂ©ritables Ă©difices , qui , quoique peints sur une superficie plate* et unie, câest-Ă -dire sur la toile, paroissoient les uns prĂšs , et les autres Ă©loignĂ©s; et cela en imitant la disposition naturelle des lignes qui rĂ©pondent toutes Ă un mĂȘme point, lineas rations naturali resjrondere , que nous nommons le point de vue, ou le point de perspective; et radiorum extensionem , et selon le point de distance. Il est vrai que les rĂšgles de la perspective 11e sont pas observĂ©es bien exactement, dans les peintures anciennes qui se sont conservĂ©es et qui sont parvenues jusquâĂ nous , hormis le morceau de peinture Ă fresque quâon a trouvĂ© dans les ruines de YilĂźeya , et qui se trouve Ă Parme dans une des salles de lâacadĂ©mie , ou lâon voit qtrâon a observĂ© les rĂšgles de la perspective. Dans tous les autres morceaux de peinture antique que jâai vus Ă Rome, Ă Naples, Ă Portici , oĂč on en a rĂ©unis une infinitĂ© , quâon a tirĂ©s des ruines dâKerculanum et de Pompeia , je nâen ai remarquĂ© aucun qui ' \ik Ii l CD Ăpb Ăźflusir f te 9 d 5t Ăźij Ni tjtll -I N 3o5 Introduction, L I V K E V I I. qui indiquĂąt que le peintre connoissoit la perspective. Je dois cependant observer que tous ces morceaux Ă©toient peints sur des murailles , dâoĂč On les a sciĂ©s ; et que , dâaprĂšs le rapport de Pline * ceux qui peignoient dans ce genre nâĂ©toient pas les meilleurs des peintres. Ces peintures prouvent , il est vrai , que ceux qui les ont faites ignoroient cet art ; mais non pas que lâart Ă©toit inconnu de leur temps. Jâose dire que , mĂȘme Ă prĂ©sent , oĂč lâon connoĂźt certainement ces rĂšgles , il y a une infinitĂ© de tableaux oĂč on ne les a pas suivies , et qui sont remplis de fautes contre la perspective ; on nâen peut pas conclure cependant que cet art est gĂ©nĂ©ralement ignorĂ© , mais que les peintres qui les ont dessinĂ©s sont des ignorans 1 . La perspective , qui, suivant la remarque dâun grand maĂźtre 2 , est la premiĂšre chose quâun jeĂ»ne peintre doit apprendre , pour savoir mettre chaque chose Ă sa place , et pour lui donner la juste mesure quâelle doit avoir, dans le lieu oĂč elle est , Ă©toit donc connu dans la GrĂšce , Ă celte Ă©poque , oĂč les arts sembloient annoncer les rapides progrĂšs quâils alloient faire , oĂč les malheurs mĂȘmes de la GrĂšce servirent Ă leurs progrĂšs. AprĂšs les ravages des Perses , il fallut rebĂątir AthĂšnes. Phidias , sous le gouvernement de PĂ©riclĂšs , dirigea la construction des nouveaux Ă©difices , et les dĂ©cora de chefs-dâĆuvres de sculptures, sortis de ses mains et de celles de ses Ă©lĂšves. Tout devint grand alors Ă AthĂšnes , et le pas qui fut franchi, dut paroĂźtre Ă©tonnant , lorsquâon compara les ouvrages dâAgeladas Ă ceux de Phidias, câest-Ă -dire ceux du maĂźtre et ceux de lâĂ©lĂšve. 11 en Ă©toit de mĂȘme pour les lettres ; ce mĂȘme temps vit paroĂźtre Euripide , Sophocle , Euphorion et Aristophane. On croyoit quâEschyle avoit portĂ© la tragĂ©diĂ© Ă sa perfection , lorsque Sophocle fit eonnoĂźtre un genre nouveau ; il sut Ă©mouvoir, non par des paroles , mais par des images sentimentales , qui pĂ©nĂštrent jusquâĂ lâame ; il fit voir dans lâart de MelpomĂšne , des beautĂ©s inconnues jusquâalors , et un talent supĂ©rieur Ă tous ceux qui avoient , avant lui , parcouru cette carriĂšre. Les plus heureuses circonstances firent fleurir alors les arts dans la GrĂšce 5 lâesprit humain sây dĂ©veloppa tout entier ; chaque olympiade vit Ă©clore de nouveaux prodiges. Lâhistoire nous a conservĂ© les noms des plus cĂ©lĂšbres sculpteurs de ce temps ; outre LĂ©ocharĂšs , Braxis, Scopas et PraxitĂšle dont parle Vitruve , PolyclĂšte et Myron dont il a parlĂ© dans le i. er chapitre du I. er livre, florissoient Ă la mĂȘme Ă©poque. Les malheurs quâĂ©prouva AthĂšnes pendant la guerre du PĂ©loponĂšse > furent aussi funestes aux arts; mais Thrasybule lui [rendit sa libertĂ© et la dĂ©livra du joug des LacĂ©dĂ©moniens. Lâart, dont le destin fut toujours liĂ© Ă celui dâAthĂšnes , parut renaĂźtre alors , et les Ă©lĂšves des grands maĂźtres prĂ©cĂ©dens , CĂŠnacus , Numides, Dinomede et Patrocle , selon le tĂ©moignage de Pline , se signalĂšrent dans la qĂŽ .âą 9 olympiade 3. Peu aprĂšs la guerre du PĂ©loponĂšse , Epaminondas changea tout le systĂšme des Ă©tats de la GrĂšce; il fit prendre Ă ThĂšbes sa patrie , la prĂ©pondĂ©rance. Vainqueur Ă Leuctres des LacĂ©dĂ©moniens, qui, 1 Discours de M. Sallier sur la perspective des anciens , tome II 2 Le'onard de Vinci, traiteâ de la peinture , Chap, I.** des me'm. de lâacad. des insc. et belles-lettres. 3 Pline, Liv, XXXIV , Chap. 8. / 39 3 o 6 LâARCHITECTURE DE V I T R TJ Y E. » depuis trente ans, Ă©toient les maĂźtres de la GrĂšce, la crainte quâil inspiroit occasionna la rĂ©conciliation de Sparte avec AthĂšnes, qui se liguĂšrent ensemble contre les ThĂ©bains , dans la io2. ra * olympiade. Pline place Ă celle Ă©poque , le temps des cĂ©lĂšbres sculpteurs PolyclĂšs , Cephisodoie et Hypatodore 1. XĂ©nophon et Platon Ă©toient alors dans la force dĂȘ leur gĂ©nie. ThĂšbes et Sparte recommencĂšrent une guerre Ă laquelle toutes les villes de la GrĂšce prirent part ; Epaminondas la termina par la bataille de MantinĂ©e , oĂč il remporta la victoire , et* termina sa glorieuse carriĂšre. Ses derniĂšres paroles , en expirant, furent pour conseiller aux ThĂ©bains de faire la paix , quoiquâau moment de leur triomphe ; ils suivirent son conseil elle fut conclue la seconde annĂ©e de la 104. me olympiade. La tranquillitĂ© gĂ©nĂ©rale succĂ©da aux troubles dans la GrĂšce. Pline place Ă cette Ă©poque le temps de la rĂ©putation de PraxitĂšle de Zeuxis, de Pamphile, dâEuphranor et dâautres artistes. Ce que PraxitĂšle Ă©toit dans la sculpture , Pamphile , Euphranor , Zeuxis, Nicias et Pharrasius le furent dans la peinture cet art ne fut portĂ© Ă sa perfection que par ces maĂźtres, car Quiniilien nous apprend que Zeuxis et Apollodore son maĂźtre } passent pour ĂȘtre les premiers qui aient introduit les lumiĂšres et les ombres dans leurs tableaux 2. MĂ©nandre, lâami dâEpicure , parut sur la scĂšne comique ; il rĂ©pandit dans ses piĂšces le sel attique, sans sâĂ©carter des lois de la biensĂ©ance , et fĂźt voir lâaffinitĂ© qui rĂ©gnoit entre la poĂ©sie et lâart auquel Apelles et Lysippe imprimoienl alors le caractĂšre des grĂąces; et DĂ©mosthĂšne se montra le plus grand orateur du siĂšcle dont nous parlons , et de tous les Ăąges. Enfin lâĂ©poque de la plus haute Ă©lĂ©gance et de la plus grande dĂ©licatesse de lâart, fut sous Alexandre-le-Grand , aprĂšs la 106. me olympiade. /Les Grecs, tranquilles sous son empire, sâadonnĂšrent aux plaisirs et aux beaux-arts. Outre Lysippe qui avoit seul le droit de jeter le portrait dâAlexandre en fonte, Apelles de le peindre, et Pyrgoteles celui de le graver en pierre fine , 3 on distingua encore, parmi les sculpteurs, Agesandre , Poly- dore et AthĂ©nodore, auteurs du Laocoon; et parmi les peintres , Aristide, ProtogĂšne et Nycomaque. Parmi les architectes , on distingue Dinocrate dont Vilruve nous a donnĂ© lâhistoire, au commencement du deuxiĂšme livre. Ce fut lui qui traça le plan et fit le modĂšle de la ville dâAlexandrie 4* Le. temple de Diane dâEphĂšse , ruinĂ© par lâincendiaire dâErostrate , fut reconstruit , et ce cĂ©lĂšbre architecte y mit la derniĂšre main. Alexandre-Ăźe-Grand mourut la premiĂšre annĂ©e de la n 4 - me olympiade ses gĂ©nĂ©raux se partagĂšrent son empire. LâEgypte, lâancienne patrie des arts, Ă©chut Ă PtolomĂ©e. Il fit bĂątir le Phare dâAlexandrie , qui passa pour une des sept merveilles du monde ; et son fils PtolomĂ©e-Philadelpbe fonda Ă Alexandrie celte fameuse bibliothĂšque dont il est pariĂ© dans cette introduction. Au rapport dâAulu- sippo duccret Ćra forlis Alexandri Vulium simulantia. Horat. epist, I> Lib. II. Plin. Lib. XXXV, Ch. 10. 4 Pline, Liv. Y. Chap. 10. / 1 Pline , Liv. XXXIV, Cliap. 8 . 2 Quint, inst. oral. , Liv. XĂźl , Chap. 10. 3 Edich- teluit ne tjuis se prĆter Appellent pingeret, aut nlius Ly~ Introduction, LIVRE VI I. elle, elle contenoit sept cent mille volumes 1 . Gallien nous apprend que PlolomĂ©e et ses suc- i -i âą_ vi âą cesseurs achetoieut trĂšs-cher tous les manuscrits quâils pouvoient se procurer , pour augmenter cette bibliothĂšque. Les soins en furent dâabord confiĂ©s au cĂ©lĂšbre DĂ©mĂ©trius de PhalĂšre qui sâĂ©loit rĂ©fugiĂ© en Egypte. Ce grand homme avoit acquis beaucoup dâautoritĂ© Ă AthĂšnes, sous Alexandre , et aussi-tĂŽt aprĂšs la mort de ce conquĂ©rant , il en fut regardĂ© comme le souverain. Il la gouverna pendant dix ans , et y fit construire un grand nombre dâĂ©difices. Câest Ă cette Ă©poque que Philon embellit le temple de CĂ©rĂšs Ă Eleusis, en plaçant des colonnes sur le devant, pour le faire prostyle , comme "Vitruve nous lâapprend dans ce livrĂ©. Les AthĂ©niens , pour honorer la vertu de DĂ©mĂ©trius, lui Ă©levĂšrent 36o statues dâairain , ce qui nâempĂȘcha pas ses ennemis de le faire condamner Ă mort ; mais il Ă©chappa Ă cette sentence, en se retirant dâabord chez Cassandre , ensuite chez PlolomĂ©e. Câest par ses conseils que PlolomĂ©e fit traduire dâhebreu en grec , par des Juifs que lui envoya ĂlĂ©azar , les livres de la loi de Moyse ; câest ce^ quâon nomme la Version des septante. dâĂ©difices. Câest Ă cette Ă©poque que Philon em- Dans le mĂȘme temps , les rois de Pergame , Atlale et EumĂšnes , accueillirent lâart dans leur patrie. Ces deux rois qui se sont immortalisĂ©s par leur sagesse et leur amour pour leurs sujets, fondĂšrent une bibliothĂšque comme celle dâAlexandrie. Ce qui excita la jalousie des Egyptiens, au point que PtolomĂ©e-Philadelphe dĂ©fendit lâexportation du papyrus ou du papier dâEgypte ; il excita par-lĂ lâindustrie des PergamĂ©niens ,, qui trouvĂšrent lâart de prĂ©parer des peaux de mouton pour Ă©crire dessus; on les a nommĂ©es parchemin , parce que cette invention eut lieu Ă Pergame. une bibliothĂšque comme celle dâAlexandrie. Ce qui excita la jalousie des Ăgyptiens Plutarque nous apprend dans la vie de Marc-Antoine , que la bibliothĂšque des rois de Pergame contenoit deux cents mille volumes. , Jâai cru quâil convenoit de donner celte petite histoire chronologique des progrĂšs des arts dans la"GrĂšce , pour faciliter lâintelligence de ce que Vitruve nous dit de ceux qui ont Ă©crit, sur les arts, des ouvrages desquels il sâest servi. Toutes les Ă©poques que je rapporte se trouvent fixĂ©es dans le XXXIV. livre de lâhistoire de Pline. Les ouvrages dâarchitecture que Vitruve cite dans cette introduction , sont prĂ©sentement perdus. La publication de son traitĂ© , qui rĂ©unit tout ce qui se trouvoit de mieux dans les autres , est sans doute cause quâon les a nĂ©gligĂ©s , et quâils ne sont pas parvenus jusquâĂ nous. Les anciens prĂ©fĂ©raient sans doute le sien Ă tous les autres. En parlant dâarchitecture ils nâen citent presque pas dâautres. 2 Ou en a trouvĂ© un grand nombre de manuscrits , quâon conserve encore dans les bibliothĂšques les plus cĂ©lĂšbres ; 5 tandis quâon nâen a trouvĂ© aucun des autres auteurs. Je crois donc que nous devons un peu nous consoler de la perte de leurs ouvrages. Vitruve ayant traitĂ© de tout ce qui concerne la construction des bĂątimens , va parler dans ce septiĂšme livre , des moyens de les embellir il commence par les enduits. 1 Liv. VI, Cha. ult. EijsĂšbe , Ămien Marcelin en parle aussi. 3 Voyez en le catalogue au commencement de cet ouvrage. a Pline entrâautres, Liv. XXXV et XXXVI. x 3o8 L'ARCHITECTURE DE YITRUVE. CHAPITRE PREMIER. De la RudĂ©ration. J E commencerai par la rudĂ©ration, i qui est le principal de tous les enduits , afin quâon ait la plus grande attention de le faire bien solide. Quand la rudĂ©ration se fait pour un payĂ© qui doit ĂȘtre au rez-de-chaussĂ©e , on examine si le sol est bien ferme par tout ; alors on Ă©tend la premiĂšre couche de cailloux et ensuite la rudĂ©ration. Mais si le local est entiĂšrement , ou mĂȘme en partie de terre rapportĂ©e , il faut avoir grand soin de bien lâaffermir , en le battant avec la hie. On doit prendre garde ensuite que sous les planchers des Ă©tages , il ne se rencontre de ces murs qui ne sâĂ©lĂšvent pas jusquâau haut de lâĂ©difice , mais seulement jusquâau plancher; sâil sâen trouvoit de cette sorte , il faut quâil soit un peu plus bas , pour Ă©viter qu il ne le touche ; autrement le plancher venant Ă sĂ©cher , et sâabaissant un peu alors, la partie qui seroit appuyĂ©e sur le mur , ne participant pas Ă ce mouvement, il se feroit certainement des crevasses Ă droite et Ă gauche dans le pavĂ©. On nuit aussi beaucoup Ă lâouvrage , si, avec des planches de chĂȘne , on en mĂȘle dâautres de chĂȘne commun, parce que le chĂȘne commun qui reçoit lâhumiditĂ© se dejette et fait fendre le pavĂ©. Si cependant on nâavoit point de chĂȘne verd , et qu'on fĂ»t obligĂ© de se servir de chĂȘne commun , il faudroit rendre les planches fort minces ; afin quâĂ©tant ainsi affaiblies , on pĂ»t les arrĂȘter plus aisĂ©ment avec des doux , on les attachera en outre sur les solives , avec des doux de chaque cĂŽtĂ© , pour empĂȘcher quâen se tourmentant, elles ne sâĂ©lĂšvent par les bords. Nous ne parlerons pas du cercus, du hĂȘtre, ni du farnia , parce quâaucun de ces bois ne peut durer long-temps. Le plancher Ă©tant achevĂ© , il faudra le couvrir de fougĂšre , si lâon en a , ou bien de paille , pour empĂȘcher la chaux de gĂąter le bois. Ensuite on Ă©tendra par-dessus, un lit de cailloux qui seront au moins gros Ă pouvoir remplir la paume de la main; et sur ces cailloux on jetera la rudĂ©ration dans laquelle on mettra une partie de chaux pour trois de cailloux, si on la fait avec de nouvelles pierres car si elles sont prises de vieilles dĂ©molitions , on mettra deux parties de chaux pour cinq de i La rudĂ©ration , comme on le verra , Ă©toit un mĂ©lange de pierres concassĂ©es avee de la chaux. 1 -s, a f, * parti % ! MĂ©r [ 4lnc ki LIVRE VII, G h a p. i. 309 cailloux. On affermira lâenduit de la rudĂ©ration , en le faisant battre long-temps par un nombre dâhommes suffisant, de sorte quâaprĂšs lâavoir Ă©tĂ© assez, il nâait pas moins de neuf pouces d'Ă©paisseur ; lĂ dessus on fera le noyau ; celui-ci nâaura pas moins de six pouces dâĂ©paisseur ; il est composĂ© de tuileaux concassĂ©s avec lesquels on mĂȘlera une partie de chaux sur deux de ce ciment. Sur ce noyau , on posera le pavĂ© bien dressĂ© avec la rĂšgle , soit quâil soit fait de carreaux, ou bien en mosaĂŻque. Quand cela sera achevĂ© , et quâon aura couvert de pavĂ©s toute la superficie , on le polira avec le grĂ©s , de maniĂšre que les piĂšces taillĂ©es en losange , en triangle, en carrĂ© , ou en exagone , nâoffrent rien de raboteux, et qu elles soient parfaitement unies dans leurs jointures. Dans les pavĂ©s en mosaĂŻque , il faut Ă©galiser et polir tous les angles 5 parce que s ils netoient pas Ă©gaux , louviage ne paroitioit pas comme il faut lorsquâil sera poli. On doit de mĂȘme dresser bien exactement les pavĂ©s de brique en forme dâĂ©pi de bled , comme on les fait Ă Tivoly , de maniĂšre quâils nâoffrent ni creux ni bosses, mais quâils soient bien polis , pour quâon puisse les placer Ă la rĂšgle. Lorsquâon aura rendu le pavĂ© trĂšs-uni Ă force de le polir , on cassera de la poudre de marbre et lâon jetera par-dessus une composition faite de chaux et de sable. Il faut prendre beaucoup plus de prĂ©caution pour les pavĂ©s qui sont Ă dĂ©couvert , Ă cause que la charpente qui soutient ces pavĂ©s , sâenfle et se tourmente d abord par lâhumiditĂ© ; elle se dessĂšche et se rĂ©trĂ©cit ensuite ; ce qui fait entr ouvrir le pavĂ©. Les gelĂ©es et les bruines qui surviennent, achĂšvent bientĂŽt de les gĂąler. Tellement que si lâon veut un pavĂ© qui rĂ©siste aux injures de lâair , et subsiste long-temps , sans dĂ©faut, on doit le faire de cette maniĂšre. Quand le premier plancher sera achevĂ© , on Ă©tendra par-dessus en travers un second rang d ais, que lâon arrĂȘtera aussi avec des doux, ce qui formera un double plancher ; on fera ensuite la matiĂšre de la rudĂ©ration , composĂ©e de nouveau cailloux mĂȘlĂ©s avec une troisiĂšme partie de tuileaux pilĂ©s , ajoutant , Ă cinq parties de cette- mixtion , deux parties de chaux. La couche de cailloux Ă©tant faite , on Ă©tendra dessus la matiĂšre de la rudĂ©ration , laquelle Ă©tant bien battue , aura encore au moins lâĂ©paisseur dâun pied. IHous avons dit comme on devoit faire le noyau sur cette rudĂ©ration on mettra par - dessus de grands carreaux Ă©pais de deux doigts , et posĂ©s de maniĂšre quâils soient Ă©levĂ©s dans le milieu , pour mĂ©nager une pente de deux doigts sur dix pieds d Ă©tendue Si lâon fait bien cet ouvrage , et quâon le polisse comme il doit lâĂȘtre , il subsistera long-temps sans dĂ©faut. Pour empĂȘcher que la gelĂ©e ne pĂ©nĂštre par les joints des carreaux et ne pourrisse les planchers , il convient dâimbiber tous 3io LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. les ans avant lâhiver , les carreaux de lie dâhuile , et de les en imprĂ©gner autant quâil sera possible. » On empĂȘche par-lĂ lâhumiditĂ© de pĂ©nĂ©trer. Veut-on mieux faire encore ? quâon couvre toute la rudĂ©ration avec des carreaux de briques qui auront deux pieds , et quâon joindra avec de la chaux ; ces carreaux auront tout autour des rainures enfoncĂ©es de lâĂ©paisseur dâun doigt, quâon remplira de chaux dĂ©trempĂ©e avec de l huile , pour bien boucher les jointures ; lorsquâelle sây sera durcie , on la frottera au-dessus avec le grĂ©s. Cette chaux sâattachera fortement aux rainures, et venant Ă durcir, empĂȘchera lâeau et toute espĂšce dâhumiditĂ© de pĂ©nĂ©trer par les jointures. Sur ces carreaux ainsi assemblĂ©s, on Ă©tendra le noyau , quâon aura bien battu avec la liie on pavera ensuite par - dessus , soit avec de grands carreaux , soit avec de pavĂ©s de briques placĂ©s en forme dâĂ©pis de bled , en observant de leur donner la pente indiquĂ©e ci-dessus. Si I on fait cet ouvrage, comme je viens de le dire , il subsistera long-temps sans se gĂąter. REMARQUES. Les anciens Ă©toient bien plus curieux que nous ne le sommes pour former de bons payĂ©s, On vient de voir , dans Vilruve , tous les travaux prĂ©paratoires et toutes les prĂ©cautions quâils prenoient avant de les placer. Beaucoup de ces pavĂ©s se sont parfaitement conservĂ©s. On en a trouvĂ© plusieurs trĂšs-entiers , particuliĂšrement dans les ruines des anciens Ă©difices de Rome , de Palestrine , de Naples , de Pompeia , dâHercuĂźanum ; on en a trouvĂ© dans toute lâItalie , et mĂȘme daus les autres parties de lâEurope 1 et de lâAsie , oĂč il existe des ruines dâĂ©difices romains. Les pavĂ©s sont ordinairement les parties les plus intactes ; ce qui prouve leur grande soliditĂ©. Tous ceux que jâai vus ont Ă©tĂ© construits , dâaprĂšs les rĂšgles rapportĂ©es par Vilruve dans ce chapitre ; on voit par-dessous les diffĂ©rentes couches dont il parle. Les Romains avoient , parmi leurs esclaves , des ouvriers appelĂ©s pavimentarii , 2 qui exĂ©cu- toient les dĂ©tails de tous ces ouvrages. La premiĂšre opĂ©ration Ă©toit dâĂ©tendre sur le sol, aprĂšs sâĂȘtre assurĂ© de sa soliditĂ© , une couche de cailloux ou de petites pierres brisĂ©es , de maniĂšre Ă pouvoir tenir dans la paume de la main. Celte premiĂšre couche se metloit Ă sec , sans le mĂ©lange dâaucun mortier. Cela sâappeloit statuminare , et statuminalio. Sur cette premiĂšre couche on en jeloit une seconde aussi de pierres concassĂ©es , mais mĂȘlĂ©es avec de la chaux on appeloit cela ruderare parce que , comme le remarque lâauteur anonime qui a composĂ© lâabrĂ©gĂ© de Vilruve , rudus est majores lapides contusi calce misii , câest-Ă -dire , a la rudĂ©ration est un mĂ©lange de grosses pierres n concassĂ©es avec la chaux. » Quand on prenoit , pour la rudĂ©ration , des pierres ou des cailloux nouvellement tirĂ©s de la carriĂšre , ou des Ă©clats de pierres de taille, cela se nommoitVwtfMS novum ; et lorsquâon la composoit de fragmens^ de pierres tirĂ©es des dĂ©bris dâun vieux mur , on disoit redi- j M. r Coxe , dans ses lettres sur la Suisse , parle dâun superbe Tranche. Lett. XXX. me payĂ© en mosaĂŻque, trouve' dans les ruines de lâancienne ville dâA- 2 Vulpii Tabula Antiana, p. 16. LIVRE VII, C h a p. i. 3n vivum. CeÂŁ vieilles pierres, tirĂ©es depuis long-temps, Ă©tant beaucoup plus* sĂšches, ou plutĂŽt plus poreuses , exigeoient une plus grande quantitĂ© de chaux , câest pourquoi Yilruve veut quâon mĂȘle avec ces cailloux deux parties de cliaux sur cinq de pierres ; tandis quâavec de nouvelles pierres , il nâexige quâune partie de chaux sur trois de pierres. Perrault sâest trompĂ© , et a confondu le statumen avec le rudus j dâoĂč il a trĂšs-mal-Ă -propos fait entrer de la chaux dans la composition du statumen. Son erreur vient de ce que Yilruve , vers la fin de ce chapitre , immĂ©diatement aprĂšs avoir rapportĂ© comment lâon composoit la rudĂ©ration , dit statuminatione facta 3 rudus inducatur ; ce quâil traduit ainsi Celte couche Ă©tant faite , on mettra la matiĂšre de la rudĂ©ration ». Tellement que Perrault a cru que cette compo- ' sition, dans laquelle il entroit de la chaux, nâĂ©toit pas celle de la rudĂ©ration, mais celle du statumen , Pour peu quâon rĂ©flĂ©chisse cependant, on voit trĂšs-clairement que la matiĂšre, dont lâauteur rapporte la composition , ne peut ĂȘtre autre que celle de la rudĂ©ration y mais comme la rudĂ©ration sâĂ©tend toujours sur une couche de cailloux statumen 3 il suppose que cette couche de cailloux a Ă©tĂ© faite dâavance ; voilĂ pourquoi , aprĂšs avoir indiquĂ© la composition de la rudĂ©ration , il dit statuminatione facta , rudus inducatur. Lâessentiel pour la rudĂ©ration est dâĂȘtre bien battue 5 Yilruve recommande de le faire faire par un nombre dâhommes suffisant , et il emploie pour cela cette expression decuriis inductis. Dans le 3 . 1316 chapitre de ce livre, il dit Ă©galement decuria homirium inducta. Ce qui est une expression gĂ©nĂ©rale , qui signifie une quantitĂ© dâhommes indĂ©terminĂ©e ; proportionnĂ©e dâaprĂšs lâouvrage, et dâaprĂšs lâespace oĂč on peut les employer. Barbaro et Perrault ont entendu par-lĂ des hommes disposĂ©s dix Ă dix , mais ils se sont trompĂ©s. * On ne pratique plus pour les pavĂ©s la rudĂ©ralion , en-deça des Alpes; et comme lâobserve Perrault, nous nâavons point mĂȘme de mot françois pour signifier ruderatio. Câest pourquoi il a dĂ» retenir le mot latin. Il nâen est pas de mĂȘme en Italie , oĂč on lâemploie encore pour les pavĂ©s des grandes salles , et cela de la mĂȘme maniĂšre que Yilruve vient de lâenseigner dans ce chapitre ; la premiĂšre couche statumen se fait de mĂȘme avec des pierres concassĂ©es sans chaux ni mortier; on la nomme en italien riccio , câest-Ă -dire hĂ©rissĂ©e . La seconde , qui est la rudĂ©ralion , se nomme le smalte , smalto } dont nous avons dĂ©jĂ parlĂ©. Les pierres concassĂ©es se joignent tellement avec la chaux, lorsque la rudĂ©ration ou le smalte est bien sec , quâelles ne forment, pour ainsi dire, quâun mĂȘme corps, qui acquiert une grande soliditĂ©; et, lorsquâil est bien Ă©galisĂ© , prend le plus beau poli. Les Italiens ayant sans doute remarquĂ© cela , ont formĂ© des pavĂ©s avec la rudĂ©ration seule , sans la couvrir avec des carreaux ou de la mosaĂŻque , comme Yitruve le dit ici. _ * Yoici comme ils sây prennent aprĂšs avoir formĂ© le smalte , ou la rudĂ©ration , comme Yitruve lâenseigne , sauf que jây ai vu employer de la pouzzolane , on la bat avec la liie jusquâĂ ce quâelle soit parfaitement sĂšche ; alors on la frotte avec des grĂ©s , et ensuite avec dâautres pierres plus douces, jusquâĂ ce que le smalte soit bien poli. Celte maniĂšre de pavĂ© fait le., plus bel effet; on cliroit quâun seul morceau de marbre forme tout le pavĂ© de la salle. Un autre avantage , pour le climat de lâItalie , câest quâelle procure la plus grande fraĂźcheur. Plusieurs salles du palais de Milan , » 3l2 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. comme nous lâavons dĂ©jĂ dit, sont ainsi pavĂ©es. Celles de lâarsĂ©nal de Venise, et du palais du Doge, celles du palais du T. Ă Manloue , de la Villa BorghĂšse Ă Rome , le sont Ă©galement. On rend ces pavĂ©s encore plus beaux , en sĂ©parant les Ă©clats de marbre , suivant leur couleur ; on en forme alors diffĂ©rens dessins , tels que des Ă©toiles , des compartimens , etc. Les plus beaux pavĂ©s que jâaie vus en ce genre, sont ceux de la Villa BorghĂšse Ă Rome ; il faut que ces pavĂ©s soient bien solides , puisquâĂ Boulogne , plusieurs loges , qui sont le long des rues , sont uniquement pavĂ©es comme cela ; ils restent trĂšs-intacts , quoique foulĂ©s continuellement par le public ; ce que jâai remarquĂ© moi-mĂȘme. Nous avons dĂ©jĂ parlĂ© des deux premiĂšres couches que les anciens metloient sous leurs pavĂ©s la troisiĂšme sâappeloit le noyau , nuclĂ©us ; elle Ă©toit composĂ©e de tuileaux concassĂ©s et rĂ©duits eu grains , Ă -peu-prĂšs de la grosseur dâun pois , et liĂ©s avec de la chaux. Câest ainsi quâest fait le ciment des diffĂ©rens pavĂ©s antiques , que jâai vus Ă Pompeia , Ă Herculanum , dans la Villa Adrienne Ă Tivoli ; soit quâils fussent en mosaĂŻque ou autrement, ce ciment acquiert Ă la longue une soli-. dilĂ© semblable Ă celle du marbre ; on le taille dĂš mĂȘme, et il prend comme lui le plus beau poli. Jâen ai vu faire Ă Naples des tabatiĂšres et dâautres ouvrages , on ne peut pas plus jolis. XâĂ©toil sur celte derniĂšre couche quâon posoit le pavĂ© qui Ă©toit ou en brique ou en mosaĂŻque , ou en tout autre ouvrage dont nous allons parler. Nous avons vu combien les anciens cherchoient Ă rendre leurs pavĂ©s solides , et les moyens quâils employoient pour cela. Us nâĂ©loient pas moins recherchĂ©s pour les rendre Ă©lĂ©gans et agrĂ©ables Ă la vue. CâĂ©loit chez eux un luxe gĂ©nĂ©ralement rĂ©pandu. Tous les pavĂ©s que jâai vus Ă Pompeia , sont de la plus grande Ă©lĂ©gance ; il y en a de carreaux de marbre blanc ; mais la plupart sont en mosaĂŻque , et reprĂ©sentent de trĂšs-jolis dessins. Les plus petites maisons , celles des marchands , des artistes, ont des chambres pavĂ©es en mosaĂŻque. f' ;; Ă» Je ' y fit* ijĂŒĂ©toi ; .Ăźinats - 3 et I iiin di 1 ijiAĂźces jim, o quâon a Ls et de a Je, T i, tt . L 1 V RE VII, C h a'p. i. 3i3 Les anciens arrĂąngeoient encore leurs pavĂ©s dâune autre maniĂšre , nommĂ©e spicatum opus ; parce que les briques en sont posĂ©es comme les grains de bled dans lâĂ©pi. Il paroit , dâaprĂšs ce que dit Vilruve , quâelle Ă©toit sur-tout en usage Ă Tivoli ; elle est encore pratiquĂ©e en Italie, oĂč on la nomme a spinadi pesce , Ă cause de la ressemblance de celte espĂšce dâouvrage avec les arĂȘtes de poisson. Ce sont des carreaux oblongs , ou des briques quâon pose verticalement sur leur cĂŽtĂ© Ă©troit, de maniĂšre quâelles forment un angle entrâelles. Les rues de Sienne, et de toutes les villes des Ă©tats dâUrbain , sont pavĂ©es de pareilles briques. Nos menuisiers exĂ©cutent, souvent cette espĂšce dâouvrage dans leurs parquets. Il est Ă©tonnant , combien lâon a trouvĂ© de pavĂ©s anciens , exĂ©cutĂ©s en mosaĂŻque 1 ; on croireit que , formĂ©s avec dâaussi petites pierres , ils dĂ©voient plus aisĂ©ment se dĂ©sunir et par-consĂ©quent ĂȘtre dĂ©truits les premiers 2 5 on en a trouvĂ© cependant une infinitĂ© , parfaitement intacts , Ă Her- culanum et Pompeia ; on est parvenu Ă les enlever par grandes piĂšces , et on les a placĂ©s dans le musĂ©um de Porlici ; ils servent de pavĂ©s aux salles , oĂč lâon a rĂ©uni toutes les antiquitĂ©s trouvĂ©es dans ces deux villes anciennes. A Rome, on a pavĂ© de mĂȘme plusieurs salles du musĂ©um ClĂ©mentin au Vatican , avec des mosaĂŻques quâon a dĂ©tachĂ©es dans les anciens Ă©difices de Tivoly , de Palestine , lâancienne Preneste des Romains et de Rome mĂȘme. On distingue sur-tout celui de la grande salle de ce musĂ©um, nommĂ© la Rotonde. Tous les fragmens de mosaĂŻque y sont rĂ©unis avec beaucoup dâart 5 tellement que dans ce nouveau musĂ©um , nous marchons encore sur les pavĂ©s des anciens, et nous avons le plaisir dâadmirer les jolis dessins dont ils les embellissoient ; ils sont parfaitement conservĂ©s , ainsi que les couleurs des diffĂ©rentes pierres et Ă©maux dont ils Ă©toient formĂ©s. Lâinvention des pavĂ©s , dit Pline , nous vient originairement des Grecs ; ils employoient beau- coup de pavĂ©s de couleur quâils peignoient avec le plus grand soin. Ces pavĂ©s perdirent leur vogue dĂšs que la mosaĂŻque fut connue. Sosus , Ă ce quâon dit , excelloit Ă faire ces sortes de pavĂ©s $ > il fit le superbe pavĂ© de la salle du théùtre de Pergame , appelĂ© par les Grecs Ăsaratos Ćcos 5 » parce que ce pavĂ© Ă©toit fait avec un amas de petits coquillages et de petites briques peintes de diverses couleurs. On y admire sur-tout une colombe qui boit ; elle est si artistement faite que » sa tĂȘte porte ombre sur lâeau. On y voit dâautres pigeons qui se grattent et se pavanent au soleil, » sur le bord dâune coupe 4. Je crois , continue Pline , que les pavĂ©s de Mauritanie que nous » employons aujourdâhui, ont conservĂ© leur premiĂšre forme , comme aussi ceux que nous faisons pour paver nos maisons j puisque les uns et les autres sont sciĂ©s et battus dâoĂč leur est venu » le nom de pavĂ© 5. Les pavĂ©s faits de petites pierres taillĂ©es et carrĂ©es furent inventĂ©s et em- 1 Leur nombre est bien plus considĂ©rable que celui des autres paves. 2 MosaĂŻque , vient du mot latin mushum ouvrage fait en compartiment , dont on a fait par corruption , Musdium et ensuite Mosaicum. 3 Câest-Ă -dire qui nâa pas e'tĂ© balaye' on lui donnoit ce nom, pareequâon voyoit si industrieusenaent reprc'sente'es, sur ce pave', les miettes et les salete's qui tombent de la table , quâil sembloit que ces objets lussent rc'els, et que les valets nâavoient pas eu soin de les balayer. 4 On voit Ă Rome , dans le muse'um dâantiquitĂ©' qui est au capi- tole , une mosaĂŻque ancienne qui repre'sente quatre tourterelles, sur le bord dâun vase ; elles ont les attitudes dont parle Pline. Il paroit que câest une copie de celles qui e'toient sur le pave' du the'Ăątre de Pergame dont parle cet auteur. 5 Du mot latin patire , qui signifie battre , frapper, consolider, ce quâon faisoit Ă ces sortes de pave's pour les enfoncer dans lâenduit. Lo 34 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. ployĂ©s la premiĂšre fois pour le temple de Jupiter , au Capitole, au commencement de la troisiĂšm© » guerre punique. Quoique les pavĂ©s fussent dĂ©jĂ trĂšs-communs Ă Rome avant la guerre que nous D eĂ»mes contre les Balaves et les Teutons, on Ă©loit dĂ©jĂ trĂšs-recherchĂ© alors pour les rendre agrĂ©a- blĂ©s ; mais on voit par ce que dit Lucilianus , que ces pavĂ©s Ă©loient faits en mosaĂŻque. Nous » devons encore aux Grecs lâinvention des plates-formes qui se font au-dessus des maisons ; ils » avoient coutume de couvrir ainsi les leurs. Ce moyen rĂ©ussit Ă merveille et convient beaucoup » dans les pays chauds ; mais il est rempli dâinconvĂ©nients dans les pays oĂč il neige beaucoup pen- > dant lâhiver. Pour bien faire ces plaies-formes , il faut, avant tout, faire un double plancher dâais, n les uns couchĂ©s de long, et les autres de travers, et bien clouer ces ais Ă leurs extrĂ©mitĂ©s , crainte » quâils ne se dĂ©jetlent et ne se tordent. Puis il faut prendre les deux tiers de plĂątre ou de moĂ«lon > de pierres nouvellement brisĂ©es ; y ajouter un tiers de tuileaux concassĂ©s et pulvĂ©risĂ©s ; on joindra » Ă tout cela la cinquiĂšme partie de chaux ensuite on fera une couche de ce ciment, qui aura » la hauteur dâun pied et quâil faudra battre trĂšs-fort avec la hie , pour bien lâentasser. Cela fait, » on Ă©tend par-dessus* le noyau, qui est une autre couche de ciment , de lâĂ©paisseur de six pouces, » sur laquelle on place, les grands carreaux de pierres plates , qui ont au moins deux pouces dâĂ©pais- seur , et quâil faut enfoncer Ă la profondeur dâun doigt au moins dans celle derniĂšre couche de p ciment. Pour leur donner la pente nĂ©cessaire , on doit avoir soin de hausser le niveau de deux » doigts de dix pieds en dix pieds. AprĂšs cela, il faut lâapplanif , ĂŽter lâĂ©cume du mortier, et le n rendre bien uni avec le polissoir. On doit avoir eu la plus grande attention de faire le plancher de bon bois de chĂȘne , dont les ais ne soient pas dans le cas de tordre car ils gĂąteraient tout lâouvrage. Pour Ă©viter cet inconvĂ©nient, on a trouvĂ© quâil Ă©toit bon de les couvrir de fougĂšre n ou de paille , pour empĂȘcher que la chaux nây pĂ©nĂštre trop tĂŽt. 11 faut aussi de toute nĂ©cessitĂ© » les couvrir dâun lit de cailloux ronds. On emploie les mĂȘmes procĂ©dĂ©s pour les pavĂ©s faits en n arĂȘtes de poissons 1 . D Je ne veux cependant pas publier de parler dâunĂ© espĂšce de pavĂ© trĂšs-joli, employĂ© par les Grecs aprĂšs avoir bien battu et foulĂ© la place quâils veulent paver , ils Ă©tendent dessus un » lit de tuileaux concassĂ©s, sur lequel ils jettent une couche fort Ă©paisse de charbons pilĂ©s; puis ils n lui donnent le dernier ciment, qui est un mortier fait de chaux , de sable et de cendre enfin » ils mettent par-dessus , avec le niveau, lâĂ©querre et la rĂšgle, des carreaux de pierre, qui ont » un demi - pied de large ; ils prĂ©tendent que câest le vrai pavĂ© quâon emploie Ă Pise ; en effet, D quand le polissoir a passĂ© dessus , il semble que tout ce pavĂ© soit noir. Quant aux pavĂ©s Ă la » mosaĂŻque , il paraĂźt quâon commença Ă les employer du temps de Sylla , qui fit paver, de petites d piĂšces rapportĂ©es Ă la mosaĂŻque , le temple de la fortune Ă PrĂ©nesie ; on a portĂ© la recherche » pour les pavĂ©s jusquâĂ faire des pavĂ©s de verre 2 . Une partie de ce pavĂ© en mosaĂŻque , qui Ă©toit dans le temple de la fortune Ă Preneste , aujourdâhui Palestrine , se conserve Ă Rome dans le palais Barberini , cpii appartient au prince de Pales- trine , oĂč on lây a fait conduire aprĂšs lâavoir enlevĂ© on regarde cette mosaĂŻque comme un des plus beaux monumens de lâantiquitĂ©. Elle est composĂ©e de petits fragmens de marbre ; on y voit plusieurs figures dâanimaux et de plantes ; une tente avec des soldats, une galĂšre , des pretres qui 2 Pline. Hist. Nat. Liv. XXXVI, Chap. 26. S 1 O pus spicata testacea , forment un chĆur de musique , des personnages occupĂ©s Ă des travaux rustiques , des tours , des obĂ©lisques , des temples , des cabanes et des barques. On voit que Pline a entiĂšrement tirĂ© de Yilruve tout ce quâil dit sur la construction des pavĂ©s ;si ce nâest quâil rapporte lâĂ©poque de lâinvention de plusieurs de ces pavĂ©s , ou plutĂŽt le temps ou lâon en a introduit lâusage Ă Home. Dans tout ce chapitre de Yitruve , on voit clairement quâil lâa entiĂšrement consacrĂ© Ă traiter des diffĂ©rens pavĂ©s , et quâil nâa pas voulu parler dâautre chose. On ne peut donc douter que Je mot ' rucleratio quâil emploie , nâindique particuliĂšrement cet enduit qui se faisoit sous les pavĂ©s , et non pas celui qui se faisoit sur les murs, comme Perrault semble lâavoir compris , suivant ce quâil dit ^dans la premiĂšre note quâil a mise au commencement de ce chapitre. Ce seroit plutĂŽt le mot expo- litiones qui comprendroit lâun et lâautre des enduits. X CHAPITRE'! I. Comment on doit prĂ©parer la chaux pour faire le stuc. AuprĂšs avoir soigneusement examinĂ© tout ce qui concerne les pavĂ©s , je vais indiquer de quelle maniĂšre on doit traiter les ouvrages en sluc. Le principal est de choisir les meilleures pierres possibles, pour faire la chaux * et de laisser dĂ©tremper celle-ci long-temps axant de lâemployer ; alin que les morceaux qui auront Ă©tĂ© moins cuits que les autres dans la fournaise , puissent avoir le loisir de sâimprĂ©gner , et de se dissoudre comme ceux-ci âą car si lâon employoit la chaux en sortant de la fournaise , sans la dĂ©tremper , il se formeroit sur lâouvrage des espĂšces de pustules , occasionnĂ©es par les petits morceaux qid sâĂ©teignent plus tard que le reste de la chaux ; ils rompent lâenduit et en gĂątent tout le poli. Pour connoĂźtre si la chaux est bien Ă©teinte ,~et suffisamment dĂ©trempĂ©e, il la faut dĂ©couper avec le hoyau, comme on fait le bois avec une cognĂ©e. Si le hoyau rencontre de petites pierres , câest une marque qu elle nâest pas encore bien Ă©teinte et si en le tirant dehors , le fer en sort clair et net, cela signifie que la chaux est maigre et pas assez abreuvĂ©e ; au lieu que si la chaux est grasse et assez gluante pour sâattacher au fer de cet outil, on sera assurĂ© qu elle est parfaitement dĂ©trempĂ©e. Alors il faut prĂ©parer les instrumens nĂ©cessaires pour enduire les voĂ»tes des chambres dont les planchers ne forment point un plafond horizontal. 3i6 LâARCHITECTURE DE VITRĂYE, RE MARQUE S. Par les mois albarium opus , on entend le stuc et toute espĂšce dâenduit de couleur blanche , quâon Ă©tend sur les murs pour les crĂ©pir en le polissant. Tectorium opus sont des termes plus gĂ©nĂ©raux , sous lesquels on comprend toute espĂšce dâenduits. Nous avons dĂ©jĂ observĂ© , dans nos remarques sur le 2, me chapitre du Y. ma livre , que albarium et album opus y ne pouvoient signifier le blanchissage qui se fait avec la brosse imbibĂ©e dâeau de chaux , comme Philander lâa cru ; mais quâil signifioit le stuc car premiĂšrement dans le blanchissage qui se fait avec lâeau de chaux , il ne peut survenir de ces espĂšces de pustules dont parle Vitruve , lorsquâil dit cum fuerit inducta habens latentes calculos 3 pustulas amittit. Secondement , dans le 2. me chapitre du V. me livre , il dit quâon droit des corniches avec ce quâil y nomme opĂ©rĂ© albario } ce que nous avons observĂ© alors. Finalement, on remarque quâen parlant des voĂ»tes, des Ă©tuves, dans le io. me chapitre du V. me livre , il dit primum testa cum calce trullissetur , deinde opĂ©rĂ© albario , sive tectorio poliatur ce qui fait clairement* voir que cet opĂ©rĂ© albario Ă©toit une matiĂšre qui avoit quelque consistance , câest-Ă -dire que câĂ©toit un enduit propre Ă couvrir la premiĂšre^couche qui Ă©toit faite avec des briques concassĂ©es, dont celui-ci devoit remplir toutes les fentes et cavitĂ©s. 11 seroit difficile de connoĂźtre en quoi cet enduit diffĂ©roit de celui nommĂ© marmoratum. Il se peut que ces mots Ă©toient synonymes et quâils signifioient tous deux du stuc Ă moins que marmoratum ne signifiĂąt proprement le stuc qui se faisoit avec la poudre de marbre ; et albarium opus y celui qui se faisoit avec le plĂątre. Usus gypsi in albariis , dit Plin. , Liv. XXXVI, Chap. 5 g. ĂS,1 s creva i, o iS, 13 Lâoutil dont les anciens se servoient pour prĂ©parer le mortier , et que Vitruve nomme ascia , nâest autre chose que le hoyau , dont nous nous servons encore aujourdâhui, pour le mĂȘme usage; comme lâa trĂšs-bien dĂ©montrĂ© M. le chanoine Mozzocchi dans son traitĂ© de dedicatione sub as- cia , imprimĂ© Ă Naples en 1739 , particuliĂšrement dans la note Ăź 52 , Ă la page lo 3 et suiv., oĂč il explique, avec une clartĂ© et une Ă©rudition admirable, les diffĂ©rens enduits dont les anciens se servoient. j'i rete I te Les anciens faisoient les couvertures ou plafonds de leurs chambres de deux maniĂšres les unes Ă©toient voĂ»tĂ©es, et se nommoient camerĂŠ et concamerationes. Les autres avoient des plafonds horizontaux , faits en bois , et se nommoient lacunaria et contignationes. Comme il nây avoit que les plafonds voĂ»tĂ©s qui Ă©toient couverts dâenduit, et que ceux faits en bois ne lâĂ©toient pas , voilĂ pourquoi Vitruve dit Ă la fin de ce chapitre, quâon prĂ©parera les inslrumens nĂ©cessaires pour appliquer le stuc sur les voĂ»tes des chambres , dont les planchers ne formeront pas des plafonds horizontaux H W LIVRE VII, C h a p, ni. 3i 7 CHAPITRE III. Des Enduits. C^uand on veut former une voĂ»te au-dessus dâune chambre , voici comme on doit la faire ĂŽn place parallĂšlement des soliveaux . Ă la distance de deux pieds les uns des autres ; les meilleurs sont ceux faits de bois de cyprĂšs , parce que le sapin se corrompt trop vite. On dispose ces soliveaux en forme de cintre , au moyen des liens quâon fait tenir en les attachant avec des doux de fer , quâon enfonce fortement dans le plancher , ou dans le toit. On doit faire aussi les liens dâun bois qui ne soit pas sujet Ă se gĂąter par le temps , la vermoulure, et l'humiditĂ©. Il faut employer le buis, le genĂ©vrier , lâolivier , lâyeuse , le cyprĂšs, et autres bois semblables , hormis le chĂȘne commun, qui est trop sujet Ă se tordre , ce qui occasionne des crevasses dans tous les ouvrages oĂč lâon sâen sert. AprĂšs avoir arrĂȘtĂ© les soliveaux , on y attache , avec des cordes faites de joncs dâEspagne , des cannes Grecques , battues et Ă©cachĂ©es , afin quâon puisse aisĂ©ment les plier - selon la courbure de la voĂ»tĂ©. On Ă©tendra , par - dessus la voĂ»te , une couche de chaux mĂȘlĂ©e avec du sable, pour retenir lâeau qui pourroit tomber des planchers ou des toits. Quand on nâa pas assez de cannes grecques , on prend de petits joncs de marais quâon lie ensemble avec des cordes faites de mĂȘmes joncs pour en faire des fascines d une longueur convenable et de la grosseur la plus Ă©gale quâon pourra , en observant de laisser au moins la distance de deux pieds entre chaque lien. On attache ces fascines, comnje on vient de le dire , avec des cordes faites de joncs dâEspagne, en les nouant sur dçs chevilles de bois fichĂ©es dans les soliveaux. Tout le reste se fait comme on la dit plus haut. Les voĂ»tes Ă©tant ainsi prĂ©parĂ©es , on commence Ă les crĂ©pir par dessous, avec le premier enduit , composĂ© de chaux et de gravier ; on l Ă©galise ensuite avec du mortier fait de chaux et de sable; et on les polit*enfin avec une composition de chaux et de craie, ou de marbre. Les voĂ»tes Ă©tant polies , on fera , Ă leur naissance , des corniches aussi lĂ©gĂšres quâil sera possible ; le poids de celles qui sont massives 3i8 LâARCHITECTURE DE Y I T R U V E. occasionne trop souvent leur chĂ»te. Il ne faut pas mĂȘler de plĂątre dans leur composition ; il ne doit y avoir que du marbre rĂ©duit en poudre , crainte que lâouvrage ne se sĂšche inĂ©galement car le plĂątre se sĂšche et sâendurcit plus vite que le marbre. Nous ne devons pas imiter non plus , dans nos plafonds , les corniches saillantes des anciens ; leur poids les rend trop dangereuses. Nous avons deux sortes de corniches ; les unes unies , et les autres taillĂ©es de culpture. Dans les places oĂč lâon fait du feu , et oĂč lâon allume beaucoup de lumiĂšres , on doit les faire unies , pour quâon puisse essuyer aisĂ©ment la suie qui sây attache. Mais dans les apparlemens dâĂ©tĂ© et dans les exĂšdres i , oĂč rien ne produit de la fumĂ©e ou de la suie , on les peut faire taillĂ©es. La plus grande beautĂ© de ces sortes dâouvrages consiste sur-tout dans leur extrĂȘme blancheur. Il faut donc Ă©viter que la moindre fumĂ©e , mĂȘme celle des appartenons voisins , ne viennent les souiller. AprĂšs avoir achevĂ© ces corniches , il faudra jeter , sur les murailles , un enduit composĂ© de chaux et de gravier , quâon fera le plus rude quâil sera possible ; et avant que cet enduit ne soit tout Ă fait sec , on aura soin d Ă©baucher les moulures avec le mortier de chaux et de sable , en traçant celles qui traversent avec la rĂšgle et le niveau; celles qui montent avec lâaplomb , et les angles avec l'Ă©querre , alin quâelles se rĂ©pondent exactement. Les encadremens faits de cette maniĂšre , embellissent beaucoup les peintures qui sont sur lâenduit. A mesure que lâenduit sĂ©chera , on Ă©tendra une seconde et une troisiĂšme couche ; plus ces couches seront Ă©paisses, plus lâenduit sera solide et subsistera long-temps. Lorsquâon aura appliquĂ© trois couches de mortier sur le premier enduit, on Ă©tendra sur celles-ci , celles qui sont faites avec la poudre de marbre ; ce stuc doit ĂȘtre tellement corroyĂ© et pĂ©tri , quâil ne sâattache pas Ă la truelle ; il faut que son fer sâen retire bien net. On mettra sur cette premiĂšre couche de stuc, composĂ©e de poudre de marbre , Ă gros grains , avant qu elle soit sĂšche , une seconde couche dont le grain sera plus fin. AprĂšs avoir rendu celle-ci bien unie , on Ă©tendra la troisiĂšme composĂ©e dâune poudre de marbre trĂšs-fine. Les murs Ă©tant ainsi couverts de trois couches de mortier de sable , et dâautant de celles de sluç , ils ne seront sujets ni Ă se fendre ni Ă se gĂąter dâaucune maniĂšre. Si ces couches sont bien battues et repoussĂ©es , et ensuite bien polies , la blancheur et la duretĂ© du marbre rendront les couleurs quâon couchera dessus , et qui sâimbiberont dedans , on ne i Nous avons vu que câĂ©toit des salles oĂč lâon se rĂ©unissoit pour y faire la conversation. LIVRE VII, C h A r. in. 3 i9 peut pas plus vives et trĂšs-Ă©clatantes. Les couleurs quâon applique Ă fresque sur le stuc., ne se ternissent pas, et conservent toujours leur Ă©clat. La chaux ayant perdu toute son humiditĂ© dans la fournaise , devient aride et poreuse ; ce qui fait qu elle sâimprĂ©gne. AussitĂŽt des couleurs et autres matiĂšres qu elle touche , sâamalgament avec elles ; et de ces matiĂšres premiĂšres, qui se communiquent leurs diverses qualitĂ©s , il se forme un corps solide , qui, en sĂ©chant, conserve toutes celles des principes qui le composent. Tellement que les couleurs quâon applique sur un enduit bien prĂ©parĂ© , ne se ternissent jamais en vieillissant, et ne sâeffacent mĂȘme pas , quand on les lave, Ă moins qu on ne les eĂ»t appliquĂ©es sur le stuc quand il Ă©toit dĂ©jĂ trop sec et lâenduit fait sur le mur, dâaprĂšs les rĂšgles que nous venons de prescrire, sera solide , brillant et de longue durĂ©e. Au lieu que si lâon ne mettoit quâune couche de mortier de sable et une de marbre , ce mince enduit se romproit aisĂ©ment, et ne pourroit jamais, Ă cause de son peu d Ă©paisseur , recevoir un poli bien brillant. De mĂȘme un miroir fait dâune lame dâargent trop dĂ©liĂ©e, reluit foiblement, et rend les images dâune maniĂšre incertaine au contraire sâil est fort solide , il sera trĂšs-clair et reprĂ©sentera les images distinctement, parce quâil aura pu recevoir le plus beau poli. Ainsi les enduits qui sont minces , sont sujets Ă se gerser , et perdent incontinent tout leur lustre tandis que ceux, que plusieurs couches de mortier , de sable et de marbre, ont rendus assez Ă©pais pour recevoir un beau poli , Ă force dâĂȘtre bien repoussĂ©s et battus , demeurent si luisans , quâon peut toujours sây voir comme dans un miroir. Les ouvrages des stucaleurs grecs sont extrĂȘmement durs , parce quâoutre les moyens que nous venons dâindiquer , ils font encore battre avec des bĂątons , et corroyer par un nombre d hommes suffisant, le sable et la chaux mĂȘlĂ©s ensemble, dans un grand mortier , et nĂ© lâemploient quâaprĂšs lâavoir bien prĂ©parĂ©. Il y en a aussi plusieurs parmi eux qui scient sur de vieux murs, des morceaux dâenduit, et sâen servent au lieu de brique , pour former les reliefs des moulures autour des encadremens. t Les enduits quâon fait sur des cloisons de bois exigent dâautres prĂ©cautions les piĂšces montantes , et celles qui traversent, font nĂ©cessairement fendre lâenduit , parce quâĂ©tant humectĂ©es, lorsquâon les couvre de terre grasse , elles se retirent en sĂ©chant. Voici comme il faut faire pour Ă©viter cet inconvĂ©nient quand la cloison sera couverte de terre grasse, on attachera sur toute son Ă©tendue , avec des clous Ă tĂȘte, des cannes Ă cĂŽtĂ© les unes des autres, sur lesquelles on mettra de la terre grasse, 320 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. et ensuite un autre rang de cannes qui seront droites , si lâon a mis les premiĂšres en travers ; on enduira, comme on lâa dit 'tout Ă lâheure , dâabord avec le mortier de sable , et aprĂšs, avec le stuc. Ce double rang de cannes posĂ©es en sens contraire les unes des autres , et arretĂ©es par tout, empĂȘchera lâouvrage de se rompre et de se fendre. REMARQUES. Il faut remarquer avant tout, que le revĂȘtement des murs de grands Ă©difices publics , chez, les anciens, se faisoit avec le mĂȘme soin et la mĂȘme propretĂ© , soit quâon voulĂ»t les enduire ou non jâen ai vu plusieurs dont lâenduit Ă©toit tombĂ© , et la muraille paroissoit aussi propre que si elle avoit Ă©tĂ© faite pour rester Ă nud. Lâenduit des murailles se faisoit avec beaucoup plus de soin quâon ne le fait aujourdâhui car on en mettoit jusquâĂ sept couches diffĂ©rentes, comme nous venons de le voir. Appliquer le premier enduit sâappeloit trullisare le mortier quâon employoit pour cela , Ă©toit composĂ© de chaux mĂȘlĂ©e de cailloux, ou de briques concassĂ©es. Appliquer le second sâappeloit ctrenct dirigere. Celui-lĂ se faisoit avec de la chaux- mĂȘlĂ©e de sable. ExceptĂ© pour les endroits humides ; alors on y mĂȘloit de la tuile pilĂ©e , et il ressembloit au premier. Appliquer le troisiĂšme , destinĂ© Ă recevoir un plus beau lustre que les autres , sâappeloit creta aut marmora polire y il Ă©toit composĂ© de chaux , ou de chaux mĂȘlĂ©e avec du sable , ou de la poudre de marbre , ou de plĂątre ou dâautres matĂ©riaux semblables. Câest ce que nous nommons le stuc. Les anciens employoient souvent celui composĂ© avec le plĂątre , comme nous faisons encore aujourdâhui , câest-Ă -dire avec le gypse ou sulfate de chaux , qui est une substance minĂ©rale composĂ©e de chaux et dâacide sulfurique et appelĂ©e pierre Ă plĂątre. Cette substance se trouve abondamment dans plusieurs endroits de lâItalie et de la France la montagne de Montmartre prĂšs de Paris en est toute formĂ©e. Les stucateurs , pour sâen servir , lui donnent une demi-cuisson j ils la pulvĂ©risent ensuite, et en forment un mortier , en lâimprĂ©gnant dâeau. Il est Ă©tonnant, comme il sâendurcit vite , et il nâest plus possible, aprĂšs cela , de lâamollir en le mouillant. Comme ce stuc sĂšche bien plus vite que celui composĂ© de poudre de marbre , Yitruve recommande de ne les pas mĂȘler ensemble , parce quâalors il sây formeroit certainement des crevasses. On mettoit trois couches de ce stuc composĂ© de marbre pulvĂ©risĂ© , sur les trois autres faites avec le mortier de sable ou de gravier. La premiĂšre de Ces couches avoit le grain beaucoup plus gros que celui de la seconde, et le grain de la troisiĂšme, qui Ă©toit destinĂ©e Ă recevoir le plus beau poli , nâĂ©toit quâune poudre extrĂȘmement fine, comme Yitruve le dit dans ce chapitre et le confirme dans le 6.* de ce livre, oĂč il sâexprime en ces termes eĂŠ autern excretĂŠ cissulĆ tusoe tribus generibus seponnntur et quĂŠ pars grandior fuerit quemadmodum suprĂ scriptum est , arenato primĂčm cum calce inducitur, deinde sequens , ac tertio quĂŠ subtilior fuerit , etc. Câest-Ă -dire , il y a trois sortes de poudre de marbre. La plus grosse, comme on lâa dit, sert Ă faire la premiĂšre couche que lâon met sur le mortier de chaux et de sable j la moyenne se met ensuite , et la plus dĂ©liĂ©e se met la derniĂšre , etc. » Câest la seule quâon emploie aujourdâhui ; les stucateurs lâappliquent immĂ©diatement sur lâenduit composĂ© de sable et de chaux. Cette maniĂšre est bien plus expĂ©ditive que celle des anciens ; mais notre stuc nâa guĂšre la soliditĂ© du leur. Chacune des sept couches quâils met- toient, LIVRE VII, C h a p. ni. 3 2I toiellt, Ă©toient bien battues et bien repoussĂ©es, et le tout Ă©toit enfin couvert de marbre pilĂ© et passĂ© au tamis. Un pareil revĂȘtement nâavoit cependant pas au-delĂ ,dâun doigt dâĂ©paisseur. Les murs enduits de celte sorte acquĂ©roient une duretĂ© , une blancheur et un poli qui les rendoient luisans comme des miroirs ; jâai vu des dessus de table faits avec des morceaux dâenduit quâon avoit sciĂ©s de ces murs. Il nâest pas mĂȘme possible dâabattre le revĂȘtement des murs et des piliers de ce quâon appelle le sette sale des bains de Titus Ă Rome , et de la piscina mirabile proche de Bayes -, le revĂȘtement en Ă©tant aussi dur que le fer, et aussi poli quâun miroir. Aux bĂątimens communs , et aux tombeaux, dont le cĂŽtĂ© intĂ©rieur du mur nâest pas fait avec la mĂȘme propretĂ© , le revĂȘtement a deux doigts dâĂ©paisseur. Vitruve , en enseignant comme on doit enduire lâintĂ©rieur des Ă©difices , suit le mĂȘme ordre quâil a suivi dĂšs le commencement de son ouvrage j câest - Ă - dire, celui que suit lâouvrier qui construit lâĂ©difice. Il a commencĂ© par enseigner comme on devoit faire les fondemeus, ensuite comme on devoit poser les stylobates , les bases, les colonnes , leurs chapiteaux , les enlablemens , etc. , parce que lorsquâon Ă©lĂšve un bĂątiment, câest par le bas que lâon commence. Mais pour enduire lâintĂ©rieur dâune salle, câest au contraire par le haut quâon commence. Aussi Vitruve enseigne-t-il dâabord comme on doit enduire les plafonds. On a dĂ©jĂ parlĂ© des plafonds horisontaux dont la plupart avoit des comparli- mens ou panneaux enfoncĂ©s, comme est aujourdâhui le plafond de Sainte-Marie-Majeure, Ă Rome, qui est dorĂ© comme lâĂ©toient beaucoup de plafonds des anciens , ce que jâai observĂ© entrâautres dans les ruines du palais des empereurs Ă Rome, oĂč lâor sâest conservĂ© malgrĂ© lâhumiditĂ© du lieu. Dans ce chapitre , Vitruve enseigne comment on doit former la voĂ»te dâun plafond. On place , dit - il, parallĂšlement , directi des soliveaux Ă la distance de deux pieds les uns des autres. Le mot directi quâil emploie ici , en parlant dâune voĂ»te , ne peut signifier droit ou direct il signifie certainement parallĂšle , comme le texte mĂȘme nous le fait comprendre clairement peu aprĂšs en ces termes. Hique asseres cum ad formant circinationis fuerint distributi , câest-Ă -dire quâon doit distribuer ces mĂȘmes soliveaux , en forme de cintre. Galiani trouve que Perrault en entendant par ad formam circinationis seulement une voĂ»te en demi-cercle, a donnĂ© Ă ces mots une interprĂ©tation trop resserrĂ©e. 11 croit que , par ces expressions , lâauteur entend en gĂ©nĂ©ral toute spĂšce de cintre. DâaprĂšs cela , on voit quâon disposoit ces soliveaux en forme de cintre , en les attachant avec des liens catenas quâonj faisoit tenir avec des clous de fer, enfoncĂ©s fortement dans le plancher ou dans le toit. Vitruve nomme catenas , ce que nos charpentiers appellent des liens. Ce sont des morceaux de bois qui ont un tenon Ă chaque bout, et qui, Ă©tant chevillĂ©s, entretiennent la charpente en tirant ; de mĂȘme que les esseliĂšres et les jambettes entretiennent en rĂ©sistant ; ils servent ici Ă attacher les soliveaux aux solives du plancher, ou aux chevrons du toit. Quoique lâauteur ne le dise pas expressĂ©ment, il est aisĂ© de comprendre que ces liens doivent ĂȘtre de diffĂ©rentes grandeurs, conformes Ă la distance qui se trouve entre la courbe du cintre et le plancher ou le toit. Vitruve continue, en disant les soliveaux Ă©tant arrĂȘtĂ©s, on y attachera avec des cordes faites de joncs dâEspagne , des cannes grecques, battues et Ă©cachĂ©es , afin quâon puisse aisĂ©ment les plier selon la courbure de la voĂ»te. Si lâon nâa pas assez, ajoute-t-il plus bas , des cannes grecques, on 322 LâARCHITECTURE DE VITRTJVE. prendra des petits joncs de marais quâon liera ensemble pour en faire des fascines dâune longueur convenable , et dâune grosseur la plus Ă©gale quâil se pourra , etc. Le contour ou cintre de la voĂ»te se faisoit donc avec des cannes quâon avoit soin dâĂ©cacher , pour les plier Ă volontĂ© , ou avec des fascines faites de joncs de marais , quâon lioil sur les soliveaux avec des cordes faites avec le sparte ou joncs d^Espagne. Par canne grecque , lâauteur entend, certainement la grosse canne qui croĂźt abondamment en GrĂšce et en Italie , sur tout aux environs de Rome. Cette canne est aussi connue en France ; mais elle ne croĂźt ni aussi haute ni aussi grosse dans les provinces du nord. Le jonc de marais quâil veut quâon emploie en dĂ©faut de cannes, est connu de tout le monde, puisquâil croĂźt dans toute lâEurope ; il ressemble Ă la canne , mais est beaucoup plus mince et plus petit , puisque la canne a prĂšs dâun pouce de diamĂštre et souvent 25 Ă 3o pieds de hauteur. Perrault et Balde , en parlant de ces fascines de joncs , voudroient quâau lieu de mataxĆ tomicĆ , on lĂ»t maxatĆ tomicĆ , et malgrĂ© que tous les manuscrits fussent dâaccord sur ce passage, Phi- ĂŻander lâavoit dĂ©jĂ corrigĂ©, et vouloit quâon lĂ»t mataxĆ et tomicĆ. Galiani , que nous avons suivi , a trouvĂ© la vraie interprĂ©tation du texte sans y rien changer , en prenant le mot tomicĆ au gĂ©nitif, rĂ©gi par alligationibus ainsi par mectaxĆ il entend les fascines faites de joncs , et par tomicĆ , leurs liens faits du mĂȘme jonc. Le sens est donc que ces fascines mataxĆ , se lioient avec du jonc quâon avoit soin de tordre, temperentur alligationibus tomicĆ 9 etc. , en observant quâon dit tomica , Ć , et tomice , es. En Italie on cloue encore des cannes sur les plafonds et les cloisons pour appliquer lâenduit par dessus. Le sparte, ou jonc des montagnes dâEspagne, dont Yitruve veut quâon fasse les cordes qui doivent lier les cannes ou fascines aux solives , est trĂšs-connu. La GrĂšce , Rome , Carthage , lâEurope et lâAfrique, en ont fait un usage constant et journalier. Les anciens fabriquoient avec ce vĂ©gĂ©tal, non seulement des cordages , mais des nattes , des panniers , des chaussures , etc. Les marins nomment sparton un cordage fait avec ce jonc. M. r de Gavoty, de Berthe , qui a rĂ©sidĂ© long-temps en Espagne , avoit Ă©tabli , il y a quelques annĂ©es , Ă Paris, une manufacture de sparte , dans laquelle on exĂ©cutoit presque tous les ouvrages qui se font dans le pays mĂȘme oĂč celte plante croĂźt. Il se fait Ă Paris une grande consommation de tapis de sparterie , auxquels on donne diffĂ©rentes couleurs; ils sont communĂ©ment verts, et imitent le gazon'; câest sans doute ce qui a fait imaginer dâen envelopper les pots de Heurs quâon place dans les apparlemens sur les consoles et les cheminĂ©es. La dĂ©coration des chambres que jâai vues dans les ruines des bains de Titus Ă Rome , et de Pompeia prĂšs de Naples, ressemble parfaitement Ă ce que Vitruve nous dit dans ce chapitre. Sous la voĂ»te des chambres rĂšgne une petite corniche en stuc * qui sâavance en saillie de deux ou trois doigts ; elle est unie , ou bien ornĂ©e de feuillages. Cette corniche coupe la partie supĂ©rieure de / / LIVRE VII, C h a p. m. 3s3 la porta, laquelle , suivant les rĂšgles de l'architecture , doit avoir,trois cinquiĂšmes de la hauteur de la chambre j et de cette maniĂšre la chambre se trouve coupĂ©e en deux parties. La partie supĂ©rieure qui sert comme de frise Ă la partie dâen bas, est Ă celle-ci comme deux sont Ă trois. Lâespace aĂŒ-dessus et au-dessous de la corniche , est partagĂ© en compariimens ou panneaux , lesquels sont plus hauts que larges , et ont ordinairement la largeur de la porte , laquelle forme elle-mĂȘme un de ces compartimens ; il y en a dâautres plus petits , ronds ou carrĂ©s dans lesquels sont peints des figures , des paysages. Dans un de ces compartimens j long de deux pieds environ et haut de trois pouces , Ă©toient peints trĂšs en petit, dĂšs gladiateurs sur un fond noir. Le dessin des figures Ă©toit de la plus grande beautĂ©. Au-dessus de la corniche se trouve la mĂȘme division ; mais de maniĂšre cependant que les compartimens en sont plus larges que longs ; on y avoit aussi peint des paysages , des marines, ou sujets semblables. On voit une muraille divisĂ©e et dĂ©corĂ©e de cette maniĂšre dans la galerie des tableaux tirĂ©s dâHer- culanum , qui sont Ă Porlici. Câest un morceau dâenviron dix-huit pieds de long sur treize de large. Celte muraille a , comme nous lâavons dit , des panneaux au-dessous et au-dessus de la corniche , laquelle est enrichie de feuillage. Des trois compartimens dâen bas , celui du milieu est plus large que celui des deux cĂŽtĂ©s. Le premier est encadrĂ© en jaune, et les autres en rouge. Entre ces panneaux , on voit des paysages sur des fonds rouges ou jaunes. Ău-clessus de la corniche , il y a quatre autres panneaux , dont deux tombent sur le panneau du milieu dâen bas; sur lâun est reprĂ©sentĂ© un amas de mĂ©dailles sur une table , avec du papier , des tablettes , une Ă©criloire et une plume ; sur lâautre on voit des poissons et dâautres comestibles. Les anciens avoient deux maniĂšres de peindre sur les murs, lâune Ă fresque , udo tectorio , lâautre Ă sec , in cirido. La premiĂšre sâappelle Ă fresque , parce que lâon peint sur lâenduit fraĂźchement appliquĂ© , et lorsquâil, conserve encore toute son humiditĂ©. Les couleurs sont uniquement dĂ©trempĂ©es avec lâeau ou avec de lâeau de chaux ; celle-ci sert pour le blanc ; et, comme le dit trĂšs-bien lâauteur, celte peinture est la plus solide de toutes , et celle qui dure le plus long-temps , parce que les couleurs pĂ©nĂ©trant dans lâenduit , sâamalgament tellement avec lui quâelles ne font plus quâun mĂȘme corps. Au contraire les peintures Ă sec , câest-Ă -dire celles qui se font en appliquant les couleurs sur le mur lorsquâil est entiĂšrement sĂ©chĂ© , ne subsistent pas, long-temps , parce que ces couleurs ne pĂ©nĂštrent pas dans lâenduit, et restent seulement attachĂ©es Ă sa superficie , au moyen de la colle dans laquelle elles sont dĂ©trempĂ©es; la moindre humiditĂ© les ternit , ou les fait tomber. DâaprĂšs ce que dit le texte, les stucateurs Grecs faisoient des enduits beaucoup plus durs et plus solides que ceux des stucateurs Romains , parce quâils avoient soin de les fouler et corroyer davantage. Il paroĂźt aussi quâau lieu de brique, pour former le relief des moulures, ils employoient des morceaux dâenduits quâils enlevoient de dessus des vieux murs , en les sciant du moins câest ainsi que Galiani a interprĂ©tĂ© ce passage de Yitruve. Perrault , au contraire , a cru quâil a voulu donner une preuve de la duretĂ© des enduits faits par les Grecs, dont il venoit de parler ; câest pourquoi il a traduit ainsi Von se sert , dit-il , des morceaux dâenduits quâon arrache des vieilles mu - railles , peur en faire des tables , etc. » Barbaro, dâun autre cĂŽtĂ©, croit quâon arrachoit ce* LâARCHITECTURE DE VITRUYE. 34 morceaux dâenduits pour en former des panneaux sur lesquels on peignoit , aprĂšs les avoir incrustĂ©s dans les nouveaux murs. Lâerreur de ces deux interprĂštes vient de ce que lâun sâest persuadĂ© que le mot abacus signifioit une table , sans doute Ă manger ou Ă Ă©crire ; et lâautre , une table sur laquelle on pouvoit peindre. Galiani rĂ©fute ces deux opinions , et tient que le vrai sens de ce passage est, que les anciens Grecs tailloient hors des vieilles murailles des morceaux dâenduits en forme de brique, câest ainsi quâil interprĂšte ici le mot abacus , pour les employer dans les nouveaux murs, et en former le relief expressiones des moulures des encadremens speculorum . Nous voyons encore dans ce chapitre , comment les anciens appliquoient lâenduit sur les murs d cloisons formĂ©s par des entrelacs, dont il a parlĂ© dans le 8. e Chap. du II. 0 Liv. ; voyez la fig. de la IV. e planche et lâexplication qui est Ă cĂŽtĂ©. On cloue un double rang de cannes, lâun perpendiculaire , lâautre horisontal sur toute lâĂ©tendue de la cloison, et lâon applique lâenduit par-dessus. Câest encore ainsi quâon le pratique en Italie pour les cloisons. Vilruve dit quâon doit clouer les cannes avec des clous quâil nomme muscarii , câest-Ă -dire clous Ă mouches. Il est assez singulier que les clous quâon emploie encore aujourdâhui en Italie sâappellent muscarclini qui signifie la mĂȘme chose en italien. On les a probablement nommĂ©s ainsi, Ă cause de la ressemblance que les tĂȘtes de ces clous ont avec le corps de la mouche. CHAPITRE IV. Des Enduits qui se font dans les lieux humides . Jâai enseignĂ© la maniĂšre de faire les enduits dans les lieux qui sont secs ; je vais indiquer prĂ©sentement les moyens quâon doit employer pour les faire dans ceux qui sont humides , afin quâils durent long-temps sans se gĂąter. Dâabord on doit enduire le bas des appartenons qui sont au rez-de-chaussĂ©e , Ă la hauteur de trois pieds , avec un mortier composĂ© de chaux et de tuiles concassĂ©es, pour Ă©viter que cette partie de mur ne souffre de lâhumiditĂ© mais si lâhumiditĂ© y Ă©toit continuelle , il faudroit construire en dedans , Ă une distance suffisante du premier , un autre mur plus Ă©troit, laissant, entre les deux murs, un canal qui soit plus bas que le pavĂ© de lâappartement, et qui ait des ouvertures libres dans un lieu dĂ©couvert. Le petit mur Ă©tant Ă©levĂ© Ă hauteur doit avoir aussi des soupiraux car si 1 humiditĂ© ne sâĂ©couloit point par les conduits d'en bas , et ne se pouvoit Ă©vaporer par les soupiraux dâen haut , cette construction dâun nouveau mur ne lâempĂȘcheroit pas de nuire au bĂątiment que lâon construit. Cela Ă©tant achevĂ© , on Ă©tendra sur le petit mur* lâenduit fait de chaux et de tuiles concassĂ©es ; ensuite on le dressera avec le mortier de sable , et on polira avec le stuc. Lâemplacement ne permet-il pas dâĂ©lever ce petit u 0 f; j;b !r> jtfc b Ă0 u mi iicttr; M If J] Ăźifflt musĂ©um de Portici, on distingue parmi les tableaux de ce genre , celui qui reprĂ©sente lâexploit de ThĂ©sĂ©e en CrĂšte , vainqueur du Minautaure quâil a terrassĂ© Ă ses pieds ; autour de lui sont reprĂ©sentĂ©s quatre jeunes athĂ©niens ou athĂ©niennes qui semblent lui rendre grĂące de leur dĂ©livrance. Vilruve trouve souverainement ridicule quâon abandonne des genres de peintures aussi sages et aussi raisonnables qui nous rendent la vĂ©ritĂ© telle quâelle est , pour reprĂ©senter des fantaisies qui nâexistent pas , qui nâont jamais existĂ© et qui nâexisteront jamais. Câest ce genre que nous avons nommĂ© le grotesque , ou dessin arabesque. ' MalgrĂ© tout ce quâil dit , le goĂ»t pour ces sortes de peintures existoit avant lui 3 elles plaisoient de son temps , et il nâa pu persuader Ă la postĂ©ritĂ© de les rejeter ? en montrant combien elles sont ridicules. Comme je lâai dĂ©jĂ dit, beaucoup de peintures antiques , quâon a dĂ©couvertes , Ă©toient de ce genre. RaphaĂ«l a fait revivre ce goĂ»t qui subsiste encore aujourdâhui, sur-tout en Italie. La composition de ces dessins , fruits dâune imagination vive , doit naturellement plaire aux Italiens. CHAPITRE VI. Comment on doit prĂ©parer le marbre pour faire le stuc . rw\ A ous les pays ne produisent pas le mĂȘme marbre. Dans quelques endroits on le trouve par bloc , remplis de petits grains luisans et transparens comme du sel ; ce marbre pilĂ© et broyĂ© est celui qui convient le plus pour faire les enduits et les corniches. Dans bien des pays cependant on ne peut sâen procurer de semblable; on se sert alors des Ă©clats qui tombent de tous les marbres, lorsquâon les travaille ; on les pile dans un mortier de fer; ensuite on les sasse pour en faire trois sortes de poudre. Celle dont le grain sera le plus gros , aprĂšs lâavoir mĂȘlĂ©e avec de la chaux , servira, comme on lâa dĂ©jĂ dit, Ă faire la premiĂšre couche de lâenduit ; celle dâun grain plus fin sera pour la seconde couche ; et la plus dĂ©liĂ©e sera pour la troisiĂšme* On prĂ©pare ainsi toutes ces couches , et lâon polit bien lâenduit pour recevoir les couleurs , afin qu elles aient beaucoup dâĂ©clat voici les diffĂ©rentes espĂšces quâon emploie , et la maniĂšre de les prĂ©parer. \ĂŻrp jfit ^ ;iji f' H**P jljĂŻW» ji silices avec ! prem Ătnce/' I Jules Ă * pp° siseprtĂź ire,loL h» il h poit[ il prĂ©pi a I LIVRE VII, C h a p. vu. 333 REMARQUES. Outre le plĂątre , le sable et la chaux , les anciens faisaient aussi entrer la poudre de marbre dans la composition des enduits , comme on le fait encore aujourdâhui en Italie. Lâauteur remarque , Ă la fin du chapitre prĂ©cĂ©dent , en parlant des matĂ©riaux qui entrent dans cette composition , quâil a dĂ©jĂ parlĂ© de la chaux , par - consĂ©quent , que , dans le chapitre suivant , il traitera uniquement de la prĂ©paration du marbre. Il a effectivement traitĂ© de la chaux dans le' 5. me chapitre du II. iaet livre ; livre quâil a consacrĂ© en entier Ă expliquer les matĂ©riaux quâon emploie pour la construction des Ă©difices. Dans le prĂ©sent chapitre, il entend parler uniquement de la poudre de marbre quâon mĂȘle avec la chaux , au lieu de sable , pour faire les enduits car il ne parle en aucun endroit du marbre , ni de la maniĂšre de le tailler , Ă moins quâil ne lâait compris sous la dĂ©nomination gĂ©nĂ©rale de pierre de taille. La premiĂšre espĂšce de marbre dont il parle dans ce chapitre , et celle Ă laquelle il donne la prĂ©fĂ©rence, pour faire les enduits, câest le marbre blanc Ă gros grains, qui est mĂȘlĂ©, je particules brillantes , comme des grains de sel , et quâon appelle pour cela en Italie marmo sçtlino. Il y a grande apparence que câest celui que les anciens appeloient le marbre pentĂ©licien. ,Quand on ne peut se procurer de ce marbre , il dit quâon doit se servir des Ă©clats qui tombent des piĂšces de marbre , lorsquâon les taille , et les rĂ©duire en poudre dans un mortier de fer, pour les employer. Comme il ne donne la prĂ©fĂ©rence Ă aucune des autres espĂšces de marbre , il paroĂźt que lorsquâon ne pouvoit se procurer la premiĂšre espĂšce , dont il a parlĂ© , qui est toujours prĂ©fĂ©rable , les autre» Ă©tant prĂ©parĂ©es de la maniĂšre quâil a indiquĂ©e , elles sont toutes Ă©galement bonnes. CHAPITRE VIL - Des Couleurs naturelles. v Plusieurs couleurs sont des productions naturelles quâon trouve dans certains endroits dâoĂč on les tire de la terre beaucoup dâautres sont Iouvrage de lâart , compose'es de diffĂ©rentes choses quâon mĂȘle et quâon amalgame ensemble , pour qu elles produisent le mĂȘme effet que les couleurs naturelles, lorsquâon les emploie. Nous allons premiĂšrement faire connoĂźtre les couleurs naturelles qui se tirent de la terre. Parmi ces couleurs nous avons dâabord celle que les Grecs appellent ocre i. O» i Du mot cc%pĂŽq qui signifie pĂąle , parce que cette couleur est le jaune pĂąle. A 334 L â A II C H I TE CTĂŒ II E DE V I T R U Y E. Ăźa trouve dans beaucoup de pays , particuliĂšrement en Italie ; mais la meilleure se tiroit de lâAttique , oĂč il ne sâen trouve plus aujourdhui ; parce que quand on employoit beaucoup de monde pour extraire les mines dâargent qui sont Ă AthĂšnes, si dans les fouilles quâon faisoit en creusant des galeries souterraines, pour chercher ce minĂ©ral, on venoit Ă rencontrer quelques veines de cette terre jaune, on la suivoit et on lâextrayoit jusquâĂ la frn, comme si câeut Ă©tĂ© de lâargent ; aussi le sil i Ă©toiĂź alors en abondance , et lâon en faisoit les plus beaux ouvrages. Les terres rouges se tirent en abondance dans beaucoup dâendroits ; mais celle d'une excellente qualitĂ© est trĂšs-rare; on en trouve cependant dans le royaume de Pont, Ă Synope , en Egypte, en Espagne, dans les isles BalĂ©ares, comme aussi dans lâisle de Lemnos, dont le SĂ©nat et le peuple Romain ont laissĂ© les revenus aux AthĂ©niens. La couleur parĂŠtonienne 2 tire son nom du lieu oĂč on la trouve; la Meline 3 tire de mĂȘme le sien de lâisle de MĂ©los l une des cyclades oĂč on trouve ce minĂ©ral en abondance. La terre verte se trouve Ă©galement dans beaucoup dâendroits, mais la meilleure vient de Smyrne. Les Grecs lâappellent Theodation , Ă cause que ThĂ©o do- tus Ă©toit propriĂ©taire du fond oĂč lâon en trouva la premiĂšre fois. Lâorpiment que les Grecs appellent Arsenicon , se tire du royaume de Pont. On trouve des mines de Minium dans beaucoup dâendroits; mais la meilleure est aussi dans le royaume de Pont, prĂšs du fleuve Hypanis. Il y en a Ă©galement, dis-je , dans quelques autres endroits, comme entre les confins de la MagnĂ©sie , et le pays dâEphĂšse, dâoĂč on la tire toute prĂ©parĂ©e, tellement quâon nâa pas besoin de la broyer ni de la passer , puisquâelle est aussi fine que si on lâavoit broyĂ©e pendant long-temps. RE M ARQUE S. Lâauteur , comme nous venons de voir, distingue deux sortes de couleurs , savoir les couleurs naturelles , et les couleurs artificielles ; la seule diffĂ©rence qui existe entre ces deux espĂšces de couleurs , câest que dans les premiĂšres , le mĂ©lange des oxides minĂ©raux avec les parties terreuses sâest fait naturellement ; au lieu que dans les autres , câest lâart qui a imitĂ© ce mĂ©lange ; mais elles ne 6ont jamais aussi bien amalgamĂ©es ensemble que dans les premiĂšres. Dans ce chapitre et dans les deux suivans , Yilruve traite des couleurs naturelles , ou pour mieux dire, minĂ©rales. Dans le dixiĂšme, et ceux qui suivent, il traitera des couleurs artificielles. Ceux qui ĂŻ Sil, câest, ainsi quâon appeloit lâocre en latin. Voyez 3 Il paroit, suivant le mĂȘme auteur, que câĂ©toit aussi les remarques Ă la fin de ce chapitre. une espĂšce de blanc. Voyez nos remarques Ă la fin du a DâaprĂšs ce que dit Pline, il paroit que cette cou- chapitre, leur Ă©toit blanche, âą jpreniK I dans ; >DĂ 1 L chose U ijans 1 y est-il dit ; or , on sait que le minium artificiel se fait avec du blanc de cĂ©ruse en le brĂ»lant. Dans ma traduction jâai toujours rendu le mot sandaraca par le mot françois minium , et le mot latin minium par celui de cinabre. âą > âą âą * - l âą ' âą f Ji J âą * Celui de cinabre. Galiani observe que câest dâaprĂšs un passage de Pline quâil a avancĂ© que le cinnabaris des anciens Ă©toit ce que nous nommons le sang de dragon chose que Dupinet, ancien traducteur de Pline , avoit dĂ©jĂ remarquĂ©e long - temps avant lui. Sic enim appeĂźlant illi indici saniem draconis elisi eĂźephantorum morientium pondĂ©rĂ© permisto utriusque sanguine. Câest en parlant du cinnabaris que le naturaliste latin sâexprime ainsi. Yoici comme je traduis ct passage Il y en a qui appellent inde , le sang que rendent les dragons qui sont Ă©crasĂ©s par le poids des Ă©lĂ©phans qui tombent morts , aprĂšs quâils en ont sucĂ© le sang qui se trouve mĂȘlĂ© avee le leur. Dans le fait, ajoute Pline , il nây a pas de couleur qui approche plus, par sa vivacitĂ© , de la couleur du sang que le cinnabaris 3 appelĂ© prĂ©sentement sang de dragon 1. » Ce que dit ici Pline des dragons et des Ă©lĂ©phans , est une fable probablement accrĂ©ditĂ©e de son temps. On sait que le sang de dragon est une rĂ©sine qui dĂ©coule dâune plante de la famille des aloĂ«s. Mais en faisant abstraction de celte fable , nous voyons clairement, par ce que dit Pline , que le cinnabaris des anciens nâĂ©loit pas notre cinabre , et que câĂ©loit vraiment la rĂ©sine appelĂ©e le sang de dragon. > Le cinabre , dont parle Yitruâve dans ce chapitre , est le cinabre naturel , ou la mine de mercure , qui nâest autre chose quâun mercure naturellement minĂ©ralisĂ© avec le souffre 3 il nous dit quâon a trouvĂ© la premiĂšre de ces mines auprĂšs dâEphĂšse , et nous apprend quels procĂ©dĂ©s on employoit de son temps pour en tirer le mercure. Nous voyons quâon avoit dĂ©jĂ remarquĂ© alors, combien ce minĂ©ral se volalilisoit aisĂ©ment par la chaleur , puisquâon employoit ce moyen pour lâextraire hors des matiĂšres hĂ©tĂ©rogĂšnes avec lesquelles il est mĂȘlĂ© , quand on le trouve dans la terre. On connois» soit aussi la propriĂ©tĂ© quâil a de sâattacher fortement, et mĂȘme de pĂ©nĂ©trer plusieurs mĂ©taux, puisque Vitruve observe que , sans lui , on ne peut dorer ni sur lâargent , ni sur le cuivre. Plusieurs statues anciennes de bronze , furent dorĂ©es , comme on le voit encore par lâor qui sâest conservĂ© sur la statue Ă©questre de Marc-AurĂšle qui est au capitole sur les quatre chevaux de Yenisc sur lâHercule du capitole et les dĂ©bris des quatre chevaux et du char , placĂ©s au fronton du théùtre dâHerculanum. 1 Pline. Liv. XXXIII , Chap. 38. f omĂŒ B Wtt ,.d $ LIVRE VII, C h A. p. ix. 339 Câest sur la propriĂ©tĂ© que le mercure a , de sâattacher aux mĂ©taux , quâest fondĂ© lâart de dorer dâor moulu , qui ne consiste quâĂ amalgamer lâor avec le mercure , Ă appliquer cet amalgame sur de lâargent , ou sur du cuivre jaune , et ensuite Ă mettre la piĂšce au feu. Le feu fait Ă©vaporer le mercure , et lâor reste Ă©troitement attachĂ© Ă lâargent. Mais , dâaprĂšs ce que dit Pline , il paroĂźt que les anciens nâemployoient pas tolit-Ă -fait ce moyen. Us doroient avec des feuilles, aprĂšs avoir enduit le mĂ©tal de mercure , ou aprĂšs lâavoir avivĂ© avec un outil 1. Nous voyons encore , dans ce chapitre , que les anciens avoient dĂ©jĂ remarquĂ© le rapport de la gravitĂ© dâun corps , Ă celle dâun autre , de mĂȘme volume , ce que les physiciens nomment gravitĂ© spĂ©cifique, puisque Yilruve observe quâune pierre du poids de cent livres surnagera au-dessus du mercure, tandis quâun grain dâor du poids dâun scrupule , sây enfoncera incontinent et cela, parce que lâor seul se trouve avoir une gravitĂ© spĂ©cifique supĂ©rieure Ă celle du mercure. Pline observe la mĂȘme chose 2. CHAPITRE IX. De la prĂ©paration du Cinabre. R evenons prĂ©sentement Ă la prĂ©paration du cinabre. Quand les mottes sont bien sĂ©chĂ©es , on les pile avec des marteaux de fer et on les broyĂ© ; ensuite par plusieurs lotions et codions , on en retire la couleur. Ces extractions , et sur-tout celle du vif-argent, font perdre au-cinabre une partie de la force quâil auroit naturellement; ce qui fait que cette couleur est trĂšs-dĂ©licate et se ternit aisĂ©ment, Ă moins quâon ne lâemploie pour peindre sur les murs des chambres fermĂ©es et couvertes car dans les endroits ouverts tels que les pĂ©ristyles, les exĂšdres *, et autres semblables , oĂč les rayons lumineux du soleil et de la lune peuvent pĂ©nĂ©trer , les parties colorĂ©es qui en sont atteintes , perdent leur Ă©clat et se noircissent ; on a plusieurs fois Ă©prouvĂ© cet inconvĂ©nient ; entrâautres , le secrĂ©taire Fabrius , qui voulant dĂ©corer, avec toute 1 Ă©lĂ©gance possible, la maison quâil possĂ©doit sur le mont Aventin, lit peindre , en cinabre , tous les murs des galeries. Au bout de trente jours tout fut gĂątĂ© la couleur changea en plusieurs endroits , ce qui le contraignit de les faire peindre une seconde fois avec dâautres couleurs. 1 Pline. Lir. XXXIII, Chap. 3a. a Idem. * Nous avons vu dans le 5 . rae Chap. du Liv. YI, que les exĂšdres Ă©toient des lieux dâassemblĂ©es dont le devant Ă©toit ouvert. 43 . L' f ARCHITECTURE DE VITRUVE, 34 o Des personnes plus adroites ont trouvĂ© le moyen de conserver au cinabre sa belle couleur ; voici comment quand le mur est entiĂšrement peint et la couleur parfaitement sĂšche , on Ă©tend par-dessus , avec une brosse , une couche de cire punique fondue dans un peu d huile ensuite , avec un rĂ©chaud plein de charbon allumĂ© , quâon tient fort prĂšs de la muraille , on rĂ©chauffe ainsi que la cire , afin de liquĂ©fier celle-ci. AprĂšs cela , on lâunit par-tout en la polissant avec des linges bien nets , comme quand .on cire des statues de marbre. Les grecs appellent cette opĂ©ration xaĂŒĂ§iç 1. La couche de cire dont je viens de parler, empĂȘche la lumiĂšre du soleil et celle de la lune de ternir et de manger la couleur. La prĂ©paration du cinabre se faisoit autrefois Ă EphĂšse ; on a transfĂ©rĂ© cette fabrique Ă Rome parce quâon a trouvĂ©, en Espagne , des veines de ce minĂ©ral, quâon transporte plus aisĂ©ment en cette ville , oĂč des fermiers ont entrepris de le purifier au profit du public. Ils ont leur attelier entre le temple de Flore et celui de Quirinus. On fait un cinabre artificiel avec de la chaux. Ceux qui voudront Ă©prouver sâil est dâune bonne qualitĂ© , doivent prendre une lame de fer , sur laquelle ils mettront du cinabre ; ils la feront chauffer dans le feu jusqu a ce qu elle soit rouge quand ils la verront commencer Ă changer de couleur , dans le feu , et devenir noire , 011 lâen ĂŽtera ; et si , Ă©tant refroidie , elle reprend son ancienne couleur , câest une preuve que le cinabre est pur si au contraire elle reste noire, cela indique quâil est altĂ©rĂ©. VoilĂ , autant que je puis me rappeler , tout ce qui concerne le cinabre. La chrysocolle vient de la MacĂ©doine ; les endroits dâoĂč on la lire sont prĂšs des mines de cuivre. Les noms du cinabre 2 et de 1 indigo , indiquent les pays qui les produisent. Il E M ARQUES. Le cinabre , qui est une des plus belles couleurs rouges qui existent , a lâinconvĂ©nient de se ternir , lorsquâon ne prend pas certaines prĂ©cautions ; sur-tout quand on lâemploie au grand air. Ce nâest pas , comme dit -\itruve , parce quâil a perdu sa force naturelle , par toutes les extractions quâon a faites en le prĂ©parant , mais câest parce quâil se dĂ©compose ; et câest le dĂ©sagrĂ©ment quâon Ă©prouve presque toujours avec les couleurs composĂ©es , comme est le cinabre. 1 Câest-Ă -dire brĂ»lure. minium en latin, et voyez nos remarques Ă la fin du 2 Quâon se rappelle que le cinabre sâappeloit chapitre. t LIVRE VII, C II a 1. IX. 341 Quoiquâon en distingue deux? sortes , le naturel et lâartificiel, le premier nâest pas moins composĂ© que lâautre , puisque lâun est minĂ©ralisĂ© avec le souffre par la nature , et lâautre lâest par lâart. Les anciens qui peignoient presque tous les murs intĂ©rieurs de leurs Ă©difices , et dbnt certaines parties telles que les galeries , les portiques , les vestibules , les exĂšdres , se trouvoient ouvertes des cĂŽtĂ©s oĂč les colonnes seules soutenoienl la couverture , avoient Ă©prouvĂ© combien cette couleur Ă©toit sujette Ă changer dans ces sortes dâendroits, sur-tout lorsquâelle Ă©toit exposĂ©e aux rayons du soleil. ^ On sera peut-ĂȘtre surpris de voir que Yitruve mette les exĂšdres au nombre des salles dont lâintĂ©rieur Ă©toit exposĂ© aux rayons du soleil; tandis que dans le livre VI , chapitre 4, il en parle comme Ă©tant des salles couvertes et entourĂ©es de murailles. La consĂ©quence quâon doit tirer de lĂ , câest que toutes les exĂšdres ne se ressembloient pas ; que les unes Ă©toient ouvertes , et les autres entourĂ©es de murailles ; ou , ce qui est beaucoup plus probable , quâelles Ă©toient ouvertes seulement dâun cĂŽtĂ© , qui Ă©toit occupĂ© par plusieurs fenĂȘtres , ou soutenues par des colonnes , comme paroissoit ĂȘtre la partie des thermes de DioclĂ©tien , quâon nomme encore aujourdâhui les exĂšdres dans lâun ou lâautre de ces cas , une partie des peintures sur les murailles , Ă©toit exposĂ©e aux rayons du soleil, ce qui ternissoit la couleur. Pour obvier Ă cet inconvĂ©nient , Yitruve nous donne la recette du vernis quâemployoient les anciens avec la maniĂšre de lâappliquer. Ce vernis , dit-il , Ă©toit composĂ© de cire punique , fondue dans un peu dâhuile. La cire punique nâest autre chose que la cire blanche, dont la meilleure venoit probablement de Carthage. Pline , dans le XXXIll.âą Liv. Chap. 4o , rapporte tout ce que dit ici Yitruve Ă cet Ă©gard-; mais il donne plus de dĂ©tail Il faut faire attention, dit-il, que les rayons » du soleil et de la lune affoiblissent fort le lustre du cinabre. Pour obvier Ă cela , il faut , dĂšs » que la peinture sera sĂšche, la vernisser de cire blanche, fondue avec de lâhuile , et enduire de » ce vernis , avec un pinceau , le dessus de la peinture. Il faut en outre la chauffer avec du » charbon de noix de galle , jusquâĂ faire suer la muraille. Cela fait, il convient encore de la bien » frotter avec une bougie , et lâessuyer aprĂšs, avec du linge bien net, pour la rendre luisante comme y, du marbre. Postea çanclelis subigatur ac deincle Unteis puris sicut et marmora nitescant . Ces expressions sont plus claires que celles de Yitruve , qui dit postea cum canclela linteisque puris subigat. Il confond par lĂ , lâopĂ©ration faite avec la bougie , et celle quâon faisoit avec le linge. Le cinabre est la huitiĂšme couleur naturelle dont parle Vitruve. Il dit un mot du cinabre factice , et parle ensuite de la chrysocoile^, qui est la neuviĂšme couleur quâil nomme. Le nom de cette derniĂšre couleur est composĂ© des mots grecs %pv veines des mines , pendant tout lâhiver , et jusquâau mois de Juin alors on dĂ©tourne lâeau , et on laisse sĂ©cher , pendant les mois de Juin et Juillet , celle qui est restĂ©e dedans ; ensuite on > en extrait la chrysocolle , de sorte quâĂ proprement parler celte couleur nâest autre chose quâune 3 mine pourrie Ăź. » Vilruve ne nous dit pas quelle Ă©toit la couleur de la chrysocolle , mais il paroit que câĂ©toit verdĂątre , câest-Ă -dire verd de pomme. Pline dit que cette pierre, dans son Ă©tat naturel , ne donne aucune couleur , mais quâelle prend aisĂ©ment celle quâon lui donne , au moyen de lâalun , et de la plante de pastel ; quâainsi prĂ©parĂ©e elle rend une couleur semblable au verd. Pingiturcjue , dit-il , cmtequam pingat , et il ajoute un peu plus bas, colorem in herba segetis lĂŠti virentis qnam simĂŻllime reddat. 2 Vitruve dit aussi la mĂȘme chose , dans le i4. e Chap. de ce livre Ceux , dit-il , qui ne veulent pas employer la chrysocolle , parce quâelle coĂ»te trop cher , mĂȘ- 3 lent, avec la terre dâazur, le suc dâune plante nommĂ©e le pastel, et en font un fort beau verd. Dioscoidde et Isidore disent que sa couleur est le verd de porreau , prĆsinus , ce que nous nommons prĂ©sentement'le verd pomme. Quant au borax , connu aujourdâhui dans le commerce et quâon croit ĂȘtre la mĂȘme chose que la chrysocolle des anciens, nous nâavons que des notions trĂšs-incertaines sur son origine , ainsi que sur la maniĂšre de lâextraire et de le purifier. Quelques-uns le regardent comme un produit de lâart qui se fait Ă la Chine , en mettant dans une fosse , de la graisse , de lâargile et clu fumier par couches successives , en arrosant ce mĂ©lange avec de lâeau , et en le laissant sĂ©journer dans la fosse pendant plusieurs annĂ©es. Dâautres soutiennent que le borax est aussi un produit de la nature, et quâon le trouve dans la terre du Thibet, dans le lac Neibal, dans quelques cavernes de la Perse, dans lâisle de Ceylan et dans la grande Tartarie. On appelle plus particuliĂšrement Tincal , la soude boratĂ©e qui vient de Perse ; elle est verdĂątre et couverte dâun enduit gras. Vilruve nous dit que de son temps , on tiroit la chrysocolle de la MacĂ©doine. Que les noms du minium , câest-Ă -jdire le cinabre et celui de lâindigo, faisoient connaĂźtre le pays qui les pro- duisoit. On ne voit pas trop de quel pays il entend parler, en disant que le nom de minium, câest-Ă - dire notre cinabre, fait connoĂźtre le pays dâoĂč on le tire. Je . ne puis croire, dit Galiani, que son nom dĂ©rive de celui de la riviĂšre du Minho en Espagne j puisque Vilruve nous apprend lui- mĂȘme quâon trouva cette couleur, la premiĂšre fois , dans les environs dâĂphĂšse ; il est plus probable , ajoute-t-il , que ce sera la couleur qui aura donnĂ© son nom au fleuve ; Ă moins quâon ait seulement commencĂ© Ă donner Ă cette couleur , le nom de minium, lorsquâon en aura dĂ©couvert des mines prĂšs de cette riviĂšre en Espagne, dâoĂč il nous apprend quâon la faisoit venir de son temps. Quant Ă lâindigo, indicum, en latin, il lire son nom de lâInde, dâoĂč les anciens le faisoient venir ; il donnoit ce bleu foncĂ© qui est presque noir. Pline, en parlant de celte couleur , dit il vient des Indes , oĂč il se fait avec le limon qui sâamasse autour de lâĂ©cume qui reste attachĂ©e i Pline , lir, XXXIII, Chap. a 6, a Pline, Ljv. XXXIII, Chap. a6. t 343 LIVRE VII, C h a p. x. » Ă des roseaux. Cette couleur paroĂźt noire en la broyant; mais en la dĂ©trempant, elle rend un bleu purpurin , qui est de la plus grande beaute. > Ex India venit, arundinum spumas adhe â rescente limo eum teritur nigrum at in diluendo misturam purpuras cĂŠruleique mirabilem reddit. Pline. Liv. XXXV. Chap. 26. On tire Ă prĂ©sent ce beau bleu de lâAmĂ©rique ; il se fait avec une plante nommĂ©e indigo , qui croĂźt dans la province de Guatimala. On fait aussi un bleu > Ă -peu- prĂšs semblable, et par les mĂȘmes procĂ©dĂ©s, avec la plante nommĂ©e la guĂšde ou le pastel. CHAPITRE X. Du noir artificiel. Nous allons prĂ©sentement parler des diffĂ©rentes matiĂšres dont on parvient Ă dĂ©composer et changer la nature , pour en faire des couleurs. Nous commencerons par le noir de fumĂ©e , quâon emploie beaucoup , et qui est nĂ©cessaire dans beaucoup dâouvrages. Je vais faire connoĂźtre les moyens quâon emploie pour prĂ©parer cette couleur. On construit une petite Ă©tuve 1 dont o n enduit' lâintĂ©rieur avec du st 11c, quâona soin de bien polir. On bĂątit, par-devant, un petit fourneau qui a un conduit qui entre dans lâĂ©tuve. Il faut que la porte , qui est Ă lâouverture , puisse se fermer exactement , pour que la flamme ne puisse sortir du fourneau par cet endroit. On fait brĂ»ler de la rĂ©sine dans le fourneau ; la force du feu pousse la fumĂ©e dans lâĂ©tuve , qui laisse sa suie attachĂ©e aux parois et Ă la couverture. On ramasse cette suie , quâon dĂ©trempe avec de la gomme pour faire lâencre Ă Ă©crire. Ceux qui peignent les murailles sâen servent avec de la colle. Si on nâavoit pas tout ce qui est nĂ©cessaire pour faire cette couleur , et quâon eĂ»t besoin de noir, on pourra, pour ne pas retarder lâouvrage , en faire de la maniĂšre suivante on allume des sarmens ou des Ă©clats de bois de pin rĂ©sineux ; et quand ils sont rĂ©duits en charbon , on les Ă©teint. Ce charbon broyĂ© avec de la colle , donne un assez beau noir ; on s en sert pour peindre sur les murailles. La lie de vin dessĂ©chĂ©e , et brĂ»lĂ©e ensuite dans un fourneau , produit aussi, Ă©tant broyĂ©e avec de la colle, un fort beau noir, principalement si la lie est de bon vin; Ă»lors la couleur noire qu'on en tire, approche de celle de lâindigo. 1 Celte Ă©tuve sâappelle en laiia laconicum ; voyez nos remarques Ă la fin du chapitre. 344 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. REMARQUES. Nous avons dĂ©jĂ parlĂ© du laconicum , dans nos remarques sur 1 io. Cbap, du Y. e Liv. Les anciens se servoient de celte machine, pour* faire le noir de fumĂ©e* Il paroĂźt quâelle ressembloit assez Ă nos Ă©tuves sans ĂȘtre, toutefois , la mĂȘme chose; elle Ă©toit maçonnĂ©e, et faite en forme dâune petite tour ronde , voĂ»tĂ©e en cul de four. Nous avons vu que dans les bains, elle servoit au mĂȘme usage que dans nos Ă©tuves. YoilĂ pourquoi je nâai pas fait de difficultĂ© de rendre ici ce mot par celui dâĂ©tuve. Les anciens employoient beaucoup, Ă ce quâil paroĂźt, le noir de fumĂ©e; câĂ©loit la base de leur encre pour Ă©ciĂąre ; mais ils ne pouvoient sâen servir que pour peindre Ă sec, en le mĂȘlant avec la colle car il seroit impossible de sâen servir dans la peinture Ă fresque; pour celle-ci, il faut absolument des noirs faits avec du charbon. Nous voyons que les anciens connoissoient aussi la gomme et la colle , et quâils les employoient comme nous dans leurs peintures Ă sec. LĂ gomme est un suc vĂ©gĂ©tal concret, qui suinte naturellement par les gerçures de lâĂ©corce de certains arbres. La colle se fait avec les nerfs, les cartilages, les rognures de peau etc. , quâon fait macĂ©rer, bouillir et dissoudre dans lâeau sur le feu , jusquâĂ ce que tout devienne liquide aprĂšs quoi on passe la matiĂšre avec un gros linge ou tamis; quand ce suc est assez Ă©paissi, on le verse sur des pierres plates , ou dans des moules , pour le couper par morceaux. Ensuite on met ces morceaux sur des rĂ©seaux de corde, pour les faire sĂ©cher. Quoique Yitruve ne parle pas du noir naturel , les anciens en connaissoient cependant un, comme Pline nous lâapprend. On met , dit-il, le noir au nombre des couleurs artificielles, On 3 en tire cependant de deux espĂšces de terre. » 1 i Airamcntum quoque inter jacliiios erit quamquam est et terme gĂ©minĂ©e originis. Pline , Lit. XXXV, Chap. a5. g t' CHAPITRE XI. LIVRE VII, C h a p. xi. 3jS CHAPITRE XI. Du bleu dâAzur et de b Ocre bmlĂ©e. Ce fut Ă Alexandrie quâon dĂ©couvrit la premiĂšre fois lâart de composer le bien dâazur ; Veslorius en a depuis Ă©tabli une fabrique Ă Pouzzole. Il est assez curieux de voir comment avec les ingrĂ©diens qui entrent dans sa composition , on parvient Ă faire cette couleur. On broie du sable avec de la fleur de nitre , aussi fin que de la farine ; on les mĂȘle avec de la limaille de cuivre de cypre quâon a limĂ© avec de grosses limes ; on arrose le tout dâun peu dâeau pour en faire une pĂąte, dont on fait plusieurs boules avec les mains , et on les laisse sĂ©cher ensuite on remplit, de ces boules , un pot de terre quâon met dans la fournaise ; lĂ , le cuivre et le sable Ă©tant Ă©chauffĂ©s , et dessĂ©chĂ©s par la force du feu , se communiquent rĂ©ciproquement ce qui se liquĂ©lie de lâun et de lâautre ; ils perdent leurs qualitĂ©s naturelles pour ne former quâun mĂȘme corps qui devient le bleu dâazur. La terre jaune brĂ»lĂ©e quâon emploie pour peindre sur les murs , se prĂ©pare de cette maniĂšre on fait rougir , dans le feu , un morceau de bon ocre jaune , on LâĂ©teint ensuite dans du vinaigre, ce qui lui donne une couleur de pourpre. RE M ARQUE S. Câest sans doute pour imiter lâazur naturel , ou lapis lazulĂ©, quâon a composĂ© le bleu dâazur artificiel, dont il est parlĂ© dans ce chapitre. Le lapis lazulĂ© est une pierre prĂ©cieuse couleur bleue; elle est souvent parsemĂ©e des taches dâor, produites par des parcelles pyriteuses ; elle vient de la Perse ou de la JNatolie ; elle Ă©toit connue des anciens. Pline en parle dans le XXX'VIl . 6 Liv., oĂč il traite des pierres prĂ©cieuses ; mais il paroĂźt quâils n\en ont jamais extrait aucune couleur. Quant Ă nous , nous nous sommes long-temps servis du beau bleu tirĂ© de cette pierre ; o n lâappeloit Outre mer, parcequâon Ăźâapportoit dâorient. Nos anciens peintres lâemployoient beaucoup dans leurs tableaux; mais ces tableaux ayant vieilli, il dĂ©range actuellement lâharmonie de leurs couleurs, parce que lui seul a rĂ©sistĂ©, et nâest pas altĂ©rĂ© .comme les autres couleurs. On lâimite grossiĂšrement en suivant le pxpcĂ©dĂ© quâindique Yitruve. 44 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. 346 Il est encore parlĂ© , dans ce chapitre , dâune autre couleur , nommĂ©e usta en latin. Nous avon s dĂ©jĂ observĂ© dans nos remarques sur le chapitre 7 , de ce livre, quâon appeloit , en latin, s il, la couleur que nous nommons ocre jaune; par consĂ©quent Pusta, qui se faisoit , comme dit Vi- iruve , avec le sil brĂ»lĂ© , Ă©loit la mĂȘme chose que notre ocre brĂ»lĂ©e. Il suit de-lĂ , que la couleur que Yilrnve nomme cerussa usta dans le j2. e chapitre de ce livre , que Pline appelle simplement usta, dans le 20. me Chap. de son XXXY. e livre, nâĂ©toit pas lâocre brĂ»lĂ©e; mais eâĂ©toit la couleur que nous nommons aujourdâhui le minium , connue des anciens sous le nom de sandaraque , puisquâon la faisoit , comme Yitruve et Pline nous lâapprennent , avec de la ceruse brĂ»lĂ©e. La maniĂšre de composer le minium usta qui se fait avec la ceruse brĂ»lĂ©e , dit Pline u fut dĂ©couverte par hazard , lors de lâincendie du PirĂ©e. Les dames AthĂ©niennes trouvĂšrent que le v feu avoit changĂ© en minium , toute la ceruse quâelles avoient laissĂ©e dans les boĂ«les oĂč elles metloienl leur fard et leurs parfums. » Usta casu reperta incendio PirĂŠei cerussa in arcis cre- mata il confirme la chose et ne laisse plus aucun doute dans le 22 e chapitre du mĂȘme livre, oĂč il sâexprime ainsi Fit et adulterina Sandaracha et cerussa in fornace coda. Yitruve dit la mĂȘme chose dans le chapitre suivant. CHAPITRE XII. Du Blanc de Ceruse, du Vert -de- Gris et du Minium. Ăl convient encore de faire connoĂźtre ici , comment se fait le blanc de ceruse , et le vert-de-gris que nous appelons eruca. Les Rhodiens mettent du sarment dans le fond dâun tonneau sur lequel ils versent du vinaigre ; ils arrangent ensuite des lames de plomb sur le sarment ; alors ils couvrent les tonneaux et bouchent bien toutes les ouvertures. AprĂšs un certain temps , ils ouvrent ces tonneaux et trouvent le plomb changĂ© en ceruse. Le vert-de-gris se fait de la mĂȘme maniĂšre, si ce nâest, quâau lieu des lames de plomb , on met des lames de cuivre. Si I on met de la ceruse dans une fournaise , la force du feu change sa couleur et devient du minium. On a dĂ©couvert cela par hazard dans les incendies. LâexpĂ©rience a prouvĂ© que ce minium Ă©toit prĂ©fĂ©rable Ă celui quâon trouve naturellement dans les mines. / LIVRE VII, C h a p. xm . RE M ARQUE S. âąxr _ âąGv Les anciens prĂ©paroient la ceruse et le vert-de-gris , comme nous les prĂ©parons encore au jour-' dâhui. Vilruve appelle celte derniĂšre couleur, Ćrugine , câest-Ă -dire rouille de cuivre. Il ajoute nous Rappelons eruca je ne sais pourquoi il lui donne ces deux noms qui se ressemblent si fort. C Ă©toit sans doute pour abrĂ©ger, que les peintres de Home disoient erucci au lieu dâcerugine .c car il n est pas probable, qu on auroit donne au vert-de-gris , le nom Ă ? erucci qui signifie une chenille , parce que cette couleur ressemble beaucoup Ă celle de la chenille verte qui est la plus commune de toutes. La fin de ce chapitre nous prouve clairement, que la couleur connue des anciens, sous le nom de sandaraque , etoit vraiment celle que nous nommons aujourdâhui minium , comme je lâai observĂ© dans mes remarques sur les chapitres prĂ©cĂ©dents. CHAPITRE XIII. De la Couleur Pourpre. N ous parlerons prĂ©sentement de la pourpre , la couleur par excellence , la plus prĂ©cieuse et la plus belle de toutes celles qui existent ; on la lire dâun coquillage marin , quâon regarde lui-mĂȘme comme une production des plus admirables de la nature en effet , la teinture pourpre quâon en tire , nâest pas la mĂȘme partout ; ses teintes varient Ă mesure que les climats qui la produisent sont plus ou moins Ă©loignĂ©s du cours du soleil. Celle qui vient du royaume de Pont , et de i la Gaule , est trĂšs-foncĂ©e, et presque noire , parce que ces contrĂ©es sâapprochent du septentrion ; celle qui vient des pays qui sont entre le couchant et le septentrion , est pĂąle; mais vers lâorient, et lâoccident Ă©quinoxial, elle tire sur le violet; enfin elle est parfaitement rouge dans les pays mĂ©ridionaux. Lâisle de Rhodes en produit cependant qui est aussi rouge que celle qui vient des rĂ©gions les plus rapprochĂ©es de la ligne. Quand on a recueilli une certaine quantitĂ© de ces coquillages , on les coupe tout autour avec un couteau , pour faire Ă©couler la liqueur pourprĂ©e quâils contiennent ; on achĂšve de f exprimer en les pilant dans des mortiers. Cette teinture sâappelle oslrum , parce quâen effet on la tire des huitres quâon trouve dans la mer. Elle a le dĂ©faut de se dessĂ©cher aisĂ©ment , Ă cause de la quantitĂ© de sel qu elle contient ; mais on obvie Ă cet inconvĂ©nient en la mĂȘlant avec du miel. 44 - 348 0 . âą LâARCHITECTURE DE VITRUYE. REMARQUES. La teinture pourpre qui Ă©toit si prĂ©cieuse et si renommĂ©e chez les anciens , se liroit dâun petit poisson Ă coquille que Vilruve appelle ostrum , et que nous nommons la pourpre. Pline dit que câest dâune veine blanche , que les pourpres ont au milieu du cou , quâon tire cette riche couleur de rose purpurine, dont on se sert pour teindre les draps les plus fins. Il y a , ajoute-t-il, deux » sortes de coquillages qui la produisent lâespĂšce quâon estime le moins , a la forme dâune » trompe ; son bec est rond , et un peu incisĂ© sur le cĂŽtĂ© ; ce qui le rend trĂšs-propre pour cor- ner ; aussi lâappelle-l-on buccin ou cornet de mer. Lâautre , quâon appelle proprement la pour- R pre , jette en avant son bec ; il a la forme dâun tuyau , il est cavĂ© , et se reploie plusieurs R fois d un cĂŽtĂ© pour y mettre la langue. Ce coquillage a la forme dâune poire sur laquelle sâĂ©lĂš- » vent sept pointes disposĂ©es comme celle dâune massue ce quâon ne trouve pas au buccin quoi- R quâils aient lâun et lâautre autant de retours quâils ont dâannĂ©es. Le buccin se lient toujours R attachĂ© aux rochers et aux Ă©cueils câest aussi lĂ oĂč on va les chercher. » t On doit au hazard , dit-on , lâinvention de cette prĂ©cieuse teinture; le chien dâun berger, pressĂ© par la faim, ayant brisĂ©, sur le bord de la mer, un de ces coquillages, pour le manger, le sang .qui en sortit lui teignit la gueule dâune couleur si belle, quâelle ravit dâadmiration ceux qui la virent on chercha les moyens de se la procurer, et on rĂ©ussit Ă lâappliquer sur les Ă©toffes. Les lynens excellĂšrent dans lâart de teindre en pourpre ; mais on ignore quelle mĂ©thode ils employoient. Jâai vu, sur les cĂŽtes de la MĂ©diterranĂ©e , des coquillages nommĂ©s buccins ou cornet de mer, absolument semblables Ă celui dont Pline fait la description ; comme ils nâĂ©loient pas vivans , je nâai pu essayer si lâon pouvoir en tirer la pourpre , et personne nâa pu me donner des renseigne- mens Ă cet Ă©gard. Il existe encore aujourdâhui, dans les Indes , quelques coquillages qui rĂ©pandent et jettent, surtout par la bouche, une Ă©cume dâun rouge trĂšs-vif. Le pĂšre Charlevoix rapporte que dans les isles Antilles , on trouve un petit poisson appelĂ© bougan , semblable Ă Ja limace ; lâintĂ©rieur de son corps contient une couleur rouge trĂšs-Ă©cĂŻatante ; lâĂ©curne quâil rĂ©pand, quand on lâĂ©crase, est delĂ meme couleur cependant rien de tout ceci ne peut ĂȘtre la pourpre des anciens. Cette teinture nâest plus en usage depuis plusieurs siĂšcles; mais nous devons ĂȘtre dâautant moins sensibles Ă celte perte, que cette couleur donnoit une odeur forte et un coup-dâĆil qui seroit dâautant moins agrĂ©able pour nous , que les anciens nâestimoient que les couleurs foncĂ©es, et que la pourpre dont ils faisoient le plus de cas, Ă©toit celle qui approchoit le plus du sang de bĆuf. Ajoutons Ă cela quâelle Ă©toit dâun prix exorbitant, et que notre pourpre moderne, ainsi que le carmin quâon fabrique Ă beaucoup moins de fraix , au moyen de la cochenille , est dâun Ă©clat bien supĂ©rieur Ă lâancienne. l Pline, IX, Giiap. 3G. LIVRE VII, C h A P. siv. 349 Vilruve dit, Ă la fin de ce chapitre, que pour conserver la couleur pourpre qui Ă©toit sujette Ă se dessĂ©cher ^ Ă cause des parties salines quâelle contenoit , il falloit la mĂȘler avec du miel. Plutarque - rapporte dans la vie dâAlexandre, quâa la prise de Suse , il se trouva, parmi le butin, le poids de cinq mille talens de pourpre , qui ayant Ă©tĂ© faite , cent quatre-vingt-dix ans auparavant, avoit conservĂ© la beautĂ© de sa couleur ; parce que, dit-il , la rouge Ă©toit faite avec du miel, et la blanche avec de lâhuile. On est trĂšs-embarrassĂ© de savoir ce que câĂ©toit que cette pourpre blanche quâon conservoit avec de lâhuile. Mercurial, pour expliquer la chose, dit que les anciens avoient deux maniĂšres de conserver la liqueur pourprĂ©e. La premiĂšre Ă©toit de mettre, dans du miel, la chair pilĂ©e des pourpres avec son suc qui faisoit une masse rouge; la seconde en sĂ©parant de la chair la veine blanche , qui , suivant ce que dit Pline , contenoit la liqueur pourprĂ©e. Câest celle-lĂ , dit-il , que Plutarque appelle la pourpre blanche , qui , Ă©tant plongĂ©e dans lâhuile , sây conservoit comme lâautre dans le miel. C H A P I T Pi E XIV. Des autres couleurs artificielles. On compose encore des couleurs pourpres en teignant la craie avec le suc des racines de la garance et de lâhysgine. On tire aussi dâautres couleurs de diffĂ©rentes fleurs , par exemple lorsque les teinturiers veulent imiter lâocre jaune de lâAttique, ils mettent des violettes sĂšches dans un vase plein dâeau , quâils font bouillir sur le feu ; quand elle est bien imprĂ©gnĂ©e de la teinture des violettes , ils la passent dans un linge , et i expriment avec les mains dans un mortier , oĂč ils la mĂȘlent avec de la craie Eretrienne , et les broyant bien ensemble, ils en font une couleur pareille Ă lâocre jaune de lâAttique. Ils font de la mĂȘme maniĂšre une couleur de pourpre fort belle , on mĂȘlant du lait avec la teinture tirĂ©e du vaccinium. Ceux qui ne veulent pas employer la chrysocolle , parce qu elle coĂ»te trop cher , teignent de la terre dâazur avec le jus de la plante nommĂ©e le pastel, et font un fort beau vert. Tout cela sâappelle couleurs artificielles. Quand on nâa pas d'indigo , on peut l imiter en teignant la craie sĂ©linusienne ou lâannuaire avec le verre que les Grecs appellent yalon. Jâai expliquĂ©, dans ce livre , tout ce quâil est nĂ©cessaire de savoir sur les diverses qualitĂ©s des couleurs ; et par quels moyens on les rend belles et durables dans la peinture. Dans les sept livres qui prĂ©cĂšdent, jâai recueilli tout ce qui peut conlii- 35o LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. buer Ă la perfection des Ă©difices , et Ă les rendre commodes. Dans le huitiĂšme , je traiterai de tout ce qui concerne les eaux ; comment on en peut trouver dans les endroits qui en manquent ; comment il la faut conduire , et par quels signes on peut connoĂźtre si elles sont bonnes. R E M A R Q U E S. Les anciens possĂ©doient, comme nous , Fart de composer plusieurs couleurs artificielles, en teignant certaines espĂšces de craies. Nos stils de grains, les laques roses se composent encore de cette maniĂšre aujourd'hui. Yiiruve , au commencement de ce chapitre , nâindique pas quelle Ă©toit lâespĂšce de craie, quâon teignoit avec le suc de la racine de la garance, ou de lâhysgine ; comme elle nâentroit dans la composition que pour donner du corps Ă la couleur, on la choisissoit certainement trĂšs-lĂ©gĂšre, ne donnant par elle-mĂȘme presquâaucune couleur ; mais propre Ă recevoir toutes celles dont elle Ă©toit imprĂ©gnĂ©e. Il est probable quâon se servoit de la terre ErĂ©irienne , quâil nomme un peu plus bas, en parlant du jaune quâon faisoit avec des fleurs de violettes dessĂ©chĂ©es. Dans la composition de nos stils de grains , et de nos laques , nous nous servons du blanc de Bougival , appelĂ© aussi blanc dâEspagne , petit blanc, et quelquefois blanc de Paris. Câest une espĂšce de craie ou marne blanche trĂšs-friable 3 qui vient aux environs de Troyes , en Champagne ^ quâon lave plusieurs fois; on la laisse rasseoir ensuite on en fait des pains , ou petits bĂątons quâon laisse bien sĂ©cher. Câest de ce blanc quâon teint avec de la cochenille , quâest fait la laque rouge. Au lieu de cochenille , les anciens employoient le suc de la racine de la garance quâon emploie encore quelquefois aujourdâhui , pour teindre en rouge. Celle plante , haute de quatre Ă cinq pieds , se cultive prĂ©sentement en Flandre , et dans le Brabant ; elle sâappelle rubia en latin ; elle est encore connue sous la dĂ©nomination de rubia tinctorum. Nous ne connoissons pas quelle est lâautre plante que Yiiruve appelle Hysginum suivant le texte mĂȘme de cetauteur, qui me semble ici ĂȘtre trĂšs-clair, la teinture quâelle donnoit devoit ĂȘtre aussi un rouge de pourpre; puisque venant de traiter assez amplement, dans tout le chapitre qui prĂ©cĂšde, de la vĂ©ritable couleur pourpre quâon extrait dâun coquillage, et quâil nomme ostro , il achĂšve, au commencement de celui-ci, cette matiĂšre en enseignant comme on composoit une pourpre artificielle , au moyen des racines de la garance et de Vhysgine. On sait, comme lâobserve trĂšs- bien Galiani , que ce nâest pas Yiiruve qui a divisĂ© par chapitre , les livres de son ouvrage cette division a Ă©tĂ© probablement faite long-temps aprĂšs lui, et assez mal, puisque la division des chapitres ne suit pas celle des matiĂšres ce qui est arrivĂ© ici , oĂč lâon a mis au commencement de ce quatorziĂšme chapitre , ce qui devoit finir le treiziĂšme qui traitoit des couleurs pourpres. Cela aura induit en erreur , et fait croire que Fauteur allait parler des couleurs diffĂ©rentes de celle dont il parloit dans le chapitre prĂ©cĂ©dent. On Fa Ă©tĂ© Ă©galement par le litre de ce quatorziĂšme chapitre qui est intitulĂ© de purpureis coloribus , comme sâil nây Ă©toit traitĂ© que des cotdeurs pourprĂ©es ; tandis quâon y parle de toutes autres couleurs , comme du jaune, du vert, de lâazur. Perrault Ă donnĂ© dans cette erreur; il a cm que le mot latin purpureus signifioit du violet qui LIVRE VII, C h A p. x iv. 351 tient* du pourpre; cette couleur se compose comme on sait, de rouge et de bleu. Il Ă©loit incontestable que la racine de garance donnoit le rouge de lĂ il a cru que celle de lâhysgine donnoit le bleu, ayant besoin de cette teinte pour fabriquer le violet, dont il croyoit quâil Ă©loil ici question rien nâest plus contraire cependant Ă ce que Pline nous dit de lâhysgine. Parmi les couleurs , dit le naturaliste Romain , que les propriĂ©taires sont obligĂ©s de fournir , Ă leurs dĂ©pens , aux entrepreneurs , lorsquâils ^veulent quâon les emploie dans les ouvrages faits par marchĂ©, on distingue dâaborl la plus belle pourpre , purpurissimum qui est certainement celle dont les dames com- posoient le fard qui servoit Ă leur toilette ensuite , parmi les autres couleurs pourpres, il vante beaucoup celle de Pouzzole , et la prĂ©fĂšre aux autres parcequâelle Ă©loit composĂ©e avec lâhysgine et la racine de garance. Quare puteolamen potiĂčs laudalur quod hisgino maxime inficialur , rubiamque cogitiir sorbere. l DâaprĂšs cela, on voit Ă nâen pas douter, que lâhysgine donnoit une teinture rouge. Rien ne nous indique dâailleurs ce que câĂ©toit que cette plante , non plus que le nom quâon lui a donnĂ© aujourdâhui. Earbaro dit que lâhysgine, le vacciniet et la hyacinthe sont la mĂȘme plante sous dif- fĂ©rens noms ; il adopte en cela ce quâHermolaĂŒs et Philander avoient avancĂ© avant lui. Baldus rapporte diffĂ©rentes opinions Ă cet Ă©gard, et avoue quâil est trĂšs-embarrassĂ© de dĂ©cider celle quâon doit choisir. Galiani remarque quâil nây auroit pas dâimpossibilitĂ© que lâhysgine fĂ»t le bois de BrĂ©sil , dâoĂč on extrait, comme tout le monde le sait, une trĂšs-belle teinture rouge semblable au carmin. Les sucs de diffĂ©rentes fleurs procuroient aussi, aux anciens, plusieurs belles couleurs. On sait quâĂ la Chine et aux Indes , pour peindre les toiles de coton et les satins , on nâemploie que les sucs des herbes et des fleurs. Les teinturiers , pour imiter la couleur de lâocre jaune , faisoient dessĂ©cher des fleurs de violettes dont ils faisoient une forte infusion; elle leur donnoit une teinte semblable Ă la couleur de lâocre, qui, Ă©tant une couleur opaque, ne pouvoit servir pour la teinture. Pline nous apprend quâon imitoit encore lâocre jaune , en faisant brĂ»ler de la terre rouge ou sanguine , dans une marmite neuvefermĂ©e hermĂ©tiquement. Ex ea fit ochra 3 exusta rubrica in ollis novis luto circum litis. 2 Encore aujourdâhui, comme le blanc de ceruse brĂ»lĂ© dans la fournaise produit du minium, de mĂȘme en faisant brĂ»ler de nouveau le minium, on produit un fort beau jaune que nous nommons massicot. Nous voyons quâon faisoit aussi une couleur pourpre en trempant et mĂȘlant dans du lait, une plante quâil appelle vaccinium. Les auteurs ne commissent pas trop quelle est cette plante ; Dios- coride, Mattiole et autres, disent que sa fleur Ă©toit couleur de pourpre. DâaprĂšs ce que dit Yirgile, elle Ă©loil certainement trĂšs foncĂ©e vaccinia nigra leguntur. On en distinguoit deux espĂšces, lâune qui croissoit en Italie , et, une autre dans les Gaules ; cette derniĂšre se nommoit aussi lâhyacinthe. En Italie, dit Pline, on seme le vaccinium pour chasser aux oiseaux; mais parce que celui, des ! 1 Pline. Liv. XXXV , Chap. 16. 2 Pline, liv. XXXV , Chap. 16. 35 a LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Gaules est de couleur pourpre , on sâen sert pour teindre les gros draps Ă lâusage des vaĂźe^Ă© i. Il dit encore dans un autre chapitre La hyacinthe croĂźt trĂšs-bien dans la Gaule j on s'en sert pour teindre et imiter la couleur de lâhysgine 2. COULEURS DONT PARLE YITRUVE. COULEURS N A TU RE L LE S. NOMS LATINS. 1 .SU . . . 2. Rubrica . . 3. ParĆtonium 4 . Melinium 5. Creta viridis 6. Auri pigmentum 7. Sandarctca . 8 . Minium . q. Chrisocolla . 10. Indicum . . . NOMS FRANĂOIS. Lâocre jaune. La sanguine ou la craie rouge. Le blanc minĂ©ral. La terre yerte ou le vert de montagne. Lâorpiment. Le minium. Le cinabre. La chrysocolle ou le borax. Lâindigo. COULEURS ARTIFICIELLES, 1. Atramentum 2. Ceruleo . 3. Usta . . . 4. Cerusa . 5 . Ărugine . . 6 . Sandaraca . y. Ostro . Le noir de fumĂ©e. La terre dâazur. Lâocre brĂ»lĂ©e. Le blanc de ceruse» Le vert de gris. Le minium. La pourpre. x Pline. Liv. XVI. Ch. 3x. 3 Pline, Liv. XXI, Ch, 97. Hyacinthus in Gallid maxime pm&nit. Hoc ibi fuco hysginum iingunt. LIVRE VIII. LâARCHITECTURE D E VITRUVE. i r ' vr . . ir ' A LIVRE HUITIĂME. 4 INTRODUCTION. ThalĂšs de Milet , lâun des sept sages , soutenoit que lâeau Ă©toit le principe de toutes choses. HĂ©raclite disoit que câĂ©toit le feu. Les prĂȘtres mages admettoient deux principes , lâeau et le feu. Euripide , disciple dâAnaxagore, que les AthĂ©niens appeloient le philosophe du théùtre , croyoit que lâair et la terre , fĂ©condĂ©s par les pluies du ciel , avoient produit les hommes et tous les animaux qui sont dans le monde âą que tout ce qui a Ă©tĂ© procréé , retourne et se change en ces mĂȘmes principes , lorsque le temps les force de se dissoudre tellement que ce qui vient de lâair , retourne dans lâair ; que rien ne pĂ©rit , mais change seulement ses propriĂ©tĂ©s dans la dissolution , et les reprend ensuite pour devenir ce qu il Ă©toit auparavant. Pythagore , Empedocle , EpicharmĂ©, avec dâautres physiciens et philosophes , Ă©tablissent quatre principes savoir , lâair , le feu , lâeau et la terre , qui mĂȘlĂ©s et combinĂ©s de diverses maniĂšres , suivant la nature de chacun de ces Ă©le'mens, composent lâessence de tout ce qui existe. Nous voyons , en effet, que non - seulement ils produisent tout ce qui prend naissance , mais encore quâils nourrissent, augmentent et conservent tout. Les animaux ne sauroient vivre sans lâair quils insinuent et font circuler sans cesse dans leurs corps par la respiration. Dun autre 45 354 Introduction. cĂŽtĂ©, un corps oĂč la chaleur ne se trouve pas dans une juste proportion, manquera dâesprits vitaux ; -il sera d une foible complexion , et les alimens quâil prendra, nây trouvant pas de degrĂ© de coxion nĂ©cessaire, ne pourront le nourrir. Sans la nourriture terrestre , qui entretient toutes les parties de notre corps , il ne pourroit subsister , puisquâil seroit privĂ© du plus solide de ses principes. Enfin tous les animaux seroient secs et privĂ©s de sang, sâils nâavoient lâĂ©lĂ©ment liquide qui entretient en eux lâhumiditĂ©. La divine Providence nâa donc pas voulu que des choses qui sont si nĂ©cessaires Ă tous les hommes , fussent rares et difficiles Ă trouver , comme le sont les perles , lâor , lâargent et autres choses semblables, qui ne peuvent satisfaire les besoins de notre corps et les* dĂ©sirs quâinspire la nature; mais elle a , au contraire , rĂ©pandu, avec profusion , par tout lâunivers , et a mis Ă la portĂ©e de tout le monde , ces objets dont on ne se peut passer dans la vie. Le corps manque -t-il dâesprits vitaux i J l'air , destinĂ© Ă les rĂ©parer , est toujours prĂȘt Ă les seconder de mĂȘme la chaleur du soleil et du feu ne manque jamais de secourir et dâaider celle qui nous est naturelle et qui entretient notre vie. Les fruits de la terre nous offrent une nourriture toujours abondante , et qui surpasse tous nos dĂ©sirs ; ils nourrissent , ils alimentent les animaux qui sâen rassasient sans cesse. Lâeau enfin, qui non-seulement sert de boisson , mais qui sert encore Ă une infinitĂ© dâusages qui la rendent dâautant plus agrĂ©able qu elle est la chose qui coĂ»te le moins. Les prĂȘtres Egyptiens prĂ©tendent que tout ne subsiste que par la vertu de cet Ă©lĂ©ment ; ils couvrent le vase Ă mettre de lâeau , le portent dans le temple avec un respect religieux , et se prosternant Ă terre , les mains Ă©levĂ©es au ciel, ils rendent grĂące Ă la bontĂ© divine de nous avoir accordĂ© ce bienfait. REMARQUES . On retrouve, dans celte introduction, Ă -peu-prĂšs tout ce qui a Ă©tĂ© dit dans le 2 . me chapitre du II. rae livre , oĂč lâauteur cherche Ă appuyer par lâopinion des philosophes , les raisonnemens quâil contient sur les divers matĂ©riaux quâon emploie pour la construction des Ă©difices ; particuliĂšrement dans le g.âą 6 Chap. oĂč il traite des arbres. Tout ce quâil dit dans ce deuxiĂšme livre , facilitera beaucoup lâintelligence de cette introduction. Il commence dans les deux endroits , par citer lâopinion de ThalĂšs , qui prĂ©tendoit que lâeau Ă©toit le principe de toutes choses ensuite il cite celle dâHeraclite qui disoit que câĂ©toit le feu. Dans cette introduction, il cite cependant celle des prĂȘtres mages dont il nâavoit pas parlĂ© dans le 2. me Chap, du II. me Liv. En parlant ici des prĂȘtres mages, il dit sacerdotes magorum les prĂȘtres des mages mais tout le monde comprend quâil a voulu dire les prĂȘtres mages, sacerdotes magi , câest-Ă -dire les prĂȘtres des Perses , parce que, comme nous 1 tĂ«,. , jiSie > pgles tiiik Ăżle ^ temple ijjii rendi ; »1 rĂ©; ms renr me estij ĂŻ bois, f Ă©toit Noce l.'iep! L Ăst b ĂŒr il l V 11 E TII1, C n A >. II. 36ĂŻ prĂšs sous le cours du soleil , sont presque de'poumies dâeau , et nâont que fort peu de fontaines et de riviĂšres , on en doit conclure que les meilleures sources sont cellĂšs dont lĂ©s"eaux s Ă©coulent vers le septentrion , ou lâAquilon; Ă moins qu elles ne passent par quelquâendroit sulphureux , alumineux ou bitumineux ; alors elles changent de qualitĂ©, et les eaux de ces fontaines, soit quâelles fussent chaudes ou froides, ont toujours une mauvaise odeur, et un goĂ»t dĂ©sagrĂ©able car il ne faut pas croire quâil y ait des eaux qui soient chaudes de leur propre nature celles qui le sont, ne sâĂ©chauffent quâen passant par quelquâendroit brĂ»lant la preuve en est, que ces eaux , qui sortent bouillantes des veines de la terre , ne conservent pas long-temps leur chaleur, et deviennent bientĂŽt froides. Si cependant elles Ă©toient naturellement chaudes , elles ne se refroidiroient jamais , et conserveroient cette chaleur , comme elles conservent leur goĂ»t, leur odeur et leur couleur ; parce que la nature subtile de cet Ă©lĂ©ment , se mĂȘle et sâimprĂ©gne fortement des matiĂšres qui causent ces effets. RE M ARQUE S. Lâauteur, dans ce chapitre, rĂ©pĂšte Ă -peu-prĂšs ce quâil a dĂ©jĂ dit dans le sixiĂšme du premier livre , sur les causes qui produisent les vents. Lâair , comme on sait } est un fluide compres- 6Ăble-qui se dilate par le chaud , et se condense par le froid. Quand une partie de lâatmosphĂšre sâĂ©chauffe, ou se refroidit, il se fait un mouvement de translation de lâair, par laquelle une partie assez considĂ©rable est poussĂ©e dâun lieu dans un autre , avec plus ou moins de vitesse ; câest ce quâon nomme le vent. Vitruve a donc raison de dire que la chaleur du soleil occasionne dans lâair chargĂ© de beaucoup dâhumiditĂ© , lâexpansibilitĂ© de ce fluide , qui pousse celui dâalentour , qui nâest pas rarĂ©fiĂ© mais lâattraction quâil attribue Ă la rarĂ©faction de lâair nâexiste pas. Si dans quelque partie de lâatmosphĂšre , la chaleur du soleil occasionne lâexpansibiliiĂ© de Pair, et que dans une autre partie , il se trouve condensĂ©, lâair qui se trouve entre eux, poussĂ© par celui qui se rarĂ©fie, se portera vers celui qui se condense tellement que toute lâimpulsion de lâair rarĂ©fiĂ© agit vers lâendroit oĂč la condensation se fait ; parce que lâespace quâoccupoit lâair avant dâĂȘtre condensĂ© , devenant moins rempli par la condensation, donne place Ă celui qui est poussĂ© par lâair rarĂ©fiĂ© ; ce qui paroĂźt une attraction , quoiquâen effet cela dĂ©termine seulement le lieu vers lequel lâimpulsion se fait. Presque tous les corps liquides, exposĂ©s Ă la chaleur de lâair , se dĂ©composent ; alors les parties les plus volatiles se dĂ©gagent des plus pesantes , et sâĂ©lĂšvent peu-Ă -peu dans lâatmosphĂšre. LâĂ©vaporation de lâeau est la plus abondante de toutes. De ce fluide, rĂ©pandu sur toute la surface du globe , qui occupe la vaste Ă©tendue des mers , il sâĂ©lĂšve sans cesse une quantitĂ© de vapeurs. LâhydrogĂšne , le plus lĂ©ger de tous les fluides pondĂ©rables , qui lâest treize fois plus que lâair que nous respironsest une des parties constituantes de lâeau. DĂšs que la chaleur agit sur celle-ci , et en dĂ©compose une partie, lâhydrogĂšne se dĂ©gage plus lĂ©ger que lâair atmosphĂ©rique , il sâĂ©lĂšve et 40 36a LâARCHITECTURE DE VITRUVE. emporte quelques parcelles dâeau ; celte Ă©vaporation continuelle et abondante forme les nuages que nous voyons dans les airs. Il est tout simple, quâĂ mesure que les climats se rapprochent du cours du soleil, lâaction de sa chaleur a plus de force , est plus continuelle par consĂ©quent lâĂ©vaporation est plus considĂ©rable, et le sol de ces climats en devient plus sec. Vitruve apporte pour preuve de cela , que les vents mĂ©ridionaux sont trĂšs-humides et amĂšnent beaucoup de pluie, parce que le soleil a pompĂ© beaucoup de vapeurs dans celte partie ; et pour la raison contraire , les vents du nord il'amĂšnent que la sĂ©cheresse ; ce qui est çn partie vrai, sur tout pour la GrĂšce et lâItalie ; parce- que pour ces pays, les vents du midi viennent de la mer; mais il nâen est pas moins vrai, que les vents du nord sont aussi trĂšs-pluvieux dans les pays qui ont la mer au septentrion, et quâau contraire le vent du midi y sera trĂšs-sec , sâil y vient du cĂŽtĂ© de la terre. On sait, comme lâobserve trĂšs-bien Yilruve , que les hautes montagnes arrĂȘtent les nuages ; que pour cette raison il pleut davantage sur les montagnes et dans le voisinage des montagnes que sur les plaines. Nous voyons en effet qne les fleuves et les riviĂšres ont toujours leurs sources dans les montagnes les plus Ă©levĂ©es au-dessus du niveau de la mer , et quâelles descendent ensuite vers elle. Il Ă©toit aisĂ© Ă Vitruve dâaprĂšs ce quâil avoit dit dâabord de faire ce dernier raisonnement , qui a pour base la vĂ©ritĂ©. Au lieu de cela, pour appuyer ce quâil a dâabord avancĂ© , que le soleil attire toute lâhumiditĂ© du midi, que les vents poussent ensuite vers le nord , il dit que le plus grands fleuves'viennent du nord; ce qui nâest pas exact. Parmi ceux quâil cite, plusieurs mĂȘme ont leur source au midi , et leurs eaux coulent vers le nord tels sont le Rhin et le Nil. La description quâil fait du cours des fleuves , exige encore dâautres observations il dit, par exemple., que le Tigre et lâEuphrate sont dans la Syrie , tandis que ces deux fleuves passent au milieu, de lâAssyrie , fort loin de la Syrie ; câest pourquoi jâai lu Assyrie au lieu de Syrie. Les auciens gĂ©ographes ont souvent confondu ces deux pays. La description quâil fait du cours du Nil est trĂšs-intĂ©ressante. Si on la confronte avec les caries modernes les plus exactes , on verra quâil connoissoit le cours de ce fleuve jusqmâĂ sa source , Ă -peu- prĂšs comme nous le connoissons aujourdâhui. I ici* ecn to une Ce fleuve commence effectivement au mont Atlas , et comme les barbares , d ? aprĂšs ce que rapporte Strabon , appeloient cette montagne Dyris , on aura probablement donnĂ© aussi le nom de % ris Ă la partie du Nil qui sâĂ©tend depuis sa source 3 et prend son cours vers lâoccident, jusquâau lac qui sâappeloit alors Eptabole 3 et aujourdâhui Dcimbea. Sorti de ce lac , il sâavance en tournant vers le midi jusquâĂ ce quâil entre dans le marais de Caloe. Cette partie du fleuve sâappeloit le Nigir. Les cartes modernes nâindiquent pas ce marais si on les suppose exactes , il faut croire que cette omission vient de ce que câest le fleuve mĂȘme qui produit ces marĂ©cages , oĂč il doit couler pendant long-temps au travers de ses propres sables , tellement quâon aura nĂ©gligĂ© dâindiquer ces marais ^ les regardant comme un accessoire qui sembloit faire partie du fleuve. Cellarius, qui ne connoissoit certainement pas ce passage de Vitruve , place mal-Ă -propos ce marais Ă la source du fleuve Astasobas , dont nous allons parler. Vitruve dit que ces marais entourent le royaume de MĂ©roe 1 dans lâEthiopie mĂ©ridionale. Plusieurs auteurs, parmi lesquels se trouve Pomponius MĂȘla, r* ĂŻ Cambyse avait bĂąti une ville dans cette partie'de il lui donna le nom de sa sĆur MeĂŻoĂ« qui y mourut. Ce aom a passe' Ă tout le pars. "IVOl SI l tdrso ' / LIVRE VIII, C * A u 364 ant cru que ce royaume Ă©toit uue isle formĂ©e par le Nil ; ils le divisent pour cela eu deux branches, dont ils appelent lâune Astaboras et lâautre Astape 1, LâAslaboras et PAstape ne sont pas deux branches du Nil qui forment une isle, mais deux riviĂšres diffĂ©rentes du Nil dont celui-ci sâapproche dans son cours , comme le remarque trĂšs-bien ici Vitruve il s'approche , dit-il, par divers contours ? etc., il dit se circumagens et non pas se dividens.. Nous voyons en effet sur les caries r que le cours du Nil est trĂšs-tortueux lorsquâil passe auprĂšs des riviĂšres Astasobas et Astaboras; mais on ne voit pas quâil sây divise en deux branches pour former une jsle. Les anciens gĂ©ographes , qui ont parlĂ© de ces deux riviĂšres, Ă©crivent tous de mĂȘme , le nom de lâAstaboras , cependant avec cette petite diffĂ©rence que les uns Ă©crivent Astaboras , dâautres Astaborras , dâautres enfin Astabores. Quant Ă lâAstape dont, Strabon Ă©crit comme nous le nom, dâautres Ă©crivent Astosabas , Astapus et Astapes. Yoyez Pline , Strabon , Pomponius MĂȘla, PtolĂ©mĂ©e, Solinus , etc. Galiani avoue quâil est trĂšs-surpris que les commentateurs de Pomponius MĂȘla , ainsi que le gĂ©ographe Cellarius avent ignorĂ© ce passage , oĂč Yitruve dit que le Nil sâapproche des deux riviĂšres , lâAstape et lâAstaboras ; il lâest encore davantage , ajoute-t-il, quâil nâait pas Ă©tĂ© connu de Delisle , qui nâen dit pas un mot dans la dissertation quâil prononça le i 4 Novembre 1708, Ă lâacadĂ©mie des sciences , dont le but Ă©toit de dĂ©terminer la situation du royaume de MĂ©roĂ«, Sans se donner autant de peine, sans former autant de conjectures et dâargumens , il auroit trouvĂ© , dâaprĂšs ce que dit ici Yitruve, la vraie situation de ce royaume; et, quoiquâen dise Pomponins MĂȘla, il auroit prouvĂ© que le Nil par ses contours, en faisoit une pĂ©ninsule et non pas une isle. Galiani observe encore que Perrault, qui avoit sous les yeux ce passage si clair de Yitruve , nâa pas laissĂ© de trar duire que le Nil s J Ă©lant divisĂ© en deux bras , nommĂ©s VAstasobam et VAstaboram etc. Vitruve ajoute que le Nil forme les cataractes, lâisle ElĂ©phantine , passe Ă sienne, dans la ThĂ©baĂŻde, et dans le reste de lâEgypte. Câest de celte derniĂšre partie du cours du Nil que [Desnon nous a donnĂ© une description on ne peut pas plus inlĂ©resssanle, dans'le voyage dâEgypte quâil vient de publier. CHAPITRE III. Des qualitĂ©s particuliĂšres de certaines eaux de fontaines. Nous avons plusieurs fontaines chaudes, dont les eaux sont fort agrĂ©ables Ă boire; celle qui sâĂ©coule de la fontaine de CamĂŠne , 2 et celle qui sort de la fontaine Martiale, ne sont pas meilleures voici comme la chaleur se communique aux eaux. Lorsquâun feu ardent s allume sous la terre dans lâalun, le bitume ou le sou- 2 Voyez les remarques Ă la fin de ce chapitre. 46 . 1 Powp. MĂȘla , Liv. I. Chap, 9. LâARCHITECTURE DE YITRĂYE. 364 fre , il Ă©chauffe tout ce qui lâenvironne, et fait Ă©lever une vapeur brĂ»lante qui se porte vers la superficie de la terre. Sâil se trouve au-dessus quelques fontaines dâeau douce, cette vapeur les Ă©chauffe dans leurs conduits souterrains, dâoĂč elles sâĂ©coulent cependant sans prendre de mauvais goĂ»t. On rencontre au contraire des fontaines dâeau froide qui ont lâodeur et le goĂ»t trĂšs-dĂ©sagrĂ©ables cela vient de ce quâelles ont passĂ© sous terre par quelquâendroit brĂ»lant; elles coulent ensuite encore pendant trĂšs-longtemps cachĂ©es dans des canaux souterrains , tellement qu elles ne sortent de terre qu entiĂšrement refroidies ; mais elles retiennent dans leur goĂ»t, leur odeur et leur couleur, tout ce quelles ont contractĂ© de mauvais telles sont les eaux de lâAlbuia sur le chemin de Tivoli ; telles sont encore les fontaines d eau froide prĂšs dArdĂ©e, 1 et celles de plusieurs autres fontaines dâeaux froides , qui ont comme celle-ci une odeur sulphureuse. Les eaux, quoique froides, semblent bouillonner, comme si elles Ă©toient chaudes, parce que passant dans les profondeurs de la terre , par quelquâendroit brĂ»lant , le choc quâoccasionne la rencontre de lâeau et du feu excite une certaine commotion qui fait Ă©lever prĂ©cipitamment quantitĂ© dâair fixe 2 qu elles retenoient et qui sortant Ă plusieurs reprises , cause ce bouillonnement. di f flou il an ban tondu t sflĂ f ils fl 0 po U les [les p! . *{ H ml LIVRE VIII, Ch Ă P. 3CS appelĂ© Xante i, la riviĂšre qui arrose leurs campagnes les vaches qui naissent le long de ses rives Ă©tant toujours rousses, et les moutons bruns 2 . On rencontre aussi des eaux dont lâusage est aussi pernicieux que mortel, Ă cause des sucs venimeux que contient la terre sur laquelle elles coulent telle Ă©toit, Ă ce quâon dit, celte fontaine de Terracine, appelle'e la fontaine de Neptune ; ceux qui buvoient par mĂ©garde de son eau, mouroient sur le champ, câest pourquoi on la combla autrefois tel Ă©toit aussi un lac prĂšs de Cichros, dans la Thrace; non - seulement ceux qui buvoient de ses eaux mouroient, mais mĂȘme ceux qui sây alloient laver. Il existe encore, dans la Thessalie , une fontaine ombragĂ©e par un arbre qui porte des fleurs de couleur pourpre; aucun troupeau ne veut boire de ses eaux, elles animaux, de toutes espĂšces, nâosent en approcher. On voit de mĂȘme en MacĂ©doine, prĂšs du tombeau dâEuripide, deux ruisseaux qui coulent, lâun Ă droite et lâautre Ă gauche du monument, et rĂ©unissent ensuite leurs eaux. Lâeau d'un de ces ruisseaux est si bonne, que tous les voyageurs sâarrĂȘtent pour sây rafraĂźchir ; mais personne nâapproche de celle qui coule de lâautre cĂŽtĂ©, parce qu elle a la rĂ©putation dâĂȘtre trĂšs-pernicieuse. Dans la partie de lâArcadie nommĂ©e Nonacris, certaines montagnes distillent une eau trĂšs-froide, que les Grecs appellent stygos hydor 3 ; aucun vase , soit dâargent, soit de cuivre ou de fer, ne peut la retenir, parce qu elle saute dehors et se disperse ; on ne peut la retenir et la conserver que dans la corne du pied d un mulet. Antipater fit porter, dit-on, de cette eau, par son fils Iolas, dans la province oĂč se trouvoit Alexandre, et elle servit de poison Ă ce roi. Dans les Alpes, au royaume de Gottus, il y a encore une eau qui fait mourir subitement tous ceux qui en goĂ»tent. Au pays des Falisques, prĂšs du chemin qui conduit Ă Naples, dans un bois qui se trouve au milieu dâun champ appelĂ© Cornetus, il sort une fontaine dans laquelle on voit des os de serpents, de lĂ©zards et dâautres bĂȘtes vĂ©nimeuses. 1 BavSoç en grec signifie la couleur jaune, blonde ou rousse. a 2 Il est assez difficile de dĂ©cider quelle est cette couleur nommĂ©e en latin leucophĆus. Pline dit que ce mĂ©lange de la rubrique, du sil jaune et de la meline dont on composoit la couche quâon appliquoit sur le bois , pour dorer , âą fait le leucophĆum. La difficultĂ© est dans la signification du mot grec Cpaioç que les grammairiens rendent par le mot latin fuscus ; ils disent Fusais est color suhniger , câest-Ă -dire brun , sans spĂ©cifier quel brun ils entendent. Les auteurs latins se sont mieux expliquĂ©s, en parlant de la couleur des visages hĂąlĂ©s, et de celle des vins qui na sont ni tout - Ă - fait blancs , ni tout-Ă - fait rouges ; ils la nomment fusais color câest dans ce sens quâOvide dit fuscantur corpora campo , et que le vin de Falerne est appelĂ© fuscum par Martial. Il suit de lĂ , que la couleur nommĂ©e fuscus par les anciens, ressemble Ă celle des visages hĂąlĂ©s , ou Ă celle de ces vins d'Es pagne ou du midi de lâItalie qui sont dâun jaune foncĂ© ressemblant assez Ă celui du visage halĂ© des habitans de ces contrĂ©es. 3 Câest-Ă -dire , eau de tristesse. kl 36 9 LâARCHITECTURE DE V I T R Ă V E. On trouve encore plusieurs sources dont les eaux sont aigres, comme celles du Lynceste, celles du Velino, en Italie i , celles qui sont prĂšs de ThĂ©ano, dans la Campanie, et dans plusieurs autres endroits. Toutes ces eaux, quand on les boit, ont la vertu de dissoudre les pierres qui sont dans la vessie. Il paroit que cela vient de ce que ces eaux s'imprĂ©gnent des substances Ăącres et acides quâelles rencontrent sous la terre ; ce qui fait, quand on les boit, qu elles dissipent tout ce qui se trouve endurci et coagulĂ© dans notre corps. Pour comprendre comment les acides peuvent dissoudre les corps endurcis , on nâa quâĂ laisser tremper quelque temps un oeuf dans du vinaigre, et on verra sa coquille sâamollir et se fondre. Il en est de mĂȘme du plomb, qui sâĂ©clate si difficilement, et qui est trĂšs-pesant mis avec du vinaigre dans un vase bouchĂ© bien exactement, il se dissout et se change en ceruse. Le cuivre , qui est encore plus dur, se dissout par la mĂȘme opĂ©ration , et devient du verd de gris les perles, et mĂȘme les cailloux que le fer ni le feu ne peuvent rompre, se cassent et tombent enȎclats*, quand aprĂšs les avoir Ă©chauffĂ©s, on les arrose avec du vinaigre. Il est aisĂ© de juger, dâaprĂšs cela, que les acides qui agissent sur ces corps, produiront le mĂȘme effet pour guĂ©rir ceux qui souffrent de la pierre. Il est dâautres fontaines dont les eaux paroissent mĂȘlĂ©es avec du vin ; on en voit une de ce genre en Paphlagonie ; ses eaux enivrent sans y mettre cette liqueur. Ă Equicole , en Italie, et au pays des Medulles 2 , dans les Alpes, certaines eaux font enfler la gorge de ceux qui en boivent. Dans les campagnes de Clitor., ville trĂšs- connue de f Arcadie, on remarque une caverne dâoĂč sâĂ©coule une fontaine qui fait haĂŻr le vin Ă ceux qui boivent de ses eaux. On a gravĂ© auprĂšs, sur du marbre, une Ă©pigramme, en vers grecs, qui porte quelle nâest pas propre pour sây baigner, et qu elle est ennemie de la vigne ; parce que câest dans cette fontaine que MĂ©lampus, aprĂšs avoir sacrifiĂ©, purifia les filles de Pretus, pour les guĂ©rir de leur folie; il leur remit, en effet, lâesprit dans l'Ă©tat oĂč il Ă©toit avant leur dĂ©mence. Voici cette Ă©pigramme " ;. , PrĂšs des antres obscurs dâoĂč coule ce ruisseau , Si la chaleur tâinvite Ă mener ton troupeau, J Berger, tu peux y boire, et dans^-leurs promenades, Suivre parmi ces prĂ©s les errantes INayades; 1 Avec Perrault et Galiani , jâai suivi ici la correction de Budeus qui lit , in Italica Velino f campana Theano, au lieu de in llalica vircna. Il paroit que Vitruve cite ici ces deux eaux, en mĂŽme - temps, parce quâau rapport de Pline , elles avoient lâune et lâautre la propriĂ©tĂ© de rompre la pierre dans le corps par leur aciditĂ© ; in Ćnaria insula calculosis mederi. Et guet eocatur acidula ah Theano sidicino. . . Idem contingit in Velino lacu po- taniihus. Liv. XXXI , Chap. 5 . 2 Les habitans des Alpes , sur-tout dans les vallĂ©es qui sont au midi, sont trĂšs-sujets aux goitres ; ces excroissances y parviennent souvent Ă un Ă©norme volume. f jin Uâ S0M iSuse, lents, s'y lu i les y i t; ' P TOJĂ jĂźlĂźlonf ^ le coi ^ Ă©toii i^'a; [Meurs 1 r LIVRE VIII» C H Ă P, 1 * in,' 1 370 Mais ne lây baigne pas ces eaux, par un âpoison Qui." fait haĂŻr le vin, corrompent la raison. Fuis donc celte liqueur ^ si contraire Ă la vigne, Que MĂ©lampe infecta de celle humeur maligne, ; Qui des filles de PrĂȘte avoit troublĂ© les sens, Lorsquâil passa dâArgos en ces lieux dĂ©plaisans. Il se trouve de mĂȘme, dans lâĂźle de Chio, une fontaine qui fait perdre lâesprit Ă ceux qui vont imprudemment sây dĂ©saltĂ©rer. On a placĂ© une Ă©pigramme qui avertit que son eau, fort agrĂ©able Ă boire, rend lâesprit dur comme une pierre. Voici cette Ă©pigramme Si lâon boit celte eau fraĂźche et pure, Elle charme vos sens dâabord ; Mais elle rend lâame plus dure Que le rocher dont elle sort, A Suse, capitale du royaume de Perse, il y a une petite fontaine qui fait tomber les dents. On y lit aussi une Ă©pigramme qui annonce que cette eau est fort bonne pour sây baigner ; mais qu elle fait tomber les dents de ceux qui en boivent 1 . Voici les vers de cette Ă©pigramme Passants, lâeau que tu vois, est une eau quâil faut craindre ' ' Tu peux, il est vrai, sans danger Tâen rafraĂźchir les mains et mĂȘme tây plonger ; Mais si dans son cristal ta soif alloit sâĂ©teindre, Tu sentirois bientĂŽt ses effets malfaisans , A la bouche fatale , elle enlĂšve les dents. REMARQUE S. Nous voyons que les anciens connoissoient comme nous lâusage des eaux minĂ©rales. Lâauteur parle dâabord des fontaines dont lâeau sort chaude de la terre, et qui sont nĂ©anmoins trĂšs-agrĂ©ables Ă boire; il les compare, pour la bontĂ©, aux eaux de deux fontaines de Rome, quâon sera peut-ĂȘtre curieux de connoĂźire. Lâune Ă©toit la fontaine de Camoene ; elle existe encore prĂšs de cette ville, hors la porte de St;-SĂ©l>asiien ; elle se trouvoit autrefois dans un bois qui sâappeloit Casmoene, qui lui a donnĂ© son 110m, ainsi quâĂ la porte de la ville, qui sâappeloit dâabord la porte Camoene, ensuite CapĂšne, et enfin de i On mâa assurĂ© , que , dans la Picardie , il se de ceux qui en boivent, trouve plusieurs fontaines dont lâeau fait tomber les dents 47 * 3ti L*ARCHITECTURE-DE YITRUVE. On sait qnc Numa Pompilius se retiroit souvent dans ce bois , oĂč se trouvoit une grotte dâoĂč sortoit la fontaine dont nous parlons. Lucus erat , dit Tite Live, L. ĂŻ., quern medium ex opaco specu fons perenni rigabat aqua. Il persuada aux Romains quâil avoit, dans cette grotte, des frĂ©quents entretiens avec la nymphe ĂgĂ©rie, qui en Ă©toit la nayade, Ce fut lĂ qu 5 il composa le premier code de lĂ©gislation qui servit Ă adoucir les mĆurs de ce peuple grossier, Ă lui inspirer lâesprit de sociĂ©tĂ© , le respect pour les dieux,, et des sentimens patriotiques qui lâont rendu dâabord respectable Ă ses voisins , et ensuite Ă tout lâunivers. DâaprĂšs cela , les Romains regardoient celte fontaine comme sacrĂ©e. Tout contribuoit Ă la rendre agrĂ©able ; lâamĂ©nitĂ© de son site, la limpiditĂ© de ses eaux, enfin le bosquet toujours verd qui lâombragçoit j non content de la voir ainsi dĂ©corĂ©e par la nature, ils y joignirent les ornemens de lâart. Ils la firent couvrir dâune voĂ»te spacieuse, sous laquelle ils pratiquĂšrent des niches pour y placer les statues des muses. La nymphe EgĂ©rie y eut aussi la sienne, de mĂȘme que Numa. Cette voĂ»te existe encore, ainsi que la statue de Numa, qui est cependant trĂšs-mutilĂ©e. PrĂšs de lĂ , se trouve un petit bois, reste, sans doute, de celui de CamĂšne, composĂ© dâarbres toujours verds, comme chĂȘnes verds , lauriers de diffĂ©rentes espĂšces, arbousiers, etc. Juvenal, accompagnant son ami Ambricius, qui partoit pour Cume, aprĂšs avoir passĂ© la porte CapĂšue, dit . In vallem EgeriĂŠ descendimus , et spelunccis Dissimiles yVeris , quanto prĆstantius esset , Numen aquĂŠ , viridi si margine cĂźauderet undas â Herba , nec ingenuum violarent marmora tophum? Câest-Ă -dire Nous descendĂźmes ensemble, dans celte vallĂ©e dâEgĂ©rie, prĂšs de ces grottes qui ne sont rien moins que naturelles. Ah ! que les Nayades qui rĂ©gnent dans ces eaux , en quâil convient, quand on aura y un e pente raisonnable, depuis la source jusquâaux murailles de la ville, de construire des regards, D distants lâun de lâautre de la longueur de quatre mille pieds, afin que, si lâon devoit rĂ©parer quelque chose dans les tuyaux, on ne obligĂ© de fouiller tout le long de la conduite, jj et quâon trouve aisĂ©ment lâendroit oĂč est le mal. On ne doit pas, ajoute-t-il, faire ses regards, » Castella , sur les pentes ni dans les enfoncemens, etc. > DâaprĂšs celaj jâai cru comme Perrault, que je devois rendre le mot castellum par celui de regard. Cependant, au commencement de ce chapitre, par le mot castellum , notre auteur nâentend pas prĂ©cisĂ©ment un regard , comme nous' venons de le dĂ©finir ; il entend un Ă©difice qui contient des rĂ©servoirs Ă©levĂ©s pour recevoir lâeau, quây amenoieni les aqueducs, Ăšt pouvoir ensuite faire commodĂ©ment la disiribuiion nĂ©cessaire, comme il est indiquĂ© par la lettre L, fig. 5 , plane. XXIII. Contre ce chĂąteau, ou regard, on construisoit trois rĂ©servoirs ou rĂ©ceptacles dâeau ; les deux qui Ctoient sur les cĂŽtĂ©s sâĂ©lĂšvoient davantage, et celui du milieu Ă©toit plus bas ; les tuyaux marquĂ©s j j , 2, 3 , versent Ă©galement lâeau du premier rĂ©servoir dans les trois autres, et les deux tuyaux marquĂ©s 4 et 5, versent dans le rĂ©servoir du milieu, lâeau qui est surabondant dans les deux i. i troi? faille dâItalie font une lieue de France, rĂ©servoirs, vu. 384 LITRE. TIU, Ch» Ă ; p. rĂ©servoirs j lâun envoyoit lâeau dans ' les- bains, 1 autre aux maisons des particuliers , et celui du milieu lâenvoyoit aux lavoirs et aux fontaines jaillissantes» tels Ă«toient> les- grands regards, câest-Ă - dire , les rĂ©servoirs principaux quâon- faisoit pour chaque aqueduc , contre les murs de la ville. Celui de YAqua Claudia existe encore Ă Rome , prĂšs de la porte Majeure ; mais ' comme nous lâapprend Frontin , il se trouvoit, dans lâintĂ©rieur mĂȘme de la ville , plusieurs regards particuliers qui servoient pour subdiviser et distribuer lâeau des trois premiers canaux. ' Lâun des rĂ©servoirs de cĂŽtĂ© envoyoit ses eaux , Ă ce que dit Vilruve, aux bains publics, et lâautre aux maisons des particuliers; et ce qui. Ă©toit de trop dans ces deux rĂ©servoirs, tomboit dansâ celui du milieu, qui envoyoit les siennes dans les lavoirs, de sorte, ajoute-t-il, que lâeau nĂ©cessaire au public ne manquera pas, et les conduits des particuliers ne pourront en dĂ©tourner le cours. Frontin rapporte un sĂ©natus-consulte, qui dĂ©fendoit aux particuliers de prendre lâeau ailleurs que du chĂąteau., sans doute pour les obliger de payer la taxe , Ă laquelle on les imposoit pour cet objet, et quâon employoit , comme nous lâapprend Vilruve , Ă entretenir les aqueducs publics. Nous avons dĂ©jĂ remarquĂ© que , dans lâancienne Rome, les ouvrages se faisoient par entreprise * il y avoit donc des entrepreneurs chargĂ©s dâentretenir les eaux et les aqueducs ; câĂ©toit Ă eux quâon remettoit le produit de celle taxe. Frontin, que nous avons dĂ©jĂ citĂ©, nous apprend quâanciennement, câest-Ă -dire , quand Rome nâavoit pas celle grande abondance dâeau quâon y introduisit par la suite , au moyen dâune quantitĂ© dâaqueducs , toute lâeau qui entroit dans la ville , Ă©toit dâabord rĂ©servĂ©e pour le service public. Il nâĂ©toit permis aux particuliers de dĂ©tourner pour leur usage propre que celle qui tomboit, câest-Ă -dire, celle qui Ă©toit de trop pour lâusage commun. Apud antiques omnis aqua in publicos usus erogabaturlegeque cautum ita fuit , ne quis privatus aliam ducat , quam quoe ex lacu humum accedit. .... QuĆ ex lacu abun- davit eam nos caducam vocamus. Tellement que lâeau servoit dâabord pour les bains et pour les lavoirs publics ; ensuite, celle qui tomboit Ă©toit distribuĂ©e entre les particuliers , qui payoient pour cela une certaine redevance. Eratque vectigalis statuta merces quĆ in publicum penderetur. Ce fut dâabord le peuple qui choisissoit les entrepreneurs qui dĂ©voient avoir soin des eaux. Tute - lam autem singularum aquarum locari solitum invenio , positumque redemtoribus necessitatem certum numerum circa ductus extra urbem , et certum in urbe servorum opificum habendi 1 . Auguste, et, aprĂšs lui, tous les empereurs sâattribuĂšrent cette entreprise, sâemparĂšrent de la taxe imposĂ©e pour cet objet, et entretinrent Ă leurs dĂ©pens, ou Ă celui du public, les eaux et les aqueducs. Comme Perrault, jâai cru que le mot lacus signifioit un lavoir, câest-Ă -dire, des fontaines, oit le peuple alloit laver les draps, et chercher toute lâeau dont il avoit besoin. Au mot lacus , lâauteur ajoute, et salientes comme Perrault, jâai rendu cette expression par fontaines jaillissantes. Galiani dit quâil est tentĂ© de croire que lacus signifioit le bassin qui reçoit lâeau, et que salientes signifioit la fontaine avec le tuyau qui rĂ©pandoil lâeau, soit horizontalement , soit en la fusant jaillir dans ce bassin. Il ajoute quâon devroit examiner si Nardini ne sâest pas trompĂ© , \ 0 Frontin , L. II. 49 385 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. r~ lorsquâil avance que beaucoup de ces endroits de Rome, nommĂ©s lacus , Ă©toient de vĂ©ritables lacs, produits par les eaux de pluies ou de fontaine. Je ne puis cependant croire, ajoute-t-il, que la police de Rome auroit tolĂ©rĂ© de semblables cloaques au milieu de la ville ; je crois plutĂŽt quâon doit entendre par-lĂ une espĂšce de lac artificiel, câest-Ă -dire, le bassin de la fontaine. v. * i ' AprĂšs avoir dĂ©crit le chĂąteau ou regard qui dislribuoit lâeau, pour les divers besoins des habi-, tans, lâauteur observe , cjue sâil se rencontre des montagnes entre la source de la fontaine et la ville, quâil faut les percer en formant un souterrain ; que si ces montagnes sont formĂ©es de terre ou de sable , on doit construire des deux cĂŽtĂ©s du souterrain, dans toute sa longueur , deux murailles , pour soutenir les terres, et y faire des puits de 4 o toises en 4 o toises , 1 uti inter duos 1 sint actus 1. . Lâaqueduc dont jâai dĂ©jĂ parlĂ© qui amenoit lâeau dans la piscine merveilleuse , au cap Mi- sĂšne , traverse plusieurs montagnes quâon a dĂ» percer ; cet aqueduc a vingt milles de long ; il amenoit lâeau dans celte piscine , qui servoit de rĂ©servoir dâeau douce pour la flotte romaine. On voit quâil a Ă©tĂ© dirigĂ©' dâaprĂšs les principes que Vitruve rapporte dans ce chapitre ; il ne sert plus prĂ©sentement, et se trouve mĂȘme dĂ©truit en partie;, mais dans plusieurs, endroits, entre-autres, lorsquâil forme des souterrains au travers des montagnes, ces parties sont intactes, ce que jâai vu moi-mĂȘme; il a quatre pieds de haut sur deux et demi de large; les parois intĂ©rieures des murs sont en opus reticulatum. La piscine elle-mĂȘme est un des monumens les plus admirables, et des mieux conservĂ©s que nous ont laissĂ©s les Romains. Câest un grand Ă©difice cape, long dâenviron cent quatre-vingts pieds, sur cent vingt-huit de largeur, portĂ© par quarante-dmit pilastres, placĂ©s sur quatre lignes; il est construit dans lâintĂ©rieur de, la montagne quâon a, creusĂ©e Ă cet effet. Dans le chapitre i. er du I. er livre, lâauteur, voulant montrer que lâarchitecte doit connoĂźtre la philosophie, ou pour mieux dire, lĂ physique, dit, que saris son secours , il ne pourroit obvier Ă ' lâeffort des vents qui sâengendrent dans lâeaulorsquâelleâest enfermĂ©e. Câest pour faciliter lâĂ©chappĂ©e K de ces vents quâil veut quâon fasse de 120 pieds en 320 pieds des soupiraux; il appelle ces soupiraux des puits, puteos , parce quâils sont enfoncĂ©s dans la terre en forme de puits , jusquâĂ lâaqueduc , qui forme une voĂ»te souterraine. Un peu aprĂšs , quand il dit que lâaqueduc doit ĂȘtre portĂ© sur des arcades , il appelle ces soupiraux des colonnes, columnaria , parce quâen effet elles ressemblent Ă des colonnes. Voyez planche XXIlI, f fig. 5 , lettres C et D. j; - â Pour indiquer la distance quâil doit y avoir entre chacun de ces soupiraux , lâauteur emploie le mot actus. On sait que Yactus chez les Romains, Ă©toit une longueur de 120 pieds. Je crois avec Perrault et Galiani, quâaprĂšs le mot actus , il y avoit un nombre ainsi marquĂ© H, cpii manque dans les manuscrits, tellement quâil fauclroit lire, uti inter duos scilicet puteos sint actus II. Câest-Ă -dire quâentre chaque puits, il y avoit, comme nous lâavons dit, quarante toises car sâil nây avoit quâun actus, ce seroit environ 20 de nos toises; espace bien court et qui mullipheroit trĂšs-inutilement les soupiraux le long de lâaqueduc, au point'que sur une lieue, il faudroit 100 1 L 'aclus chez les Romains 'toit une longueur de no pieds comme on Je verra ci-aprĂšs. LIVRE VIII, C b k p, , , 36 puits. Ce qui prouve encore plus en faveur de cette correction , câest que Fauteur dit, sint actus au pluriel ; il entend donc quâil devoit y avoir plusieurs actus , autrement au .lieu de sint , il auroit dĂ» mettre sit. t r âą r ' * ' t; . Les anciens employoient, de mĂȘme que nous, des tuyaux de plomb oUjde poterie pour conr duire les eaux 5 ils indiquoient les divers ; palib res des tuyaux , par. le, nombre de doigts que conte- noit la largeur de la lame de plomb avant dâĂȘtre tournĂ©e pour former un tube, câest-Ă -dire, par sa circonfĂ©rence. On sait que la circonfĂ©rence est Ă©gale Ă trois diamĂštres, plus , une septiĂšme partie du diamĂštre, câest-Ă -dire , comme 22 est Ă 7; par consĂ©quent, il est aisĂ© dâaprĂšs le nombre de doigts que ! Yitruve assigne Ă la circonfĂ©rence de chaque espĂšce de tuyaux, de connoĂźtre leur diamĂštre. ^ , Nous lisons dans Frontin , articles 24 et a 5 , que le doigt Ă©toit la quantitĂ© qui servoit Ă rĂ©gler la proportion qui se trouvoit entre les mesures quâon employoit pour lâeau 3 mais que câĂ©loit le diamĂštre , quâon divisoit en plusieurs doigts et non la circonfĂ©rence. On ajoute quâAgrippa , et suivant dâautres , Yitruve introduisit lâusage de mesurer lâeau, dâaprĂšs un certain module, appelĂ© quina - rius. Ceux qui en attribuent lâinvention Ă Agrippa, disent quâon appelle ce module quinarius , parce quâil Ă©toit divisĂ© en cinq modules trĂšs-petits , qui nâĂ©toient pas plus gros quâun tuyau de plume; que câĂ©toit dâaprĂšs ce petit module quâon dislribuoit lâeau Ă Rome, lorsquâelle y Ă©toit encore rare, avant quâon y eĂ»t introduit les fontaines dont nous avons parlĂ©. Ceux , au contraire , qui font Yitruve auteur de cette espĂšce de mesure , disent quâon lâappeloit ainsi, parce quâil conte- noit la largeur de cinq doigts, qui Ă©toit celle que Ailruve assigne Ă la plus petite des lames de plomb dont on devoit former des tuyaux. DâaprĂšs cette derniĂšre rĂ©flexion, Galiani est portĂ© Ă croire que câest plutĂŽt Yitruve quâAgrippa qui a introduit lâusage du module nommĂ© quinarius. Un des grands avantages quâoffrent les tuyaux pour la conduite des eaux, câest quây Ă©tant enfermĂ©es, on peut les faire descendre dans le fond des vallĂ©es, et ensuite remonter sur la cĂŽte opposĂ©e ce quâon ne peut faire avec des aqueducs, quâil faut toujours maintenir de niveau ou en pente; tellement que quand ils doivent traverser des vallĂ©es , il nây a dâautre moyen que de les faire porter par des arcades. Une prĂ©caution quâon doit avoir Ă lâĂ©gard des buses, câest dâĂ©viter dans tous les dĂ©tours verticaux ou horizontaux, de former des angles trop aigus; il faut de plus renforcer tous ces coudes, afin quâils rĂ©sistent au choc de lâeau quâon dĂ©tourne dans cet endroit. Câest pour cela que Yitruve exige quâon ne fasse pas remonter tout de suite lâeau quâon aura conduit par des buses au fond dâune vallĂ©e , parce que lâangle ou le coude ne pourroit rĂ©sister au choc de lâeau ; il veut quâon la conduise Ă peu prĂšs horizontalement dans un certain espace, avant de la faire remonter; çâest ce quâil appelle un ventre. } Il seroit assez curieux de connoĂźtre ce quâil entend par les pierres quâil nomme saxi rubri , pierres rouges , et quâil veut quâon emploie pour former les coudes, lorsquâon se buses de poterie. Il est probable que câest celle terre pĂ©trifiĂ©e, ou tuf , dont la couleur est quelquefois dâun noir grisĂątre , et quelquefois rosacĂ©e , qui se trouve en abondance dans les environs de Rome 49 - L'ARCHITECTURE DE' VITRUVE. 3*7 ou comme le soupçonne Galiani, celte autre pierre dâune couleur rouge de feu, qui se trouve dans les environs de Sienne , et qui est aussi dure que la pierre de touche. Nous avons vu quâon prĂ©fĂ©roit Ă Rome les tuyaux de poterie Ă ceux de plomb , pour conduire les eaux. Dans un climat comme celui oĂč se trouve la ville de Rome, les tuyaux de poterie nâavoient pas lâinconvĂ©nient, quâils ont souvent dans les nĂŽtres, de se briser par la gelĂ©e, lorsquâils ne sont pas enfoncĂ©s bien profondĂ©ment dans la terre. Nâayant pas cet inconvĂ©nient, il est tout simple quâon leur donnoit la prĂ©fĂ©rence, puisquâils coĂčtoient moins ; qu ? il Ă©toit plus aise de les rĂ©parer, et enfin, quâils nâengendroient pas, comme ceux de plomb, la ceruse que les anciens croyoient vĂ©nimeuse. Nous avons vu dans le 12. chapitre du VII. e livre, que la ceruse se fait avec le plomb , par lâintermĂšde de lâacide. Il sembleroit donc que lâeau, qui sĂ©journe dans ce mĂ©tal, ne suffiroit pas pour en extraire la ceruse cependant comme on ne peut nier que, dans toutes les eaux, il ne se trouve quelques parties acides ou salines, nous devons adopter le senti* ment de Titruve. La ceruse , toutefois , nâest pas en elle-mĂȘme aussi dangereuse qitâil le croit ce nâest que ltf prĂ©paration des matiĂšres premiĂšres qui nuit souvent aux ouvriers. Les diverses opĂ©rations quâexige la connexion du plomb avec les acides pour produire la ceruse, J le transport des matiĂšres, et le battage font naĂźtre une poussiĂšre fine, qui couvre les ouvriers, pĂ©nĂštre dans les poumons par le nez et par la bouche; ce qui leur cause des maladies le plus souvent mortelles. Les manufacturiers en Angleterre, ont trouvĂ© le moyen de parer Ă cet inconvĂ©nient. Pour ne rien laisser Ă desirer sur les moyens de procurer de lâeau aux habitations, lâauteur, aprĂšs avoir indiquĂ© tout ce quâil faut faire pour amener lâeau courante, indiquĂ© ce quâon doit faire lorsquâon ne peut avoir celle-ci; câest-Ă -dire, quâil enseigne comme on doit enfoncer les puits,, et construire des citernes. Nous voyons par ce quâil nous dit, quâon connaissoit de son temps, lâeffet du mauvais air, qui se fixe trĂšs-souvent au fond des puits, et quâon connoissoit Ă©galement le moyen dây remĂ©dier en approfondissant dâautres puits Ă cĂŽtĂ©, et les faisant communiquer avec le premier par des galeries souterraines, pour Ă©tablir la circulation de Pair. Câest le moyen quâon emploie depuis des siĂšcles dans les miniĂšres de notre pays. Nous voyons quâil Ă©toit en usage dans les treiziĂšme et quatorziĂšme siĂšcles. Les LiĂ©geois, qui ont toujours eu une correspondance trĂšs-active avec Rome, avoient sans doute rapportĂ© dans leur patrie, ce quâils voyoient pratiquer dans les miniĂšres dâItalie, oĂč on avoit probablement toujours suivi le moyen indiquĂ© par Vitruve. LâexpĂ©rience quâil conseille pour sâassurer si lâair est mauvais au fond du puits, est immanquable ; on lâemploie encore tous les jours. U » faut y descendre, dit-il, une lampe allumĂ©e; si elle ne sâĂ©teint pas, on peut y descendre sans » danger; mais si la force de la vapeur la fait Ă©teindre, il faut creuser, Ă cĂŽtĂ©, deux nouveaux puits. Lorsque nos ouvriers mineurs voyent leur lumiĂšre sâĂ©teindre , ou prĂȘte Ă sâĂ©teindre dans les puits ou les galeries souterraines, ils jugent alors que lâair y est malsain, et ils Ă©prouvent eux- mĂȘmes, sâils y restent encore quelque temps, quâil nâest plus respirable; ils ne peuvent rĂ©sister, ils tombent en foiblesse et pĂ©rissent si on ne les transporte bien vĂźte hors de la miniĂšre. II est Ă©ton*- nant quun homme aussi instruit que lâĂ©toit Perrault , ignorĂąt tout cela; il ne peut concevoir quâaprĂšs avoir creusĂ© un puits, on ait besoin dây descendre une lampe , pour sâassurer si on peut y descendre soi-mĂȘme sans danger que cette lampe, en sâĂ©teignant, fasse connoĂźlre si les vapeurs * 388 LIVRE VIII, CrH AP. VII . sont dangereuses; et que le remĂšde soit de creuser deux autres puits pour exhaler les vapeurs du premier. Car , dit-il , les deux nouveaux puits auront aussi leurs vapeurs dangereuses. Pour concevoir, » ajoute-t-il, que ces nouveaux puits diminuent la .vapeur du premier, il faudroit supposer quâil nây » avoit dans la terre quâune certaine quantitĂ© de vapeur dans le premier puits , qui , Ă©tant partagĂ©e » entre les deux autres, doit diminuer la quantitĂ© de celui-ci. » Ce nâest pas , comme le croit Perrault , une vapeur qui se trouve sous la terre ; mais un air qui nâest pas respirable , qui se fixe au fond des puits et y devient stagnant ; on lâĂ©vite en Ă©tablissant un courant dâair au moyen dâun autre puits quâon fait communiquer avec celui-ci par une galerie. Vilruve ne dit cependant pas ici le point essentiel ; câest quâil faut que lâouverture de ce dernier puits soit plus Ă©levĂ©e -quenelle de -lâautre, pour prendre une colonne dâair moins dilatĂ©, et par consĂ©quent plus pesant, qui, par son poids, force lâair, qui est dans lâautre puits, de sortir, et le remplace continuellement , ce qui Ă©tablit la circulation. Vilruve est encore plus dans lâerreur, lorsquâil veut quâon fasse deux autres puits Ă cĂŽtĂ© du premier; un seul suffit pour Ă©tablir cette circulation. Les mots latins signinis operibus ne signifient pas proprement une citerne, mais cette espĂšce dâouvrage fait avec des cailloux , ce qui sâappelle en Italie le smalte dont nous avons dĂ©jĂ parlĂ©. ĂPai rendu ces expressions par le mot citerne , parce que câest ainsi quâon nomme les rĂ©servoirs qui reçoivent les eaux qui tombent des toits. Gaiiani est Ă©tonnĂ© de ce que Vitruve nâexige quâune seĂŒle couche de chaux et de cailloux concassĂ©s pour lâenduit des citernes, tandis que dans le i. cr chapitre du VII. livre, il en exige beaucoup plus pour le pavĂ© des maisons ; il croit que Vitruve nâa voulu parler ici que de la premiĂšre couche dite statumen , et tout au plus de la seconde dite rudus , et quâil a nĂ©gligĂ© de parler des autres. Nous voyons que tout lâintĂ©rieur de la citerne dont nous avons parlĂ© , oĂč lâon conservoit lâeau douce pour la flotte romaine au cap MisĂšne , appelĂ©e la piscine admirable , Ă©toit couvert dâun dernier enduit, composĂ© de chaux et de tuiles concassĂ©es câest celui que lâauteur nomme la trulisation. LâARCHITECTURE DE Y I T R U y E. LIVRE NEUVIĂME. I N T R O ,D U C T I O N. . Ăź ; ; Les anciens Grecs accordĂšrent les plus grands honneurs aux AthlĂštes qui s etoient rendus cĂ©lĂšbres et qui avoient remportĂ© le prix aux jeux olympiques , Pithiens, Isthmiques et NĂ©mĂ©ens; non contens de les combler de louanges , dans les assemblĂ©es publiques , oĂč ils paroissoient portant des palmes et des couronnes, ils voulurent encore quâils retournassent dans leur patrie, sur des chars de triomphe , et que la rĂ©publique leur assignĂąt des pensions pour le reste de leur vie. Ka-t-on pas lieu de sâĂ©tonner quâon nâait pas rendu les mĂȘmes honneurs , et de plus grands encore , Ă ceux dont les Ă©crits ont Ă©tĂ© si utiles Ă tous les siĂšcles et Ă tous les peuples? Cela, certes, eĂ»t Ă©tĂ© bien plus juste, puisque les exercices des AthlĂštes ne servent quâĂ rendre leur corps plus fort et plus robuste ; tandis que lâĂ©tude de ceux qui composent des livres, perfectionne non - seulement leur esprit, mais dispose encore celui des autres Ă apprendre les sciences. En effet, quel bien Milon de Crotone a-t-il fait aux hommes , pour nâavoir jamais Ă©tĂ© vaincu? Et quâont fait tant dâautres , qui ont remportĂ© de pareilles victoires ? si ce nâest dâavoir acquis pendant ,1e cours de leur vie , beaucoup de gloire et de rĂ©putation parmi leurs concitoyens Ăź Au lieu que les leçons de Pylhagore, de DĂ©mocrile, de Platon , dâAristote et des autres grands hommes, lues et mises en pratique, devinrent dâabord un fruit utile pour leurs concitoyens , et ensuite pour tous les peuples , de quelque nation JĂź corn fi, cel] lITOTl Ăs les Il lâadres Ăź Wt qu âtloses e Ont tonj ĂŻws de f prouver â Siffle 1 ' PNcij ^Ăšme -, ! *loit $ Introduction. 3 9 ° quâils fussent; car, câest Ă ceux qui, dĂšs leur tendre jeunesse, ont ornĂ© leur esprit dâune bonne doctrine et des excellens principes de la sagesse, quâil appartient de rĂ©gir les villes par de bonnes lois, sans lesquelles il est impossible que les Ă©tats puissent subsister. Si les grands hommes sont les premiers bienfaiteurs de lâhumanitĂ© , par les ouvrages quâils publient, je crois quâils mĂ©ritent, non - seulement dâĂȘtre honorĂ©s par des palmes et des couronnes, mais quâon doit encore leur dĂ©cerner desâ triomphes , et les mettre ail rang des dieux. Je me propose de rapporter quelques exemples des dĂ©couvertes les plus utiles Ă la vie humaine et Ă la sociĂ©tĂ©, que des auteurs anciens nous ont transmises dans leurs Ă©crits ; on avouera quâils mĂ©ritoient autant dâhonneur que de reconnoissance. t Je commencerai par une dĂ©couverte de Platon ; de toutes celles quâil a dĂ©montrĂ©es, celle-ci est la plus utile ; voici comme il lâexplique. REMARQUES. Aristote , dans la XXX. c section de ses problĂšmes , examine quelles sont les raisons pour lesquelles les anciens honoroient plutĂŽt les athlĂštes que les savans ; il en rapporte deux la premiĂšre est quâon estime et quâon admire les choses qui se font par la puissance humaine , et non pas celles que la puissance humaine trouve faites. Or, dit-il, la victoire dâun athlĂšte est lâouvrage de la force et de lâadresse du corps ; au lieu que toute lâintelligence dâun philosophe ou des mathĂ©maticiens nâaboutit quâĂ trouver ce qui existe dĂ©jĂ sans elle, puisque les plus belles spĂ©culations se, font sur des choses existantes avant la spĂ©culation. Par exemple, les trois angles de toutes sortes de triangles auroient toujours Ă©tĂ© Ă©gaux,, Ă deux droits, quand personne nây auroic-jamais pensĂ©. La seconde raison , câest que tout le monde peut juger de la force du corps. Il nây a personne qui ne puisse dire quel est celui qui surpasse les autres Ă la course, Ă la lutte et dans les autres exercices de ce genre. Il nâen est pas de mĂȘme des productions de lâesprit les personnes qui ont assez de lalens et de lumiĂšres pour les juger, sont en trop petit nombre. Les trois premiers chapitres de ce livre , devroient faire partie de Ăźâfntroduction , puisquâils contiennent trois dĂ©couvertes faites par dâanciens philosophes , que lâauteur rapporte comme exemples, pour prouver lâavantage de la philosophie. Le premier chapitre en contient une de Platon , le second une de Pythagore , et le troisiĂšme , enfin , une dâArchimĂšde. Elles nâont aucun rapport avec lâobjet principal de ce livre, qui traite de la gnomonique. Ensuite , la maniĂšre dont lâauteur termine le troisiĂšme chapitre, prouve Ă©videmment que câĂ©toit seulement lĂ que finissoil lâintroduction, et que devoit commencer le livre. Cependant, Ă lâexemple de Galiani, je nâai rien voulu changer Ă lâancienne division des chapitres; mais , comme lui, je me suis abstenu dây mettre des titres pour les distinguer des autres. i LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE PREMIER. Y eut-on doubler la grandeur dâune piĂšce de terre qui soit carrĂ©e, de maniĂšre que ce double soit aussi un carre' ? Il faut se servir de lignes, parce quâon ne peut le faire par la multiplication des nombres. Voici comme cela se dĂ©montre Si lâon veut quâune surface carrĂ©e T qui a , par exemple, dix pieds de long et autant de large, et qui fait par consĂ©quent cent pieds de surface, soit doublĂ©e, et qu elle contienne deux cents pieds, en conservant toujours la figure carrĂ©e, on doit chercher quelle doit ĂȘtre la grandeur des cĂŽtĂ©s de ce carrĂ©, pour que la multiplication de ces cĂŽtĂ©s produise les deux cents pieds, que doit avoir la superficie, ce quâil est impossible de trouver par les nombres car si lâon fait les cĂŽtĂ©s de i4 pieds, leur multiplication fera 196 ; si on les fait de i5, ils produiront 225; de sorte que cela ne pouvant sâexpliquer par les nombres, il faut dans ce carrĂ©, qui a dix pieds de long, et dix de large, tirer une ligne diagonale, dâun angle Ă lâautre, pour le diviser en deux triangles Ă©gaux, qui aient chacun cinquante pieds de surface ; et sur la longueur de cette diagpnale, on dĂ©crit un autre carrĂ©. Il se trouvera alors que le grand carrĂ© aura quatre triangles Ă©gaux et pareils , tant pour la grandeur que pour le nombre de pieds, aux deux petits triangles de cinquante pieds chacun, qui ont pour base la diagonale du petit carrĂ©. Câest ainsi que Platon explique la maniĂšre de doubler le carrĂ©, en se servant de lignes, comme on le voit clairement par la figure. REMARQUES. . On voit par la figure ici jointe, que le carrĂ© ABEF, tracĂ© sur la diagonale AB, est double du petit carrĂ© AC BD, dans lequel on a tirĂ© celte diagonale. Il est reconnu engĂ©omĂ©lrie, quâen multipliant par elles-mĂȘmes, les quantitĂ©s qui divisent la longueur dâun des cĂŽtĂ©s du carrĂ©, on aura lâĂ©tendue de sa superficie ; il est encore reconnu, par consĂ©quent, que le cĂŽtĂ© AC du carrĂ©, est incommensurable avec sa diagonale AB. 11 est donc impossible dâindiquer avec des nombres, la longueur de la diagonale dâun carrĂ© dont on connoĂźt le cĂŽtĂ©. Câest ce que Vitruve entend quand il dit quâon ne peut trouver un nombre qui, multipliĂ© par lui-mĂȘme, donne un carrĂ© qui soit le double dâun autre , qui a Ă©tĂ© produit par un nombre donnĂ©. La dĂ©monstration quâil en donne ici, est plutĂŽt pratique que gĂ©omĂ©trique. En gĂ©omĂ©trie, la dĂ©monstration de celte proposition ou problĂšme, dĂ©pend et se fait de la mĂȘme maniĂšre que celle de la cĂ©lĂšbre proposition dâEuclide, qui est la 47 . de son I. er livre, dont il sera parle dans le chapitre surfant parce que le carrĂ© de lâhypothĂ©nuse AB, LIVRE IX;' Ch A'p; n. 3 92 qui est ici la diagonale du petit carrĂ©, est Ă©gale aux deux carrĂ©s des cotĂ©s AC, CB; ici les deux cĂŽtĂ©s Ă©tant Ă©gaux , câest la mĂȘme chose que si lâon disoit que ce carrĂ© est le double de celui dans lequel se trouve la diagonale. ĂȘs.\ Ă© s. ^.carres. p. carrĂ© s. CHAPITRE II. ythĂ gore a, de mĂȘme, inventĂ© la maniĂšre de tracer un angle droit sans employer lâĂ©querre dont se servent les ouvriers. Par lĂ , il a perfectionnĂ© cet instrument quâils avoient tant de peine Ă fabriquer. Il a dĂ©montrĂ© les rĂšgles quâon devoit suivre , et enseignĂ© la vĂ©ritable mĂ©thode de les faire trĂšs-exactes. Voici comment. âllJĂ arrti lit f J y On prend trois rĂšgles, lâune de trois pieds , lâautre de quatre et la troisiĂšme de cinq ; on les dispose de maniĂšre que leurs extrĂ©mitĂ©s se joignent et qu elles composent ainsi un triangle qui formera une Ă©querre parfaite. Si lâon trace sur la longueur .de ces trois rĂšgles , autant de carrĂ©s , on verra que celui dont le cĂŽtĂ© sera de trois pieds , aura neuf pieds de superficie ; celui dont le cĂŽtĂ© en aura quatre , sera de seize pieds de superficie ; et celui dont le cĂŽtĂ© aura cinq pieds , sera de vingt-cinq de plus , si on rĂ©unit le nombre des pieds que contiennent les superficies des deux carrĂ©s , dont lâun a trois et lâautre quatre pieds de chaque cĂŽtĂ©, on trouvera quâil sera Ă©gal Ă celui que contient la superficie du carrĂ© qui a cinq pieds de chaque cĂŽtĂ©. On dit quâaprĂšs avoir fait cette dĂ©couverte, Pythagore en rendit grĂące aux Muses , et quâil leur fit un sacrifice , parce quâil ne doutoit pas que cette invention ne lui eut Ă©tĂ© inspirĂ©e par ces dĂ©esses. no L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. Cette de'couver te est trĂšs-utile dans beaucoup de circonstances , principalement pour mesurer ; elle est aussi dâun grand usage dans la construction des Ă©difices sur-tout pour rĂ©gler la hauteur des degrĂ©s des escaliers puisquâon divise en trois toute la hauteur AB, depuis-le rez-de-chaussĂ©e jusquâau premier Ă©tage, on donne cinq de ces parties au limon de lâescalier AC, ce qui fait prĂ©cisĂ©ment la longueur de sa pente. Avec une grandeur Ă©gale Ă chacune des trois parties qui divisent la hauteur , qui se trouve entre le premier Ă©tage et le rez-de-chaussĂ©e, du point B, oĂč la perpendiculaire de cette hauteur le joint, on mesure quatre parties BC, et Ă lâextrĂ©mitĂ© on place les premiers degrĂ©s, qui, par ce moyen , seront Ă©galement bien proportionnĂ©s , ainsi que lâescalier. On verra la description de tout cela dans la figure suivante. RE M ARQUE S. Tout ce que fauteur avance dans ce chapitre , se trouve dĂ©montrĂ© dans la 47 . me et la 48. m * proposition du I. er Liv. dâEuclide , oĂč lâon voit que le carrĂ© de lâhypoihĂ©nuse , câest-Ă -dire, celui q*uâon trace sur le cĂŽtĂ© dâun triangle, opposĂ© Ă lâangle droit, est Ă©gal aux deux autres carrĂ©s tracĂ©s sur les deux autres cĂŽtĂ©s ; et cela est vrai de tous les triangles rectangles. Celui de Pythagore a cela de particulier^ que les cĂŽtĂ©s du sien sont comme de nombre Ă nombre. LIVRE IX, C n a p," ni. Vi CicĂ©ron dit que Pylhagore avoit coutume dâimmoler un bĆuf, toutes les fois quâil dĂ©couvroit quelque chose de nouveau dans la gĂ©omĂ©trie ; mais AthĂ©nĂ©e rapporte quâil en immola cent pour avoir dĂ©couvert la proposition dont il sâagit. Galiani reproche Ă Perrault de nâavoir pas assez respectĂ© le texte, dans ce chapitre, et dây avoir fait trop lĂ©gĂšrement plusieurs corrections. Par exemple ce traducteur françois veut quâon lise, scapis scalarum , tandis que, dans tous les manuscrits , on lit scalis scaporum. Scapus signifie un fĂ»t de colonne, un trĂŽne , un poteau ; ainsi scapis scalarum , comme il veut quâon lise, signifieroit le poteau qui sert de noyau ou de vis Ă un escalier rond. Perrault dit ensuite cc les » degrĂ©s des escaliers qui sont carrĂ©s oblongs, et qui ont des rampes droites, sont appuyĂ©s sur des poteaux inclinĂ©s suivant la pente des rampes les charpentiers appellent ces poteaux les limons de lâĂ©chelle. Jâai cru, ajoute-t-il, que Yilruve les a voulu signifier par scapi scalarum » car je crois avoir eu raison de corriger cet endroit, en mettant scapi scalarum , au lieu de scala scaporum , parce quâil est vrai de dire que les escaliers ont des poteaux , et non pas que r les poteaux ont des escaliers. Yoici comme il auroit pu et dĂ» faire la construction erit in scalis inclinatio scaporum. Rien ne rĂ©pugne donc Ă laisser le texte tel quâil est, pour signifier le limon de lâescalier, qui est une piĂšce de bois posĂ©e obliquement, et qui sert Ă porter les marches, ou un ouvrage en pierre , ou en maçonnerie destinĂ©e au mĂŽme usage. Ce limon est , en quelque maniĂšre, le rĂ©gulateur de lâescalier ; on ne peut douter que ce ne soit de cette piĂšce que Yi- truve veut parler ici, et il Ă©loit trĂšs - inutile de toucher au texte. DâaprĂšs tout ce quâon vient de lire, on voit que , chez les anciens, la longueur de la base dâun escalier Ă©toit, Ă sa hauteur , comme 4 est 3 ; cette proportion Ă©toit pour les escaliers des maisons car ceux des temples avoient une proportion toute diffĂ©rente , comme nous Pavons vu dans le 3. me Chap. du III. me livre. Aujourdâhui, en gĂ©nĂ©ral, on fait la base de lâescalier le double plus grande que sa hauteur. CHAPITRE III. X Armi une infinitĂ© de dĂ©couvertes admirables quâa faites ArchimĂšde ; on distingue, sur-tout, celle que je vais rapporter, oĂč il montre une grande intelligence dâesprit. HiĂ©ron, sâĂ©tant placĂ© sur le trĂŽne de Syracuse , et tout lui ayant heureusement rĂ©ussi dans cette entreprise, rĂ©solut dâoffrir une couronne dâor aux dieux immortels dans un de leurs temples ; il convint avec un ouvrier de lui payer une somme considĂ©rable pour la façon, et lui donna lâor au poids. Lâartiste livra son ouvrage le jour quâil lâavoit promis au roi, qui le trouva parfaitement bien exĂ©cutĂ© ; et la couronne ayant Ă©tĂ© pesĂ©e, parut avoir le poids de lâor quâil 5o. 3 9 5 LâARCHITECTURE DE VITRUVE; avoit donnĂ©. Par la suite, ayant quelquâindice i que lâouvrier avoit ĂŽtĂ© une partie de 1 or quâil avoit remplacĂ© par autant dâargent , le roi fut trĂšs-offensĂ© de cette tromperie ; mais ne pouvant trouver le moyen de convaincre lâouvrier du vol quâil avoit fait, il pria ArchimĂšde dâen occuper son esprit. Un jour quâArchimĂšde, tout occupĂ© de cette affaire , se mettoit au hain, il sâaperçut par hasard quâĂ mesure quâil sâenfonçoit dans le hain , lâeau sâen alloit par dessus les bords 2 ; cette dĂ©couverte lui fit connoĂźtre la raison de ce quâil cherchoit, et sans tarder davantage , il sortit tout joyeux du hain , et courant tout nud vers sa maison, il se mit Ă crier quâil avoit trouvĂ© ce quâil cherchoit , disant en grec ssupputa 3. On dit qu aprĂšs cette premiĂšre dĂ©couverte, il fit faire deux masses de mĂȘme poids qu avoit la couronne, lune dâor et lâautre dâargent. Il plongea dans un vase plein dâeau la masse dâargent, qui, Ă mesure quâelle sâenfonçoit, fit sortir une quantitĂ© dâeau, Ă©gale Ă sa' capacitĂ©; lâayant ensuite ĂŽtĂ©e , il remit autant dâeau dans le vase quâil en Ă©toit sorti, le remplissant jusquâau hord , comme auparavant ; ayant mesurĂ© Jfeau qui Ă©toit sortie, il connut la quantitĂ© d'eau qui rĂ©pond Ă une masse dâargent dâun certain poids aprĂšs cette expĂ©rience, il plongea de mĂȘme la- masse dâor dans le mĂȘme vase rempli dâeau ; lâayant retirĂ©e, il mesura lâeau comme devant , et trouva que la masse dâor nâavoit pas fait sortir autant dâeau , et que le moins rĂ©pondoit Ă celui quâavoit le volume de la masse dâor comparĂ© avec celui de la masse dâargent, qui Ă©toit de mĂȘme poids ; ensuite il remplit encore le vase et y plongea la couronne , qui fit sortir plus dâeau que la masse dâor, dâĂ©gal poids , nâen avoit fait sortir. Calculant enfin combien cette quantitĂ© surpassoit celle que la masse avoit fait sortir, il connut ce quâil y avoit dâargent mĂȘlĂ© avec lâor, et fit voir clairement ce que 1 ouvrier en avoit volĂ©. ... N . - - Quand on porte ses rĂ©flexions sur les pensĂ©es ingĂ©nieuses dâArchitas de Tarente; et dâEratosthĂšne de CirĂšne , on voit combien ils ont fait de dĂ©couvertes utiles aux hommes, dans les mathĂ©matiques ; quoiquâelles soient toutes intĂ©ressantes , il en est une pour laquelle ils se sont, sur-tout, attirĂ©s notre admiration chacun cherchoit Ă rĂ©soudre le problĂšme quâApollon avoit proposĂ© dans sa rĂ©ponse aux 1 Philander et Perrault ont cru que le mot indicium dĂ©rivoit Ă 'index , dont on sâest quelquefois servi pour dĂ©signer la pierre de touche , quâon emploie pour Ă©prouver les mĂ©taux. Le dernier dâaprĂšs cela a traduit dans ce sens ce passage de Vilruve. Galiani que jâai suivi nâa pas adoptĂ© leur opinion ; il trouve que la signification quâils ont donnĂ©e Ă ce mot , rĂ©pugne au sens de Fauteur ; si en effet , dit-il , le roi HiĂ©ron avoit connu , par la pierre de touche indicium , le vol quâon lui avoit fait , en mettant de lâargent avec For , il nâauroit pas dĂ» avoir recours Ă ArchimĂšde. Galiani croit donc que indicium signifie ici , que ce roi eut des indices par une dĂ©nonciation ou autrement. 2 Il appelle ici solium , les bords de la baignoire J qu il a appelĂ©s labrnm dans le Chap. io du Liv. V. 3 Câest-Ă -dire , je Fai trouvĂ© , je Fai trouvĂ©. LIVRE IX, C h a p. in. 3 9 6 habitans de Delos; elle portoit quâon fĂźt un cube qui fĂ»t le double de celui de son autel ; que si on parvenoit Ă le faire , les habitans de lâisle seroient dĂ©livrĂ©s des maux que leur avoit attirĂ©s la colĂšre des dieux. Ărchitas parvint Ă le faire au moyen des hĂ©micylindres i , et EratosthĂšne par l'invention dâune machine appelĂ©e Misolabe 2 . Combien ne devoient-ils pas aimer les sciences, ceux qui ont fait de pareilles dĂ©couvertes ! car rien ne satisfait plus lâesprit, qui, naturellement portĂ© Ă pĂ©nĂ©trer la vĂ©ritĂ©, cherche Ă connoĂźtre lâeffet de chaque chose. Parmi tous les livres , je ne puis mâempĂȘcher dâadmirer ceux oĂč DĂ©mocrite traite de la nature, et son commentaire quâil- a intitulĂ© Chirotoneton 3 , oĂč il a marquĂ© et cachetĂ© avec son anneau et de la cire rouge, tout ce quâil connoissoit par sa propre expĂ©rience. Les ouvrages de ces grands hommes resteront et seront utiles Ă jamais, non- seulement pour la morale, mais encore pour tout ce quâil y a dĂ© plus important; au lieu que la bravoure qui illustre les AthlĂštes, pĂ©rit, en peu de temps, avec la force de leur corps. On peut mĂȘme ajouter que, ni ce quâils ont pu faire par eux-mĂȘmes, tandis quâils Ă©toient dans la vigueur de lâĂąge, ou par ceux qui sont venus aprĂšs eux, ni par les prĂ©ceptes quâils ont donnĂ©s cle leur art, ils nâont jamais pu procurer aucun avantage Ă la vie humaine, comparable Ă ceux qu elle reçoit des inventions des savants. Quoiquâil nây ait aucune coutume ou loi qui dĂ©cerne de grands honneurs aux Ă©crivains cĂ©lĂšbres, cependant leur aine, accoutumĂ©e Ă mĂ©diter les objets sublimes, prend son essor avec le secours de la mĂ©moire; elle sâĂ©lĂšve. , pour ainsi dire , jusquâaux eieux , dâoĂč elle aperçoit tout ce quâil y a de plus Ă©levĂ© ; ils les transmettent Ă la postĂ©ritĂ©, dans leurs Ă©crits, et dans les figures quâils en laissent. Parmi les amateurs des belles-lettres, en est-il un seul qui nâait limage dâEnnius gravĂ©e dans lame, comme si câĂ©loit celle dâun dieu? Ceux qui aiment les vers dâAccrus sont toujours avec cet auteur, qui sâest si bien dĂ©peint dans ses ouvrages de mĂȘme, combien ne sera-1-il pas agrĂ©able Ă ceux qui 1 viendront aprĂšs nous, de sâentretenir, avec LucrĂšce, des secrets de la nature, comme sâil Ă©toit prĂ©sent, et, avec CicĂ©ron, de la rhĂ©torique, ou, avec Varron, des propriĂ©tĂ©s de la langue latine? Tous ceux qui cultivent les belles-lettres ne confĂšrent-iis pas avec les sages de la GrĂšce, comme sâils leur communiquoient leurs plus secrettes pensĂ©es ? Les conseils de ces anciens philosophes, quoiquâab- 1 Câest-Ă -dire demi - cylindres. ' * proportionnelles. Voyez les remarques Ă la fin du chapitre.. 2 Câest-Ă -dire qui sert Ă prendre deux moyennes 3 Câest-Ă -dire , choisi. % LâARCHITECTURE D Ă Y I T R U Y E, sens, leur plaisent davantage ; et ils les trouvent plus solides que ceux quâils pourroient apprendre en confĂ©rant avec tous les philosophĂšs de leur temps. Câest pourquoi, ĂŽ CĂ©sar ! appuyĂ© de lâautoritĂ© de ces grands hommes et conduit par leurs conseils, jâai Ă©crit mes sept premiers livres, qui traitent des Ă©difices, et le huitiĂšme, qui concerne les eaux. Dans celui-ci, jâexpliquerai les rĂšgles de la gnomonique, et, comme on est parvenu aies Ă©tablir, dâaprĂšs lâombre produite par lâinterposition du gnomon aux rayons du soleil ; jâenseignerai encore dans quelle proportion cette ombre augmente pendant un certain espace de temps, et comme elle diminue ensuite. REMARQUES. Archilas de Tarenie ,â cĂ©lĂšbre philosophe pythagoricien , florissoit vers fan 4o8 avant EratoslhĂšne de CirĂšne, en Afrique, Ă©loit un savant critique ; il fut disciple dâAriston et de Callimaque , et bibliothĂ©caire dâAlexandrie , sous PtolomĂ©e EvergĂ©te , roi dâEgypte ; il mourut ig4 ans avant , Ă 81 ans; il sâĂ©loit appliquĂ© Ă tous les genres de sciences, et trouva, le premier, la maniĂšre de mesurer la grandeur de la terre ; ce qui lui lit donner le surnom de cosmographe et arpenteur de lâunivers. Selon Yitruve, on doit, Ă ces deux philosophes, la solution du problĂšme de la duplication du cube. Cette dĂ©couverte a Ă©tĂ© trĂšs-cĂ©lĂšbre dans la haute antiquitĂ©. Les Grecs, qui aimoient le merveilleux , ont arrangĂ© deux fables, pour la rendre plus intĂ©ressante ; elles sont toutes deux rapportĂ©es dans la lettre dâEratosthĂšne Ă PtolomĂ©e, qui est parvenue jusquâĂ nous. Nous venons de voir la premiĂšre dans Vilruve, qui prĂ©tend quâon a trouvĂ© celle solution Ă lâoccasion de lâoracle rendu par Apollon. Dans la seconde, on dit quâayant demandĂ© Ă Glaucus quelle forme il vouloit quâon donnĂąt Ă son tombeau? Il rĂ©pondit quâil falloit faire un cube dont le solide fĂ»t double dâun autre cube, dont chaque face eĂ»t cent pieds de superficie. On crut dâabord parvenir Ă le faire, en cherchant Ă doubler les faces mais il arrivoit, quâau lieu de les doubler, on les quadruploit ; ce qui produisoit un cube dont le solide* Ă©toit huit fois aussi fort que celui quâon vouloit seulement doubler. On proposa la question Ă plusieurs gĂ©omĂštres , qui ne purent la rĂ©soudre ; il nây eut quâun certain Hypocrate de Chio qui, aprĂšs avoir rĂ©flĂ©chi Ă la nature relative des cubes, reconnut que tout le problĂšme se rĂ©duisoit Ă trouver deux moyennes proportionnelles, entre deux lignes droites, dont lâune fĂ»t le double plus grande que lâautre ; parce quâen formant un cube sur la premiĂšre des deux moyennes proportionnelles, celui-ci seroil au cube donnĂ©, en raison triple des cĂŽtĂ©s, comme la premiĂšre de ces quatre lignes proportionnelles est Ă la derniĂšre, câest-Ă -dire, le double. .âąSi nous en croyons les Grecs sur leur parole , voilĂ comme fut trouvĂ©e la solution de ce fameux problĂšme. Il est plus probable cependant que les' Egyptiens la leur avoit fait connoĂźtre avec le reste de la gĂ©omĂ©trie ; mais il paroĂźt quâon la perdit par la suite , puisquâelle fut le sujet des recherches de plusieurs savants , parmi lesquels on compte Platon, ArchimĂšde, MĂ©nechme, Philon, HĂ©ron, LIVRE IX, C h a p. IV. 3 9 8 Pappus , Apollonius, etc. Ils parvinrent, par diffĂ©rentes mĂ©thodes, Ă la retrouver; mais câest Descartes qui nous a appris, par un moyen aussi ingĂ©nieux que facile 3 le moyen de trouver les deux moyennes proportionnelles. Philander et Barbaro ont cherchĂ© Ă expliquer les mĂ©thodes dâEratosthĂšne et dâArchitas , dont parle notre auteur ; mais ils lâont fait d^une maniĂšre si obscure, quâĂ peine peut-on les comprendre, sur-tout pour celle dâEratosthĂšne. Galiani y a suppléé; en suivant leur mĂ©thode, il a trĂšs - bien dĂ©montrĂ© et rĂ©solu ce problĂšme. CHAPITRE IV. De la sphĂšre et des planĂštes. Les inventions de la gnomonique semblent venir dâun esprit divin. Comme elles sont admirables pour ceux qui les considĂšrent avec attention ! On voit, par exemple, lâombre dâun gnomon, pendant lâĂ©quinoxe, avoir une grandeur diffĂ©rente Ă AthĂšnes, Ă Alexandrie, Ă Rome, Ă Plaisance i et dans les autres endroits de la terre; de lĂ vient que la maniĂšre de tracer les cadrans, diffĂšre quand on change dâun lieu Ă un autre car câest dâaprĂšs la grandeur des ombres Ă©quinoxiales, qu'on dĂ©crit les analĂšmes , au moyen desquelles on tire , suivant la situation des lieux et lâombre des gnomons , les lignes qui indiquent les heures. On appelle analĂšmes 2 , les rĂšgles quâon a Ă©tablies dâaprĂšs les observations, pour bien tracer le cours du soleil, selon lâaccourcissement qui arrive aux ombres, depuis le solstice d hiver ; elles servent, Ă lâaide dâun compas conduit avec art, Ă dĂ©crire tous les effets que cet astre produit dans le monde. Par le monde, on entend tout ce que comprend la nature mĂȘme, le ciel et les Ă©toiles. 1 U est assez Ă©tonnant quâil cite ici la ville de Plaisance, qui nâĂ©toitpas une capitale comme Rome et AthĂšnes , mais une ancienne colonie Romaine. Il est probable que lâauteur y avoit fait quelque sĂ©jour pendant lequel il aura fait des observations sur lâombre du gnomon. 2 Du grec ctvxXĂŻppcc, qui signifie hauteur, parceque ces rĂšgles servent Ă trouver la hauteur du soleil, a une heure quelconque, par une opĂ©ration graphique. C est pourquoi on appeloit analĂšmes des espĂšces de cadrans qui montroient la hauteur que le soleil avoit tous les jours Ă midi ; par la grandeur des ombres du gnomon, ils nâindiquoient pas les heures, mais seulement les mois et les signes. Depuis on y joignit des cadrans horaires, par lĂ , ils marquoient ensemble et les mois par la longueur des ombres , et les heures par leur inclinaison ce qui Ă©toit nĂ©cessaire pour les cadrans dâalors , parce que, comme nous le verrons tout-Ă -lâheure, les Romains divisoient le jour en douze heures et les nuits Ă©galement tellement que pendant une partie de lâannĂ©e , câĂ©toit les heures du jour qui Ă©toient plus longues que celles de la nuit ; et pendant lâautre , câĂ©toit le contraire. L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. 399 Le ciel tourne continuellement autour de la terre et de la mer, appuyĂ© sur les deux extrĂ©mitĂ©s de son axe. Dans ces deux endroits, la puissance qui gouverne la nature, a forme' et place' ces deux pivots comme deux centres, dont lâun va de la terre et de la mer, se rendre au haut du monde, auprĂšs des e'toiles septentrionales lâautre est Ă lâopposite, sous la terre, vers le midi. Autour de ces pivots, comme autour de deux centres, elle a mis ce quâon appelle en grec les pĂŽles 1, câest-Ă - dire , de petits moyeux 2 pareils Ă ceux dâune roue , ou de mĂȘme quâĂ un tour sur lesquels le ciel tourne sans cesse. La terre et la mer sont .placĂ©es naturellement au milieu, pour servir de centre; et la nature a disposĂ© le tout, de maniĂšre que le plus Ă©levĂ© des pĂŽles se trouve vers la rĂ©gion septentrionale, et lâautre, du cĂŽtĂ© du midi, est cachĂ© sous la terre. De plus, entre ces deux pĂŽles, il se trouve comme une espĂšce de ceinture, qui traverse obliquement et sâincline vers le midi ; elle se compose de douze signes qui sont naturellement reprĂ©sentĂ©s par la disposition des Ă©toiles, divisĂ©es en douze parties Ă©gales. Ces Ă©toiles, avec le reste des astres qui luisent au firmament, tournent autour de la terre et de la mer, et suivent, dans leurs cours, la circonfĂ©rence du ciel. Ces Ă©toiles, de toute nĂ©cessitĂ©, sont alternativement visibles et invisibles, pendant un certain temps, puisquâil y a toujours six signes qui tournent dans le ciel, sur lhorison ; tandis que les six autres , qui sont sous la terre , ne se voient point. Six de ces signes se trouvent toujours sur l horison , par la raison que voici autant le dernier signe se cache et sâabaisse sous la terre, emportĂ© par le mouvement circulaire du ciel, autant le signe opposĂ© , entraĂźnĂ© par le mĂȘme mouvement, sâĂ©lĂšve des lieux oĂč il Ă©toit cachĂ© , pour reparoĂźlre Ă nos yeux ainsi le mĂȘme moteur les fait passer sans cesse de lâorient Ă lâoccident. Les douze signes qui occupent chacun la douziĂšme partie du ciel, ont donc perpĂ©tuellement leur cours dâorient en occident, tandis quau-dessous dâeux, par un mouvement contraire , la Lime, Mercure, VĂ©nus , le Soleil mĂȘme, Mars , Jupiter et Saturne , sâavancent comme sâils montoient par des degrĂ©s du couchant au levant, chacun , par un cours particulier , sur des orbites de diffĂ©rente grandeur car la 1 Câest-Ă -dire les essieux, 2 Ce passage est assez obscur , dâautant que par orbiculos , il paroitroit quâil auroit peut-ĂȘtre voulu entendre les cercles polaires, dans lesquels sont les pĂŽles de lâĂ©cliptique , et autour desquels, tourne par consĂ©quent le ciel particulier des planĂštes; mais en examinant bien les choses , jl/paroĂźt que , par orbiculos , il a tout simplement entendu deux anneaux ou deux espĂšces de moyeux dans lesquels il suppose que tournent les extrĂ©mitĂ©s de lâaxe du monde. Aulugele dit , quâoutre les cinq cercles ordinaires , savoir lâĂ©quinoxial , les deux tropiques et les deux cercles polaires , M." Varro en mettoit encore deux autres plus petits qui touchent im- jxiĂ©diatement lâaxe qui les traverse. ' Lune V LIVRE IX, C h a p, iy. ^ 00 Lune fait son cours en vingt-huit jours, et un peu plus dâune heure , et fait ainsi le tour du ciel, Ă prendre du point d'un signe, jusquâau mĂȘme point i ce qui fait le mois lunaire. Le Soleil, dans lâespace dâun mois, parcourt un signe , qui est la douziĂšme partie du ciel ; et passant ainsi en douze mois par lâintervalle des douze signes , il revient au point du signe dâoĂč il Ă©loit parti ; et il ne fait quâune fois en douze mois , le circuit que la lune fait treize fois 2 . La planĂšte de Mercure et celle de Venus, trĂšs-rapprochĂ©es des rayons du Soleil, 3 dans leur rĂ©volution forment un cercle autour de lui , dont il est le centre ; elles retardent quelquefois leur marche, et restent en arriĂšre , faisant des espĂšces de stations Ă cause du genre particulier de leur circonvallation ce qui se voit clairement, lorsque la planĂšte de VĂ©nus suivant le Soleil , paroĂźt encore trĂšs-luisante , aprĂšs son coucher , quand on lappelle vesperrugo 4 ; ou lorsquâelle le prĂ©cĂšde et se lĂšve avant le jour , quand on la nomme Lucifer 5 de lĂ vient aussi que ces deux planĂštes restent quelquefois plusieurs jours Ă parcourir un signe , et dâautres fois passent trĂšs- vite dans un autre. Quoiquâelles ne mettent pas un temps Ă©gal , pour parcourir chaque signe , celui de leur circonvallation l'est toujours , dâautant que si elles sont arrĂȘtĂ©es au commencement dans quelques signes , elles sâavancent ensuite plus vite dans les autres , lorsquâelles sont dĂ©livrĂ©es de ce qui les arrĂȘtoit. Mercure fait sa rĂ©volution de maniĂšre quâen trois cents soixante jours , il parcourt tous les signes et parvient au point dâoĂč il Ă©toit parti pour commencer sa course ; le temps de sa route est Ă©galement distribuĂ©, de sorte quâil reste environ trente jours dans chaque signe. Lorsque la planĂšte de VĂ©nus nâest pas empĂȘchĂ©e par les rayons du Soleil , elle ne reste que trente jours Ă parcourir lâespace dâun signe ; cependant, alors, et chaque fois qu elle sây arrĂȘte moins de quarante jours , elle rĂ©tablit ce temps ensuite , en retardant davantage dans un autre signe ; tellement qu elle accomplit son cours , et 1 En astronomie , on distingue la rĂ©volution pĂ©riodique , et la rĂ©volution synodique cette derniĂšre est relative Ă la conjonction des planĂštes avec le Soleil. Ainsi, par exemple la rĂ©volution synodique de la Lune , est lâintervalle qui se trouve entre deux conjonctions successives de la Lune et du Soleil ; mais ici , lâauteur entend la rĂ©volution pĂ©riodique , câest-Ă -dire celle qui se termine au mĂȘme point oĂč elle a commencĂ©. 2 Le mois lunaire Ă©tant de 28 jours environ, il est clair quâil sâen trouve treize , dans une annĂ©e composĂ©e de 364- jours. 3 On sait que VĂ©nus ne sâĂ©loigne jamais du Soleil plus de 4^ degrĂ©s et Mercure plus de 28. 4 Câest-Ă -dire lâĂ©toile du soir. 5 Câest-Ă -dire lâĂ©toile du matin. 5i LâARCHITECTURE DE VITRUVE. retourne toujours au mĂȘme signe oĂč elle a commencĂ© son chemin , au bout de quatre cents quatre - vingt cinq jours. Celle de Mars fait son cours en six cents quatre-vingt trois jours, ou environ-, elle passe dans tous les signes, et revient Ă celui dâoĂč elle Ă©toit partie d'abord; elle lâaccomplit toujours dans le mĂȘme nombre de journĂ©es , parce que si elle a Ă©tĂ© un peu plus vite dans certains signes , elle sâarrĂȘte dans dâautres. Jupiter, par un mouvement qui est aussi opposĂ© Ă celui du ciel, mais plus lent, reste environ trois cents soixante jours dans chaque signe; il reste onze ans et trois cents vingt-trois jours avant de revenir au signe dans lequel il se trouvoit douze ans auparavant. Enfin Saturne reste trente un mois et quelques jours Ă parcourir un signe .et revient , aprĂšs vingt-neuf ans et cent soixante jours environ, au mĂȘme signe oĂč il Ă©toit dâabord. Cette planĂšte Ă©tant, pour ainsi dire, Ă lâextrĂ©mitĂ© du ciel, elle dĂ©crit un cercle beaucoup plus grand, ce qui fait que son mouvement paroĂźt plus lent. Quand les planĂštes qui dĂ©crivent leur circuit au-dessus du soleil, sont en trine aspect, i avec lui, elles nâavancent plus; elles sâarrĂȘtent, ou mĂȘme reculent en arriĂšre, jusquâĂ ce que le soleil, changeant cet aspect, passe dans un autre signe. Il y en a qui croient que le soleil, Ă©tant alors fort Ă©loignĂ© de ces planĂštes, nâĂ©claire pas assez cette partie de leur route, et qu elles doivent s arrĂȘter , ne pouvant se conduire dans lâobscuritĂ©. Ce n est cependant pas lĂ notre opinion. 11 est trop visible que la lumiĂšre du Soleil sâĂ©tend par tout lâunivers, pour quâon puisse croire qu elle soit affoi- biie , et comme obscurcie par lâĂ©loignement car nous ne cessons pas de la voir, lorsque ces Ă©toiles font ce mouvement rĂ©trograde, ou quâelles sâarrĂȘtent. Si nous pouvons donc voir la lumiĂšre du Soleil qui se trouve si Ă©loignĂ©e., comment peut-on croire que les planĂštes , ces ĂȘtres divins, restent arrĂȘtĂ©es dans FobscuritĂ©, parcequâelles ne peuvent apercevoir cette lumiĂšre ? il me paroĂźt plus vraisemblable d attribuer cela Ă la chaleur qui attire tout Ă elle; nous voyons quelle fait Ă©lever les fruits de la terre ; quâelle fait monter, jusquâaux nues , les vapeurs des fontaines , quand il se forme un i Comme je lâai dĂ©jĂ dit, les astronomes distinguent quatre aspects , pour les planĂštes , savoir trine, qua- drai, sextile et diamĂ©tral. Quand une planĂšte est sĂ©parĂ©e dâune autre , par lâespace de quatre signes , qui font justement le tiers des douze qui composent tout le cercle du zodiaque , Us appellent cela trine aspect quand elles sont sĂ©parĂ©es par trois signes qui en font le quart, ils appellent cela quadrat aspect quand elles sont sĂ©parĂ©es par deux signes qui en font le sixiĂšme , ils appellent cela sextile aspect et quand elles sont sĂ©parĂ©es par six signes, qui font la moitiĂ© du zodiaque, ils appellent cela diamĂ©tral aspect cm opposition, are-en? ciel la puissante ardeur du soleil, lorsquâil envoie ses rayons en triangle, attire, de mĂȘme, Ă lui, les Ă©toiles qui le suivent, arrĂȘte celles qui le prĂ©cĂšdent, et modĂ©rant leur course, les empĂȘche de s avancer, et les oblige au contraire de reculer pour rentrer dans le signe dâun autre triangle. On demandera, peut-ĂȘtre , pourquoi le Soleil, par sa chaleur , retient plutĂŽt les planĂštes Ă©loignĂ©es, comme quand elles sont dans le cinquiĂšme signe, que celles qui sont plus prĂšs dans les second et le troisiĂšme signes? voici comme je rĂ©pondrai Ă cela. Les rayons du Soleil divergeant en ligne droite dans le ciel, forment des triangles Ă©quilatĂ©raux, dont les cĂŽtĂ©s s'Ă©tendent jusquâau cinquiĂšme signe; lĂ seul, ils peuvent produire un effet; en-deçà , ou au-delĂ , ils nâen ont aucun; sâils nâĂ©toient fixĂ©s par ces triangles, quand ils se rĂ©pandent circulairement dans tout le monde, ils brĂ»leroient tout ce qui seroit prĂšs de lui. Câest ce quâa trĂšs-bien remarquĂ© Euripide, poĂšte grec , quand il dit dans sa tragĂ©die de PhaĂ©ton, que, qui est Ă©loignĂ© du Soleil, ressent plus ardemment sa chaleur, et quelle est plus tempĂ©rĂ©e Ă mesure quâon sâen approche. Voici comme il sâexprime De loin sa chaleur est brĂ»lante , De prĂšs elle est moins violente. Si la raison et lâautoritĂ© de cet ancien poĂšte dĂ©montrent que les choses sont ainsi, je ne crois pas quâon puisse avoir une autre opinion que celle que je viens de faire connoĂźtre. La planĂšte de Jupiter faisant son circuit entre Mars et Saturne, le fait plus grand que celui de Mars et plus petit que celui de Saturne. Il en est de mĂȘme des autres Ă©toiles; plus elles sâĂ©loignent du dernier ciel, et plus elles sâapprochent de la terre, moins elles paroissent employer de temps pour achever leur cours; puisque celles qui font leur cours dans un plus petit cercle, devancent et passent plusieurs fois sous celles qui sont plus Ă©levĂ©es ; de mĂȘme que, si sur la roue dâun potier, on place sept fourmis, dans autant de cannelures creusĂ©es autour du centre de cette roue, qui formeront de plus grands cercles en sâĂ©loignant de ce centre, et que les fourmis soient obligĂ©es de marcher en rond, pendant que la roue va d un mouvement contraire Ă celui quelles font en sâavançant; il est certain que, malgrĂ© le mouvement contraire de la roue , elles ne laisseront pas de poursuivre leur chemin, et que celle qui marchera le plus prĂšs du centre, aura bien plutĂŽt achevĂ© son tour que celle qui le fera dans la derniĂšre cannelure , quoique lâune marchĂąt aussi vite que lâautre ; parce que l ime a un bien plus grand cercle Ă parcourir que 1 autre. De mĂȘme les astres qui vont LâARCHITECTURE DE VITRUYE. ! 4o3 contre le cours universel du ciel, achĂšvent chacun leur circuit particulier; mais ce cours universel qui se fait en un jour ne cesse de les transporter en arriĂšre vers le lieu dâoĂč ils viennent. Il y a quelques Ă©toiles qui sont tempĂ©rĂ©es, dâautres sont chaudes, et dâautres sont froides ; cela vient de ce que tout feu pousse *sa flamme vers le haut. Câest par cette raison que le Soleil enflamme et brĂ»le, par ses rayons, tout cet espace appelĂ© ĂEther, qui se trouve au-dessus de lui, et dans lequel la planĂšte de Mars fait son cours aussi ; lâardeur du Soleil la rend elle-mĂȘme trĂšs-brĂ»lante. Celle de Saturne, au contraire , qui touche aux extrĂ©mitĂ©s du ciel, qui sont gelĂ©es, est extrĂȘmement froide. Je viens de faire connoĂźtre tout ce que mâont appris mes maĂźtres, sur le cercle des douze signes; sur les sept planĂštes, sur leur mouvement et leur cours contraire Ă celui des autres astres, sur la maniĂšre , et le temps qu elles mettent Ă passer dâun signe dans un autre, et comme elles achĂšvent leur circuit. Je dirai prĂ©sentement, comme je lâai encore appris des anciens, pourquoi la lumiĂšre de la Lune a son croissant ainsi que son dĂ©clin. BĂ©rose, i venu du pays des ChaidĂ©ens, publia le systĂšme quâil avoit rĂ©pandu dans toute lâAsie ; il enseignoit que la Lune Ă©toit une boule, dont une moitiĂ© est Ă©clatante de lumiĂšre, et lâautre de couleur bleue lorsque dans son cours, elle se rencontre sous le globe du' Soleil, attirĂ©e alors par ses rayons, et par la force de sa chaleur, elle retourne vers lui sa partie brillante, Ă cause de la sympathie que ces deux lu miĂšres ont enlrâelles; attirĂ©e directement ainsi sous le Soleil, elle tourne sa partie Ă©clatante vers le haut; lâautre qui ne lâest pas reste invisible parce quâelle a la mĂȘme couleur que lâair quand donc elle se trouve perpendiculairement sous les rayons du Soleil, toute sa lumiĂšre se trouve rĂ©pandue sur sa partie supĂ©rieure, et on lâappelle, dans cet Ă©tat, premiĂšre Lune. Quand elle sâavance ensuite vers la partie orientale du ciel, elle ressent moins lâardeur du Soleil, et lâextrĂ©mitĂ© de sa partie Ă©clatante paroĂźt Ă ceux qui sont sur la terre, comme une petite ligne de lumiĂšre ; on lâappelle alors la seconde Lune. Quelques jours aprĂšs, quand elle sâĂ©loigne davantage , on lâappelle troisiĂšme Lune, et enfin quatriĂšme Lune au septiĂšme jour, le Soleil se trouvant Ă lâoccident, et la Lune entre lâOrient et l'Occident, câest-Ă -dire au milieu du ciel ; elle tourne alors vers la terre la moitiĂ© de sa partie Ă©clatante, parce que la moitiĂ© du ciel la sĂ©pare du Soleil* enfin quand la majeure partie du ciel se trouve entre le Soleil et la Lune ; que le Soleil passant Ă lâOccident, regarde par derriĂšre le globe de la Lune qui est Ă lâOrient, comme elle est Ă©loignĂ©e alors du Soleil, autant qu elle le i Voyez les remarques Ă la fin du Chap. VĂŻl de ce livre. ' LIVRE IX, C h a. p. Ăźx. 4°4 peut-ĂȘtre , elle montre, en entier , la partie Ă©clatante de son globe ce qui arrive le quatriĂšme jour. Diminuant ensuite de jour en jour , elle accomplit le mois lunaire , en tournant sur elle-mĂȘme , et sâavançant vers le Soleil, elle passe de nouveau sous son disque, et achĂšve tout cela dans lâespace dâun mois. Le mathĂ©maticien Aristarque de Samos , a une autre opinion, quâil fonde sur dâexcellentes raisons, tirĂ©es des sciences quâil possĂ©doit. La voici. Il est certain, dit-il, que la Lune nâa dâelle-mĂȘme aucune lumiĂšre; mais comme un miroir , elle reçoit celle du Soleil parmi les sept planĂštes, câest elle qui fait son cours le plus prĂšs de la terre et en moins de temps ; chaque mois, elle passe sous le Soleil; le premier jour elle se trouve cachĂ©e sous son disque, et reste obscurcie; dans cet Ă©tat de conjonction avec le Soleil, on la nomme nouvelle Lune le jour suivant, on la nomme seconde Lune, parce quâalors elle sâĂ©loigne un peu du Soleil qui commence Ă Ă©clairer lâextrĂ©mitĂ© de son disque; le troisiĂšme jour, s Ă©loignant davantage, cette lumiĂšre commence Ă croĂźtre, et ainsi sâĂ©loignant tous les jours jusquâau septiĂšme , la moitiĂ© du ciel, environ , la sĂ©pare du Solçil, quand il se couche Ă l oc- cident, et il Ă©claire seulement la partie de cette planĂšte qui est tournĂ©e vers lui. Le quatorziĂšme jour, lorsqu elle lui est diamĂ©tralement opposĂ©e, câest la pleine Lune ; elle se lĂšve alors quand le Soleil se couche, parce que tout lâespace des ci eux se trouve entre eux ; ainsi elle a le Soleil en face , et tout son disque reçoit ses rayons qui le rendent brillant de lumiĂšre. Le dix-septiĂšme jour, quand le Soleil se lĂšve, elle se trouve prĂšs du couchant. Le vingt-uniĂšme jour, au lever du Soleil, la Lune est Ă peu-prĂšs, au milieu du ciel; la partie qui regarde le Soleil, est Ă©clairĂ©e, le reste demeure obscur ainsi continuant sa course, elle se trouve le vingt-huitiĂšme jour sous le Soleil, et alors elle achĂšve le mois. % Il me reste Ă expliquer comment le Soleil qui passe chaque mois dans un signe , augmente ou diminue et les jours et les heures. R E M A R Q U E S. Tout ce quâon vient de lire sur la sphĂšre , et le mouvement des planĂštes , est bien informe ; le faux y dĂ©figure par-tout le vrai. CâĂ©toit les lumiĂšres du temps; on Ă©loit trĂšs-ignorant alors, en fait de gĂ©ographie, et de sphĂšre. Les uns croyoient que la terre Ă©loit un corps plat ; les autres un cylindre ; les autres enfin un tirnpan. Vitruve partageoit une de ces erreurs ; on voit que ses idĂ©es sur le globe terrestre nâĂ©toient pas justes; il ignoroit sur-tout les trois diffĂ©rentes positions de la sphĂšre , qui sont la sphĂšre horizontale, la sphĂšre verticale, et la sphĂšre oblique; car il considĂšre la sphĂšre, comme si on devoit toujours la placer obliquement ; parce que câest la position quâelle doit avoir Ă Home ; il croit quâelle ne doit pas en avoir dâautre, pour toutes les parties de la terre. L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. / f o5 A lâordre quâil suit en nommant les planĂštes, on reconnoĂźt quâil adopte les principes qui furent par la suite la base du systĂšme de PtolemĂ©e , qui fait de la terre le centre immobile de Punivers. Ce fut cependant plus de cent cinquante ans aprĂšs 1 que PtolemĂ©e publia son livre intitulĂ© ^ de la grande construction clĂ©s planĂštes , qui contient les principes du systĂšme qui a portĂ© son nom ; mais il nâen Ă©toit pas lâauteuril existoit long-temps avant lui ; il a seulement rassemblĂ© dans son ouvrage , ce quâArislole et Possidonius avoient pensĂ© sur lâarrangement du monde , en y ajoutant toutefois quelques rĂ©flexions qui Ă©toient de lui. U est donc assez curieux de trouver dansYitruve, un traitĂ© dâastronomie Ă©crit long-temps avant que PtolemĂ©e nâait publiĂ© le sien. Celui-ci en rĂ©digeant son ouvrage , avoit rectifiĂ© tous les calculs et perfectionnĂ© lâouvrage de ses prĂ©dĂ©cesseurs. 11 paroĂźt que du temps de Vitruve , on nâavoit pas encore calculĂ©, dâune maniĂšre bien exacte , le temps que les planĂštes employent Ă parcourir leur orbite, ou du moins , que Vitruve ne sâen Ă©loit pas assurĂ© ou que ses copistes auroieut fait plusieurs fautes ce qui est le plus apparent, puisque, dans le texte , on voit que Vitruve se contredit souvent. Je vais indiquer et tĂącher de rectifier ces erreurs. Dans toutes les Ă©ditions publiĂ©es avant celle de Galiani , on lit que la planĂšte de Jupiter reste 565 jours dans chaque signe. Il lui faudroit donc dâaprĂšs ce compte , douze ans et vingt-deux jours pour accomplir son cours. Cependant le mĂȘme texte porte qĂŒe cette planĂšte nây emploie que onze ans et 323 jours. Par consĂ©quent il faut donc qu J il y ait ici une erreur , Galiani lâa corrigĂ©e en partie , en lisant que la planĂšte de Jupiter reste seulement 56o jours dans chaque signe. 11 a suivi en cela le manuscrit du Vatican, que jâai Ă©galement adoptĂ©, parce quâil est plus probable que câĂ©toit ainsi quâil fall oit lire. En effet, dit Galiani, si la planĂšte de Jupiter reste 56o jours pour parcourir chaque signe il lui faudra onze ans et 3t6 jours pour achever toute sa circonvallation , ce qui est conforme au calcul de PtolemĂ©e. Il est vrai quâon lit aussi dans le mĂȘme manuscrit, que , pour cette circonvallation , il lui faut onze ans et 3s3 jours y mais le mĂ©compte nâest que de sept jours, tandis que si lâon suivoit la maniĂšre de lire qui a clĂ© suivie dans toutes les autres Ă©ditions oĂč on lit que cette planĂšte reste 365 jours dans chaque signe ; il lui faudroit , pour accomplir son tour , douze ans et 22 jours ce qui se rapporte beaucoup moins avec le calcul de PtolemĂ©e et celui de Vitruve qui porte le tout Ă onze ans et 323 jours. Il conviendroit de corriger de mĂȘme le calcul de lâauteur , pour la planĂšte de Mercure. Suivant PtolemĂ©e, elle emploie 124 jours environ Ă faire son cercle ^ et Vitruve dit quâelle en emploie 36o. Peut-ĂȘtre lâauteur aura-t-il Ă©crit de cette maniĂšre CXXIV , des copistes ignorants auront lu CCCLX. 11 aura de mĂȘme Ă©crit clenos dies, et ils auront lu trecenos clies. Le passage oĂč lâauteur parle de la circonvallation de la planĂšte de VĂ©nus , a paru trĂšs-obscur aux interprĂštes. Perrault nâen a pas du tout saisi le sens ; il a traduit comme si lâauteur avoit entendu que cette planĂšte ne devoit rester que 3o jours dans chaque signe , et que quand elle devoit demeurer 4o jours empĂȘchĂ©e par les rayons du Soleil , elle regagnoit le nombre de jours quâelle avoit lardĂ© dans ce signe , en sâavançant plus vite dans les autres lâauteur nâa pas voulu dire cela ; il entend, au contraire , que le moins de temps que peut rester la planĂšte dans un signe câest 3o 1 Vitruve e'crivoit sous le rĂšgne dâAuguste, et PtolemĂ©e sous celui de Marc-AurĂšle. LIVRE IX, C H A p. IX. 4o6 jours ce qui nâarrivoit, suivant lâopinion dâalors, que quand elle nâĂ©toit pas empĂȘchĂ©e par les rayons du soleil ; quâautrement elle devoit y rester 4o jours, et que quand elle y restoil moins de 4o jours, connue Vitruve lâa certainement entendu, elle retardoit sa marche dans les autres signes, puisquâil lui falloil nĂ©cessairement 485 jours pour achever son orbite. Si on suppose quâelle reste 4o jours dans chaque signe, il lui faudra 480 jours pour les parcourir tous les douze, parce que la multipliĂ© par 4o , produit 480. Dans le compte de Vitruve, il ne se trouve que 5 jours de trop; ce simple calcul auroit suffi pour prouver Ă Perrault son erreur. Une note quâil met sur ce passage est encore bien moins concevable que sa traduction, a Vitruve , dit-il a dĂ» entendre plus de 4o jours , parce que le chemin que VĂ©nus fait dans les douze signes, nâiroit quâĂ 4oo jours, supposĂ© que nâĂ©tant a point empĂȘchĂ©e , elle ne demeurĂąt que 4o jours dans chaque signe » cependant en bonne arithmĂ©tique, douze fois 4o font bien 48o ; tellement quâil nây a , comme je viens de le dire, que 5 jours dâerreur, dans le compte de Vitruve , en donnant Ă ce passage le sens que je viens de lui donner. On ne peut toutefois ĂȘtre assurĂ© quâon a bien choisi entre les diverses leçons de ce passage , comme lâobserve trĂšs-bien Galiani; puisquâon ne peut sâappuyer sur aucune autoritĂ©. JNous voyons en effet que 'Vitruve dit, que VĂ©nus fait sa circonvallation en 485 jours. PtolemĂ©e dit quâelle la fait en 5^5 jours, et dâaprĂšs les observations modernes, elle nâen emploie que 224. Lâopinion de Vitruve , qui attribue aux rayons du Soleil la cause des stations ou rĂ©trogradations des planĂštes, est rapportĂ©e par Pline , qui en parle comme sâil en Ă©toit le premier auteur. Voici comme il lâexplique stellĆ solis radio percussĆ inhibentur rectum agere cursum et igneci vi levantur in sublime. Comme nous lâavons remarquĂ©, Pline Ă©toit postĂ©rieur de beaucoup Ă Vitruve ; nous avons vu mĂȘme quâil avoit souvent compilĂ© notre auteur ainsi cette opinion nâest pas de lui; dans de fond elle nâest pas bien ingĂ©nieuse ; mais en supposant la terre dans le centre , et faisant tourner les planĂštes autour dâelle , il falloit bien se contenter de ces mauvaises raisons pour expliquer ces stations et rĂ©trogradations apparentes des planĂštes de Mercure et de VĂ©nus-. Dans lâhypothĂšse de Copernic , oĂč le Soleil est le centre de lâunivers , toutes les difficultĂ©s disparoissent. Si nous voyons en effet passer la planĂšte de VĂ©nus sous quatre signes , et quâensuite nous la voyons sâarrĂȘter ou reculer, sous ces signes, ce nâest pas quâelle ne tienne une route uniforme mais cette diversitĂ© dâapparence vient de ce quâelle tourne autour du Soleil, et que la terre y tourne aussi; mais VĂ©nus plus vile et la terre plus lentement; dâoĂč suit la diversitĂ© des aspects et une apparence dâirrĂ©gularitĂ©. Ce chapitre et les trois suivants contiennent un petit traitĂ© dâastronomie qui est dâautant plus intĂ©ressant que nous y retrouvons les principes du systĂšme de PtolemĂ©e, et nous voyons quâils Ă«toient connus Ă Rome long-temps avant que le philosophe dâAlexandrie nâeĂ»t publiĂ© son traitĂ©; il nous fait connoĂźtre en partie jusquâoĂč les anciens avoient portĂ© alors cette science je dis en partie, car les opinions sur lâordre des cieux , sur le mouvement des planĂštes, Ă©toient partagĂ©es comme elles lâont Ă©tĂ© de notre temps. 11 y avoit alors plusieurs systĂšmes comme aujourdâhui long-temps; avant Vitruve, les Pythagoriciens, ensuite PhilolaĂŒs , Aristarque et ClĂ©anthe de Samos avoient enseignĂ© que le ciel Ă©toit en repos , et que câĂ©toit la terre qui Ă©toit transportĂ©e autour du Soleil , LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. 4°7 c selon la ligne oblique du Zodiaque, tout en tournant journellement sur son axe. w i Vitruve avoit donc adoptĂ© un systĂšme comme on feroit prĂ©sentement. Je suppose quâil a suivi ce qu J ĂŒ a trouvĂ© dans Arislote , Hypocrate et Possidonius , sans se donner la peine de vĂ©rifier leur calcul. Son ouvrage , dans le fond , nâest pas un traitĂ© dâastronomie , il ne parle ici de celte science ,, quâautant quâelle est nĂ©cessaire pour expliquer tout ce qui a rapport Ă la gnomonique. Il seroit assez intĂ©ressant sans doute, de dĂ©velopper Ă la lin de ces chapitres les principes de lâastronomie moderne_, Ă mesure que Vitruve dĂ©veloppe ceux quâon suivoit de son temps ; mais cela nous meneroit trop loin , et nous Ă©carteroit de notre but qui est uniquement dâexpliquer Aitruve et non pas de faire un traitĂ© dâastronomie. Ceux qui voudront faire cette comparaison , doivent avoir recours aux savants ouvrages de M. de la Lande. On trouvera Ă©galement de quoi satisfaire sa curiositĂ© dans le quatriĂšme volume du spectacle de la nature de M. Pluche , et dans le livre si intĂ©ressant de la pluralitĂ© des mondes par M. de Fontenelle, oĂč il a su mettre Ă la portĂ©e de tous les lecteurs, les matiĂšres les plus abstraites , et revĂȘtir de la clartĂ© et des agrĂ©ments du style un sujet aussi ingrat. Quant Ă moi je me contenterai dâexpliquer, comme je lâai dĂ©jĂ fait, les passages que le commun des lecteurs auroit peine Ă comprendre, ce qui arrive, sur-tout, lorsquâil est question des usages anciens, qui sont contraires aux nĂŽtres. Par exemple la plupart des lecteurs ne comprendront pas ce quâentend lâauteur, lorsquâĂ la fin de ce chapitre, il sâexprime en ces termes je dirai prĂ©sence lement , comment le Soleil qui passe chaque mois dans un signe , augmente et diminue les jours ce et les heures. Ceux qui pensent que les anciens divisoient les jours comme nous, ne pourront sâimaginer comment le Soleil dans son cours peut diminuer les heures, qui, chez nous, sent toujours Ă©gales5 mais elles ne lâĂ©toieul pas chez les anciens ; ils divisoient le jour en douze heures , et Ă©galement la nuit tellement que quand les jours Ă©toient plus longs, les heures lâĂ©toient Ă©galement5 ainsi Ă mesure que les jours augmenloient, les heures du jour sâallongeoient Ă proportion , et celles de nuit sâaccoureissoient de mĂȘme. Depuis lâĂ©quinoxe de septembre jusquâĂ celle de mars, lâheure de jour Ă©toit plus petite que celle de nuit; et depuis lâĂ©quinoxe de mars jusquâĂ celle de septembre, elle Ă©toit plus grande. Au solstice dâhiverlâheure de jour Ă Rome nâavoit guĂšre que 40 de nos minutes ^ tandis quâalors lâheure de nuit en avoit 90. Pendant le solstice dâĂ©tĂ© câĂ©toit le contraire toutes les horloges, dont nous verrons la description dans les chapitres suivants , sont construites dâaprĂšs ces principes. On sent quâil Ă©toit assez difficile de tracer un cadran solaire, propre Ă marquer de celte maniĂšre les heures , pendant tout le cours de l.âannĂ©e , et qu*il nâĂ©toit pas plus aisĂ© de construire une horloge dans le mĂȘme genre. Nous verrons dans le g erae chapitre de ce livre , comme cela se praliquoii. Câest sans doute Ă cause de la difficultĂ© quâcntraĂźnoil leur exĂ©cution , et des connoissances quâelle exigeoit, que cette partie Ă©toit attribuĂ©e aux architectes. Lâaugmentation et la diminution des jours est lâeffet naturel produit par le cours du Soleil; mais connoĂźtre exactement la longueur que les heures doivent avoir chaque jour de lâannĂ©e, comme nous venons de dire, que les anciens divisoient le jour , et faire des cadrans et des horloges dans ce sens, cela demandoit une grande intelligence , qui nâest plus nĂ©cessaire aujourdâhui, puisque chez nous, toutes lĂ©s heures sont toujours Ă©gales, ĂŻ Plut, de jade in orbe Lun$, CHAPITRE''V. I LIVRE IX; Chap; Y. 4o 8 CHAPITRE V. Du cours que le Soleil fait dans les douze 'signes du Zodiaque . ^ijĂ nd le Soleil passe Ă la huitiĂšme partie du signe du BĂ©lier , il produit lâĂ©quinoxe du printemps alors il passe la queue du Taureau , et sâavance ensuite vers les PlĂ©yades , au-delĂ desquelles paroĂźt la moitiĂ© de devant du Taureau ; il a ainsi parcouru plus de la moitiĂ© du ciel , en s'avançant vers le Septentrion , sortant du Taureau , pour entrer par les GĂ©meaux ; au lever des PlĂ©yades , il sâĂ©lĂšve davantage sur la terre , et les jours croissent de plus en plus. Alors sâavançant depuis les GĂ©meaux jusquâĂ lâEcrevisse, celui des signes qui occupe le moins dâespace quand il parvient Ă sa huitiĂšme partie , il marque le Solstice dâĂ©tĂ© , et continuant son cours , il va jusquâĂ la tĂȘte et jusquâĂ la poitrine du Lion, qui sont des parties attribuĂ©es Ă lâEcrevisse. Depuis la poitrine du Lion et les extrĂ©mitĂ©s de lâEcrevisse, achevant de passer le Lion, il diminue les jours en diminuant les arcs quâil fait sur lâhorison, et revient Ă faire les jours Ă©gaux Ă ceux quâil faisoit Ă©tant dans les GĂ©meaux. Ensuite passant du Lion dans la Vierge, il sâavance jusquâau repli que forme son habit ; les arcs qu il fait alors sur l horison, deviennent encore plus petits, et les jours sont pareils Ă ceux quâil faisoit, tandis quâil Ă©toit dans le Taureau; De lĂ passant par le repli de la robe de la Vierge, qui occupe le commencement de la balance, il marque lâĂ©quinoxe dâautomne , faisant des arcs Ă©gaux Ă ceux quâil faisoit Ă©tant dans le signe du BĂ©lier. AprĂšs cela il entre dans le Scorpion. Lorsque les PlĂ©yades se couchent, il diminue les jours en sâapprochant des parties mĂ©ridionales , et les rend encore plus courts quand il sort du Scorpion et quâil touche les cuisses du Sagittaire. DĂšs qu il commence Ă entrer dans les cuisses du Sagittaire , partie du ciel qui appartient aussi au Capricorne, il occupe sa huitiĂšme partie câest alors qu il parcourt le plus petit espace du ciel; et Ion appelle ces jours brama, Ă cause de leur briĂšvetĂ©. AprĂšs avoir passĂ© du Capricorne dans le Verseau, il fait croĂźtre les jours et les rend Ă©gaux Ă ceux du Sagittaire. Du Verseau, il entre dans les Poissons, tandis que le vent Favonius souffle, et Ă©gale les jours Ă ceux du Scorpion. Ainsi le Soleil en parcourant les signes, allonge, pendant un certain temps , les jours et les heures, et ensuite les accourcit. 52 -H 4o 9 L âarchitecture de yitruve. Il reste Ă parler des autres constellations, qui sont Ă droite et Ă gauche du Zodiaque , et qui sont placĂ©es et reprĂ©sentĂ©es dans les rĂ©gions mĂ©ridionales et septentrionales du ciel. REMARQUES. Columelle rapporte la raison pour laquelle les anciens ne plaçoient pas les solstices et les Ă©quinoxes , au commencement des signes, mais Ă leur huitiĂšme partie cela se faisoit, dit-il, parce quâEudoxe , Meton et les autres anciens astronomes,, avoient cru que câĂ©loit Ă la huitiĂšme partie des signes quâĂ©toient les points des Ă©quinoxes et des solstices, et quâon avoit Ă©tabli de leur temps des fĂȘtes, pour ces Ă©poques de lâannĂ©e, fĂȘtes quâon cĂ©lĂ©broit encore; quoique, dans la vĂ©ritĂ©, les Ă©quinoxes et les solstices aient lieu au commencement des signes , comme Hipparcus Ea enseignĂ© depuis. Pline place les PlĂ©yacles dans la queue du Taureau; ce qui est contre lâusage des astronomes, qui nâattribuent les Ă©toiles de la constellation du Taureau quâĂ la moitiĂ© de son corps , câest-Ă -dire Ă la partie de devant quand mĂȘme on entendroit par la queue du Taureau, lâextrĂ©mitĂ© de la constellation, il nâest pas vrai que les PlĂ©yades soient dans cette extrĂ©mitĂ©; mais entre celte extrĂ©mitĂ© et la tĂȘte , comme Vitruve le dit. Nous avons vu que les anciens appeloient le solstice dâhiver bruma , Ă cause de la briĂšvetĂ© des jours, Ă cette Ă©poque de lâannĂ©e. On voit dans Yossius, les diverses Ă©tymologies de ce mot ; celle qui le fait dĂ©river du mot brevis , lui paroĂźt mĂ©riter la prĂ©fĂ©rence; de brevis on aura fait brevissima , ensuite brevimas , breumas, brumas et enfin bruma. Câest ainsi que du mot exterrimus , on a dit extremus , ensuite extemus et enfin extimus. \b >. tĂšte I 1 And ijĂŒfhi linot 1 ation jbche lit le CHAPITRE VL lJuSj k; 3 ji Des Constellations Septentrionales . 1 i k constellation septentrionale que les Grecs nomment Arctos 'i ou bien HĂ©lice 2 a, auprĂšs Telle, son gardien; la Vierge nâen est pas Ă©loignĂ©e; Ă son Ă©paule droite, se trouve une Ă©toile fort brillante que les Latins appellent provindemiam et les Grecs protrygeton 3 ; elle se fait remarquer, parce quâelle est plus Ă©clatante que les autres. Vis-Ă -vis de celle-ci, il y a une autre Ă©toile qui se trouve entre les genoux du gardien de lâOurse appellĂ© Arctur ; prĂšs de lĂ , directement Ă la tĂȘte de lâOurse, le long itymi jf iHfclion h'obal ail. L H ; 4va ?i Pour irait t 1 Câest-Ă -dire lâourse; ÂŁ2 Câest-Ă -dire tournoyante. 3 Câest-Ă -dire qui donne le* vendanges. 1 L I V Pi E IX, C h Ă a / v. vĂŻ, ^10 clĂ©s pieds des GĂ©meaux, est le chartier, dont les pieds sont au-dessus de la corne gauche du Taureau. Cette constellation a une Ă©toile quâon nomme la main du chartier; et sur son Ă©paule gauche, sont les chevreaux et la chĂšvre. Au-dessus des signes du Belier et du Taureau , se trouve la constellation de PersĂ©c ; parmi les Ă©toiles qui la composent, celles qui sont Ă droite, passent au-dessus des PlĂ©yades, et celles qui sont Ă gauche au-dessus de la tĂȘte du Belier. PersĂ©e sâappuie de la main droite sur CassiopĂ©e, tenant de la gauche, qui est au-dessus du chartier, la tĂȘte de la Gorgone par le sommet du front, et la posant sous les pieds dâAndromĂšde. Les poissons sont prĂšs dâAndromĂšde; le long de son ventre, et du dos du cheval, vers lâextrĂ©mitĂ© du ventre de celui-ci, se trouve une Ă©toile fort brillante, qui fait aussi lâextrĂ©mitĂ© deâ la tĂȘte dâAndromĂšde. AndromĂšde tient la main droite au-dessus de la constellation de CassiopĂ©e , et la gauche sur le poisson septentrional. Le Verseau est au-dessus de la tĂȘte du cheval dont les oreilles i se dirigent vers les genoux du Verseau au milieu de la constellation du Verseau, est une Ă©toile qui fait aussi partie de celle du Capricorne 2 . Au- dessus du Capricorne se trouve lâaigle et le dauphin, et auprĂšs dâeux, la flĂšche. Le cygne est placĂ© Ă cĂŽtĂ© ; son aile droite touche la main et le sceptre de CĂ©phĂ©e ; lâaile gauche sâĂ©tend sur CassiopĂ©e , et sa queue couvre les pieds du cheval. .3 Ensuite vient le Sagittaire, le Scorpion et les Balances; au-dessus dâeux, est le serpent qui 1 JusquâĂ prĂ©sent on a lu Equi unguia, ; cependant les pieds du cheval ne touchent pas les genoux du Verseau ; ils sont tournĂ©s du cĂŽtĂ© contraire et touchent les ailes du cygne. Philander et Perrault ont cru quâau lieu d 'Aquarii gcnua , il falloit lire avis pennas. LâidĂ©e nâĂ©toit pas mauvaise ; mais Galiani trouve, avec raison , cette correction un peu forcĂ©e ; il propose celle-ci il est plus probable , dit-il, quâau lieu dâunguia , il faut lire auriculĆ. Les oreilles du cheval se dirigent en effet vers les genoux du Verseau ; ensuite , le mot attingere , dont se sert ici Vitruve , ne signifie pas toucher comme les ongles du cheval touchent les ailes du cygne ; fl signifie sâĂ©tendre pour atteindre , comme font les oreilles du cheval vers les genoux du Verseau. 2 Pour traduire le texte dans lâĂ©tat oĂč nous lâavons , il faudroit dire que lâĂ©toile du milieu de CassiopĂ©e est dĂ©diĂ©e au Capricorne , ce qui est impossible , puisque ces deux constellations sont trop Ă©loignĂ©es lâune de lâautre ; mais comme le remarque trĂšs-bien Galiani , lâĂ©toile qui est au milieu du Verseau , fait partie du Capricorne ; cette Ă©toile est commune aux deux signes. DâaprĂšs cela , on voit donc quâau lieu de CassiopeĂŠ , il faut lire aquarii. Philander a remarquĂ© lâerreur ; mais il ne lâa pas corrigĂ©e. Perrault, pour la corriger et con^ server le mot CassiopeĂŠ , a cru quâau lieu de CassiopeĂŠ media est dedicata Capricorno, supra in altitudine aquila et delphinus il falloit lire., Cassiopea media est, scilieet Ce- phei et AndromedĂŠ dedicata est' Capricorno supra in altitudine aquila sien/â et Delphinus. Combien voilĂ de corrections , tandis quâune seule suffisoit. 3 Pour expliquer ce quâon vient de lire sur la constellation du cygne , qui nâest pas conforme Ă ce que nous voyons sur les cartes cĂ©lesles modernes , il faut supposer que du temps de Vitruve on reprĂ©sentoit cette constellation tout autrement qu aujourdâhui, câest-Ă -dire quâon plaçoit son aile gauche oĂč lâon place prĂ©sentement sa queue , et sa queue oĂč lâon place lâaile gauche ; comme cela , lâaile gauche seroit Ă©tendue vers CassiopĂ©e et la queue couvriroit les pieds du cheval. 52 . L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. 4n touche du bout, de sa tĂȘte, la couronne. Le serpentaire tient, par le milieu du corps, le serpent dans ses mains, et pose le pied gauche sur la tĂȘte du Scorpion. PrĂšs de sa tĂȘte se trouve cette constellation appelĂ©e lâhomme Ă genoux, i On distingue aisĂ©ment le haut de la tĂȘte de ces deux constellations, parce que les Ă©toiles qui les forment sont luisantes. Le pied de lâhomme Ă genoux sâappuie sur la tĂȘte du serpent qui est entre les ourses quâon appelle les sept trions. On voit le dauphin se courber un peu 2 , et vis-Ă -vis du bec du cygne, on voit la lyre la couronne est placĂ©e entre les Ă©paules du gardien de lâourse et celles de lâhomme Ă genoux. Les deux ourses sont placĂ©es dans le cercle Arctique, de maniĂšre que leurs dos se touchent ; la poitrine de lâune est tournĂ©e dâun cĂŽtĂ©, celle de lâautre lâest du cĂŽtĂ© opposĂ©. Les Grecs appellent la petite, Cinosura 3, et la grande Elice 4 leurs tĂȘtes regardent chacune dâun cĂŽtĂ© opposĂ©; lâune tourne sa queue vers la tĂȘte de lâautre, ce qui fait qu elles Ă©lĂšvent toutes deux leur queue. LâĂ©toile quâon nomme polaire est celle qui brille si fort dans la queue de la petite ourse 5i Le serpent comme on lâa dit, sâĂ©tend fort loin entre les queues des deux ourses ; il tourne autour de la tĂȘte de la grande qui est prĂšs de lui, ensuite il se replie et se jette aussi autour de celle de la petite, et sâĂ©tend encore le long de ses pieds, et ses replis se rĂ©flĂ©chissent depuis la tĂȘte de la petite ourse jusquâĂ la grande, proche de son museau et de sa tempe droite. Les pieds de CĂ©phĂ©e sont aussi au-dessus de la queue de la petite ourse. PrĂšs de lĂ , au-dessus du Belier, on voit les Ă©toiles qui composent un triangle qui a deux cĂŽtĂ©s Ă©gaux. La petite ourse et CĂ©phĂ©e ont beaucoup dâĂ©toiles communes Ă elles deux., Jâai parlĂ© dâabord des constellations qui sont Ă droite de lâorient entre le Zodiaque et les Ă©toiles septentrionales; je vais prĂ©sentement parler de celles qui sont Ă gauche de lâorient dans les rĂ©gions mĂ©ridionales. 1 Cette constellation est celle dâHercule, qui, comme le remarque trĂšs-bien Hyginus , est appuyĂ© sur le genou droit , et a le pied gauche sur la tĂšte du serpent. 2 Philander dont Perrault a suivi lâopinion , croit quâau lieu de ces mots penve per eos, il faut lire equi parai per os. Il est vrai que le dauphin se trouve prĂšs de la bouche du petit cheval ; mais comme Vitruve ne parle pas de cetle constellation , quâon nâavoit peut- ĂȘtre pas encore reconnue de son temps Galiani avoue quâil nâa osĂ© changer le texte , dâautant que rien ire rĂ©pugnĂ© Ă ce quâil reste tel quâil est. 3 Câest-Ă -dire queue de chien, 4 Câest-Ă -dire tournoyante. 5 Galiani a fait ici une correction que jâai adoptĂ©e; on lisoit avant lui dans toutes les Ă©ditions. E qua Stella j quĆ dicitur Polit s plus elucct circum caput majoris sepien- trionis. Ce qui nâest pas vrai puisque lâĂ©toile Polaire nâest pas auprĂšs de la tĂȘte de la grande ourse ; mais elle fait partie ou plutĂŽt termine la queue de la petite. Pour corriger cette erreur Galiani a substituĂ© le mot caudam Ă celui de caput , et celui de minoris Ă celui de majoris. Par lĂ le texte se trouve dâaccord avec nos cartes cĂ©lestes. LIVRE IX, Chap. ti. 4 12 REMARQUES. La division des cieux en constellation est fort ancienne. Les dĂ©couvertes quâon a faites en Egypte y prouvent que, dans les plus anciens temps, ces peuples reprĂ©sentoient lâassemblage de plusieurs Ă©toiles sous la figure dâun homme, dâun animal ou de quelquâautre chose. M. Desnon a trouvĂ© dans un des temples de Tintyra , un planisphĂšre reprĂ©sentĂ© en bas relief dâaprĂšs lequel on ne peut douter que ce ne soit chez les Egyptiens que les Grecs avoient pris les images de leurs signes. Le ciel Ă©toilĂ© a trois parties principales celle du milieu ou le Zodiaque; celle qui est au nord du Zodiaque , et celle qui est au midi. Yitruve a parlĂ©, dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, de celle du milieu appelĂ©e le Zodiaque, qui renferme toutes les Ă©toiles qui se trouvent dans la route des planĂštes , pendant leur rĂ©volution. Cette zone, ou bande du Zodiaque , sĂ©pare les constellations de la partie borĂ©ale qui est au nord du Zodiaque , de celles de la partie australe qui est au midi. Yitruve a parlĂ© des premiĂšres dans ce chapitre, et il parlera des autres dans le suivant. DâaprĂšs ce quâil dit dans ces deux chapitres, il paroĂźt que les figures des constellations nâĂ©toient pas prĂ©cisĂ©ment placĂ©es de son temps , comme elles le sont aujourdâhui, ni composĂ©es des mĂȘmes Ă©toiles , Ă moins quâon ne suppose que les copistes ignorants celte matiĂšre , nâaient fait un grand nombre de fautes. On a vu combien il a fallu corriger pour accorder le texte de Yitruve avec nos cartes cĂ©lestes , publiĂ©es par Jean Boyer. Beaucoup dâauteurs ont prĂ©tendu que PtolemĂ©e Ă©toit le premier qui avoit dressĂ© un catalogue dâĂ©toiles, et en avoit formĂ© 48 constellations, dont 12 autour de lâEcliptique, 21 dans la partie septentrionale du ciel, et i5 dans la partie mĂ©ridionale. On voit combien ces auteurs se sont trompĂ©s; puisque Yitruve, qui Ă©crivoit au moins i4o ans avant lâastronome dâAlexandrie, parle de toutes ces constellations , et les divise de mĂȘme que lui et Yitruve suit la division que le philosophe DĂ©mocrite avoit fait avant lui , comme il le dit lui-mĂȘme dans le chapitre suivant. On a depuis ajoutĂ© de nouvelles constellations qui nâavoient pas Ă©tĂ© observĂ©es de leur temps telles que la chevelure de BĂ©rĂ©nice et Antinous dans la partie borĂ©ale. Les astronomes modernes, qui ont voyagĂ© dans lâhĂ©misphĂšre austral, aprĂšs en avoir observĂ© les Ă©toiles, en ont formĂ© aussi de nouvelles constellations. Jean Boyer en a ajoutĂ© 12 autres, et lâabbĂ© de la Caille i4. Dans le septiĂšme chapitre de ce livre, Yitruve parle des constellations de lâhĂ©misphĂšre mĂ©ridional connues de son temps. 4-i 3 L â A R CIIITECTURE DE Y Ăź T R U V E. CHAPITRE VIL Des Constellations qui sont au Midi . Nous avons premiĂšrement le poisson mĂ©ridional posĂ© sous le Capricorne ; il regarde la queue de la Baleine i. Entre lui et le Sagittaire, il se trouve un vuide. Lâencensoir 2 est dessous lâaiguillon du Scorpion. PrĂšs de la balance et du Scorpion , on voit le devant du Centaure, qui tient dans ses mains cette constellation que les astronomes appellent la bĂȘte. PrĂšs de la Vierge, du Lion, et de lâEcrevisse, le serpent Ă©tend une bande dâĂ©toiles ; il entoure dans ses replis la rĂ©gion de lâEcrevisse, et Ă©lĂšve sa tĂȘte vers le Lion; il soutient la coupe sur le milieu de son corps, et vers la main de la Vierge, il Ă©tend sa queue, sur laquelle se pose le corbeau les Ă©toiles qui sont sur son dos , sont toutes Ă©galement luisantes. Le Centaure est placĂ© directement sous la courbure du ventre du serpent et sous sa queue. Sous la coupe et le Lion se trouve le navire nommĂ© Argo; on nâaperçoit pas sa proue qui est obscure ; mais le mĂąt et les parties qui sont vers le gouvernail, sont plus apparentes. Le chien , par le bout de sa queue, touche le navire. Le petit chien suit les GĂ©meaux , vis-Ă -vis la tĂȘte du Serpent. Le grand chien suit le petit. LâOrion est placĂ© en travers sous le Taureau, qui le foule dâun pied; il tient dans la main gauche un bouclier et dans la droite une massue qu il lĂšve vers les GĂ©meaux 3. Il a, sous ses pieds, le chien 1 On lit dans le texte Cauda prospicĂźens Cephea. Phi- Ăźander ainsi que Perrault ont reconnu que câĂ©toit une erreur. Perrault a cru , et ce nâĂ©toit pas sans quelque vraisemblance , quâau lieu de cephea il falloit lire centau - reum ; il entendait par lĂ le Sagittaire , auquel on a souvent donnĂ© ce nom. Cependant lâexpression prospi- eiens dont Vitruve se sert ici, prouve que câest de la tĂȘte du poisson dont il veut parler car les yeux sont dans la tĂȘte et non Ă la queue. Philander , avec bien plus de raison , croit quâon doit lire caudam prospicĂźens eeti , puisquâeffectivcment la tĂšte du poisson regarde la queue de la baleine. Dans le premier manuscrit du Vatican , on trouve ici le mot caudam ; mais aprĂšs on trouve celui de cephei. 11 nâest cependant pas possible que Vitruve ait pu dire que le poisson regardoit Ce- phĂ©e , qui est une des constellations du nord ; voilĂ qui suit de prĂšs le liĂšvre. Sous le Relier pourquoi nous avons adoptĂ© la correction de Philander. 2 On appelle ordinairement cette constellation , ara, lâautel ; mais Vitruve la nomme ici thuribulum, lâencensoir. 3 Ce passage avoit certainement besoin dâĂȘtre corrigĂ©. On lit communĂ©ment dans le texte , manu lava tenens clavam alteram ad geminos iollens. Perrault pour le rendre intelligible , a cru quâil suffisoit de substituer les mots et eam Ă celui de alteram ; mais cela ne convient pas Ă la maniĂšre dont cette constellation est disposĂ©e , et est trĂšs-contraire Ă lâusage , puisquâon ne tient pas ordinairement une massue de la main gauche. Galiani que jâai suivi, croit quâon doit plutĂŽt lire manu leva tenens clypeam , clavam altĂ©ra ad geminos iollens ; ce qui est trĂšs-conforme Ă la maniĂšre dont on a toujours reprĂ©sentĂ© cette constellation. 1 V i 1111' Ecris te re,ui Ăźitlcfi t >in l&l **{ mais^ nsi if jĂšrs ^ LIVRE IX, C n a p. vu /,/ i 1 i et les poissons se trouve la Baleine. Il sort de sa crĂȘte, sous les poissons, deux petites bandes dĂ©toiles rangĂ©es par ordre; on les appelle en grec Hermedon i, câest le lien des poissons, qui dans un grand espace, se replie, se noue * et vient toucher le haut de la crĂȘte de la Baleine. Comme un fleuve dâĂ©toiles , lâEridan a sa source sous le pied gauche dâOrion. Lâeau , que fait tomber le Verseau, sâĂ©coule entre la tĂȘte du poisson austral, et la queue de la Baleine. Je viens de faire eonnoĂźtre les constellations dont lâesprit divin, auteur de la nature , a formĂ© les diverses figures dans le ciel, comme le philosophe DĂ©mocrite les a dĂ©signĂ©es. Je nâai parlĂ© que de celles qui se lĂšvent et se couchent sur notre horizon, et que nous pouvons voir car de mĂȘme que les constellations du nord qui font leurs cours autour du pĂŽle septentrional, ne se couchent pas et ne passent jamais sous le globe , il sâen trouve dâautres qui tournent aussi autour du pĂŽle mĂ©ridional, et restent toujours cachĂ©es sans se lever sur la terre ce qui fait quâon ne connoĂźt point leur figure. Cela est prouvĂ© par lâĂ©toile nommĂ©e Canope 2 que nous ne connoissons que par le rapport des marchands qui ont voyagĂ© Ă lâextrĂ©mitĂ© de 1 Egypte, et jusquâaux terres qui terminent le monde. Jâai dĂ©montrĂ© exactement le cours que les astres font autour de la terre ; la disposition des douze signes du Zodiaque, ainsi que celles des Ă©toiles qui sont vers le septentrion et vers le midi, parce que la construction des anale mines 3 dĂ©pend de ce mouvement de rotation que fait le monde, du cours que fait le soleil dans les signes par un mouvement opposĂ©, et des ombres Ă©quinoxiales des Gnomons. Quant au reste de cette science qui concerne lâastrologie , et qui consiste Ă faire eonnoĂźtre lâinfluence des douze signes, celle des cinq planĂštes, celle du Soleil et de la lune, sur la vie des hommes, il faut sâen rapporter aux CaldĂ©ens qui possĂšdent particuliĂšrement lâart de raisonner sur les naissances, et dâexpliquer comment lâon peut eonnoĂźtre par les astres, le passĂ© et lâavenir. Les savantes dĂ©couvertes quâils nous ont transmises dans leurs Ă©crits, montrent combien ils Ă©toient habiles, combien ils possĂ©doient de lumiĂšres, ces grands hommes sortis de la nation CaldĂ©enne. Le premier fut BĂ©rose ; il descendit dans l isle de Coo et Ă©tablit une Ă©cole dans la ville de ce nom, oĂč il enseigna cette science ensuite le savant Antipater et Archi- napolus ont dĂ©montrĂ© que la gĂ©nethliologie 4 Ă©toit plutĂŽt fondĂ©e sur la conception 1 Câest-Ă -dire les dĂ©lices de Mercure. 2 Cette Ă©toile trĂšs-remarquable par sa grandeur , fait partie de celles qui composent la proue du navire ; elle nâest pas aperçue par ceux qui habitent le Ăź^ord, parce que , comme aous lâa observĂ© Vitruve , cette partie du navire reste invisible pour nous. 3 Voyez la deuxiĂšme note sur le IV. me Chap. de ce livre. 4 Câest-Ă -dire lâart de raisonner sur l$s naissances. 4x5 LâARCHITECTURE DE I T R U Y E. que sur la naissance. Mais si lâon veut connoĂźtre le principe des choses qui sont dans la nature, il faut lire les ouvrages oĂč ThaĂŻes de Milet, Anaxagore de ClazomĂšne, Pytliagore de Samos, Xe'nophantes de Colophon, et De'mocrite dâAbdĂšre, ont Ă©crit leurs savantes dĂ©couvertes sur les ĂȘtres qui la composent, les puissances qui la gouvernent , et les causes qui produisent tous les effets que nous voyons dans le inonde. Sans s'Ă©carter de leur systĂšme, Eudoxe, Eudemon , Callistus, Melo, Philippus; Hipparchus, Aratus, et tous les autres astrologues ont fait, avec le secours de lâastrolabe , les observations les plus exactes sur le lever et le coucher des Ă©toiles, ainsi que sur les saisons de lâannĂ©e , observations quâils ont transmises Ă la postĂ©ritĂ©. Les sciences que possĂ©doient ces grands hommes, sont faites pour exciter notre admiration; puisque, par leur application, ils sont parvenus Ă prĂ©dire les changements du temps ce qui paroĂźt venir dâune connoissance plus qujhamaine. Rapportons-nous en donc Ă leurs lumiĂšres sur des choses quâils ont Ă©tudiĂ©es avec le plus grand soin. REMARQUES. On regarde les CaldĂ©ens comme les pĂšres de lâastronomie; ils ne se bornĂšrent pas Ă connoĂźtre lâĂ©tat du cielj le cours des astres; ils cherchĂšrent Ă tirer un meilleur parti de leur science, en se rendant plus importants aux yeux du vulgaire. DâaprĂšs Jes aspects, les positions des corps cĂ©lestes et les influences cpiâils leur attribuoient, ils sâavisĂšrent de prĂ©dire lâavenir. Ils en imposĂšrent bien aisĂ©ment. En cfĂź'et comme ils annonçoient exactement, dans leurs Ă©plrĂ©mĂ©rides, le cours du Soleil pour chaque jour de lâannĂ©e, les changements de Lune, le mouvement des planĂštes; enfin quâils prĂ©disoient les Ă©clipses; on ne douta pas quâils nâeussent un commerce direct avec le ciel. On nâen- treprennoit rien dâimportant sans avoir consultĂ© les astrologues. Ils prĂ©tendoient sur tout, dĂ©cider quelle seroit la destinĂ©e dâun homme, en examinant quel Ă©toit lâaspect des astres Ă lâinstant de sa naissance ou de sa conception. Le Zodiaque , comme nous lâavons vu, Ă©tant divisĂ© en douze parties Ă©gales, ces douze portions avoient chacune leur attribut, comme les richesses, la science etc, etc. La portion la plus dĂ©cisive, Ă©toit celle qui Ă©toit prĂȘte Ă monter et Ă paroĂźlre sur lâhorizon , lorsquâun homme venoil au monde* Les planĂštes Ă©toient divisĂ©es en favorables, nuisibles et mixtes câest cette science que Vilruve nomme GĂ©nethliologie. Elle pĂ©nĂ©tra daps la GrĂšce avec lâastronomie. Les Grecs , trĂšs amateurs du merveilleux , donnĂšrent beaucoup dans celle science chimĂ©rique. "Vilruve et Pline nous apprennent que BĂ©rose, qui Ă©toit prĂȘtre du temple de Belus Ă Babylonefut le premier CaldĂ©en qui enseigna cet art dans la GrĂšce, Pline ajoute que les AthĂ©niens furent si contents de ses prĂ©dictions , quils firent placer sa statue, avec une langue dorĂ©e, dans leur gymnase [i. Les Grecs aimoient les sciences; ils y Ă©toient trĂšs-habiles; mais ils aimoient encore davantage le merveilleux. Il nâest donc pas i Plin. Ljv. VII, Chap. 38, Ă©tonnant if» sut On imei BC iwstra *4 l i y r e ix, ? u J il Ă©tonnant quâils rendirent de semblables honneurs Ă BĂ©rose. A cĂšYprĂ©jugĂ©s prĂšs, on ne peut nier quâils ne fussent trĂšs-instruits dans lâastronomie. ^ T T , - J. j ! Nous avons vu par-tout ce que Yitruve a dit jusquâĂ prĂ©sent , combien ils connoissoient lâĂ©tat du ciel, et le cours des astres; quoique privĂ©s du telescope v , et'de beaucoup dâautres instruments, qu ont Ă©tĂ© si utiles aux astronomes modernes, ils nâen connoissoient pas moins le cours des planĂštes, et ils avoient formĂ©, Ă -peu-prĂšs, les mĂȘmes systĂšmes que nous avons aujourdâhui. Leurs voyageurs nâavoient pas encore pĂ©nĂ©trĂ© vers le pĂŽle austral , et par le raisonnement ils savoient que, dans la partie du ciel qui y correspond, les Ă©toiles ne se couchoient pas plus, quâelles ne le font dans le nord. Câest dommage quâĂ tant de connoissances, ils mĂȘlĂŽient les idĂ©es les plus absurdes. On voit que Yitruve Ă©toit persuadĂ© quâon pouvoit j conriĂŽĂźirĂ« lâavenir par lâaspect des astres ; mais il ne dit pas comment, et il nous renvoie aux ouvrages des CaldĂ©ens parce que celte science Ă©toit inutile pour la confection des cadrans solaires, objet de ce livre. On a continuĂ© Ă croire quâon pouvoit lire dans lâavenir , en examinant les astres , au point que Je mot Astrologie signifioil Ă©galement lâart de connoĂźlre le ciel et celui de prĂ©dire lâavenir ; il nây a pas long-temps quâon est revenu de celte folie, et quâon a dĂ©signĂ© par le nom dâAstronome ceux qui sâoccupoient de lâĂ©tude du ciel et du mouvement des astres; et par celui dâAslroĂźogue ceux qui prĂ©lendoient prĂ©dire lâavenir par lâaspect, les positions, et lâinfluence des corps cĂ©lestes. On a remarquĂ© combien nous avons dĂ» corriger le texte dans ces deux chapitres. On voit Ă©videmment que les copistes avoient souvent changĂ© le nom des constellations. s Dans tous les exemplaires, comme nous lâavons observĂ©, dans une notĂ© , au commencement d© ce chapitre , on lit Piscis austrinus caudam prospiciens Cephei. J1 est Ă©vident quâon aura mis ici un nom pour un autre car il est impossible que lâauteur ait voulu dire cjue la queue du poisson austral regardoit CĂ©phĂ©e, constellation qui est prĂšs du pĂŽle septentrional. Galiani soupçonne que les anciens dĂ©signoient chaque constellation par un signe particulier , dans le genre de ceux dont nous nous servons encore aujourdâhui pour dĂ©signer les constellations du Zodiaque ce que je crois aisĂ©ment, puisquâon a trouvĂ© que ces signes , quâon emploie pour indiquer les constellations du Zodiaque, Ă©toient employĂ©s par les Egyptiens pour les mĂȘmes objets 1 . Il est assez probable que dans leur Ă©criture hiĂ©roglyphique, ils auront eu des symboles pour chaque constellation, et que les Grecs et les Latins sâen seront servis pour abrĂ©ger. Si la chose Ă©toit ainsi, il ne seroit pas Ă©tonnant que les copistes eussent pris le signe qui indiquoit le Centaure pour celui qui indiquoit le Taureau; celui qui indiquoit le Serpent pour celui qui indiquoit le Poisson , etc etc. 1 Pioche, Spect. de la nat. tom, IV, page 3o6. 53 p* 7 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE VIII. Description des Cadrans avec les AnalĂȘmes. Nous allons expliquer par dâautres principes que les leurs, la maniĂšre de tracer les cadrans, et indiquer comment les jours augmentent i ou diminuent selon les diffĂ©rents mois de TannĂ©e. Quâon divise la longueur du Gnomon en neuf parties Ă©gales, pendant le temps de lâĂ©quinoxe, lorsque le Soleil se trouve, dans le signe du Relier ou dans celui de la Balance , lâombre aura alors huit de ces parties Ă l'Ă©lĂ©vation du pĂŽle de Ilome. Comme Ă AthĂšnes quand le Gnomon a quatre parties, lâombre en aura trois ; Ă Rhodes, quand il en a sept, lâombre en aura cinq ; Ă Tarente quand il en a onze, lâombre en aura neuf; Ă Alexandrie, quand il en a cinq, lâombre en aura quatre; il en est de mĂȘme par tout la grandeur de lâombre Ă©quinoxiale change naturellement dâun endroit Ă un autre. Quand on voudra donc tracer un cadran quelque part, il faudra dâabord chercher Ă connoĂźtre sur ce point quelle est lâombre Ă©quinoxiale. Lâombre a-t-elle , comme Ă Rome, huit parties, et le Gnomon neuf ? on tire une ligne BT sur le plan, au milieu de laquelle on en Ă©lĂšve une autre dâaplomb et dâĂ©querre avec celle-ci; câest ce quâon nomme le Gnomon BA; on la divise avec le compas , en neuf parties, Ă commencer depuis cette premiĂšre ligne quâon a tirĂ©e sur le plan; prĂšs du point qui termine la neuviĂšme partie, on mettra le centre marquĂ© Ă; et ayant ouvert le compas de la grandeur quâil y a depuis ce centre jusquâĂ la ligne du plan oĂč lâon mettra la lettre B, on fera avec le compas, un cercle appelĂ© mĂ©ridien. AprĂšs cela, dans les neuf parties qui sont depuis la ligne du plan jusquâau centre, qui est lâextrĂ©mitĂ© du Gnomon, on prendra la grandeur de huit parties que lâon marquera sur la ligne du plan directement oĂč sera la lettre C; ce sera lâombre Ă©quinoxiale du Gnomon. De ce point C, par le centre oĂč est la lettre A, on tirera une ligne, qui est le rayon du Soleil, lorsquâil est Ă lâĂ©quinoxe. Cela fait, on ouvrira le compas, pour prendre lâespace quâil y a, depuis la ligne du plan jusquâau centre; et lâon fera deux marques Ă©gales sur les extrĂ©mitĂ©s du cercle, lune Ă gauche , vers E , et lâautre Ă droite vers I puis on tirera par le centre une i Le mot Ă epalationes , que Vilruve emploie ici , ils ne doutent pas de sa signification cependant Galiarw pour la premiĂšre fois , et qui ne se trouve pas dans prĂ©fĂšre de suivre ici le deuxiĂšme manuscrit du Vatican , les autres auteurs Latins, a beaucoup intriguĂ© les inter- oĂč, au lieu de ce mot, on lit explanationes , expression prĂȘtes qui ont cherchĂ© Ă dĂ©couvrir son Ă©tymologie, car qui est plus connue et plus intelligible. /M jjl' Ijdei iiirl Ou tes jek Ă« et fil doit naturellement se trouver deux autres signes , entre chacun de ceux-ci; voici comme cela se fait le cercle des mois GCH , Ă©tant comme on le dit, divisĂ© en douze , on tire des points de division sur ^ la ligne H G appelĂ©e lacotome , les perpendiculaires l. 2. l\. 5 . Ensuite du point Ă , par les points dâintersection que font ces lignes sur celle HG, on tire dâaiiires lignes jusquâĂ celle du plan BT , oĂč lâon marquera les points a b d e qui indiqueront la grandeur de Pombre , pour chaque mois de lâannĂ©e. Ofi pourroit de mĂȘme la trouver pour chaque jour ; il suffi- roit de faire la figure beaucoup plus grande, et diviser sur le cercle GCH, les mois en autant de jours quâils contiennent , et tirer les autres lignes comme on vient de lâindiquer. OV âą ectacles, que je nâai fait aucune difficultĂ© de me servir de ce mot. En parlant du peu de tçmps 43i LâARCHITECTURE DE VITRUVE. quâon avoit pour faire construire ces siĂšges en amphithéùtres, lâauteur ajoute quâon devoit aussi fairt tendre des toiles ou des voiles , velorum inductiones. » On distingue deux sortes de voiles dans les théùtres des anciens ; lâun se tiroit devant la scĂšne avant quâon ne commençùt ; pendant le spectacle on le laissait tomber par terre, et quand il Ă©toit ĂŒui on lâĂ©levoil pour le tendre de nouveau devant la scĂšne; cette sorte de voile sâappeloit siparium. Lâautre servoit comme un toit Ă couvrir tout le théùtre , pour empĂȘcher les spectateurs dâĂȘtre incommodĂ©s par les rayons du soleil, ou par la pluie. Il paroĂźt que Yitruve entend ici ce dernier voile. Le premier nâĂ©toit quâun voile ordinaire qui faisoit nĂ©cessairement partie du théùtre ; ainsi, il Ă©toit inutile dâen parler , au lieu que lâautre Ă©toit un objet bien plus considĂ©rable; on Ă©toit obligĂ© de le soutenir par des cordes tendues, dâautant quâil couvroit souvent un trĂšs-grand espace. On ne peut donc douter que ce ne soit de ce voile extraordinaire dont Vitruve veut parler. CHAPITRE PREMIER. Des diffĂ©rentes espĂšces de Machines et de leurs Organes. On entend par machine , un assemblage de bois bien jointqui sert sur - tout pour remuer de trĂšs-lourds fardeaux. Lâeffet de la machine dĂ©pend de lâart, et il est fondĂ© sur le mouvement circulaire des roues que les Grecs appellent kykliken kinesin i. Le premier genre de machine sert pour monter ; les Grecs lâappellent Acrobaticon 2 . Le second genre, quâils nomment Pneumaticon 3, sâemploie pour le vent. Le troisiĂšme est pour tirer ; ils lâappellent Banauson 4 - Les machines pour monter sont celles qui sont composĂ©es de deux piĂšces de bois dâune certaine hauteur , et jointes par plusieurs piĂšces traversantes , au moyen desquelles on peut monter sans danger pour voir et reconnoĂźtre tout ce qui se passe. Les machines pneumatiques sont celles qui , par lâimpulsion compressive de l'air, imitent le son des instruments et mĂȘme celui de la voix humaine. Enfin les machines pour tirer, sont celles qui transportent ou qui Ă©lĂšvent de grands fardeaux. Pour monter Ă des lieux Ă©levĂ©s, on a moins besoin dâart que de hardiesse. Tout lâart consiste Ă assembler des montans et des Ă©chelons , de sorte quâon en compose 1 Câest-Ă -dire mouvement circulaire. 3 Qui agit par le vent, 2 Qui monte en haut . 4 Qui dre, w * une v LIVRE X, C h a p. i. 432 une machine doublement liĂ©e , dont une partie sert de soutien Ă lâautre. Lâart de faire agir des machines par le moyen de lâair est trĂšs - ingĂ©nieux , et produit des effets Ă©tonnans. Lâart de tirer de grands fardeaux est encore plus important ; il est utile , mĂȘme indispensable dans quantitĂ© de circonstances, sur-tout pour faire de grands et magnifiques ouvrages, dĂšs quâon sâen sert avec prudence et adresse. Toutes ces machines se meuvent mĂ©caniquement ou organiquement. Il y a cette diffĂ©rence entre la machine et lâorgane ; les machines font leur effet avec plus dâappareil et ont besoin de la force de plusieurs hommes , comme les ba- listes et les pressoirs ; au lieu que les organes font le leur par le moyen dâun seul homme qui les conduit avec adresse les arbalĂštes i et les anisocycles 2 sont de ce genre. Mais les organes et les machines sont dâun usage tellement nĂ©cessaire quâon ne peut rien faire sans leur secours. Lâart des mĂ©caniques est entiĂšrement fondĂ© sur la nature , ou sur lâĂ©tude quâon a faite des mouvemens circulaires du monde. Quâon rĂ©ilĂ©chisse comment le Soleil, la Lune et les cinq planĂštes exĂ©cutent mĂ©caniquement leur circonvallation, et lâon verra que , sans leur mouvement, la terre seroit privĂ©e de la lumiĂšre , et ses fruits nâatteindroient pas la maturitĂ© ; câest sur ces^modĂšles , offerts par la nature , que les anciens , dĂ©sirant imiter ses divins ouvrages , inventĂšrent les machines qui sont si agrĂ©ables et si nĂ©cessaires Ă la vie. Puisquâau moyen de ces machines , de leur mouvement circulaire et de leurs organes , les ouvrages les plus difficiles sont devenus aisĂ©s Ă faire , nos pĂšres ayant reconnu combien elles Ă©toient utiles , sâappliquĂšrent Ă les perfectionner de plus en plus , et y employĂšrent 1 On ne peut douter que le mot Scorpiones dont se sert ici Vitruve ne signifie ce que nous avons appelĂ© des arbalĂštes. YĂ©gĂšce dit que, de son temps , Scorpiones s'appelaient Manubalista , pour les distinguer des grandes ba- listes ou catapultes qui nâĂ©toient pas portatives. Il sera parlĂ© de ces machines dans les chapitres i5 et 16 de ce livre. Vitruve nous dit ici quâil nâĂ©toit besoin que dâun seul homme pour se servir de ces machines, quâil met pour cela au nombre des organes , dans le chapitre 5 du livre I. cr , en parlant de la distance quâon devoit laisser entre deux' tours ; il dit premiĂšrement On doit compasser les espaces qui sont entre les tours, de maniĂšre quâils ne soient pas plus longs que la por- tĂ©e des traits et. des flĂšches ; » il ajoute ensuite afin quâon puisse xâepousser les assiĂ©geants en les battant Ă droite et Ă gauche , tant avec les Scorpions, Scorpio- niĂčus , quâavec les autres machines qui servent pour lancer des traits. » On voit donc clairement que les Scorpions des anciens lançoient des flĂšches et dĂ©voient ressembler par consĂ©quent Ă nos arbalĂštes ; on appeloit ces petites machines des Scorpions, parce quâelles blĂ©sâ soient avec des flĂšches , comme le Scorpion blesse avec son aiguillon.; et Ă cause de la figure de leur arc qui re- prĂ©sentoit deux bxâas recourbĂ©s comme les pattes dâun Scorpion. 2 On ne sait pas prĂ©cisĂ©ment ce quâĂ©toit cette machine que lâauteur nomme anisocycle ; ce mot qui est grec , signifie des cercles inĂ©gaux. Il paroĂźt que câĂ©toit un fil dâacier , tournĂ© en vis ou en spiral , et enfermĂ© dans un canal ; en tirant Ă soi les bouts de cette vis , et la'lĂąchant tout-Ă -coup , elle lançoit un trait placĂ© au bout telle est lâopinion de Baldus. DâaprĂšs ce que dit Vitruve , câĂ©toit, comme le Scorpion , une machine fort simple quâun seul homme pouvoit faire agir. LâARCHITECTURE DE VI T R U VE. 433 tout leur talent et toute leur industrie. Les choses les plus necessaires ont certaine-' ment Ă©tĂ© inventĂ©es les premiĂšres tels sont les vĂȘtemens on nâa cependant pu les faire quâavec lâaide de plusieurs instrumens. Il a fallu trouver le moyen dâentrelacer la chaĂźne avec la trame ; cet entrelacement sert non-seulement Ă couvrir le corps de lâhomme , mais il en fait encore lâornement. Nous nâeussions jamais eu de rĂ©coltes abondantes qui nous nourrissent, si lâon nâavoit trouvĂ© le joug, la charrue et le moyen dây attacher des bĆufs. Sans les moulinets et les leviers qui servent aux pressoirs , on ne pourroit faire des huiles claires et des vins agrĂ©ables comme nous les avons. Et comment pourrions-nous les transporter ces objets dâun lieu Ă un autre , si lâon nâavoit inventĂ© les chariots et charettes pour les conduire sur terre ? On a trouvĂ© de mĂȘme les balances et les trĂ©buchets pour connoĂźtre le poids de chaque chose et empĂȘcher les tromperies qui se font contre les loix. Il existe une infinitĂ© dâautres machines dont il est inutile de parler , parce que nous les avons tous les jours Ă la main ; comme sont les roues , les soufflets des ouvriers , les chars , les chaises roulantes , les tours , et les autres instrumens dont il faut que nous nous servions habituellement nous commencerons Ă parler de celles dont nous nous servons rarement et qui sont peu connues. REMARQUES. Nous entendons par machine ce qui sert Ă transmettre lâaction dâune puissance sur une rĂ©sistance Ăźi gĂ©nĂ©ral. Par son moyen on augmente et on rĂšgle les forces mouvantes. Les forces de lâhomme Ă©tant bornĂ©es , il ne peut porter quâun lĂ©ger fardeau ; mais son gĂ©nie a su les augmenter par le secours des machines. Plus rien alors ne lui a Ă©tĂ© difficile ; il a transportĂ© les fardeaux les plus lourds ; il les a Ă©levĂ©s Ă de grandes hauteurs. Câest surtout pour lâarchitecture que lâart de les employer lui est devenu nĂ©cessaire. Sans cet art , comment auroit-il pu tiansporter dâĂ©normes colonnes , les dresser , et Ă©lever au-dessus dâelles les diverses parties de lâentablement? On peut dire que lâarchitecture lui doit tout ce quâelle a de grand , et une partie de sa magnificence. Ce nâest donc pas sans raison que ^itruve consacre un livre Ă une science qui est si nĂ©cessaire Ă lâart dont il traite. On distingue deux espĂšces de machines les machines simples que "Vitruve appelle les organes, et les machines composĂ©es. Les machines simples sont au nombre de six ; les autres peuvent se rĂ©duire Ă celles-ci le levier , le treuil , la poulie , le plan inclinĂ© , le coin et la vis. Ces six machines peuvent mĂȘme se rĂ©duire Ă deux , le levier et le plan inclinĂ© ; car le treuil et la poulie agissent comme le levier 5 et le coin et la vis agissent comme le plan inclinĂ©. Nous appelons machines composĂ©es , celles qui sont formĂ©es de plusieurs machines simples combinĂ©es ensemble. Pour les inventer 3 il faut connoĂźtre^ la puissance des forces motrices, leurnature, LIVRE X , C H a p. b 434 leurs lois , et leurs effets ; on les combine avec les loix du mouvement , et de lâcquilibve. Alors avec le secours des mathĂ©matiques , on parvient Ă diriger les forces mouvantes et Ă former les machines les plus ingĂ©nieuses. Nous avons conservĂ© Ă celte science le nom quâelle avoit chez les anciens. Nous lâappelons comme eux la science des mĂ©caniques. Ils lâavoient portĂ©e Ă une grande perfection dĂšs les lems les plus reculĂ©s , si nous en jugeons dâaprĂšs les masses Ă©normes qui composent les anciens temples de lâEgypte , de la GrĂšce et de la Sicile. Il est certain que leur maniĂšre dâopĂ©rer Ă©loit beaucoup plus simple que la nĂŽtre. Toute lâEurope a retenti des prĂ©paratifs que Fontana fĂźt pour dresser, sur la place de au Vatican , lâobĂ©lisque de granit Ă©gyptien que Sixte V y fit Ă©leverĂ© II existoil en Egypte beaucoup de colonnes dâobĂ©lisques plus considĂ©rables , qui Ă©toient monolithes comme celui-ci ; les Egyptiens les transportoient dans leurs villes, quoiquâils tirassent ces pierres dures des carriĂšres qui en Ă©toient trĂšs-Ă©loignĂ©es. Celui dont nous venons de parler avoit Ă©tĂ© Ă©levĂ©, dans HĂ©liopolis par Noncoreo,, roi dâEgypte 1,} il fut transportĂ© Ă Rome pendant la troisiĂšme annĂ©e du rĂšgne de Caliguia , qui le fit placer dans son cirque , situĂ© au pied du mont Vatican , prĂšs de lâendroit oĂč est prĂ©sentement la basilique de Quand Sixte A le fil transporter oĂč il se trouve aujourdâhui , il Ă©toit dans lâendroit oĂč est Ă prĂ©sent la nouvelle sacristie de celle basilique , tellement qu^on nâeut quâun trajet de quelques pas Ă lui faire faire tandis que pour le faire venir de lâEgypte Ă Rome , on dut dâabord le transporter dâIiĂ©liopolis Ă Alexandrie , oĂč on lâembarqua pour Ostie sur un vaisseau plus considĂ©rable quâaucun quâon eĂ»t fait jusquâalors. DâOslie on le conduisit Ă Rome. Il est vrai que ce transport se fit presquâenliĂšrement par eau , comme Pline nous lâapprend puis quâen Egypte on lâembarqua sur le Nil , et Ă Ostie sur le Tybre ; en quoi on connut , dit Pline , que les eaux du Tybre Ă©toient aussi profondes que celles du Nil , et qrCon pouvoit y embarquer dâaussi pesants fardeaux. Pline nous apprend encore , en parlant de ces obĂ©lisques et des moyens que les Egyptiens emploient pour les Ă©lever , que Ramesses , qui rĂ©gnoit en Egypte Ă lâĂ©poque dĂ© la prise de Troie , voulant Ă©lever un obĂ©lisque dans la ville oĂč Ă©toit autrefois le palais de MĂ©mo onium , il y employa vingt mille hommes. Lorsquâil fut question de Je dresser , ce roi craignant que les machines quâon avoit prĂ©parĂ©es pour cela , rie fussent pas assez fortes , malgrĂ© tout ce quâon lui assuroit, et pour que les architectes et les ouvriers y missent plus dâattention , fit attacher un de ses fils au bout de lâobĂ©lisque , afin que la crainte de nuire Ă ce jeune prince , obligeĂąt de prendre toutes les prĂ©cautions possibles pour Ă©viter que lâobĂ©lisque ne tombĂąt ; ce qui rĂ©ussit parfaitement. Cet obĂ©lisque , dit-il , fut trouvĂ© si admirable , que Cambise g aprĂšs la prise de cette ville, quâil fit mettre Ă feu et Ă sang , voyant les flammes parvenues au pied de lâobĂ©lisque , ordonna de lâĂ©teindre ; ayant, ajoute Pline , plus dâĂ©gards et de respect pour ce grand obĂ©lisque que pour le reste de la ville. Il avoit , dit-il , quatre-vingt dix- neuf pieds de long , et quatre coudĂ©es de chaque cĂŽtĂ©. Liv. XX X\ I , Chap, 8 et 9. On voit combien les anciens connoissoient cette science avec laquelle ils Ă©toient parvenus Ă faire de si grandes choses. Il est trĂšs-curieux de retrouver dans "Vitruve un traite, qui nous lait voir comment la pratiquoient les Romains qui la tenoient des Grecs ? et ceux-ci des Egyptiens. - s**' / 1 Pline, livre XXXVI, chapitre 2. 55 . LâARCHITECTURE DE V I T R U V E, CHAPITRE IL Des machines pour tirer . * Nous parlerons dâabord des machines qui sont nĂ©cessaires pour la construction des temples et des autres ouvrages publics. Voici comme on les fait. On prend trois piĂšces de bois AAA proportionnĂ©es Ă la pesanteur du fardeau quâon veut Ă©lever ; on les joint ensemble par le haut avec une cheville B, ensuite on les dresse , et on les Ă©carte par en bas , aprĂšs avoir liĂ© en haut des cordes quâon attache tout autour , pour tenir la machine droite et lâaffermir. On attache en haut un moufle C, appelĂ© par dâautres rechamus. On met dans le moufle deux poulies qui tournent sur leurs axes , on fait passer sur la poulie supĂ©rieure le cable qui doit tirer DD; on le passe ensuite sur une autre poulie, qui se trouve dans un moufle qui est par dessous E ; alors on le fait revenir passer sur la poulie qui est au bas du moufle supĂ©rieur ; et on fait encore descendre le cable pour en attacher le bout dans le trou F qui est dans le moufle infĂ©rieur; lâautre bout du cable sâattache en bas de la machine. Sur les piĂšces de bois Ă©quarries , dans lâendroit oĂč elles se retirent en arriĂšre en sâĂ©cartant, on attache les amarres GG i qui reçoivent les deux bouts de lâaxe du moulinet H , de maniĂšre quâils y puissent tourner aisĂ©ment. Le moulinet, vers chacun de ses bouts , a deux trous II disposĂ©s de façon quâon y puisse poser des leviers KK. Finalement on attache sous le moufle dâen bas des tenailles de fer L, dont les crochets sâadaptent dans les trous qu'on a faits pour cela dans les pierres. Comme le bout du cable est attachĂ© au moulinet , il s'entortille tout autour , et se tend Ă mesure quâon tourne le moulinet avec les leviers , ce qui fait Ă©lever les fardeaux Ă la hauteur oĂč on doit les placer. * Planche XXVL me comme on le verra dans le Chap. 5 , Ă un morceau i Jâai rendu le mot chelonia , par le mot françois de bois , clouĂ© sur un montant , oĂč il forme un bos- amarres , ce que Perrault avoit fait avant moi. Les architectes et les charpentiers appellent ainsi les deux morceaux de bois , percĂ©s au milieu , oĂč lâon fait passer tes deux bouts du moulinet Oi/donne le mĂȘme nom, sage ou crochet pour arrĂȘter une corde liĂ©e autour du montant. On appelle aussi amarre, en terme de marine, les cables avec lesquels on attache un vaisseau ; mais on sent qu il nâest pas ici question de cette sorte dâamarre. 1 LIVRE X, C h a p. n. REMARQUES. 4 36 Le mot trochlea quâemploie ici Fauteur, signifie ce que nos ouvriers appellent un moufle. On a donnĂ© ce nom en latin Ă toute la machine , quoique ce soit seulement celui dâune de ses parties, Car trochlea en latin et rpo%aXicc en grec signifie proprement une poulie, appelĂ©e orbiczilus dans le texte de Vitruve. Le nom Sorbiculus et celui de trochlea qui signifie une roue , convient bien mieux Ă une poulie quâau moufle. Dâautres, comme nous le voyons, nommoient celte machine en latin rechamus , mot qui ne se trouve que dans Yitruve. Ces moufles sont des morceaux de bois dans lesquels il y a des mortaises oĂč les poulies sont enchĂąssĂ©es. On lire le plus grand parti de cette machine pour Ă©lever toutes sortes de fardeaux. Lâun des moufles Ă©tant attachĂ© au haut de lâengin et lâautre au fardeau, la corde qui le doit lever produit son effet en faisant approcher le moufle mobile de celui qui reste fixe au haut de la machine ; il facilite par lĂ lâĂ©lĂ©vation du fardeau , par la raison que le cable, faisant deux replis sur les poulies des moufles, il arrive que le cable qui descend au moulinet, fait le double du chemin que fait le moufle infĂ©rieur en sâapprochant de lâautre; et par consĂ©quent, il nâa besoin que de la moitiĂ© de la puissance qui seroit nĂ©cessaire si elle ne passoit que sur une poulie, et si la descente du cable vers le moulinet Ă©loit Ă©gale Ă la montĂ©e du* fardeau. Nous avons vu quâon employoit deux espĂšces de cordes pour confectionner cette machine que nous nommons aujourdâhui une chĂšvre ou engin. Les unes qui servent pour lâaffermir, sâappellent en latin retinacula ; elles sont attachĂ©es par une de leurs exirĂ©mitĂ©s au haut de la machine, et par * lâautre Ă de forts pieux qui sont chassĂ©s obliquement dans la terre , autour de la machine quâelles soutiennent comme les haubans soutiennent le mĂąt dâun navire. Elles sont marquĂ©es MM, Fig. I. r , Planche XXVI. Lâautre espĂšce de corde est le cable qui passe daus les moufles et qui sert Ă Ă©lever le fardeau ; on le nomme en latin ductarii funes , que jâai traduit par cable qui doit tirer. Il est indiquĂ© dans la mĂȘme figure, par les lettres DD. Pour prendre les pierres et les attacher au moufle qui devoit lâĂ©lever, les anciens se servoient dâune espĂšce de tenailles quâils nommoient forcipes. Câest ainsi que Philander, Perrault et Galiani ont lu , au lieu de forfices , quâon trouve dans quelques manuscrits , qui signifie des ciseaux et qui ne voudrait rien dire ici. Ces tenailles Ă©toient composĂ©es de deux piĂšces de fer, jointes par un clou au milieu comme des ciseaux ou des tenailles. Ces piĂšces Ă©toient recourbĂ©es par en bas pour serrer la pierre , et elles avoient chacune un anneau par en haut comme des ciseaux, afin quâune corde Ă©tant passĂ©e dans ces anneaux fĂźt approcher en tirant les deux branches dâen haut et serrer par consĂ©quent les deux branches dâen bas, qui, plus on tiroit, lenoient fortement la pierre dans les deux trous oĂč elle avoit les deux extrĂ©mitĂ©s de ses pinces. Voyez la Planche XXVII, fig. 2 , lettre L. On ne se sert plus prĂ©sentement de cette pince qui, pouvant se plier, laisse alors tomber la pierre; on emploie gĂ©nĂ©ralement lâinstrument que nous nommons une louve , qui nâa pas le mĂȘme inconvĂ©nient. On le met dans un seul trou quâon doit creuser de maniĂšre quâil soit plus large dans le fond quâĂ 1 entrĂ©e, Planche XXVI, lettre L, 1 437 L â A 11 C II I T E C T U R E DE V I T R U V E. On met clans ce trou les deux coins, 22 , dont la partie la plus large se trouve en bas. Au milieu de ces coins il y en a un troisiĂšme, 3, qui nâest pas plus large en haut quâen bas, qui sert pour Ă©carter les deux autres et les serrer contre les cĂŽtĂ©s du trou. Les trois coins sont percĂ©s par en haut et enfijĂ©s avec une anse , I, par la cheville 44. Ces trois coins ainsi joints ensemble forment une queue dâhirondelle quâil est impossible de faire sortir de la pierre sans ĂŽter les coins qui les serrent. Trois poutres composent lâassemblage de cette machine que nous nommons aujourdâhui une chĂšvre. Ce nombre est nĂ©cessaire pour quâelle puisse se tenir dressĂ©e et sâappuyer sur elle-mĂȘme, en formant le trĂ©pied.. Les autres machines pour tirer que Yitruve dĂ©crit dans les chapitres suivans , sont de mĂȘme composĂ©es de trois poutres, Ă lâexception dâune seule, dont il parle dans le Chap. 5, qui consiste en une piĂšce de bois retenue par des cordes. Lâassemblage des autres est donc le mĂȘme que celui quâil a dĂ©crit dans ce deuxiĂšme chapitre. Il observe au commencement de celui qui suit que les diffĂ©rentes dĂ©nominations quâil donne Ă cette machine , dĂ©rivent uniquement du nombre de poulies quâon y a adaptĂ©es. Ainsi, la chĂšvre quâil vient de dĂ©crire dans ce deuxiĂšme chapitre, ayant trois poulies, sâappelle tris- pctslo. Yoyez fĂźg. 3, Planche XXĂX. Une autre qui en a cinq sâappelle pentapasto. Y oyez fig. 4. U ne cite que ces deux lĂ dont les noms dĂ©rivent du nombre de leurs poulies; mais il faut faire attention que ce sont les seules de celles dont il parle qui nâont quâun rang de poulies placĂ©es perpendiculairement les unes au-dessus des autres dans les moufles, et oĂč lâon nâemploie quâun seul cable. On ne comptoit donc , Ă ce quâil paroĂźt dâaprĂšs cela , que les poulies dâun rang pour donner un nom qui Ă©loit dĂ©rivĂ© de leur nombre Ă la machine. Les rangs de poulies quâon meitoit Ă cĂŽtĂ©, pour y employer un second ou un troisiĂšme cable, ne se comploient pas. Nous voyons en effet que, dans le quatriĂšme chapitre de ce livre, il parle, mais sans la nommer, dâune autre machine oĂč lâon a mis un second rang de poulies Ă cĂŽtĂ© des premiĂšres 3 afin de pouvoir y employer deux cables pour tirer, ce qui nâest dans le fond autre chose que le trispasto dont on a doublĂ© les poulies pour y employer deux cables 3 machine quâil auroit dĂ» nommer excispcisto > sâil lui avoit donnĂ© un nom dâaprĂšs le nombre de poulies qui sây trouvoient. Dans le cinquiĂšme chapitre, il parle encore dâune autre machine oĂč on a ajoutĂ© un troisiĂšme rang de poulies pour y employer trois cables , ce qui nâest aussi que le trispasto dont on a triplĂ© les poulies. Comme il ne donne Ă celte deVniĂšre machine que le nom gĂ©nĂ©rique de polispasto, câest-Ă -dire, composĂ© de plusieurs poulies, il paroĂźt quâon 11 e comptoit que les poulies placéçs perpendiculairement et qui jouoient avec le mĂȘme cable pour en faire dĂ©river le nom donnĂ© Ă la machine , et quâon ne comptoit pas celles qui Ă©toient dans les rangs placĂ©es Ă cĂŽtĂ©. Il remarque , dans le mĂȘme chapitre , que plus ce fardeau sera pesant, plus on devra augmenter le nombre de cables, pour le tirer, et par consĂ©quent les rangĂ©es de poulies. J LIVRE X, C h a p. in. CHAPITRE III. Dâune autre machine pour tirer . C^ommb il y a trois poulies qui agissent dans la machine dont je viens de parler , on la nomme trispastos i ; quand il y en a deux dans la partie infĂ©rieure et trois dans la supĂ©rieure, on lâappelle pentaspastos 2. Si lâon avoit besoin dâune machine pour lever de plus grands fardeaux , il faut employer des piĂšces de bois plus longues et plus Ă©paisses , et augmenter dans la mĂȘme proportion la force des chevilles et des autres liens qui sont en haut, et celle des moulinets qui sont en bas. * Quand on aura prĂ©parĂ© ces objets , on commencera par placer , mais sans les tendre, les cables DD qui doivent tirer; on attachera ensuite au haut de la machine les cordes MM qui doivent la retenir , et on les laissera lĂąches sans les tendre. Si lâon ne trouve aucun objet oĂč on puisse les lier , on fichera tout autour dans la terre des pieux en les inclinant, et on les enfoncera bien avant avec des maillets, afin de pouvoir y lier les cordes. AprĂšs cela , il faut attacher avec un cable la partie supĂ©rieure du moufle C au haut de toute la machine, et conduire ce mĂȘme cable vers un des pieux O fichĂ© en terre oĂč on le fait passer sur une poulie liĂ©e Ăą ce pieu. On le fait ensuite retourner sur une des poulies du moufle supĂ©rieur , et descendre sur le moulinet qui est au bas de la machine , et on lây attache. Lorsquâon tournera le moulinet avec les leviers , la machine se dressera elle-mĂȘme sans danger ; et quand on aura liĂ© les cordes qui doivent la retenir aux pieux qui sont disposĂ©s tout autour, elle sera bien affermie ; on pourra donc se servir du moufle et du cable comme 011 lâa dit ci-dessus. REMARQUES Le passage de ce troisiĂšme chapitre , oĂč Vitruve commence Ă faire la description dâune machine assez forte pour pouvoir Ă©lever des fardeaux plus pesans, nâest pas de mĂȘme dans tous les manuscrits. On lit dans presque tous His explicatis cmtarii funes ante laxi collocentur 3 etc. * Planche XXVI.âą CO Câest-Ă -dire, tirant par trois. 2 Câest-Ă -dire, tirant par cinq. 43g LâARCHITECTURE DE YITRUVE. Philander remarque que dans dâautres, au Heu antarii on trouve antaai; mais on sup- pose, sans cependant vouloir lâassurer, quâon devroit plutĂŽt lire ductarii. Gali»ni a suivi cette derniĂšre opinion quâil trouve la plus raisonnable de toutes; je lâai Ă©galement adoptĂ©e. Nous voyons, en effet, que Vitruve parle dâune machine semblable, ou, pour mieux dire, absolument la mĂȘme que celle quâil a dĂ©crite dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, si ce nâest que les piĂšces de bois qui la composent sont plus grandes et plus fortes. Comme elle est plus pesante que la premiĂšre, il explique la maniĂšre de pouvoir lâĂ©lever, et câest de cette opĂ©ration quâil sâagit. Nous avons remarquĂ© cpte dans toutes les machines pour tirer , et particuliĂšrement dans celle quâil dĂ©crit dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, On employoit deux espĂšces de cordes, dont les unes Ă©toient des cables, quâil appelle ductarii , lesquels serveienl pour tirer les fardeaux ; et les autres quâil nomme retinacula qui servoient pour affermir la machine. On voit quâil veut quâon commence par attacher celles-ci Ă la machine , tandis quâelle est encore Ă©tendue par terre , sans doute pour quâon le fasse plus commodĂ©ment ; et, pour la mĂȘme raison, il veut Ă©galement quâon prĂ©pare les moufles et les cables destinĂ©s Ă tirer, et ensuite quâon attache le moufle avec un autre cable au haut de la machine , et que ce dernier cable serve aussi pour Ă©lever toute cette machine , comme lâindiquent ces mots et ex eo funes perducantur ad palum , etc. , ce que la lig. I. re de la Planche XXVI fait voir. DâaprĂšs cela , on voit que les deux premiĂšres cordes dont il parle , doivent ĂȘtre les mĂȘmes que celles employĂ©es dans la premiĂšre machine ; tellement quâon doit lire , comme nous lâavons fait , ductarii . Baldus veut au contraire quâon lise antarii , et il entend par lĂ celte corde quâon attache Ă la pierre , qui sert Ă la conduire et Ă la tirer vers lâendroit oĂč on la veut poser. Mais il nây a aucune apparence que ce soit lĂ lâintention de lâauteur , puisquâil aurait dĂ» faire connoĂźlre au moins lâusage de cette corde quâil nâauroit fait que nommer , et qui , dans le fond, ne feroit pas partie de la machine. Je croĂźs donc, dĂ»iprĂšs ce que jâai observĂ© , quâil faut lire ductarii , comme Galiani a lu , le texte ayant de cette maniĂšre un sens trĂšs-raisonnable et trĂšs-apparent. CHAPITRE I Y. D une autre machine pour tirer. Si l'on doit employer dans un ouvrage des fardeaux dâune grandeur excessive et dâun poids Ă©norme , pi on ne se fie pas Ă un moulinet ce moyen ne suffit pas ; il faut de plus faire passer un essieu dans les amarres oĂč tournent ses deux extrĂ©mitĂ©s; cet essieu aura dans le milieu un grand tympan P, que quelques-uns parmi nous appellent LIVRE X, C h a p. iv. 44 ° appellent une roue, et les Grecs amphireusin i, ou peritrockon 2 . Les moufles de cette machine se font encore autrement que pour les autres car le moufle supĂ©rieur , de mĂȘme que f infĂ©rieur , doivent avoir deux rangs de poulies 3 , et il faut passer le cable dans le trou du moufle infĂ©rieur , de maniĂšre que ces deux bouts soient Ă©gaux , quand il sera Ă©tendu ; et son milieu qui se trouve dans le trou du moufle infĂ©rieur , il faut l'attacher si bien avec une petite corde , quâil ne puisse glisser ni dâun cĂŽtĂ© ni dâautre. Cela fait de la sorte , il faut passer les deux bouts du cable en dehors dans le moufle supĂ©rieur et sur les poulies basses pour redescendre et repasser en dedans sous les poulies du moufle infĂ©rieur , et ensuite retourner Ă droite et Ă gauche pour passer sur les poulies qui sont au haut du moufle supĂ©rieur , oĂč, Ă©tant passĂ©s par en haut , ils descendent des deux cĂŽtĂ©s du tympan , oĂč on les attache fortement Ă lâessieu. Il faut entortiller autour du tympan un autre cable quâon rattache Ă un vindas R. Celui-ci en tournant fait aussi tourner le tympan , et tire Ă©galement les cables qui sont attachĂ©s Ă son essieu , de maniĂšre quâil lĂšve insensiblement les fardeaux sans occasionner de danger. Si lâon veut faire le tympan beaucoup plus grand , de façon que des hommes, en marchant dans le milieu ou sur un des cĂŽtĂ©s , puissent le faire tourner sans employer un vindas , la machine agira plus promptement. REMARQUES. Le vindas , dont il est parlĂ© dans ce chapitre , est une espĂšce de moulinet ou treuil, mais qui est posĂ© verticalement ; il est bon de remarquer que ce vindas et les autres moyens ingĂ©nieux que Yilruve attribue particuliĂšrement Ă quelquâune de ses machines , peuvent sâadapter indistinctement Ă toutes les autres. Quand la force dâun homme ne suffit pas pour tirer une corde, on facilite lâopĂ©ration, comme on le sait, au moyen dâune poulie; on la facilite encore davantage en employant le vindas par lequel les forces rĂ©unies de plusieurs hommes agissent Ă©galement et sans gĂȘne. On la facilite enfin en doublant ou en triplant les cordes. Les anciens faisoient aussi tourner le tympan dâune machine , en faisant marcher des hommes dedans. Ln bas-relief antique, qui est encastrĂ© dans un mur , sur Je marchĂ© de Capoue , reprĂ©sente une de ces machines avec des hommes dans la roue ou le tympan 4. x Câest-Ă -dire qui roule Ă lâentour. tiplier de meme les poulies. Ainsi il faudra doubler ou 2 Câest-Ă -dire qui tourne Ă lâentour.. tripler les rangs de poulies , comme on le dit ici , et 3 Quand on juge quâune seule corde ne peut sup- comme onle verra dans la description de la polys pastos. porter le fardeau , il faut en ajouter dâautres , et mul- O Mazocdu dis. Amplnth . Campania. 56 44* LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE Y. Dâune autre espĂšce de machine. * Il existe une autre machine assez ingĂ©nieuse qui agit fort vite; mais il faut beaucoup dâadresse pour sâen servir. Elle consiste dans une longue piĂšce de bois Ă, quâon dresse et quâon maintient dans cet Ă©tat , en la retenant des quatre cĂŽtĂ©s avec des cordes MM. Au haut de cette piĂšce de bois , sous l'endroit oĂč ces cordes sont attachĂ©es , on cloue deux amarres G sur lesquelles on attache le moufle avec des cordes. On appuyĂ© le moufle par une rĂšgle T longue environ de deux pieds, large de six doigts et Ă©paisse de quatre. Les moufles ont dans leur largeur chacun trois rangs de poulies , tellement que trois cables DDD attachĂ©s au haut de la machine , viennent passer du dedans au dehors sous les trois poulies qui sont au haut du moufle infĂ©rieur , et retournant au moufle supĂ©rieur passent de dehors en dedans sur les poulies quâelle a en bas de lĂ descendant au moufle , ces cables passent encore de dedans en dehors sous les poulies qui sont au second rang , et retournent au moufle supĂ©rieur , pour passer sur les poulies qui sont au second rang , et ensuite retourner au moufle infĂ©rieur , et enfin encore au supĂ©rieur , oĂč ayant passĂ© sur les poulies qui sont en haut, ils descendent au bas de la machine. Au pied de la machine , on place un troisiĂšme moufle que les Grecs appellent Ă©pagon i et nous artemon 2 ; ce troisiĂšme quâon attache au pied de la machine , contient trois poulies , sur lesquelles passent les trois cables qui sont tirĂ©s par des hommes. Ainsi trois rangs dâhommes peuvent tirer et Ă©lever promptement les fardeaux sans employer le vindas. On appelle cette machine potys pastos 3 , Ă cause que la multitude des poulies fait qu elle tire avec beaucoup de facilitĂ© et de promptitude. Elle offre encore un grand avantage Ă©tant composĂ©e dâune seule piĂšce de bois dressĂ©e sur elle - mĂȘme , quâon peut incliner en avant ou de cĂŽtĂ© , Ă droite ou Ă gauche vers lâendroit oĂč lâon veut placer le fardeau. * Planche XXVII , fig. i. 1 Câest-Ă -dire , qui tire Ă soi. 2 Câest-Ă -dire , qui est ajoutĂ©. 3 Câest-Ă -dire , qui tire par plusieurs poulies, LIVRE X, Ch ap. v . 44a % Toutes les machines quâon vient de dĂ©crire , servent non seulement pour les objets que nous avons indiquĂ©s , mais encore pour charger ou dĂ©charger les navires ; pour les employer , il faut dresser les unes et coucher les autres sur des cylindres pour les tourner vers lâendroit oĂč lâon en a besoin. On peut aussi sans Ă©lever cette piĂšce de bois dont nous avons parlĂ© , tirer les navires hors de lâeau, en employant, dâaprĂšs les rĂšgles que nous avons Ă©tablies , les cables passĂ©s dans les moufles. REMARQUES .. La machine que Fauteur vient de dĂ©crire est extrĂȘmement simple, puisqu'elle consiste en une seule piĂšce de bois quâon dresse et quâon maintient dans cet Ă©tat avec quatre cordes , comme on maintient le mĂąt dâun navire avec les aubans. Toute la force de cette machine consiste en ce quâon a multipliĂ© les poulies et les cordes. Elle offroit encore un avantage on pouvoit incliner sa cime au-dessus de lâendroit oĂč lâon vouloit placer le fardeau , ce que Vitruve fait remarquer. Perrault a cru quâil entendoit par-lĂ quâaprĂšs avoir Ă©levĂ© la pierre Ă la hauteur nĂ©cessaire, on pouvoit alors, en inclinant toute la machine, placer cette pierre Ă droite ou Ă gauche comme on le vouloit. Il est Ă©tonnant quâun homme aussi versĂ© quâil lâĂ©toit dans lâart des mĂ©caniques , nâait pas senti combien il Ă©toit difficile ou , pour mieux dire impossible de faire agir Ă volontĂ© celte longue piĂšce de bois, quand elle seroit chargĂ©e , et porleroit en Pair ce pesant fardeau si on avoit dĂ©tendu un des aubans qui la retenoient, aucune force nâauroit Ă©tĂ© v capable de la diriger. Il falloir donc incliner la cime de la machine au-dessus de lâendroit oĂč on devoit placer la pierre, avant de commencer Ă lâĂ©lever. Câest ce que Vitruve a entendu, comme le fait voir le texte latin, qui dit quod ante quantum velit , etc. Le mot ante , mis lĂ tout exprĂšs, exprime clairement la chose. Je ne crois donc pas quâon pouvoit baisser cette machine, chargĂ©e de la pierre , pour placer celle-ci dans lâendroit qui lui Ă©toit destinĂ© il Ă©toit bien plus simple et plus aisĂ© de la tirer avec une autre corde, tandis quâelle Ă©loil suspendue , pour la conduire oĂč on vouloit la placer. On sent quâil Ă©toit bien plus facile de faire celle opĂ©ration avec cette machine, composĂ©e dâune seule poutre, quâavec celles qui lâĂ©loient de trois. Celte machine, comme nous lâavons vu, sâappeloit polyspastos, câest-Ă -dire, qui tire par plusieurs poulies. Plutarque nomme de mĂȘme la machine avec laquelle il dit quâArchimĂšde traĂźna lui seul sans peine hors de lâeau un grand navire chargĂ© de tout ce quâil pouvoit porter sur la mer 1. Il paroĂźt quâil y a de lâexagĂ©ration dans le rĂ©cit de Plutarque; on sait tout ce que la polyspasle peut faire, ce qui est bien Ă©loignĂ© des effets que Plutarque lui attribue. Nous avons prĂ©sentement des machines beaucoup plus commodes pour Ă©lever des fardeaux Ă une grande hauteur et les placer oĂč nous voulons. Perrault en dĂ©crit quelques-unes dans ses notes sur ce chapitre. i Plutarque , vie de Marccllus. 56 . 443 L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE VI. Moyen quemploya ClĂ©siphon pour transporter des fardeaux trĂšs - pesants. * Il convient aussi de rapporter lâinvention ingĂ©nieuse quâemploya ClĂ©siphon pour transporter les colonnes qui dĂ©voient servir au temple de Diane. Il falloit amener les fuis de ces colonnes depuis les carriĂšres oĂč on les prenoit jusquâĂ EphĂšse. Les charrettes ne lui paroissoient pas un moyen assez sĂ»r, Ă cause que les chemins traversant un terrain peu solide , il craignoit que la pesanteur du fardeau ne lit enfoncer les roues. Voici comme il fit. Il assembla quatre piĂšces de bois de quatre pouces en carrĂ© , dont deux Ă©toient jointes en travers AA avec les deux autres qui Ă©toient plus longues BB et Ă©gales Ă la grandeur du fĂ»t des colonnes. 11 enfonça aux deux extrĂ©mitĂ©s de chaque colonne des boulons de fer C , faits en queue dâhirondelle i , et les y scella avec du plomb , ayant mis dans les piĂšces de bois traversantes des anneaux de fer dans lesquels les boulons entroient , et il affermit le devant de la machine en lâattachant aux traverses avec dâautres piĂšces de bois de chĂȘne DD. 2 Les boulons tournoient si librement dans les anneaux de fer , que les fĂ»ts des colonnes ne cessĂšrent de rouler tout le temps que les bĆufs les tiroient. Il lit amener ainsi tous les fĂ»ts des colonnes , sur le modĂšle de cette machine. MĂ©tagĂšnes , fds de CtĂ©siphon en lit une autre pour amener les architraves et les autres parties de lâentablement. Elle Ă©toit composĂ©e de roues de douze pieds environ dans le milieu desquelles il enferma les deux bouts des architraves , auxquelles il ajouta des boulons et des anneaux de fer. les boulons placĂ©s dans les anneaux de * Planche XXVIII."** 1 On comprend que ces boulons nâĂ©toient en queue dâhirondelle que par le bout qui entroit dans la pierre , oĂč il Ă©toit scellĂ© avec du plomb pour lây faire tenir. Lâautre bout qui sortoit hors de la colonne devoit ĂȘtre rond afin de pouvoir tourner dans lâanneau. 2 Perrault a cru que les mots haciilis iligneis signi- fsuient deux limons placĂ©s devant la machine pour y Lorsque les bĆufs tiroient la machine, fer faisoient tourner les roues tellement attacher les bĆufs. Si lâintention de lâauteur avoit Ă©tĂ© telle , il auroit dit baculos iligneos cupitibus religavit au lieu de cela il dit, baculis iligneis capita religavit, Il paroit que par ces mots Vitruve entend quâon fasse tenir plu* fortement le devant de la machine aux traverses, en les attachant encore avec de petites piĂšces de bois de chene, placĂ©es diagonalement dans les angles, comme on les voit reprĂ©sentĂ©s D D fig. 2 , planche XXVIII. LIVRE X, C h a p. vl s 444 que les architraves enfermĂ©es dans ces roues comme des essieux , furent amenĂ©es sur les lieux avec les fĂ»ts des colonnes. Nous avons un exemple de ces machines, dans les cylindres quâon employĂ© pour applanir les promenoirs des palestres, i On nâauroit pu employer celte machine , si les carriĂšres avoient Ă©tĂ© plus Ă©loignĂ©es du temple ; mais leur distance nâest que de huit cents pas. La disposition du lieu Ă©toit dâailleurs trĂšs - favorable , puisquâelle prĂ©sente une campagne sans aucun enfoncement , mais toujours Ă©gale. On se rappelle de nos jours que la base de la statue colossale dâApollon se rompit de vĂ©tustĂ© dans son temple ; de crainte que la statue ne vĂźnt Ă tomber et se briser par sa chute , on fit marchĂ© pour faire une nouvelle base taillĂ©e dans la carriĂšre dâoĂč on avoit tirĂ© lâancienne. Un certain Paconius lâentreprit. Sa longueur devoit ĂȘtre de douze pieds , sa largeur de huit et sa hauteur de six. Par ambition , il ne voulut pas employer les moyens de MĂ©tagĂšnes , mais il essaya de faire une antre machine dans le genre de la sienne. Il la composa de deux roues qui avoient quinze pieds environ ; il enchĂąssa les deux extrĂ©mitĂ©s des pierres dans ces roues , et fit passer des fuseaux de bois , de la grosseur de deux pouces, dâune roue Ă lâautre , il les disposa circulairement, de maniĂšre quâils enfermoient la pierre, laissant entre chacun la distance dâun pied. Autour de tous ces fuseaux , il entortilla un cable quâil fit tirer par des bĆufs , qui en dĂ©vidant le cable , faisoient tourner les roues; mais il ne fut pas possible de faire avancer cette machine par un chemin droit ; car elle se dĂ©tournoit continuellement Ă droite ou Ă gauche , tellement quâil falioit toujours la retourner. Il arriva de lĂ que Paconius dĂ©pensa tant dâargent pour faire tourner et retourner sa machine , quâil ne put achever son entreprise. REMARQUES. » Perrault observe trĂšs-judicieusement que si, au lieu dâune corde entortillĂ©e dans le milieu de sa machine^ Paconius en eĂ»t entortillĂ© deux, câest-Ă -dire, une de chaque cĂŽtĂ©, la machine au- roil avancĂ© trĂšs-droit. La machine de Paconius avoit un avantage sur celle de MĂ©tagĂšnes les ĂŻ En employant ici le mot palestre, il prend le machine que CtĂ©siphon inventa pour traĂźner les fĂ»ts tout pour la partie, câest-Ă -dire, pour le xiste qui fai- des colonnes , quâĂ celle de MĂ©tagĂšnes pour transpor- soit partie de la palestre, et qui Ă©toit lâendroit oĂč les ter les piĂšces de lâentablement. Ceci feroit soupçon- athlĂštes sâexerçoient Ă la lutte , et qui pour cela nâĂ©toit ner quâon a transportĂ© toute la pĂ©riode depuis le mot pas pavĂ©, mais couvert de sable, quâon avoit soin Exemplar jusquâĂ ceux perpetuus campus, qui dĂ©voient se dâapplanir et dâĂ©galiser avec ces cylindres. Voyez Liv. trouver Ă la fin du dernier alinĂ©a , avant ces mots , V. Chap. II. Lâexemple de ces cylindres, qui ser- " cum autem scapos etc. voient Ă unir les promenoirs , convient mieux Ă la 445 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. roues Ă©tant plus grandes et les cables tirant vers le haut sur la superficie de la machine, et non sur base, il falloit bien moins de force pour la faire agir que pour celle de MĂ©tagĂšnes. Mais elle avoit en revanche un grand inconvĂ©nient quand les cables Ă©loient dĂ©vidĂ©s , il falloit sâarrĂȘter chaque fois pour les entortiller de nouveau autour de la machine , ce cjui prenoit beaucoup de temps , et fut probablement cause quâon sâen dĂ©goĂ»ta. CHAPITRE VIL Comment on dĂ©couvrit les CarriĂšres dâEphĂšse. j e ferai connoĂźtre par une petite digression comment furent dĂ©couvertes les carriĂšres dâĂphĂšse. Un berger , nommĂ© Pixodore , conduisoit souvent son troupeau dans les environs ; dans le temps que les EphĂ©siens se proposoient de faire venir de Paros , de ProconĂšse, dâHĂ©raclĂ©e , ou de Thasis , les marbres nĂ©cessaires pour construire le temple de Diane , il arriva que le berger faisant paĂźtre son troupeau en cet endroit , deux bĂ©liers courant pour sâentre-choquer , passĂšrent lâun Ă cĂŽtĂ© de lâautre sans se toucher ; et lâun dâeux alla donner de ses cornes contre un rocher dont il rompit un Ă©clat; le berger le trouva dâune blancheur si vive, quâĂ lâheure mĂȘme, laissant ses moutons sur la montagne, il courut le porter Ă EphĂšse , oĂč lâon Ă©toit trĂšs-embarrassĂ© pour trouver le moyen de transporter les marbres. On dĂ©cerna sur le champ de grands honneurs au berger. Son nom de Pixodore fut changĂ© en celui dâEvan- gelus i et Ă prĂ©sent encore , le magistrat de la ville se rend tous les mois sur les lieux pour y faire un sacrifice , et il y est mĂȘme tenu sous peine de punition. CHAPITRE VIII. Des principes MĂ©caniques . J Ai su exposer en peu de mots tout ce que j ai cru nĂ©cessaire pour expliquer es machines qui sont faites pour tirer les deux moteurs ou puissances qui les font agir , diffĂ©rons lâun de l'autre, ne se ressemblent mĂȘme pas. Aussi produisent- ils les principes de deux actions ; l une est la force de la ligne droite appelĂ©e eutheia Ăi Gâest-Ă -dire , porteur de bonnes nouvelles. LIVRE X, Chap. vin. 446 par les Grecs ; lâautre la force de la ligne circulaire appelĂ©e cyclotes. Il nâen est cependant pas moins vrai que le mouvement qui va en ligne droite nâagit pas sans celui de la ligne circulaire , ni celui de la ligne circulaire sans celui de la ligne droite , quand on Ă©lĂšve des fardeaux en tournant des machines. Pour mieux faire comprendre la chose , je vais lâexpliquer. Toutes les poulies , par exemple , ont des pivots qui les traversent dans le centre comme des axes. Une corde passe sur les poulies , va droit au moulinet , oĂč on lâattache quand on tourne celui-ci avec les leviers , il fait Ă©lever les fardeaux. Les deux bouts du moulinet qui sâĂ©tend dâune amarre Ă lâautre, sont aussi comme des centres dans les trous des amarres , et les extrĂ©mitĂ©s des leviers dĂ©crivent un cercle, lorsque le moulinet tourne en Ă©levant les fardeaux. On peut de mĂȘme, au moyen dâune barre de fer, lever un fardeau que plusieurs hommes ne sauroient remuer. Pour servir de centre , on place sous la barre un appui, que les Grecs appellent Ypomochlion ; on fait entrer sous le fardeau un des bouts de la barre ; alors la force dâun seul homme qui pousse sur lâautre bout de la barre suffit pour faire lever le fardeau. Voici pourquoi. Cette partie antĂ©rieure de la barre qui entre sous le fardeau , jusquâĂ lâappui qui sert de centre , est beaucoup plus courte que lâautre qui sâĂ©tend depuis ce centre jusquâĂ lâautre extrĂ©mitĂ© ; tellement quâen prenant cette extrĂ©mitĂ© et appuyant dessus , elle forme un mouvement circulaire, qui met la force de la main en Ă©quilibre avec le poids dâune masse aussi considĂ©rable. On peut de mĂȘme mettre le bout de la barre de fer sous le fardeau , et au lieu de pousser sur lâautre extrĂ©mitĂ© de la barre , la lever ; le bout antĂ©rieur appuyant sur le sol agira contre la terre comme il faisoit auparavant contre le fardeau , et la barre pressera lâangle du fardeau quelle lĂšve , comme elle pressoit Y Ypomochlion. Par ce moyen qui agit dans un sens opposĂ© Ă lâautre , on lĂšve le poids, mais pas aussi aisĂ©ment. Si au contraire on enfonce fort avant sous le fardeau la barre soutenue sur Y Ypomochlion, de maniĂšre que lâautre extrĂ©mitĂ© se trouve trop rapprochĂ©e du centre, on ne pourra lever le fardeau , Ă moins quâon ne reprenne 1 Ă©quilibre , comme on a dit , en faisant que la plus grande partie de la barre se trouve du cĂŽtĂ© opposĂ© Ă celui sur lequel pose le poids. On peut observer cela dans les balances , quâon appelle statĂšres; i lâanse, qui est comme le centre du flĂ©au, est attachĂ©e prĂšs de lâextrĂ©mitĂ© oĂč on a suspendu le i Câest ce que nous nommons la balance romaine ou peson. 447 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. bassin ; plus on fait avancer vers lâextrĂ©mitĂ© de lâautre partie du flĂ©au, sur les points qui y sont marques, le poids qui glisse tout le long, plus ce petit poids aura la force dâĂ©galer une grande pesanteur , Ă cause que le flĂ©au est en Ă©quilibre , et que le contre-poids est plus Ă©loignĂ© du centre. Tellement quâun poids dont lâeffet Ă©toit trĂšs-foible , lorsquâil se trou voit trop prĂšs du centre , peut acquĂ©rir en un moment une grande force, et Ă©lever sans peine un trĂšs-lourd fardeau. i - » Cette mĂȘme force, qui agit loin du centre, fait que la main du pilote qui dirige avec la barre du gouvernail, que les Grecs nomment Oiax , peut tourner en un moment un Ă©norme navire chargĂ© de marchandises et de tous ses agrĂšs. Elle est encore cause que quand on nâĂ©lĂšve les voiles que jusquâĂ la moitiĂ© du âą mĂąt, elles ne font pas aller le vaisseau aussi vite que quand on Ă©lĂšve les antennes jusquâen haut ; parce que le vent agit avec moins de force sur les voiles qui reçoivent son soufle aussi prĂšs du pied du mĂąt, que lâon considĂšre comme le centre, que sur celles qui le reçoivent en haut Ă une plus grande distance. De mĂȘme, quand on appuyĂ© sur le milieu dâun levier , on a beaucoup de peine Ă remuer le fardeau quâil doit lever , tandis quâon le fait aisĂ©ment lorsquâon le prend par lâextrĂ©mitĂ© du manche ainsi les voiles qui sont attachĂ©es au milieu du mĂąt, ont beaucoup moins de force, que quand elles le sont en haut ; comme elles se trouvent alors plus Ă©loignĂ©es du centre , quoique le vent ne soit pas plus fort, mais Ă©gal, lâimpulsion qui se fait au sommet, accĂ©lĂšre la marche du navire. Nous voyons aussi que les rames attachĂ©es Ă leur cheville avec des cordes, quand on les plonge et quâon les ramĂšne Ă force de bras, plus leurs extrĂ©mitĂ©s sâavancent loin du centre dans la mer, plus elles donnent une vĂ©hĂ©mente impulsion et un cours direct au navire en lui faisant fendre les flots. Six ou bien quatre portefaix i veulent-ils soulever de lourds fardeaux, ils mesurent dâabord les bĂątons dont ils doivent se servir, et font en sorte que le centre qui doit porter se trouve au milieu , afin de partager la charge Ă©galement sur les Ă©paules de chacun. Il y a pour 1 Le mot Phalangani signifie ceux qui portoient des fardeaux sur leur Ă©paules avec des bĂątons appelĂ©s phalanges. Le mot grec ĂaXa>y§ signifie proprement un rouleau de bois ; par mĂ©taphore câĂ©toit un bataillon rangĂ©, peut-ĂȘtre par ce quâil avoit la figure dâun morcela des chevilles de fer au milieu de ceau de bois Ă©tant plus long que large , et aussi qu il en avoit la fermetĂ©. Il paroĂźt encore que câest Ă cause de leur ressemblance avec cette figure que Galien, et long temps avant lui Aristophane, au rapport de Fol- lux , appellent les os des doigts , phalanges. leurs L I Y 11 E X, C h a p. vin. 448 leurs bĂątons, qui empĂȘchent les courroies qui supportent le fardeau de glisser d'un cĂŽte ou dâautre. Or quand le fardeau sâĂ©loigne du centre, il pĂšse sur celui des porteurs vers lequel il a glisse', comme quand on fait aller le contre-poids d'une balance vers son extrĂ©mitĂ©. Pour la mĂȘme raison , les bĆufs tirent Ă©galement, quand la courroie qui soutient le timon est liĂ©e au milieu de leur joug mais quand les bĆufs ne sont pas de force Ă©gale et que lâun fait trop travailler lâautre , on passe la courroie de maniĂšre quâun des cĂŽtĂ©s du joug soit plus long que fautre , afin de soulager le bĆuf qui est le plus foible. Il en est des bĂątons Ă porter comme des jougs, quand les courroies ne sont pas au milieu , et quâune partie du bĂąton se trouve plus longue et une autre plus courte , savoir celle vers laquelle la courroie a coulĂ© ; si lâon fait circuler alors le bĂąton autour de 1 endroit oĂč se trouve la courroie qui sert de centre, lâextrĂ©mitĂ© de la partie la plus longue dĂ©crira un plus grand cercle, et celle de la plus courte un plus petit. C est pour cela que les petites roues roulent plus lentement et plus difficilement; câest pour cela encore que les bĂątons et les jougs pĂšsent davantage du cĂŽtĂ© ou se trouve 1 intervalle le plus court, depuis le centre jusquâĂ lâextrĂ©mitĂ© ; et au contraire , ils soulagent dâautant ceux qui les portent, quâil y a un plus long espace depuis le centre jusquâĂ lâextrĂ©mitĂ©. Ces exemples font voir que toutes les machines agissent par le mouvement direct ou circulaire , Ă raison de la distance du centre ; câest ainsi que les chars, les voilures , les pignons, les roues , les vis, les arbalĂštes, les baiistes, les presses et toutes les autres machines produisent les effets pour lesquels elles sont destinĂ©es , par la force de la ligne droite, du centre et de la ligne circulaire. REMARQUES. Ce nâest pas dâaprĂšs les principes de la gĂ©omĂ©trie ni dâaprĂšs ceux de la physique que lâauteur cherche Ă dĂ©montrer, dans ce huitiĂšme chapitre, comment les machines produisent leurs effets y il se contente de faire connoĂźire ces machines et dâexpliquer par diverses expĂ©riences et des exemples les effets quâelles produisent; on ne peut douter cependant quâil ne connĂ»t trĂšs-bien , comme on pouvoil en rendre raison par les rĂšgles de la gĂ©omĂ©trie et de la physique mais il est probable quâil en a agi de la sorte pour se faire plus aisĂ©ment comprendre des artistes qui ignoroieut ces sciences. Ainsi il fait voir par des exemples que , quoique Je mouvement direct scit different du mouvement circulaire , il nâest pas dâopĂ©ration mĂ©canique oĂč ces rleux mouvement, nâagissent concurremment ensemble. Dans la poulie, par exemple, se trouve le mouvement circulaire, et dans la corde qui la fait agir le direct. Le levier agit directement, et la main qui lâemploie agit par un mouvement circulaire; il en est de mĂȘme des autres machines. 5 7 449 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. Il s'attache sur-tout Ă faire connoĂźtre, et toujours par des exemples, les diffĂ©rents usages du levier , la plus simple et , en mĂȘme temps, la principale de toutes les machines. Pour appuyer 1 principe que plus la puissance qui fait agir le levier est Ă©loignĂ©e de lâappui, plus elle a de force, il cite les rames dâun vaisseau , qui, plus elles sont longues depuis le bord du navire qui est le centre, et atteindront par-consĂ©quent de loin la mer, plus elles accĂ©lĂ©reront la marche du navire. Philander et Perrault reprennent ici Yilrnve et prĂ©tendent quâil applique mal Ă propos la thĂ©orie des effets du levier Ă celui des rames des navires. Ils disent quâen cela il est contraire Ă ce quâenseigne Aristote qui veut que la longueur des rames est seulement nĂ©cessaire pour que Peau soit frappĂ©e avec plus de vitesse, ce qui arrive quand la rame est longue, lâeau rĂ©siste alors lavante tage car si Peau nâobĂ©issoit pas , il est certain que plus la rame seroit courte depuis la cheville jusquâĂ la mer , plus les rameurs auroient de force pour remuer le vaisseau, et en ce cas il vau- droit mieux pour remuer le vaisseau avec plus de puissance, que la plus grande partie de la rame fĂ»t depuis les chevilles jusquâĂ la main des rameurs. » Galiani croit que comme traducteur et interprĂšte de Vitruve, il a contractĂ© lâobligation de prendre sa dĂ©fense contre ces critiques qui nâont pas bien saisi le sens de notre auteur, et qui veulent le reprendre en appliquant mal Ă propos lâautoritĂ© dâAristote. Câest un axiome de physique, dit Galiani, que la rĂ©action est Ă©gale Ă lâaction tellement que quand deux puissances agissent en sens contraire aux deux extrĂ©mitĂ©s dâun levier, elles peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es indiffĂ©remment, lâune ou lâautre comme la force motrice et lâune ou lâautre comme le corps rĂ©sistant. Or donc Vitruve dit que quand la plus petite partie de la rame est depuis la main du rameur jusquâĂ la cheville, et la plus grande depuis la cheville jusquâĂ la mer, le mouvement du vaisseau est plus prompt. Ses critiques prĂ©tendent au contraire quâon le feroit agir plu» aisĂ©ment, si la partie de la rame Ă©toit plus longue depuis la main du rameur jusqu J Ă la cheville , que celle qui est depuis la cheville jusquâĂ la mer. Dans ce sens ils ont raison de dire quâon a plus aisĂ© de le faire agir, câest-Ă -dire que les rameurs n J ont pas besoin dây employer autant de force, mais ce nâest pas ce que Vitruve a entendu. Il a dit que le vaisseau iroit plus vite, vehe- menti impulsa. En supposant donc , comme lâa fait Vitruve, que la quantitĂ© des rameurs soit suffisante pour vaincre la force opposĂ©e, câest-Ă -dire le poids du navire et la rĂ©sistance de lâeau, tout homme de bon sens sentira , sans ĂȘtre mĂȘme mĂ©canicien , que plus la rame sera t longue , depuis la cheville jusquâĂ la mer, plus chaque coup de rame fera faire un long, trajet au navire. / N LIVRE X, Chap, ix. 45o CHAPITRE IX. Des machines pour tirer leau . .Nous parlerons prĂ©sentement des machines inventĂ©es pour tirer de lâeau il y en a de diffĂ©rentes espĂšces. Je commence par le tympan . cette machine nâĂ©lĂšve pas lâeau trĂšs-haut , mais elle en tire beaucoup en peu de temps. On fait un essieu quâon arrondit au tour ou au compas, et on couvre de fer ses deux extrĂ©mitĂ©s. Il traverse un tympan fait avec des planches jointes ensemble. On pose le tout sur deux pieux , dont les bouts sont garnis de lames de fer pour soutenir les extrĂ©mitĂ©s de lâessieu. Dans la cavitĂ© du tympan on met huit planches en travers, depuis la circonfĂ©rence jusquâĂ lâessieu, lesquelles divisent le tympan en autant dâespaces Ă©gaux on ferme le devant avec dâautres planches, auxquelles on fait des ouvertures de demi-pieds 'pour y laisser entrer lâeau. On creuse outre cela le. long de lâessieu autant de canaux quâil y a dâespaces , et on les fait aboutir Ă lâun des cĂŽtĂ©s de lâessieu. AprĂšs avoir enduit le tout de poix comme le sont les navires , des hommes font tourner avec les pieds la machine qui puise lâeau par les ouvertures qui sont Ă lâextrĂ©mitĂ© du tympan, et la rend par les conduits qui sont le long de lâessieu. Une auge de bois reçoit lâeau qui coule en abondance par un tuyau quâon y a adaptĂ©, et on la conduit dans les jardins quâon veut arroser ou dont les terres salines ont besoin dâĂȘtre tempĂ©rĂ©es. Si lâon devoit Ă©lever lâeau Ă une plus grande hauteur , on peut le faire avec la mĂȘme machine , en y faisant les changemens que voici on fait autour de lâessieu une roue assez grande pour atteindre la hauteur oĂč on veut Ă©lever lâeau , et autour de la circonfĂ©rence de la roue on attache des caisses de bois enduites de poix et de cire. Des hommes feront tourner cette roue en marchant dedans ; par ce moyen les caisses remplies dâeau sâĂ©lĂšveront jusquâau rĂ©servoir placĂ© en haut oĂč elles la verseront dâelles-mĂȘmes , ayant alors leur ouverture retournĂ©e par en bas. Doit-on faire monter lâeau Ă une hauteur beaucoup plus Ă©levĂ©e encore ? il faut alors mettre sur lâessieu d une roue une double chaĂźne de fer qui descende jusque 5 7 * 451 LâARCHITECTURE DE VITIl CJ V E. dans 1 eau , et attacher tout le long de cette chaĂźne des vases de forme conique faits en cuivre. Cette roue en tournant fera avancer sur elle la chaĂźne et monter les vases de cuivre , qui, en passant sur lâessieu , devront se renverser et verser dans un rĂ©- servoir lâeau quâils ont Ă©levĂ©e. REMAROUE S. Pour expliquer ces expressions , hominibus caĂźcantibus versatur dont fauteur se sert pour dire que des hommes font tourner cette roue en marchant dedans , il faut supposer quâil y a une autre roue jointe au tympan dans laquelle ces hommes puissent marcher. Nous avons observĂ© , dans nos remarques sur le IV me Chap. de ce livre, que dans un mur du marchĂ© de lar ville de Capoue, on a encastrĂ© un bas - relief antique , oĂč. lâon voit reprĂ©sentĂ©e une de ces roues ou tympan que des hommes font tourner en marchant dedans. CHAPITRE X. i I'une autre espĂšce de Tympan et des Moulins Ă leau. Les roues dont nous venons de parler , servent aussi pour Ă©lever l eau des riviĂšres. On attache autour de la circonfĂ©rence de la roue des ailerons , qui poussĂ©s par le cours de 1 eau , la font tourner tellement que , sans le secours dâaucun homme , les caisses puisent lâeau et la portent en haut. Les moulins Ă lâeau i tournent de la mĂȘme maniĂšre et sont faits de mĂȘme , exceptĂ© quâune des extrĂ©mitĂ©s de lâessieu passe au travers dâune roue Ă dents , posĂ©e Ă plomb et en couteau qui tourne avec la grande roue. Joignant cette roue en couteau ; il y en a une autre plus petite n , dentelĂ©e aussi et placĂ©e horizontalement Ă lâextrĂ©mitĂ© supĂ©rieure de son essieu se trouve un fer en forme de hache , qui 1 affermit x Turnebe et Saumaise ont corrigĂ© ici le texte latin. Ils lisent hydrumylĆ qui signifie des meules que lâeau fait aller , au lieu de hydraulĆ qui signifie des machines qui conduisent l'eau avec des tuyaux. Perrault et Galiani ont adoptĂ© cette correction qui est plus conforme Ă la suite du texte. Jâai suivi leur exemple. a DâaprĂšs les principes de la mĂ©canique .cette seconde roue , placĂ©e horizontalement, doit ĂȘtre plus petite que celle qui la fait mouvoir , autrement la meule tourneroit plus lentement que la roue qui va dans lâeau, ce qui ne doit pas ĂȘtre. Câest pourquoi Perrault a cru quâil faiioit lire minus iiem dentatum piauum est collocatum , au lieu de Majus , etc. LIVRE X, Ch a p. xi. 452i dans la meule. Les dents de cette roue traversĂ©e par lâessieu de la grande poussent les dents de lâautre roue qui est placĂ©e horizontalement, et fait tourner la meule sur laquelle pend la trĂ©mie , qui fournit le grain aux meules pour le broyer en tournant et en faire la farine. C H A P I T R E X I. Ie la Vis. Nous avons une espĂšce de vis 1 qui puise beaucoup d'eau, mais ne lâĂ©lĂšve pas aussi haut que la roue , voici comme on la fait. On prend une piĂšce de bois qui doit avoir autant de doigts dâĂ©paisseur que sa longueur a de pieds. 2 AprĂšs lâavoir bien arrondie , on divise les cercles qui terminent les deux extrĂ©mitĂ©s , en quatre parties Ă©gales ou en huit ; par ces divisions on trace autant de lignes , et on doit les tracer de maniĂšre quâen dressant perpendiculairement la piĂšce de bois sur un fond uni , les extrĂ©mitĂ©s des lignes qui sont sur les deux bouts rĂ©pondent Ă plomb lâune Ă lâautre. De ces extrĂ©mitĂ©s on tire tout le long de la piĂšce de bois des lignes perpendiculaires, distantes lâune de lâautre de la huitiĂšme partie de la circonfĂ©rence de la piĂšce de bois. On marque ensuite tout le long dâune de ces lignes des espaces Ă©gaux Ă ceux qui sĂ©parent les lignes lâune de lâautre , et de chacun de ces espaces on dĂ©crit autour du bois d autres lignes qui traversent toutes les lignes perpendiculaires et on marque des points oĂč les lignes sâentrecroisent. Cela fait avec exactitude , on prend une petite tringle de bois de saule ou dâozier, on la frotte de poix liquide , et on lâapplique sur le premier point ; ensuite on la conduit obliquement sur les intersections que forment les lignes droites avec celles qui entourent la piĂšce de bois. On traverse ainsi en tournant huit distances et on 1 Ce que lâauteur nomme ici eochlea , sâappelle vulgairement la vis dâArchimĂšde ou pompe spirale, il paroit quâon ne lâavoit pas encore attribuĂ©e Ă ArchimĂšde du temps de Yitruve , quoique Diodore de Sicile , qui Ă©crivoit presquâen mĂȘme-temps que \itruvd, fasse ArchimĂšde lâinventeur de cette machine. La grande utilitĂ© que cet auteur prĂ©tend quâon en a tirĂ©e pour rendre lâEgypte habitable en Ă©puisant lâeau dont elle Ă©toit autrefois inondĂ©e , feroit cependant croire quâelle est beaucoup plus ancienne quâArchimĂšde. 2 La longueur de cette piĂšce de bois devoit contenir seize fois son Ă©paisseur , parce que le pied des anciens contenoit seize doĂŻgts. 4^3 L â A R ⏠Il 1 T E C T CJ RE DE V I T R ĂŒ V E, passe sur huit points , marques sur les lignes droites , jusquâĂ ce quâon parvienne Ă la mĂȘme ligne par laquelle on avoit commencĂ© de maniĂšre que nsâavançant obliquement sur huit poinls de la circonfĂ©rence, on sâavance aussi de huit points sur la longueur. On attache de mĂȘme d'autres tringles obliquement , sur toutes les intersections pie font, jusquâau bout, les lignes droites et les circonfĂ©rences , et suivant la division quâon a faite en huit parties, on forme des canaux entortillĂ©s, semblables Ă ceux quâon voit dans les coquilles des limaçons. Sur ces premiĂšres tringles, on en applique dâautres Ă©galement enduites de poix liquide, on en met autant quâil en faut, pour que tout le diamĂštre de la vis Ă©gale la huitiĂšme partie de sa longueur. Autour des circonvolutions des tringles , on cloue des planches enduites encore de poix liquide T et on les lie avec des cercles de fer , afin que lâeau ne puisse les sĂ©parer. On affermit les deux extrĂ©mitĂ©s de la piĂšce de bois, en douant autour deux cercles de fer, et lâon y enfonce les boulons. Ensuite Ă droite et Ă gauche des deux bouts de la machine , on plante des pieux qu on lie ensemble , avec dâautres piĂšces de bois mises en travers , oĂč il y a des viroles de fer enchĂąssĂ©es , dans lesquelles on fait entrer les boulons ; alors des hommes font tourner la vis avec les pieds. Quand on Ă©lĂšve un des bouts de la vis pour lâincliner , on suit les proportions du triangle de Pylhagore que nous avons dĂ©crit câest-Ă -dire quâon divise la longueur de la vis en cinq parties , dont on donne trois Ă lâĂ©lĂ©vation de ce bout ; de sorte quâil y en aura quatre depuis la ligne perpendiculaire de cette Ă©lĂ©vation jusquâĂ lâouverture d en bas. La figure qui est Ă la lin de ce livre montre comme on doit faire tout cela. Je viens de parler, le plus clairement que jâai pu de toutes les machines en bois quâon emploie pour Ă©lever les eaux ; j'ai dit la- maniĂšre dont on doit les construire et les faire agir , et dĂ©montrĂ© enfin les avantages pour ainsi dire infinis quâon en tire. REMARQUES. Tout le monde connolt la vis dâArchimĂšde que lâauteur vient de dĂ©crire elle est composĂ©e dâun canal qui tourne en forme de spirale autour dâun cylindre. On plonge dans lâeau un des orifices du canal, on Ă©lĂšve lâautre au-dessus de son niveau , et en faisant tourner la machine, lâeau monte dedans et se dĂ©charge par ce dernier orifice. Mais il faut nĂ©cessairement pour cela que ce cylindre soit inclinĂ© Ă lâhorizon , sous un angle qui ait moins de 45 degrĂ©s. Tel est celui que forme lâhypotĂ©nuse avec la base dans le triangle rectangle de Pylhagore, dĂ©- LIVRE X, C h a p. xit. 454 ciii clans le a c Chap. du 1X U Liv. , puisque sa base esi plus grande que la perpendiculaire , corame dans tous les triangles rectangles dont la base et l'hypotĂ©nuse forment un angle moindre de 45 degres , la perpendiculaire de ce triangle nâayant cpie 5 parties et sa base 4- Si le cylindre inclinĂ© forinoit avec lâhorizon un angle de 45 degrĂ©s, tons les angles que forment les canaux de la vis , avec le cylindre, seroient Ă©gaux Ă celui-ci, et tous les canaux seroient alors horizontaux et parallĂšles Ă la superficie de lâeau quâils ne pourroient par consĂ©quent puiser. Il faut donc que le cylindre forme avec lâhorizon un angle moindre de 45 degrĂ©s, lâeau entrant alors dans la machine , quand on la fait tourner , dâautant plus abondamment que cet angle aura moins de 45 degrĂ©s. O CHAPITRE XII. De la machine de CtĂ©sibius. Parlons maintenant de la machine de CtĂ©sibius qui Ă©lĂšve lâeau Ă une grande hauteur. Cette machine se fait en cuivre ; on place en bas , assez prĂšs lâun de lâautre , deux barillets d une Ă©gale capacitĂ©. De ces barillets sortent des tuyaux qui forment une fourche en se joignant pour entrer dans un petit bassin , placĂ© au milieu, dans lequel sont des soupapes qui sâappliquent lĂ©gĂšrement sur lâouverture supĂ©rieure des tuyaux , et qui, en fermant cet orifice , empĂȘchent de retomber tout ce quâon a poussĂ© avec force dans le bassin par le moyen de l'air. Sur le bassin se trouve un couvercle , qui a la forme dâun entonnoir renversĂ© , il faut quâil joigne exactement et quâon lâattache avec des chevilles qui passent dans des pitons crainte que la force de lâeau ne lâenlĂšve lorsquâon la pousse. Au-dessus du couvercle , on soude un autre tuyau quâon nomme la trompe , et quâon Ă©lĂšve Ă la hauteur quâon veut. Au-dessous de lâentrĂ©e des tuyaux placĂ©s au bas des barillets, il y a des soupapes qui ferment les trous qui sont au fond de ces barillets. On fait entrer par le haut des pistons polis au tour et frottĂ©s dâhuile; ceux-ci enfermĂ©s dans les barillets, Ă©tant mis en mouvement Ă lâaide dâune barre Ă laquelle ils sont attachĂ©s , et dâune manivelle qui les Ă©lĂšve et baisse alternativement, pressent continuellement lâair qui sây trouve avec lâeau ; les soupapes fermant les ouvertures par lesquelles l eau entre dans les barillets , la compression la force dâentrer dans le petit bassin par les tuyaux qui v 455 L â A R C H I T E C T U R E DE V I T R U Y E. aboutissent ; lorsquâelle sây trouve , la rencontre du couvercle lâoblige de sâĂ©lever dans la trompe. Par ce moyen on peut faire monter lâeau dâun endroit profond dam un rĂ©servoir Ă©levĂ© et former une fontaine jaillissante. Cette machine nâest pas la seule que CtĂ©sibius ait inventĂ©e ; 11 y en a beaucoup dâautres, de diffĂ©rentes espĂšces, qui montrent qu en comprimant les liquides au moyen de lâair, on produit des effets semblables Ă ceux de la nature telles sont ces machines qui imitent le citant des oiseaux ; ces vases de verre i remplis dâeau dans lesquels on voit courir de petites figures; et plusieurs autres de te genre dont les unes rĂ©jouissent la vue et les autres rendent des sons trĂšs agrĂ©ables ;\ entendre. Jâai choisi celles dont lâusage mâa paru ĂȘtre le plus utile et nĂ©cessaire; jâen ai parlĂ© dans le livre prĂ©cĂ©dent, quand jâai enseignĂ© comme on devoit construire les horloges ; dans celui-ci je me suis occupĂ© de celles qui font monter lâeau. Quant aux autres machines qui sont de pur agrĂ©ment et dont on ne tire aucune utilitĂ© , les curieux pourront en voir la description dans les ouvrages mĂȘmes de CtĂ©sibius. CHAPITRE XXII. Des Orgues hydrauliques. ci e ne puis cependant mâempĂȘcher dâexpliquer en peu de mots , et le mieux quâil me sera possible , par quel art on fait des orgues qui jouent au moyen de lâeau. On place un coffre de cuivre , sur une hase faite en bois. A droite et Ă gauche de cette base on Ă©lĂšve de chaque cĂŽtĂ© deux rĂšgles , quâon joint ensemble en forme dâĂ©chelle ; entre ces rĂšgles on enferme des barillets , dont les fonds sont itio- i Lâauteur emploie ici le mot engilata. Baldus voudroit quâon lĂ»t angibuta , mot quâil fait dĂ©river du grec opyyiiov , qui signifie un vase. Le traitĂ© des machines pneumatiques de HĂ©ron lui a donnĂ© lâidĂ©e de faire cette correction. HĂ©ron fait la description dâune machine formĂ©e dâun vase transparent, dans lequel de petites figures se remuent. Ce vase ressemble Ă ceux que font nos Ă©maiiieurs, oĂč de petites figures dâĂ©mail sont enfermĂ©es avec de lâeau, et soutenues dans ce liquide par de petites bouteilles de verre qui, Ă©tant fermĂ©es hermĂ©tiquement, les y soutiennent au moyen de lâair qui est dedans. Baibaro interprĂšte ce mot autrement il le lait dĂ©river du grec syyit'J qui signifie ce qui est prĂšs , comme si ces figures etoient _ si petites quâil fallĂ»t les regarder de prĂšs. A l'exempte de Perrault et de Galiani jâai adoptĂ© la correction de Baldus. biles XIII. 45 fr LIVRE X, Chap. biles i et parfaitement arrondis au tour. On les attache Ă des barres de fer qui tiennent par des charniĂšres Ă des leviers , enveloppĂ©s de peaux qui ont encore leur laine 2. Dans la plaque qui couvre le haut des barillets , il y a des trous qui ont environ trois doigts de large ; prĂšs de ces trous et des charniĂšres , des dauphins de bronze soutiennent a\ec des chaĂźnes pendues a leur gueule, des cymbales qui bouchent par - dessous les trous des barillets. 3 Dans le coffre de cuivre qui contient lâeau , il se trouve une espĂšce dâentonnoir 4 renversĂ© , sous lequel sont des billots de 1 Ă©paisseur de trois doigts environ, qui soutiennent son bord dâen bas Ă une Ă©gale distance du fond du coffre. Le haut qui sâĂ©lĂšve en sâĂ©trĂ©cissant forme une espĂšce de cou , et se joint Ă un petit coffre qui soutient la partie supĂ©rieure de lâinstrument ; les Grecs appellent cette partie canon musicos 5 ; par - dessus , et dans toute sa longueur , on creuse des canaux au nombre de quatre , quand lâinstrument est tĂ©tracorde 6 ; au nombre de six quand il est exacorde 7 ; et au nombre de huit quand il est octocorde 8. Chacun de 1 Par fonds mobiles , il entend les pistons , qui occupent effectivement le fond des barillets lorsquâils sont baissĂ©s. 00 Il est assez difficile de deviner Ă quoi servoit cette peau couverte de laine, il paroĂźt cependant que e'Ă©toit pour empĂȘcher le bruit que font les charniĂšres. 3 Avant Galiani on lisoit dans toutes les Ă©ditions, pendentia habentes catenis cymbala ex ore , infra foramiâ na modiolorum chalata intrĂ arcam quo loci aqua susâ tinetur. Inest in id genus etc. De cette maniĂšre le sens de ce passage seroit trĂšs obscur. Perrault a changĂ© et ajoutĂ© quelques mots au texte , et cependant ne lâa pas rendu beaucoup plus clair. Galiani , que nous avons suivi , nây a fait dâautre changement que de placer un point aprĂšs le mot chalata , et dâattribuer Ă la suite du discours les mots suivants intrĂ arcam quo loci aqua sustinetur; par ce moyen il a trouvĂ© le vrai sens de ce passage. Ces dauphins Ă©toient placĂ©s horizontalement soutenus par une cheville, ils jouoient comme le flĂ©au dâune balance, ils avoient dans leur gueule des petites chaĂźnes au bout desquelles Ă©toient attachĂ©es les soupapes des barillets, faites en forme de cĂŽne, que Vitruve nomme des cymbales , pai'ce que ces instruments de musique chez les anciens avoient une forme conique. La partie la plus pesante du corps de ces dauphins qui Ă©toit de lâautre cĂŽtĂ© de la cheville, opposĂ© Ă celui oĂč Ă©toit la tĂȘte , servoit de contrepoids Ă ces soupapes, et les faiâ soit remonter dĂšs que lâimpulsion de lâair qui les avoit poussĂ©es en bas en entrant dans les barillets, venoit Ă cesser. 4 Dans le texte on lisoit phigĆos. TurnĂšbe a trĂšs-adroitement corrigĂ© ce passage , en substituant Ă ce mot celui de pnigeos quâil fait dĂ©river du grec -xviyziv qui signifie suffoquer , Ă©touffer, dont on a formĂ© le mot latin pnigeos, pour signifier un Ă©teignoir qui Ă©touffe la lumiĂšre et qui ressemble Ă un entonnoir renversĂ©. 5 Câest-Ă -dire rĂšgle musicale. 6 A quatre jeux. 7 A six jeux, 8 A huit jeux. Il nâest pas vraisemblable que les or-* guĂ©s des anciens ne contenoient seulement que quatre tons, ou six et au plus huit. Elles dĂ©voient naturellement contenir leurs 18 tons. On ne doit donc pas entendre ici par tĂ©tracorde , exacorde etc. un nombre de tuyaux qui rĂ©pond Ă pareil nombre de marches ou touches; mais le nombre rangĂ©es de tuyaux dont chacune rĂ©pond Ă toutes les touches. Câest ce que nous appelons les diffĂ©- rens jeux. Il le prouve en disant que les canaux qui sont au nombre de quatre , de six ou de huit , et qui font appeler lâorgue tĂ©tracorde , exacorde ou octocorde, sont placĂ©s en long in longitudine, tandis que les marches ou touche» sont certainement placĂ©es, comme il le dit aussi, entravers, ordinqta in transverso foramina. Il ajoute ensuite que le vent entre dans ces canaux par des robinets qui apparemment font lâoffice de ce quâon nomme registre dans nos orgues. 58 457 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. ces canaux a un robinet i dont la clef est en fer ; par ce moyen lorsqu'on la tourne , on ouvre chaque conduit par oĂč lâair qui est dans le coffre passe dans les canaux ; le long de ces conduits , il y a une rangĂ©e de trous, qui rĂ©pondent Ă dâautres qui sont dans la table qui est au-dessus , et quâon appelle en grec pinax 2. Entre cette table et le canon , on met des rĂšgles exactement percĂ©es lâune comme lâautre et huilĂ©es , afin quâon puisse aisĂ©ment les pousser , les tirer en avant et les renvoyer en arriĂšre pour tĂ©rmer et pour ouvrir les trous qui sont le long des canaux ; on nomme ces rĂšgles pleuritides 3. Ainsi en les faisant aller et revenir elles bouchent une partie des trous et ouvrent les autres 4. } On attache Ă ces rĂšgles des ressorts de fer 5 quâon joint Ă©galement avec les touches, ce qui fait quâen touchant celles-ci, elles font aussi mouvoir les rĂšgles dans la table sont les trous par lesquels le vent pĂ©nĂštre dans les tuyaux et dans les rĂšgles sont des ouvertures rondes 6 qui correspondent avec les embouchures de tous les tuyaux. Il sort des barillets, des conduits dont les ouvertures se rendent au cou de bois qui va dans le petit coffre lĂ se trouvent des soupapes faites au tour , qui ferment ces ouvertures dĂšs que le vent est entrĂ© dans le petit coffre et lâempĂȘchent dâen sortir. De sorte quâen levant le bout des lĂ©viers , les barres de fer font descendre les pistons jusquâau bas des barillets ; cela fait que les dauphins qui agissent comme des charniĂšres , laissent descendre les cymbales pendues Ă leur gueule , et par-lĂ donnent entrĂ©e Ă lâair dans la cavitĂ© clĂ©s barillets. Ensuite lorsque les barres de fer , par leurs mouvemens rĂ©itĂ©rĂ©s, font remonter les pistons, les cymbales, par lâaction 1 Le mot Ă«pĂźslomium quâon trouve dans le texte, signifie proprement la clef dâun robinet. Il sâen trouvoit de semblable Ă lâextrĂ©mitĂ© de ces canaux. Quand le trou de cette clef Ă©toit directement vis-Ă -vis du canal ; lâair y entroit, et quand on le toumoit sur le cĂŽtĂ©, lâair ne pou- voit y pĂ©nĂ©trer. Ces clefs ou robinets faisoient dans les orgues anciennes lâeffet des registres dans les nĂŽtres. 2 Câest-Ă -dire une table. 3 Câest-Ă -dire des cĂŽtes. 4 Chacune de ces rĂ©gies , comme on le voit un peu plus bas , servoit Ă ouvrir ou fermer les trous qui corres- pondoient seulement Ă un ton. Elles produisoient , mais par un moyen diffĂ©rent, le mĂȘme effet que les soupapes qui font aller les touches dans nos orgues modernes. 5 Lâauteur employĂ© le mot chomgia , qui, dâaprĂšs son Ă©tymologie * ne peut signifier autre chose que des ressorts, puisquâil est dĂ©rivĂ© du mot sauter, danser. On appelle encore sauterelles les piĂšces de bois , auxquelles sont attachĂ©s les morceaux de plumes qui font rĂ©sonner les cordes de nos clavecins. Ces ressorts repoussoientles touches de chaque ton , quand on avoit cessĂ© de les pousser en avant. TurnĂšbe et Baldus voudraient quâon lĂ»t cnodada qui signifie des boulons de fer mais comme lâobserve trĂšs-bien Perrault, des boulons de fer ne sont point propres pour repousser ces rĂšgles , qui ont besoin dâun ressort qui les fasse revenir en avant quand elles ont Ă©tĂ© poussĂ©es. 6 Le latin dit reguiĂŻs sunt annuli; jâai entendu par-lĂ des trous arrondis comme des anneaux. LIVRE X, Chu, ĂIIL 458 des dauphins , bouchent les trous qui sont au-dessus dâelles, et lâair enfermĂ© dans les barillets , pressĂ© par les pistons , est forcĂ© de passer dans les conduits, et de lĂ par le cou de bois dans le petit coffre. Lâair ainsi pressĂ© par de frĂ©quentes impulsions , entre par les ouvertures des robinets , et emplit les canau>. Alors en appuyant sur les touches , on pousse les rĂ©glĂ©s qui reviennent ensuite, et les trous Ă©tant tantĂŽt ouverts, tantĂŽt fermĂ©s , suivant les rĂšgles de la musique , la multitude et la variĂ©tĂ© des sons produisent des chants pleins de mĂ©lodie. Jâai fait mon possible pour expliquer clairement une chose qui est dâelle-mĂȘme assez obscure et oifficile a dĂ©montrer par Ă©crit. Hormis ceux qui commissent cet instrument pour lâavoir pratiquĂ© , tout le monde aura de la peine Ă concevoir par quel art on peut le construire ; mais je suis persuade que ceux qui n auront pu le comprendre d aprĂšs ce que j en ai Ă©crit, seront obligĂ©s de convenir que tout cet arrangement est trĂšs - curieux et rempli dâindustrie , lorsquâils verront lâouvrage exĂ©cutĂ©. REMARQUES. On ne sauroit faire connaĂźtre dâaprĂšs le texte de Yitruve, quelle Ă©toit la vraie forme des orgue* anciennes. Quand mĂȘme on employeroit des figures, comme il lâobserve Ă la fin de ce chapitre , il nây a que ceux qui connoissent cet instrument pour lâavoir pratiquĂ© , qui pourront comprendre aisĂ©ment ce quâil en a Ă©crit. Il nâexiste plus dâorgues anciennes, et on nâen trouve aucune, que je sache , reprĂ©sentĂ©e dans des monumens antiques, qui pourroil nous faciliter cette intelligence. Le seul moyen donc que nous avons de faire comprendre ce quâil dit des orgues anciennes , câest, dâaprĂšs la ressemblance que nous voyons qu'elles ont en beaucoup de choses avec les nĂŽtres , de les comparer ensemble. Câest ce que nous allons faire, Pour introduire Pair dans nos orgues modernes, on se sert de soufflets; un canal le conduit dans une caisse hermĂ©tiquement fermĂ©e, quâon nomme vulgairement la caisse du vent. Au lieu de soufflets , les anciens employoient des barillets, avec des soupapes qui produisoient le mĂȘme effet en introduisant lâair dans une caisse nommĂ©e area dans le texte. Cette caisse Ă©toit couverte, comme elle lâest encore Ă prĂ©sent, par une table nommĂ©e caput machinĆ , et en grec ko,vĂč>v. JNos artistes modernes lâappellent le banc. Dans nos orgues , le cĂŽtĂ© de cette table, qui est vers la caisse , est traversĂ© dans sa largeur par autant de rainures ou demi-canaux que nous avons de tons dans notre musique dans les orgues anciennes , au contraire, câĂ©loit des tubes entiers et non des demi-canaux qui Ă©toient placĂ©s dans toute la longueur de la table ; il nây en avoit pas autant quâil y avoit de tons dans leur musique, mais autant quâil y avoit de diffĂ©rents jeux ou registres. Cette table Ă©toit percĂ©e , comme elle Pest encore aujourdâhui, par un nombre de trous Ă©gal a celui des tuyaux qu on devoit mettre Ă lâorgue. Sur cette table on en placoit une autre , qui sâappeloit alors tabula summa 3 58 . LâARCHITECTURE DE VITRUVE. 4 % en grec irlvaĂ; , et aujourdâhui le sommier. Celle-ci Ă©toit, comme elle lâest encore dans nos orgues percĂ©e exactement comme lâautre ; câĂ©toit sur les trous de celte derniĂšre table tabula summa quâon dressoit des tuyaux. Nous faisons glisser aujourdâhui entre ces deux tables autant de rĂšgles que nous voulons avoir dâespĂšces de jeux ou registres. Cgs rĂšgles placĂ©es dans la longueur de ces deux tables sont aussi percĂ©es comme elles tellement que quand leurs trous sont prĂ©cisĂ©ment placĂ©s entre ceux des tables de maniĂšre quâils se rĂ©pondent directement , lâair de la caisse du vent entre dans les tuyaux j mais si on tire ces rĂšgles , la partie qui nâest pas percĂ©e se trouve entre les trous des deux tables et intercepte la communication du vent. Les anciens ne faisoient pas comme cela Ă lâentrĂ©e de chaque tube ou canal qui leur servoit de rĂ©gistres , ils avoient des robinets avec des clefs pour les ouvrir ou fermer , suivant quâils vouloient donner ou ĂŽter la communication Ă lâair. Enfin dans les orgues anciennes comme dans les nĂŽtres , il y avoit autant de louches ou marches quâil y a de tons ; les anciens nommoient ces touches pinnĆ elles produisoient lâune et lâautre le mĂȘme effet , mais elles agissoient diffĂ©remment. Celles de nos orgues , au moyen des ficelles qui passent sur des poulies et pĂ©nĂštrent dans la caisse du vent font lever , quand on appuie dessus , des soupapes qui laissent passer le soufle dans le tuyau quâon veut faire jouer. Les louches des orgues anciennes , quand on appuyoit dessus , faisoient avancer de petites rĂšgles placĂ©es entre les deux tables dont nous avons parlĂ© , câest-Ă -dire entre le canon musicos et la table supĂ©rieure , tabula summa y alors lâair pĂ©nĂ©lroit dans les tuyaux quâon vouloit faire jouer, par le trou de la rĂšgle qui rĂ©pondoit directement Ă ceux des deux tables ; ensuite un ressort, choragia , repoussoit la rĂšgle dont le plain interceploil la communication du vent. AthĂ©nĂ©e dit comme Vitruve , que CtĂ©sibius est lâinventeur de cet instrument ou du moins quâil lâa perfectionnĂ© , parce que la premiĂšre dĂ©couverte en est 4 due Ă Platon , qui inventa lâhorloge nocturne, câest-Ă -dire une clepsydre qui faisoit jouer des flĂ»tes, pour faire entendre les heures aux temps oĂč on ne peut les voir. Cette description que Vitruve fait des orgues de son temps , nous prouve que cet instrument est bien plus ancien quâon ne le croit. Les ambassadeurs de lâempereur Constantin Copronyme, lors de lâassemblĂ©e de CompiĂšgne , tenue en 767 , firent prĂ©sent au roi PĂ©pin dâun orgue , et c fut Ă ce quâil paroĂźt le premier quâon vit en France. Mais on voit , dâaprĂšs ce que dit "Vitruve, quâil Ă©toit connu bien auparavant en Italie. On ne peut douter, sur le tĂ©moignage des historiens , quâil ne fĂ»t aussi en usage chez les Orientaux long-temps avant les premiers quâon apporta e* France. LIVRE X, Ch ap. xi r. 46 CHAPITRE XIV. Comment on peut mesurer les milles dans un voyage . P A s s o N s prĂ©sentement Ă une autre matiĂšre , qui peut ĂȘtre de quelquâutilitĂ©. Il sâagit d une invention des plus ingĂ©nieuses que nous devons aux anciens. Par son moyen , on peut connoĂźtre le nombre de milles quâon a faits en voyageant, assis dans un char, ou naviguant sur la mer. Voici comment Les roues du char doivent avoir quatre pieds de diamĂštre , afin quâayant marquĂ© sur la roue lâendroit oĂč elle a commencĂ© Ă rouler sur la terre , on soit assurĂ© qu elle aura parcouru un espace dâenviron douze pieds et demi, quand en continuant de rouler , elle sera revenue Ă cette marque , par laquelle elle a commencĂ©. On attache fortement au moyeu de la roue un tympan i , qui doit avoir une petite dent qui excĂšde sa circonfĂ©rence. On place dans lâintĂ©rieur du char une hoĂ«te quâon'arrĂȘte bien ferme , dans laquelle il doit se trouver un autre tympan placĂ© verticalement qui tourne sur un axe. Sur la face de ce tympan , il doit y avoir quatre cents dents distribuĂ©es Ă une Ă©gale distance lâune de lâautre , et correspondant Ă la dent du premier tympan. Outre cela , le second tympan doit avoir sur le cĂŽtĂ© une autre dent qui excĂšde celles qui sont Ă sa circonfĂ©rence. Sur le tout on place horizontalement un troisiĂšme tympan enfermĂ© dans une boĂ«te, et divisĂ© en autant de dents que le second ; elles doivent se rapporter Ă la dent qui est Ă cĂŽtĂ© du second tympan. Dans ce troisiĂšme tympan on percera autant de trous Ă peu prĂšs que le char peut faire de milles par jour , et on mettra dans chaque trou un petit caillou rond qui devra tomber dĂšs quâil sera arrivĂ© directement sur un autre trou, fait Ă la boĂ«te, dans laquelle ce dernier tympan sera enfermĂ© comme dans un Ă©tui , et ce caillou coulera par un canal dans un vase dâairain placĂ© au fond du char ; tellement que quand la roue du char en avançant i Quoique le mot tympanum dont se sert ici Vitruve devroit ĂȘtre rendu en francois par le mot roue , jâai cru comme Perrault que pour Ă©viter lâĂ©quivoque quâil y auroit eu entre les roues du char et les roues dentelĂ©es de la machine , il falloit employer le mot tympan ; par ce moyen il y aura moins de confusion dans le discours. LâARCHITECTURE DE Y I T R U Y E. 461 emporte avec elle le premier tympan , la petite dent pousse Ă chaque tour une dent du second , Il arrive delĂ que quatre cents tours du premier tympan font faire un tour au second , et que la petite dent qui est attachĂ©e Ă cĂŽtĂ© ne fait avancer le troisiĂšme tympan que dâune dent ; ainsi le premier tympan en quatre cents tours nâen faisant faire qu'un au second , on parcourt lâespace de cinq mille pieds qui font mille pas , quand le second tympan a terminĂ© son tour. Le bruit que fait chaque caillou en tombant, avertit quâon a fait un mille, et le nombre des cailloux quâon trouve chaque jour au fond du vase, indique combien on a fait de milles. En changeant trĂšs-peu de chose , on emploie le mĂȘme moyen pour la navigation. Il faut faire traverser le navire dâun cĂŽtĂ© Ă lâautre par un essieu dont les deux bouts passeront au delĂ de ses bords. On y attache des roues qui auront quatre pieds de diamĂštre avec des ailerons tout autour qui doivent toucher Ă lâeau. Cet essieu vers le milieu du navire traverse un tympan qui nâa quâune seule dent qui excĂšde sa circonfĂ©rence. On place en cet endroit une boĂ«te , dans laquelle se trouve un second tympan , divisĂ© Ă©galement en quatre cents dents, proportionnĂ©es Ă la dent du premier tympan , que traverse lâessieu , oĂč se trouve aussi une autre dent qui excĂšde sa circonfĂ©rence. Ensuite on joint une autre boĂ«te qui enferme encore un tympan posĂ© horizontalement et dentelĂ© comme lâautre , de maniĂšre que la dent qui est a cĂŽtĂ© du tympan posĂ© verticalement fasse tourner le tympan posĂ© horizontalement , en poussant Ă chaque tour une de ses dents. Ce tympan posĂ© horizontalement est aussi percĂ© de trous dans lesquels On met des cailloux ronds. La boĂ«te ou Ă©tui qui 1 enferme, a une ouverture et un canal par lequel le caillou, lors quâil nâest plus arrĂȘtĂ© par l'Ă©tui qui le retenoit, tombe et fait retentir le vase dâairain. Quand le navire sera donc poussĂ© par le soutte des vents ou par les rames , la rencontre de lâeau fera tourner en sens contraire les ailerons attachĂ©s Ă la roue, qui fera tourner lâessieu et celui-ci le tympan dont la dent Ă chaque tour poussant une dent du second tympan lui fera accomplir sa circonvallation par un mou vendent trĂšs-modĂ©rĂ©. DâaprĂšs cela quand les ailerons auront fait faire quatre cents tours aux roues du vaisseau , le tympan placĂ© horizontalement nâen aura tait quâun par limpulsion quâil recevra de la dent qui est sur le cĂŽtĂ© du tympan vertical. Ă mesure que le tympan horizontal fera son tour , et quâil amĂšnera les cailloux sur le trou qui est Ă son Ă©tui, ils tomberont par le canal ; tellement qu'on connoĂźtra par le bruit quâils feront et par leur nombre la quantitĂ© de milles quâon aura faits sur l'eau. 4 t \ . K LIVRE X, Chap. xiv. * Il me_ semble quil ne me reste plus rien Ă dire sur les machines dont on tire quelqu utilitĂ©, et qui procurent de 1 agrĂ©ment , tandis quâexempt de crainte on jouit de la paix. RE 31 ARQUE S. Cette machine est tres-ingĂ©nieuse ; mais on ne pourroit lâexĂ©cuter de la maniĂšre que Vitruve la propose car une roue qui a 4 oo dents, doit avoir pour le moins deux pieds de diamĂštre, pour faire que chaque dent ait une ligne de largeur , qui est le moins quâelle puisse avoir. Or les dents dune roue de deux pieds de diamĂštre ne sauroient donner prise de la sixiĂšme partie dâune ligne, Ă une autre dent qui tourne de la maniĂšre que Yilruve lâentend. Le moyen quAI indique pour employer cette machine Ă connoĂźire lâĂ©tendue de la route quâon fait en naviguant, devoit donner des rĂ©sultats bien faux. CĂąr des roues qui vont par lâimpression de lâeau tournent plus vite Ă proportion quand la marche du navire est rapide que quand il va lentement, au point que le vaisseau pourroit aller si lentement que les roues ne tourneroient pas du tout pour peu que la machine apporte de rĂ©sistance , le mouvement du vaisseau , ne seroit pas capable de la surmonter , dâautant que lâeau obĂ©iroit et cĂ©deroit Ă cette rĂ©sistance. Il nâen est pas de mĂȘme sur terre oĂč les roues Ă©tant poussĂ©es par le poids du char font toutes leurs rĂ©volutions uniformes, soit que le char aille vite ou lentement. I A prĂ©sent pour mesurer le sillage dâun vaisseau , on se sert du loch. Câest une piĂšce de bois qui par sa pesanteur et sa" forme , reste immobile dans lâeau. Il est attachĂ© Ă une corde oĂč sont des nĆuds. Le nombre des nĆuds qui ont filĂ© avec la corde , fait connoĂźtre la longueur du chemin quâon a fait. On jette le loch toutes les heures ou toutes les deux heures, et plus souvent lorsque le vent varie. Quoique ce moyen indique les lieues quâon a faites plus exactement que celui des * anciens, il. laisse nĂ©anmoins beaucoup Ă dĂ©sirer j câest cependant le moins dĂ©fectueux que lâon con- noisse. Il se trouve au commencement de ce chapitre une faute dans les manuscrits oĂč on lit, que la roue du char doit avoir quatre pieds deux pouces de large , pedum quaternum et sextantis , afin quâen achevant son tour elle parcoure lâespace de 12 pieds, pedum XII. Les rĂ©sultats que ces deux quantitĂ©s dĂ©voient produire a fait voir Ă Perrault comme il falloir corriger ce passage. AprĂšs les mots pedum quaternum il a supprimĂ© ceux et sextantis , et a ajoutĂ© plus bas une S aprĂšs pedum XII, en lisant pedum XII S , ce qui signifie douze pieds et demi. Par-lĂ tous les calculs de lâauteur se rapportent , ce qui ne seroit pas , si on nâavoit pas fait cette correction. Il faut en effet que la roue du char ait accompli un tour , afin quâavec sa dent elle fasse avancer dâune dent, le tympan qui en a 400 j et quand ce tympan a achevĂ© le sien , comme on le lit ensuite dans le texte, on a lait un mille, ou 5 ooo pieds. Or il est certain que 4 o° tours dâune roue de 12 pieds ne parcourent que 48 oo pieds. Perrault a donc eu raison dâĂŽter et sextantis , et de lire seulement pedum quaternum j ensuite de lire douze pieds et demi , pour que les 4 oo tours fassent les 5 ooo pieds. On o 463 LâARCIIITECTORE sait outre cela que la circonfĂ©rence est au diamĂštre Ă peu prĂšs, comme 22 est Ă 7. Par consĂ©quent celle dâune roue qui a 4 pieds de diamĂštre doit ĂȘtre dâenviron 12 pieds et demi. Aussi dans lâĂ©dition âde Joconde on lit pedum XII S. C H A P I T R E XV. r »i 1 ; Des Catapultes et des Scorpions . J e vais traiter prĂ©sentement des proportions quâon doit observer pour Ăźa construction des machines de guerre dont on a besoin pour se dĂ©fendre ; tels sont les scorpions, les catapultes et les batistes. Je commencerai par les catapultes et les scorpions. La proportion de ces machines se rĂšgle sur la longueur du dard quâon doit jeter. On en prend la neuviĂšme partie pour dĂ©terminer la grandeur des trous qui sont aux chapiteaux et par lesquels on bande les cordes faites de boyau qui attachent les bras de la catapulte., Voici comme on rĂšgle la hauteur et la largeur des chapiteaux oĂč sont ces trous 1. LâĂ©paisseur des planches quâon appelle parallĂšles , qui composent le haut et le bas du chapiteau, doit ĂȘtre Ă©gale au diamĂštre dâun de ces trous ; leur largeur doit avoir un diamĂštre et un huitiĂšme , et Ă leurs extrĂ©mitĂ©s avoir un diamĂštre et demi. Les poteaux qui sont Ă droite et Ă gauche doivent, outre les tenons , avoir la hauteur de quatre diamĂštres et la largeur de cinq ; les tenons doivent ĂȘtre de trois quarts de diamĂštre , et depuis le trou jusquâau poteau du milieu il doit y avoir aussi trois quarts de diamĂštre. Le poteau du milieu aura un diamĂštre et un quart de large et un diamĂštre dâĂ©paisseur. L espace oĂč lâon place le javelot dans le poteau du milieu, doit avoir le quart d un diamĂštre. Il faut garnir les quatre angles tant ceux des cĂŽtĂ©s , que ceux de devant t de bandes de fer attachĂ©es avec des clous de cuivre ou de fer. Le petit canal, appelĂ© en grec syrinx 2 doit avoir dix-neuf diamĂštres de long. 1 On se rappelle dâavoir vu dans le 2 e . Ch. du I er cation de ce principe pour la baliste , et nous venons Liv, que le diamĂštre du trou du chapiteau de la ba- de voir quâil en Ă©toit de mĂȘme pour les catapultes, liste Ă©toit le module qui rĂ©gloit toutes ses proportions. 2 Câest-Ă -dire un canal. Dans le 17 e Ch. de ce X me Liv. nous verrons lâappli- Les .LIVRE X, C h a p. xy. 464 Les tringles nommĂ©es par quelques-uns huccula 1 , qui sont attachĂ©es aux deux cĂŽtĂ©s pour former le petit canal, doivent aussi avoir dix-neuf diamĂštres de long; on leur donne un diamĂštre d Ă©paisseur et autant de largeur, On ajoute en cet endroit deux rĂšgles dans lesquelles on passe un moulinet long de trois diamĂštres et gros de Ăźa moitiĂ© dâun diamĂštre. LâĂ©paisseur du huccula qui sây attache , appelĂ©e scamillum 2 par quelques - uns et loculamentum 3 par dâautres, est dâun diamĂštre. On joint ce huccula par des tenons Ă queue d hirondelle longs de la grandeur dâun diamĂštre et larges d on demi Le moulinet doit avoir huit diamĂštres et une huitiĂšme partie de long. Le gros rouleau 4 a neuf diamĂštres. L 'Ăšpitoxis 5 doit avoir trois quarts de diamĂštre de long et un quart dâĂ©pais. Le chelo fi quâon nomme aussi manucla 7 a trois diamĂštres de long , trois quarts de. diamĂštre de large et autant d Ă©paisseur. La longueur du canal dâen bas a seize diamĂštres. LâĂ©paisseur contient la neuviĂšme partie dâun diamĂštre, et la largeur un demi-diamĂštre et une huitiĂšme partie. La petite colonne avec sa base qui est prĂšs de terre , a huit diamĂštres , et vis-Ă - vis de la plinthe qui est sur cette petite colonne, elle a un diamĂštre et un huitiĂšme. Son Ă©paisseur est dâun douziĂšme et dâun huitiĂšme de diamĂštre. La longueur de la petite colonne jusquâau tenon Ă douze neuviĂšmes de diamĂštre, et Ăźa largeur un demi- diamĂštre , et une huitiĂšme partie. LâĂ©paisseur a le tiers de cette largeur ; les trois liens de la petite colonne ont neuf diamĂštres de long, un diamĂštre et une neuviĂšme partie de large et un huitiĂšme de diamĂštre dâĂ©paisseur. La longueur du tenon a la neuviĂšme partie dâun diamĂštre. La tĂȘte de la colonne a un diamĂštre trois quarts de long. La piĂšce de bois qui est plantĂ©e devant aura de largeur un diamĂštre et trois quarts , et lâĂ©paisseur d un diamĂštre. Cette colonne plus petite que les 1 â Les LĂšvres. 2 Dans tous les manuscrits il y a CamĂŻihim , qui signifie une boite. Baldus voudrait quâon lĂ»t catillum, tqui signifie un petit plat , et Perrault Scamillum , câest- Ă -dire un peiit banc. 3 Câest-Ă -dire un Ă©tui. 4 Dans le I er . Chap. du VII e . LĂźv. nous avons vu * que par le mot scutula dont lâauteur se sert encore ici, il entendoit des pavements dont la forme Ă©toit en losange ou ovale comme les boucliers des anciens. Dans le chapitre suivant , le 17 e . du livre que nous expliquons , on verra quâil appelle scutula le trou par oĂč passoient les cordes de boyaux qui dĂ©voient rendre un mĂȘme ton , parce quâils Ă©toient ovales. Comme on appelle aussi scutula les rouleaux quâon met sous les navires pour les faire avancer quand iis sont sur terre. Perrault, et Galiani, que nous avons suivis, ont n i interprĂ©tĂ© scutula par ce gros rouleau dont on va parler, 5 Qui est sur le dard. 6 tortue. 7 petite main. iKJ LâARCHITECTURE DE VITRĂVE. 4^5 autres, qui se trouvent par derriĂšre , quâon appelle en grec antihasis , 1 a huit diamĂštres de long , un diamĂštre et demi de large , et trois douziĂšmes de diamĂštre d'Ă©paisseur. Le chevalet a douze diamĂštres de large; son Ă©paisseur est Ă©gale Ă la grosseur de lapins petite colonne. Le chelonium 2 ou coussin qui est placĂ© sur la petite colonne, a deux diamĂštres et demi de long , autant de haut ; sa largeur est d un diamĂštre et trois quarts. Les mortaises 3 du moulinet ont deux diamĂštres et demi, leur profondeur est aussi de deux diamĂštres et demi et leur largeur dâun diamĂštre et demi. Les travers avec leurs tenons ont dix diamĂštres de long, un diamĂštre et demi de large leur grosseur est aussi de dix diamĂštres. Les bras ont sept diamĂštres de long. Leur Ă©paisseur vers le bas- est dâun douziĂšme de diamĂštre et une sixiĂšme partie , et vers le haut dâun tiers de diamĂštre et une sixiĂšme partie, Leur courbure doit avoir huit diamĂštres. 11 faut faire toutes ces parties avec les proportions que je viens d indiquer, quelque soit la grandeur de lâensemble cependant lorsque la hauteur du chapiteau surpasse la largeur de la machine, ce qui fait quâon l'appelle dans ce cas anatonum , 4 il faut raccourcir tes bras , parce quâils sont moins tendus quand le chapiteau est aussi Ă©levĂ© ; câest pourquoi on diminue alors leur longueur afin quâils frappent beaucoup plus fort. Quand au contraire la hauteur du chapiteau est moindre que la largeur de la machine , ce qui le fait appeler calatonum 3 , et quâon doit tendre les bras davantage , il faut les alonger afin de pouvoir aisĂ©ment les courber jusquâau point nĂ©cessaire. Ainsi avec un levier qui nâa que quatre pieds de long , il faut rĂ©unir les forces de quaire hommes , pour remuer un fardeau , tandis que deux hommes Ă©leveront aisĂ©ment ce fardeau avec un levier qui en a huit. Il en est de mĂȘme des bras de la catapulte ; on les bande aisĂ©ment quand ils sont longs ; mais plus ils sont courts , plus il faut y employer de force. * REMARQUES. Plusieurs interprĂštes, Ă ce que remarque Juste-Lipse , ont cherchĂ© Ă dĂ©couvrir, dâaprĂšs le texte de Yitruve , quelle Ă©loit la forme de la catapulte. Les descriptions qidont donnĂ©es de cette machine, JUh Ă©nĂ©e le mathĂ©maticien, Ammien Marcellin, A Ă©gece, Joconde et Robert Yallurius; les deux' 1 Câest-Ă -dire l'arc-boutant. 2 La tortue. 3 Dans presque tous les exemplaires, on lit earcheli , mot dont on ignore la signification. Barbaro met tracheli qui signifie le cou, et il entend par lĂ les bouts des moulinets qui tournent dans les amarres. LaĂ«t, avec plus de vraisemblance , croit quâoĂŻl doit lire carclesia qui signifie des gobelets , et il entend par ce mol les mortaises oĂč lâon passe les leviers. 4 Câest-Ă -dire qui lande vers le haut. 5 Câest-Ă -dire qui lande vers le bas. figures qui sont dans Je livre anonyme, intitulĂ© Notitia imperii , celle que G. du CLoul dit avoir tirĂ©e dâun ancien marbre, la catapulte qui se voit dans lâarsenal de Constantinople, celle qui se voyoil dans celui de Bruxelles , ni celles qui sont reprĂ©sentĂ©es sur la colonne Trajane , nâont aucun rapport avec, celle dont Yilruve nous donne les proportions. Cet auteur auroit obligĂ© davantage la postĂ©ritĂ© , si , au lieu de ces proportions , il eĂ»t expliquĂ© cl dĂ©crit quelle Ă©toil la fmure et quels Ă©toient les usages des parties dont il donne si exactement les dimensions. Mais il est trĂšs-difficile , dâaprĂšs ce quâil dit , de comprendre quelle Ă©toit la structure de cette machine. On sait en gĂ©nĂ©ral que les catapultes Ă©toient faites pour jeter des javelots , de meme que les balisles servoient Ă jeter des pierres , quoique les derniers auteurs latins nâaient jamais fait ceUe distinction. Ils ont toujours employĂ© le 'mot baliste pour exprimer lâune et lâautre machine. Les catapultes lançoient leurs javelots avec une si grande force, quâau rapport de Lucain ils percoient plusieurs hommes les uns aprĂšs les autres. Suivant lâauteur du livre intitulĂ© Notitia imperii elles portoient dâun bord du Danube Ă lâautre ; il y en avoit enfin qui pĂ»ussoienl des javelots de la grosseur de nos chevrons. AthĂ©nĂ©e en dĂ©crit qni avoient douze coudĂ©es; il ajoute, et on aura peine Ă le croire , quâĂgĂ©sislrate avoit fait une catapulte qui nâavoil que trois palmes de long , et porioit cependant au delĂ de trois stades, câest-Ă -dire environ 5oo toises. La description de Vilruve fait entendre que la catapulte avoit deux bras ou arbres, câest-Ă -dire, des piĂšces de bois quâon faisoit plier en les attirant avec des cordes quâon bandoit par des mon-* linets ; mais personne nâa expliquĂ© comment ces bras frappoient le javelot, comment ils Ă©toient arrĂȘtĂ©s avant la dĂ©tente , et comment la dĂ©tente se faisoit , ni Ă quoi servoit cette Ă©galitĂ© de tension quâon connoissoit par lâĂ©galitĂ© des tons que les cordes rendoient; on ne sait point non plus quel Ă©toit le mystĂšre de toutes ces proportions quâon prenoil sur les trous par lesquels passoient les cables. Les monuments antiques nous offrent deux sortes de catapultes ; dans les unes ce sont les bras qui se plient comme ceux dâune arbalĂšte , en tirant une corde qui va de Lun Ă lâautre pour lancer Je trait; quand on la lĂąchoit, les bras se redressant faisoient partir le dard. On sent que pour tirer Ă soi cette corde , il falloit que lâart vĂźnt au secours des forces humaines et quâon employĂąt un moulinet. Dans les autres catapultes ce sont les bras ou arbres qui frappoient immĂ©diatement le javelot, et il paroĂźt que la catapulte, dont parle Aitruve , agissoit de cette maniĂšre. Les deux bras de celle catapulte Ă©toient deux arbres placĂ©s debout Ă cĂŽtĂ© lâun de lâautre, et arrĂȘtĂ©s au bas de la machine comme le mĂąt dâun navire. Leurs deux bouts dâen haut se rapporloient aux trous du chapiteau, quand on les droit avec des cables qui passoient par ces trous ; lorsquâon les dĂ©ieudoit , ils frappoient dâun mĂȘme coup le javelot. On meltoil deux arbres pour augmenter lâeffet de la machine. Qn observoit si les cordes rendoient le mĂȘme ton , pour sâassurer si les deux arbres Ă©toient tendus Ă©galement, ce qui Ă©toit nĂ©cessaire autrement le bras quâon auroit moins tendu nâauroil servi Ă rien , parce que lâautre auroit dĂ©jĂ poussĂ© le javelot avant quâil le pĂ»t toucher. Nous avons interprĂ©tĂ© comme Galiani les signes qui indiquent, dans le texte latin , les diffĂ©rentes grandeurs des parues de la catapulte et de la baliste. \ 4I7 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. C H A P I T R E X V I. - f' ijfj Des Batistes. ĂŽ. * âai fait connoĂźtre les parties qui composent la catapulte , et j ai indiquĂ© leurs proportions. Quant aux .batistes , quoi qu elles produisent toutes le mĂȘme effet, 011 les fait de diffĂ©rentes maniĂšres. On bande les unes avec des moulinets et des leviers, dâautres avec des moufles, dâautres avec des vnulas, d autres enfin avec des roues dentelĂ©es. On doit nĂ©anmoins toujours proportionner leur grandeur Ă la pesanteur de la pierre quelles jettent; il nâest pas donnĂ© Ă tout le monde de bien saisir ces proportions ; il faut pour cela connoĂźtre parfaitement les rĂšgles de lâarithmĂ©tique , surtout la multiplication. On fait au chapiteau de la baliste des trous par oĂč lâon passe des cables faits de cheveux et surtout de cheveux de femmes, ou de boyaux; il faut proportionner ces cables Ă la grosseur et Ă la pesanteur de la pierre que la baliste jette , comme on proportionne les catapultes sur la grandeur des javelots. Pour apprendre cela tout de suite Ă ceux qui ne savent pas les rĂšgles de la gĂ©omĂ©trie et de lâarithmĂ©tique, et leur Ă©viter la peine de sâen embarrasser l esprit, pendant quâils sont exposĂ©s aux pĂ©rils de la guerre, je vais dĂ©crire tout ce que jâen ai appris de mes maĂźtres , et par ma propre expĂ©rience ; jâajouterai le calcul que j ai fait, pour rĂ©duire les mesures grecques aux poids qui sont en usage parmi nous. C H A P I T II E X Y I I. Proportions de la Batiste. 1 Ă k baliste jette-t-elle une pierre de deux livres? le trou de son avoir cinq doigts de large en jette-t-elle une de quaire livres ? il doigts en jette-t-elle une de six livres? il doit avoir sept doigts une de dix livres ? il doit avoir huit doigts en jette-t-elle une de chapiteau doit doit avoir sis en jette -1 - elle vingt livres? il L I V li E X, C n a P . XVII. 468 doit avoir dix doigts ; en jette-t-elle une de quarante livres ? il doit avoir douze doigts et demi et un seiziĂšme en jette-t-elle une de soixante livres? il doit avoir treize doigts et une huitiĂšme partie en jette-t-elle 'une de quatre-vingts livres ? il doit avoir quinze doigts ; en jette-t-elle une de cent vingt livres ? il doit avoir un pied et demi , et en sus un doigt et demi eii jette-t-elle une de cent soixante livres ? il doit avoir deux pieds en jette-t-elle une de deux cents livres? il doit avoir deux pieds et six doigts en jette-t-elle une de deux cent dix livres ? il doit avoir deux pieds et sept doigts enfin en j e lie-t-elle une de deux cent cinquante livres? il doit avoir deux pieds et onze doigts et demi. AprĂšs avoir dĂ©terminĂ© la grandeur de ce trou , qui sâappelle en grec peritrelos , r on trace un ovale dont la longueur aura deux diamĂštres du trou et en sus une douziĂšme et une sixiĂšme partie de ce diamĂštre ; sa largeur aura deux diamĂštres et une sixiĂšme partie on divise en deux parties Ă©gales la ligne quâon a dĂ©crite, et aprĂšs cela on rapproche ses extrĂ©mitĂ©s pour les contourner obliquement, de maniĂšre que la longueur du contour soit dâune sixiĂšme partie , et la largeur que forme le pli dâune quatriĂšme partie. Depuis lâendroit oĂč commence le contour Ă lâextrĂ©mitĂ© de lâangle qui entoure le trou , on rĂ©trĂ©cit la largeur de ce trou dans lâintĂ©rieur dĂźme sixiĂšme partie. La longueur de lâovale de ce trou sera proportionnĂ©e Ă la grosseur de lepizygis 2 ; aprĂšs en avoir tracĂ© les bords, on en amincit lâextrĂ©mitĂ© pour lui donner un lĂ©ger contour son Ă©paisseur de chaque cĂŽtĂ© sera dâun demi-diamĂštre et une seiziĂšme partie. Les barillets auront deux diamĂštres et un quart de long , un diamĂštre et trois quarts de large leur Ă©paisseur, sans y comprendre le vide du trou , aura un diamĂštre et demi et lâextrĂ©mitĂ© du trou aura la largeur dâun diamĂštre et une seiziĂšme partie. Les poteaux auront de longueur cinq diamĂštres et demi et un seiziĂšme ; de tour un demi-diamĂštre ; d Ă©paisseur un tiers et un neuviĂšme de diamĂštre entre les deux poteaux on laisse la meme largeur que celle quâon a indiquĂ© devoir se trouver auprĂšs du trou ; tellement quâelle aura de large et de profondeur cinq diamĂštres, et de haut un quart de diamĂštre. La rĂšgle qui est Ă la table doit avoir huit diamĂštres de long , et un demi-diamĂštre tant de largeur que 1 Câest-Ă -dire percĂ© tout ,au tour. 'Il donne ce nom grec au trou de la batiste quâil nomme fin latin sculula. Dans le Ăź. er chapitre du VIL rec livre et dans le XV. n,c de celui-ci nous avons vu que ce mot signifioit un bouclier de figure ovale. Le mot peritrelos peut se prendre de deux façons , et signifier une chose percĂ©e tout autour , ou composĂ©e dâun seul trou , quâon a agrandi tout-Ă -lâentour par plusieurs coups de ciseau, qui font que ce trou va en sâĂ©largissant comme un entonnoir ou le pavillon dâune trompette. Cette derniĂšre maniĂšre convient beaucoup Ă ce que \itruve continue de dire de ce trou de la baliste, dont il faut Ă©largir et adoucir les bord, pournepas user les cables qui doivent y passer. 2 Câest-Ă -dire qui. est sur le joug. 4 % Lâ A II C H I T E ⏠T U II E DE VI T II U V E. dâĂ©paisseur. Le tenon aura deux diamĂštres et un sixiĂšme de long la courbure de la rĂšgle sera d'un seiziĂšme et cinq quarts de seiziĂšme. La largeur et l Ă©paisseur de la rĂšgle extĂ©rieure doit ĂȘtre pareille. La longueur que donnera sa courbure, avec la largeur du poteau et sa courbure, sera dâun seiziĂšme de diamĂštre. Les rĂšgles supĂ©rieures doivent ĂȘtre semblables aux infĂ©rieures, câest-Ă -dire avoir un seiziĂšme de diamĂštre. Les travers de la table auront deux tiers et un seiziĂšme de diamĂštre. Le fut du climakis i aura treize diamĂštres de long et trois seiziĂšmes de diamĂštre dâĂ©pais. Lâintervalle du milieu aura un quart de diamĂštre de large , et de profondeur un huitiĂšme et un quart de ce huitiĂšme. La partie supĂ©rieure du climakis , qui est prĂšs des bras et qui touche Ă la table, se divise dans toute sa longueur en cinq parties la piĂšce que les Grecs nomment chelo 2 occupera deux de ces parties la largeur de cette piĂšce sera dâun seiziĂšme de diamĂštre , son Ă©paisseur dâun quart et sa longueur de trois diamĂštres et demi et un huitiĂšme. La saillie du chelo aura un demi-diamĂštre, et celle du Plinlhigonalos 3 un douziĂšme de diamĂštre et un sicĂŒique 4. Quant Ă la partie , quâon nomme la face de traverse, qui est vis-Ă - vis de lâessieu , elle doit avoir trois diamĂštres de long les rĂšgles qui sont dans lâintĂ©rieur auront un seiziĂšme de diamĂštre de long, un douziĂšme et un quart de douziĂšme dâĂ©paisseur. Le rebord 5 du chelo qui sert de couverture Ă la queue d hirondelle , doit avoir un quart de diamĂštre de long ; la largeur des montants du climakis doit en avoir un huitiĂšme, et leur Ă©paisseur un douziĂšme et un quart de douziĂšme. LâĂ©paisseur du carrĂ© qui est au climakis doit ĂȘtre dâun douziĂšme et dâune huitiĂšme partie de douziĂšme ; mais vers lâextrĂ©mitĂ© elle ne doit ĂȘtre que dâun quart de douziĂšme. Le diamĂštre du cylindre de lâessieu sera Ă©gal au chelo ; mais vers les clavicules, il sera plus mince de la moitiĂ© et une seiziĂšme partie. La longueur des arcs-boutans sera dâune douziĂšme partie et de trois quarts de douziĂšme. La largeur^ Ci Câ est-Ă -dire , petite Ă©chelle. 2 Câest-Ă -dire tortue. 3 Ouelques-uns lisent, plentigcnatos , dâautres plintigo- natos ; B al dus et TumĂ©fie lisent ptenfgomntos , parce que Ctesibius appelle toute cette machine pteryoo qui signifie une aile, et quâelle sâavance effectivement en forme dâaile. 4 Joconde prend ici le mot siciliens pour la quatriĂšme partie du tout prĂ©cĂšdent. Le sicilique signifioit ordinairement deux dragmes , qui font le quart de Fonce. 5 Le mot replum dont Yitruve se sert ici, et quâil a encore employĂ© dans le 6. n,e chap. du IV e livre, en parlant de la menuiserie des portes, oĂč je lâai traduit par le mot feuillure, nâest pas expliquĂ© de la mĂȘme maniĂšre par les interprĂštes. Saumaise pense quâil 1 employĂ© ici au lieu du mot rĂ©plication , comme il employĂ© diiplum au lieu de duplication. Suivant cette opinion adoptĂ©e par Perrault, nous avons mis ici rebord, Ă cause quâil dit ensuite quâil sert de couverture Ă la queue dâhirondelle. LIVRE X, C h a p. XVII. 4 7 o en bas, dâune treiziĂšme partie de diamĂštre ; 1 Ă©paisseur en haut, dâun huitiĂšme et dâun quart de huitiĂšme. La base quâon appelle eschara i aura de longueur une neuviĂšme partie de diamĂštre. La piĂšce qui est devant la base aura quatre diamĂštres. LâĂ©paisseur et la largeur de lâune et l'autre jusquâĂ la moitiĂ© de leur hauteur aura un neuviĂšme et un seiziĂšme de diamĂštre. La colonne aura en largeur et Ă©paisseur un diamĂštre et demi . sa hauteur ne se rĂšgle pas sur le diamĂštre du trou du chapiteau, mais on la proportionne Ă lâusage quâon la destine la longueur du bras sera de six dismĂštres; son Ă©paisseur, vers le bas, dâun demi-diamĂštre, et Ă son extrĂ©mitĂ©, dâun douziĂšme de diamĂštre. » n AprĂšs avoir fait connoĂźtre les proportions que jâai jugĂ©es ĂȘtre les, plus convenables pour les catapultes et les balistes, je vais expliquer , le plus clairement quâil sera possible, comme on doit les bander, en les tendant avec des [ Cordes de boyaux ou de cheveux. âą t CHAPITRE XVII II V ' De la maniĂšre de bander les Balistes et les Catapultes. U n prend deux longues piĂšces de bois sur lesquelles on attache les amarres pour passer des moulinets. Au milieu de chacune de ccs piĂšces de bois , on fait une entaille oĂč lâon met le chapiteau de la catapulte, quâon y affermit avec ,' on * chevilles , afin quâon ne puisse lâarracher en bandant la machine. AprĂšs cela .n enchĂąsse dans ce chapiteau les barillets de cuivre , dans lesquels on plac^ *s chevilles de fer que les Grecs appellent Ă©pi scindas. Ensuite on passe par iâun des trous qui traversent le chapiteau, le bout du cable quâon attache au moulinet , autour duquel il sâentortille, quand on le fait tourner avec les leviers, et on le bande jusquâĂ ce quâĂ©tant frappĂ© avec la main on connoĂźt sâil rend le ton quâil doit avoir. Alors on met la cheville dans le trou du chapiteau pour arrĂȘter le cable et empĂȘcher quâil ne se lĂąche on passe de la mĂȘme maniĂšre le cable dans i Câest-Ă -dire lâĂąire , le foyer, un gril. 471 L â A R C II I T E C T U K E D E Y I T R U V E. le trou qui est Ă cĂŽte', et on le bande avec les leviers et le moulinet jusquâĂ ce quâil rende le mĂȘme ton que lâautre; au moyen de ces chevilles de fer on arrĂȘte les catapultes auxquelles on a donnĂ© le degrĂ© de tension nĂ©cessaire , en observant les tons que sonnent les cables. R Efl J R Q U E S. Dans le I. er cliap. du I. er Liv. nous avons vu quâune des raisons pour lesquelle» Yitruve exigcoit que l'architecte connĂ»t la musique y câĂ©loit pour pouvoir piger si les cordes de ces machines de guerre rendroient un mĂȘme tou. AprĂšs avoir lu ce chapitre et ceux qui prĂ©cĂšdent, on sera convaincu de la difficultĂ© ou, pour mieux dire , de l'impossibilitĂ© dâĂšxphquer aujourdâhui dâune maniĂšre satisfai-ante dâaprĂšs le texte, quelle Ă©loit la vĂ©ritable forme dĂ© ces machines. Pour en faciliter cependant lâintelligence , jâai fait graver le plan de la catapulte qui se trouve dans lâĂ©dition de Perrault ; et jây joins lâexpli- caliou tirĂ©e du texte. Mais je suis loin dâaffirmer que nous avons bien rencontrĂ©. Ou voit dans ce dernier chapitre que les diverses parties des catapultes et balistes , dont Vilruve adonnĂ© si exactement les proportions dans les chapitres prĂ©cĂ©dents , forai oient plusieurs assemblages, quâon rĂ©unissoil seulement lorsquâon employoit la machine. Ces assemblages consisloient 3 1 °. dans les deux longues piĂšces de bois oĂč lâon attachoit; 2°. le moulinet; et 3°. le chapiteau. On avoit ensuite 4°. les barillets quâon enchĂąssoit dans le chapiteau; 5.° les chevilles; et enfin 6.° lâassemblage oĂč se irouvoient les bras qui frappoienl le javelot ou la pierre. Perrault est parvenu Ă rĂ©unir dans sa figure toutes les. parties > de ces machines; je donne donc ici celte figure, en attendant quâon parvienne Ă dĂ©couvrir quelque monument , qui nous ofire quelque chose de plus satisfaisant. s ; r aie, $ou CHAPITRE XI X. ' 1 " ' \- i. âąS Des machines pour assaillir les forteresses. Jâai traitĂ© le mieux quâil m a Ă©tĂ© possible de ces objets ; il me reste prĂ©sentement Ă expliquer les machines quâon employĂ© pour assaillir et dĂ©fendre les villes. La premiĂšre quâon inventa fut le belier ; voici comment ; Lorsque les Carthaginois firent le siĂšge de Cadix, ils rĂ©solurent de dĂ©molir au dus vile un chĂąteau qu'ils avoient pris. Comme il manquoient dâoutils nĂ©cessaires» 4 7 2 ;»i Tpr f L l Y R ÂŁ .i. * X C II Ai i* * â > k.* X i X. L. -i V . i ils se servirent dâune .poutrç,- que plusieurs, howmes. r &outenoienl clans leurs mains,, et frappant du bout de cette poutre le diaut de la muraille, Ă coups redoublĂ©s, ils firent tomber les pierres des rangs, den haut ainsi allant dâassiser en assise, ils abattirent toutes les fortifications. AprĂšs .,cela , un charpentier de la ville cle Tyr, nommĂ© Pephasmenos, instruit par cette premiĂšre expĂ©rience, planta un mĂąt, auquel il suspendit une poutre comme une balance, et par la force des grands coups que donnoit cette poutre, en allant et venant, il abaĂŒit les murs de la ville de Cadix. Cetras de CalcĂ©doine fut le premier qui lit pour celte machine une base de charpente portĂ©e sur des roues. Il Ă©leva sur cette base un assemblage i composĂ© de piĂšces montantes et de traverses, dont il lit une loge 2 ., dans laquelle il suspendit un bĂ©lier. Il couvrit celte loge de peaux de boeufs, afin de mettre en sĂ»retĂ© ceux qui travailloient Ă battre la muraille. Comme on ne pou voit avancer cette loge que fort lentement, on 1 appela une tortue Ă bĂ©lier. Tels furent les premiers commencemens de ces sortes de machines. Polyde de Thessalie leur donna la derniĂšre perfection, pendant le siĂšge que le roi Philippe, fils dâAmyntas, mit devant Bysance. Il en inventa plusieurs autres, de diffĂ©rents genres, dont lâusage Ă©toit beaucoup plus facile. Il eut pour disciples Biades et Chereas, qui servirent dans les armĂ©es d'Alexandre- le-Grand. Diades a laissĂ© quelques Ă©crits dans lesquels il prĂ©tend avoir inventĂ© les tours roulantes ; il dit quâil les faisoit porter dĂ©montĂ©es quand l'armĂ©e marchoit. Il ajoute que câest lui qui a encore inventĂ© la tarriĂšre et une machine montante , au moyen de laquelle on passoit de plein pied sur la muraille, de mĂȘme que le corbeau dĂ©molisseur, quâon nomme aussi une grue. Il se servoit du belier posĂ© sur des roues dont il a expliquĂ© la structure. Les plus petites tours quâon puisse faire , dit-il, doivent avoir au moins soixante coudĂ©es de haut et dix-sept de large il faut les Ă©trĂ©cir Ă mesure quâon les Ă©lĂšve, de sorte que le haut soit un cinquiĂšme moins large que leur base les montants auront par le bas trois quarts de pied, et par le haut un demi-pied elles auront dix Ă©tages, avec des fenĂȘtres devions les cĂŽtĂ©s. Les plus grandes tours, continue-t-il, doivent avoir cent vingt coudĂ©es de haut et vingt-trois coudĂ©es de large ; il faut, 1 Ce que Vitruve appelle arrectaria. AthĂ©nĂ©e lâappelle gzeXoi}, Ă©chelle , câest-Ă -dire, la jambe. 11 paroĂźt que le mot sccila est dĂ©rivĂ© de ce mot grec, parce que lâĂ©chelle est composĂ©e de deux montants, comme de deux jambes et de plusieurs Ă©chelons en travers. a DâaprĂšs lâopinion de Baldus, nous avons rendu ici le mot latin çara par le mot loge. ĂŻl croit quâil vient de varns , qui signifie courbĂ© et Saumaise dit que câest de lĂ quâest dĂ©rivĂ© le mot français se garder , comme qui diroit guarare au lieu d e varare. Ainsi on dit guepe du .latin vespa. Câest pourquoi, ajoute Peiiault, qui a suivi de mĂȘme que nous 1 opinion de Daldus, il semble qu une couverture courhee sous laquelle on se garde, peut s appeler une loge. 60 . ' 47 3 LâARCHITECTURE DE YITRUVE. comme les autres, les re'tre'cir dâun cinquiĂšme, depuis la base jusquâau sommet les montants auront par le bas la grosseur dâun pied, et par le haut celle dâun demi-pied. Il divise ces grandes tours en vingt e'tages, qui ont chacun leurs parapets de trois coudĂ©es. Il les couvre de cuirs nouvellement Ă©corchĂ©s, pour les dĂ©fendre contre toutes espĂšces de coups. Il construit Ă -peu-prĂšs de meme la tortue Ă belier. Elle a, dit-il, trente coudĂ©es de large, et quinze de haut, non compris le toit, qui doit en avoir sept, depuis la plate-forme jusquâau sommet sur cette hauteur sâĂ©lĂšve en outre, dans le milieu, une petite tour qui aura au moins douze coudĂ©es de large elle contient quatre Ă©tages, dans le dernier desquels on place les scorpions et les catapultes ; dans les Ă©tages dâen bas on amasse une grande quantitĂ© dâeau, afin d Ă©teindre le feu quâon pourroit jeter dessus pour lincendier. On place dans cette tortue la machine Ă belier, qui sâappelle en grec criodocĂȘ , quâon pose sur un rouleau parfaitement arrondi au tour , afin de lui donner lâimpulsion en le poussant en avant et le retirant en arriĂšre avec des cables, ce qui produit un grand effet. De mĂȘme que la tour, on couvre ce belier de cuirs fraĂźchement Ă©corchĂ©s. Voici comme il dĂ©crit la taniĂšre elle ressemble beaucoup, dit-il, Ă la tortue. Au milieu de celte machine, se trouve un canal semblable Ă celui des catapultes et des balistes, posĂ© sur des montants. Il a cinquante coudĂ©es de long et une coudĂ©e de large. Au travers de ce canal on place un moulinet, et par devant, Ă droite et Ă gauche, on place des poulies qui servent Ă faire mouvoir une poutre ferrĂ©e par le bout et placĂ©e dans le canal. Sous le canal il y a des rouleaux, au moyen desquels on la pousse avec beaucoup de force et de promptitude. Au-dessus de la poutre on forme une espĂšce de voĂ»te, pour la couvrir et soutenir les peaux fraĂźchement Ă©corchĂ©es dont on enveloppe la machine. Il croit qu il ne doit rien dire du corbeau, parce quâon a reconnu que cette machine produit peu dâeffet. Je sais quâil avoit promis dâexpliquer la structure d une Ă©chelle i, quâon nomme en grec Ă©pibathra , et des machines navales ; mais japprends avec regret quâil nâa pas exĂ©cutĂ© sa promesse. AprĂšs avoir parlĂ© de la structure des machines sur lesquelles Diades a Ă©crit, il me reste Ă faire coanoĂźtrc Ă quoi elles sont utiles, comme je lâai appris de mes maĂźtres. i Dans le texte on lit accessu ; Perrault a cru que Vitruve nomme au commencement de ce chapitre as- eâĂ©toit une faute et quâil falloit lire ascensu, parce qu il cendens machina. En efFet, le mot grec csrtSccS-pa signifie paroĂźt que cette machine est la mĂȘme que celle que plutĂŽt ascensu que accessu. LIVRE X, C h a p. xix. 474 R E M'A R Q U E S. AthĂ©nĂ©e dit que ce fut GĂ©ras de Carthage qui adapta une base au belier. II ajoute que cet Architecte ne suspendit pas son belier, comme dit Vitruve, mais quâil Ă©toit portĂ© par plusieurs hommes qui le faisoient agir. Il est vrai quâil parle ensuite dâautres beliers quâon faisoit rouler suides cylindres. TurnĂšbe croit que Vitruve a tirĂ© d'AthĂ©nĂ©e presque tout ce quâil rapporte des machines de guerre quoique Casaubon pense quâAthĂ©nĂ©e vivoit long-temps aprĂšs Vitruve, se fondant sur ce que Trebellius Pollio rapporte que lâempereur Gallien fit fortifier plusieurs villĂȘs par deux architectes de Bysance , dont lâun se nommoit ClĂ©odamus et lâautre AthĂ©nĂ©e. Mais il est certain que ce dernier nâĂ©loit pas le mĂȘme qne celui que nous citons , parce que, comme lâobserve Vossius, le nĂŽtre a dĂ©diĂ© son livre Ă Marcellus, qui exisloit avant Vitruve. Il paroĂźt que câest aussi dans AthĂ©nĂ©e que Vitruve a trouvĂ© quâon avoit appelĂ© celle machine tortue Ă cause quâelle sâavançoit fort lentement. Ce qui Ă©toit si vrai quâau rapport de Plutarque, lâHĂ©lepoĂźe de DĂ©mĂ©trius Ă©toit un mois Ă faire un stade , câest-Ă -dire, prĂšs de deux ans Ă faire une lieue. VĂ©gece en donne une autre raison , qui est sa ressemblance avec lâanimal dont elle porte le nom, qui avance la tĂȘte hors de son Ă©caille et la retire dedans, comme le bout du belier sâavance et se relire hors de la loge. On peut dire encore que son usage lui a fait donner ce nom, parce quâelle sert de couverture et quâelle est une forte dĂ©fense contre les pierres et les traits que les assiĂ©gĂ©s pourroient jeter dâen haut, et quâelle met en sĂ»retĂ© ceux qui sont dedans, comme la tortue lâest dans son Ă©caille. AthĂ©nĂ©e parle, comme notre auteur, des hautes tours Ă plusieurs Ă©tages quâon faisoit avancer contre les murs des villes assiĂ©gĂ©es, pour passer de plein pied sur les remparts ; il ne donne aussi Ă leur base que vingt liois coudĂ©es de large, ce qui ne lait pas six toises. Il paroĂźt que cet empĂątement ne peut suffire Ă une tour qui avoit cent vingt coudĂ©es de haut, qui font trente toises. Comment cette tour nâĂ©loit-elle pas renversĂ©e par le vent? Comment pouvoit-on la faire avancer? Et quel soin ne devoit-on pas prendre pour applanir les endroits oĂč elle devoit passer? Ces raisons font soupçonner quâil pourroit ici y avoir une faute dans le texte , dâautant quâil parle ensuite dâune tour que DĂ©mĂ©trius PoliorcĂšte fit faire pour le siĂšge de Rhodes, qui avoit un empĂątement bien plus considĂ©rable que celui dont il donne, ainsi quâAthĂ©nĂ©e, les proportions Plutarque dit quâelle avoit quarante-huit coudĂ©es de large et soixante-six de haut. On leur donnoit cette hauteur pour Ă©galer celle des murs des villes, qui alloient quelquefois jusquâĂ trente-cinq toises. Pline parle de la hauteur des murs de Babylone , mais ce quâil en dit nâest pas croyable car il seroit Ă©tonnant quâune ville fut enfermĂ©e et comme Ă©touffĂ©e par des murs aussi hauts que des montagnes ; au point, Ă ce que rapporte Quinte-Curce , quâon avoit Ă©tĂ© obligĂ© de laisser un grand espace entre ces murs et les maisons. Ces hautes tours Ă©toient divisĂ©es en vingt Ă©tages, qui avoient chacun leur parapet. Câest ainsi du moins que jâai rendu le mot circuitionem. AthĂ©nĂ©e se sert du mot grec peridrome pour exprimer le mĂȘme objet. SievĂ©cliius, dans une figure quâil a mise Ă son commentaire sur AĂ©gece, reprĂ©sente. 6o, J . r/ A II C H I T E C T OSE D E â-V 1 T R U V E. ee pĂ©ridrome comme un corridor saillant Ă chaque Ă©lage 3 en forme de mĂąchecoulis mais Philander croit que le mot circuitio signifie la mĂȘme chose que e que des anciens nommoient peribolon et lorica > que dâAblancourt a rendu, dans sa traduction des commenlaires de CĂ©sar, par le mot parapet. PeridrĂčms . signifier une chosq qui tourne tout autour fait une enceinte et non pas un corridor qui .fait saillie. Nous voyons effectivement quâil enlouroit chaque Ă©tage et y servoit dâappui. AthĂ©nĂ©e dit quâil .devoit avoir trois coudĂ©es de haut, pour empĂȘcher le feu; cette hauteur convient beaucoup pour le parapet. Pollux dit que le mol peridrome signifie lâappui des plates- formes qui sont en haut des maisons. On voit donc quâil doit signifier un parapet et non un corridor faisant saillie. Perrault et G*rhani avoient adqptĂ© avant nous la mĂȘme interprĂ©tation. AthĂ©nĂ©e nous fait connoĂźlrjĂ la hauteur de tous ces Ă©tagĂ©s que Vitruve a omise il donne sept coudĂ©es et demie au premier, cinq au 2 e , 4 e et 5 e , et quatre et demie Ă tous les autres qui sont au-dessus. Mais Perrault croit quâil, doit y avoir une faute dans le texte grec, car toutes ces hauteurs dâĂ©tages rĂ©unies ne font que g5 coudĂ©es, Ă moins quâAthĂ©nĂ©e nâait pas conquis lâĂ©paisseur des planchers. Mais dans ce cas elle auroil Ă©tĂ© trop grande, Ă©tant pour chacun dâune coudĂ©e et un quart, câest- Ă -dire , de 22 pouces , qui est la moitiĂ© plus quâil ne faut pour un plancher en bois. Vilruvei nous apprend que Diades a cru ne devoir rien Ă©crire sur la machine nommĂ©e le Corbeau dĂ©molisseur,-parce que, dit-il, elle ne produisoit pas beaucotq dâeffet. Suivant Polybe., elle fut cependant cause de la premiĂšre victoire que les Romains remportĂšrent sur les Carthaginois, dans un combat naval. Les grands effets quâon raconte des machines dâArchimĂšde , pour la dĂ©fense de Syracuse, sont attribuĂ©s par Plutarque principalement Ă ce corbeau. Polybe et Frontin disent que le consul C. Duelius, qui commandoit lâarmĂ©e navale des Romains, fut lâinventeur de cette machine quoique Quinte-Curce en attribue lâinvention aux Tyriens, lorsque leur ville fut assiĂ©gĂ©e. AthĂ©nĂ©e se plaint, comme Vitruve, que Diades nâa pas expliquĂ© plusieurs autres machines quâil avoil promis de dĂ©crire; ce qui fait croire, dit Perrault, que Vitruvç a traduit dâAthĂ©nĂ©e ce quâil rapporte de Diades, et quâil nâa pas lu lâouvrage de ce dernier. e ; CHAPITRE XX. , h . De la Tortue quon employĂ© pour combler les fossĂ©s. ⌠o ici comme on construit ia tortue dont on se sert pour remplir les fossĂ©s et pour sâapprocher Ă couvert des murailles. On fait une base carrĂ©e, que les Grecs appellent eschara i ; chacun de ses cĂŽtĂ©s a vingt-cinq pieds. Ces cĂŽtĂ©s i C âest-Ă ~dire, une grille. SOI ! ces le c tl ui asseĂŻ o fl / ; le ni 4 d !tlo Iqu i roi l'osier ;"be] 4 ah; o co i 1 D; entii ^lutĂŽi X X. L I V RE X, C Ăźi Ă p. 476 sont joints par quatre travers qui sont arretĂ©s par deux autres, Ă©pais dâune douziĂšme partie de leur longueur et large de la moitiĂ© de leur Ă©paisseur. La distance entre ces travers doit ĂȘtre dâenviron un pied et demi. Dans chaque intervalle il faut mettre par dessous de petits arbres, quâon nomme en grec Amaxopodes 1 , dans lesquels tournent les essieux des roues qui sont affermis avec des laines de fer. Ces petits arbres sont ajustĂ©s de maniĂšre quâau moyen de leur pivot et des trous dans lesquels sont passĂ©s des leviers, on dirige exactement les roues sur le chemin quâon veut suivre , soit en avant ou en arriĂšre , soit Ă droite ou Ă gauche , soit diagonalement. On pose , en outre , sur chaque cĂŽtĂ© de la base une poutre qui tonne une saillie de six pieds , et sur cette saillie, tant par devant que par derriĂšre, on met deux autres poutres auxquelles on donne sept pieds de saillie, et qui ont lâĂ©paisseur et la largeur que nous venons dâindiquer pour le bois de la base. Sur cet assemblage on Ă©lĂšve des poteaux assemblĂ©s qui ont neuf pieds de haut sans les tenons, et qui , dans tous les sens, ont un pied et un palme dâĂ©paisseur. La distance de lâun Ă lâautre est dâun demi-pied. On les assemble par le haut, en les emmortaisant dans des sabliĂšres sur ces sabliĂšres on place des forces 2 quâon Ă©lĂšve et quâon encastre lâune dans lâautre, Ă la hauteur de neuf pieds. Sur ces forces se trouve une piĂšce de bois carrĂ©e qui les assemble. On doit encore arrĂȘter et affermir le tout avec des pannes 3, et le couvrir de planches de bois de palmier, si cela se peut, autrement de quelquâautre espĂšce de bois fort, tel quâon voudra, pourvu que ce ne soit ni de pin, ni dâaune, parce que ces bois se rompent et sâenflamment trop aisĂ©ment. On couvre les cĂŽtĂ©s de claies faites dâosiers verts entrelacĂ©s et trĂšs-serrĂ©s ; ensuite on recouvre le tout de peaux fraĂźchement Ă©corchĂ©es, quâon double dâautres peaux semblables, en mettant entre deux des algues marines ou de la paille trempĂ©e dans du vinaigre ; par lĂ elle rĂ©sistera aux coups des balistes et on ne pourra lincendier. 1 Pieds de chariot. 2 Dans le texte on lit capreoli, câest-Ă -dire, des contre-fiches. Ce qui suit fait voir cependant que ce mot a Ă©tĂ© mis au lieu de caniherii , qui signifie des forces , ou plutĂŽt les chevalets dont nous avons parlĂ© dans nos remarques sur le 2. e chap. du liv. IV. 3 Lâauteur employĂ© ici le mot laierarii; mais comme on voit clairement par le reste du texte, que cette piĂšce de bois sert au mĂȘme usage que les pannes , quâil nomme templa , dans le 2. e chap. du IV. e livre , je nâai fait aucune difficultĂ© de rendre ce mot par celui de pannes. 477 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. CHAPITRE XXL Des autres espĂšces de Tortues. Il y a une espĂšce de tortue qui a toutes les parties qui se trouvent dans celle quâon vient de dĂ©crire, Ă la rĂ©serve des forces mais un parapet rĂšgne tout autour, avec des anneaux faits dans des planches ; au-dessus se trouve une couverture inclinĂ©e, faite de planches et de cuirs, fortement attachĂ©s ensemble ; on Ă©tend par dessus un enduit dâargile pĂ©trie avec du crin ; on rend la couche assez Ă©paisse pour que le feu ne puisse endommager la machine. On peut, sâil est nĂ©cessaire, et si la nature du lieu lâexige, faire porter cette machine par huit roues. Les tortues qui servent Ă couvrir les mineurs sâappellent en grec oryges i ; elles ressemblent en tout Ă celles quâon vient de dĂ©crire elles prĂ©sentent par devant un triangle , afin que les traits , quâon lance de dessus la muraille , ne rencontrent pas une surface plate, mais que recevant les coups sur le cĂŽtĂ©, elle les rejette, tellement qu elle couvre les mineurs, qui travaillent dessous sans danger. Il me semble quâil nâest pas hors de propos de rapporter les proportions de la tortue quâAgĂ©tor de Bysance construisit. Sa hase a soixante pieds de long et dix- huit de large. Les quatre montants posĂ©s sur lâassemblage sont formĂ©s chacun de deux poutres de trente-six pieds de hauteur , sur un pied et un palme dâĂ©paisseur et un pied et demi de largeur. Cette hase roule sur huit roues, hautes de six pieds et trois quarts , Ă©paisses de trois pieds ; elles sont composĂ©es de trois piĂšces de bois jointes ensemble par des tenons Ă queue dâhirondelle et bandĂ©es de fer battu Ă froid. Elles tournent aussi dans des pivots nommĂ©s amapopodes. Sur lâassemblage des poutres qui sont au-dessus de la base, sâĂ©lĂšvent des montants qui .ont dix-huit pieds et un quart de long, trois quarts de pied de large et un douziĂšme et demi d Ă©paisseur; la dislance de lâun Ă lâautre est dâun pied et trois quarts. Ces montants sont enchĂąssĂ©s par le haut dans dâautres poutres qui rĂ©gnent tout autour, pour affer- j Câest-Ă -dire, pionniers, dâç/jycrcrw, qui signifie fouir, creuser la terre. LIVRE X, ChĂ p. xxi. 47* mir tout 1 assemblage. Ces poutres orit un pied et un quart de largeur et trois quarts de pied dâĂ©paisseur. Au-dessus de cela sâĂ©lĂšvent les forces Ă la hauteur de douze pieds. Ces forces sont jointes et enchĂąssĂ©es dans une autre piĂšce de bois placĂ©e au sommet. Il y a aussi des chevrons placĂ©s en travers, qui sont chevillĂ©s, et au-dessus se trouve un plancher qui rĂšgne tout autour et qui couvre le bas. Au milieu est encore un autre plancher posĂ© sur des soliveaux ; câest lĂ quâon place les scorpions et les catapultes on dresse en outre deux forts montants, longs de trente-cinq pieds, Ă©pais dâun pied et demi et larges de deux. On les lie en haut, par une piĂšce traversante, avec des tenons, et par une autre piĂšce qui lie encore les montants ensemble par le moyen des tenons ; le tout bandĂ© de lames de fer. Entre ces montants et le traversant il y a dâautres piĂšces de bois placĂ©es des deux cĂŽtĂ©s et fortement enfoncĂ©es entre le chelo i et les angles. Dans ces piĂšces de bois se trouvent deux rouleaux faits au tour, auxquels on attache les corjdes qui tiennent le belier suspendu. 2 Au-dessus de ceux qui font agir le belier, sâĂ©lĂšve un parapet qui a la forme dâune petite tour, oĂč peuvent s Ă©tablir, Ă lâabri de tout danger, deux soldats, pour dĂ©couvrir et faire connoĂźtre toutes les entreprises de l ennemi. Le belier a cent et six pieds de long, sa largeur par le bas est dâun pied et un palme, et son Ă©paisseur d'un pied, Lar il va en rĂ©trĂ©cissant depuis la tĂȘte jusquâĂ 1 autre extrĂ©mitĂ©, oĂč sa largeur nâa plus quâun pied et son Ă©paisseur un demi-pied et une huitiĂšme partie. On arme sa tĂȘte de fer, comme le devant dâun long navire ; de cette tĂȘte partent quatre bandes de fer, longues environ de quinze pieds, qui servent Ă lâattacher au bois. Depuis la tĂȘte jusquâĂ 1 autre extrĂ©mitĂ© de la poutre, on Ă©tend quatre cables, de la grosseur de huit doigts, et on les y attache comme 1 Je crois que par le mot materiesj qui signifie en gĂ©nĂ©ral des piĂšces de bois, il entend celles qui servent dâarcs-boutants et qui sont eftectivement entre les mon - tants et les travers et entre le cbelo et les angles oĂč elles sont fortement enfoncĂ©es, inter scapos et transversarium trajecla, cheloniis et ancunĂŻbus inclusa. Nous avons vu que le mot chelo signifie en grec une tortue, et nous avons encore vu dans la description de la catapulte , quâon nom- moit aussi manucla la partie de cette machine qui sâappelle le chelo , et que manucla signifie une petite main. Je crois donc quâon appeloit chelo ou manucla , les deux extrĂ©mitĂ©s des travers sur lesquels les montants sâĂ©levoient. a Je crois quâun de ces rouleaux Ă©toit au haut de la machine, et que la corde oĂč le belier Ă©toit suspendu pas- soit sur ce rouleau ; lâautre Ă©toit au bas de la machine J lâextrĂ©mitĂ© de la corde y Ă©toit attachĂ©e ; en tournant ou dĂ©tournant celui-ci avec une manivelle, on Ă©levoit ou on baissoit le belier, pour le faire frapper plus haut ou plus bas. Appian dâAlexandrie dit que les habitans dâUtique empĂȘchĂšrent lâeflĂšt des beliers dont Scipion faisoit battre leurs murs, en descendant des poutres pendues Ă des cordes et mises en travers pour soutenir les coups des beliers. Au moyen des rouleaux, dont je viens de parler, on Ă©lc- voit ou on abaissoit le belier, pour Ă©viter que ses coi ps ne portassent sur les poutres quâon y opposoit. Nous verrons eftectivement, Ă la fin du chapitre, quâon pouvoit lâĂ©lever pour frapper la muraille jusquâĂ prĂšs de cent piedr» 479, L â A II C II 1 T E C T ĂŒ 11 E DE VIT K U V E. on attache le mĂąt d'un navire Ă la poupe et Ă la proue. Ces cables sont relie's par des cordes, mises en travers, qui les entourent comme des ceintures, Ă la distance lâune de lâautre dâun pied et un palme. On couvre entiĂšrement le belier de peaux fraĂźchement e'eorchĂ©es. A l'endroit oĂč pendent les cables Ă la tĂšte du belier, il y a quatre chaĂźnes de fer recouvertes aussi de peaux fraĂźchement Ă©corchĂ©es i. Sur la saillie du plancher, il y a enfin une caisse quâon lie aux cables ; elle est fortement asseinbie'e et pique'e de doux, afin que, par son Ăąprete', on puisse aise'- ment marcher dessus sans glisser, quand on veut parvenir jusquâĂ la muraille. On faisoit mouvoir cette machine de trois maniĂšres , savoir en la faisant avancer en ligne droite, en la faisant tourner Ă droite ou Ă gauche, en la faisant hausser ou baisser. On lâĂ©levoit pour frapper la muraille, jusquâĂ prĂšs de cent pieds, et' lâespace qu elle pouvoit atteindre de droite Ă gauche e'ioit aussi de cent pieds. Cent hommes la gouvemoient; elle pesoit quatre mille talents, câest-Ă -dire, quatre cent quatre-vingt mille livres. 71 E M A R O U E S. c- Toules ces machines de guerre sont expliquĂ©es dâune maniĂšre si obscure quâil paroĂźl presque inutile de se donner la peine de chercher Ă y comprendre quelque chose. Lâart de la guerre a tellement changĂ© depuis la dĂ©couverte de la poudre Ă canon , quâon ne connoĂźt plus ces machines que par le peu quâen ont Ă©crit quelques auteurs anciens. On sâesi encore servi nĂ©anmoins des machines de ce genre dans le moyen Ăąge , mĂȘme aprĂšs la dĂ©couverte de la poudre. Nous lisons, dans la chronique de Zamfliet., que les LiĂ©geois employĂšrent encore en i43o, au siĂšge de Bouvigne, dans le comtĂ© de Namur, une machine appelĂ©e la catapulte j mais, outre quâon ne connoĂźt pas i Le texte porte ex quibus autan funibus pendebant connu capita, fuerant ex ferro quadrupUces catenĂŠ. Il est impossible que par les mots, funibus pendebant , lâauteur ait entendu les cables qui suspendent le bĂ©lier; car les mots eorurn capita , qui suivent, font voir clairement que ce ne peut ĂȘtre ces cables ; parce que le bĂ©lier nâest pas suspendu parle bout, mais par le milieu. Je crois donc quâil sâagit des quatre cables dont il a dĂ©jĂ parlĂ©, qui ser- voient Ă manier, Ă tirer et Ă pousser le belier, et qui Ă©toient liĂ©s Ă son extrĂ©mitĂ© comme les aubans le sont au bout du mĂąt dâun yaisscau. On ajoutoit quatre chaĂźnes au le chat 2 , qui produisoit les mĂȘmes effets que bien comme elle Ă©toit laite, il ne paroĂźt pas bout de ces cables, câest-Ă -dire , dans la partie qui sâavan- çoit hors de la tortue, pour Ă©viter quâon ne les coupĂąt. 2 Cette machine , Ă ce que rapporte la chronique de Zamfliet, avoit e'te' invente'e par un chanoine de Lie'gc , nomme' Henri de Pe- tersheim , et employe'e au siĂ©gĂ© de Bouvigne en i32o. Alors la poudre Ă canon nâavoit pas encore e'te' trouvĂ©e. La mĂȘme chronique rapporte quâen i43o , aprĂšs la de'couverte de la poudre, le canon ne faisant presque aucun effet contre les murs de Bouvigne, les Lie'geois prirent la rĂ©solution de les battre avec la ma- chinĂ© appele'e le chat, dont on sâe'foit servi Ă lâautre sie'ge de Bouvigne dont nous avons parle'. Ainsi, maigre' la de'couverte de la poudre , on avoit encore alors recours aux machines de guerre. quâelle LIVRE X, Chap. xxii. 4p quâelle ressemblent Ă celle des anciens. Ce qui dĂ©courage sur-tout dans les recherches quâon fuit pour dĂ©couvrir la forme des machines dĂ©crites par Yilruve, câest quâon soupçonne avec raison quâil *ne les comprenoit pas bien lui-mĂȘme, lorsquâil ne les connoissoit que par les livres quâil sc con- tentoit de copier, ce quâon remarque aisĂ©ment en voyant la diffĂ©rence dans sa maniĂšre de les dĂ©crire, et comme il ehange de style en parlant de ces diverses machines. On ne peut douter eertainement quâil ne connĂ»t trĂšs-bien les machines de guerre employĂ©es de son temps, parce que, comme nous lâavons vu dans lâintroduction du premier livre, il Ă©toit chargĂ© de les entretenir. Mais il paroĂźt que la plupart de celles quâil dĂ©crit, enlrâautres cette derniĂšre inventĂ©e par Agetor de Bysance, nâĂ©toient plus en usage alors. CHAPITRE XXII. Des moyens quon emploie pour dĂ©fendre les places fortes. Jâai rapportĂ© tout ce quâil convient de savoir sur les scorpions, les catapultes," les balistes, les tortues et les tours; jâai fait connoĂźtre les inventeurs de ces machines, et comme on doit les faire. Jâai cru quâil nâĂ©toit pas nĂ©cessaire d Ă©crire sur les Ă©chelles, les guindages et autres objets semblables, quâil est si aisĂ© de faire, au point que câest ordinairement lâouvrage des soldats dâailleurs ces machines ne peuvent ĂȘtre employĂ©es de mĂȘme dans tous les endroits, câest pourquoi on les construit de plusieurs maniĂšres. Les diversitĂ©s quâon rencontre dans les fortifications et le courage des diffĂ©rents peuples, font quâon doit avoir dâautres machines pour attaquer ceux qui sont hardis et tĂ©mĂ©raires, dâautres pour ceux qui sont vigilans, dâautres enfin pour ceux qui sont timides. Si lâon suit cependant les prĂ©ceptes que jâai donnĂ©s, et quâon sache choisir ce qui convient parmi les divers objets que jâai traitĂ©s, on trouvera tous les expĂ©dients nĂ©cessaires, selon la nature des dieux, pour tout ce quâon voudra entreprendre. On sent qu'il est pour ainsi dire impossible dâĂ©crire sur les moyens que les assiĂ©gĂ©s peuvent employer pour se dĂ©fendre, car il est probable qu ils ne suivront pas nos Ă©crits pour leurs travaux de siĂšge ; lâexpĂ©rience nous apprend quâon a souvent renversĂ© les machines des ennemis , par des moyens ingĂ©nieux trouvĂ©s 6i L â ARCHITECTURE DE VITRUVE. 48 r sur-le-champ, comme il arriva autrefois Ă Rhodes. Il y avoit Ă Rhodes un architecte nomme DiognĂšte, qui recevoit tous les ans un salaire honorable de la rĂ©publique, pour les services quâil rendoit dans la partie qui concerne son art un autre architecte nommĂ© Callias, venu dâArad Ă Rhodes, demanda audience- ' * ' rV 7 il exposa le modĂšle dâun rempart sur lequel il avoit placĂ© une machine, qui est ce guindage qui tourne aisĂ©ment, avec lequel il prit et enleva une hĂ©lepole i quâil avoit fait approcher de la muraille, et la transporta au-delĂ du rempart. Les Rhodiens, voyant lâeffet de ce modĂšle, lâadmirĂšrent. Ils ĂŽtĂšrent Ă DiognĂšte la pension quâils lui avoient accordĂ©e, et la donnĂšrent Ă Callias. Quelque temps aprĂšs, le roi DĂ©mĂ©trius, quâon appela PoliorcĂštes 2, Ă cause de lâopiniĂątretĂ© avec laquelle il avoit coutume de sâattacher Ă tout ce quâil entrepre- noit , dĂ©clara la guerre aux Rhodiens. Ce roi avoit amenĂ© avec lui un excellent architecte athĂ©nien nommĂ© Epimacque, quâil chargea de construire une hĂ©lepole oĂč il employa une dĂ©pense et un travail extraordinaire. Elle avoit cent vingt-cinq pieds de haut et soixante de large ,* elle Ă©toit couverte de poils et de cuirs nouvellement Ă©corchĂ©s , de sorte qu elle Ă©toit Ă lâĂ©preuve dâune baiiste , qui auroit jetĂ© une pierre de trois cent soixante livres. Cette machine pesoit trois cent soixante mille livres. Les Rhodiens demandĂšrent Ă Callias de prĂ©parer sa machine pour enlever lâhĂ©lepole et la transporter en deçà des remparts , dans la ville , comme il lâavoit promis mais il leur dĂ©clara quâil ne pouvoit le faire, dâautant que toutes les choses ne sâexĂ©cutent pas de la mĂȘme maniĂšre ; quâil y a effectivement des machines qui produisent, quand elles sont exĂ©cutĂ©es en grand , le mĂȘme effet, quâa produit leur petit modĂšle; quâil y en a dautres quâon ne peut reprĂ©senter par un modĂšle, mais quâil faut voir exĂ©cutĂ©es ; quâenfin il y en a qui semblent devoir produire beaucoup dâeffet quand on en voit le modĂšle, mais qui ne rĂ©ussissent pas quand on les exĂ©cute en grand. Quâil est facile de se convaincre de cette vĂ©ritĂ©, si lâon considĂšre combien il est aisĂ© de faire avec une tarriĂšre un trou de la grandeur dâun demi-doigt, dâun doigt, 1 Philander remarque que ce nom est dĂ©rivĂ© dâĂź'Aw ; deuxiĂšme aoriste subjonctif ou deuxiĂšme futur indicatif du verbe ccipsco, qui signifie s'emparer, vaincre, subjuguer, etc., et de -xoĂ uç, ville, câest-Ă -dire, qui subjugue les villes. DâaprĂšs ce que disent les historiens et la description quâen fait "Vitruve, il est certain que lâhĂ©lepole ne pouvoit ĂȘtre autre chose quâune grande tour, 2 Le nom de PoliorcĂštes , quâon donna Ă DĂ©mĂ©trius, roi de MacĂ©doine, ne signifie pas lâopiniĂątretĂ© ; ce nâĂ©toit pas en effet par une grande persĂ©vĂ©rance quâil prenoit les villes ; car les historiens remarquent quâil prit presque toutes les plus fortes places delĂ GrĂšce, commeAthĂšnes, MĂ©gare, Sicyone,. HĂ©raclĂ©e, Gorintte et Salamine, le mĂȘme jour quâelles furent assiĂ©gĂ©es. PoliorcĂštes signifie celui qui prend et ruine les villes. 482 LIVRE X, C h A p. xxii. ou dâun doigt et demi; et quâil devient difficile» au-delĂ de toute expression,â de chercher Ă le faire dâun palme ; quâil ne peut mĂȘme entrer dans la pensĂ©e de tenter dâen percer un dâun demi-pied ou plus quâainsi, quoiquâil paroĂźt que ce quâon a fait avec un petit modĂšle puisse aussi sâexĂ©cuter dans une grandeur mĂ©diocre, on ne peut nĂ©anmoins le faire rĂ©ussir en grand. Les Rhodiens s'aperçoivent alors quâils se sont laissĂ©s tromper, faute dâavoir fait ces rĂ©flexions, et quâils ont mal-Ă -propos offensĂ© DiognĂšte. Ils voyent cependant lâennemi s'opiniĂątrer Ă la prise de la place au moyen de cette machine. La crainte d ĂȘtre rĂ©duit en captivitĂ© et dĂ© voir bientĂŽt la ruine de leur ville, les force de venir se jeter aux pieds de DiognĂšte, pour le prier de vouloir secourir sa patrie. Dâabord il les refuse ; mais quand il vit des filles nĂ©es libres, les enfants et les prĂȘtres le venir prier, il promit de faire ce quâon lui demandoit, Ă condition que sâil prenoit la machine, elle seroit Ă lui. Cela lui Ă©tant accordĂ©, il fait percer le mur de la ville directement Ă lâendroit vers lequel la machine sâavance, et ordonne que chacun y apporte ce quâil pour- roit dâeau, de fumier et de boue, pour les faire couler par des canaux au travers de cette ouverture et les rĂ©pandre devant le mur. Toute la nuit est employĂ©e Ă jeter quantitĂ© dâeau, de boue et de fumier, tellement que le lendemain, quand on veut faire avancer lâhĂ©lepoie, avant mĂȘme dâĂȘtre prĂšs de la muraille, la voilĂ qui sâenfonce dans le gouffre humide quâon lui a prĂ©parĂ©, de sorte quâil est impossible de la faire avancer ni reculer. DĂ©mĂ©trius voyant que DiognĂšte, par son talent, avoit fait Ă©chouer ses projets, se retire avec sa flotte. Alors les Rhodiens, dĂ©livrĂ©s par lâindustrie de DiognĂšte, se rĂ©unissent pour le remercier publiquement, et le comblent d honneurs et de rĂ©compenses, pour lui tĂ©moigner leur gratitude. DiognĂšte fait entrer lâhĂ©lepole dans la ville, et la met dans la place publique, avec cette inscription DiognĂšte a fait ce prĂ©sent au peuple, de la dĂ©pouille des ennemis. DâaprĂšs cela, on voit que, pour dĂ©fendre les places, lâesprit et lâindustrie font autant que les machines. Les habitants de la ville de Chio firent Ă©prouver le mĂȘme sort aux ennemis qui vinrent les assiĂ©ger avec des machines appelĂ©es sambuques , placĂ©es sur des vaisseaux. Ces habitants, pendant la nuit, jetĂšrent, dans la mer, devant leur muraille, quantitĂ© de terre, de sable et de pierres quand les ennemis voulurent appro- 6r, 483 LâARCHITECTURE DE VITRĂYE. cher le lendemain, leurs navires Ă©chouĂšrent sur ces bancs, et sây engravĂšrent tellement, quâil leur fut impossible dâavancer vers le mur ni de se retirer, de sorte que les assiĂ©gĂ©s ayant jetĂ© des flĂšches incendiaires sur ces machines, y mirent le feu et les rĂ©duisirent en cendres. Lorsque la ville dâApollonie fut aussi assiĂ©gĂ©e, les ennemis creusĂšrent une mine; .par laquelle ils pensoient pĂ©nĂ©trer dans la ville sans quâon sâen doutĂąt; les assiĂ©gĂ©s, avertis de ce projet par leurs espions, furent trĂšs-Ă©pouvantĂ©s, ne sachant quel parti prendre, parce quâils ignoroient en quel temps et par quel endroit les ennemis vouloient entrer dans leur ville cette incertitude leur faisoit perdre courage. Il se trouvoit parmi eux un architecte dâAlexandrie, nommĂ© Tryphon, qui indiqua le moyen de faire plusieurs contremines, qui passoient par dessous les remparts et sâavançoient par delĂ la longueur dâun trait dâarc ; puis il fit suspendre, dans toutes ces .galeries souterraines, des vases de bronze. Quand les ennemis commencĂšrent Ă travailler, les vases de la galerie dont ils Ă©toient le plus prĂšs, retentirent Ă chaque coup de pioche quâon dormoit. Par lĂ lâon connut bientĂŽt lâendroit que les assiĂ©geans vouloient percer pour pĂ©nĂ©trer dans lâintĂ©rieur de la ville. AprĂšs sâen ĂȘtre assurĂ©, Tryphon fit prĂ©parer, au-dessus des travailleurs ennemis, des chaudiĂšres dâeau et de poix bouillante, avec des excrĂ©ments humains et du sable rougi au feu. Pendant la nuit, il lit percer plusieurs ouvertures dans leur mine, y fit jeter Ă lâinstant ces objets, et tous ceux qui y travailloient furent massacrĂ©s. Pendant le siĂšge de Marseille, les habitants furent de mĂȘme prĂ©venus que lâennemi avoit pratiquĂ© plus de trente galeries souterraines ; ils rĂ©solurent aussitĂŽt de creuser autour de la place un fossĂ© ils le firent si profond quâils rencontrĂšrent et ouvrirent toutes les mines de lâennemi. Dans les endroits oĂč ils ne purent creuser, iis firent, en face, dans lâintĂ©rieur de la ville, un Ă©norme fossĂ©, en forme dâĂ©tang, quâils remplirent dâeau tirĂ©e des puits et du port ; cette eau entrant tout- Ă -coup dans les mines, abattit les Ă©tais, et tous ceiix qui sây trouvoient furent Ă©touffĂ©s par lâeau et par la chute des terres. Les assiĂ©geans tentĂšrent ensuite de sâĂ©lever plus haut que les remparts, en entassant vis-Ă -vis des arbres coupĂ©s et placĂ©s les uns sur les autres ; mais les Marseillois brĂ»lĂšrent tout cet ouvrage, en jetant dessus, avec les balistes, des barres de fer rougies au feu. Enfin, quand on approcha la tortue avec le belier, pour battre la muraille, les assiĂ©gĂ©s descendirent un lacs suspendu au bout dâune corde, dans lequel iis prirent le belier, LIVRE X, Chap. xxii. 484 et lui levĂšrent la tĂȘte si haut, par le moyen d une roue attachĂ©e Ă un engin, quâils lâempĂȘchĂšrent de frapper la muraille ; puis , avec des flĂšches incendiaires et Ă coups de balistes, ils dĂ©truisirent toute la machine. Câest ainsi que cette ville resta victorieuse , et fut dĂ©livrĂ©e, non par le moyen des machines, mais par le talent des architectes, qui rendirent inutiles celles quâavoit employĂ©es lâennemi. Tels sont les principes qui nous ont paru les plus utiles pour la construction des machines dont on se sert pendant la paix et pendant la guerre. Jâai tĂąchĂ© de les rĂ©unir dans ce dernier livre. Les neuf qui prĂ©cĂšdent traitent des diffĂ©rentes parties qui appartiennent Ă notre sujet , tellement quâon trouvera dans ces dix livres tout ce qui compose le corps de farchitecture. REMARQUES . "Vegece,, dans le 2i. e Chap. du IV. e Liv. des Institutions militaires , fait connoĂźtre les moyens quâon emploie pour sâopposer aux effets des hĂ©lepoles, et ceux propres Ă les anĂ©antir. Le premier moyen, dit-il, câest de chercher Ă les brĂ»ler.,Il rapporte ensuite celui quâemployĂšrent les Rhodiens , mais autrement que Vitruve suivant lui, ils creusĂšrent un souterrain, par dessous lâendroit oĂč devoit passer cette machine $ quand elle y fut parvenue, elle sâenfonça tout-Ă -coup, et il fut impossible de lâen tirer. Pour prouver combien lâintelligence et la prĂ©sence dâesprit est nĂ©cessaire Ă ceux qui dĂ©fendent les places assiĂ©gĂ©es 9 Vitruve nous cite encore pour exemple ce qui sâest passĂ© pendant le siĂšge de Chio. Les ennemis voulant sâapprocher de cette ville avec leurs vaisseaux, et y pĂ©nĂ©trer, au moyen des machines nommĂ©es sambuques, qui Ă©toient, Ă ce quâil paroĂźt, des Ă©chelles de cordes dont on se servoit sur les navires pour escalader les murs, et qui Ă©tant dressĂ©es avoient une forme triangulaire semblable Ă celle de lâinstrument de musique appelĂ© sambuque, dont on a parlĂ© dans le J. er Chap. du VI. e Liv., les habitants de Chio ayant dĂ©couvert les projets de lâennemi, jetĂšrent pendant la nuit quantitĂ© de sable, de terre, etc., dans la mer vis-Ă -vis de leur muraille, tellement que les vaisseaux de lâennemi sâapprochant de la ville Ă©chouĂšrent sur ces bancs. Les assiĂ©gĂ©s incendiĂšrent alors leur flotte en lançant dessus des flĂšches enflammĂ©es que Vitruve nomme malleolii, Jâai rendu ce mot par flĂšches incendiaires , dâaprĂšs ce que dit VĂ©gece , Chap. 18 , Liv. III. Mal- leoli velut sagittĆ sunt , et ubi adhĆserint , quia ardentes sunt , unipersa conflagranb. On voit aussi dans Nonius que câĂ©tait des machines enflammĂ©es par une composition combustible dont elles Ă©toient entourĂ©es. Ammien Marcellin dit ^quâelles etoient ferrees par le bout, qu on les lançoit avec des arcs, et que , sâattachant aux machines de guerre ou aux navnes, elles les melloient en feu. * 485 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. Ces diffĂ©rentes machines de guerre, rendoient les siĂšges des anciens pour le moins aussi meurĂź triers que les nĂŽtres. Ils en avoient de tous les genres, tant pour lâattaque que pour la dĂ©fense, dont les effets Ă©loient Ă©tonnans. Les siĂšges de Rhodes, de Chio et de Marseille, dont parle Yitruve, prouvent combien leurs ingĂ©nieurs Ă©loient habiles. Ce que Plutarque 1 rapporte des machines employĂ©es par ArchimĂšde pour dĂ©fendre Syracuse est plus Ă©tonnant encore. ArchimĂšde et Eudoxe furent les premiers, suivant lui, qui appliquĂšrent les principes de gĂ©omĂ©trie aux mĂ©chaniques il dit quâArehimĂšde le fit pour sâamuser, et par ^dĂ©lassement* dâaprĂšs la demande dâHiĂ©ron, roi de Syracuse, son parent et son ami. Il ajoute que Platon fut indignĂ© de ce quâils avoient ainsi corrompu et gĂątĂ© lâexcellence de la gĂ©omĂ©trie, en faisant descendre celte science, qui Ă©toit toute intel- lective et spirituelle, Ă des objets sensibles et matĂ©riels. ArchimĂšde avoit composĂ© pour HiĂ©ron , quantitĂ© de machines pour assaillir et dĂ©fendre les villes mais ce roi nâen ayant pas fait usage, parce- quâil jouit de la paix pendant tout son rĂšgne, elles servirent aux habilans de Syracuse, lorsque Marcellus, Ă la tĂȘte des armĂ©es romaines, vint assiĂ©ger cette ville par mer et par terre. Us les trouvĂšrent toutes prĂ©parĂ©es, et ce qui valoit bien mieux encore, ils possĂ©doient ArchimĂšde, qui les avoit inventĂ©es. LâarmĂ©e i*omaine, qui devoit assaillir par terre, sâavance vers les murs sous la conduite dâAppius. Marcellus, qui commandoit soixante galĂšres, sâavance du cĂŽtĂ© de la mer. Il avoit fait lier ensemble huit de ces galĂšres, et dresser dessus une Ă©norme machine pour rompre les murailles. LâĂ©pouvante sâempare alors des Syracusains qui se voyent attaquer des deux cĂŽtĂ©s. ArchimĂšde seul reste sans inquiĂ©tude, il fait agir ses machines. Une infinitĂ© de traits partent Ă lâinstant de tous les cĂŽtĂ©s; des pierres Ă©normes sâĂ©lancent dans les airs avec un bruit Ă©pouvantable, elles brisent et renversent tout ce quâelles rencontrent, [sans que rien puisse rĂ©sister Ă leur impĂ©tuositĂ© ; la confusion et le trouble rĂ©gnent dans les rangs des Romains. Ce fut bien autre chose encore quand les galĂšres vinrent attaquer du cĂŽtĂ© de la mer les unes sont plongĂ©es au fond des eaux par de longues piĂšces de hois semblables Ă des mĂąts* qui sont jetĂ©es avec des machines de dessus les murailles; dâautres sont Ă©levĂ©es par la proue avec des mains de fer et des crochets en forme de bec de grue, qui les dressent perpendiculairement sur les ondes, et y enfoncent leur poupe. Dâautres sont saisies en dedans par des machines tendues en sens contraire lâune de lâautre , qui leur font faire la pirouette dans les airs* et les vont ensuite briser contre les rochers qui sont au pied des murailles. Rien nâĂ©toit plus horrible que de voir ces galĂšres sâĂ©lever et tournoyer dans les airs* oĂč elles paroissoient suspendues avec toutes les personnes qui Ă©toient dessus dont la mort Ă©toit certaine, puisque jetĂ©es au loin par le tournoiement, ces galĂšres, Ă la fin, venoient se briser vuides contre les mitrailles, ou retomber dans la mer quand les machines les lĂąchoient. Lorsque Marcellus fit approcher la machine quâil avoit placĂ©e sur plusieurs galĂšres jointes ensemble, Ăšt qui sâappele sambuque , Ă cause quâelle ressemble Ă lâinstrument de musique qui porte le mĂȘme nom; tandis quâelle Ă©toit encore assez Ă©loignĂ©e, on lance sur elle de dessus la muraille* une pierre Ă©norme, qui pesoit mille livres, ensuite une seconde, et puis une troisiĂšme qui tombe sur celte machine avec un bruit de tonnerre* la fracasse et disperse les galĂšres qui la soutenoient, tellement que Marcellus ne sachant oĂč il en Ă©toit, fut obligĂ© de se retirer, et dâordonner Ă ceux qui attaquoient du cĂŽtĂ© de la terre, dâen faire autant. On tint conseil, et il fut dĂ©cidĂ© que le lendemain avant le jour, on sâapprocheroit le plus prĂšs i Vie de Marcello*. LIVRE X, C h a p. x x 11. 486 de la muraille quâil serait possible, dâautant que les machines fdâArchimĂšde Ă©tant trĂšs-tendues, elles lanceroient leurs pierres et leurs traits au-dessus de la tĂȘte des assiĂ©geans, et ne pourroient leur nuire dâaussi prĂšs; mais ArchimĂšde avoit prĂ©vu cela il avoit prĂ©parĂ© des machines dont la portĂ©e Ă©toil proportionnĂ©e Ă toutes les distances de sorte que les Romains sâapprochant, croyant ĂȘtre Ă couvert, sont tout Ă©tonnĂ©s de se voir assaillis de nouveau par une infinitĂ© de traits, et accablĂ©s de pierres qui leur tomboient Ă -plomb sur la tĂȘte. Ils furent contraints de se retirer encore une fois. QuoiquâĂ©loignĂ©s, les traits des ennemis venoient encore les atteindre, et ils ne pouvoient leur en envoyer aucun , parce quâArchimĂšde avoit dressĂ© presque toutes ses machines Ă couvert derriĂšre les murailles. Il sembloit, dit Plutarque, quâun dieu combattoit les Romains, puisquâon ne pouvoit dĂ©couvrir dâoĂč tous ces coups partoient. Marcellus reprochoit aux ingĂ©nieurs, quâil avoit dans son camp, quâils ne pouvoient venir Ă bout de ce gĂ©omĂštre qui avoit enfoncĂ© dans la mer ses galĂšres, et repoussĂ© ses sambucjues, et qui avoit surpassĂ© les gĂ©ans aux cent mains dont parlent les poĂštes. Voyant ses gens si dĂ©couragĂ©s et si effrayĂ©s , que dĂšs quâils apercevoient le bout dâune corde ou de quelque piĂšce de bois sur les remparts, ils sâenfuyoient, criant quâArchimĂšde alloit les anĂ©antir avec ses machines. Il renonça Ă tenter aucun assaut, et rĂ©solut de traĂźner le siĂšge en longueur. Il prit enfin cette ville par surprise, et ArchimĂšde y fut tuĂ© par un soldat qui ne le reconnut point, tandis quâil Ă©ioit profondĂ©ment appliquĂ© Ă rĂ©soudre un problĂšme de gĂ©omĂ©trie. Jâaurois dĂ©sirĂ© pouvoir rĂ©pandre autant de clartĂ© sur la partie de lâouvrage de Vitruve qui traite de lâarchitecture militaire des anciens, que jâai cherchĂ© Ă en rĂ©pandre sur celle oĂč il traile de lâarchitecture civile. Ceux qui voudront connoĂźtre davantage celte architecture militaire , doivent avoir recours aux ouvrages de G. C. Waller, de Juste Lipse, du chevalier de Follard, etc. F I K. a 1 1 kxte -.âSSS >a ^m PLANCHES. Les Figures sont expliquĂ©es en latin et en françois . Le latin est entiĂšrement tirĂ© du texte de Vitruve. Nous avons, en cela, suivi lexemple que nous a donnĂ© Galiani, dans sa traduction italienne . Les chapitres, pour lesquels on a gravĂ© ces Figures, sont aussi indiquĂ©s, tellement quelles peuvent servir pour lintelligence du texte dans les Ă©ditions latines, oĂč Ion ri a pas mis toutes les Planches nĂ©cessaires telles sont celles de Philander, de Laet, etc. L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. PLANCHE I â FIGURE I." Plan dune ville entourĂ©e de murs , Chap. 5, Lib. I. AAA. Murus. Mur simple. BBB. Cum aggere. Mur avec un rempart. CCC. Partarum itinera eraxict. Porte et le chemin qui sây rend du cĂŽtĂ© gauche. FIGURE I I. Plan et Ă©lĂ©vation perspective dune partie des murs de la ville reprĂ©sentĂ©e ci-dessus. Chap. 5 , Liv. I. AAA. Murus . a a. Crassitudo. B B. Agger. DD. Turrus. LE. ĂŻnterior turrium murus divisas . FF. Itinera contignata. GG. Fundamenta transversa conjuneta exteriori et interiori pectinatim quemadmodum serrĆ dentes. Mur simple. Largeur du mur simple, Rempart. Tours. Le mur des tours qui est interrompu du cĂŽtĂ© de lâintĂ©rieur de la ville. Pont-levis. Mur en forme de dents de scie qui lie le mur extĂ©rieur AA avec le mur intĂ©rieur GG. FIGURE III. Plan du fondement sur lequel on doit Ă©lever un rempart. Chap. 2 , Liv. YI. AA. Fundamentum. Fondement. BB. Anterides sive erismoe. Contreforts ou Ă©perons. HH. Fentes cçnjnncti muro serrali/n. Mur en forme de dents de scie. J PI. I. -4M*** AXJ3!TBB- LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. 4i 3 PLANCHE III. FIGURE 1.â DiffĂ©rentes maniĂ©rĂ©s de bĂątir des Anciens. Chap. 3 et 8 , Liv. IL Le pentadoron ou brique de cinq palmes. Sa demi-brique. Le leiradoron ou brique de quatre palmes. Sa demi-brique, ou bien le didoron , câest-a-dire , la brique de deux palmes, Maçonnerie en briques. â en pierres de taille. â isodome , câest-Ă -dire , dâĂ©gale structure. â pseudisodome , câest-Ă -dire , dâinĂ©gale stucture. â lâirrĂ©guliĂšre. â la maillĂ©e. â en remplissage. â en pierres Ă deux paremens qui traversent le mur. FIGURE IL Les premiĂšres habitations des hommes, lorsqu ils Ă©toient encore barbares. Chap. i , Liv. IL. Maisons faites avec des poutres, de la paille et enduites avec de la terre grasse. Maison des liabitans de la Colchyde. Maison des habilans de la Phrygie, A. Parieles ex farcis erectis et çirgultis inter - positis j et luto tecti. B. Colchorum 1 / domus. C. Frigum / A. Pentadoron. B. Emilater. b Tetradoron. D. Didoron. E. Dater uni ordines. F. Structura quadrata. G. Isodoma. H. PseudisĂŽdoma. I. Incerta. L Rcticulata. M. Etnpleclon . N. Diatoni. ĂŒ \ l .!!!!l!!l!l!llĂŒl!lwi!l!jl!Hlwi**sw»H miwannuHmnnHiHiBĂ Ăźj^ tilllllllimillllllllllll lllllllllll IlIllIlHHIllllllItlIHU uiK»iiniiiHiiiiiiii âfflMM Ht^llIlimmilltUIlttN nififirntHI !KW HIIIIHHUIIIIIIItHUIII ittHunMMni iiBI»H»linflllUHmUIHI 4 iH»IHW WHDltlIUi B»!» f VRfr 'mm * Vâ- âmĂ©Mj fe»iilliiiBliiilimie /' âlt r ĂźigafiBS iiffliiijiĂ mmiiiiifgvgg; 49' L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. PLANCHE I Y. FIGURE I.âą Le corps humain placĂ© dans un carrĂ© . Les proportions se trouvent indiquĂ©es Ch. i, Liv. III. FIGURE IL Le corps humain placĂ© dans un cercle. FIGURE III. PiĂšces qui composent la charpente des toits. Chap. 2 , Liv. IY. Noms italiens. r a. Columen. Asinello. FaĂźtage, * b b. Transira. Asticcivole. Poutre de traverse. c c. Cantherii. Puntoni. Les forces. dd. Capreoli. Razze. Les contrefiches. e e. ColumnĂŠ. Monachi. Le poinçon. ff. Templa. Paradossi. Les pannes. SS- Asseres. Panconcelli. Les chevrons. b h. TegulĂŠ. Tegole. Les tuiles. 3N. Triglyphus. Trigiifo. . Trl g ] yr lie - O. Intertigmum , sive Metopt a. Meiopa. Metope. FIGURE I V. Mur de cloison fait avec des entrelacs. Chap. 8 , Liv. II. Chap. 3 , Liv. YII. AA. Arrectaria. Les montants. BB. Transversaria. Les travers. CC. Priores cannĆ perpĂ©tuas. Premier rang de cannes. DD. Lutum. Enduit de terre grasse. EE. SecundĂŠ cannĆ. Second rang de cannes. FF. Tectorium. Enduit de stuc. ^ G. Solum. Empalement un peu Ă©levĂ© sur le sol d5 !' ^ ^ ÂŁ I J J ' S3 ^ "S 2j -I -S -S * A *. fc* ^ J. IB"! I Hvn\m âąâą*.âą ; »;!' âą; *m' jjéßHia i»llfli!P '' i&â âą. $4 LâARCHITECTURE DE VITRUVE. PLANCHE XI. L' O R D R E DORIQUE. Chap. 3 , Liv. IV. FIGURE I." A. Columna XX stries plants. C. Capitulant. i. Cymatium. а. Abacus . 3 . Echinus. 4 . Anuli. 5 . Hypotrachelium. б. Aslragalum cum Apoplrygis, F ] D» Epistylium. 1. TĆnia. 2. GuttĆ. 3 . RĂ©gula. E. Zophorus, a. Triglyphus. ' 4 * Femora. 5 . CanalicuH. 6. Scmicanalicuh. b. Me topa. c. Semimetopia. 7. Capitulum triglyphi. 8. Cymatium doiicum. g. Corona. F I 1 5 . GuttĆ. 16. Fulmina. 17. ViĆ. 10. Menlum. ig. Scolia. 20. Lacunaria. F I Colonne avec 20 cannelures pleines. Le chapiteau. La cymaise. Lâabaque ou le tailloir. Lâove ou quart de rond. Les annelets. Le gorgerin. Lâastragale avec le listel. G U Fi E I I. Lâarchitrave. Plate bande. Les gouttes. La tringle. La frise. Le triglyphe. Les rĂšgles. Les canaux. Demi - canaux. MĂ©tope. Demi-mĂ©tope. Le chapiteau du triglyphe. La cymaise dorique. Le larmier. G U R E III. Les gouttes. Foudres sculptĂ©es dans le plafond. Plates bandes en relief. Dessous de la gouttiĂšre. Ixainure. Plafond. G u R e 1 v. Les entrecolonnements de ĂŻordre Dorique. Chap. 3 , Liv. IV. FIGURE Y. Chap. G G. Ostium doricum lifore. 1 . 4 * Antepagmentum. 1. Super cilium. 2. Hyperthyrum. 5 . Corona plana. 5 . PrujecturĆ d extra , ac sinistra, 6. Scapi cardinales. . Replum. . Tympanum. g. Impages. , Liv. IV. Porte dorique Ă deux battants. Le chambranle, 4 jambes du chambranle. Lâarchitrave du chambranle. Lâhyperliron , ou bien le dessus de porte avec une cymaise dorique et une astragale lesbien. La corniche plate. Saillies que fait lâarchitrave Ă ses deux extrĂ©mitĂ©s. Les maĂźtres montants de lâassemblage. La plate bande ou feuillure. Les panneaux encadrĂ©s. Les piĂšces de traverse de lâassemblage. W RHI^iĂźHĂŒĂŒ Ă! $ a G. II. L'ORDRE 10NIQ UE et les parties qui le composent. Chap. 3 , Liv. III. FIGURE L" Eexplicalion^j^es lettres A. B. G. H. E. F. a Ă©tĂ© faite dans les deux planches prĂ©cĂ©dentes. Ostium ionicum qucidrifore. Porte ionique Ă quatre pans. Protyrides. Console. Chap. 6 , Liv. IY. Les renvois i. 2 . 3. etc, , sont les mĂȘmes que pour la PI. XI, Jig. i. re , ou ils ont Ă©tĂ© expliques. F I G U R E I I. 1. 2 . 3. 4. B. 2. 1. 2 . 3. Ăź. 2 . 5. 4. 5. e. 7- 8 . 9- Ăźo. 11. a. 12. 13. 14. Elle BctsĂźs ionica. Piinthus. for Us. Trochilus superior. Trochilus inferior. Basis atticurges. Piinthus. Torus inferior. Scotia. Torus superior. Abacus. Oculus volutĆ. Canalis cum incarpis. PulviiĂŻorum balthei. Axes. Echinus. Cymatium 1 > , A. . > epislylu, Fctscice Cymatium zophoti. Denticuli. Intersectio. Sima. . Capita leoninci. Corona. Base ionique. Le plinthe. Le tore. - La scolie supĂ©rieure. La scolie infĂ©rieure. Base attique. Le plinthe. Le tore infĂ©rieur. La scolie. Le tore supĂ©rieur. FIGURE III. Lâabaque. La volute. LâĆil de la volute. Creux avec la guirlande. Ceinture de lâoreiller. Lâaxe. Lâove. La cymaise I -, ,, . âą T i V de i architrave. Les laces J Cymaise de fa frise. Le denticule. Intervalle. La corniche. TĂȘtes de lions. Le. larmier. FIGURE I Y. Description de la volute. se trouve dans le Chap. 2, Liv. III du texte, dans les notes et remarques Ă la fin de ce FIGURE Y. Distance des entrecolomements eustyles , tetrastyles et octastyles . ,Ghap, 3, Liv. III, chapitre. FĂjO. Ip. lfef~ If j 11111111 l U MP'i il Fut. 3. Ă©^t . ' X ^Ă bĂč-Ăźmi 3 1 1,1 Fia. z SttTĆ mmiT 5 i 3 LâARCHITECTURE DE YITRUYE. PLANCHE X I I I. L' O R D R E CORINTHIEN. Chap. i , Liv. IY. FIGURE I. re Les lettres A. B. C. D. E. F. sont expliquĂ©es planches X et XI. FIGURE IL Plan et Ă©lĂ©vation du chapiteau corinthien. FIGURE III. Chapiteau des colonnes du temple de Jupiter tonnant au Capitole. FIGURE IY. PiĂ©destaux formant des saillies appelĂ©es scamilli impares. Chap. 3 , Liv. III. FIGURE Y. 1 Moyens de joindre dans les angles du fronton, la cymaise de la corniche. Chap. 3, Liv. III. F I G'U RE VI. G. Ostium atticurges valvalum , Porte Attique nâayant quâun battant. Chap. 6, Liv. IY. Les chiffres i. 2 , 3. etc.; sont expliquĂ©s PI. XI, Jig. i. re . i. 1 ! i ! âą M ; 1 I lljnill 'i'. 5x5 LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. PLANCHE XI Y. Plan du forum et de toutes ses parties adjacentes. Chap. i A; Forum. MM. A dit us. jNN. TabernĆ. L. ScalĆ. B. JBasilica. C. ChcdcidicĆ. D. Ădes Augusti. E. Pronaos. F. Tribunal. G. Templum Jovis. H. Curia. I. Ărarium. KK. Carcer. ii. 12. Lignes sur lesquelles on a pris les coupes du suivante, qui est la XV. ĆQ et 2 , Liv. Y. Le forum ou le marchĂ©. Les entrĂ©es. Les boutiques. Escaliers pour monter Ă lâĂ©tage supĂ©rieur, La Basilique. Les chalcidiques. Le temple dâAuguste. Avant-temple. Le tribunal. Le temple de Jupiter. La maison de ville. Le trĂ©sor public. Les prisons. forum, et celle de la basilique qui sont gravĂ©es dans la planche / '/. juv; i 7 L'ARCHITECTURE DE VITRUVE. PLANCHE X V FIGURE I.âą Chap. i, Liv. Y. Coupe du Forum 7 prise sur la ligne 1 . 1 . du plan qui se trouve dans la planche prĂ©cĂ©dente, ou toutes les lettres qui se rapportent h celle-ci sont expliquĂ©es. FIGURE II. Chap. 1 et a , Liv. V. Coupe du Forum,, de la Basilique et du Temple , prise sur la ligne 2 . 2 . de la planche prĂ©cĂ©dente, oĂč toutes les lettres qui se rapportent Ă celle-ci sont expliquĂ©es, exceptĂ© cependant les chiffres suivants. 1. 3. ParastratĆ altos pedes 20. 2. 2. Allas parastratĆ pedum 18. 5 . 3 , Spatia relicta luminibus. 4 . 4 . Trahes ex tribus tignis bipedalĂŻbus. Pilastres hauts de 20 pieds. Autres pilastres hauts de 18 pieds, fluide des fenĂȘtres. Architrave composĂ© de trois poutres de deux pieds cVĂšpaisseur. FIGURE III. Chap. 10, Liv. Y. Vianet coupe reprĂ©sentant lâintĂ©rieur dâune salle de bain. A. Balneum. a. a. Labrum. d. d. Alveus. 13 . Schola. C. Gradus. e. e. Pluteum. Le bain;, Le bord de la baignoire. La loge. Lieu oĂč lâon attend avant dâentrer dans le bain. Bains qui rĂ©gnent tout autour. Balustrade. FIGURE IV. Chap. 10, Liv. V. . i ULâH I ^iĂâl 5 i 9 LâARCHITECTURE DE YITRUVE. PLANCHE. XVI. FIGURE I.â Plan du théùtre des Romains. Depuis le Chap. 3 , jusquâau Chap. 9 , Liv. Y. K. Spatia ad ornatus comparata. L. Itinera versurarum. M. Trigoni versatiles. N. Portions posi scenam. O. IlypĂŠthrĆ ambulationes. suivant les diverses espĂšces de scĂšne. Passages dans les cĂŽtĂ©s de la scĂšne. Machines triangulaires , sur lesquelles sont peintes les dĂ©corations pour les trois changements de scĂšne. Portique derriĂšre la scĂšne. Promenoir dĂ©couvert. FIGURE II. Coupe du mĂȘme théùtre sur la ligne XX. du plan. Ce sont les mĂȘmes lettres que dans le plan , puisqu âelles indiquent les mĂȘmes parties ; on oient de les expliquer ci-dessus ftg. qui est celle du plan. PP. AperturĆ cellarinn, in quitus vasa Ćrea. Ouverture des cases dans lesquelles on pĂźaçoit les vases de bronze. FIGURE III. 1 Vue de la scĂšne. tt Les lettres sont encore les mĂȘmes que dans le plan ; celle qui indique un objet dans le planlâindique aussi dans lâĂ©lĂ©vation voyez ci-dessus Jig. i. re a. Podium. b. ColumnĆ inferiores. c. ColumnĆ superiores. - PiĂ©destal. Premier rang de colonnes. Second rang de colonnes* r -, -dĂštjf' A. Orchestra. Lâorchestre. j G. Proscenium. La scĂšne. B. Gradus. DegrĂ©s servant de siĂšges. i 1 r C, PrĆcinctio. PrĂ©cinction_, ou pallier semi-circulaire. D. Portions. Portique supĂ©rieur. '.j E. ScalĆ inter cuneos. Escaliers qui sĂ©parent les amas de degrĂ©s servant de siĂšges. ? 1 F. Aditus. Passages. li H. ValvĆ regiĆ. Porte royale. Porte des Ă©trangers. X _ 1 f 1 1 f _ . âą ? _ 1 . . . L Hospitalia. PI. XVI. _ in'font Ăżj . Mm MnwTHilirhHmHiiwwnwmiHiiHiiiiimirimrtintiiHimHiiumumĂźiiHinniiminnimi rtH WHHHW B âfss ^HUHIIIIHIHIHIIIIIIItlIlllimi fMlM jk iu ,m*jJ 152 521 L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. PLANCHE XVII. FIGURE I.â Vlan du théùtre des Grecs. Depuis le Chap. 3 , jusquâau Chap. g , Liv. V. our quâon puisse comprendre plus aisĂ©ment comment lâon construisoit les théùtres, jâai divisĂ©, en quatre sections , la partie de ce plan , qui, sans cela , auroit Ă©tĂ© absolument la mĂȘme que dans le théùtre des Romains , reprĂ©sentĂ© dans la planche prĂ©cĂ©dente. La premiĂšre division , depuis a , jusquâĂ b, montre le plan infĂ©rieur, par consĂ©quent, les entrĂ©es de lâorchestre, par les passages ff. La seconde depuis b , jusquâĂ o, indique le plan pris au niveau de la premiĂšre prĂ©cinction ; on y voit les escaliers II, par lesquels on monte Ă cette prĂ©cinction. Dans la troisiĂšme., câest-Ă -dire, depuis c , jusquâĂ d, on voit la direction des escaliers qui conduisent au portique supĂ©rieur, oĂč se plaçoient les dames. Par les escaliers 33 , on montoil jusquâĂ 44 ; et par ceux 44 , jusquâĂ Ă5. La pointe des flĂšches, qui sont placĂ©es sur les escaliers, indique leur direction en montant. Finalement, la quatriĂšme division, depuis d , jusquâĂ e, indique le plan de lâintĂ©rieur du portique dâen haut, et le circuit que forment les siĂšges. FIGURE IL Trois Coupes diffĂ©rentes , prises dans les degrĂ©s ou siĂšges des théùtres. I. Coupe de la premiĂšre division a b, qui reprĂ©sente les passages pour se rendre dans lâorchestre. II. Coupe de la deuxiĂšme division b c, qui fait voir comment on montoit Ă la premiĂšre prĂ©cinction. III. Coupe de la troisiĂšme division c d , qui fait voir tous les escaliers qui conduisoient au portique supĂ©rieur. FIGURE III. Partie des siĂšges ou degrĂ©s BB. sur lesquels on Ă©toit au théùtre, et des escaliers EE. pour y parvenir, gravĂ©s sur une plus grande Ă©chelle. FIGURE IV. Vase de bronze renversĂ©, dont le bord du cĂŽtĂ© de la scĂšne est soulevĂ© par un support , qui ne peut avoir moins dĂ© un demi-pied de haut. 11 iiillĂŒi 1 ksiiii 523 L'ARCHITECTURE DE V I T R U V E. PLANCHE X Y I I I. Vlan dune palestre comme on les construit en GrĂšce. Chap. ii, Liv. 1Y. Ă. Peristylia quadrata duorum stadiorum. I, 2. 3. TrĂšs porticus simplices. 4. 4. Porticus duplex. BB. Exedrge spatiosĆ. C. EphĆbeum. D. Coriceum. E. Conisterium. F. Frigida lavatio. G. TlĆothesium. H. Frigidarium. J. lier in propnigeum. L. Propnigeum. M. Concamerata sudatio. N. Faconicum. O. Calida lavatio. Les dehors 5. 6. 7. Porticus Li'es. 6. Porticus duplex. 7. Xistus. aa. MĂ rgines sive semitĂŠ. bb. Medium excavatum. cc. Gradus bini. QQ. SilvĂŠ. !Ppy S'»\â~' ss%n W&R Lâ ARCHITECTURE DE VITRUVE. PLANCHE XX. Plan dune Maison Grecque. Liv. YI, Gyneconitis. A. Itinera non spatiosci s eu tyrorion. B. Equilia. C. Ostiariorum cellos. D. JanuĆ inter tores. E. PeristyĂźion . i. 2 . 3. TrĂšs portions. 4. 4. AntĂŠ spatio cimplo distantes. F. Prostas seu Parastas. G. Eci magni ad lanificia. ' HH. Thalami. II. Amphithalami. KK. Triclinia quoiidiana , cubicula , et cellĆ familiaricĆ. Andronitides. 4 L. Peristylia latiora. M. Vesiibula egregia. N. Triclynia cizycena et pinacothecĆ. O. BibliothecĆ. P. ExedrĂŠ. Q. Eci quadrati. BR. ITospitalia. SS. MesaulĆ. Chap. io. Habitation des femmes. Petit passage. L J Ă© curie. ' La loge du portier. Les portes de lâintĂ©rieur. Le pĂ©ristyle. Trois portiques. Deux pilastres trĂšs-Ă©loignĂ©s lâun de lâautre. Prostade, ou grande loge ouverte par-devant. Grande salle servant dâouvroir pour y filer de la laine. Chambres Ă coucher. Antichambres. Tricline ou chambre Ă manger journaliĂšre , et habitation pour les servantes. Habitation des hommes. PĂ©ristyle beaucoup plus spacieux. Vestibules magnilicptes. Salles Ă manger nommĂ©es cizycĂšnes, et cabinets de tableaux'. BibliothĂšques. Salles pour recevoir , et pour y faire la conversation. Salles carrĂ©es. Habitation des Ă©trangers. Passages. r-denm erdeMi J0 Ăź *?»? *$& ĂŒĂŒ u ;i !i!Vi'iĂiiUl'ljj!! ' i '" ' ' *^ 1 ââ ' 1 * 11 ! !}j. &ĂŒiĂźiĂŒTf^j;!jjj 3t PLANCHE XXII. La cour Corinthienne . Chap. 3 et 4-? Liv. VI; Ce sont les mĂȘmes lettres , et elles indiquent Us mĂȘmes parties que dans la planche prĂ©cĂ©dente , oĂč on en trouve Vexplication. iliĂli 'iVs' 533 LâA R C II I T E C T^U RE DE V I T R U V E, PLANCHE XXIII. Les acqueducs. Chap. 6 et 7 , Liv. VIII. FIGURE I. re Dioptra. LibrĆ aquariĆ. Chorobcttes. AA.. RĂ©gula peclwji XX. Ancones. Lâalidate. FIGURE II ET IIL Les niveaux dâeau, FIGURE IV. Le cliorobale. âąRĂšgle de 20 pieds. Bouts de rĂšgles encastrĂ©s daus la premiĂšre, et formant avec elle des angles droits, BB. Trans vers aria. Travers. CC. LineĆ acl perpendiculum sub partibus DD. Lignes perpendiculaires que doivent couvrir les plombs DD. FF. Canalis pedum V, Canal long de 5 pieds. F I G U R E V. C hap. 7, Liv. VIII. A. Rivus. B. Specus sub terra . ' ' C. Putei. D. Columnaria . E. Sctxa rubra in geniculis. EE. Venter , en grec J Ccifaci. F. Substructio. G. Decursus. H. Expression I. Arcuatio. KK. Castella. * ÂŁj- Castellujn ad jnĆnia cum, triplici immissario. Conduit dâeau. Conduit souterrain. Puits. Ventouses. Pie rres rouges quâon emploie pour former les angles. Ventre, on nommoit ainsi la partie du conduit qui occupoit le fond de la vallĂ©e. Substruction pour maintenir lâeau de niveau dans le fond de la vallĂ©e. Descente du conduit sur la pente du coteau. MontĂ©e du conduit sur le coteau opposĂ©. Arcades. Regards. Regard ou chĂąteau dâeau, bĂąti contre les murs de la ville , avec trois Ă©missaires. Et1^ pĂšv ,-vA? »4ĂW ^ i%^ SS5r â- ' 5 CK ttTJ;. ,- l v =ĂąstÂŁÂŁ3t oiisuw U ph»1 t M jjj4N L^ jJj i U S 3 9 L'ARCHITECTURE DE VITRUV1 PLANCHE XXVI. FIGURE I". Chap. 3. Liv. X. Machine appelĂ©e la chéçre , vue au moment ou on l'Ă©lÚçe. FIGURE IL Chap. 4 -1 Liv. X. Vue de la chéçre quand elle est dressĂ©e. Les poulies } qui sont les mĂȘmes dans ces deux machines } y sont indiquĂ©es par les mĂȘmes lettres. A. A. A. Tigna tria. B. Fibula. C. Trochlea y sive Rechamus. D. Duclarius funis. E. Trochlea inferior. F. Foramen , in quo caput funis religatur. G. G. Chelonia. II. Sucula. II. B ina foramina in quoe convenire possint K. K. vectes, L. ForfĂźces feçrei. M. Retinacula, N. PĂąli resupinati. O. Palus cum trochleĂą. P. Rota sive tympanum. R. Ergata. Les trois poutres qui la composent. La cheville qui les assemble par le haut. Poulie ou moufle. Cable pour tirer. Le moufle de dessous. Anneau dans lequel on attache lâextrĂ©mitĂ© du cable. Les amarres. Le moulinet. Deux trous percĂ©s aux deux extrĂ©mitĂ©s du moulinet pour y placer K K. les manivelles. Tenailles de fer. Les cordes qui retiennent la machine y comme les haubans tiennent le mĂąt dâun navire. Pieux inclinĂ©s , enfoncĂ©s dans la terre. Pieu avec une poulie. Roue ou tympan. Yindas. Trispastos. FIGURE III. Machine Ă trois poulies. FIGURE IV. Pentaspaslos. Machine Ă cinq poulies. FIGURE Y. Polispastos . Machine Ă plusieurs poulies. Q. TrochleĆ cum duplicibus ordinibus orbiculorum. Moufle ayant deux rangs de poulies. S. TrochleĆ cum ternis ordinibus orbiculorum. Moufle ayant trois rangs de poulies» \FĂč/. 3 a3 a wmmm R. &&ÂŁâą âą*»>»***.- Wm ĂŻsgSEr JltAa 4 Sil LâARCHITECTURE DE V I T R U V E. PLANCHE XXVII. FIGURE I.» Chap. Polispastos. A. Tignum. MM. Retinaculci. y. Tertia trochlea sive arlemon . G. Chelonici T. RĂ©gula longa pedes duos . 5, Liv. X. Machine ayant plusieurs poulies. Poutre dressĂ©e et retenue par des cordes comme les haubans tiennent le mĂąt dâun navire. TroisiĂšme moufle , autrement dit moufle ajoutĂ© aux autres. lies amarres. RĂšgle longue de deux pieds. FIGURE II. Chap. 6 , Liv. X. S Moyen employĂ© par Ctesiphon pour transporter les colonnes . eta. Scapi irons versarii. bb. Scapi longi. ce. Codaces. dd. Baculi ilignei. PiĂšces de bois placĂ©es en travers. PiĂšces de bois placĂ©es de long. Roulons de fer. Petites piĂšces de bois placĂ©es diagonalement dans les angles, pour fortifier la machine. F I G U R E I I I. Chap. 6 , Liv. X. I Moyen employĂ© par MĂštagene pour transporter les piĂšces de Ientablement. FIGURE IV. Chap. 6, Liv. X. !Moyen employĂ© par Paconius pour transporter la base de la statue colossale d'Apollon. % Wxxm />,/ / FujJV. cCSS-r?' /rjJ ^âą^.V'A'; Vi_I»C .v\ V ^.ÂŁ1 ^'W, **= Fis/. m. ^Fu/ // Ă**'* t 5 > Wj mm &fM i y;-// 7 i/ffl WM Ft\yfc. Iggg HĂŒ mmm mmmmm ĂȘsmm v»»v**v.**v*vv KH ill ia yjiĂĂmit-L 543 L'ARCHITECTURE DE V I T R ĂŒ Y E. PLANCHE XXVIII. La Catapulte. Chap. i 5 , 16 , 17 et 18, Liv. X. A A, Tabules in summo et in imo capituli. B B, Les piĂšces de bois qui sont au liant et au Parastatas dextrci ac sinistrĂ . C C , Anguli qua- bas du chapiteau. B B. Les poteaux qui sont Ă tuor qui sunt circcl in lateribus et frontibus , droite et Ă gauche. C C, Les quatre angles , quij, laminis ferreis et clavis conjixi. tarit sur les cĂŽtĂ©s que sur les devants , sont garnis de bandes de fer. D D. Canaliculus , syrinx dictas. Le petit canal nommĂ© syrinx. E E. RĂ©gulas duĆ in quas inclitur sucula. Tigna Les. deux rĂšgles dans lesquelles passe un moulinet ; longitudine amplissima dicitur. elles sont formĂ©es de deux longues piĂšces de bois. E F. CheloniĆ quĆ supra tigna figuntur ? et in Les amarres quâon attache sur ces deux longues quibus inclucluntur suculĆ. G, Bucula, scamil- piĂšces de bois, et dans lesquelles on passe des lum vocata , securiclatis cardinibus fixa. H. moulinets. G. Le Buscula ou scamillon , joint par Scutula. I. Epiloxis. des tenons Ă queue dâhirondelle. K. Chelo , sive manucla . L. Canalis fiundi. Le clielo ou manucla. L. Le canal qui est en bas. M. Columella. La petite colonne. N. Subjectio , Eschara dicta. Le chevalet appelĂ© la grille. Os'Chelonium , sive pulvinus ^ quod est supra mi- Le chelonium ou coussin qui est au-dessus delĂ norem columnam quĆ GrĆce antibasis dicitur. petite colonne nommĂ©e en grec antibase. c. Subjectio. Le chevalet. Q. Sucula. B.. Brachii radix. S. Brachii summum. Le moulinet. R. Le bas des arbres. S. Le haut des arbres. TT. Modioli Ćnei qui in capitula includuntur. Les barillets de cuivre enchĂąssĂ©s dans le chapiteau de la catapulte. Ce chapiteau, quâon a gravĂ© sur une plus grande Ă©chelle , se place entre les deux poteaux BB, oĂč U est reprĂ©sentĂ© en petit. XXJ 71/ Asphalte , voyez Bitume. A rrirXyvov, herbe qui consume la rate , 33. Asseres , les cbevrons, 149 , 32i. Asseum , lieu" pour faire suer dans les bains , 241. Astaboras et Astacobas , sont deux fleuves de lâAfrique , 36o , 363. Assiette pour coucher lâor , 337. Astragale , m. LâAstragale de la colonne ionique nâappartient, point au chapiteau, 134- LâAstragale lesbien , 167. Astronomie !â est nĂ©cessaire Ă un architecte, 6. Astrologie T est prise par Vitruve pour l'astronomie , ibid. Les prĂ©dictions merveilleuses des Astrologues , 4^4- nG. Asty , voyez AthĂšnes. Ateliers pour les tapissiers et les peintres, 280. TABLE DES AthĂšnes , les Grecs la nommoient Asty , câest-Ă - dire, la ville , 3oi. Atiios le mont , proposĂ© Ă Alexandre pour ĂȘtre taillĂ© en forme d nomme, 5a. Atlas , espĂšce de Charialides , 287 , 288. Atomes de DĂ©mocrife , 56. Atramentum, noir de fumĂ©e, 344, 35a. Atrium , signifie une cour et jamais un vestibule, comme Perrault lâa cru abusivement , 274. Est le synonyme de Qwrnn Ădhim , ibid. Atticurge, base atticurge , 118. Ses proportions et ses formes sont toutes harmoniques , 128. Aubier. , ce que câest , 8g. Auguste est lâEmpereur Ă qui Vitruve dĂ©die son ouvrage, 1 et suivantes. Il aimoit lâarchitecture ; il fit Ă©lever beaucoup dâĂ©difices Ă Rome, ibidem. On lui a rendu des honneurs divins avant sa mort, 3. Avoit un temple Ă Fano , ibid. igo. Au la , explication de ce mot ,son Ă©timologie, 287. Aune , arbre , 84. Avocats les doivent ĂȘtre bien logĂ©s , 280. Aurelius , chargĂ© avec Vitruve dâentretenir les machines de guerre , 2. Autels les doivent ĂȘtre tournĂ©s vers lâOrient 180. Les autels des dieux du ciel doivent ĂȘtre hauts , et ceux des dieux de la terre et de la mer doivent ĂȘtre bas , 186. Automates , 121. AutoritĂ© T est un des fondements de lâarchitecture , i3 , 27. Axe de la volute ionique , 120. Axe , une ligne dans lâAnalemme , 4*8. ailpjov le lendemain , 45. AzurĂ© artificiel , 345. AzurĂ© naturel , ou lapis lĂŒzuli , ibid. B. bĂątie debriques et de bitume, 3g, 4i , 367^ Bains les doivent ĂȘtre tournĂ©s au couchant i4» 23g. Bains des maisons de campagne , 282. Le fourneau qui Ă©chauffe les bains, i3g. VoĂ»tes des bains, a4o. Grandeur et proportion des bains, ibid. Leur reposoir et leur corridor, ibid. Le bain appelĂ© Lalron , 246. Balance romaine, ou peson, 445. Baliste et Catapulte sont souvent pris pour une mĂȘme machine par les auteurs latins , 455* Baiiste , machine de guerre , 5. Son chapiteau , 467. Grosseur des cables qui bandoient les balistes, ibid. Explication de la structure des balistes, âą* 468. Les proportion du trou de la baliste , 4674 Balle que lâon faisoit rouler dans les fourneaux des bains , pour juger sâils avoient la pente nĂ©cessaire , 23g. Baltens , ceinture de la volute ionique ? ĂŻ3l â Balustre de la volute ionique , ibid. Banauson , genre de machine 7 43** MATIERES. 54G Barillets, ou corps de pompe dans la machine de Ctesibius, 454- Bans la machine hydraulique des orgues , 455, 458. Barillet dans le chapiteau de la catapulte et dans celui de la baliste , 47°. BarriĂšre , 288. Basiliques les 18g. La basilique de Fano bĂątie- par Vitruve , zgo. Les basiliques Ă©toient pour les marchands et pour y rendre la justice, ibid. Basilique julienne Ă AquilĂ©e , ibid. Base la dâune colonne reprĂ©sente la chaussure dâune femme, i4i. Pourquoi elle âest appelĂ©e Spira , i44. Sa saillie appelĂ©e Ephoru , 118. Base atticurge , ibid. Base ionique , ng. Les colonnes anciennement nâavoient point de bases, 14. BeautĂ© la dâun Ă©difice dĂ©pend sur-tout de la proportion , g4- Belier , machine de guerre pour abattre les murs des villes que lâon assiĂšge , 3g. Sa premiĂšre invention , 471. Il Ă©toit enfermĂ© dans une tortue , 472. On appeloit criodoche la machine Ă belier, 473. Description du belier , 478. Sa pesanteur , 479- Bergeries les, 283. Berose , chaldĂ©en, rĂ©pand son systĂšme astronomique en Asie et dans la GrĂšce , 4°3, 4*4* Bes , partie de lâas , ga. BibliothĂšques les doivent ĂȘtre exposĂ©es au levant , i4 , 27g, 286. BibliothĂšque la des rois Attaliques Ă Pergame, 2g8 , 307. Celle du roi PlolomĂ©e Ă Alexandrie , 2g8 , 307. BiensĂ©ance la dans lâarchitecture, 12, 25. Bi fores , des portes Ă deux battants, 175. Bitume sert de mortier aux murs de Babylone, 3g , 4i , 366. Bitumeuses les causes purgent, 365. Blancheur la est superbe , 3i8. Bleu le des anciens, 345. Bleu dâoutremer , ibid. Bois Ă bĂątir , 82. Le temps propre pour le couper , ibid. Bois de platanes , 247. Borax, 347. Bouclier pour fermer lâouverture qui Ă©toit au haut des Ă©tuves , 244. Bras , ou arbres des catapultes et des balistes , 465 et suivantes. Briques non cuites , 5g. EmployĂ©es Ă des murs qui doivent soutenir des terres , 57. Orr les lais- soit sĂ©cher cinq annĂ©es avant que de les employer , ibid. Plusieurs Ă©difices de Rome et de la GrĂšce , bĂątis de ces briques crues , 5g. Quand elles sont bien sĂšches , elles nagent sur lâeau, 58. De quelle terre, en quel temps et de quelle forme on doit faire les briques, 57. Il y avoit trois sortes de briques , ibid. On mĂȘloit de la paille ou du foin avec la terre dont on les faisoit , ibid. Les Ă©difices de briques sont estimĂ©s durer davantage que ceux qui sont bĂątis de pierres , 75. 11 y a quantitĂ© de beaux palais anciens qui ne sont bĂątis que de briques, ibid. 547 TABLE DES Bruit le ne frappe point lâoreille par des cercles qui se font dans Pair agitĂ©, aoo. Les vĂ©ritables causes du bruit, 204. Bru ma , le temps de lâannĂ©e oĂč les jours sont plus courts , 4o8. Buccula , tringles de bois dans la catapulte , 464* Explication de ce mot , ibid. Buis , 34* c. Cabanes de la Coichide, 54- Celles des Phrygiens, ibid. La cabane de Romulus , couverte de chaume , se voyoit encore Ă Rome du temps de Yitruve , 55. K Cabinets de tableaux doivent ĂȘtre tournĂ©s au septentrion, 38o. Proportions des cabinets de conversation, 37g. Cabinets de tableaux, ibid. Cables faits de cheveux de femme ou de boyaux pour les balistes , 467. Cadrans au soleil , iij. Les anciens en avoient de plusieurs sortes , savoir lâHemicycle, la Scaphe, lâHĂ©misphĂšre, le Disque, lâAraignĂ©e, le Plinthe, le Prostahistoromena, le Prospanelima, le Pele- cinon , le Carquois, le Gonarque, lâEngonate, lâAnliborĂ©e , le CĂŽne, etc. 4 2 °- Calculi Rotundi , 4 22 - Caldarium , partie des bains , 243. Callimaque invente le chapiteau corinthien , Camahieu , 335. CamĂ©ra , voĂ»te , 3i6. Camillem , une des piĂšces de la catapulte, 464» Camaisseur, ibid. Ils Ă©toientdedeux maniĂšres, ibid. Les degrĂ©s des théùtres, 199, 223 . Leur hauteur et leur largeur , 200 , 228» Proportion de la hauteur des degrĂ©s des escaliers prise du triangle rectangle de PyĂźagore , 3 g 3 . DeliqĂŒ iĂŠ , les toits qui rejettent lâeau en dehors, 271. Deeubra , XII . Drlumbata Lacunaria , des planchers en voĂ»te surbaissĂ©e , 273. DeMETRIUS P O L l O R C. ETES , /,82. DĂ©mocrite a Ă©crit, un livre de physique. , il mettoit les atomes pour principe de toutes choses, 56 . "Vitruve lui attribue la composition des constellations , 4-i 4- D enier composĂ© de dix as, 92. Denticule , 122 Dans lâordre dorique du théùtre de Marcellus , 27. La hauteur du denticule de la corniche ionique, 122. Proportions de sa coupure , ibid. Les denticules reprĂ©sentent les bouts des chevrons, i48. lis ne doivent point ĂȘtre mis sous les modifions , 148. Depalatio , situation du gnomon, 4 J 7 - Dextans, dodrans ,. portion de lâas, 9a. Diane dâEphĂšse, quel Ă©toit son temple, 1 4 1 âą Diane templede magnĂ©sie, 18, 3 oo. Diapason, octave, 214. Diapente, quinte, ibid. , 107. Di atessaron, quarte, 2i4- Diathyron , barriĂšre , 288. Diatonique, genre de chant, 207. U/atonous , pierre Ă double parement, 74* Diaveon, 246. Diazomata , les prĂ©cinctions des degrĂ©s des théùtres, 2o3. Dichaeea , petite piĂšce de monnoie, 92. Diooron , sorte de brique , 57. DiĂšse , 207. Diezeugmenon , tetracorde disjoint, 209. Diminution des colonnes, diffĂ©rente Ă proportion de leur hauteur, no. Raison de cette diffĂ©rente diminution , ibid. ManiĂšre pour tracer la diminution des colonnes, 116. Diminution des colonnes Ă lâĂ©gard lâune de lâautre, lorsquâelles sont mises lâune sur l'autre, 189. Dimoeron , portion de lâas , 92. DinocrĂątes , architecte dâAlexandre, 5 i. BĂątit la ville dâAlexandrie , ibid. Diognete, architecte maltraitĂ© par les Pihodiens, et bien vengĂ© ensuite , 481 âą Dioptres, 376, 377. DipecaĂŻce , deux cubes, 12. Diplacion , portion de lâas , 92. DiptĂšre , 98. Disdiapason, double octave, 214» matiĂšres. DisPLvyiATĂŒM , lieu oĂč il pleut, 271. Disposition la dâun bĂątiment se reprĂ©sente de trois maniĂšres, 12. La disposition des colonnes est de cinq espĂšces selon vitruve, 107. La disposition dâun bĂątiment doit ĂȘtre diffĂ©rente selon les climats, 279. Disque, espĂšce de cadran au soleil, 420. Distribution la , dâun bĂątiment consiste- Ă©n deux choses, i4 , 27. Distribution la du dedans des temples, 161. DitonĂŒm ou Diton , 207. Dix le nombre de est le plus parfait, g 5 . Do ei via , 283. DĂŽme des temples ronds ou tolus, 184. Dorique origine de lâordre , x4o. La colonne dorique nâeut au commencement que six diamĂštres de hauteur, i 4 i. On lui en donna ensuite sept, ibid. Cet ordre est embaxrassant Ă cause des tri- gĂźyphes, i 52 . Lâordre dorique pour les temples est plus grossier que celui qui est pour les portiques de derriĂšre les théùtres, i 54 - Proportion des membres de la colonne dorique, x 53 . La corniche dorique , ibid. Les cannelures, x 55 . La porte dorique, 166, 169. Doublement des colonnes, 114. Doubler la maniĂšre de le carrĂ©, 391. DuretĂ© ce qui fait la des corps, 62,64. Doucine , 171. E. Eau, principe de toutes choses, selon Taies, 353 , Il nây a rien de plus nĂ©cessaire , ibid. , 3 y 4 - Elle est adorĂ©e par les Ă©gyptiens , 354 - Lâeau de pluie est la meilleure, 35 g. Comment on peut connoĂźtre !a qualitĂ© des eaux, 375. La bonne eau est celle dans laquelle les lĂ©gumes se cuisent aisĂ©ment, ibid. Les mauvaises eaux causent les maladies des yeux et des jambes, 366 . Celles qui passent par des lieux alumineux , sulfurĂ©s et bitumineux ne valent rien pour la boisson ordinaire, 36 x. Et gĂ©nĂ©ralement toutes les eaux minĂ©rales qui Ă©chauffent, sont absolument contraires Ă la vie , ibid. Les eaux sulfurĂ©es sont bonnes aux maladies des nerfs ; les alumineuses guĂ©rissent la paralysie ; les bitumineuses et les nitreuses purgent, 365 . Les eaux qui viennent des mines dâor, dâargent, de fer, de uivre , de plomb et des autres mĂ©taux , sont dangereuses Ă boire, ibid. Elles causent la goutte, ibid. Lâeau du fleuve Cidnus la guĂ©rit, 366 . Il y a des eaux qui ont une Ă©cume semblable Ă du verre rouge, ibid. Dâautres sont salĂ©es et produisent du sel, ibid. Dâautres sont huileuses, ibid. Dâautres ont une graisse qui surnage, qui a lâodeur du citron , 366 . Dâautres jettent de la poix , du bitume liquide et du bitume endurci, ibid. Dâautres pĂ©trifient ce quâon y jette, 367. Dâautres sont amĂšres, ibid. Dâautres sont pleines dâos de serpens> ibid. Dâautres ont une aigreur qui leur fait rompre les pierres de la 551 TABLE DES MATIERES. vessie, 369. Dâautres enivrent; dâautres font haĂŻr le vin ; dâautres font enfler la gorge ; dâautres endurcissent lâesprit, ibid. Dâautres font tomber les dents, 370. Dâautres rendent la voix belle, 373. Les eaux ne sont point naturellement chaudes, 36i. Toutes les eaux chaudes ont une vertu mĂ©dicinale, 365. Les moyens de trouver de lâeau , 356. Les signes par lesquels on connoĂźt les lieux oĂč lâon doit trouver de lâeau , ibid. La maniĂšre de conduire les eaux, 376, 378. Quelle pente il faut donner aux eaux pour les conduire , 379. On mĂȘle du sel dans lâeau des citernes pour la rendre plus subtile, 382. Ecclesiasterium , câest-Ă -dire , lieu dâassemblĂ©e. On nommoit ainsi le petit théùtre de la ville de Tralles, peint par Apaturius , 829. Echine ou quart de rond, i53. Proportion de lâĂ©chine du chapiteau dorique i53 , i58. EcpĂŒora , saillie des bases, 118. Saillie des parties de lâentablement, i58. Ecuries, 283. Edifices publics, comme on doit les placer, 4g- ElĂŠothesium , lieu oĂč lâon gardoit lâhuile pour les athlĂštes, ElĂ©mens, tout estjcomposĂ© des quatre Ă©lĂ©mens, 32. InventĂ©s par Pytagore , 35, 353. ElĂ©vation T gĂ©omĂ©trale, 20. Et lâĂ©lĂ©vation perspective , ibid. ElevĂ©s les lieux sont plus sains, 3i. Embates , module ou particule servant de mesure, 28, i53. Emplecton , espĂšce de maçonnerie , 74. Encabpi, vignettes ou guirlande du chapiteau ionique,' â *44- Enduits les doivent ĂȘtre faits avec de la chaux Ă©teinte depuis long-temps, 3o8. Ils doivent ĂȘtre de plusieurs couches, afin dâĂȘtre polis, 317. Enduits des lieux humides, 324., EnĂŒibata , vases de verre , 455. Engonate, espĂšce de cadran au soleil, 420. Enharmonique le genre, 207. Ennius , poĂ«te latin, en quel temps il vivoit, 2. Entablement , i34- Parties qui le composent, ibid. Entasis , renflement de la colonne , 110, 116, i3y. Entre-colonnement, x 10. Les entre-colonnements Ă©troits font paroĂźtreles colonnes plus grosses, 10g, Les entre-colonnements serrĂ©s plaisoient aux anciens, xi3. Proportions des divers entre-colonne» rnents , ibid. Epagon , moufle qui tire Ă soi, 44t* Eperon, 292. Epiikbeum , lâĂ©cole des jeunes hommes, EpuectoN, epidimoeron, epipentamoeron, epitritos, partie de lâas , 92. Epibatra , machine montante , 4-7^. Episcenium , le second Ă©tage de la face de la scĂšne dâun théùtre, 3a6, 32g. Epistyle, io 3, 134,277. EpitĂ©thĂšdes , les grandes cymaises, 123, x35. Epitoxis , piĂšce de la catapulte , 464- Epizygis , une des parties de lĂ baliste, 468. Equerre, la maniĂšre de la faire juste , inventĂ©e par Pytagore, 3g2. Equinoxes les et les solstices Ă©toient marquĂ©s par les anciens Ă la huitiĂšme partie des signes, 4og. Erastostene a mesurĂ© le tour de la terre, 44> 47- A inventĂ© le mĂ©solabe, 3g6. Eruca , chenille, 347. ErysmĂŠ , arcs-boutants, Ă©perons, 296. Escabeaux piĂ©destal Ă , 118, 127. Escaliers les des anciens Ă©toient bien plus rudes Ă monter que les nĂŽtres, 126. Leur proportion Ă©toit prise du triangle rectangle de Pytagore, 3g3. Disposition des escaliers des théùtres, 204. Eschara , grille servant de base Ă la machine appelĂ©e tortue, 475. Eschyle, poĂ«te tragique, 299. Esprit la beautĂ© de 1â moins estimĂ©e par les anciens , que la force et lâadresse du corps, pourquoi, 389,3go. Etage chaque avoit son ordre dans les Ă©difices des anciens, 26. Etables Ă bĆufs, 283. Etoiles, leur cours, 399. Ont des tempĂ©raments diffĂ©rents, 4o3. Etuves des bains , 240, ?44>246 1 2 49- Eu angĂ©lus y nom donnĂ© au berger qui dĂ©couvrit la carriĂšre de marbre dont le temple dâEphĂšse fut bĂąti, 445. Euripide , poĂ«te, surnommĂ© le philosophe du théùtre, 353. Eurhythmie, 12, 22. Eustyle , 108. Il est de la plus belle ordonnance, ibid. et 112. Eutheia , effet de la ligne droite dans la mĂ©canique , 445- Excunearb , explication de ce mot, 204. Exedra , salle de conversation, 248, 275, 3l8. Exisona , explication de ce mot, 179. Expolitiones , sorte dâenduit, 3i5. Exposition commode des appartements, 279. Express 10 , explication de ce mot, i65. 024. sv'pyxcc, câest-Ă -dire, je lâai trouvĂ©. ArchimĂšde emploie ce mot pour exprimer sa satisfaction, dâavoir trouvĂ© le moyen de dĂ©couvrir combien on avoit mĂȘlĂ© dâargent dans une couronne dâor, 396. F. Faces ou bandes des architraves , 122. Des chambranles , 168. FaĂźtage , i46. F*no , sa basilique bĂątie par - "Vitruve , 190. Fanum , diffĂ©rence quâil y a entre le mot Faiium et celui Templum , ni , i4o. Farnio , arbre , §5 , 3o$. TABLE DES MATIĂRES, $5i FASTi&tĂŒM , fronton, *35 , 196. FAvi , carreaux hexagones , 3ia. Faux porter Ă , 291 , 292, Femmes les ne mangeoient pas avec les hommes chez les Grecs, 286, 28g. FĂ©mur , rĂšgle dans les triglyphes, *53. Fer Ă moulin , J+Si. Ferme , assemblage de charpente, i4g. FĂȘtes il y avoit des aux solstices et aux Ă©quinoxes parmi les anciens, 409. Festons, 144. Feu le a Ă©tĂ© la premiĂšre occasion de la sociĂ©tĂ© des hommes, 53. Câest le principe de toutes choses selon HĂ©raclite, 56. Effet du feu sur la pierre calcaire , 62. Fleuron , au haut du temple pĂ©riptĂšre rond, 178. Fleuves les sources des grands viennent du cĂŽtĂ© du septentrion, 36o. Fleurs, roses du chapiteau corinthien, 147. Fenil , grenier au foin, 283. Foie le des animaux fait connoitre si les lieux sont sains ou non, 33. Fondements les des murs qui entourent les villes, comme on doit les faire, 3 t , 79. Quel doit ĂȘtre lâemplacement et la largeur aes fondements , 117, J25. Le fondement est la partie-la plus importante des Ă©difices, 291 , 294. Largeur des fondements quand il y a des caves, 291. * Fondi , fragment du mur de cette ville, bĂąti en maçonnerie irrĂ©guliĂšre, 80. FĂ»NTAiNESlesbouillantes, dâoĂč vient leur chaleur, 361. Il y a des fontaines dâeau fiâoide, qui bouillonnent comme si elles Ă©toient sur le feu , 364» Toutes les fontaines chaudes ont une vertu mĂ©dicinale, 365. Les meilleures fontaines sont celles qui existent vers le septentrion , 361. Forces les, i46. Les forces des toits des anciens, ou pour mieux dire, les extrĂ©mitĂ©s des chevalets, reprĂ©sentoient les modifions par leur saillie hors 1 du mur , 147. Fobcipes , tenailles pour prendre les pierres quâon Ă©lĂšve, 436. Fortifications des anciens , 37 et suiv. Fortune Ă©questre temple de la, 107. Forum , la place publique, 189. Foudres , taillĂ©s dans la corniche dorique, i54- Fourneaux des Ă©tuves et des bains , 23g. FrĂȘne, arbre , 84. Fresque, maniĂšre de peindre, 3ig. Frigidarium , fieu dans les bains pour se rafraĂźchir, 245. Frise, 122. Etymologie de ce mot, ibid. Froids lespays sont plus sains que les pays chauds, 32. Les maladies causĂ©es par le froid sont difficiles Ă guĂ©rir, 43. Fronton , est le Fastigium des anciens , i35. Sa pro- ortion selon \itruve, ibid.; selon Scamozzi, ibtd. es anciens ne mettoient daçs les frontons ni mo- * dillons ni denticules, i48. Le fronton doit toujours ĂȘtre sur la largeur du bĂątiment, et jamais sur la longueur, i 5 i. Il doit occuper la partie la plus Ă©levĂ©e, ibid. Fronton dans lâordre toscan, 178. Frontons qui ne soutiennent point le toit, *35. Jamees les maux de sont souvent causĂ©s parles mauvaises eaux, 366. Jeux des anciens, 201, 247, 248. Jonc dâEspagne, nommĂ© sparte , 322. Joncs de marais, 256. Jour le des anciens Ă©toit partagĂ© en douze heures, depuis le lever jusquâau coucher du soleil, 407. Jour le doit ĂȘtre recherchĂ© sur toutes choses dans les Ă©difices, 278, 284* Principalement pour les escaliers et les passages, 284. Jugement le de la vue, 122, 161,265. Le jugement de Fouie, 200. Jupiter la planĂšte de fait son cours en onze ans et trois cent vingt-trois jours , 4oi- Jurisprudence la est nĂ©cessaire Ă un architecte, K oiXia, ventre, 38o. Voyez Coilia. KĂŻkliken Kinesin , mouvement circulaire, 43i. L. Labrum , le bord du bassin ou de la cuve oĂč lâon se baigne, 245 ,3g5. Laconicum , Ă©tuve, 240 , 244 ? 246 ? 343, 344- Lacotome, ligne pour marquer les signes dans lâana- lĂȘme, 418 . Lacunaria , les plafonds, 170, 273, 3i6. La eus , endroit oĂč lâeau se rĂ©unissoit Ă Borne, 384* Lait de chaux , n'est point Valbarium opus des anciens , 198, 3i6. Lambris, 325. Lampe une allumĂ©e , Ă©tant descendue dans un puits , sâĂ©teint quand il exhale des vapeurs mĂ©phit tiques , 38x , 387 . TABLE DES Lamterme , la > dâun dĂŽme , i83. Lapis lazuli, azur naturel, 345, Laqueare , plancher, 3i6. Larix, arbre, 85. Histoire de lâincombustibilitĂ© du larix, ibid. Larmier le,ia3, i 5/ h . Laser, plante fĂ©rulacĂ©e du pays CirĂ©naĂŻque, 367. Lentilles, au nombre de cent huit dans la drachme, 101. Lepta , la plus petite partie de lâas , ibid. Legier , architecte , sa rĂ©ponse au roi de Prusse , 11. LeucophĂŠa , ' couleur, explication de ce mot, 3G8. 1,EVIER, 433. Llaison maçonnerie en, 73. Libella, de niveau , en ligne droite, i33. Liera ayucuia , niveau pour les eaux , 377. Liciianos , intervalle des tons de musique , 208. Liege, arbre, 84- Lien, piĂšce de charpente , 817. Lieux les sains , ou qui ne le sont pas, 3i. Limace , ou vis dâArchimĂšde , 452. LimnĂ© AsphallU , lac bitumineux prĂšs de lĂźabylone, 366. Limon de lâescalier, 3g3. Linteau, 181. Liparis, fleuve de Cilicie, 366. Listeau , espĂšce de moulure , 181. LivellarĂŠ AquĆ , prendre le niveau dâeau, 377. Loculamentum , piĂšce de la catapulte, 4-64- Logeion , le lieu oĂč lâon rĂ©ciloit dans les théùtres , 23l. Lautron, bain dâeau froide, 246. Louve , instrument pour lever les grosses pierres , 436. JjUcifer , lâĂ©toile du matin , 4°o- LĂŒdi , lĂ©s jeux, 201. Lune temps du cours de la , 4°°? 4°3. DiffĂ©rentes opinions des anciens sur les raisons des diverses apparences delĂ lune, 4°3- Elle est comme un miroir, 4°4- M. Machine , ce que câest, 431. 11 y en a de trois genres , savoir lâacrobatique , la pneumatique et la banautique, 43 i- Machine et organe', en quoi diffĂšrent , 43a, 433. Machine pour Ă©lever les fardeaux, 435. Machine inventĂ©e par Ctesibius, pour prendre un miroir , 4 21 - Autres machines de lâinvention de Ctesibius, ibid. Machine pour savoir combien on a fait de chemin , 460- Plusieurs machines pour Ă©lever lâeau , savoir le tympan, 45o. La roue Ă caisse , ibid. La roue Ă chapelet, ibid. La vis dâArchimĂšde , 45a. La pompe de Ctesibius, 454- Machine hydraulique qui fait jouer des orgues , 455. Machine montante, 4?3. matiĂšres. 554 Elle est appelĂ©e epibathra , ibid. Machines de guerre, savoir les scorpions, les catapultes, 463. Lâonagre, la baliste, 467- 11 y a des machines qui ne rĂ©ussissent pas en grand comme en petit, 483. Maçonnerie, ses diffĂ©rentes espĂšces, 73. â Maçonnerie ou structure des grecs, 74* La maillĂ©e, 73. La structure en liaison, 74. Maisons , les doivent ĂȘtre diffĂ©remment disposĂ©es, selon les diffĂ©rentes qualitĂ©s de ceux qui les doivent habiter, 280. Les maisons de campagne, ibid. Les maisons des grecs, 286. Celles des romains, 275. Malleoli , des brĂ»lots, 485. Manacus , ligne pour les mois dans lâanalĂȘme, 4i8. ManubalistĂŠ-, petites balistes , 432. Manucla , piĂšces dans la catapulte, 464? 4?8- Marais pontins rĂ©pandent un air trĂšs-malsain , 36. Marches des degrĂ©s des escaliers des temples des anciens Ă©toient beaucoup plus hautes que nous ne les faisons Ă prĂ©sent, 118,. 126. MarĂ©cageux les lieux sont malsains, 33. Principalement si les marais sont des eaux dormant es, nâĂ©tant pas jointes Ă des riviĂšres , 34- Les marais qui sont proche de la mer, et tournĂ©s au septentrion Ă lâĂ©gard de la ville, ne sont pas si malsains, ibid. La vilie des Salapiens fut transportĂ©e ailleurs , Ă cause des marais qui la rendoient malsaine , ibid. Ma ri us trophĂ©e de, io4- " Marqueterie , 176. Marbre , bon Ă faire le stuc â 332. Marmoratum , stuc, 3i6, 320. Mars la planĂšte de fait son cours en 683 jours,4oi. MataxĂŠ , fascines, 320. Materia , signification de ce mot ,478*. Mausole fait bĂątir son palais de briques, 75. MausoiĂ©e, une des sept merveilles du monde, ibid. MĂ©caniques les, 445- Le mouvement circulaire est le premier principe de la mĂ©canique, ibid. , histoire, genre de peinture, 33i. MĂ©lĂšze, arbre, 84. Melin uia , couleur mĂ©line, 334- Menuiserie des portes, 168. Mercure et de "VĂ©nus les planĂštes de tournent autour du soleil, 4°o. Mercure fait son cours en 36o j ours, ibid. ManiĂšre de trouver la ligne mĂ©ridienne, 417- MeroĂ, royaume dâAfrique, 36o. Sa situation, 363. Merones, des sacs pleins de terre grasse pour emplir les batardeaux, 256. Meros , câest-Ă -dire, cuisses , partie du triglyphe, i53 et 154- MĂ©saule, petite allĂ©e entre deux corps de logis , 287. Mese , une des phtongues de la musique des anciens, 208. MĂ©solabe, inventĂ© par Eratosthene , pour prendre une moyenne proportionnelle , 3g5. Meson , le tĂ©tracorae du milieu, 208. 555 MĂ©taux et minĂ©raux nâĂ©toient pas distinguĂ©s par les anciens, 336. Metagenes , invente une machine pour amener les architraves du temple dâEphĂšse, 443» Musique mĂ©trique, sog. MĂ©tochĂ©, coupure du denticule, 122. * MĂ©tope, les mĂ©topes doivent ĂȘtre aussi longues que larges, i 52. Anciennement cet espace Ă©toitvide, i5o. Les demi-mĂ©topes, i54, i58. Mine pour prendre les villes, 482. MinĂ©raux et mĂ©taux nâĂ©toient pas distinguĂ©s par les anciens, 336. Minium , nom latin du cinabre, 327. La sandaraque des anciens se nomme minium en françois, 336 , 346. MitylĂšne , ville mal exposĂ©e Ă lâĂ©gard des vents , 42. Mobiles fonds, Vilruve nomme ainsi les pistons des pompes, 456. ModĂšles les , pour les Ă©difices , 21. Ceux dâArcĂ©silas , ibid. Les modĂšles sont utiles aux architectes pour se faire comprendre des ouvriers, ibid. Modillons et mutules , 147- Son contour appelĂ© Sinnare en latin, i 5 i. On les attribue quelquefois Ă lâordre ionique et corinthien, ibid. On ne doit point mettre de modifions au-dessus des den- ticules, i48. Les anciens nâen mettoient point aux frontons , ibid. Module , ce que câest, 25. Vitruve emploie pour module, le diamĂštre entier de la colonne, hormis pour la colonne dorique, n3, i53, 157. Module est appelĂ© embales , pour quelle raison, 25 , i53. Moellons , ig3. MĂŽle, pour couvrir les ports, i 52 , i58. Trois maniĂšres de bĂątir les mĂŽles, ibid. Monochrome, genre de peinture, 335. Monogramme , genre de peinture, ibid. MonoptĂšre rond, 178. Monotriglypiie , 253. Mortier , par quelle raison il sâendurcit , 64- Mortier de chaux et dâhuile , 3io. MosaĂŻque, 3og, 3i3, 3i4. M OUFLE , pour les machines , 435- Moulinet , servant aux machines , ibid. Moulins Ă bled , 283. Moulures, 12g. 'Moyennes proportionnelles, 3g6. Murs les des villes, leur largeur, 37. Ils doivent faire une enceinte , ibid. Ils doivent ĂȘtre fortifiĂ©s par des piĂšces de bois mises en travers, 38. Largeur des murs des temples, 161. ManiĂšre de les construire, i65- Les murs qui sont bĂątis de petites pierres sont plus forts , 78. Construction des murs qui soutiennent des terres , 2g2. Dans les murs, rien ne doit porter Ă faux, 2gi. Claoi ,, clous Ă tĂȘte de mouche, 824. Musique la elle est nĂ©cessaire Ă lâarchitecte , 5. Musique harmonique, 207 , 20g. MATIĂRES. Mutules , ils sont particuliĂšrement attribuĂ©s Ă lâordre dorique, 147- Les anciens les faisoient en penchant, ibid. Mutule dans lâordre toscan, 178, 182. N Naissance ou congĂ©, 182. Nj os en ParaslasĂźn , temple Ă antes , g7 Naufrage dâAristippe , 257. Nectrum , filet du congĂ© , 182. Nef , ou intĂ©rieur des temples, 161. Nete , la corde qui sonne le ton le plus aigu , 208. Nil , description de son cours , 36o. Nitreuses les eaux purgent et fondent les Ă©crouelles , 365. Niveau , 376 Niveler, plusieurs maniĂšres de par le dioptre, le niveau pour lâeau et le chorobate , ibid. Noir de charbon , de fumĂ©e, de lie de vin brĂ»lĂ©e, 343. Nombres la division des , par dixaines est prise du nombre de nos doigts, g5, 101. Le nombre le plus parfait est le six, g5. Le nombre cubique deux cent seize fut choisi par Pitagore , pour y rĂ©duire ses prĂ©ceptes, r88. Noyau des pavĂ©s fait avec du ciment , 312. O ObĂ©lisques transportĂ©s dâEgypte Ă Rome, 434* Obole, est la sixiĂšme partie de la drachme, cp. Ocre, couleur nommĂ©e Sil en latin, 333. Ocre attique , 334- Octave, 214. , g8. Odeon fi est prĂšs du théùtre dâAthĂšne , 238. , les grandes salles, 276. GEcqnomia , une des parties de lâarchitecture, i4- 2 7 OEĂŻl de Ja volute ionique , 120 , i 3 i. Oiax -, la barre ou le manche du gouvernail, 447> Oiseaux les ont peu d'humiditĂ©, selon Vitruve jj 32. Olivier 1â nâest point sujet Ă la vermoulure, on mettoitdes bĂątons dâolivier entravers dans les murs des .villes, 37. Opes , signification de ce mot, 147 , i5o. Ofisthodomos , la porte de derriĂšre dâun temple,â 102. Optique 1â est nĂ©cessaire Ă l'architecte, 4. O pus reticulatum , en maçonnerie, maillĂ©e, 7g, 80, O RBi eu lu s , anneaux, 3gg. Poulie, 436. Orchestre , le milieu du bas du théùtre , 202. DiffĂ©rence entre lâorchestre des théùtres grecs et celui des théùtres romains, 281, 284. Ordonnance des bĂątimens, 11, i5. Ordre dâarchitecture, i3g , i4o. Selon les ordres diffĂ©rents , la disposition des colonnes doit ĂȘtre diffĂ©rente TABLE DES 556 TABLE DES MATIERES. Oreiller chapiteau Ă , i 3 . Organe et machine, quelle est leur diffĂ©rence , 432 . Organique musique, 20g. Orme , arbre, 84. Ornamenta , ce qui est sur les colonnes ,âą savoir ; lâarchitrave, la frise et la corniche, 146, 148. Ornemens , Vitruve nomme ainsi les parties de lâen- tabiement, 146, i48. O rpin minĂ©ral, 334 - Orthographie reprĂ©sente lâĂ©lĂ©vation de lâĂ©difice, espĂšce de dessin , 12 , 20. Ortges , des tortues pour couvrir les pionniers, 477. OsĂŻer , on emploie son bois pour former la spirale de la vis dâArchimĂšde , 452 . Ostrum , pourpre , 347- Ove , membre du chapiteau ionique , 121. Ourse T, constellation, 4 ° 9 i 4 11 * P. Paconius, architecte, rĂ©ussit mal dans lâinvention dâune machine avec laquelle il avoit entrepris dâamener la base de la statue dâApollon, 444 - PagmentĂŒm , assemblage des portes, 174. Pays lesfroids sont plus sains que les pays chauds, 3 i. Les pays mĂ©ridionaux et les septentrionaux rendent les corps divĂ©rsement tempĂ©rĂ©s et les esprits diffĂ©rents, 32 . Paysage, genre de peinture, 328. Palestre, lieu dâexercices, 246, 248. Paliers de repos de nos escaliers , comparĂ©s aux prĂ©cinctions des théùtres anciens, 19g. Palme, les grecs lâappellent doron , 57. Grandeur du palme, 223 . Pannes, piĂšces de bois dans les couvertures, i 4 g. Panneaux de la menuiserie des portes , 168. PrĂŠtorienne couleur , 334 ? 335 . Paramese , Paranete , noms des cordes de la lire ou cithare, 208. Parapet , 475 . ParastatĂŠ, antes, piliers, carrĂ©s, 97. , 286. Paries communis , murs communs, 6, 284. Paripate , nom dâune corde des ^instruments de musique , 208. Pastel, teinture, 34 g- PavĂ© , 3 o 8 . P A y IM eistu iĂżl, sectile , 3i2. Pavibe , Ă©timologie de ce mot, 3 i 3 . Paume jeu de, 246. Pecunia , pourquoi on a donnĂ© ce nom Ă la mon- noie, 100. Peinture, ce que câest, 827. Elle est de trois espĂšces, savoir le paysage, lâarchitecture et lâhistoire, ibid. La peinture ne doit reprĂ©senter que les choses qui doivent exister, 328. Peinture monogramme, mono cro me , 335 . Peinture Ă fresque, 3 19. Peliciuon , espĂšce de cadran au soleil, 1^20. Pentadoron , sorte de brique, 57.' Pentamoeron , la cinquiĂšme partie dâun tout, 96. Pente pour la conduite des eaux, 38 o. Peper/no , sorte de pierre dont on se sert Ă Rome , 7 l 1 7 2, . . , Periactous , les machines qui font les changements de scĂšne aux théùtres , 227. Peribolon, parapet, 475. PĂ©riclĂšs , son siĂšcle Ă©toit celui de la bonne architecture, 18, 3 o 5 . Il fait bĂątir l'Ă©difice appelĂ© lâOdĂ©on, 238 . Embellit AthĂšne , 3 o 5 . Perdrom/das , 247, 288. PĂ©ridrome , 47 5 . Perichondes , les lieux qui rĂ©sonnent tout Ă lâentour, 23 l. PĂ©riptĂšres, genre de temple , 98. La proportion des pĂ©riptĂšres se prend du nombre des colonnes , io 3 , 106. PĂ©riptĂšre rond, 178. PĂ©ristyle, 146. Ses proportions, ibid. PĂ©ristyle des maisons des anciens, 274, 28G. PĂ©ristyle des palestres , 146. PĂ©ristyles rhodiens , 286. Peristretos , le trou du chapiteau de la balisie, 468 . Peritrochon, la roue dâune grue, 44 . Perles les se fondent dans le vinaigre, 36 g. Peron es , des sacs quâon empioyoit pour contenir la terre grasse dans la construction desbĂątardeaux, 256 . Perse statues de en maniĂšre de cariatides, 5 . Perspective, 20. Pesanteur la des choses dĂ©pend de leur nature , 337, 33 g. Pestum. commentlesmursde cetĂźeville sontbĂątis, 18. PĂ©trification , comment elle se fait, 367. Peuplier , arbre, 84. Phegos , arbre, ibid. Pu a la n ga rii , des porte-faix, 447 * Phrygie, maniĂšre dây bĂątir, 54 . âpOoyyoi , sons en gĂ©nĂ©ral qui comprennent les tons, demi-tons, etc., 208. Ils sont ou mobiles, ou immobiles , 206. Philosophie la est nĂ©cessaire Ă un architecte , 4 » Phisiologie, les grecs nomment ainsi la physique; ibid. Pied le de lâhomme est,selon Vitruve, la sixiĂšme partie de tout le corps, g 5 . Le pied romain et le palme , 223. PiĂ©destal, 118. PiĂ©destal en maniĂšre dâescabeau, ibid. , 127. Les piĂ©destaux des temples monoptĂšres ronds, 178. Pied-droit, 196. Pierres , leurs espĂšces, 69. Elles doivent ĂȘtre tirĂ©es de la carriĂšre en Ă©tĂ©, 70. Pierres de taille carrĂ©es, 81. Pierre de touche, nommĂ©e quelquefois Index , 3 g 5 . Pilastre , 161. Pilastres joints Ă des colonnes, io 3 . Pilotis dâaune, dâolivier et de chĂȘne, 117. PinĂ x , le sommier des orgues des anciens , 4^7. PinnĂŠ , les marches des orgues des anciens, 45 g. Pin , arbre, 84. Ă© 55 7 TABLE D Pinacotkecm , les galeries de tableaux , 296. Piramidale , les Egyptiens ramenoient sans cesse cette forme , comme Ă©tant la base de toute soliditĂ© , i 3 i. Piston de la pompe de Ctesibius , 454 - Pistons , des pompes, 4 - 54 -. Pistons de la machine hydraulique qui fait jouer des orgues, 457. Pixodore , nom dâun berger qui trouva la carriĂšre de marbre dont le temple d'RphĂšse fut bĂąti , 44 - 5 . Place la publique, ou le Forum , 18g, 192. Plan le ou ichnographie , 12. Principes dâaprĂšs lesquels on doit tracer les plans, 16. Ancien plan de Rome trouvĂ© dans le temple de Romulus, 21. Planchers les en voĂ»te , 3 o 8 . Les planchers qui boivent lâeau, ibidem. Les planchers ne doivent porter que sur deux murs, 3 o 8 . PlanĂštes les ont leur mouvement propre dâOc- cident en Orient , 3 gg. Les planĂštes sâarrĂȘtent quand elles sont Ă©loignĂ©es du soleil, parce quâelles ne voyent pas assez clair dans leur chemin , 4oi. Le cours des planĂštes expliquĂ© par la comparaison des fourmis qui marchent sur la roue dâun potier , 4°2. Platane, arbre, 82. Platon invente la maniĂšre de doubler le carrĂ© , 3 gi. Plafond des corniches, i 54 , i 5 g. De la corniche dorique , i 54 - Plate-bande de lâarchitrave dorique, i 53 .Du chambranle dorique, 167. Du chambranle ionique, ibid. Du chambranle attique , 186. PlĂ©iades les , 288. Elles sont dans la queue du taureau , 4 IO> Pleuritides , les rĂšgles qui servoient Ă boucher et Ă donner le vent aux tuyaux des orgues des anciens ,457- Plinthe , le tailloir du chapiteau de lâordre toscan est appelĂ© plinthe , 177. Plinthe des bases, 118, 12g. De la base toscane, 117 , 180. Plinthe, espĂšce de cadran au soleil, 4 2 °- Plis des vĂȘtements des femmes ont donnĂ© lieu Ă lâinvention des cannelures des colonnes , i4i. Plomb. Sceller avec du plomb , 448 . Plomb proportion des tuyaux de , 379. Plomb le rend lâeau dangereuse, quand elle est conduite par des tuyaux de ce mĂ©tal , 38 i. Plomb Ă , il faut, prendre garde que les ouvrages soient bien Ă plomb , 291. Pluies , comment elles se forment, 36 i. Elles tombent plus souvent sur les montagnes que dans les plaines , 35 g. Fluteus , appui , 118 , 127, ig4 , 245, Pluteus , mantelet employĂ© dans les machines de guerre , ig 5 . Pneumatique , 43 s. Pnigeos , une maniĂšre dâentonnoir dans la machine hydraulique des orgues , 453. Podium , ballustrade , 118 , 127. PoĂ©tique musique , 209. ES MATIĂRES. Poinçon , piĂšce de charpente , 146. Poissons les ont peu d humiditĂ© , 32. Pourquoi ils ne peuvent vivre hors de lâeau , 35. PĂŽle le , 3gg. Polaire lâĂ©toile, 4 â* Poliorcetes , preneur de villes , surnom du roi Demetrius , 482. Polyspate , machine qui a un grand nombre de poulies , 44 ĂŻ. PoMpe de Ctesibius , 454 * Porches des temples, ou vestibule, 161. Porches des temples toscans , 117. Poteaux au-dessus des portes , 292. Portes les des villes doivent avoir leur chemin Ă gauche , 37. Portes des temples sont de trois sortes , 166 , 16g. Porte dorique -, ibid. Porte ionique, 167, 172. Ses consoles, ibid. La menuiserie des portes , 168. Portes atticurges , 168, 175. Portiques les des basiliques , 190. Les portiques de derriĂšre le théùtre , 226 , 235 . Le portique des palestres , 247. Le portique rhodien, 286. Portiques des pĂ©ristyles des maisons des grecs , 287. Portique de^PompĂ©e, 235 . Ports les de mer , gĂątĂ©s par les riviĂšres , a 5 i. Postscenium , le derriĂšre du théùtre, 204. Posticum , le derriĂšre du temple , 102. Poterie tuyaux de , 38 o. Pourpre , 347. Pourpre blanche , ce quâon entend par la , 349 - PoussĂ©e la de la terre est plus grande en hiver quâen Ă©tĂ© , 292. Pouzzolane fait un mortier qui durcit dans lâeau, 66. Par quelle raison , ibid. Ses anciens noms, 67. II nây en a pas en Toscane ni en GrĂšce , 68. Elle est propre Ă bĂątir les mĂŽles pour les ports de mer, 25 a , 254 - Pratique sans thĂ©orie ne sauroit faire un architecte, 3 . PrĂŠcinctiones , des théùtres, 199. Ressembloient en quelque sorte aux paliers de nos escaliers , ibid. PrĂŠfv rnium , le fourneau des bains , 25 o. Pressoir , 282. Principes les de toutes choses , 56 . Prisons les , 197. Prodoiuos , le devant dâun temple , 102. Promenoirs , 235 . Pronaos , le dĂ©part ou le vestibule dâun temple, 102 , 161 , 162. Propnigeum , le fourneau des bains, 246. Proportion, 12, 22. 11 faut changer les proportions selon la distança Ă laquelle les choses sont Ă©levĂ©es, cela se doit faire avec beaucoup de discrĂ©tion , 122. Les proportions ne doivent point ĂȘtre changĂ©es dans certaines choses , telles que sont les siĂšges, les prĂ©cinctions* et les escaliers des théùtres , 227. Proportions , comme on doit les rĂ©gler dâaprĂšs la nature du lieu, 265. Comme on doit les rĂ©gler dans la longueur, la largeur TABLE DES et la hauteur des piĂšces cjui composent les appartements, 273. Les proportions du corps humain , 94 ; Savoir si les proportions des membres dâarchitecture sont naturelles ou arbitraires, 26. Proscenium, ou la scĂšne dâun théùtre, 204, 216, 223 . Proslambanomenos , le premier ton du systĂšme de la musique des anciens , 208. Upog 7 rav fui , espĂšce de cadran au soleil, 420. Prostas, 286. > Prothyrides , consoles, 167. Prostyle , genre de temple, 97. Protyron , barriĂšre , 288. Protrygeton , qui devance les vendanges , 409. Protyron , espĂšce de vin , 368 . Provin demi a , Ă©toile qui devance les vendanges , 409. Pseudisodomum , espĂšce de maçonnerie , 74 » 79, 82. PseudodiptĂšre, un genre de temple, il est de lâinvention dâHermogĂšne , et il a plusieurs avantages sur les autres genres de temples , 98. PseudopĂ©riptĂšre , 179. Pteromata , ailes ou cĂŽtĂ©s dâun temple, 102, 162. Puits , servant de soupiraux aux aqueducs, 38 o , 38 7 . PrĂ©cautions quâil faut prendre en creusant les puits , 382. Pulpitum , lâendroit du théùtre sur lequel les acteurs viennent rĂ©citer , 204 , 21G, 223 . Purgatives eaux , dissolvantes, etc, 365 . Pulvinata Capitula, les chapitaux ioniques, i 3 , l 32 . Pupitre, lâendroit du théùtre sur lequel les acteurs rĂ©citent leurs rĂŽles, 20^, 216, 223 . Pycnostyle , 107. Pyramide des temples pĂ©riptĂšres ronds, 178. Pytagore , ses opinions, 10, 56 . Invente lâĂ©querre qui se fait par le moyen du triangle rectangle, 392. Il avoit choisi le nombre cubique de deux cent seize , auquel il avoit rĂ©duit ses prĂ©ceptes , 188. Pytagoriciens , leurs dĂ©couvertes, 10. Pythius , architecte , a bĂąti le temple de Minerve Ă PriĂšne , 7. Q. Quadrant , la troisiĂšme partie de l'as , 96. Quadres , ou bordures , 3 i 8 . Qu adrifores valv ĂŠ 1 une porte Ă deux battants brisĂ©s ,175. Quart de rond ou Ă©chine , i 53 , i 58 . Quercus , arbre , 84 - Oueue dâhirondelle en menuiserie , 182. Quinarivs , module pour mesurer la capacitĂ© des MATIĂRES. i>58 tuyaux qui conduisoient, Ă Rome, lâeau dans les habitations , 186. Quircvnx , les cinq douziĂšmes de lâas, 96. Quintarium , les cinq sixiĂšmes de lâas , ibid. R. Rame une paroĂźt rompue dans lâeau, 265. Les rames ont plus de force quand elles sâavancent loin hors de la galĂšre , 4-4-7* Rapport des proportions , g 4 - RarĂ©faction la des nuĂ©es produit le vent, 36 i. Rechamus , un moufle , 435 . Regards des fontaines , 37g , 38 o. Registres des orgues , 457 , 43 g. RĂ©gion la moyenne de lâair est plus froide que la basse , par quelle raison , 4° 2 - RĂšgle appelĂ©e fĂ©mur dans les triglyphes, i 53 . Remparts , quelle figure doivent avoir les dâune ville , 38 . Renflement des colonnes, 110 , 116. Il est dĂ©- saprouvĂ© par la plus grande partie des architectes , ibid. Sa grandeur se prend sur la largeur de lâentre-deux des cannelures , 187. Replum , le chĂąssis dâun panneau, 168. Replum , un rebord , 46g. ReprĂ©sentation la des choses naturelles est le fondement de lâarchitecture , 148. Resaut , ou avant - corps des architraves , i 35 . RĂ©servoirs , au nombre de trois aux fontaines publiques des anciens , 379. Respiration et ses usages , 35 . Ressort de fer pour repousser les marches des orgues , 45 7 . Retinacula , les cordes qui retiennent les machines , 436 . Reticulatum , espĂšce de maçonnerie , 75. Retractiones Graduem , la largeur des degrĂ©s pour monter dans les temples , 126. RĂ©trogradation des planĂštes , 4 g 1 - Rhodiens les vaincus par un stratagĂšme de la reine ArtĂ©mise , 76. Portique rhodien , 286. Rhytmique musique , 209. Romaine ou siatĂšres , espĂšce de balance, 446 - Rome est placĂ©e dans un climat tempĂ©rĂ© selon Viâ truve , afin que son peuple fut capable de commander Ă tout lâunivers , 261. Romains les ont Ă©crit de lâarchitecture avant "Vitruve , 3 oo. Rose du chapiteau corinthien, 147. Rosee la sâengendre des vapeurs que le soleil lait sortir de la terre , 35 g. Roues les petites ne roulent pas si aisĂ©ment que les grandes, 448. Rvbri Saxi , pierres rouges des environs de Rome, ou de Sienne , 386 . Rubrique sinopique , espĂšce de couleur , 334 » 55g TABLE DES RudĂ©ration , mĂ©lange de pierres et de mortier qui se mettoit sous les pavĂ©s , 3 g 8. Rues les doivent ĂȘtre alignĂ©es de maniĂšre que les vents ne les enfilent point , 4s* Rvdus , signification de ce mot, 3io. S. Sable de cave , 6o. diflĂ©rentes espĂšces de sables , ibid. Le sable de la mer empĂȘche le mortier de se sĂ©cher , ibid. Celui des riviĂšres est bon pour les enduits , ibid. Salapiens les abandonnent leur ville et en bĂątissent une nouvelle dans un lieu plus sain , 34 - Saillies les doivent ĂȘtre Ă©gales Ă la hauteur des membres saillants , 123. salientes , explication de ce mot, 384- Salix, erratica , arbre , 35y. Salles Ă manger, 275. Salles corinthiennes, salles Ă©gyptiennes , ibid. Salles cyzicĂšnes , 278. Salles Ă manger, d'une grandeur extraordinaire, ibid. Salles oĂč les mĂšres de famille filoient avec leurs servantes , 286. Salmacis , fontaine , 75. Salons, 278. A la maniĂšre des grecs, 278. Sambyque , instrument de musique, 261. Sambuque , machine de guerre. Sandaraque , minĂ©ral , aujourdâhui le minium , 336. Elle se fait deâ la cĂ©ruse brĂ»lĂ©e , ibid. Saturne , le temps que cette planĂšte emploie pour accomplir sa circonvalation , 4° l - ScĂšne la satyrique , 23o. Les piĂšces dramatiques, satiriques des anciens sont pleines de libertĂ©s grossiĂšres , 232. Ăźl ne nous reste plus de ce genre que le cyclope dâEuripiue, 282. Sapin , arbre, 83. Le supernas eXVinfernas , 86, gi; Saule , arbre , 84. ĂŽAxr rubri , pierres rouges pour joindre les tuyaux dans les angles , 386. Setamus , la cheville dans laquelle on attache les rames , 447- Scamilli maniĂšre de piĂ©destaux, 127. Scamillum , tringle attachĂ©e avec des queues dâhirondelles dans la catapulte , Jfili- Scaphe , espĂšce de cadran au soleil , 420. Scapi cardinales , les montants des portes , auxquels les gonds sont attachĂ©s , 168, 174. Scapi scalarum , les limons des ^escaliers , 3g4. Scapus , tige de la colonne , 44*^ ? 444* Sceller avec du plomb , 443. ScĂšne la des théùtres, 204, 225. Ses proportions, 226. Ses changemens, 23o. Il y avoit trois sorte de scĂšne , ibid. Machine qui en tournant change la scĂšne des théùtres anciens, 227 , MATIĂRES. ScĂ©nographie, le dessein du plan dâun Ă©difice, 12 , 20. , plan raccourci, 45. Schlateras , style qui fait voir lâombre , 43. Sciographie , ou lâart de reprĂ©senter les ombres, 20. , dans les bains , 245. Scorpion , machine de guerre , 432. Scotie , partie de la base dâune colonne , 119. Scotinos , nom donnĂ© Ă HĂ©raclite , Ă cause de lâobscuritĂ© de ses Ă©crits , 56. Sculpture la est essentielle Ă quelques membres dâarchitecture , 27. Il y a des endroits oĂč lâon nâen doit point faire, ibid. , 3i8. ScutĂŒea, losange, 3i2. Scutula , gros rouleaux dans la catapulte, 4&4 , dans la baiiste, 468. Sectilza , passĂ©., 3i2. SecurictĂŠ , des queues dâhirondelles, 182. Sels les de la chaux, ceux du sable et des pierres sont la cause de lâendurcissement du mortier , 63. On mĂȘle du sel dans lâeau des citernes pour la purifier, 882. Semiton , 207. Semisse la moitiĂ© de lâas , g6. , les Ă©toiles de la grande ourse , 4og. Septentrion , le vent de guĂ©rit la fiĂšvre et la toux, 42. Serpens , lieux oĂč les ne peuvent vivre , 373. , le demi joint au tout , 96. Sestertids , deux et demi , 96, Câest la quatriĂšme partie du denier , ibid. Sextans , la sixiĂšme partie , 96. SĂšve des arbres ,83. Sicilique , espĂšce de mesure ou de poids, 92. SiĂšges les des théùtres , 199 , 20a. Signes les du Zodiaque ont un mouvement contraire Ăą celui des planĂštes , 3gg. Sigia , nom grec du jong , 84. Sigxixvm opus , espĂšce de ciment employĂ© pour les pavĂ©s , 25o. Et pour les citernes , 382 , 388. Sil , ocre jaune , 327 , 335 , 346. Sil attique , 334. Silique , troisiĂšme partie de lâobole , g2. , voile qui couvroit la scĂšne pendant quâon la changeoit , 431. Six est le nombre le plus parfait, 96. lĂ»xiciĂč»!pciii, le style qui indique lâombre, 43. Smalte, enduit dont on forme des pavĂ©s en Italie, 61 , 3i 1. Socrate dĂ©siroit quâon pĂ»t connoĂźtre les pensĂ©es des hommes, 92. Socle, ce qui est sous les bases, n3. S,oi%sia , Ă©lĂ©mens, 3e. Soleil le par sa chaleur , attire les planĂštes, et les arrĂȘte, 4oi. Le temps de son cours, 4°°; 4o8. Le soleil Ă©chaulfe davantage les corps qui sont les plus Ă©loignĂ©s, 4 00 * Solstices TABLE DES Solstices les et les Ă©quinoxes Ă©toient marquĂ©s parmi les anciens , Ă la huitiĂšme partie des signes , 4°8* SoliditĂ© causes de la des corps , 63. Solive, 146 , 317. Son le , ce qui le produit, 2o5. Sonnerie , aux horloges des anciens , 422. Soufflets les des orgues modernes remplacent les barillets employĂ©s dans les orgues des anciens , 458. Soupape de la machine de Ctesibius , 454* Soupape en forme de cĂŽne, appelĂ©e cymbale , 456 . Soupiraux, le long des murs pour faire Ă©vaporer lâhumiditĂ© , 324- Soupiraux aux cĂŽtĂ©s des puits pour faire Ă©vaporer les mauvaises vapeurs , 38i. Sources les des grands fleuves viennent du cĂŽte' du septentrion , 36o. Sourds les lieux ne sont pas propres pour y construire des théùtres , 200. Spectacles des romains , 201. SphĂšre de la 3q8. SpiCATUM opus , 3l3. Spira , la base dâune colonne , i44'* Stade , 246. StatĂšre , espĂšce de balance , appelĂ©e autrement Romaine , 446. Statio , signification de ce mot , i3. Station des planĂštes , 4°° ? 4°6 - Statues des dieux , comme il faut les placer dans les temples, 166.. Statuminare , signification de ce mot , 3io, 388 . , massif de maçonnerie , servant de fondement, ou de premier socle , 117- mu M , ce qui reçoit lâeau et la fait Ă©couler , io3 , 271. Striges , les cannelures des colonnes , i3j. Stria , lâerĂŒre-deux des cannelures , ibid. Stylobate ou piĂ©destal ,117. Sttgos hidor , eau de tristesse , 368. Strategeum , arsenal , 2 35. Stuc, espĂšce dâenduit, 3i5. 11 doit ĂȘtre fait avec de la chaux Ă©teinte depuis long - temps , ibiil. 31 faut plusieurs couches , 317. Choix du marbre pour le faire , 332. Su bscudes , tenons en queue dâhirondelle ou clefs . de bois , 182. SulpiiurĂ©es les eaux sont'bonnes aux maladies des nerfs , 365. Summum epistilium , le haut de lâarchitrave , i35 . SurbaissĂ©e voĂ»te, 317. _ 1 SymĂ©trie , est autre chose en françois que sim- metria en latin , 22. 11 y a deux espĂšces de symĂ©trie , 23 et suivantes. SytsâECJIOndes , lieux qui rĂ©sonnent , i 3 i. Synemmenon , tĂ©tracorde des conjointes , 209. Systyle, 107. MATIEPiES. S60 T. Taele dâAristoxĂšne , 2x5. Tablinum , cabinet dâĂ©tude dans les appartemens des anciens , 273. Tableaux les galeries de doivent ĂȘtre exposĂ©es au septentrion , 279. Tailloir , appelĂ© plinthe dans lâordre toscan , 177. Tailloir ou abaque du chapiteau corinthien ; il Ă©toit quelquefois aigu et non recoupĂ© par les angles , i45. Talon ou astragale , 11g. Tambour , vaisseau renversĂ© pour les clepsydiâes. 422. Tambour pour une autre espĂšce de clepsydre , 4 2 3. TarriĂšre , machine de guerre , 4?3. Tectorium , enduit , 3x6. Tegul , les tuiles , 149. Teeamones , espĂšces de cariatides , 287 , 288. TempĂ©rament le fait le caractĂšre de chaque animal , 3a , 260. Tempua , les pannes , 149- Temple , dans quel endroit de la ville chaque temple doit ĂȘtre placĂ© , 49- Quelles sont les parties des temples , 102. Quelles sont leurs espĂšces , 107. Division comprenant toutes les espĂšces de temples , 97 , 107. Temple Ă antes. , 97. Temple prostyle , ibid. Temple amphiprostyle , ibid. Temple pĂ©rip- lĂšre , 98. Temple pseudodiptĂšre , ibid. Temple diptĂšre , ibid. Temple hypĂŠthre , ibid. Temple pseudodiptĂšre , ibid. Temple Ă la maniĂšre toscane , 117. Temples monoptĂšres ronds , et pĂ©riptĂšres ronds , 178. La distribution du dedans des temples , 161. Le vestibule des temples , ibid. La proportion des temples pĂ©riptĂšres se. prend du nombre de leurs colonnes , io3. Comment les temples doivent ĂȘtre tournĂ©s , 166, Les portes des temples de trois sortes , ibid. Origine du mot temple , 111, i4o. Temple de CerĂšs Ă Eleusis , 3oi , 807. Temple de la Vertu et de lâHonneur , 98 , 002. Temple de Diane Ă MagnĂ©sie, bĂąti par Ctesiphon, 98, 3oo. Temple -> de Diane Ă EphĂšse, 98 , io5 , i4o. Temple de Jupiter Stator, 98, io4 , io5. Temple de Jupiter Olympien , 98 , Soi. Temple de la Fortune Ă©questre , 107. Temple dâHercule , bĂąti par PompĂ©e , 108 , Temple de Bacchus, ibid. Temple de la Concorde Ă Rome , i3a , 179. Temple dâApollon Panonien , i 4 i , x43. Temples de Pestum , i 43. Temple de Vesta , i45. Temple de Castor , 179. Temple de Yejovis , ibid. Temple de Diane , chasseresse , ibid. Temple dâAuguste, 190. Temple dâEsculape , temple de Flore, temple de Quhâinus, 98. Les quatre principaux temples de la GrĂšce , Soi. Les dieux tutĂ©laires doivent avoir leuf temple dans les lieux 561 TABLE DES MATIERES. s. les plus Ă©levĂ©s de la ville 49 - Les temples de VĂ©nus et ceux de Mars et de Vulcain doivent ĂȘtre hors de la ville , ibid. Les temples des dieux S ue lâon invoque pour la guĂ©rison des maladies, oivent ĂȘtre bĂątis dans 'des endroits sains , i 3 . Tenailles de fer pour Ă©lever les pierres , 4 - 36 . Terre la a 282000 stades selon EratostĂšne 44 - Terres il y a des sur lesquelles les serpens ne peuvent vivre , 073. Terre verte , couleur pour peindre, 342. Terrestres les animaux ont peu de terrestre , cela fait quâils ne peuvent vivre dans lâeau, 32 . Terrasses les doivent ĂȘtre pavĂ©es avec grand soin , 3 oq. Tessera , signification de ce mot, 3i2. TĂšte de lion dans les cymaises, ia 4 - Testudinatum , cours voĂ»tĂ©es , 271. Tetracoroe , suite de quatre sons , 207. Il y en a cinq espĂšces , ibid. Tetradoron , sorte dĂ© brique , 57. Tetrans , la quatriĂšme partie dâune chose , 96. Tetrantorum ac/ionibus, les quarts de cercles dont la volute ionique est composĂ©e , 121 , i 32 , i 33 . TĂ©tras , une chose partagĂ©e en quatre , 96. Tetrastyle cours , 267. Thalamus , chambre Ă coucher, 28g. ThalĂšs mettoit lâeau pour principe de toutes choses , 56 , 353 . Théùtres les nâĂ©toient anciennement que de bois , 202. Le théùtre doit ĂȘtre bĂąti dans un lieu sain , 199. Proportions des degrĂ©s du théùtre, ibid. Les vases des théùtres , 216. Trois rangs de cellules pour les vases dans les grands théùtres , 217. Le plan du théùtre des romains se traçoit par quatre triangles , 222. Celui des grecs par trois carrĂ©s, 23 i. Les voiles des théùtres, 43 i* ThĂ©orie , ce que câest , 3 . Elle sert peu sans pratique , ibid. SrsfULTi cr yttoç,. Ă©tat des choses , i 3 . Thermes , les anciens thermes de Rome , leur magnificence , 241- Tholia , tholus , la coupole des temples ronds, i 85 . TiiymĂȘlĂ© , tribune qui sâavançoit dans le théùtre des grecs, 233 . ThymelĂ©eih s , sorte dâacteurs chez les grecs , 23 i. Tkyiiorion , passage dâune porte Ă une autre, 186. Tilleul , 84 - Tirans de charpenterie, 3 a 1. Toit Ă trois Ă©gouts ou Ă trois pans , nommĂ© ter- tiaiia , 178 , 182. Les toits des anciens Ă©taient moins exhaussĂ©s que les nĂŽtres , i4q- Tomica , lien , 822. TonĂŠ, signification de ce mot, 422. Tore dans les bases des colonnes, 1x8. Tortue Ă bĂ©lier, 473 . Ses proportions , elle est appelĂ©e criodochĂ© , ibid. La tortue Ă bĂ©lier dâAgetĂŽr, 477- Tortue pour combler les fossĂ©s, 4 ? 5 . Tortue pour couvrir les pionniers , 477 * Le Torus , rouleau, lit oĂč matelas, le gros anneau des bases, 119, T oscan ordre , 177. Temples Ă la maniĂšre toscane, ibid. Touches des orgues anciennes et modernes , 4^7, â Tours des fortifications des anciens, 37. Tour la dâAndronic Cyrrhestes pour les vents ; 4 - 3 . Tours xâoulantes pour les siĂšges des villes, 472. Proportion de la plus petite de ces tours, ibid. proportion de la plus grande , ibul. La plus grande , appelĂ©e hĂ©lepole, sâavançoit trĂšs-lentement; il lui fâalloil un mois pour faire une stade, câest-Ă -dire, prĂšs de deux ans pour faire une lieue , 474 - Trabes , les poutres , 269. Tragique ' la scĂšne , 23 o. Transtrum , poutre de traverse, 149. Travertin , sorte de pierre, 70, employĂ© dans les temps les plus reculĂ©s , 81. TrĂ©sor le public, 197. Triangle , rectangle de Pytagore, 3g2. Tribunal dans les temples monoptĂšres, 178 tribunal du temple dâAuguste , 190. Triemitonium , un ton et demi, 207. Triglypue, Ă©tymologie de ce mot, 147, Son origine , ibid. 11 ne reprĂ©sente point une fenĂȘtre , ibid. Les iriglyplies doivent ĂȘtre au droit des colonnes, i 53 . Ăauteur et. largeur des tri 182 et i 53 . Le chapiteau du triglyphe, i 44 Tri ch a le a , petite piĂšce de monnoie , 96. Triclinium , salle Ă manger, 275, 276, 33 i. Tri ens , quatre parties des douze qui composent lâas , 92 , 96. Triones , les^Ă©toiles de la grande ourse, 4 ° 9 - Trispastos, machine qui tire par trois poulies, 4 ^ 8 . Trochilon , scotie dans la base de la colonne , ng. , moufle, instrument pour remuer les fardeaux , 436 . Truelle Ă travailler au stuc , 3 i 8 . Trullisation , enduit, 3 x 6 , 820. Tuf , sorte de pierres employĂ©es Ă Rome , 71 , 81, Tuteles , Ă©difices des romains Ă Bordeaux , ie 5 ., 277. Tuyaux de plomb pour les fontaines et leurs proportions , 379. Lâeau qui a passĂ© dans des tuyaux de plomb est dangereuse , 38 1. Les tuyaux de poterie, 38 o. La maniĂšre de les joindre ensemble, ibid. PrĂ©caution en mettant lâeau dans les tuyaux , 38 i. Lâeau est meilleure dans les tuyaux de poterie que dans ceux de plomb , ibid. Tuyaux des orgues , 467. Tuyleaux pilĂ©s pour faire le ciment, 309,820. Tympan , le dedans du fronton , ses proportions x 35 . Tympan la hauteur du dâun fronton , 123 , i 36 . T'y m pan u m , le dedans dâun fronton , i 35 . Il signifie quelquefois le fronton entier, ibid. Quelquefois .glyphes, TABLE DES Une roue en forme de robinet pour une espĂšce de clepsydre, Quelquefois les roues dentelĂ©es , telles que sont celles dâune horloge, 460. Quelque' fois la roue dâune grue , 43 g. U. Tjdo teclorio , peinture Ă fresque , SaS. L j lka , herbe de marais , i 56 . Un ci a , once, 96. Usage F j est une des principales choses quâil faut considĂ©rer dans un Ă©difice , 1G. Câest la Kn pour laquelle chaque partie dâun Ă©difice est faite ; est la principale rĂšgle de ses proportions , ibul. Usta , ocre brĂ»lĂ© , 335 . V. Vaccinium , plante qui servoit Ă la teinture, 35 i. ValvatĂŠ fores , une porte qui nâa quâun battant, i 7 5. Vapeurs il sâĂ©lĂšve des du fond de la terre, 35 y. Va ra , une hutte , 47 2. Vases les dâairain des théùtres , 216. Il y en avoit trois rangs dans les grands théùtres , 217. Leur accord , ibid. Us nâĂ©toient quelquefois que de poterie, 218. Les vases des bains oĂč les eaux sont rĂ©servĂ©es , 289 , 242. Veines les portent au dedans du corps les qualitĂ©s des choses qui les touchent en dehors, 32 . Vejovis , dieu malfaisant, 17g. Vent , ce que câest , 4 2 - Celui du midi est fiĂ©vreux ; celui du septentrion guĂ©rit la fiĂšvre et la toux , ibid. Les qualitĂ©s des vents dĂ©pendent des lieux par lesquels ils passent , ibid. Le nombre des vents, 43 . Leurs noms , 44 - Faire que les vents nâenfilent point les rues , 4 2 Ces causes des vents , ibid. 35 g. Vents enfermĂ©s dans les tuyaux des fontaines , 38 o. Ventouses , aux tuyaux des fontaines , 38 o. Ventre , les grecs appellent ainsi l'Ă©tendue des tuyaux qui sont au tond dâune vallĂ©e , 38 o. VĂ©nus et Mercure tournent autour du Soleil , 4 °o* LâĂ©toile de VĂ©nus appelĂ©e vespermgo le soir , et lucifer le matin , ibid. Son cours , ibid. Vert le couleur favorable Ă la vue, 237. VERT-de-gris , 346 . Vmrgiles , constellation , 288. Vernis fait de cire , 34 o , 34 1. Versura , les cĂŽtĂ©s dâun temple , 97. Les cĂŽtĂ©s de la scĂšne , 22g. Vesperrugo , la planĂšte de VĂ©nus quand elle pa- roĂźt le soir , 4oo. VĂȘtemens les ont donnĂ© occasion Ă inventer les premiĂšres machines , 433 . Vestibules des temples , leurs proportions, i6r, MATIĂRES. .562 ViĂŠ , des canaux creusĂ©s dans la corniche dorique , i 5 g. Vif argent , 337. Villes , on doit choisir un local sain pour les bĂątir , 3 i. Vinaigre, il dissout les perles, 36 g. Vin0as , machine pour tirer , 44 °- Violettes, on imite, avec une infusion de violettes dessĂ©chĂ©es , la couleur du sil atticpae , 34 g- Vis dâArchimĂšde , 43 2 - Vitex , arbrisseau qui croĂźt dans les endroits humides , 357. VrmuvE , intendant des machines de guerre dans les armĂ©es de Jules-CĂ©sar et dâAuguste , 2. Sâexcuse de nâavoir pas mieux Ă©crit son livre , g. Peu estimĂ© pendant sa vie, 25 g. 11 a composĂ© son livre de ce quâil a recueilli des grecs qui ont Ă©crit sur lâarchitecture , 299. Voiles des théùtres , 43 i. Voix la' , ce que câest, 200. Elle fait des cercles en. lâair, de mĂȘme que lâeau quand elle est frappĂ©e , ibid. Elle a deux mouvemens , 206. Les peuples mĂ©ridionaux ont la voix aiguĂ« ; les septentrionaux lâont plus grosse, 260. La sĂ©cheresse et lâhumiditĂ© font la voix aiguĂ« ou basse , plutĂŽt que la chaleur ou le froid, 261. Volute , ng. La maniĂšre de tracer la volute ionique , 11g, i 3 i , i 33 . LâĆil de la volute , 120. Le canal de la volute, sa profondeur, 121. Sa ceinture, son axe, ibid. et i 3 i. Son balustre , 120. La volute ionique reprĂ©sente la coiffure dâime femme , i4i. ; et ses cĂŽtĂ©s ressemblent Ă un oreiller ou Ă un balustre, i 3 i. VomiTORiA , nom donnĂ© aux portes des théùtres, O 200. VoĂ»tes , comme on doit les faire , 317. VoĂ»te double au-dessus des bains , 240. Vue la nous reprĂ©sente souvent les objets autrement quâils ne sont, 268. Vuide des portes, ses proportions, 167. X. Xanthus , riviĂšre , pourquoi ainsi nommĂ©e, 368 . Xenia , les prĂ©sens que les grecs faisoient Ă leurs hĂŽtes , 287,291. Xrsros , parmi les grecs Ă©toit un portique large et spacieux dans lequel les athlĂštes sâexerçoient, 247, 25 o, 287. Pourquoi on les nommoit ainsi , a 5 i. Xrs7 us, chez les romains, Ă©toit une allĂ©e dĂ©couverte pour se promener , 247,287. Y. Yalon, nom dâune espĂšce de verre eriGrĂšce, 34 g. Ypomocheion , lâappui du levier, 44 ^- 563 TABLE DES MATIĂRES. Z Zodiaque, ses douze signes, ÂŁo8. Le zodiaque,â est divisĂ© en parties inĂ©gales, dans la clepsydre anaphorique , 42 3 . ZoĂŻle Ă©crit contre HomĂšre, 299; Ztgia , nom donnĂ© par les anciens au bois de charme, parce quâils s en servoient Ă faire les jougs, 84 - FIN DE LA ĂA15LE, 4k'1S&a&f*ĂSr. ' ***V - 4 *» WĂŻ 0 *' * < /** *-
Cesmurs, gardiens de mĂ©moire, ont la parole. AbonnĂ©s. De superbes dĂ©couvertes. Saint-Rome-de-Tarn. PubliĂ© le 19/07/2018 Ă 08:09. Ă lâimage des quelques hameaux ou corps de ferme quiOifaa. 167 223 139 123 325 146 190 183 166